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DE L’EVALUATION A LA QUALIFICATION

dans l’œuvre de Gérard Donnadieu

Gérard Donnadieu est l’auteur d’une œuvre importante dans le domaine de la gestion des
ressources humaines : « du salaire à la rétribution. Pour une nouvelle approche des
rémunérations », « Classification-Qualification . De l’évaluation des emplois à la gestion des
compétences », « Manager avec le social. L’approche systémique appliquée à l’entreprise ».
Il est également l’auteur de dossiers importants sous l’égide de l’Institut Entreprise et
personnel. Un de ses principaux domaines de réflexion est la contribution de la fonction RH
à la performance globale de l’entreprise.
Pour Gérard Donnadieu, par la qualité des outils qu’elle met en œuvre, soit directement, soit
par le moyen des managers opérationnels, la fonction RH contribue positivement à
l’amélioration de l’efficacité humaine. Elle le fait au travers des politiques et systèmes de
développement des compétences, de motivation et de communication ainsi que des pratiques
formalisées d’évaluation et d’appréciation.
Sa réflexion autour du concept d’évaluation met en valeur les raisons pour lesquelles la
gestion des ressources humaines n'est pas à considérer de la même manière que les autres
volets de la gestion (aspects juridiques, psychologiques). Elle illustre le fait que l'esprit sur
lequel est fondée la gestion des ressources humaines est celui d'une double exigence, de
résultat productif et de développement humain. Celle-ci peut donc se traduire par des
tensions (qu'il importe de ne pas ignorer) ou par des solutions satisfaisantes pour les parties.
Il précise certaines notions du programme de Terminale relatives à la Gestion des Ressources
humaines.

Classification et qualification
Classification et qualification sont en quelque sorte les deux manières complémentaires de repérer
l'adéquation homme/emploi, en se plaçant suivant le cas soit du côté des emplois en tant que cases
d'un organigramme, soit du côté des personnes titulaires de ces emplois).

L'enchaînement des concepts Emplois Du côté des personnes


La notion de base dans :
L’entreprise taylorienne le poste le titulaire d’un poste
L'entreprise post-taylorienne la fonction, les (agent)
activités, le titulaire d'une fonction
les missions (acteur)
Ces notions se déclinent en termes de exigences compétences
qui peuvent être repérées par un(e) niveau d'exigence capacité
ce qui suppose une mesure désignée sous le nom d’évaluation d’appréciation (de la
capacité)
qui appelle ensuite une comparaison (ou un classification qualification
rangement) sur une échelle hiérarchique

Glossaire de quelques termes clés


Emploi : Situation de travail d'une ou plusieurs personnes effectuant les mêmes activités et
correspondant au versement d'un salaire. Il s'agit d'un terme générique décrivant le mode d'occupation
des individus.
Poste : Situation de travail entièrement définie par l'organisation quant à son lieu d'exercice, son
contenu et ses modalités d'exécution, indépendamment de son titulaire. La formule - l'individu fait son
poste - décrit une organisation qui justement n'a pas de poste.

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Fonction : Situation de travail dans laquelle l'organisation présente une certaine plasticité le titulaire
disposant d'un pouvoir d'influence pour élargir et enrichir le contenu de son emploi .
Activité (ou activité unitaire) : La plus petite unité organisationnelle de travail, finalisée par un
objectif clair (ou mission) et qui peut, de ce fait, être efficacement confiée à un salarié disposant d’une
marge minimale d'initiative.
Evaluation : Pesée ou cotation des emplois consistant à établir entre eux une hiérarchie de niveau
légitimée par des critères réputés objectifs et rationnels. L'évaluation commence le plus souvent dans
des entreprises où existent des postes bien définis par l'organisation.
Compétences : Ensemble de connaissances, de savoir-faire et de comportements structurés en
fonction d’un but dans un type donné de situation de travail.
Capacité : Degré d’aisance démontré, naturel ou acquis par l'expérience, dans un champ d’activité
professionnelle. La capacité se vérifie à l'occasion de la tenue efficace de postes ou fonctions. C est
pourquoi on l'appelle aussi capacité prouvée pour la distinguer d'une capacité présumée, a terme plus
ou moins lointain, que l'on appelle aussi potentiel
Classification : Hiérarchie des emplois et en règle générale des postes, établie le plus souvent en
référence à une grille construite a priori. Les classifications sont définies par une convention
collective. Cette classification peut aussi résulter d'une évaluation par le biais d'une méthode.
Qualification : Dans son acception commune, la qualification désigne l'attribut d'un individu ayant
accumulé un savoir et un savoir-faire susceptibles d'être valorisés socialement, par exemple en termes
de rémunération ou de promotion.
Dans l'acception de G. Donnadieu, la qualification désigne la hiérarchie que l'on peut établir entre les
individus selon leur capacité prouvée.

