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Le mot de l’éditeur

Il faut sans doute être un peu fou pour être éditeur aujourd’hui. C’est d’ailleurs
parfois ce qu’on nous a dit lorsque nous avons créé les Éditions Kawa en 2010, à l’heure
du « tout Internet », du numérique et de la virtualisation. Mais c’est probablement cette
folie qui nous a permis de garder intacte notre ambition de départ, celle de contribuer au
partage des connaissances et des savoir-faire entre ceux qui les décrivent et ceux qui les
découvrent. Sans jamais nous départir de notre curiosité, sans jamais chercher à orienter
les débats ni à surfer sur les polémiques.
Aujourd’hui, après plus de 150 titres publiés et quelques jolis best-sellers largement
médiatisés, notre maison d’édition est devenue une référence dans les domaines du
marketing, du digital et de la communication d’entreprise notamment. Peut-être parce que
nous sommes fous, c’est vrai, mais aussi parce que nous sommes passionnés.
Passionnés par ce monde qui bouge, par ces gens qui ont des choses à dire, par ces

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auteurs que nous ne nous contentons pas d’accompagner dans leur processus d’écriture

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mais avec qui nous entretenons dès le premier contact un dialogue étroit, respectueux et
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amical.
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Notre succès, nous le devons sans doute également à notre vision de la « révolution
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digitale », et à notre conviction qu’elle mérite bien mieux qu’un traitement fugitif et
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superficiel ; mieux que cette course effrénée à l’information qui fait qu’on n’a plus le temps
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de se poser les bonnes questions, et encore moins d’écouter les bonnes réponses. Plus
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précisément, en tant que professionnels du digital, il nous paraît essentiel de nous arrêter
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par moment sur tous ces sujets qui forment notre quotidien de citoyens, d’entrepreneurs,
de consommateurs ou même simplement d’internautes. Le temps d’un livre, justement,
pour poser des idées, les développer, les mettre en perspective afin de nourrir nos
propres réflexions et, qui sait, de faire évoluer notre point de vue. Le livre que vous tenez
entre les mains reflète parfaitement cette volonté.
Xavier Wargnier
Directeur fondateur des Éditions Kawa
Retrouvez moi sur : www.facebook.com/xavierwargnier http://twitter.com/xavierwargnier
http://fr.linkedin.com/in/xavierwargnier
Organisateur des sommets du digital : http://les-sommets-du-digital.com/
Table des matières
Le mot de l’éditeur 5
Préface de Michel Édouard Leclerc 11
Le mot du directeur éditorial 13
Avant-propos 15
Comment lire ce livre ? 17
Remerciements 25

Le digital aujourd’hui et demain 26


Le client est digital, alors qu’attendez-vous pour le devenir ? 33
Le salarié est digital 39
Le digital est partout, tout est digital 42
Mon boss sera bientôt digital 44
Au fait c’est quoi le digital ? 52
Digital Me Up : La transformation digitale est-elle une question de survie ? 56
Panorama introductif de la transformation digitale 59
5 conseils pour réussir votre transformation digitale 68
Transfo digitale vs. start-up 70
Digital Me Up - Qu’est-ce qu’un « Growth Hacker » et quel est son rôle ? 76

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Le digital dans tous les secteurs 80
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Le digital est dans tous les secteurs 81
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Le digital et l’industrie 84
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Le digital et l’automobile 87
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Le digital et l’aéronautique 91
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Le digital et les transports terrestres 94


Le digital et la banque 97
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Digital Me Up - La « Blockchain » : la technologie qui va bouleverser le secteur de la finance 106


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Le digital et l’assurance 109


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Le digital et les services 111


Le digital et la santé 115
Le digital et l’immobilier 117
Le digital et l’énergie 120
Le digital et la grande distribution 123
Interview de Pierre Denis 125
Le digital, l’informatique et les télécoms 129
Témoignage - le digital et les télécoms 132
Le digital et le luxe 136
Le digital et le tourisme 140
Le digital et la culture 143
Le digital et les experts-comptables 147
Que faire si votre secteur n’est pas cité ? 151

Le digital dans tous les métiers 154


Le digital et les RH 155
Témoignage - Abandonnons la marque employeur : passons à l’expérience candidat / collaborateur 159
Le digital et la communication 161
Digital Me Up - Comment gérer un « bad buzz » efficacement ? 166
Le digital et le marketing 169
Big Data ou Big Fad (gros effet de mode) ? 173
Le digital et les forces de vente 177
Le digital et la R&D 179
Le digital et le service clients 182
Digital Me Up - Les nouveautés de Google en 2016 186
Le digital et la DSI 188
Le digital et la formation 191
Le digital et la direction financière 194
Digital Me Up - Comment créer un modèle freemium qui réussisse ? 198
Le digital et les boss 201
Le digital et les actionnaires 204
Remettre l’individu au cœur du digital 206

Mythes et réalités du digital 210


Mythes et réalités de l’ubérisation 211
Témoignage - Vivons-nous dans une bulle d’innovation ? 215
Le digital c’est pour les digital natives 217
Digital Me Up - En matière d’écran, la taille compte ! 219
Le digital va booster mes ventes 221

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Digital Me Up - Comment développer votre business à l’aide des smartphones 223

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Le digital ne concerne pas mon secteur 226 ss
Le mythe du « ça ne marchera jamais » 228
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J’ai déjà effectué ma transformation digitale, merci 231
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Par où commencer ? 234


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Je commence par nommer un CDO 235


Je commence par recruter les bons profils 240
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Je commence par acquérir une entreprise digitale 242


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Je commence par former tous les employés 243


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Digital Me Up - Comment choisir un Mastère en digital (quand vous êtes Français et avez 36 ans) ? 245
Je commence par écouter mes clients 247
Je commence par essayer, tester, avancer 251
Je commence par créer une check-list et des tableaux de bord 254
Comment innover pour réussir sa transformation digitale 256
Bonus : Les mythes et les pièges de l’innovation 261

Conclusion 266
Rangeons les chiffons rouges, et allons de l’avant 267
Postface 271
Bibliographie 273
Préface de Michel-Édouard Leclerc
Consultants, ouvrages spécialisés, thèses, études marketing… tous convergent : le digital
bouleverse nos vies et nos business. Le processus est irréversible. On serait même au
début de l’aventure.
Au passage, curieux paradoxe que de choisir la finitude (la dernière lettre de l’alphabet)
pour baptiser une génération censée faire advenir une nouvelle ère : après les X et les Y,
les Z sont désignés pour incarner cette transformation profonde.
Je ne suis personnellement ni conservateur, ni frileux. Mais le digital n’est pas pour moi
une seconde nature (et encore moins une première). Je regrette toujours mon fidèle
BlackBerry et son clavier rugueux qui permettait d’écrire des SMS à l’aveugle sous la
table… Mais j’ai l’instinct de survie et je sais qu’il faut s’adapter à son environnement.
J’étais arrivé assez tôt sur la toile avec mon blog (2004). Je prends désormais du plaisir à
bâtir une stratégie digitale personnelle sur LinkedIn, Facebook et Instagram, pendant que
professionnellement, je dois sans cesse me replonger dans les enjeux du Big Data ou de
la Blockchain.
Eh oui… l’épicerie française a beau avoir beaucoup de défauts, elle a rapidement compris

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qu’elle devait embrasser ces mutations, sous peine de disparaître : Auchan et E. Leclerc
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ont popularisé le drive, Casino et Carrefour ont su relancer de très beaux sites Internet…
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En moins d’une décennie, le secteur de la distribution – pas seulement alimentaire – a


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investi des milliards d’euros dans la logistique, l’informatique, l’automatisation, la gestion


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de données …
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Satisfaire rapidement clients et fournisseurs, réduire les risques de rupture tout en limitant
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notre empreinte carbone et nos coûts… voilà autant de défis que nous avons su relever
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en quelques années.
Parce qu’elle est en symbiose avec la société, la grande distribution a dû s’adapter aux
nouvelles exigences consuméristes plus vite que d’autres secteurs de l’économie.
Plus de choix, tout de suite et pour moins cher… c’est à prendre ou à laisser.
Vous n’êtes pas prêts ? D’autres le sont déjà : Amazon, Alibaba, … sans oublier toutes
ces marques qui rêvent de toucher directement les consommateurs en se passant de vos
services.
Dans nos métiers, le digital structure désormais toute la relation client.
Il nous faut revoir nos processus, réformer nos organisations, réinventer nos stratégies
commerciales et marketing pour offrir une expérience d’achat sans cesse renouvelée à
des consommateurs qui passent du magasin au site internet, de l’appli au drive, selon
leurs humeurs ou leurs contraintes.
Le commerce peut être le fer de lance de la transformation digitale de l’économie
française.
Si les pharmaciens bénéficient pour quelques années encore d’une législation protectrice,
c’est depuis l’intérieur même de leur corporation qu’ils assisteront à la remise en cause
par l’internet de ces barrières illusoires.
Méditons l’exemple de ces dizaines de milliers de chauffeurs de taxi qui ont cru que la
solidité de leur monopole les protègerait d’une concurrence nouvelle. En quelques mois, le
digital a violemment submergé cette ligne Maginot.
Aujourd’hui, une PME ou une start-up peut espérer rivaliser rapidement avec les plus
grosses multinationales, en se positionnant sur des places de marché, ou en sachant
créer son propre écosystème digital.
Le client devient plus facilement accessible, le terrain de jeu est désormais mondial, pour
un coût d’entrée limité (au moins au début). Il se trouve même des gens qui financent des
boîtes qui ne sortent pas un seul résultat positif en dix ans !
Transports, banque, assurance, restauration, aide à la personne, charité… tout le monde
est désormais concerné par le phénomène et doit s’adapter pour perdurer.
Napster, puis Deezer, ont eu raison des disquaires, qu’on ne retrouve plus guère que dans
les romans de Virginie Despentes. Parlez-en avec des ex-Virgin ! Kodak, qui avait

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pourtant pris de l’avance dans le numérique, s’est laissé finalement distancer, faute de

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croire vraiment à la relégation de l’argentique. ss
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Le digital touche tous les secteurs, et tous les métiers. Les investissements qu’il requiert
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sont lourds. Et pour faire tourner ces belles machines, il est nécessaire d’investir sans
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cesse dans la formation des collaborateurs. C’est vraiment un projet global pour
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l’entreprise.
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Il faut faire preuve d’une certaine distance critique quand on analyse un phénomène en
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cours de survenance. Yann Gourvennec et Hervé Kabla se livrent à cet exercice avec
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talent, parvenant à faire preuve de pédagogie sans nous noyer dans des terminologies
absconses.
Ceux qui sont convaincus qu’il faut entrer de plain-pied dans le digital trouveront dans ce
livre matière à réconfort, tandis que les plus réticents se demanderont en le refermant,
pourquoi ils ont hésité si longtemps à s’y atteler.
Le digital expliqué à mon boss est un outil précieux qui mérite de figurer sur le bureau de
tout entrepreneur digne de ce nom.
Michel-Édouard LeclercPrésident des Centres E. Leclerc
Le mot du directeur éditorial

Disruption, vous avez disruption1 ?


Digital, vous avez digital ?
Nous baignons dans le digital tous autant que nous sommes, pendant nos loisirs et
pendant notre vie professionnelle. Nous le respirons, nous l’utilisons sans même nous en
rendre compte. Et pourtant, il y a encore des entreprises et des collaborateurs qui n’ont
pas franchi le Rubicon, ou qui se posent encore des questions lancinantes : il faut que j’y
aille mais aïe comment faire, par quoi commencer, qui embaucher, par quels moyens…
Manifestement, nous vivons une vraie disruption et même une révolution. Et de
nombreuses entreprises, petites et grandes, sont au bord de la panique : n’est-ce pas
trop tard ? Que vais-je faire de mes collaborateurs remplacés demain par des
algorithmes ? Comment notre DSI va-t-il faire pour avaler et traiter les millions de
données – euh qui s’appellent maintenant des Big data – que nous produisons chaque

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jour ? Comment mener de front notre activité qui devient obsolète avec les aléas de la
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transformation digitale ? Et plein d’autres questions ?
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Heureusement, Yann Gourvennec et Hervé Kabla savent parler à l’oreille des Boss ; leur
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livre arrive à point nommé pour aider les Boss et leurs managers à prendre conscience
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qu’il est enfin temps d’agir, de changer ses lunettes (en adoptant par exemple les lunettes
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Snapchat, elles sont très digitales et à la mode :) !), et de ramer avant que le bateau
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digital soit déjà trop loin de la côte. Laure de La Raudière, députée d’Eure et Loire et
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rapporteur à l’Assemblée nationale de la loi « fracture numérique » pour faciliter le


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développement des réseaux à très haut débit sur tout le territoire, a analysé la situation et
elle dit crument : il y a deux France, celle qui crée et celle qui est immobile ; si je ne fais
rien, je vais mourir.
Cette disruption nous montre deux visages, elle est à la fois technologique et sociétale.
Avec trois axes pour nourrir les stratégies :

L’axe de disruption vis-à-vis des concurrents (qui ont pris le train digital dès qu’il a
démarré)
L’axe de disruption par rapport au marché et aux attentes des clients (l’expérience
client prend désormais plus d’importance que le produit)
L’axe de disruption à l’intérieur même de l’entreprise entre les jeunes « digital
natives » qui commencent à arriver aux postes de commande et qui tombent des
nues quand ils trouvent des équipements obsolètes et l’état d’esprit du
management, sans même parler de son manque de vision.
La difficulté de l’adaptation à la digitalisation réside dans le fait que nous ne vivons plus
dans un monde linéaire. Les méthodes d’extrapolation ne fonctionnent plus. Non
seulement la vague digitale est puissante mais en plus elle se transforme en permanence.
Les grosses entreprises sont envieuses du succès des start-up qui les dépassent en un
rien de temps. Comble de culot, ces start-up débutantes ont le toupet de s’attaquer aux
mastodontes, et comme elles n’ont pas de passé elles avancent très rapidement sans
être ralenties par les viscosités juridiques ou financières qui freinent l’innovation. Comme
le dit Philippe Silberzahn2 avec humour : les structures cristallisées ne s’ouvrent pas au
recrutement du sang neuf, elles craignent qu’un petit con à capuche qui est né avec un
smartphone dans la main vienne un jour les évincer.
Ce qui est nouveau avec ce livre, que vous soyez Boss ou Manager, Chef de projet ou
DRH, c’est que Yann Gourvennec et Hervé Kabla traitent avec talent et mise en
perspective, à la fois les difficultés techniques et les difficultés de « digestion » pour le
personnel. Non seulement, ces difficultés sont abordées mais aussi, les deux auteurs nous
prodiguent force conseils, méthodes et témoignages jusqu’à ce que le Boss devienne
digital lui-même et prenne le flambeau pour entrainer son entreprise.
En tout cas, préparez-vous à l’imprévu, pensez en dehors du cadre, amadouez les digital

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natives et ne pensez à aucun moment que le futur de votre entreprise sera une

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extrapolation de son passé. Comme le dit Béatrice Rousset3 avec le sourire : ne maquillez
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pas le cadavre !
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Et en attendant, bonne lecture ! Attention, chaque page vous digitalisera…


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Henri KaufmanDirecteur éditorial


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Avant-propos
C’est dans le courant de l’année 2015 que nous est venue l’idée d’un livre sur le digital.
Après avoir écrit sur les médias sociaux en 20114 et la communication digitale en 20135, il
nous semblait en effet impératif d’éduquer les entreprises sur le digital, non plus en tant
qu’adjectif associé à des termes classiques en entreprise comme « communication », «
stratégie » ou « transformation », mais en tant que substantif, porteur de valeurs à part
entière.
Car en quelques années, le digital s’est emparé de nos vies et de nos usages. Sous sa
forme française (« numérique ») tout autant que sous sa forme anglaise6. Cet
engouement se traduit par de profonds changements, qui touchent aussi bien le grand
public, les entreprises que les politiques. Le gouvernement, par exemple, dispose depuis
2012 d’une secrétaire d’état à l’économie numérique, dont les prérogatives vont de la
défense des jeunes entreprises numériques françaises, ce qu’on appelle la « FrenchTech
», au droit à l’oubli en passant par la portabilité des données ou la taxation des
entreprises de l’économie collaborative.
Du côté des entreprises, cet essor se traduit également par une prise en considération

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accrue du digital comme facteur de compétitivité des entreprises. Nombre d’entre elles se
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dotent d’un directeur du digital, voire d’un « chief digital officer », sorte de gourou du
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digital censé porter la transformation salvatrice. D’autres se parent de « shadow ComEx7
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», constitués de « digital natives », pour parer aux objections de la génération Y aux


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mesures prises par le véritable ComEx, qui continue, lui, de ne comporter que des
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seniors.
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La portée du digital est bien trop grande et trop complexe pour qu’on puisse réduire son
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expression à des décisions aussi symboliques que celles que nous venons de citer. Le
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digital est l’affaire de l’ensemble des collaborateurs, chacun à son échelle, et c’est ce que
nous nous efforcerons d’établir dans cet ouvrage.
C’est pourquoi nous nous attacherons, dans la première partie de ce livre, à démontrer
que le digital est partout, et que tout est digital, en référence à la célèbre phrase de Regis
McKenna : « Marketing is everything, everything is marketing8 ». Le digital est dans nos
murs, il concerne tout aussi bien les salariés de l’entreprise que ses partenaires, ses
clients, et bien entendu, ses dirigeants. Chacun à son échelle, avec ses propres objectifs,
ses contraintes et ses opportunités, doit porter le digital.
La seconde partie de ce livre s’intéresse plus particulièrement aux répercussions du digital
sur de nombreux secteurs, allant de l’automobile aux transports, en passant par
l’immobilier, la banque ou les services. Cette partie, bien que très étoffée, ne peut pas
être exhaustive. Si vous n’y trouvez pas d’exemples issus de votre secteur, ce n’est pas
grave : ce qui compte, c’est de comprendre la démarche et son état d’esprit. Vous
pourrez ainsi vous livrer à un exercice similaire sur le secteur éludé.
La troisième partie de cet ouvrage est dédiée aux aspects opérationnels, et à la mise en
œuvre du digital dans tous les métiers : marketing et communication, bien entendu, mais
nous allons bien au-delà, en abordant les enjeux du digital pour la direction informatique, la
direction financière ou les actionnaires.
La quatrième partie de notre livre s’attarde sur ce que nous avons appelé les « mythes et
réalités du digital », c’est à dire l’ensemble des préjugés et des idées préconçues que
nombre de dirigeants et de managers, parfois de haut niveau, portent sur ce sujet. Peu
importe qu’il s’agisse de préjugés positifs ou négatifs, ce que nous souhaitons ici, c’est
désacraliser le sujet, dégonfler la baudruche, afin que le digital devienne un sujet comme
un autre, abordé sereinement et sans a priori.
Enfin, la cinquième et dernière partie a pour but de répondre aux principales questions
que nombre de nos lecteurs ne tarderont pas à se poser, une fois qu’ils ou elles auront
décidé de mettre en œuvre le digital au sein de leur structure. Par où commencer, avec
qui, avec quel moyen et quels outils de mesure, c’est ce que nous vous proposons de
découvrir à la fin de ce livre.
Disséminés tout au long du livre, nous avons voulu ajouter une sélection des meilleurs
articles du blog digital-me-up.com sur la stratégie digitale. Ce blog est le résultat du
travail des élèves du Mastère Spécialisé international de Grenoble École de Management,
dont Yann Gourvennec est le directeur de programme depuis 2015. Ces articles, traduits

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en français, corrigés et annotés, servent non seulement à démontrer les capacités des
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élèves en stratégie digitale de ce Mastère, mais ils balaient aussi beaucoup de sujets en
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apportant des expertises précises et pointues qui peuvent servir à nos lecteurs.
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La collection « Expliqué à mon boss »


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Ce livre est largement nourri d’exemples, de témoignages, de meilleures pratiques à


mettre en œuvre, comme tous les autres ouvrages de la collection « Expliqué à mon boss
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». Comme eux, il a été écrit dans le même esprit, il abonde d’illustrations et de schémas,
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dont la plupart sont mis à la disposition des lecteurs sur le site de la collection « À mon
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boss » 9 et au travers d’un lien raccourci et d’un QR code installés sur la quatrième de
couverture de l’ouvrage.
Comment lire ce livre ?
Historique et perspective
Comme ses prédécesseurs, ce livre se veut un guide pratique du digital en entreprise,
expliqué par ceux qui le pratiquent réellement tous les jours sur le terrain. Il ne s’agit pas
d’un ouvrage spéculatif sur la question du numérique, même si vous pourrez trouver, çà et
là, des développements plus généraux destinés à éclairer la méthodologie ou la réflexion
sur la communication digitale. Ces développements plus théoriques ne sont que le fruit de
notre propre expérience, combinée avec celle des praticiens interviewés, remise en forme
et ordonnée de façon à la rendre utilisable et accessible à tous.
Le digital, les doigts sur le clavier : doit-on dire digital ou numérique ?
Puisque nous en sommes aux préliminaires, revenons immédiatement sur un sujet qui ne
manquera pas encore de faire couler de l’encre, même virtuelle, dans les médias sociaux
et les zones de commentaires de nos blogs. Faut-il dire « numérique » ou « digital » ?
Nous avons, dans l’ouvrage précédent, tenté une timide percée pour essayer de justifier
ce qui est probablement un barbarisme. Certes tiré du latin, mais néanmoins un

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barbarisme. Nous avons bataillé en ligne à de nombreuses reprises contre des zélotes du

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français parfait, à une époque d’orthographe nouvelle où nous nous « entrainons » à faire
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« disparaitre » (sic) les « couts » (re-sic), mais où le « jeûne » ne cesse de « croître »
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sur un marché « mûr ». En fin de compte, la situation, fort complexe au départ, est bien
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confuse à l’arrivée. Mais dans le domaine du « digital » (nous y venons), la situation est
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bien pire, car nous y faisons entrer le loup dans la bergerie : l’ennemi héréditaire, la
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perfide Albion (pour les nostalgiques), à force de barbarismes et d’emprunts linguistiques.


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Alors, doit-on dire « digital » ou « numérique » ? Le problème n’est pas si trivial à un


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moment où la langue française est en pleine mutation. « Digital » est un barbarisme, et les
critiques ont partiellement raison, qui nous fustigent pour ne pas avoir utilisé son
équivalent, plus correct mais aussi plus ringard, de « numérique ». Sa présence dans le
dictionnaire Le trésor de la langue française informatisé10 d’une part, et d’autre part le fait
que la pratique s’oriente vers l’utilisation systématique du vocable « stratégie digitale »
nous a fait pencher pour ce terme. Nous utiliserons donc « digital » la plupart du temps et
à d’autres moments, « numérique » comme un synonyme. Il serait assez confortable pour
nous de croire que ce petit paragraphe pourrait calmer les bretteurs insatiables du réseau
à l’oiseau, mais il va de soi que cela est illusoire. Tant pis ! Nous assumerons ce
barbarisme, pour sacrifier à la modernité.
Ceci étant dit, nous en profiterons également pour rappeler à nos chers lecteurs notre
amour des langues (à nous deux, nous en parlons six) et notre attachement à la qualité de
l’écrit. Précisons en effet que c’est notre métier. Que cette justice nous soit rendue.
Ainsi, tout en cédant sur l’utilisation de ce barbarisme, nous n’abandonnerons en rien notre
engagement sur la qualité de l’écriture, primordiale dans tous nos livres. Nous rejetons en
effet et sans concessions le sabir franglais entendu hélas si souvent dans la bouche des
marketeurs. Un véritable volapük qui n’a aucun sens, ni dans une langue, ni dans une
autre, et n’est là que pour masquer l’embarras du locuteur ou la faiblesse de son discours.
Comment nous avons conçu ce livre
Nous avons donc conçu ce livre en nous basant sur notre propre expérience de la mise en
œuvre du digital au sein des entreprises, une démarche bien plus ardue que celle qui
consiste à regarder les choses de l’extérieur. Dans ces pages, vous trouverez donc
uniquement du concret et du réel, éprouvé sur le terrain, avec une forte dose de conduite
du changement. Le responsable – ou futur responsable – de la stratégie digitale en
entreprise doit être capable d’aller au-delà de la simple session de « brainstorming » et
de diagnostic / recommandations : il doit aussi et surtout mener à une conduite du
changement et enfin, vivre avec ce changement, afin de le porter et de l’inscrire dans la
durée.
Il n’est pas question de cacher que de nombreuses inconnues sont encore présentes,
surtout en cette période de mutation économique. L’avenir du digital n’est plus en
question, même si sa place, sa synergie avec le cœur de métier de l’entreprise fait
encore l’objet de nombreux débats et conjectures.

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La communication digitale Le digital expliqué à mon boss
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Ce livre est le quatrième que nous publions aux éditions Kawa, et avec le recul, c’est sans
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doute celui que nous aurions dû écrire en premier, tant il est important. Nos précédents
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livres bénéficiaient tous, certes, de cette vision stratégique qui ne nous a jamais quittés,
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car c’est notre marque de fabrique. Quand nous parlions des médias sociaux en 2011 et
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en 2013, nous les considérions comme autre chose que de simples outils. Pour nous, il
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s’agissait de changer le monde, et pas seulement d’envoyer des messages de 140


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caractères. C’est pour cela que l’annonce faite par Twitter le 24 mai 201611, même si elle
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a fait grand bruit, ne nous émeut pas beaucoup.


Twitter est un outil et, comme n’importe quel outil, il évolue et est interchangeable. On
peut décider de mettre trois ou cinq lames à un rasoir, cela reste un rasoir. La véritable
question ici est de savoir à quoi il sert, et pourquoi on l’utilise, et c’est cette question qui
nous guide. Notre approche est ainsi, à l’instar de celle du cercle d’or de l’innovation de
Simon Sinek, centrée sur le pourquoi, plus que sur le comment. D’ailleurs, en ce début
2017 où nous mettons la dernière touche à cet ouvrage, nous ne sommes même pas sûrs
de la survie de Twitter, tant les rumeurs de son rachat, puis du refus de son rachat ont été
nombreuses12. Cela ne nous émeut pas non plus. Yann Gourvennec évoquait dès 2009 la
possible disparition de certains médias sociaux dans une vidéo enregistrée par
Socialmedia.org lors d’une conférence à Atlanta13. Depuis, les fermetures de sites n’ont
pas manqué. Mais le marketing du bouche-à-oreille, les fondements du marketing viral,
eux, survivront à tous ces outils, et c’est cela qu’il faut comprendre et retenir de ce
premier ouvrage.
Figure 1 : le fameux cercle d’or de l’innovation de Simon Sinek http://bit.ly/simsinek
Ainsi, assez naturellement, avons-nous voulu positionner notre deuxième ouvrage
résolument en amont, sur le domaine de la communication. La question, dès 2013 n’était
plus de savoir comment, ni même pourquoi, pratiquer les médias sociaux. Ni même si
c’était important. Elle était ailleurs, sur le cran du dessus, sur la meilleure utilisation
possible du digital pour changer la façon dont les entreprises communiquent.
Durablement.

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Avançons encore de trois ans, intercalons une version anglaise de notre best-seller, et le

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paysage a encore changé. D’une certaine manière, c’est même un peu un « retour vers le
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futur ». Les questions de base des débuts du Web sont en effet revenues au premier plan
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: comment transformer mon entreprise, mes employés, innover, et me développer ?


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Comment ma marque sur le Web peut-elle interagir avec ma marque hors du Web ?
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Même le vieux sujet brick and mortar versus click and mortar est revenu à la mode : le
vocabulaire a changé, on parle désormais de Web to Store ou de Click and Collect, mais
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ces débats semblent sans fin. Ces questions, déjà à l’ordre du jour lors de nos premiers
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pas sur Internet il y a vingt ans, sont bel et bien revenues sur le devant de la scène dès
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2014.
Que s’est-il donc bien passé entre ces deux périodes, soit près de vingt ans ? La bulle est
passée par là, avec l’effondrement de la fameuse « nouvelle économie ». Surtout, depuis
2014, le Web a fêté son premier quart de siècle. Ce qui a pu passer pour une mode
technologique est devenu incontournable. Nos styles de vie, nos modes de travail, tout a
été bousculé par cette vague Internet, rebaptisée « digitale ». Il n’est donc plus question
de minimiser le phénomène, c’est bien une lame de fond qui nous submerge.
Elle nous submerge tous.
Durablement.
C’est cela que nous avons voulu dire avec ce nouvel opus de la collection « à mon boss »,
une remise à l’honneur de l’aspect stratégique de notre métier, à une époque où ce type
de discours devient plus audible et où les métiers du digital sortent de leur ghetto
technique. Ce retour au premier plan de l’importance stratégique du Web ne doit pas faire
oublier la pente que nous devons cependant remonter : apprentissage, désinhibition,
montée en compréhension et en compétence, et surtout changement des mentalités.
C’est pour cette raison qu’il nous semblait important d’écrire ce livre : à un moment où le
digital occupe une place de plus en plus centrale, il nous faut donner les clés de lecture à
nos lecteurs pour pousser le bouchon du digital un peu plus loin.
Le paradoxe d’une pratique indispensable mais pas toujours comprise
Toutefois, le paradoxe de l’adoption des technologies, déjà décrit succinctement dans la
version précédente de notre ouvrage, est tel que nous sommes loin d’être arrivés à un
niveau de compréhension et d’intégration totales de ces nouvelles composantes dans la
stratégie de l’entreprise. Trop souvent, le digital est annoncé comme stratégique, mais sa
mise en œuvre est éloignée du cœur de métier, et contredit même parfois totalement
cette promesse de changement et de modernité.
En conséquence, ce que nous tentons de faire au travers de ce livre, c’est de remettre la
discipline du digital dans cette mouvance stratégique, en fournissant aux responsables
digitaux, aux praticiens du digital, à leurs interlocuteurs et aux responsables d’entreprise
un prisme pour décoder les évolutions technologiques en cours, leurs conséquences et les
manières les plus efficaces de mettre en œuvre le changement.
Ce que cet ouvrage n’est pas

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Il est aussi utile de dire ce que ce livre n’est pas, afin de permettre au lecteur de
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s’orienter dans sa lecture. Il s’agit bien d’un ouvrage qui va au-delà d’une simple suite à
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notre précédent ouvrage, La communication digitale expliquée à mon boss, dont il
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constitue un complément stratégique. Il ne s’agit pas non plus d’une réécriture ni d’une
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mise à niveau, mais d’un ensemble de textes originaux.


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Nous avons voulu éviter les incantations au changement pour le changement, sur l’air de
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l’antienne bien connue qui veut que si l’entreprise ne change pas et n’embrasse pas
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immédiatement les modes technologiques, elle disparaît immédiatement. Celles-ci sont en


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fait contre-productives, et tendent à décrédibiliser la haute technologie14 aux yeux des


chefs d’entreprise.
Notre point de vue diffère de ces refrains trop souvent entendus, car nous ne sommes
pas des technologues, encore moins des technolâtres, et notre expérience combinée
regroupe quasiment tous les aspects de l’entreprise : vente, marketing, organisation,
stratégie, gestion, SI, R&D, management de l’innovation, entrepreneuriat, intrapreneuriat,
maîtrise d’œuvre, maîtrise d’ouvrage et communication.
C’est un livre de management que vous avez entre les mains (ou sur votre liseuse), pas
une compilation de considérations technologiques. Attendez-vous donc à ce que nous y
remettions en cause les poncifs, redressions les idées reçues, analysions les chiffres et
les études, étudions les impacts réels et avérés, fassions des hypothèses (clairement
indiquées) lorsque nous avons des doutes, et enfin que nous y parlions business.
Apprendre pour adapter
À ce sujet, une autre précision s’impose ; il n’est pas conseillé d’appliquer les recettes qui
ont fonctionné ailleurs sans les adapter à son propre contexte. Il est rare que les bonnes
pratiques des autres fonctionnent bien chez soi quand elles sont appliquées telles quelles.
Par contre, il est toujours possible d’adapter les bonnes idées, et de faire en sorte
qu’elles en déclenchent d’autres, plus originales et plus adaptées à votre business.
N’oubliez pas que le but du marketing est de se démarquer, pas seulement de faire, mais
de faire « autrement » que ses concurrents. Il faut donc savoir apprendre des autres, puis
prendre du recul, et enfin fabriquer ses propres recettes maison. En matière de
communication digitale encore plus qu’ailleurs, c’est le terrain qui vous fera remarquer
parmi vos pairs.
Il conviendra également d’apprendre des mauvaises pratiques, que nous décrivons çà et
là et qui doivent servir de garde-fou. Il est en effet plus aisé de se souvenir de ce qu’il ne
faut pas faire que de ce qu’il faut faire15.
Lorsque vous aurez appliqué ces quelques principes et que vous aurez des résultats
satisfaisants, alors pourrez-vous à votre tour partager votre expérience, qui sait, peut-être
dans un prochain ouvrage de la collection à mon boss qui s’est largement enrichie courant
2016.
Un ouvrage pratique

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Pratique est donc le maître mot de ce livre et nous l’avons conçu de façon à ce qu’il soit le

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plus facile à utiliser. Soit cursivement en le prenant de la première page à la dernière
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page, soit en le feuilletant, en utilisant l’index et la table des matières, et en allant d’un
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bout à l’autre du document au gré de vos envies ou de vos besoins.


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Vous pouvez donc décider vous-même de la façon dont vous désirez y recourir, c’est vous
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le rédacteur en chef, vous êtes libre de picorer ici et là et – en fonction de votre propre
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cheminement – d’emprunter à tel ou tel de ces témoignages, ou à telle ou telle de ces


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méthodologies.
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Et, nous en sommes convaincus, ce livre fera évoluer votre regard sur le digital.
À propos de digital me up
Au fil de la lecture de ce livre, vous découvrirez des cartouches estampillés « Digital Me
Up ». De quoi s’agit-il ? Digital me up est le blog des élèves du MS16 Digital Business
Strategy de Grenoble École de Management. Ce n’est pas qu’un simple blog, c’est
également un objet de formation qui s’inscrit notamment dans le cadre du programme
GLM (GEM Learning Model) qui décrit les modalités d’enseignement et l’innovation
pédagogique dans toutes les écoles de Grenoble École de Management. Ce MS se
déroule entièrement sur le campus de l’école à Paris, où il regroupe des étudiants en
formation initiale et des professionnels dans un format Executive, autour d’un programme
qui dure 15 mois et propose 350 heures de formation spécialisée à ses apprenants. Le
MS Digital Business Strategy est entièrement enseigné en anglais. Yann Gourvennec en
est le directeur de programme depuis juillet 2015.
Digital me up est aussi l’outil que l’école met entre les mains des étudiants, et au travers
duquel ils apprennent non seulement le marketing de contenu, mais aussi à développer
leurs réflexions autour de la transformation digitale.
C’est pour cette raison qu’il nous a semblé pertinent d’adjoindre des billets sélectionnés
parmi les articles écrits par les étudiants du MS Digital Business Strategy de la session
2015-2016. La publication de chacun de ces billets a été autorisée par chacun de ses
auteurs.
Ces billets, écrits en anglais à l’origine, ont été traduits et adaptés. Nous en avons
attribué la paternité à chacun des auteurs avec le lien vers leur profil LinkedIn. Il ne s’agit
que d’une sélection, le reste des écrits des étudiants peut être consulté sur http://digital-
me-up.com.

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Remerciements
Comme tous les ouvrages de la collection « expliqué à mon boss », le livre que vous tenez
entre vos mains est le fruit d’un travail éditorial mené pendant l’année 2016 par les
auteurs, avec des contributions et des témoignages fournis par de nombreux experts des
domaines concernés.
Nous tenons donc à remercier chaudement celles et ceux qui nous ont aidés à mener à
bien ce projet, au travers de rencontres, d’interviews ou d’échanges informels : Frédéric
Augier, Arnaud Bouchard, Philippe Centa, Cécile Demailly, Pierre Denis, Matthieu Destot,
Minter Dial, Christophe Faurie, David Fayon, Patrice François, Jonathan Goldberg,
Joanne Jacobs, Olivier Jehl, Valérie et Philippe Jourdan, Isabelle Moreau-Lovett, Tanguy
Moillard, Jean-Claude Pacitto, Michael Tartar. Leur expertise rejaillit sur de nombreux
chapitres de ce livre.
Merci aux élèves du MS Digital Business Strategy de Grenoble École de Management
dont les écrits illustrent certains chapitres, et notamment Agnès Lopez, Maxime Mario,
Alain Perrier, Alice Bréhaut, Céline Notelet, Claire Roversi, Carlos Manjon , Sébastien
Faye et Ana Pia Hopf-Valenzuela.

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Un grand merci également à Michel-Édouard Leclerc et Pierre Calmard, qui ont
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aimablement accepté d’ouvrir et de clore le livre par leurs commentaires avisés.
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Merci encore à Mathias Bergeaud, dont le boss illustre, avec humour et talent, les
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couvertures de nombreux livres de la collection depuis 2013.


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Merci aux équipes de Be Angels et de Visionary Marketing, qui nous font profiter de leur
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expertise, acceptent de supporter nos états d’âme à longueur de journée, et se sont


prêtées au jeu de la relecture des épreuves de ce livre.
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Merci à nos éditeurs, Xavier Wargnier et Henri Kaufman, qui nous ont de nouveau fait
confiance pour un nouvel opus : cette collaboration démarrée en 2010 est elle-même la
plus belle illustration de la puissance du digital.
Merci à Bruno Gonzalvez pour sa relecture attentive.
Merci à Guillaume Monsigny, dont la vitesse et l’efficacité nous étonnent à chaque nouvel
opus de la collection.
Enfin et surtout, un immense merci à nos familles respectives, qui nous ont soutenus et
encouragés durant ces longs mois, malgré le peu de temps que nous avons pu leur
accorder alors qu’elles avaient tant besoin de notre présence à leurs côtés.
Yann Gourvennec et Hervé Kabla
C’est le titre d’un livre collectif du Think tank les Mardis du Luxembourg http://bit.ly/2mjS68a
Il est professeur à EMLYON Business School et chercheur associé à l’École Polytechnique. Allez voir son blog ! Il est ici :
https://philippesilberzahn.com/
B. Rousset : Executive coach & Senior Learning Partner @GIEAXA
Les médias sociaux expliqués à mon boss, Yann Gourvennec et Hervé Kabla, Editions Kawa, 2011
La communication digitale expliquée à mon boss, Yann Gourvennec et Hervé Kabla, Editions Kawa, 2013
Pour un développement plus long sur la sempiternelle polémique entre numérique et digital, voir plus loin le chapitre intitulé
Comment lire ce livre ?
ComEx, ou « comité exécutif »
Marketing is everything, Harvard Business Review, 1991, https://hbr.org/1991/01/marketing-is-everything
http://www.amonboss.com
Cf. http://atilf.atilf.fr/tlf.htm
En anglais sur le blog de Twitter : http://bit.ly/2iNmeWT « en faire plus avec 140 caractères »
« Salesforce ne rachètera pas Twitter non plus » - recode - http://on.recode.net/2iNmLIn
Pour revoir cette vidéo, « succeeding in social media initiatives » http://bit.ly/vimeoyag2009
Pour ne pas dire High-Tech
Cf. Thinking fast and slow, Daniel Kahneman, Penguin 2012
MS pour Mastère Spécialisé, soit une forme haut de gamme de mastères pilotée par la Confédération des Grandes
Ecoles. Le MS traduit une volonté de formation d’élèves en formation initiale ou en format executive à très haut niveau
d’expertise et de spécialisation. Ce diplôme est considéré comme un Bac + 6 (même si stricto sensu la catégorie Bac + 6
est officieuse) et sanctionne des profils très avancés.

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Le digital aujourd’hui et demain
Éric Delvaux : « Votre rapport sur le numérique a été enterré et pour quelle raison selon
vous ? »
Tariq Krim : « Car le numérique, en France, est vu avant tout comme de la communication,
on ne le voit pas en termes d’emplois, en termes de transformation numérique, de
transformation industrielle ».
ED : « C’est donc toujours un débat d’initiés selon vous ? »
TQ : « Absolument ! Il faut expliquer que le numérique a non seulement changé nos vies
quotidiennes mais qu’il va aussi transformer les emplois de demain, que ce n’est pas une
fatalité, qu’il faut juste réfléchir et trouver des solutions ».
Tariq Krim, interviewé par Éric Delvaux sur France Inter dans le 5-7 du 19 octobre 2016

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Le digital – ou le numérique – ça ne date pas d’aujourd’hui. Stricto sensu, c’est en
remontant à l’origine de l’informatique (l’ENIAC, la première machine calculatoire
autonome entièrement électronique), voire à la « bombe » d’Alan Turing17, désormais
célèbre depuis qu’un film largement romancé l’a mis à l’honneur, que l’on peut comprendre
d’où vient cette obsession de la digitalisation qui se transmet à tout ce que nous touchons
aujourd’hui.

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L’ENIAC entre 1947 et 1955, photo de l’Armée américaine (domaine public). La société fut ensuite rachetée par
Remington pour former UNIVAC, devenue Unisys en 1988

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Le digital omniprésent
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Depuis la musique dématérialisée et ses fabuleuses machines (comme le Node2 du


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canadien Bluesound18), au livre électronique (minoritaire en France et ultra majoritaire


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outre Atlantique), en passant par cette myriade d’objets connectés et/ou reliés au
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smartphone, de bracelets, de balances, de voitures de flottes connectées et suivies à


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distance, de distributeurs de boissons et même de bennes à ordures, le digital s’est


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immiscé partout. L’ordinateur miniaturisé est omniprésent au point de devenir une


obsession et de générer des débats sans fin sur l’utilisation des téléphones et de l’Internet
au restaurant comme en société.

À l’exception des costumes et à l’épaisseur des tablettes près, on se croirait en 2016, non ?
Pourtant, l’illusion de la nouveauté, un mot bien galvaudé, ne doit pas nous cacher la
réalité. Ce monde où l’ordinateur est devenu omniprésent (ubiquitous computing en
anglais) est né il y a près de 30 ans19. Toutes ces inventions géniales sont issues du
cerveau d’un grand monsieur : Mark Weiser, chercheur au Palo Alto Research Center de
Xerox. Celui-là même où tous les grands de l’informatique, Steve Jobs en tête, sont venus
puiser leurs idées et leur vision du futur. La période d’aujourd’hui, celle de l’ordinateur
omniprésent20, que beaucoup voient comme une explosion d’innovations, est en fait
l’aboutissement d’un cycle, la fin d’une époque, la fin d’un cycle ouvert dans les années 80
sur la côte Ouest des États-Unis. Ce qui nous attend reste à écrire mais est aussi
largement inconnu. En dépit des annonces prophétiques qui remplissent les unes des
journaux, de façon toujours plus péremptoire, avec un pic de pollution informationnelle en
début janvier, au moment du CES de Las Vegas.
L’ordinateur omniprésent – si le réseau l’est aussi
C’est là que notre histoire commence, c’est là que l’innovation arrive véritablement : quand
on ne sait pas ce qui va nous tomber dessus. C’est que la boucle de l’ « ubiquitous
computing » n’est pas encore complètement bouclée non plus. Il suffit d’aller faire un tour
dans le métro parisien (ou londonien, c’est encore pire) pour s’en apercevoir : il n’est pas
encore possible de travailler partout ni en tout lieu, malgré les promesses, du fait de la
présence de larges zones blanches, notamment dans les régions éloignées.

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La carte dynamique de couverture de l’arcep http://bit.ly/2ekUmt9 qui est assez généreuse avec la mesure de la qualité
des connexions dans les belles et sauvages Pyrénées ariégeoises. Elle montre cependant un taux de couverture de 16 %
(Octobre 2016) dans le métro parisien, qui me semble au contraire assez optimiste si on se place du côté de la 3G (ou
encore pire, la 4G).
Les questions sur l’adoption des technologies ne sont pas nouvelles non plus. Elles sont
même aussi vieilles que cela, et nous nous en faisions aussi l’écho au travers des
planches de notre livre précédent : La communication digitale expliquée à mon boss21.
Notre courbe de la digestion des technologies qui est plus d’actualité que jamais.