Les déterminants de la classification/qualification

Par quoi le concept classification/qualification est-il influencé ? Quels sont les facteurs qui le
déterminent ? Sur quels domaines de la gestion apparaît-il ?

On peut identifier quatre principaux cas de figure où le concept classification/qualification intervient


fortement.
- la relation avec l'environnement économique. Elle se manifeste classiquement sous forme de
l'ajustement au « marché du travail » et le plus souvent en termes de lien avec la rémunération,
- la relation avec le système social interne. Il s'agit de réaliser une hiérarchie des positions sociales
(statuts, coefficients, rémunérations...) estimée équitable par le corps social,
- la relation avec l'organisation. Le travail est rarement défini indépendamment de toute donnée
extérieure à lui-même. Les choix d'organisation, la structure, l'importance des délégations de
responsabilité et de pouvoir conditionnent fortement le contenu et la classification des emplois,

Gestion de Gestion Gestion Gestion de Gestion de


l'organisation administrative financière personnel l'emploi et des
compétences
Conception L'homme est un Les salariés sont Les hommes sont Les hommes Les hommes
dominante facteur de des « ayants- un centre de coût sont des sont
de l'homme production, droits » et (ou) un personnes des acteurs
au travail « une main » investissement stratégiques
et identitaires
Concepts et Le « poste » Les individus Les postes Les potentiels, L'emploi-type,
modes de comme contractants par budgétaires les attentes et les
segmentation ensemble de statuts aspirations des familles
tâches, temps et individus professionnelles
mouvements
élémentaires
Objet Optimisation des Les droits par Les fonctions, Les carrières Les
principal temps et des statuts, grades sections et lignes par la gestion compétences
de la gestion mouvements et catégories budgétaires des actuelles et

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rétributions futures
Objectifs Productivité et La conformité Rentabilisation Intégrer et Optimiser la
principaux et amélioration des avec les des moyens motiver mise
moyens conditions de obligations engagés le personnel en œuvre des
travail légales et moyens
contractuelles d'adaptation
Méthodes Analyses du Consolidations Comptabilité Évaluation des Analyses
d'analyses travail, informatiques, analytique postes, repérage qualitatives, et
associées MTM, suites bases de données des potentiels prospectives
logiques, des
gammes... emplois-types
X. Baron – La gestion de l’emploi et des salariés - Les cahiers français n°262

- la relation avec le système de gestion des personnes et plus précisément des carrières. Assurer
dans l'instant la meilleure utilisation du personnel, développer pour demain les compétences de chacun
ne sont pas des actes de gestion indépendants de la connaissance des emplois et des hommes. La
classification/qualification devient ainsi un des points de passage obligés pour améliorer la
performance actuelle et future de l'entreprise.

G. Donnadieu

L'organisation de l'entreprise renvoie plutôt à l'aspect classification du concept ; à l'inverse, l'aspect


qualification est plutôt concerné par la gestion des personnes.
Quant à l'équité interne et à l'ajustement au marché du travail, qui concernent directement la
rémunération, ils renvoient suivant les cas à l'un ou l'autre aspect du concept (rémunération de l'emploi
ou de la capacité des personnes).