Où va le digital ?
Mais où va le digital ? Certes il a envahi notre quotidien, mais son intégration dans la vie
réelle est encore faible. C’est un euphémisme. Tariq Krim, fondateur du mythique Netvibes
et ancien Vice-Président écosystème et innovation du conseil du numérique en 201322, au
cours d’une interview sur France Inter, s’en est fait l’écho et nous avons mis sa citation en

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exergue de ce chapitre tant elle traduit l’état d’esprit actuel sur ce sujet.

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Pour commencer, l’interview a eu lieu à six heures trente du matin, ce qui montre déjà
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l’importance du sujet et la nécessité de lui donner une visibilité nationale. Pourtant, on
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parle bien des emplois de demain, non seulement dans les start-up, chose qui restera
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encore pour les quelques années à venir un peu anecdotique, mais aussi et surtout pour
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les entreprises traditionnelles, celles qui sont concernées par la fameuse transformation
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digitale et que nous décrivons dans le chapitre Différence entre start-up et transformation
digitale à la fin de la première partie.
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Ensuite, il y a ces questions du journaliste, Eric Delvaux, entièrement biaisées et qui ont
même réussi à faire dire à Tariq Krim l’inverse de ce qu’il avait envie de développer : que
« les technologies nouvelles sont clivantes », que « l’intelligence artificielle est destructrice
d’emplois », et qu’en somme, la machine va écraser l’homme dans une sorte de remake
plus ou moins réussi du fameux piano mécanique de Kurt Vonnegut23. Bref, l’apocalypse,
et c’est normal, le monde nouveau, donc inconnu, fait peur. Et la peur fait vivre – ou
survivre – les journaux. CQFD.
Un monde à inventer et non déjà inventé pour nous
Le mot de la fin est revenu à Tariq Krim cependant : « il faut expliquer que le numérique a
non seulement changé nos vies quotidiennes mais qu’il va aussi transformer les emplois
de demain, que ce n’est pas une fatalité, qu’il faut juste réfléchir et trouver des solutions ».
Il a réussi à rétablir la situation de manière positive et de façon tout à fait inattendue, et
malgré les efforts désespérés du journaliste de noircir encore la situation.
Le monde de demain est à inventer. Totalement. Les innovations technologiques qui nous
sont présentées aujourd’hui comme étant des panacées (réalité virtuelle, voiture
connectée, réalité augmentée, objets connectés, etc.) sont probablement celles que nous
n’aurons pas devant les yeux demain matin et encore moins dans cinq ans.
C’est parce que les changements se font dans le temps long qu’il faut aller très
vite
L’innovation s’inscrit dans un temps long et c’est parce que ce temps est long qu’il faut se
dépêcher d’aller très vite car plus on prend de retard aujourd’hui, plus nous serons à la
traîne dans 10 ou 15 ans. Le mal ne se fera pas sentir tout de suite, il faudra ce temps
long que nous décrivions au-dessus dans la courbe de digestion des technologies, de la
même manière qu’il a fallu 30 ans pour que les technologies et les inventions de Mark
Weiser arrivent sur le marché, et encore 10 ans pour qu’elles deviennent industriellement
acceptables.
Vers l’ordinateur « omni-absent »
Car après tout, cet ordinateur omniprésent, deviendra certainement dans les quelques
années prochaines, et sans que nous ne soyons véritablement capables de décrire
pourquoi ni comment, un ordinateur « omni-absent ». C’est-à-dire un ordinateur capable
de vous assister en tout temps et en tout lieu et sur tous les supports, à tel point qu’on en

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aura oublié la présence.
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En 2016, soit 26 ans après que nous ayons commencé à travailler sur nos premiers
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ordinateurs, un quart de siècle, une tâche aussi banale que celle d’écrire ce texte reste
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encore quelque chose de suffisamment technique pour être rebutant et peu naturel (même
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si Yann Gourvennec a déjà expliqué comment utiliser la reconnaissance naturelle de la


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parole pour dicter ses textes dans le livre précédent24). Il nous faut toujours, pour cela, un
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clavier et un ordinateur et nous mettre au travail devant un appareil somme toute assez
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artificiel. Certes, grâce au Cloud computing, on peut commencer un texte à un endroit et


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le finir ailleurs. Et la tablette apporte un peu de confort, avec certaines limites. Mais tout
cela a été inventé il y a déjà longtemps, n’y revenons plus. La reconnaissance naturelle de
l’écriture en est encore à ses balbutiements. Pire, elle a même régressé par rapport à ce
que Yann Gourvennec faisait dans les années 2000 avec son iPaQ sous Windows CE et
un petit logiciel appelé Phatware. Le futur est à réinventer et il y a du travail.
Un monde à créer dans les entreprises
Mais dans le monde des entreprises, le phénomène s’est encore accru. Beaucoup reste à
inventer dans les entreprises, qui n’ont pas encore intégré, du moins en France, cette
nécessité de l’innovation technologique qui consiste à se dépêcher pour prendre de
l’avance et gagner du temps dans le futur. Les tentatives d’évangélisation vues ici et là ne
semblent pas fonctionner, malgré les efforts nombreux. En effet, d’une manière
paradoxale, plus les technophiles et les technolâtres s’évertuent à décrire des
technologies immatures devant un public immature, plus le pays s’enfonce et prend du
retard pour les décennies qui viennent.
Sans doute qu’aucun des deux auteurs de cet ouvrage n’aura à souffrir des conséquences
de ces retards ni de ces atermoiements, de ces rapports enterrés, et de ces lois inutiles
qui n’amènent aucune véritable innovation, ni même amélioration de l’intégration de la
technologie dans les cœurs de métier. Mais leurs enfants et leurs petits-enfants en
verront hélas les conséquences, sauf à se ressaisir très rapidement. Car comme
l’explique Tariq Krim dans son interview, les talents sont bien là en France. Il faut en
profiter. Il est encore (tout juste) temps.
Des outils à dépassionner car ce ne sont que des outils
En fin de compte, plutôt que d’essayer de former tout le monde à essayer de s’adapter à
des outils, mieux vaudrait-il dépassionner le débat en expliquant que ces outils ne sont que
des outils. De façon ultime, ce dont le monde a besoin, et en particulier la France, c’est
moins d’intelligence artificielle que davantage d’intelligence naturelle, de celle qui permet
de mieux intégrer des outils et de mieux en faire profiter ses clients, ses employés, ses
partenaires, son entreprise. Intégrer ces outils de la manière la plus transparente possible
dans notre travail de tous les jours est la véritable et seule innovation qui inventera les
métiers et les produits de demain.
C’est cela, et uniquement cela, qui constitue la transformation digitale, il ne faut pas se

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tromper de cible. ss
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Le client est digital, alors qu’attendez-vous pour le devenir
?
Si tout est digital, un ouvrage dédié à la stratégie et la transformation digitale ne peut que
commencer par le client. Car le client est devenu digital. En fait, près d’un tiers de siècle
après l’invention du Web, on pourrait presque considérer que le monde entier est « digital
native ». Les jeunes surfent, les seniors surfent, les cadres surfent, les clients surfent.
C’est un fait, il faut s’y habituer. Un bon indicateur est le rapport annuel de Simon Kemp
(2016 Digital Yearbook25), qui nous gratifie chaque année d’un état des lieux de la
pénétration du Web et des médias sociaux par zone géographique et par pays. Les
résultats sont là, faisons parler les chiffres.

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Les chiffres sont sans appel.


Alors que la France est souvent pointée du doigt comment étant, au mieux, en milieu de
tableau de l’équipement et de l’usage du digital, son taux d’utilisation de l’Internet y est
quand même de 86 %. Ceci malgré un indéniable problème de fracture numérique décrit
dans le rapport Havas de 201226. On notera tout de même un taux d’utilisation mondial qui
peut paraître encore faible (46 %). Mais qui se souvient du temps mis par la planète pour
s’équiper de téléphones ? Nous oui, car nos parents l’attendaient encore en 1970. Et à
l’époque il leur fallait patienter jusqu’à un an pour avoir le droit de s’équiper, sauf à faire
intervenir un parent ou un ami, en conformité avec le bon vieux Système D qui prévaut en
nos régions.
Ces chiffres peuvent bien-sûr être regardés de différentes manières. Beaucoup reste
encore à faire dans le domaine de l’équipement digital des consommateurs, même dans
un pays avancé comme la France et encore plus si on considère l’Europe dont les confins
incluent des pays assez défavorisés comme la Moldavie27 ou la Roumanie par exemple.
Remettre en cause la terminologie de « transformation digitale »
Dans ce contexte, il nous paraît important de revenir sur les termes que nous utilisons.
Alors que l’on parle souvent – et même maintes fois de façon abusive – de «
transformation digitale », il nous semble important de remettre en cause cette
terminologie en amenant nos lecteurs à se poser (pour la première fois ou à nouveau) la
question du choix de ces termes et de leur signification tandis que tout le monde – ou
presque – est connecté.
La notion de « transformation digitale » ou de « digitalisation » suppose un passage d’un
état « physique » à un autre plus « virtuel » ou « numérique ». Contrairement à ce que
certains a priori pourraient laisser penser, il n’est pas toujours question de révolution
digitale. Dans bien des cas, il serait plus juste en effet de parler de transition ou
d’évolution des métiers.

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Tous les secteurs ne sont cependant pas au même niveau de rupture ni d’évolution, et les

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exemples sont nombreux sur le terrain de la rupture vécue ou subie par des secteurs
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comme le transport, l’hôtellerie, les expert-comptables ou la photographie et la musique. Il
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n’existe pas une seule transformation digitale, uniforme et universelle, qui toucherait
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l’ensemble des entreprises d’un même secteur de la même manière. Surtout si le secteur
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en question est réglementé et protégé, comme le sont, par exemple, le secteur bancaire
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ou la santé.
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Une transition au cours de laquelle l’entreprise fait évoluer ses processus métiers, mais
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également sa stratégie globale aussi bien en interne qu’en externe, son organisation, ainsi
que ses produits et les interactions avec ses clients. Une migration vers les technologies
numériques actuelles, autrement dit, une « transformation digitale » qui accompagne
l’évolution du marché aussi bien en amont (fournisseurs, prestataires, partenaires, chaine
de production…) qu’en aval (prospects, clients, concurrents…).
Quel que soit votre secteur d’activité, il est important avant d’aller plus loin, de
comprendre que le digital change le mode de fonctionnement de votre entreprise.
Attention, on ne parle pas de changement « pour » du digital, mais « avec » le digital.
Même le terme de changement est ici impropre. La notion de transformation est en effet
plus large et plus profonde, car elle inclut généralement un ensemble de changements au
sein d’un chemin d’évolution. Surtout, dans le cadre d’une transformation, cette évolution
se fait d’un état connu vers un état inconnu, à la différence du changement, qui vous fait
passer d’un état connu à un autre état connu. Bref, une transformation n’est pas un
changement et surtout, une transformation digitale n’est pas digitale, mais une
transformation avec du digital28.
Gageons également que les usages – ces mêmes usages sur lesquels Regis McKenna
focalisait son attention29 - varient selon les nations, les zones géographiques et aussi les
secteurs : celui de l’alimentation, par exemple, a mis beaucoup de temps pour se
développer sur Internet mais le modèle « click and collect » popularisé en France par ce
qu’on appelle les supermarchés « Drive30 » va permettre à terme de changer cet état de
fait.

Schéma de la pénétration du e-commerce selon les secteurs (FEVAD31) : 43 % pour le tourisme mais à peine 7 % pour

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les montres et bijoux.

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Les rythmes de maturité des clients ne sont pas forcément les mêmes, ni n’évoluent à la
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même vitesse. Ceux-ci sont modifiés par les taux d’équipement et le déploiement des
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infrastructures. À la fin de la décennie 2010, les enjeux se focalisent autour du


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déploiement de la fibre pour les infrastructures fixes, et de la future 5G qui ne va plus


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tarder à arriver. À ce moment-là, nous pourrons alors considérer que nous sommes
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proches de l’informatique omniprésente chère à son inventeur, le regretté Mark Weiser32.


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Mais ce n’est pas tout, loin de là.


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Il suffit pour s’en rendre compte de regarder les différences de pénétration du e-


commerce en France sur les différents secteurs. La Fevad nous fournit chaque année ses
chiffres clés sur ce domaine, ce qui nous permet de vérifier à quel point les choses
évoluent – ou non – dans certains secteurs.

Les chiffres clés du e-commerce (source : Fevad)


Profitons-en pour citer cet extrait du rapport de la Fevad : « Malgré un taux d’équipement
Internet équivalent à la moyenne européenne (83 %), le taux d’e-acheteurs en France est
de 12 points au-dessus de la moyenne européenne (65 % versus 53 %). Fort
heureusement, nous remarquerons cependant que la France est – en chiffre d’affaires du
e-commerce – repassée devant l’Allemagne, ce qui est logique en termes d’usages. Ce
CA reste néanmoins 3 fois inférieur à celui généré par le Royaume Uni sur la même
période.
Les enjeux du digital pour les entreprises aujourd’hui
Contrairement à ce que beaucoup de chefs d’entreprises pourraient penser, la
transformation digitale ne concerne pas que certains acteurs minoritaires, sous-entendant
ainsi que votre secteur et votre entreprise sont à l’abri des changements sociétaux qui
nous entourent.
En effet, beaucoup auraient tendance à s’attacher aux apparences, en pensant que le
passage à l’ère du digital est réservé à des entreprises proches de l’informatique, du Web
ou de la High-tech, et que les secteurs plus traditionnels sont à l’abri de ces changements.
La réalité est tout autre. Le secteur bancaire est un bon exemple car il a déjà été forcé, il
y a déjà quelques années, de passer aux services en ligne sous la pression de la
demande de ses clients.
Encore faut-il ajouter que la forte réglementation protectrice autour du système bancaire
tient celui-ci à l’abri de bouleversements bien plus radicaux que ceux qu’il traverse déjà en
cette période.

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Si vous n’êtes toujours pas convaincus, sachez que dès 2011, en France, le e-commerce

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réalisait le même chiffre d’affaires que le secteur des télécoms. C’est dire le poids de ce
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secteur, qui sort de l’anecdotique pour entrer dans la cour des grands.
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Ce phénomène oblige les acteurs majeurs des marchés à réfléchir à la façon dont ils sont
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organisés ainsi qu’aux valeurs acquises et qui doivent évoluer. Il leur faut apprendre à
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travailler au travers de l’organisation, dans un souci d’ouverture et de transparence. Enfin,


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l’entreprise doit calquer son organisation sur le consommateur et non plus en fonction de
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ses contraintes internes.


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Selon une étude conjointe du cabinet Roland Berger et de Google France33, publiée début
2017, la France est le second marché européen du e-commerce derrière le Royaume-Uni,
le premier des petites annonces en ligne, le deuxième plus gros marché d’AirBnb après
les États-Unis et le pionnier du co-voiturage. Tout n’est pas gris, mais tout n’est pas rose
non plus.
En résumé de cette introduction sur la transformation digitale, il faut retenir que :

Le digital bouleverse le modèle économique des entreprises établies de façon


fondamentale ;
Le digital réinvente la façon de commercialiser ses produits, en notant que les
acteurs établis ne sont pas à l’abri de ces changements ;
Le digital impose de réformer l’organisation et la culture du personnel de
l’entreprise.
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Le salarié est digital
Si le client est digital, dites-vous bien que le salarié l’est tout autant, pour la simple et
bonne raison qu’il s’agit de la même personne, mais considérée sous un angle différent. Et
de la même manière que dans leur vie de consommateur vos salariés font un usage sans
restriction des outils digitaux, ils aspirent à une approche numérique de leur vie
professionnelle.
Blogs, réseaux sociaux, mobiles, newsletters, forums, sites de partages, constituent leur
univers quotidien, celui au sein duquel ils évoluent et vivent leur citoyenneté connectée.
Pourquoi cette vie numérique cesserait-elle au moment de franchir les portes de
l’entreprise ? Il est grand temps de reconsidérer la place du salarié dans un écosystème
digital professionnel.
Pourtant, cela ne se passe pas toujours aussi simplement. La vie en entreprise est loin
d’être aussi fluide que l’expérience vécue par l’utilisateur hors des heures de bureau. En
effet, si le salarié est libre de ses choix et des orientations de sa vie privée, il n’en va pas
de même au sein d’une société. Tout d’abord, chaque entreprise dispose de ses propres
règles et de sa propre culture. Instaurées au fil du temps, elles régissent les modes

m
d’interaction entre les différentes parties prenantes. Par exemple, la liberté d’expression
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ou la possibilité de se cacher derrière un pseudonyme, dont jouissent les salariés hors de
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l’entreprise, n’existe plus systématiquement une fois qu’ils s’expriment en son nom. Dans
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ce cas en effet, l’anonymat n’a pas de raison d’être et les décisions individuelles doivent
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répondre à des impératifs de réserve, des règles d’éthique financière si la société est
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cotée, ou des choix organisationnels. Tout au contraire de l’anonymat, c’est la règle de la


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transparence qui prévaut dans ce cas ; celle-ci se résumant simplement par la nécessité
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de dire qui l’on est et pour le compte de qui on s’exprime34.


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Ensuite, toute entreprise est dépendante de ses propres choix technologiques (cf. le
digital et la DSI, page 188). Les possibilités numériques varient d’un contexte à l’autre,
d’un environnement à l’autre, et ce qui est envisageable sur des plateformes récentes et
plus évoluées pourra paraître inabordable dans des environnements qui datent ou en voie
d’obsolescence. Nombre d’entreprises, par exemple, restent plusieurs années sur les
mêmes versions de logiciels, afin de se prémunir des risques d’incompatibilité induits par
les évolutions de certains composants : ce faisant, elles privent leurs collaborateurs
d’accès à des outils ou des données qui nécessiteraient, pourtant, ces mêmes évolutions.
C’est ainsi qu’on voyait encore, en 2016, des entreprises équipées de versions anciennes
d’Internet Explorer, qui ne permettaient pas d’accéder correctement à des outils comme
LinkedIn ou Facebook. Cela paraît quasiment surréaliste dans un contexte où cette
version du logiciel diffusé par Microsoft n’est plus supportée par cet éditeur.
Cacher Internet aux employés, un sport difficile et dangereux
Plus ennuyeux, certaines entreprises décident de priver leurs collaborateurs d’accès à
certains services numériques, sous prétexte que ces services pourraient nuire à la
productivité, faciliter la fuite de données ou perturber le bon fonctionnement du réseau
d’entreprise. Ces mêmes entreprises sont-elles conscientes que le taux d’équipements en
smartphone des populations salariées converge rapidement vers sa limite maximale, et
qu’en empêchant un salarié d’accéder à Facebook sur son poste de travail, on ne fait que
l’inciter à y accéder depuis son propre terminal ?
Ce n’est pas une vue de l’esprit, cela nous est bel et bien arrivé !
Prenons une société qui n’autorise pas – ou du moins de façon ouverte – l’accès à
Facebook et prenons une commerciale dans une agence de la banlieue Est de Paris qui
est plus au fait des médias sociaux que ses patrons et vous avez le cas parfait où une
personne sur le terrain a préempté une page Facebook au nom de son entreprise en
utilisant son iPhone personnel. Son action n’était d’ailleurs pas répréhensible, loin de là.
Quand nous avons voulu la féliciter pour son geste, qui a permis d’éviter à la marque en
question de perdre le contrôle de sa page, la commerciale en question a eu tellement
peur qu’elle cessa toute communication et que nous n’en entendîmes plus jamais parler.
C’est dire le niveau de terreur dans lequel sont maintenus certains employés. Ceci n’est
bon ni pour l’entreprise, ni pour ses employés.
C’est là tout le problème du digital en entreprise. La méconnaissance des usages, la
crainte des mauvais comportements, l’incompréhension des bénéfices du digital font que

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nombre d’entreprises préfèrent se voiler la face et se priver d’infrastructures numériques
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dignes de leur rang. C’est à la fois pitoyable et dangereux. Pitoyable, car cette attitude
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témoigne, finalement, d’une sorte de mépris envers le collaborateur, déresponsabilisé,
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indigne de confiance, ou tout du moins pas suffisamment fiable pour qu’on lui laisse la
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possibilité de profiter des mêmes services que ceux dont il dispose dans sa vie privée.
de

Dangereux, car non seulement on le prive de ces services, mais on prive également
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l’entreprise des bénéfices induits par leurs usages. Pire encore, une entreprise ayant une
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approche archaïque de la digitalisation de ses infrastructures verrait sans aucun doute


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son capital sympathie décliner rapidement auprès des recrues les plus récentes, qui
n’hésiteront pas à aller voir ailleurs, et chez des concurrents mieux équipés, afin d’être
plus efficaces.
En réalité, le salarié n’aspire qu’à un équilibre entre sa vie privée digitale, celle qu’il vit en
tant que citoyen, et sa vie professionnelle digitale, et pas uniquement au sein de son
entreprise, mais aussi lors de ses déplacements professionnels. Cet équilibre ne signifie
pas forcément qu’on utilise exactement les mêmes outils – le même ordinateur ou le
même téléphone mobile – mais qu’on se dote du même potentiel d’efficacité et de
performance.
Enfin, le digital est souvent perçu comme une menace pour l’emploi. Il est vrai que le
premier axe de digitalisation consiste souvent à automatiser les tâches les plus répétitives
ou les moins dignes de valeur, ou à transformer la chaîne de valeur de telle sorte que les
intermédiaires à plus faible valeur ajoutée disparaissent. Mais au final, ce processus est-il
réellement destructeur d’emploi, comme le prétend Luc Ferry35 ?
Dans son rapport paru en Janvier 2017 et intitulé « Automatisation, numérisation et emploi
», le Conseil d’Orientation pour l’Emploi36 conclut que « […] moins de 10 % des emplois
cumulent des vulnérabilités qui pourraient en menacer l’existence dans un contexte
d’automatisation […] » et que « […] la moitié des emplois existants pourrait voir son
contenu notablement ou profondément transformé ». S’intéresser au digital est donc une
priorité individuelle à l’échelle des salariés, comme des dirigeants. Comme l’indique Tariq
Krim dans son interview sus-citée, mieux vaut considérer que le digital « n’est pas une
fatalité », mais aussi une opportunité de faire évoluer les métiers. Car ceux-ci de tout
temps ont muté. Nous pouvons certes avoir la nostalgie des échoppes des maréchaux-
ferrants ou des moulins qui couvraient la vallée de la Bièvre, mais est-ce une raison
suffisante pour prôner un hypothétique et impossible retour au passé37 ?