Mérite : Notion morale, mettant l'accent sur les efforts et la volonté engagés par un collaborateur en
vue d'atteindre certains résultats, que ces derniers soient ou non réellement obtenus.
Le problème posé par la notion de mérite est que sa mesure ne peut être que subjective car
déconnectée des résultats. (Cf la déclaration d'un chef d'entreprise : je reconnais vos mérites mais je ne
paye que vos résultats).

Sur le plan de l'histoire de la société industrielle, l'aspect classification a longtemps prévalu sur l'aspect
qualification.

La qualification : variable principale de la gestion des personnes

Entre emploi, classification, capacité, qualification, compétences des passerelles nombreuses existent.
Aussi, même si elle est conceptuellement liée aux notions de compétences et de capacité, la
qualification peut difficilement récuser le détour par l'emploi, c'est-à-dire par la situation réelle de

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travail, pour asseoir et valider sa mesure. En dernière analyse, l'emploi reste le plus souvent la variable
indispensable au repérage de la qualification et à la gestion des personnes.
Il y a interférence entre la complexité du poste et la réussite du travailleur dans son emploi pour fonder
la qualification. Interférence que l’on peut schématiser ainsi :

La qualification dépend de l'emploi tenu et de la manière dont il est tenu.

La qualification se trouve donc au croisement d’un triple constat :


 plus l'emploi est reconnu complexe (par sa position dans la grille des classifications), plus la
qualification du travailleur sera jugée à priori élevée ;
 mais, en même temps, plus la réussite d'un travailleur dans son emploi sera établie (ce qui est
l'objet de l'appréciation de résultat ou de performance), plus sa qualification sera reconnue
réelle car plus le salarié fait la preuve de sa maîtrise des savoir-faire exigés par l'emploi et
donc de sa qualification ;
 La qualification d'un individu est une notion dynamique qui se réfère à son histoire
personnelle. Elle se construit à partir de sa formation initiale mais aussi et surtout à partir des
savoir-faire opérationnels que l'individu intègre au cours de sa trajectoire professionnelle et
qui correspondent aux exigences successives des emplois occupés. Le dernier emploi tenu
n'est pas seul en cause. S'il est tenu de manière performante, il actualise et enrichit certes les
compétences du collaborateur. Mais la qualification globale peut intégrer également des
savoir-faire sur un emploi antérieur et qui ne trouvent pas d'utilisation dans l'emploi actuel.

G.Donnadieu – Manager avec le social

L’appréciation des performances (ou des résultats)

Elle consiste à :
 porter un jugement sur l’activité d'un collaborateur au cours d'une période déterminée;
 analyser avec l’intéressé les causes des écarts entre les résultats attendus (objectifs) et les
résultats constatés;

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 en tirer les conséquences sous formes d’actions correctrices immédiates ( nouveaux objectifs,
formation d'adaptation, montant du bonus...);
 fournir des indications pour la gestion des personnes en matière de :
- plans d'augmentations des rémunérations,
- plans de formation,
- orientation de carrière,
- plans de promotion.

Indépendamment de cette utilisation gestionnaire, l'appréciation de performance s'inscrit généralement


dans un projet de management par objectifs. C'est le management par objectifs qui donne d'abord à
cette appréciation sa raison d'être, sa cohérence.

Deux étapes clés peuvent être distinguées dans le processus.

 La fixation des objectifs : c’est l’élément-clé de l’opération


Dans un premier temps, il s’agit de déterminer clairement à quel niveau de la hiérarchie doit être
attribuée la responsabilité de fixer les objectifs et par voie de conséquence d'apprécier. Le plus
souvent, on constatera qu'il s'agit du supérieur hiérarchique direct de l'intéressé.
Dans un deuxième temps, les objectifs sont fixés dans le cadre d'une négociation entre le hiérarchique
et ses collaborateurs. Pour pouvoir jouer leur rôle mobilisateur, les objectifs doivent être ambitieux
mais réalisables.