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Le digital est partout, tout est digital
Il y a plus de 40 ans, un génie du marketing prenait pied dans un domaine devenu crucial
aujourd’hui, appelé à la rescousse par un jeune patron de la Silicon Valley qui cherchait un
coup de main pour lancer un nouveau produit (lequel, selon les gourous de l’époque, avait
à peu de choses près autant de chances de se vendre qu’une poêle à frire à vapeur). Ce
produit était un micro-ordinateur dont tout le monde sait que personne n’avait besoin, les
ordinateurs étant de grosses machines qui remplissaient des salles entières et qui
n’avaient pas besoin d’arriver sur votre bureau.
De nombreux échanges plus loin, au cours desquels certains de ses associés hésitaient à
parier sur de tels produits sortis de la tête d’un jeune qui avait quitté Atari après à peine
deux ans pour travailler dans son garage (avec l’aide d’un ingénieur à peine plus
expérimenté venant de HP), notre génie a l’idée de prendre des parts dans la société en
question, pour monnayer le travail de communication qu’il effectuera pour eux. Le jeune
homme dans son garage s’appelait Steve, son ami aussi et se surnommait Woz, et tout le
monde les connaît. Et notre génie du marketing nous direz-vous ? Il est fort à parier que
vous ignorez son nom, tant nous sommes surpris de nous rendre compte qu’il évoque peu

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de choses au travers des conférences auxquelles nous assistons.

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Regis McKenna est pourtant le véritable fondateur du marketing des TIC38. À une époque
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où les ordinateurs se vendaient de spécialiste à spécialiste sur la base de configurations
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techniques ultra sophistiquées et loin, très loin du grand public, il a introduit le marketing
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dans ce domaine avec brio et efficacité. L’Apple II c’est lui, et on peut même le créditer
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de

de l’invention de l’idée de l’Apple Store. Dès 1984.


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Il nous semble important de remettre le génie du marketing qu’était Regis McKenna à


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l’honneur en intitulant notre chapitre « le digital est partout, tout est digital » et en
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paraphrasant ainsi le génial marketeur qui déclara un jour que « le marketing est partout,
tout est marketing39 »
Faisons avancer les aiguilles de nos montres et rendons-nous en 1989. Cette fois-ci, ce
sont deux autres génies qui changent le monde. Oui, vous avez bien lu, deux. Robert
Cailliau (un Belge que l’histoire a oublié) et Sir Tim Berners-Lee, un Britannique dont le
monde entier se souvient, inventent le protocole HTTP40 qui nous permet aujourd’hui de
communiquer, de nous informer, d’échanger, de créer, de nous instruire, nous former,
vendre, etc. La liste est infinie, il faudrait une vie pour décrire tout ce qu’il est possible de
faire avec cette invention basée sur un réseau maillé (un internet, un réseau de réseau, un
nom commun devenu un nom propre, d’où sa majuscule, trop souvent omise).
Le pont aux ânes du digital41
Aujourd’hui, on nous demande souvent de démontrer l’importance du digital. Pour être
francs, nous nous livrons souvent à cet exercice qui nous semble cependant assez
artificiel. D’aucuns vous demandent-ils pourquoi le transport ou la logistique sont
importants ? Et la comptabilité ? La finance ? Peut-être, même si nous en doutons. Mais
le digital, soyons sérieux, il faut encore démontrer à quoi il sert. Des fois que quelqu’un ne
l’utilise pas encore, sans doute42.
C’est cela qui est étrange. La grande fracture non pas entre les utilisateurs et les non
utilisateurs, mais entre le monde du consommateur – où tout paraît naturel et aller de soi
– et le monde de l’entreprise qui semble hésiter, ignorer, rechigner. C’est à cela que doit
servir ce livre. À donner un grand coup de talon sur ce vilain bug du scepticisme, qui
semble si bien se développer de ce côté-ci de l’Atlantique et de la Manche, au point de
créer une véritable schizophrénie : le chef d’entreprise accro à son smartphone, qui surfe
toute la journée et sait l’utiliser, mais ne se préoccupe guère de la dernière mise à jour de
son site Web qui date de 2007 ni même de sa compatibilité avec l’affichage sur mobile.
Passons donc un peu de temps avec cet ouvrage, mais pas trop tout de même, à vous
convaincre de l’évidence, ce qui constituera notre entrée en matière sur ce sujet. Et
gageons que lors de sa prochaine mise à jour, nous pourrons supprimer ce chapitre (nous
sommes d’incorrigibles optimistes).

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Mon boss sera bientôt digital
Revenons donc au point de départ : les échanges commerciaux sont digitaux, les
employés aussi, les clients pas moins, les médias n’en ont que pour Twitter, l’entreprise
tout entière est utilisatrice de technologies digitales mais la question se pose encore, «
quelle est l’importance de l’impact du digital » ? Mais si, nous vous l’assurons, nous
l’entendons tous les jours ou presque, cette question. Pourtant, elle devrait désormais
faire partie du passé. Et si le boss devenait aussi digital ? Ne serait-ce pas une bonne
idée ?
Avril 2016, l’un d’entre nous reçoit un coup de fil de la part d’une grande entreprise
internationale du secteur de la santé. Il faut réaliser très rapidement une séance
d’initiation au digital pour les personnels de la société dont deux départements viennent de
fusionner. Le constat, fourni par le client est alarmant : la connaissance des employés en
matière de digital serait proche du zéro absolu. Mauvais départ nous direz-vous. Pourtant,
cette donnée de base méritait bien qu’on la remette en cause, et notre consultant de
demander s’il est possible de réaliser un bref sondage auprès de la population en
question. La permission accordée, le sondage fut lancé.

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Surprise, la majorité des employés interviewés se sentaient assez ou complètement à
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l’aise avec le digital et ne se considéraient absolument pas comme des débutants.
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Avec une moyenne de 5.98, les participants étaient loin de se considérer comme des « newbies 43 » en digital.
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On ne peut pas considérer pour autant que ces participants étaient des « experts44 »,
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même si des personnes plus compétentes que d’autres sont représentées dans chaque
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cohorte (dans tout groupe on trouvera toujours au moins 1 ou 2 intervenants plus rompus
à ces technologies que les autres). C’est vrai pour toutes les classes d’âge d’ailleurs45.
Transformons notre vue de la transformation
Former et sensibiliser ses employés au « digital » est une activité louable. Nécessaire.
Mais la transformation digitale ne s’arrête pas là. C’est un sujet de management, de
gouvernance d’entreprise, qui nécessite de donner une impulsion forte à tous les niveaux
de management, et non seulement au niveau le plus haut. À la base, la transformation
digitale est surtout affaire de transformation et non de digital et une transformation est
quelque chose de bien particulier.
Une transformation n’est pas un changement
Nous l’avons déjà vu plus haut, une transformation n’est pas un changement. La
transformation est à la fois plus complexe et plus incertaine. Plus complexe car elle est le
résultat d’une myriade de changements. Son but ultime est la transformation du métier de
l’entreprise, d’où le vocable choisi. Son but est de transformer l’entreprise dans son
ensemble, le digital étant un catalyseur de cette évolution et non un but en soi.
Plus incertaine aussi, car le terme de transformation, à la manière de la chrysalide du
papillon, fait allusion au passage d’un état à un autre état. Vu de l’entomologiste, l’état
final du papillon est connu et immuable. Vu du papillon, c’est une autre histoire. Pour les
entreprises, la transformation implique forcément un saut dans l’inconnu.
Un inconnu qui est source de motivation pour beaucoup d’entrepreneurs et d’intrapreneurs,
et beaucoup moins pour nombre d’employés qui ne sont pas maîtres de cette
transformation et ont, souvent à tort, l’impression de la subir.
Revenons à notre exemple ci-dessus. Voilà une entreprise, celle citée plus haut, qui a
toutes les chances de pouvoir utiliser le digital pour améliorer le contact avec ses clients,
ses patients, ses publics et même rendre le travail interne beaucoup plus efficace. Les
budgets sont là, les employés enthousiastes, ou du moins en nombre suffisant, et même
les bonnes idées, à portée de main, la plupart du temps déjà lancées, plus ou moins bien,
avec plus ou moins de conviction. Prêtes à permettre la réussite. Quand on y pense, peu
de choses sont nécessaires pour aller au bout du chemin. Et la place du digital est sans
doute assez facile et naturelle à trouver dans un monde où tout est digital, comme nous
l’avons évoqué précédemment46. Et pourtant, c’est ce dernier pas qui est difficile. La
fameuse résistance au changement évoquée ci-dessus, car l’inconnu fait peur et engendre

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des résistances, étant sans doute un des obstacles les plus évidents dans le

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développement d’une stratégie de transformation. ss
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Et si le boss lui aussi devenait digital, et ce que cela signifie
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C’est là qu’un boss « digital » serait sans doute utile, direz-vous. Et nous serons d’accord.
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À l’heure où les salariés sont digitaux, où les clients sont digitaux, où les différents
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départements de l’entreprise le sont également devenus ou sont en passe de le devenir,


comment pourrait-il en être autrement ? Ce boss digital n’est cependant peut-être pas qui
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vous croyez. Pour cela nous nous référons à une étude de 2016 menée par Cécile
Demailly sur le management intermédiaire face à la transformation digitale. Dans cette
étude (voir ci-après) réalisée auprès d’un échantillon d’une centaine de répondants et
ayant permis la collecte de centaines de verbatim, on sent nettement poindre un malaise
entre les membres de ce corps intermédiaire, très important pour faire avancer les
projets, et les membres des comités exécutifs d’une part, et d’autre part la base des
employés47. La principale conclusion de l’étude est de démontrer la rémanence de
l’archaïsme des organisations, fortement et majoritairement ancrées dans la hiérarchie,
avec un impact somme toute assez faible voire minime des nouveaux modes
d’organisation.
L’étude de Cécile Demailly, en fin de compte, vient enfoncer quelques mythes de la
transformation digitale avec force et témoignages à l’appui : d’une part, c’est rarement du
sommet que viennent les miracles. Une impulsion peut être donnée, c’est surtout en cela
que le top management est attendu, et notamment pour indiquer la tendance business. Le
rôle du top management dans une transformation est bien en effet de donner un éclairage
sur ce qu’est cette transformation (vers quoi l’entreprise doit tendre). Et non d’expliquer à
la base comment utiliser une tablette. De même, le boss peut tweeter48, cela ne fait pas
de mal, mais ce n’est ni suffisant ni forcément utile en soi : tout dépend de la profondeur
des messages et des impulsions qu’il initie au travers de l’outil, ce n’est pas l’outil lui-
même qui compte.
Ensuite, le middle management est bien perdu, mais cela n’est pas forcément nouveau ni
original, c’est même un poncif des manuels d’organisation depuis que nous avons usé,
pour certains d’entre nous, nos fonds de culotte sur les bancs des écoles de commerce
dès les années 80 et même avant pour nos aînés.
Troisièmement, le salut viendra des nouvelles formes d’organisation. Jamais nous n’avons
autant entendu parler d’ « holacratie » 49 et de pyramide inversée. Mais le résultat n’est
pas là, Frédéric Laloux l’a également souligné dans son best-seller de 201450 : « la
plupart des organisations sont passées par plusieurs phases de programmes de
changement, fusions, centralisation et décentralisation, nouveaux systèmes d’information,
nouveaux slogans et « mission statements », nouveaux tableaux de bord et systèmes de
rémunération à la performance. On a clairement le sentiment que nous avons poussé le
mode actuel de gestion des organisations à ses limites et que les recettes traditionnelles
font finalement plus partie du problème que de la solution ».
Pour faire avancer la transformation digitale de l’entreprise – ne devrait-on pas parler de

m
transformation tout court ? – il faudra en effet être capable de travailler autrement, et si
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un manager peut bien tweeter, ce sera surtout ces leaders qui savent où ils vont et ceux
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qui auront intégré l’importance du digital au point de le remettre à sa juste place : celle
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d’un outil de rupture, qu’il faut maîtriser et qu’on peut utiliser à bon escient à condition d’en
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bien connaître les limites autant que la puissance.


de

Avant de transformer le digital, pour réussir, il vous faudra transformer votre façon de
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penser, de travailler ensemble et d’innover. Ce n’est pas rien. C’est à cette aune que votre
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boss doit devenir digital, il ne faut pas se tromper de cible.


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Interview de Cécile Demailly : le management intermédiaire face à la transformation


digitale

Source de l’étude (français et anglais) : http://www.earlystrategies.com/recherche


Cécile Demailly dirige le cabinet Early Strategies, spécialisé dans l’accompagnement des
entreprises sur les changements induits par les évolutions technologiques
Vous avez lancé une étude dont le sujet est « Comment le middle-management fait face à
la transformation digitale ». Pouvez-vous nous en dresser les grandes lignes ?
Cette étude a été menée en 2016, auprès de managers intermédiaires au sein
d’entreprises de plus de 2000 salariés. Elle avait pour objectif de voir comment ces
managers intermédiaires vivaient cette transformation digitale, ou numérique. Au travers
de 36 questions, plus qualitatives que quantitatives, on leur a surtout demandé de donner
leur avis, avec des verbatim, qu’ils racontent leur histoire, leur ressenti. L’étude a récolté
117 réponses, dont 94 ont été conservées, et l’étude est sortie en mai 201651. Il ne s’agit
pas de vérités premières, mais de pistes de réflexion, pour toute personne appelée à
travailler sur ces questions de transformation digitale, qu’il s’agisse de DRH, de
responsable marketing, ou autre. Ces pistes de réflexion permettent de comprendre ce
qui se passe dans l’entreprise, et ce que ces relais qui doivent mettre en œuvre la
transformation digitale, pensent réellement du sujet.
De manière globale, suite à cette étude, êtes-vous optimiste sur la capacité du middle-
management à aborder la transformation digitale ?
Je m’attendais à une vision très manichéenne de la transformation digitale, une grande
partie jouant un rôle de frein, et une plus petite partie beaucoup plus impliquée : mais en

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fait, ce n’est pas du tout le cas. Les résultats montrent un univers bien plus nuancé, avec
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un dénominateur commun : ils savent que ça se passe, maintenant, que c’est important
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pour l’entreprise, qu’il faut qu’ils s’en occupent, que c’est de leur responsabilité, et ils
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veulent la prendre. Mais entre ce qu’il faut faire, et comment on le fait, c’est là que
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résident les principaux points d’interrogation.


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Est-ce qu’ils ont une bonne perception de ce que signifie la transformation digitale, est-ce
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que c’est clair pour eux ?


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Pour la plupart, pas vraiment, mais ils aimeraient bien que ce le soit. Ils ne savent pas où
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trouver le temps de se tenir au courant, et quand ils ont suffisamment d’autonomie pour
trouver ce temps, ils ne savent pas par où commencer. Ils ont besoin qu’on leur mette le
pied à l’étrier, ils sont demandeurs.
Ne sommes-nous pas entrés dans un monde d’initiatives, où la base prend le pouvoir ?
C’est une question intéressante, car nous avons beaucoup investigué dans ce domaine-là.
Nous avons demandé si les organisations s’aplatissaient, s’il y avait une approche de «
crowdsourcing » pour la transformation de l’entreprise au sens large. On a trouvé que
l’organisation s’aplatit, mais pas d’une manière simple. Les silos tombent un petit peu, et
on perd des niveaux de hiérarchie dans l’entreprise, un peu partout, plus que ce qu’on
pensait, mais ce n’est pas vécu violemment. Sinon, ils sont managers intermédiaires,
entre les grands patrons et les opérationnels, mais les opérationnels n’ont pas pris le
pouvoir : il faut être maître de son temps, pouvoir disposer d’une certaine autonomie
financière, et ce n’est pas encore le cas. De tout façon, le changement en entreprise
repose traditionnellement sur les épaules du middle management.
Les membres du Comex leur donnent en général carte blanche, tout en leur mettant des
bâtons dans les roues. Il y a toujours un risque de rupture entre le comité de direction et
le middle management. Une dizaine de réponses, dans l’étude, provenaient de membres
de comités de direction. Ils nous ont répondu que les comités de direction avaient en
général des idées un peu abstraites sur la question, et trouvaient que la digitalisation et la
transformation numérique, c’était « la caverne d’Ali Baba », et du coup, demandaient des
tas de chiffrages, de tableaux de bord, à tort et à travers, qu’il y avait un risque qu’on
croule là-dessous, et que cela ne donnait pas une perception intéressante de l’entreprise,
pas une perception réelle, d’ailleurs.
Ces middle managers sont pris en sandwich entre le top management qui attend que les
décisions soient prises au milieu, et les équipes qui attendent aussi que l’initiative soit
prise au milieu, et donc cela crée une « fracture numérique » entre le middle management
et le comité exécutif. Du coup, c’est le premier point important de votre étude, et c’est un
peu un marronnier, ces middle managers se sentent mal aimés, on ne reconnaît pas leur
travail.
Ce n’est pas spécifique au digital, il existe des études sur ce sujet et le rôle du middle
manager, c’est simplement confirmé lors de la transformation numérique, et avec des

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éléments de détail qui permettent de voir là où ça pèche.

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Le deuxième point, c’est qu’on change de sujet : on passe du management au leadership,
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et ce n’est pas facile pour tout le monde.
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Et ça, pour le coup, ce n’est pas un signal faible, c’est un signal fort : le management à
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l’ancienne est en train de disparaître, et on demande aux managers d’être des leaders.
de

Qu’est-ce que cela signifie ? C’est avoir une réputation, se faire connaître, ne pas être là
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pour répondre aux questions mais pour poser les questions qui vont faire évoluer les gens,
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c’est ouvrir des portes, montrer où est la lumière. Et ça, c’est plus ou moins bien vécu,
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parce que ce n’est pas facile, et rarement accompagné.


On leur demande de répondre à des questions qu’ils comprennent à peine.
Oui, parce qu’ils peinent à trouver le temps de se former, parce qu’ils ont plein d’autres
choses à faire. Et quand ils ont l’autonomie suffisante pour se mettre au courant, ils ne
savent pas par où commencer. Mais ils sont très demandeurs d’informations.
Personne n’aime le changement et la rupture, et cela fait aussi souffrir les middle
managers.
Ils souffrent, mais ils savent que cela doit arriver. Ils font face à la résistance au
changement, mais ils ne sont pas les principaux freins. La large majorité sait que le
changement est de leur ressort. Mais ils doivent faire face à tellement de choses à la fois,
gérer la résistance au changement des gens qu’ils encadrent, gérer les comités exécutifs
qui ne les laissent pas réellement gérer et qui leur demandent des trucs impossibles,
apprendre à utiliser de nouveaux outils, faire des plans, s’adapter à une stratégie qui
n’arrête pas de fluctuer, c’est difficile, et ce n’est pas donné à tout le monde de savoir
comment s’y prendre.
Ce changement est difficile à mettre en œuvre, puisqu’il faut remettre en cause les
pratiques quotidiennes, et quand cela échoue, qui est responsable ?…
Il y a de fortes présomptions pour qu’effectivement, cela leur retombe dessus. Mais nous
n’avons pas posé cette question-là explicitement, car nous avons considéré que ce
changement était un changement en marche, c’est un changement en régime permanent,
en beta permanente, on essaie un peu, on voit si ça marche, on n’a pas fini le changement
qu’on en commence un autre. Mais de toute manière, ils considèrent la responsabilité
comme la leur : si ça ne marche pas, ils sont prêts à l’assumer, mais ils aimeraient bien
que ça marche, et avoir un peu d’aide, surtout pour avoir le temps de trouver l’information
qui va les aider.
La transformation digitale des entreprises est un vocable nouveau, mais l’informatisation
des entreprises ne l’est pas, la numérisation non plus, la prévalence des données est
peut-être nouvelle dans certains secteurs, mais existe depuis longtemps dans beaucoup
d’autres, l’Internet a vingt-cinq ans, les médias sociaux plus de dix ans, tout cela
commence à être un peu vieux. Est-ce qu’on ne pourrait pas parler d’un décalage entre
ces technologies qui sont largement mûres, et le fait que ces organisations ont l’air assez
démunies, avec des gens pleins de savoirs et pleins de compétences, mais désemparés

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face à cette transformation ?

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L’entreprise est restée largement hiérarchique. Or Internet n’est pas hiérarchique : c’est
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collaboratif, c’est un réseau, ça marche à base de niches d’innovation qui se répandent.
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Mais l’entreprise, même si elle s’aplatit un petit peu, fonctionne toujours de manière
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hiérarchique. De ce fait, elle ne peut pas tirer tout le parti qu’elle pourrait espérer de cette
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transformation-là. L’entreprise est un organisme ancien, qui n’est pas encore totalement
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adapté au monde moderne.


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Il faut adapter non seulement la hiérarchie et l’organigramme, mais aussi la culture


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d’entreprise, la stratégie pour pouvoir la traduire numériquement. Il y a encore de


nombreux sujets où l’on fonctionne encore un peu comme au dix-neuvième ou au vingtième
siècle.
Et pourtant les livres de management ne manquent pas sur ce sujet ?
Oui, mais on peut difficilement abandonner les habitudes. L’entreprise telle que nous la
connaissons a été créée à la fin du dix-neuvième siècle, elle fonctionne sur un mode
hiérarchique. Tous les essais qui ont été menés pour la faire fonctionner sur un mode
collaboratif se sont soldés par de petits succès pour des PME ou des start-up, mais
finalement, quand vous regardez les grandes start-up, celles qui ont réussi et dont tout le
monde parle, elles ont un jour ou l’autre basculé sur un mode hiérarchique : on n’y fait pas
ce que l’on veut, et on ne joue pas le rôle de sentinelle pour l’entreprise sans qu’on en ait
vraiment reçu l’objectif. Il y a donc encore de nombreuses transformations à mener. Est-
ce qu’elles pourront se réaliser ? C’est là toute la question.
Peut-on espérer des changements organisationnels à court terme ?
Dans de nombreuses entreprises c’est en marche. Est-ce qu’on le verra ? Probablement,
sur des outils comme le crowdsourcing pour gérer la transformation, c’est à dire
demander l’aide de tout un chacun sur des idées pour innover, pour changer de marché,
changer les usages en entreprise. Il y a encore trop de monde qui ne connaît pas ce
genre d’outil. Quand vous leur en parlez, ils sont intéressés et si vous leur demandez s’ils
sont prêts à mettre cela en route, ils vous répondent « oui, pourquoi pas ».

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Au fait c’est quoi le digital ?
Digital
Adjectif : dig·i·tal \’di-jə-təl\
Popularité : parmi les 40 % des mots les plus utilisés de la langue anglaise
Définition simple de « digital »
1 : qui montre le temps avec des nombres et non des aiguilles (réveil digital)
2 : fait de ou relatif à l’information stockée sous forme de 0 et de 1
3 : utilisant ou déterminé par la technologie informatique
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4 : lié à ou relatif aux doigts et aux orteils (dextérité digitale)
Source : Merriam-Webster’s Learner’s Dictionary
Le terme numérique et son cousin anglais digital ont envahi notre quotidien. On le trouve
mis à toutes les sauces : communication numérique, transformation numérique, révolution
numérique, quand ce n’est pas sous sa forme la plus épurée « le numérique ». Mais
qu’entend-on au juste avec cet adjectif substantivé ? Le numérique, ou digital, représente

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avant tout l’essor de technologies apparues au sortir des années 70, avec la diffusion

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massive des premiers ordinateurs au sein de l’entreprise. Des données auparavant
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traitées sous un format analogique (son, image) ou physique (papier) basculaient tout d’un
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coup sous la forme d’un fichier informatique, et devaient pour cela passer sous une
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représentation numérique, la seule qu’un ordinateur soit capable de manipuler. C’est ainsi
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que les traitements de texte remplacèrent les machines à écrire, que les logiciels de CAO
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remplacèrent la planche à dessin, et que le compact-disc et le CD-ROM remplacèrent le


tourne-disque et le lecteur de cassettes. En un peu moins de deux décennies, les données
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et les outils de notre quotidien ont cédé la place à leur avatar numérisé.

L’excellent blog « la boutique d’Éric » explique comment fonctionne un système HIFI numérisé multi-pièces. Non geeks
s’abstenir.
Au-delà du changement des formats des données et des outils, cette première révolution
numérique a induit deux changements fondamentaux, sur le stockage et la recherche des
données. D’une part, des volumes de données autrefois gigantesques et qui étaient
difficilement manipulables, ont tout d’un coup pu être enregistrés sur des supports de
quelques centimètres cubes : les centaines de mètres de papier nécessaires à la
construction d’un avion ont été transformés en quelques téraoctets enregistrés dans « le
cloud ». D’autre part, des outils d’analyse et de traitement de ces mêmes données ont pu
apparaître, et faciliter l’extraction d’information par le brassage de millions
d’enregistrements numériques : pour reprendre l’exemple issu du secteur aéronautique, il
n’est plus nécessaire de construire la maquette physique d’un avion pour en simuler le
fonctionnement depuis une vingtaine d’années déjà.
Une seconde révolution numérique est apparue avec l’interconnexion de millions de
réseaux informatisés. Les premières briques de ce qui allait devenir Internet furent posées
dans le cadre de projets de recherche militaire puis universitaire aux États-Unis (sur la
base d’un concept imaginé en France par Louis Pouzin53, Cocorico !). Grâce à cela, dès
le milieu des années 80, le monde de la recherche est totalement connecté. Dix ans plus
tard, le grand public accède à cette même infrastructure, et aujourd’hui, près de trois
milliards d’internautes échangent quotidiennement par le biais de connexions mobiles ou
fixes, des données aussi bien personnelles que professionnelles.
Numérisation des données, des outils et des échanges, en quoi cela pose-t-il problème

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dans un cadre professionnel ? Ces mutations ont transformé à tel point notre espace de

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travail, qu’il serait inconscient de ne pas chercher à adapter la vie en entreprise aux
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conséquences directes et indirectes qu’elles induisent : omniprésence de l’informatique,
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connectivité permanente, plateformes collaboratives, instantanéité des échanges.


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Lors d’un récente intervention à une conférence Microsoft à Rome, son CEO, Satya
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Nadella, a présenté les quatre piliers sur lesquels repose, selon lui, toute transformation
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digitale. Nous partageons son avis. Pour nous, ces quatre piliers sont les axes principaux
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que vous devez avoir en tête à tout moment au cours de votre transformation digitale.
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Le premier pilier, c’est la transformation induite sur la relation client. La révolution


numérique a mis un terminal internet dans la main de chaque consommateur, chaque
utilisateur, terminal qui le relie aux marques, aux entreprises, à ses amis ou ses collègues
à tout instant. Comprendre les conséquences de cet état de fait est essentiel, car son
impact peut être immédiat en termes de réputation, de ventes, ou simplement d’interaction
avec les clients.
Le second pilier, ce sont les produits. Si vos produits sont déjà digitaux, demandez-vous
s’ils utilisent ces technologies au meilleur de leurs performances et de leurs possibilités.
Et s’ils ne le sont pas, comment pourriez-vous, justement, prendre en compte le digital
pour améliorer la qualité de vos produits, aussi bien la qualité intrinsèque que la qualité
perçue ? Un TGV peut-il être plus digital (la réponse est oui) ? Un appareil photo
numérique est déjà digital. Peut-il l’être encore plus (la réponse est également oui) ?
Le troisième pilier, ce sont les salariés. N’imaginez pas que la transformation digitale sera
sans impact sur votre organisation et sur vos équipes. Et ce, sur tous les sujets, que cela
touche au recrutement, à la formation, la motivation, la communication interne, pas un
domaine ne sera épargné. Le digital s’insinue par toutes les pores de l’entreprise, et
touche toutes ses strates, des stagiaires aux dirigeants : mais lesquels sont les plus
perméables ? En réalité, réussir la transformation digitale d’une entreprise, c’est peut-être
avant tout réussir la transformation digitale de ses salariés.
Le quatrième pilier, enfin, ce sont les opérations, les processus. Le digital peut devenir un
formidable accélérateur interne, à condition d’être convenablement intégré et pris en
compte dans toutes les activités de l’entreprise. Il peut aussi devenir un frein terrible s’il
est peu ou mal pris en compte. Cela concerne bien évidemment le traitement des
données, mais pas uniquement cet aspect.
Clients, salariés, produits et opérations : voilà définis, en quatre termes, les territoires

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d’investigation pour mettre en œuvre le digital. Comment et avec quels moyens ? C’est ce
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que nous allons voir ensemble dans les chapitres suivants.
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Digital Me Up : La transformation digitale est-elle une
question de survie ?
Par Agnès Lopez
https://goo.gl/aqHDD7

Tout le monde parle de transformation digitale, au point que c’en est devenu un des «
buzzwords » du moment. Mais en fait, il s’agit de bien plus que cela. La transformation
digitale n’est même plus une affaire de choix mais de survie. La majorité (87 %) des
entreprises pensent que la transformation digitale est une opportunité compétitive, 51 %
des dirigeants considèrent qu’il est critique de mettre en place une transformation digitale

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dans les 12 mois à venir54. Mais de quoi parle-t-on exactement : s’agit-il d’une sorte de
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magie noire, ou est-ce réel ? Et pourquoi est-ce si crucial ?
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Qu’est-ce que la transformation digitale ?


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Commençons par démonter un mythe : il ne s’agit pas de magie noire. On nage en pleine
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réalité. Il s’agit plus exactement d’une réalité virtuelle et complexe, qui est apparue il y a
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quelques décennies, mais qui est encore quasi inconnue pour nombre de nos congénères.
On pourrait d’ailleurs tout aussi bien commencer par définir ce que le digital n’est pas : le
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digital ne se résume pas à la technologie ! La technologie est juste un moyen pour


supporter la donnée digitale. La technologie n’est pas le point le plus important. En fait, la
notion de digital est bien difficile à définir de manière exacte : il doit bien y avoir autant de
définitions que d’individus, comme le montre une vidéo diffusée sur la chaîne YouTube de
Cisco55. Quant à la notion de « transformation digitale », on pourrait la résumer aux trois
changements majeurs suivants.
Un changement d’état d’esprit
La volonté de transformation doit venir du sommet de l’entreprise : c’est un véritable
changement d’état d’esprit qu’on attend de sa part. Les dirigeants doivent absolument
être convaincus de la nécessité de ce changement et le soutenir tout le long. Il faut
assumer cette peur de perdre du pouvoir en soutenant quelque chose qu’ils ne
comprennent pas : c’est la peur de l’inconnu.
Un tel changement d’état d’esprit est assez complexe. Une aide extérieure peut être
souhaitable, car cela permet d’analyser la situation de manière objective, d’offrir un
meilleur point de vue et de prendre du recul, afin de pouvoir émettre des propositions qui
seront mieux reçues en raison du statut supposé neutre de l’émetteur.
Nommer un CDO (un Chief Digital Officer, voir page 233) peut être une étape importante :
un représentant interne, central, avec une vision globale au travers de l’organisation, pour
coordonner toutes ces transformations.
Un changement de structure
La transformation digitale est un projet qui ne peut pas être mené comme tous les autres.
Ce projet-là conduit à réinventer la structure de l’entreprise. Son but est de transformer le
modèle économique en un modèle au sein duquel le digital sera pleinement intégré. Une
équipe transversale, dédiée à ce type de projet, doit être mise sur pied, pour prendre le
lead sur tous les sujets concernés, avec le support du CDO.
Si la transformation digitale peut et doit être considérée comme un projet qui ne finit
jamais, il ne faut pas perdre de vue que chaque sous-projet qui y contribue doit forcément
être un projet à court-terme. La réactivité et la capacité d’adaptation sont des ressorts
essentiels, pour rythmer ce changement global, améliorer et adapter l’organisation.
Un changement de point focal
La transformation digitale est avant tout un changement d’objectif principal. Elle implique
d’identifier clairement le principal et seul point vers lequel doivent se focaliser toutes les

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forces de l’entreprise : le client.
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Le client doit retrouver son importance originelle. Toute l’organisation doit basculer dans
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un mode customer-centric, d’un point de vue aussi bien structurel que stratégique.
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L’organisation doit apprendre à être obsédée par le client56. La transformation digitale


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n’est pas une mode qui traduit l’accroissement des investissements technologiques. Pas
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du tout. Il s’agit de renouveler la focalisation de l’entreprise sur les clients et le côté


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humain du commerce57.
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Pourquoi la transformation digitale est-elle si importante ?


Le monde est digital, tout autour de nous58. Nous en faisons partie. Nous en sommes les
acteurs. Et nous ne pouvons plus vivre sans. Pour survivre, les entreprises n’ont d’autre
choix que de se lancer dans une transformation digitale. Elles doivent s’adapter et prendre
le digital au sérieux. Si des entreprises décident de ne pas suivre le mouvement et de
rester à l’écart, elles finiront par mourir. De nombreuses entreprises en ont déjà fait les
frais.
Il ne suffira pas, pour les entreprises qui décident de se lancer, de se focaliser
uniquement sur de nouvelles technologies et de nouveaux produits. La transformation
digitale doit être considérée comme une chance, une opportunité, et non comme quelque
chose qui peut être ignoré ou contre lequel elles doivent se battre. Dans tous les cas,
elles finiraient par perdre la « guerre ». La FNAC illustre parfaitement ce profil
d’entreprise qui finit par embrasser le digital avec succès. Mais de nombreux exemples de
sociétés qui ont refusé de suivre le mouvement et de s’adapter existent aussi. Certaines
ont déjà disparu.
Et la stratégie digitale dans tout ça ?
Tout comme la transformation digitale, il s’agit encore d’un vocable à la mode. Même s’il
est clair que la transformation digitale fera partie du langage courant d’ici peu. Elle
touchera toutes les sociétés, aussi bien dans leur organisation que leur stratégie.
Si la question de la nécessité d’une transformation digitale ne se pose pas, il y a
cependant une question que toute entreprise doit se poser : par où commencer ? De
manière évidente, il faut commencer par définir clairement sa stratégie digitale. Mais
qu’entend-on par stratégie ? Comment la définir ? Et comment garantir son succès ?

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Panorama introductif de la transformation digitale
Dans cette première partie, nous nous sommes efforcés de définir ce qu’est le digital et
surtout pourquoi et comment aborder le virage numérique de l’entreprise.
Dans sa définition de base, nous l’avons vu, le terme « digital » est, avant tout, une
expression anglo-saxonne qui signifie « numérique ». Mais il existe autant de termes liés à
la transformation digitale que d’interlocuteurs. En effet, le mot englobe, en dehors du Web
lui-même, un certain nombre de concepts liés aussi bien aux médiums qu’aux supports. Le
digital recouvre tout d’abord ce que l’on appelle le capital Web. Mais il ne s’arrête pas là.
Stricto sensu, il concerne chacun des 4 piliers qui ont été décrits au chapitre précédent.
Qu’est-ce que la transformation digitale ?
La notion de « transformation digitale » ou de « digitalisation » supposerait un passage
d’un état « physique » à autre plus « virtuel » ou « numérique ». Pourtant, cette notion de
virtuel est éminemment critiquable. Nous aurions, d’un côté, le monde réel, le monde
ancien, celui qui s’occuperait de choses sérieuses, pour paraphraser le businessman du
Petit Prince. Et de l’autre, un monde nouveau, qui reposerait quant à lui sur le « virtuel »,

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le digital étant selon cette opinion, un niveau d’abstraction ? Voilà une vision qui, dans bien

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des cas, dénote une incompréhension totale du monde.
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L’Internet n’est pas irréel ni même dématérialisé. Il est un réseau de réseaux, bien réel,
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fait de ressources qui ne sont pas plus virtuelles qu’une machine-outil. Certes, ces
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ressources sont assez souvent logicielles, mais les activités qu’elles servent sont bien
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réelles. Croire que l’activité du monde réel est à l’abri des barbares du monde « virtuel »
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est une vue de l’esprit, une vue erronée qu’il est dangereux de croire et de colporter.
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Au-delà de cette vue très manichéenne du monde, il serait plus juste de voir le digital
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comme une véritable chance de transformer ou de faire évoluer les métiers : la clef vers
une transformation. Ceci étant dit, tous les secteurs n’en sont pas au même niveau de
rupture et d’évolution, et les exemples sont nombreux sur le terrain, de la rupture vécue ou
subie par des secteurs comme le transport, l’hôtellerie, les experts-comptables ou les
photographes et les musiciens (nous avons décrit un grand nombre de secteurs et l’impact
du digital sur leur fonctionnement et leur avenir dans les chapitres qui suivent). Nous avons
tous en tête les mésaventures de Kodak ces vingt dernières années, et il est vrai que la
transformation subie par l’ex-leader incontesté de la photographie argentique a de quoi
faire réfléchir. Celle-ci n’est toujours pas terminée à ce jour et les conséquences de la
numérisation du marché sur l’ancien géant de la photo se font encore sentir, avec des
plans de licenciements qui se poursuivent encore aujourd’hui59, cela n’en finit pas de finir,
alors même que l’entreprise essaie de se réinventer pour la millième fois avec le digital60.
Il n’existe pourtant pas, malgré cet exemple spectaculaire, de transformation digitale
uniforme et universelle, qui toucherait l’ensemble des sociétés d’un secteur économique
de la même manière. Surtout si le secteur en question est réglementé et protégé, comme
celui de la banque, par exemple. Les recettes toutes faites ne peuvent s’appliquer, et
chercher à remplir une grille de benchmarking – comme cela nous a déjà été demandé –
pour évaluer le niveau de digitalisation d’une entreprise, n’a aucun sens car cela
reviendrait à comparer des choses incomparables. La transformation digitale est une
approche stratégique, et en tant que telle, elle se doit d’être adaptée à chaque cas
individuel.
Les enjeux du digital pour les entreprises aujourd’hui
Contrairement à ce que beaucoup de chefs d’entreprises pourraient penser, la
transformation digitale ne concerne pas uniquement certains acteurs minoritaires, sous-
entendant ainsi que votre secteur et votre entreprise sont à l’abri des changements
sociétaux qui nous entourent. En effet, beaucoup auraient tendance à s’attacher aux
apparences, en pensant que le passage à l’ère du digital est réservé à des entreprises
proches de l’informatique, du Web ou de la High-tech, et que les secteurs plus
traditionnels sont à l’abri de ces changements. La réalité est toute autre. Le secteur
bancaire est un bon exemple, car il a déjà été forcé, il y a déjà quelques années, de
passer aux services en ligne sous la pression de la demande de ses clients. Encore faut-il
ajouter que la forte réglementation protectrice autour du système bancaire tient celui-ci à
l’abri de bouleversements bien plus radicaux que ceux qu’il traverse déjà en cette période.
Le spécialiste mondial de l’électroménager Whirlpool nous a fourni un bon exemple de la

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profondeur de ce qui se passe, et ce, sur un secteur on ne peut plus traditionnel. Entre
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2009 et 2015, le chiffre d’affaires réalisé par le groupe grâce aux ventes en ligne est
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passé de 8 % à 22 %, car il inclut ce que nous appelons en France Web to Store. Un
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chiffre somme toute cohérent avec celui de Darty (2016) qui annonce 30 % de son chiffre
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d’affaires en click and collect (et même 50 % si on exclut le gros électroménager) 61.
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Le chiffre donné par Darty lors d’une conférence réalisée chez Adobe fin 2016
Aux sceptiques qui trouveraient ces chiffres encore peu significatifs, précisons que depuis
longtemps déjà, 90 % des clients de la marque préparent leurs achats en ligne62 et que la
consultation de l’Internet – via le mobile – n’est plus une exception, au point de forcer
Darty à équiper tous ses magasins et à considérer qu’il s’agit là d’un investissement
prioritaire.
C’est dire que tous les messages auxquels ils vont être exposés en ligne sont importants.
73 % des répondants de ce sondage IFOP de fin 2014 reconnaissent « consulter des avis de consommateurs en ligne
sur des blogs, des forums ou des sites de consommateurs » en magasin, 44 % « consultent des avis sur les réseaux
sociaux » sur le point de vente.
Si vous n’êtes toujours pas convaincus, rappelons que dès 2011, en France, le e-
commerce réalisait le même chiffre d’affaires que le secteur des télécoms63. C’est dire le
poids de ce secteur, qui sort de l’anecdotique pour entrer dans la cour des grands. Fait
remarquable, le e-commerce n’est plus, loin de là, un secteur de spécialistes et de pure
players, il concerne aussi et surtout des acteurs du commerce, au point que les acteurs

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natifs du monde de l’Internet sont désormais en minorité. ss
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Rang Entreprise Secteur

1. Amazon E-commerce (US)

2. Apple Fabricant (US)

3. JD.com E-commerce (Chine)

4. Walmart Commerce (US)

5. Otto (Germany) E-commerce (ex Vente par correspondance) (All)

6. Tesco Commerce (UK)

7. Macy’s Commerce (US)

8. Liberty (QVC.com) Home Shopping (US)

9. Casino Guichard (France) Commerce (Fr)

10. Suning.com E-commerce (Chine)

La liste des 10 plus grands e-commerçants du monde. Un seul français mais beaucoup de commerçants qui, soit se sont
transformés, soit ont muté en e-commerçants (Otto Versand, devenu aujourd’hui Otto Group GMBH). Nous en
dénombrons 7 sur 10 dans cette liste offerte par Deloitte64.
En résumé, retenons d’abord, que le digital bouleverse de façon fondamentale le modèle
économique des entreprises établies. Deuxièmement, le digital bouleverse la façon de
commercialiser ses produits, en notant que les acteurs établis ne sont pas à l’abri de ces

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changements. Enfin, dernier point et non des moindres, le digital impose de repenser
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l’organisation et la culture du personnel de l’entreprise.
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Qu’est-ce qu’une entreprise digitale ?


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Même si la tablette peut être un outil très pratique, et bien qu’elle puisse faire des
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merveilles65, quand elle est bien utilisée, il ne suffit pas de développer une application ni
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de distribuer des ardoises électroniques pour être une « entreprise digitale ». De même, il
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ne suffit pas d’équiper une agence bancaire, de la barder d’appareils numériques et


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d’écrans et de mettre des jeunes gens en t-shirt à l’accueil pour en faire la marque de la
banque du futur. Pourtant, notamment au Royaume Uni, ces banques du futur ont fleuri
depuis des années, sans jamais réinventer quoi que ce soit, ni freiner l’hémorragie de
fermetures d’agences. C’est que la transformation digitale va au-delà de ces aspects
formels et matériels.