On peut distinguer trois familles d'objectifs :


- objectifs permanents: liés à la définition de l'emploi et à sa description;
- objectifs conjoncturels: liés aux objectifs du moment de l’entreprise ou de l'établissement (par
exemple: campagne de qualité ou de sécurité), ils permettent d'exprimer les priorités collectives;
- objectifs personnels: liés à la personne, au titulaire du poste exemple- suivre une formation
complémentaire), ils entrent dans le processus d'acquisition des compétences et jouent sur la
qualification.

 La mesure des résultats : pour un poste donné, il s'agit de mesurer comment le titulaire a plus
ou moins bien assumé sa tâche. Il s'agit donc d’une appréciation factuelle, portant le plus
possible sur des indicateurs objectifs ou aisément repérables concernant le passé proche, par
exemple l’année écoulée A cet effet, il convient de rechercher, dès la phase de fixation des
objectifs, les indicateurs de réalisation qui permettront cette mesure.

L'appréciation est habituellement élaborée au cours d'un entretien de une à deux heures, préparé par le
hiérarchique et le collaborateur à partir d'un support normalisé. Ce document sera contresigné par les
deux parties qui pourront y reporter leurs observations.

L’appréciation de la capacité prouvée et des potentiels


Elles ont en commun de concerner la totalité de la personne dans son histoire professionnelle et non
plus pour ses résultats immédiats. La capacité prouvée vise le passé, les potentiels visent le futur
proche et lointain.

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V. Marbach, La rémunération des compétences, thèse de doctorat de gestion soutenue le 28/11/1995 à l’IAE de Paris
in G. Donnadieu – Manager avec le social

Capacité : Degré d’aisance démontré, naturel ou acquis par l'expérience, dans un champ d’activité
professionnelle. La capacité se vérifie à l'occasion de la tenue efficace de postes ou fonctions. C est
pourquoi on l'appelle aussi capacité prouvée pour la distinguer d'une capacité présumée, a terme plus
ou moins lointain, que l'on appelle aussi potentiel
Potentiel : Hypothèse plus ou moins fondée par l'observation et l'extrapolation portant sur les
ressources de toute nature encore non exploitées d'un individu et sur l'ampleur de leur développement
éventuel dans le temps. Lorsque ce pronostic est effectué dans une optique court/moyen terme (0 à 3
ans) en vue de préparer la prochaine étape de carrière d'un collaborateur, on parle de potentiel
escompté. Lorsqu'un même pronostic est effectué à un horizon de long terme en vue d'estimer ce que
sera l'apogée de carrière d'un collaborateur (généralement au voisinage de 50 ans), on parle de
potentiel ultime.

Conclusion : Une gestion efficace des hommes est toujours un jeu à trois
partenaires.

G.Donnadieu – Manager avec le social

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La tentation consiste bien entendu, au nom d'une efficacité illusoire à réduire ce jeu à trois à un jeu à
deux, c'est plus simple et plus facile ! Mais des effets pervers surviennent nécessairement et des
dysfonctionnements apparaissent :
- si tout se passe entre le salarié et sa hiérarchie, celui-ci devient entièrement dépendant de son «chef»
qui détient seul les clés de sa carrière professionnelle. On a alors une gestion autocratique des
hommes, caractéristique de beaucoup d'entreprises françaises
- Si le salarié a pour interlocuteur principal de sa carrière le service du personnel, il sera tenté de
confier aux syndicats la défense de ses intérêts. On versera alors dans une gestion bureaucratique,
caractéristique de beaucoup d'administrations. Tout se déroule au moyen de règles, de codes et de
normes suivant une logique d’ayant droit.
- si hiérarchie supérieure et direction du personnel s’entendent pour planifier la carrière de leurs
salariés dans une optique essentiellement productiviste, les hommes deviennent alors des pions
déplacés au gré des intérêts de l'entreprise. On a le modèle de gestion technocratique de certaines
multinationales.

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