L’hémorragie d’agences bancaires au Royaume Uni est réelle66. 1 700 agences ont disparu depuis 5 ans. Chris Skinner,
sur son blog, prédisait aussi l’avenir, dès 2013, pour les fermetures à venir d’agences en France67. Les annonces en
cascade de 2015-2016 lui ont donné raison et ce n’est que le début d’une forte mutation68.
L’entreprise digitale n’est donc pas un showroom de démonstration Darty, mais une
entreprise sociale, connectée à son environnement, également mobile et collaborative, en
profondeur. C’est une entreprise qui interagit avec son écosystème : ses clients, ses
fournisseurs, ses partenaires et tout le reste de son environnement. Une entreprise qui
diversifie les canaux de communication, depuis les médias et les réseaux sociaux comme
Twitter, Facebook, LinkedIn, la communication digitale et toute autre forme d’interaction
digitale69.
La transformation digitale n’est, par ailleurs, ni une démarche ascendante ni descendante.
Finis le top-down, ou les sondages d’opinion afin de décrypter les besoins ou attentes des
clients. On ne sonde plus les consommateurs, on interagit avec eux en direct, au travers
de ce que l’on appelle des « études chaudes », en rupture avec les « études froides » des
débuts du marketing70. Aujourd’hui, la communication et le temps réel prévalent,
l’entreprise doit être réactive face aux concurrents et à ses clients, fonctionner à la même
vitesse qu’eux.
Eviter les caricatures sans nuances des entreprises qui meurent sous les coups
des barbares
Il ne s’agit pas, inversement, de prédire sans nuances la mort immédiate des entreprises

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qui n’adhérent pas à la transformation digitale. C’est ce que Bill Gates a appris à ses
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dépens, lui qui l’avait annoncée en 1995 pour le secteur bancaire, avec l’explosion
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technologique qui prévalait à l’époque (celle de la naissance de la banque en ligne). Les
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banques sont toujours là, mais pas celle que Microsoft prévoyait alors de lancer.
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Les agences de Bank of America en chute libre au fur et à mesure de l’adoption de la banque en ligne sur mobile par les
clients finals. Ceci dans un pays où la tendance a été à la création d’agences il y a encore peu71.
Les banques, en effet, malgré les prédictions de l’homme le plus riche du monde, ont su
passer le cap, et même surmonter les crises financières successives, notamment en
France. Vingt ans plus tard, la majorité des clients de la banque s’est habituée à utiliser
les canaux digitaux pour communiquer avec son banquier. Hormis les plus démunis – et
même c’est déjà démenti par le succès du compte Nickel72 – les clients de la banque
désertent en masse les points de vente et réclament un niveau de conseil et
d’accompagnement qui pousse les institutions financières à se réinventer, sans qu’elles
sachent toujours comment faire. Cette nouvelle exigence est bien la même que celle
soulignée, sans doute trop maladroitement et agressivement, par Bill Gates en 1995.
L’exigence est là, plus que jamais présente et impérieuse, mais il faut éviter les jugements
à l’emporte-pièce qui ont souvent les effets inverses de ceux que l’on escompte : plus
vous dites à un malade qu’il mourra un jour, moins il a envie de changer ses habitudes
alimentaires. C’est un paradoxe humain dont il faut tenir compte.
Se transformer en quoi ? Et pour quoi faire ?
Si vous êtes convaincus, et c’est la première étape, que la transformation digitale, avec
les nuances que nous venons d’évoquer, est nécessaire pour que votre entreprise soit
plus efficace, plus réactive et plus présente auprès de vos clients, reste à savoir comment
s’y prendre pour la réussir.
Etre une entreprise digitale ne se décrète pas, cela se démontre sur le terrain
Devenir une entreprise digitale n’est pas un but en soi. Mis à part les entreprises dont la
raison d’être est de vous vendre une transformation digitale (et encore, il faut demander à
vérifier sur le terrain si leur propre transformation est réelle), ce qui fera de vous une
entreprise performante sera votre utilisation des technologies digitales pour atteindre de
véritables objectifs métiers.

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Les bonnes mises en œuvre de la digitalisation des entreprises sont celles où la technologie se met au service du business
et non l’inverse. N’en concluez pas pour autant que l’absence de savoir-faire technologique est une garantie de succès.

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Une démarche, ni descendante, ni montante : la complémentarité des extrêmes
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Un des points les plus importants, c’est bien-sûr la qualité de l’approche de cette vision
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digitale, mais surtout l’appréhension et la compréhension de sa mise en œuvre. D’aucuns


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pensent qu’il s’agit essentiellement d’un travail descendant (le comité de direction décidera
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pour tous), d’autres que le miracle viendra de la « génération Y », à laquelle on associe


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tant de fantasmes.
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Il ne faut pas attendre de miracles, il suffit de s’appliquer et de s’impliquer dans la mise en


œuvre. La réalité est toute autre : la bonne démarche consiste en une connexion
permanente entre innovation montante et structuration descendante.
C’est cela, la transformation digitale : un aller-retour entre ce qu’offre une technologie
digitale (le champ des possibles), et auquel nous n’aurions pas forcément pensé sans
l’existence révélatrice d’un objet technologique, et les objectifs économiques qui
correspondent à une stratégie. Ce n’est ni une démarche descendante—comme c’est
cependant souvent décrit—qui définit une stratégie in abstracto, ni un abandon sans
restriction à la technolâtrie, l’adoration de la technologie pour la technologie.
La véritable transformation digitale fait bien appel à ces deux éléments, apparemment opposés, et pourtant
complémentaires.

Se transformer : en quoi, vers quoi, pour quoi faire ? Définir son but
À tout moment du projet, la démarche de transformation digitale doit être ramenée à la
question fondamentale de savoir comment et dans quelles circonstances la -technologie
digitale pourra—ou non—contribuer aux objectifs suprêmes de l’entreprise, lesquels
pourront être de soutenir le cœur de métier (niveau 1), d’étendre ce cœur de métier, de le
développer et de le faire évoluer (niveau 2), ou enfin de sortir du cœur de métier et de
proposer des options nouvelles propres à faire évoluer (transformer) l’entreprise au-delà
de son activité (niveau 3).

Les 3 niveaux de la transformation digitale


Cette transformation pourra ensuite choisir plusieurs voies : transformation du cœur de
l’entreprise, acquisition ou absorption, « acqui-hire73 », voire spin-off d’une activité
innovante actuelle hors du cœur de métier (éventuellement en vue d’une réintégration ou
non au cœur de l’entreprise en cas de succès).

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5 conseils pour réussir votre transformation digitale
De nombreux obstacles risquent d’apparaître sur la route de la transformation digitale.
Avant de vous lancer, voici 5 conseils pratiques que nous vous donnons, et qui vous
permettront de mettre toutes les chances de votre côté.
Conseil n°1 : soyez en veille permanente sans être aveuglé par la technologie
Réussir sa transformation digitale, c’est être en prise sur les nouveautés du domaine
digital. Il ne faut cependant pas être aveuglé par les innovations technologiques. Au
contraire, il convient de faire la différence entre les fonctions utiles et les gadgets, celles
qui vous seront nécessaires, et celles dont vous pourrez vous passer ; les effets de mode
et ces innovations qui vous permettront un véritable effet levier. Pour ce faire, vous devrez
vous former et utiliser votre jugement, et si nécessaire, vous faire accompagner par un
professionnel du domaine. La pertinence d’une technologie par rapport au métier n’est pas
seulement une question de connaissance ; celle-ci nécessite des allers retours
permanents entre business et technologies.
Conseil n°2 : « connais-toi toi- même »

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C’est là probablement le plus important des critères de succès de la transformation
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digitale : la connaissance de l’entreprise elle-même, de ses compétences, de ses savoir-
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faire, de ses valeurs, de sa capacité à innover et à se dépasser. C’est cette connaissance
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qui permettra à terme de faire évoluer l’entreprise vers un statut nouveau, plus que la
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simple observation des « bons exemples » qui ne sont jamais réplicables à l’identique.
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Conseil n°3 : auditez votre Marketing et fixez vos objectifs « SMART »


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Tout projet de transformation digitale commence par un audit de votre marketing : ses
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chiffres d’affaires, ses produits, ses marges, ses clients, ses marchés, son capital digital
et social et sa communication. Ces éléments seront indispensables pour déterminer le
chemin de l’évolution de l’entreprise, depuis un statut A vers un statut B. Cet audit vous
permettra de vérifier des hypothèses, de souligner les contradictions, de fixer des
objectifs qui doivent rester « SMART » c’est-à-dire : Simples, Mesurables, Atteignables,
Réalistes, et Temporels. La démarche de transformation digitale se heurte de façon quasi
systématique à l’absence des données de base qui permettent de poser le jugement sur
des faits et des certitudes – pourtant faciles à obtenir – et non sur des hypothèses
personnelles et fantaisistes.
Conseil n°4 : oscillez sans arrêt entre méthode descendante et montante.
Fixer un cap sans comprendre les enjeux de sa mise en œuvre est inutile est inefficace.
L’inverse également. La bonne méthode consiste, en matière de transformation digitale, à
passer sans arrêt d’un état stratégique à une réflexion de mise en œuvre. Procéder par
essais et erreurs, corriger, avancer et adapter. Évitez les positions trop rigides qui vous
enfermeront dans des décisions qui ne sont pas toujours bonnes. En même temps,
laissez-vous surprendre, c’est par les essais et par les tentatives que vous permettrez
l’innovation. Nous en reparlerons dans la cinquième partie de ce livre.
Conseil n°5 : organisez le chaos
Trouvez un vrai porteur de changement de votre transformation digitale. Celui-ci où celle-ci
doit être non seulement au fait des technologies, de l’organisation, des objectifs de
l’entreprise, de ses métiers, et savoir passer sans cesse du marketing à la technologie et
vice versa. Mais ce n’est pas tout. L’équipe projet devra également posséder de solides
compétences en termes de conduite du changement, qui sont essentiellement basées sur
la connaissance humaine et la capacité à faire travailler les gens ensemble. Ce n’est qu’à
ce prix-là que la formation digitale pourra devenir une réalité concrète de l’entreprise.

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Transfo digitale vs. start-up
On entend souvent parler à tort et à travers des start-up, notamment dans les grandes
entreprises : il est vrai que c’est un sujet à la mode. Pourtant, une start-up n’est pas une
petite entreprise. Il faut bien faire la différence entre les deux formes d’entreprenariat qui
n’ont pas grand-chose à voir entre elles. Tous les entrepreneurs ne sont pas des « start-
uppers » et toutes les start-up ne sont pas propres à devenir des entreprises
traditionnelles. Il s’agit d’une forme bien particulière d’entreprise qui répond à des règles
spécifiques. Pire encore, on entend souvent citer des exemples de transformation digitale
comme « Airbnb ou Uber ». Parlez-nous de transformation digitale, il y aura toujours un «
expert » qui vous expliquera comment Uber a procédé.
La chose la plus importante à comprendre, c’est qu’Uber ne se transforme pas
digitalement. Aucune de ces start-up ne se transforme digitalement : elles sont toutes
nativement digitales. La transformation digitale s’adresse donc aux entreprises établies.
Enfin, dernier point et non des moindres, la transformation, qui, répétons-le, n’est pas un
changement, ne peut pas être digitale, pour une entreprise qui n’est pas dans ce secteur.
On ne peut parler que de transformation avec du digital. Cette confusion est faite très

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souvent. Les conséquences peuvent être très graves pour les entreprises qui la font, car
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elles finissent par jouer avec de la technologie et à sortir de leur domaine de compétence,
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voire à oublier leur métier d’origine.
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Commençons par définir ce qu’est et ce que n’est pas une start-up


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« Une start-up est une entreprise qui travaille à la résolution d’un problème quand cette
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résolution n’est pas évidente et que le succès n’est pas garanti » explique Neil Blumenthal,
cofondateur et co-CEO de Warby Parker74. En général, on parlera donc plutôt de start-up
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dans le domaine de la technologie, qui ne se limite pas à la technologie informatique. On


pourra notamment intégrer, c’est courant dans la Silicon Valley, les start-up de la biotech,
qui vont lancer de nouveaux produits ou solutions dans le domaine de la biotechnologie.
On trouve également beaucoup de start-uppers dans le domaine de la pharmacologie :
les grands groupes préfèrent laisser la R&D se développer dans de petites sociétés plus
agiles et plus aptes à prendre des risques, pour les racheter ensuite, ce qui coûte moins
cher que de développer les nouvelles molécules soi-même. Ceci étant, une grande
majorité des start-up auxquelles on fait référence quand on évoque ce terme, évoluent
dans les secteurs de la haute technologie, de l’informatique ou des communications.
Une petite entreprise (et le terme « petit » varie d’un pays à un autre et d’une définition à
une autre) est quelque chose de bien différent. Il s’agit « d’une entreprise indépendante,
soit dans la forme de son actionnariat, soit dans la façon dont elle est opérée, qui est
limitée en termes de taille et de chiffre d’affaires. Cela peut concerner toutes petites
entreprises notamment dans le domaine de l’artisanat ou du commerce, mais aussi des
entreprises du secteur manufacturier dont le nombre d’employés serait inférieur à 500,
par exemple. Cela peut concerner également la petite entreprise de conseil jusqu’à 10 ou
15 personnes par exemple. Et il n’y a pas de jugement de valeur derrière ce terme de «
petite entreprise » (nous sommes d’ailleurs tous les deux patrons de petites entreprises)
mais il faut comprendre qu’une petite entreprise n’est pas une start-up et réciproquement.
Qu’est-ce qui de ce fait, caractérise une start-up ? Prenons, pour éclaircir ce point, la
définition de la Small business association : « Dans le monde des affaires, le mot « start-
up » signifie bien plus qu’une société qui se crée75. Le terme de start-up est aussi associé
à celui d’une entreprise qui est essentiellement orientée vers la technologie et a un
potentiel de croissance élevée. Les start-up font face à des défis uniques, notamment en
termes de financement. Ceci du fait que les investisseurs recherchent les potentiels les
plus élevés de retour sur investissement tout en jaugeant leurs risques76 ».
Revenons sur ces différents points avec plus de détails.
Première différence, la croissance
Dans le domaine des start-up, la croissance est essentielle77. Certes, dans
l’entreprenariat en général, c’est également le cas. Mais dans le cas d’une start-up, ce
point devient primordial. D’abord croître, le reste viendra après. On a même inventé un
terme pour désigner cela : le « Growth Hacking » 78. Pour résumer, la croissance est une
obsession pour une start-up. Dans la plupart des cas, elle va chercher notamment à

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multiplier le nombre d’utilisateurs ou d’abonnés avant, bien avant, de réaliser des ventes

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ou de dégager des profits. Notamment quand le produit est offert dans un mode «
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Freemium » 79 (l’ouverture du service est gratuite, mais on va offrir des services premium
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au fur et à mesure de l’utilisation du service). Il faut donc à tout prix grossir, c’est ce qui
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fait la valeur d’une start-up. Si l’on prend l’exemple de Twitter, bloqué à 300 millions
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d’utilisateurs actifs et qu’on compare sans arrêt, et à tort d’ailleurs, à Facebook (1,5
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milliards et plus utilisateurs), l’absence de croissance en nombre d’utilisateurs est


rédhibitoire. Autre exemple, Blablacar continue à engranger des utilisateurs, à ouvrir des
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pays au fur et à mesure de son développement, ce qui grignote progressivement la marge


qui pourrait être obtenue si l’entreprise cessait de croître.
Mais dans la logique d’une start-up, cette croissance ne s’arrête jamais. L’objectif est de
montrer qu’elle est toujours potentiellement importante. C’est que l’objectif de marché est
différent. Amazon, par exemple, a vécu pendant de nombreuses années sans générer de
profits. Cela lui a permis de prendre des parts de marché conséquentes au point de
concurrencer les leaders de la distribution dans chacun des principaux pays où elle opère.
La marge est venue plus tard, notamment grâce à la branche B2B qui croît très vite et est
largement et rapidement profitable.
Finis les ricanements, Amazon est sorti du rouge et a préempté le marché (le géant de Seattle, Washington réalise plus
de revenus que les 20 premiers sites de e-commerces suivants). Les analystes financiers en sont à argumenter pourquoi
il faut choisir Walmart plutôt qu’Amazon80, mais pour combien de temps ?81

Deuxième différence, le risque


Ceci ne veut pas dire bien entendu qu’entreprendre n’est pas risqué, si l’entreprise créée
est industrielle ou dans le secteur des services. Il est bien entendu qu’entreprendre
présente toujours des risques. Mais dans le domaine des start-up, ce risque est magnifié

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du fait du positionnement technologique et innovant. Investir dans une start-up, pour un
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investisseur, représente toujours un risque bien supérieur à celui de l’investissement dans
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une entreprise normale du fait de cette incertitude autour de la technologie et de sa future
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réussite sur le marché.


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Troisième différence, le financement


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Alors qu’une entreprise traditionnelle, même petite, va tenter de se financer soit par
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investissement privé, soit par emprunt, soit par autofinancement, une start-up va toujours
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chercher à « lever des fonds ». Pas forcément tout de suite, mais la question va
forcément se poser à un moment ou à un autre. Il faut bien financer la fameuse
croissance que nous avons décrite ci-dessus.
Parfois, cela peut être spectaculaire. Citons comme exemple la start-up franco-espagnole
Cornerjob qui offre des services de mise en relation entre employés et employeurs pour
les cols bleus. En un an et demi à peine, ses créateurs ont réussi à lever 35 millions
d’euros. Les montants levés sont parfois énormes car les investisseurs (business angels,
fonds d’investissement, etc.) vont faire un pari sur l’avenir de la réussite du service ou de
la technologie. C’est pour cela que la croissance est si importante. Réaliser une énorme
croissance va permettre à un investisseur de penser à son retour sur investissement, et
c’est ce qui nous amène à la quatrième différence des start-up par rapport aux petites
entreprises.
Quatrième différence, la finalité et la stratégie de sortie
L’objectif sous-jacent à la création d’une start-up n’a pas grand-chose à voir avec celui de
la création d’une entreprise classique. Alors qu’une entreprise va chercher à être rentable
et générer un bénéfice (c’est le cas les entreprises qui cherchent à rester saines), une
start-up va essayer d’attirer les investisseurs au travers des montants de croissance
réalisés et attendus, et de privilégier une « stratégie de sortie » (« exit strategy » en
anglais). Celle-ci sera probablement un rachat par une autre entreprise. Dans la Silicon
Valley, c’est devenu quasiment une plaisanterie, repérer ces start-up qui cherchent à se
créer uniquement pour se revendre et « faire la culbute » (« Flip it » en anglais). Bien
entendu, il faut ici comme ailleurs éviter les excès. Les bonnes start-up sont celles qui
génèrent des résultats et qui offrent des perspectives de croissance. Mais la rentabilité
n’est pas une exigence immédiate.
On pourrait également citer une cinquième différence qui est celle du recrutement des
talents, car souvent la réussite d’une start-up dépend de la qualité de son développement
et de sa technologie. De ce fait, Il existe une course à la recherche de talents, notamment
en termes de programmation. C’est ce qui explique que certains profils en développement
dans la Silicon Valley peuvent atteindre des sommes proches des salaires des cadres
supérieurs en France (plus de 100 000 € par an pour un développeur PHP).

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Les salaires des programmeurs se sont envolés ces dernières années dans la Silicon Valley. Mais même comme cela,
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ce ne sont pas eux qui sont les mieux payés car les salaires autour de San Francisco sont astronomiques 82. Il n’est pas
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rare de voir des start-up californiennes délocaliser leur développement à … Paris, c’est beaucoup moins cher.
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Maintenant que nous avons expliqué de façon plus précise ce qu’est et n’est pas une
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start-up, voyons la transformation digitale et comment celle-ci se compare avec la logique


des start-up.
D’une part, le terme de transformation digitale ne peut s’appliquer qu’à des sociétés du
secteur traditionnel. Une start-up ne se transforme pas digitalement. Elle est nativement
digitale. On ne peut donc prendre une start-up comme exemple d’une transformation
digitale réussie.
Pour les autres entreprises, c’est une autre histoire. Le digital, s’est souvent immiscé dans
la réalité de leur vie de tous les jours, comme nous l’étudions dans la 2e et la 3e partie du
livre, dédiées aux différents secteurs et aux différents métiers. La question n’est pas de
savoir si une banque, par exemple, doit devenir « digitale », mais de savoir comment les
technologies digitales peuvent améliorer la relation client à toutes les étapes du parcours
client (avant, pendant et après la relation client). C’est-à-dire, comment le digital va me
permettre de mieux renseigner mes clients, mieux les informer, mieux les inspirer, mieux
les rencontrer83, mieux les servir, en différents endroits et à des horaires étendus etc.
Comme on peut le voir avec l’exemple que nous avons cité précédemment, la plupart de
ces choses existent dans les banques. Il n’y manque pas de technologies digitales. Au
contraire, elles sont même souvent pléthoriques. Parfois même, on trouve certaines
applications bancaires de très bonne facture (pour comparer beaucoup de banques les
unes aux autres, il n’est pas rare de voir des institutions traditionnelles dont les applicatifs
sont meilleurs que certaines banques « Pure Player »). Le véritable enjeu de la
transformation digitale n’est pas dans l’accumulation des technologies, mais dans la
justesse de leur utilisation et la qualité du service rendu au client.
En bref, le terme de « transformation digitale » stricto sensu est impropre. On devrait
parler plus précisément de transformation avec le digital, car cette expression inexacte
tend à renforcer l’impression que la mise en œuvre des technologies est autosuffisante.
Or, c’est une des leçons que nous avons apprises sur le terrain, à partir des nombreuses
transformations digitales que nous avons menées : plus on connaît une technologie, et
plus on la maîtrise, plus on est capable de la mettre au service d’un but plus large, sans la
déifier, ni en avoir peur. Ces deux écueils principaux sont ceux rencontrés le plus
communément dans la transformation digitale des entreprises, souvent la traduction d’une
peur aiguë de la technologie qui tend soit à en exagérer l’importance, soit à la minimiser
de façon indue.
Forts de ces constats et de ces définitions, nous sommes capables désormais de

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naviguer un peu plus en avant dans la transformation digitale de nos sociétés et

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également de faire la différence entre une start-up et une entreprise, distinction loin d’être
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superflue.
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Digital Me Up - Qu’est-ce qu’un « Growth Hacker » et quel
est son rôle ?
Par Alain Perrier
https://goo.gl/T2vBPz

Qui est concerné par le « Growth Hacking » ?


Le « Growth Hacking » est une discipline principalement destinée aux start-up, mais les
marketeurs et les experts des médias sociaux peuvent aussi s’en servir pour de plus
grandes entreprises. Tentons de clarifier, dans les lignes qui suivent, ce qu’est réellement

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le « Growth Hacking », et montrons que ces techniques ne sont pas magiques, sont aussi

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efficaces que l’huile versée sur le feu, et sont essentielles pour une start-up qui ne peut se
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contenter de s’appuyer sur sa communication pour croître. Il faut aussi garder à l’esprit
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que seules les start-up qui peuvent se targuer d’un excellent « product market fit »
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devraient en faire usage84.


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Qu’est-ce qu’un « Growth Hacker » ?


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Dit simplement, le « Growth Hacking » est une technique utilisée par certaines start-up
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pour focaliser leur stratégie sur la croissance. Un « Growth Hacker » ne pense qu’à une
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seule chose, toute la journée : acquérir de nouveaux utilisateurs. Dans une grande
entreprise déjà installée, en revanche, on attend du « Growth Hacker » qu’il développe la
rétention et la loyauté des clients.
Etre un Growth Hacker requiert plusieurs compétences. Il faut un bon background
technique, une approche de l’expérience utilisateur, et des qualités de communicant. Un
Growth Hacker se situe à mi-chemin entre le marketing, les ingénieurs, l’équipe de data-
analystes, et l’équipe de production (y compris le support client).
Un Growth Hacker doit également être méthodique. Pour être efficace, il doit développer
ses propres procédés, et s’appuyer sur l’automatisation des tâches autant que possible.
La croissance doit être évolutive, parce qu’au moment où il devra s’atteler à différentes
tâches, il ne pourra pas perdre en efficacité sur celles les plus répétitives.
Que fait-il pour atteindre ses objectifs ?
Comment expliquer des réussites comme Dropbox, Twitter et Uber ? Quel était alors le
rôle de l’équipe de Growth Hacking ? Prenons l’exemple de Dropbox, qui a mis en place
un programme de cooptation très efficace pour récupérer de nouveaux clients (500Mo
étaient offerts par client coopté). Leur stratégie était intelligente, parce qu’elle offrait
l’opportunité de disposer d’un espace de stockage gratuit de taille décente. Les
utilisateurs n’avaient qu’à inviter leurs amis pour disposer de plus de Mo, s’ils en avaient
besoin. C’est ainsi que Dropbox a atteint son objectif de croissance : acquérir
régulièrement de nouveaux utilisateurs.

De 0 à un demi-million d’utilisateurs en 7 ans !

Intégrer la culture du Growth Hacking


La culture du Growth Hacking a pour corollaire la culture de l’impatience. Un Growth
Hacker doit développer des relations fortes avec toutes les équipes, car son rôle dépend

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de nombreuses compétences, et donc d’un haut niveau de coordination. Il doit aussi
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pourvoir s’appuyer sur l’équipe de direction pour créer un esprit start-up, et bénéficier d’un
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excellent niveau d’engagement. Les équipes doivent être aptes à se lancer des défis, et
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se motiver à l’idée d’accomplir leurs objectifs. Le style de management doit être plus
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porté vers la démocratie, et influencé par des objectifs clairs (le point le plus important,
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probablement).
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Définir des objectifs majeurs


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Le Growth Hacker doit définir des objectifs clairs, identifier les bons systèmes de mesure
et s’y tenir, et mettre en place tous les moyens nécessaires (et possibles) pour y parvenir.
Si on reprend l’exemple de Dropbox, il montre aussi qu’un Growth Hacker doit faire preuve
d’imagination et de créativité, et ne pas hésiter à sortir du cadre pour se différencier et
battre ses concurrents.
Définir la zone de jeu
Les Growth Hackers doivent se concentrer sur la catégorie de clients qui rapportent le
plus de profits, c’est à dire ceux qui sont prêts à être convertis. Ils doivent cibler avec
précision, pour obtenir un bon retour sur investissement. C’est pourquoi ils cherchent
avant tout les adopteurs précoces.
Ils peuvent collecter des données avec des techniques de base :

Durant les premières phases, en identifiant des hashtags sur Twitter, en lançant
des enquêtes en ligne, en paramétrant des pages d’atterrissage, ou des comptes
sur les médias sociaux
À un stade plus avancé, en analysant les données collectées, via le CRM, Google
Analytics ou tout outil de « tracking » de l’expérience utilisateur.

Une fois que toutes les données ont été collectées et analysées, ils pourront enfin mettre
en place une stratégie expérimentale afin d’acquérir de nouveaux clients.
Expérimentation et itération
Les Growth Hackers doivent se concentrer sur des résultats rapides et concrets, mais
aussi sur des résultats qui leur permettent d’ajuster leur stratégie. Ils évoluent dans des
environnements agiles, car il n’y a pas de formule magique pour mettre au point une
stratégie de Growth Hacking parfaite. C’est pourquoi les Growth Hackers passent leur
temps à faire des expériences pour trouver par tâtonnement la solution optimale, qui
pourra être remise en cause quelque temps plus tard.
Comme évoqué plus haut, les outils analytiques et l’esprit d’analyse sont essentiels. C’est
pourquoi les Growth Hackers font un usage régulier de techniques de tests A/B. Cela leur
permet de converger vers le meilleur choix, sur une base expérimentale. Cela consiste,
par exemple, à tester deux versions d’une même page d’accueil d’un site, pour choisir

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celle qui a significativement le meilleur taux de conversion, et le taux de rebond le plus

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bas85. On peut adapter cette approche à de nombreuses situations. Dans tous les cas,
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cela permet d’effectuer le nombre optimal de retours en arrière pour prendre la décision
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la plus efficace.
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Un Growth Hacker, en quelques mots


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Un Growth Hacker travaille sur 3 axes principaux :


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1. Définir des buts et des indicateurs clés (Key performance indicators, ou KPI)
2. Identifier les leviers d’une croissance soutenue (médias sociaux, RP, et même
événementiel)
3. Explorer les données (celles des clients existants tout comme celles des futurs
clients possibles).

Il veille à développer une machinerie de Growth Hacking qui soit :

Evolutive (scalable en anglais)


Prédictible
Répétable

Et pour atteindre ses objectifs, son travail de tous les jours implique :

D’organiser des séances de brainstorming


De définir des priorités
De faire des tests
D’implémenter des choix
D’analyser les données collectées
De systématiser les tâches les plus répétitives

Pour finir, je tiens à préciser qu’il n’est pas facile de définir exactement le travail d’un
Growth Hacker, principalement parce que son job étant focalisé sur la génération de
business, sa forme dépend de la structure de l’entreprise, de la diversité des
compétences de l’équipe, des objectifs business, de la maturité de l’entreprise et même
du budget dont il ou elle dispose. L’évolution d’un rôle de marketeur vers un rôle de
Growth Hacker fait partie des tendances à ne pas négliger, de nos jours, en raison du
grand nombre de start-up qui voient le jour et de la demande qu’elles suscitent du fait de
leur besoin de traction86.
Sans doute du fait du film et de son caractère romancé, on oublie de dire que Turing a repris les travaux sur les bombes
cryptologiques, initiés par les Polonais et interrompus par l’invasion allemande de 39. http://bit.ly/2dpONmW. Le terme
original est Bomba Kryptologiczna (http://bit.ly/bombapolonaise)

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bluesound.com sur la base de technologie NAD

i
L’ordinateur du XXIe siècle, Scientific American, Mark Weiser http://bit.ly/2ejRnB3
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D’autres comme Rafi Haladjian l’ont renommé « pervasive computing », mais c’est le même concept.
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http://amonboss.com/slides2013
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Une nomination pour 3 mois, on se demande bien ce que quelqu’un d’aussi doué peut changer aussi rapidement à
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l’échelle d’un pays en si peu de temps : https://fr.wikipedia.org/wiki/Tariq_Krim


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Player Piano, Kurt Vonnegut, 1952


de

La communication digitale expliquée à mon boss, Editions Kawa, 2013


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2016 Digital Yearbook, Simon Kemp : http://bit.ly/digyear2016


Ibid.
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Par accord d’association signé avec l’Union Européenne en vue de l’intégration de ce pays, un des plus pauvres d’Europe
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depuis la fin de l’Union Soviétique dont il était un des principaux pourvoyeurs de vins, de légumes et de fruits.
À lire pour comprendre ce point crucial : http://bit.ly/knowdifference « nous sommes toujours incapables de discerner la
transformation du changement » par Ron Ashkenas sur le site de la Harvard Business Review, un article fondamental de
2015.
Dès 1972 McKenna décrivait le micro-ordinateur par ses usages. Cette démarche était absolument révolutionnaire à
l’époque, car elle forçait les marketeurs, et même les ingénieurs, à penser au-delà des simples caractéristiques du
produit. Si cela peut paraître banal aujourd’hui, force est de constater que nombre de services R&D ont encore bien des
soucis pour dépasser ce stade et aller au-delà de la simple incantation aux usages.
Déjà 4 % de pénétration du e-commerce dans la grande distribution alimentaire grâce à ce nouveau canal en 2015 selon
le rapport Fevad 2016, ce qui est un décollage remarquable sur un secteur qui se cherche depuis longtemps (Telemarket,
qui a fermé ses portes en 2013, a mis 30 ans à essayer d’imposer un modèle de vente en ligne jusqu’alors peu adapté à
la demande des consommateurs).
Pour le dernier rapport de la FEVAD paru en juillet 2016 : http://bit.ly/fevadclés16.
Ancien patron de labo du PARC (Palo Alto Research Center de Xerox) qui est à l’origine du concept de « ubiquitous
computing » et qui a littéralement rendu possible l’informatique mobile telle que nous la connaissons aujourd’hui, dès la
moitié des années 80. Voir aussi le chapitre Le digital aujourd’hui et demain, page 26.
Cf. http://bit.ly/Roland-berger-google-2017
Voir http://socialmedia.org/disclosure pour de plus amples détails. Il y a quelques années, les auteurs de cet ouvrage ont
contribué à cette charte en l’adaptant au contexte et la langue française.
L’innovation destructrice, Plon, 2014
Cf. http://www.coe.gouv.fr/Detail-Nouveaute.html % 3Fid_article=1347.html
Reste néanmoins ce nécessaire débat philosophique sur la place du progrès, si efficacement résumé par la conclusion
de Ravages par René Barjavel. Mais il s’agit d’un débat bien plus large que celui du numérique, et qui lui a largement
préexisté.
Technologies de l’information et de la communication
« Marketing is everything, everything is marketing » dans un article de la Harvard Business Review de 1991 qui débute
ainsi : « les années 90 sont celles du client et ceci est une excellente nouvelle pour les marketeurs ». McKenna était le
spécialiste de la petite phrase. Parmi ses aphorismes géniaux citons aussi « il faut penser aux clients de ses clients » («
Think about your clients’ clients ») qui fut un des mots d’ordre d’Unisys dans les années 90 quand Yann Gourvennec y
officiait.
HyperText Transfer Protocol ou protocole de transfert hypertexte en français, un nouveau protocole, basé sur un langage
(le html), lui-même hérité et bricolé à partir d’un autre langage, le SGML
Pour comprendre la signification de cette locution issue du Moyen Âge, lire http://bit.ly/2iQY2nY Le grand bestiaire de la
philosophie, par Christian Godin (2016 éditions du Cerf)
Sur ce point, voir le blog de Visionary Marketing (http://bit.ly/deconnectee) l’article de 2012 sur le rapport Havas concernant
la fracture numérique intitulé « la France des déconnectés ». 4 ans après cette étude est sans aucun doute dépassée
même si la France a ses cohortes de résistants (http://bit.ly/figarodec).
Le terme anglais utilisé sur les réseaux sociaux et dans le monde l’Internet pour désigner les débutants, ceux qui sont
nouveaux (d’où le terme) dans le domaine.
D’ailleurs, stricto sensu, il n’y a pas d’experts du digital, en tout cas est-ce un vocable que nous avons récusé tout au long
de nos carrières et que nous avons soigneusement évité d’utiliser dans nos précédents ouvrages. Comment peut-on être
expert d’un domaine aussi changeant, aussi subdivisé en autant de micro spécialités. Tout en sachant qu’en même
temps, les sujets digitaux exigent de travailler beaucoup et de se remettre en question souvent et que l’on ne peut
s’improviser spécialiste de ce domaine. Il s’agit plus en fait d’une question d’humilité et de reconnaissance de la nécessité

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de l’amélioration permanente.

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Voir, à ce sujet, le marronnier annuel de Visionary Marketing dans sa version 2015 « Les digital natives n’existent (toujours)
pas » à l’adresse http://bit.ly/
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Et nous l’évoquerons tout au long de ce livre qui n’est qu’une démonstration de ce phénomène, dans tous les secteurs,
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tous les métiers, tous les pays.


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On raisonne ici sur la masse de l’étude et non au cas par cas et il existe toujours des exceptions. Ce sont d’ailleurs
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souvent ces exceptions qui font la une des journaux, ce qui paraît fort logique, mais qui donne du fait une mauvaise
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impression de l’ensemble.
Cf. La tribune de Stanislas Magniant sur le blog de Visionary Marketing « Patrons, réfléchissez avant de Twitter »
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http://bit.ly/digital-2017-patrons-tournez
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Voir l’interview de notre ami Philippe Pinault, grand défendeur de ce système de management http://bit.ly/2jck17K
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Reinventing organizations : a guide to creating organizations inspired by the next stage of human consciousness, Frédéric
Laloux, Nelson Parker, 2014
Disponible ici : http://www.earlystrategies.com/research/
Cette traduction du célèbre dictionnaire Merriam Webster’s est dédiée aux opposants du terme « digital » en français, afin
de leur montrer qu’en anglais également, digital veut bien dire « doigts » et aussi numérique ; c’est bien normal car on
apprend à compter sur ses doigts.
La biographie de Louis Pouzin, Polytechnicien né en 1931, sur Wikipédia http://bit.ly/2jczS6d
Source : http://bit.ly/digital-2017-cmo
Voir https://www.youtube.com/watch ? v=xsWbECkVqgI
Cf. http://bit.ly/digital-2017-mckinsey
Dixit Brian Solis dans http://bit.ly/digital-2017-brian-solis
Voir ici les chiffres-clés du digital, constamment réajustés http://digitalisations.com/chiffres-cles/
Une annonce parmi d’autres, ce n’est pas la seule http://on.rocne.ws/2jcxVH2
La nouvelle plateforme pour photographes digitaux de Kodak http://zd.net/2jcpVFO. Qui sait, du fait de la dégringolade de
Yahoo ! et sa disparition annoncée en tant que marque (http://engt.co/2jcDPbg), peut-être que Flickr laissera sa place aux
anciens ?
« Darty réalise 50 % de son CA en click and collect » http://visionarymarketing.fr/blog/2016/09/click-collect/
Source Clubic (2013) http://bit.ly/2dqVOUE sur la base d’une étude menée par Mediametrie et NetRatings auprès de 3 200
personnes
Selon le rapport annuel de l’Idate de 2012
Listing de 2016 fourni par Deloitte Global Powers of Retailing 2016. Liste complète basée sur l’année fiscale 2014 et
jusqu’à juin 2015 (à l’exclusion du B2B) http://bit.ly/2dqZFBh
Cf. ce passage dans l’article dédié à Darty sur l’utilisation des tablettes dans le magasin pour rassurer le client. Ibid.
The Guardian, août 2016, http://bit.ly/2elZqNV « Bank branch closures trigger high street alarm bells ». Voir aussi la BBC
en avril 2016 : http://www.bbc.co.uk/news/business-36268324 car le phénomène s’est accéléré dans l’année précédente :
« Banks close more than 600 branches over the past year »
http://thefinanser.com/2013/10/this-bank-branch-is-dead-no-its-not-its-uh-resting.html/ et lire aussi cet article des Echos
de mars 2016 « Coup d’accélérateur sur la fermeture des agences bancaires en France » http://bit.ly/2drIYFB
Cf. cet article http://bit.ly/2elZflM « le Crédit Agricole accélère sa mutation » et les autres billets du blog de Visionary
Marketing sur ce sujet http://visionarymarketing.fr/blog/ ? s=banque.
Pour ces points nous vous renvoyons à nos ouvrages précédents « les médias sociaux expliqués à mon boss » (2011) et
« la communication digitale expliquée à mon boss » (2013).
Voir à ce sujet aux Editions Kawa, Nardin & Gourvennec, « Du bruit au signal : manifeste pour la refondation des études
sur les médias sociaux » : http://amzn.to/2elZqNR
À lire sur The Motley Fool : « Chart : Bank of America Is Closing Branches as Mobile App Users Grow » «
http://bit.ly/2elXKDX
La Banque Nickel : 400 000 clients en 4 ans, Le Télégramme de Brest http://bit.ly/2em18ia
Une des tendances de la Silicon Valley : https://www.cooleygo.com/acqui-hire-basics/
Forbes « What is a start-up » http://bit.ly/2e7Wy4t
Il ne faut pas l’oublier, le terme de start-up, ou de « jeune pousse » en français est essentiellement associé au fait que
l’entreprise est en train de se créer et de décoller. Au-delà de l’étymologie, ce que la SBA essaie d’expliquer est que ce
mot signifie bien plus.
Cf. le site de la Small Business Association (SBA), sorte de CGPME à l’américaine http://bit.ly/2e84Ed5
Cf. Les start-up expliquées à mon boss, Alexandre Steiner et Matthieu Vetter, Editions Kawa, 2016
Cf. page 84
Cf. page 217

m
Pourquoi il faut choisir Walmart plutôt qu’Amazon. Famous last words. https://yhoo.it/2joBpnq

i
Source : Business Insider http://read.bi/2joIR22
ss
Cf. cet article sur Qz.com : « Les employés les mieux payés ne sont pas les ingénieurs logiciels » http://bit.ly/2e8luc3
A
Il est encore des banques, et non des moindres, où prendre rendez-vous reste une opération dantesque, malgré, voire à
y

cause, des outils technologiques qui ont été plaqués sur des processus mal définis.
B

Pour une définition du « product market fit », voir cette interview d’Oussama Ammar https://www.youtube.com/watch ?
d

v=WkoYtenAZMs
de

Il s’agit du rapport entre le nombre de visiteurs qui quittent le site après avoir lu la page considérée et du nombre de
visiteurs qui sont venus visiter le site.
oa

Cf. l’excellent livre Traction : A Startup Guide to Getting Customers, Justin Mares & Gabriel Weinberg, S-curves
pl

Publishing, 2014
U
Le digital dans tous les secteurs
Il est 6h30, le réveil vient de sonner dans la chambre de Marie, qui ouvre péniblement ses
yeux embués. D’un effleurement, elle éteint la sonnerie du smartphone posé sur sa table
de nuit, et lance le programme « maison » de sa cafetière connectée. Après une rapide
toilette et un passage sur sa balance qui lui confirme une perte de quelques 300g depuis
sa dernière pesée, elle ouvre sa tablette pour écouter les informations du matin et se
renseigner sur la météo. Avant de partir au travail, elle vérifie le niveau de trafic en région
parisienne, et opte pour les transports en commun : ça tombe bien, l’application dédiée lui
annonce que son bus passe à la station en bas de chez elle dans 7 minutes exactement.
En chemin, elle pourra écouter de la musique en streaming, consulter des blogs ou chater
avec ses amies. Sa journée commence, qu’elle passera en conférence sur le Web, et en
formations à distance. Ses collègues vivent à six cents kilomètres de son lieu de travail,
mais ça ne la dérange pas pour autant, les outils collaboratifs fonctionnent à merveille.
À la pause déjeuner, profitant d’un break bien mérité, elle décide de réserver une place de
cinéma pour ce soir, en compagnie de Jules, avant d’aller dîner dans un restaurant du
quartier où elle réserve une table pour deux, via une autre application mobile. Et en

im
rentrant chez elle, ce soir, Marie veillera à bien recharger son ordinateur et son
ss
smartphone, dont le niveau de batterie, à 5 %, témoigne d’une journée bien remplie … et
A
sans câble de connexion.
y
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Ce descriptif de la journée presque imaginaire d’une jeune salariée de 2017 vous semble
d
de

anodin ? Imaginez-vous vingt ans plus tôt : rien de ce que Marie a vécu n’aurait pu avoir
oa

lieu. En deux décennies, nos mœurs ont radicalement évolué : le réseau, le mobile, les
applications, ont remplacé les interfaces traditionnelles que nous utilisions auparavant,
pl
U

comme le stylo, le papier, ou le téléphone fixe. Constamment connectés, nous avons


gagné en immédiateté, à défaut de gagner en efficacité. Le digital est bien partout, et
dans tous les secteurs. Pour vous en convaincre, nous vous proposons dans le chapitre
qui suit un panorama aussi large que possible de l’impact du digital dans de nombreux
domaines.
Le digital est dans tous les secteurs
Pour illustrer l’omniprésence du digital dans tous les secteurs, nous avons interrogé
Patrice François, pionnier du Web, cofondateur et Directeur Général de Digimind.
Vous avez cofondé Digimind en 1998 à Grenoble, quelle était la situation quant à
l’adoption du digital à cette époque ?
1998 correspond à une époque intéressante qui a permis à de nombreuses entreprises
de toucher du doigt le potentiel du digital. Ce fut l’année de la création de Google, des
premiers moteurs et annuaires de recherche (Altavista, Yahoo, Lycos), et l’avènement des
navigateurs Internet (Netscape, Internet Explorer, etc.) Les smartphones et les
applications n’existaient pas et le e-commerce en était à ses balbutiements.
Les entreprises ont utilisé les sites Internet comme des plaquettes animées permettant
une prise de contact par email, et l’on voyait les bannières publicitaires envahir
progressivement le Web. Nous étions alors loin des technologies de Marketing
Automation, de publicités ciblées, ou de l’analyse du parcours client digital.
Nous avons vu se développer l’actualité en ligne, issue de journaux traditionnels ou

m
d’entreprises, et vu apparaître les premiers forums de discussion (les forums NNTP) qui

i
constituaient les ancêtres des réseaux sociaux. ss
A
Dès l’an 2000, nos clients se sont mis à surveiller ces premiers flux d’information afin d’en
y

tirer de la connaissance pour diriger leurs activités. Ce fut la naissance de la veille sur le
B

Web et des outils de méta-recherche permettant de gagner du temps.


d
de

Depuis, le digital s’est beaucoup développé, quels sont les secteurs qui ont été les
oa

premiers à l’utiliser ?
pl

Dans notre domaine d’activité, nous avons tout d’abord travaillé pour les grandes
U

entreprises des secteurs de l’énergie, des télécoms, et de la santé. Le secteur de


l’énergie étant très international et multiculturel, on a vu éclore de nombreux projets de
knowledge management et des outils collaboratifs internes, qui ont été les précurseurs
des réseaux sociaux d’entreprise et des outils interactifs que l’on déploie aujourd’hui avec
ses clients, partenaires ou fournisseurs.
Pour le secteur des Télécoms, l’arrivée de la data et l’ouverture des marchés ont obligé
ces entreprises à conduire une transformation à marche forcée. Le digital s’est donc
révélé indispensable pour développer la relation client, pousser de nouvelles offres et bâtir
une machine de guerre marketing pour conquérir ou préserver les parts de marché.
L’industrie pharmaceutique enfin est très focalisée sur l’innovation et la recherche. Elle a
donc naturellement développé des processus de veille technologique sur le Web pour
pouvoir identifier des entreprises nouvelles, dans la biotech par exemple, de nouveaux
processus R&D, des travaux de recherche externes (Open R&D). Le digital leur a
également permis de comprendre le “parcours patient”, et de mieux appréhender les
informations que recherchent les personnes souffrant d’une pathologie, afin de mieux les
accompagner et les soigner.
Peut-on dire que désormais que tous les secteurs l’utilisent ?
Oui en effet. Il est intéressant de voir comment les entreprises B2B n’ayant a priori pas
de contact direct avec les consommateurs s’engagent malgré tout dans des projets lourds
de communication à destination du grand public. Citons par exemple les acteurs de la
chimie, qui engagent des stratégies innovantes sur les médias sociaux, afin de se faire
connaître des étudiants ingénieurs pour les attirer, et aussi de travailler leur e-réputation
afin de prévenir les risques liés au travail des associations ou des activistes.
Y-a-t-il des secteurs qui l’utilisent mieux que d’autres ?
On peut difficilement mettre toutes les entreprises d’un secteur dans un même « panier
digital ». À l’intérieur d’un même secteur, certaines entreprises sont plus agiles que
d’autres, et ce ne sont pas forcément les plus grandes ni les plus fortunées.
Prenez par exemple la société Motul, qui vend du lubrifiant pour voitures et motos
principalement à des grossistes et des garages. C’est un petit acteur sur son marché,
mais qui est particulièrement en pointe dans ses actions digitales, avec l’animation de
communautés de fans de l’univers auto /moto, une activité riche sur les réseaux sociaux,
des concours, etc. C’est une bonne pratique que des sociétés plus grosses aimeraient
bien émuler.

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Quelles sont les marges de progression que vous identifiez ?
A
Dans le domaine de la social intelligence / market intelligence et la mesure de
y

performance du Marketing digital, je pense que les entreprises doivent encore progresser
B

dans plusieurs domaines :


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Le « Social Selling » : il existe de fantastiques opportunités pour les


pl

entreprises de rencontrer leurs prospects lors du fameux87 Zero Moment of


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truth décrit par Google : cette phase ou les gens n’ont pas encore pris de décision
d’achat mais où ils requièrent de l’aide pour s’informer et choisir ;
Le parcours client ou « Customer journey » en anglais : écouter ce que disent
les consommateurs à chaque étape de leur relation avec l’entreprise pour
comprendre leurs parcours, leurs difficultés, leurs « douleurs client88 » et
améliorer ainsi petit à petit la fluidité de leur expérience avec elle ;
Le déploiement dans toute l’entreprise de l’approche « Insight driven ». Cela
consiste pour chacun des départements de l’entreprise, à recueillir et analyser les
millions de données disponibles de manière ouverte, pour aider à la prise de
décision et au pilotage des activités. On peut citer par exemple pour un service
R&D le fait d’écouter les réseaux sociaux pour connaître les lacunes d’un produit
lancé récemment, ou pour un service commercial le fait d’écouter ce qui se dit sur
la concurrence pour être à même de mieux argumenter et vendre face à elle.
Le digital et l’industrie
L’essor du digital fait basculer nos entreprises industrielles dans une nouvelle dimension.
L’essayiste et spécialiste de prospective Jeremy Rifkin89 évoque le concept de 3ème
révolution industrielle. Mais contrairement aux deux premières qui étaient liées à la
formidable transformation que représentait la maîtrise de sources d’énergie (la machine à
vapeur pour la première, l’électricité pour la seconde), la troisième révolution industrielle
prend racine dans le développement de l’information, et de la convergence de ces
développements avec la maîtrise de formes d’énergies renouvelables. Cette révolution
impose de nouvelles transformations, tant au niveau de la transition énergétique, que de la
diffusion ou du stockage de ces énergies, permettant l’essor de nouveaux modèles et de
nouvelles formes de production.
Pour ce qui est des acteurs industriels eux-mêmes, cette 3ème révolution fait déjà partie
du passé, et on évoque d’ores et déjà ce que l’industrie allemande qualifie d’ « industrie
4.0 » 90. L’appellation fait sourire, et évoque plus le jargon marketing qu’une réalité
industrielle, et pourtant il s’agit bien de bouleversements dont les impacts ne devraient pas
être négligés. En fait, selon nos amis d’outre-Rhin, Rifkin a déjà un coup de retard : ce 4.0

m
correspond selon les inventeurs de ce concept, à la 4ème révolution industrielle91.

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Les 4 états de l’industrie, depuis 1.0 à 4.0 par Christopher Roser (cc Wikimedia Commons 92) : mécanisation / production
de masse / automatisation et informatisation / systèmes cybernétiques
Dons son principe, l’industrie 4.0 évoque l’avènement de la « smart factory », l’usine
intelligente. Constituée de structures modulaires, interconnectées et pilotées par des
systèmes de mesure en temps réel, l’usine intelligente fait appel à tout ce que l’essor du
digital met à sa disposition : objets connectés, capteurs intelligents, Big Data,
autodiagnostic, automatisation, traçabilité, etc.
Allant au-delà de la simulation de procédés industriels, l’usine intelligente peut, par
exemple, prendre la décision de demander toute seule le remplacement d’une machine,
sur la base d’informations remontées par les systèmes de mesure intelligents et
interconnectés avec d’autres machines conçues par le même fabricant, informations qui
indiqueraient une usure prématurée de telle ou telle pièce, constatée de manière
purement statistique. C’est tout l’objet de la technologie développée par une société
comme OptimData93, dont le leitmotiv est de permettre aux machines de « s’exprimer ».
L’impact de tels changement est considérable. En identifiant les pannes en amont, on
réduit les phases de non-production, et on augmente ainsi la rentabilité de toute
l’installation. En réduisant la consommation énergétique et en ayant une approche
optimale des ressources, non seulement on réduit le coût de production, mais on inscrit
les procédés industriels dans une démarche de développement durable à laquelle la
société civile est de plus en plus attachée.
Comment mettre en place l’usine 4.0, c’est tout l’enjeu de consortiums qui se créent dans
les pays les plus concernés par l’évolution de leur appareil industriel. Il n’est donc pas
étonnant de retrouver les Allemands à la pointe de ces évolutions. Les questions à
résoudre sont loin d’être négligeables, et il faudra encore du temps pour que tout se
mette en place. Parmi les questions les plus importantes, citons les risques liés à la
sécurité des données et des systèmes d’information, la stabilité et la fiabilité des
systèmes de communication entre machines (M2M), la protection de la propriété
industrielle.
Deux sujets vont également faire parler d’eux dans les années à venir. Le premier
concerne le manque de compétences clefs pour réaliser cette transformation. D’une part,
la main d’œuvre qualifiée aujourd’hui ne l’est pas assez pour les systèmes intelligents et
complètement digitaux qui seront à l’œuvre demain ; d’autre part, les meilleurs
spécialistes de l’informatique, ceux qui évoluent au sein des GAFAM, sont rarement attirés
par l’informatique industrielle : c’est pourtant ces profils-là qui feront entrer l’industrie 4.0

m
dans une ère technologiquement aussi performante que l’est celle des systèmes

i
d’information ou des applicatifs grand public. ss
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Le second sujet est encore plus explosif : il concerne la perte probable de centaines de
y
B

milliers d’emplois, au profit de machines ou de robots.


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Ce sujet nourrit des débats infinis entre les économistes pessimistes comme Daniel
de

Cohen et les théoriciens optimistes, Jeremy Rifkin en tête. Ce débat oppose d’un côté les
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théoriciens de la régression séculaire, un gros mot pour dire que l’impact de l’Internet et
pl

du digital ne serait pas positif, et de l’autre les partisans de la destruction créatrice, dite
U

Schumpétérienne, censée faire naître l’ordre à partir du chaos.


Il est toujours extrêmement hasardeux de faire des prédictions de ce genre, et il est plus
tentant de renvoyer nos deux écoles dos à dos. Mais il est bien probable que la
désindustrialisation que nous avons déjà vécue, et notamment en France où elle a été
particulièrement violente, ne soit qu’un avant-goût de ce qui nous attend. Au-delà de la
régression, voire de l’éradication du travail pénible, dont personne ne se plaindra malgré
la nostalgie ambiante, il y a cependant fort à parier que l’avenir de nos sociétés et de
leurs structures se verra entièrement bouleversé par cette nouvelle révolution industrielle.
Rifkin parle même de société à coût marginal zéro, soit d’une société ou la valeur des
biens a disparu, obligeant les humains à en découvrir d’autres, moins marchandes. Le
concept est un peu farfelu mais séduisant intellectuellement, au point d’avoir interpellé
Angela Merkel qui s’est fait conseiller par l’économiste américain.
Le temps nous dira lequel des deux camps philosophiques a raison. Ceux qui disent que la
révolution industrielle reste globalement positive, ou ceux qui disent que les effets positifs
ne sont pas assez forts pour contrebalancer les conséquences négatives de ce
bouleversement. Les conséquences de ces évolutions sont telles qu’elles peuvent
conduire les politiques à proposer des idées parfois insensées, comme la taxe sur les
robots, proposée par un récent candidat à l’élection présidentielle.
Les pragmatiques prendront bonne note et cultiveront leur jardin, en suivant ce nécessaire
débat culturel, éthique et philosophique d’une oreille, tout en veillant à bien se préparer à
la révolution digitale en marche, bien plus industrielle qu’on aurait pu le croire.

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Le digital et l’automobile
Le secteur automobile est probablement l’un de ceux qui ont été le plus tôt à sensibilisés
la transformation digitale : la révolution numérique l’a heurté de plein fouet il y a déjà une
quarantaine d’années. C’est la première transformation digitale, celle des outils, des
processus de fabrication et des bureaux d’étude, celle qui concerne la R&D.
L’automobile, un secteur pionnier dans le digital
La CAO naît au début des années 70, avec de grandes figures françaises comme Pierre
Bézier (chez Renault et dans une moindre mesure chez Peugeot) ou Paul de Casteljau
(chez Citroën). À cette époque, les entreprises cherchent à automatiser certains
procédés, notamment ceux liés à la commande numérique, puis à piloter l’usinage et le
perçage des pièces. Le gain de précision et de fiabilité que permettent ces outils
numériques est si important, que les postes de CAO envahissent en une dizaine d’années
l’ensemble des bureaux d’études.
La conception de dizaines de milliers de pièces appelées à être assemblées et la diversité
croissante des véhicules posent de nouveaux problèmes, notamment de gestion de

m
nomenclature. C’est la deuxième étape de cette révolution numérique, qui voit exploser les

i
systèmes de gestion de données techniques. Ces logiciels, qui s’appuient sur des bases
ss
de données d’une complexité qui ne cesse d’augmenter, doivent permettre de gérer la
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configuration d’un véhicule, ce qui n’est pas chose simple : pour chaque véhicule, jusqu’à
y
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150 critères doivent être croisés.


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En quelques années, le numérique est parvenu à jalonner tout le processus de R&D, du


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style jusqu’à la simulation, le plus gros du travail étant désormais constitué par la
maquette numérique, qui remplace la maquette physique. Avec cette maquette numérique,
pl
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on peut réaliser un nombre incroyable de tâches : de l’analyse de clash, des vérifications


de toute sorte en matière d’ergonomie, etc. Grâce au digital, on est passé de 4 à 5
vagues de prototypes, à 2, tout au long du cycle de développement. Cela représente une
économie de plusieurs millions d’euros par projet. De nos jours, on est même capable de
réaliser des maquettes configurées – choisir un modèle, une version, une motorisation,
une couleur, un habillage, etc. – en quelques minutes de calcul. C’est la grande révolution,
que permettent des logiciels comme ENOVIA V6 de Dassault Systèmes.
Cette capacité de travailler sur des maquettes numériques représente également une
révolution du côté de la simulation. Il n’est plus nécessaire de fabriquer puis de détruire
des dizaines de prototypes, tout se fait par simulation : crash-test, résistance de la
structure, bruits (de roulement, de moteur, propagation dans la structure, ce qui permet
de réduire le poids des isolants et de réduire la consommation), électromagnétique (pour
ne pas détruire les pacemakers), et même la simulation d’émission, parce que les normes
sont de plus en plus sévères et qu’on le paie au niveau des taxes en France
(contrairement à l’Allemagne). On ne simule plus uniquement les masses, mais aussi la
résistance au roulement (en fonction du train de pneus et de la pression), ou encore le
coefficient de pénétration dans l’air (CX).
Le digital pilote également la fabrication. Le pilotage des lignes elles-mêmes se fait de
manière numérique. Cela commence par les robots en tôlerie ou en peinture, puis au
montage, même si le nombre de robots y est réduit, à l’exception de la pose des lunettes
et des pare-brise, pour plus de précision. Parfois, on a abandonné les robots, comme sur
la pose des sièges, car cela pose des problèmes à l’attache des ventouses. En revanche,
le digital reste présent sur l’aide au choix, ou sur la gestion des approvisionnements, en
flux tendu le plus souvent, comme pour la fabrication des sièges : les fabricants ont leur
atelier à proximité, et les sièges sont livrés just-in-time.
Vers la voiture numérique
Le deuxième grand volet digital dans l’automobile concerne la digitalisation du produit, du
véhicule lui-même. La révolution, ce sont les « aides à la conduite », les fameux ADAS, ou
Advanced driver assistance systems. Les premiers sont apparus au début des années 70
: c’étaient principalement des calculateurs embarqués dans les moteurs à injection. Puis
sont apparus de nouveaux systèmes d’aide à la conduite : l’ABS, l’ESP, les radars de
toute sorte. De nos jours, on trouve de plus en plus de services connectés, le premier
étant le GPS, qui prend parfois la forme de tablettes, avec énormément de données
d’ordre statistique. Rien n’est figé dans ce domaine, qui connaît une très forte poussée, et

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dans lequel les sous-traitants français sont assez bien positionnés.
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La stabilité des systèmes et des logiciels est un des grands enjeux du domaine de la
A
construction automobile. Les équipes qui conçoivent l’électronique du véhicule ne sont pas,
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en effet, issues de l’univers de l’informatique, mais plutôt de la prestation contrôlée par


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ordinateur. La gestion d’erreurs, la qualité du logiciel ou l’ergonomie, sont souvent les


de

parents pauvres de ces systèmes : c’est ce qui explique, peut-être, les


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dysfonctionnements des premiers systèmes mis sur le marché, sur les véhicules qui en
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étaient équipés, avec une plus ou moins grande visibilité : on a plus tendance à pointer du
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doigt une panne informatique sur un véhicule produit à plusieurs dizaines de milliers
d’exemplaires que sur un véhicule de luxe.
Les constructeurs sont devenus des intégrateurs, même en matière de logiciels. Ils
s’appuient sur à peu près les mêmes fournisseurs (Valeo, Delphi, Faurecia notamment)
auprès de qui des pans entiers du véhicule sont sous-traités. Les grands constructeurs se
protègent par des contrats d’exclusivité quand c’est possible, mais le risque de perdre son
savoir-faire est une véritable menace. La sous-traitance de la vie du véhicule pose
d’autres problèmes : seules les grosses modifications sont reprises en main par le
constructeur. En cas de panne sur ces équipements, vers qui doit se tourner
l’automobiliste ?
Vers le véhicule autonome
Les prochaines grandes étapes visent à développer la communication de véhicule à
véhicule, ainsi que le véhicule autonome, qui représente l’aboutissement des ADAS : tous
les constructeurs ou presque en annoncent pour 2020. On est pourtant loin d’y aboutir
totalement. Même Tesla, qui prétend faire partie des entreprises les plus avancées, se
contente de parler d’assistance à la conduite : les risques liés à des poursuites judiciaires
suite aux accidents – parfois mortels – qui en découlent sont suffisamment pris au sérieux
pour ne pas parler de voiture complètement autonome. Les systèmes les plus évolués
savent circuler sur une voie rapide en mode bouchon (périphériques, autoroutes en-
dessous de 30 km/h). Chez Mercedes, certains prototypes arrivent même à faire des
dépassements. Mais c’est un peu comme pour les véhicules qui se garent tous seuls : s’ils
sont capables de faire plein de choses, c’est presque toujours et uniquement dans des
conditions idéales.
La révolution digitale ne concerne pas uniquement les véhicules privés : les véhicules
professionnels, fourgonnettes et autres utilitaires, offrent les mêmes opportunités.
L’exemple de Mercedes est particulièrement instructif. En 2016, le groupe Daimler a
investi 500 millions d’euros dans le projet AdVANce94. Bâti autour d’un concept, le « Vision
Van », ce projet s’inscrit dans la bataille entre constructeurs, pour être le leader de la
logistique du dernier kilomètre.
Concrètement, ce chantier est construit autour de trois axes. L’identification électronique
des produits en cours de livraison, qui s’apparente à un projet autour de l’Internet des
objets, constitue le premier axe. Le second s’intéresse aux dispositifs d’aide à la livraison,

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comme des drones qui vont piocher les colis et les remettre en mains propres aux

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destinataires. Le troisième axe a pour objectif de travailler le business model d’un tel
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projet : comment rentabiliser les investissements colossaux que cela représente – 500
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millions d’euros, cela paraît même assez peu – sans pour autant pénaliser les clients ni
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les distributeurs ? Vaste programme.


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Le véhicule autonome pose en outre des problèmes qui confinent parfois à l’économie, à
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la philosophie ou à la politique, plus qu’à la technologie. Il soulève des questions éthiques


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essentielles : seriez-vous prêts à acheter une voiture dont l’algorithme pourrait être amené
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à vous sacrifier95 pour ne pas mettre en péril le groupe d’enfants qui traverse
imprudemment la route ? Et comment gérer la coexistence de véhicules autonomes et de
véhicules conduits par des êtres humains ? Doit-on créer des files de circulation à part ou
revoir le code de la route ? Et que deviendraient les chauffeurs de taxi, si prompts à se
mettre en colère et à paralyser toute une ville, si leurs métiers disparaissaient ? Il
n’appartient pas aux constructeurs de répondre seuls à ces questions, mais ces derniers
doivent être prêts à aborder toutes les conséquences qui découlent de cette innovation
majeure. Nous aborderons de nouveau ce sujet dans la section consacrée à l’impact du
digital sur le secteur des transports, page 94.
Automobile et commerce connecté
Enfin, le troisième chantier digital du secteur automobile, c’est celui du commerce
connecté. Tous les constructeurs sont parvenus au même constat : on ne peut pas tout
mettre dans un showroom, et de toute façon, l’acheteur d’un véhicule neuf en 2017 ne fait
plus le tour des showrooms : comme tous les internautes, il entame sa démarche de
consommateur connecté sur Internet, en partant de requêtes sur Google. La consultation
de blogs, de forums, fait partie du parcours standard, même pour acheter une voiture. On
peut tester les configurations chez soi, avant de les essayer ou de les commander
physiquement. Dans certains pays, comme en Russie, où la distance est un facteur
discriminant et où le concessionnaire le plus proche est à 400 kilomètres, c’est même
indispensable.
La gestion de configuration sur les sites Internet des constructeurs commence à être
assez évoluée, tant sur la qualité du résultat et que sur le rendu. Mais beaucoup de
choses restent à améliorer sur le parcours des utilisateurs. En général, ces systèmes
s’appuient sur un logiciel maison, développé en interne : il n’existe pas encore de
prestataire unique sur le sujet. L’expression de la diversité étant différente d’un
constructeur à l’autre, cela s’explique. Mais cela ne justifie pas, pour autant, la pauvreté
des interfaces de ces outils, appelés à évoluer pour se rapprocher au plus près des
besoins des consommateurs.

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Le digital et l’aéronautique
Il y a quelque chose d’étonnant quand on observe bien le rapport du secteur aéronautique
à l’univers du digital : voici bien un domaine où l’ordinateur a été présent depuis une
quarantaine d’années. Et pourtant, on a le sentiment que la digitalisation du secteur aérien
s’est faite sur le tard. Tentons d’éclaircir ce mystère ensemble.
Comme pour l’automobile commençons par nous intéresser à la fabrication et la
conception des avions : cela fait déjà près de quarante ans que les grands noms de ce
secteur (Boeing, Dassault…) ont informatisé leurs bureaux d’études. Depuis les années
90, il n’est d’ailleurs plus nécessaire de construire une maquette physique de l’appareil
pour passer certaines certifications de la FAA, la simulation par ordinateur permet de
valider certaines étapes intermédiaires. L’apport de la CAO a été déterminant non
seulement pour accélérer le processus de développement, mais également pour
coordonner les efforts entre les donneurs d’ordre et leurs sous-traitants, parfois au
détriment du savoir-faire des premiers ; de même, lors des phases de fabrication, ou de
maintenance. L’automatisation des tâches les plus répétitives ou celles pour lesquelles
l’homme aurait du mal à accéder aux pièces concernées est une réalité. Les processus de

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fabrication ont gagné en qualité et en précision. Et le rendu réaliste permet de choisir

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l’intérieur d’un avion avant même de le fabriquer.ss
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Mais l’apport du digital ne se limite pas à cela. Le digital a également permis de
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transformer la vie des pilotes. Non seulement les commandes sont assistées
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électroniquement depuis quelques années déjà, mais les pilotes n’ont plus à traîner avec
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eux la très lourde valise de documents (le flight bag) : désormais, ils sont équipés de
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tablettes qui contiennent toutes les informations pour leur prochain vol : carte météo, plan
pl

de vol. Seul un backup papier est mis à leur disposition.


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Un déclic a eu lieu au début des années 2000 : le billet électronique. Ce déclic aurait très
bien pu se produire dix ans avant, en réalité. Le morceau de papier n’était déjà plus
nécessaire depuis des années, un passager étant déjà modélisé informatiquement. Mais il
n’y a pas eu de déclic technologique, peut–être est-ce simplement dû au transfert logique
de l’achat d’un billet en ligne vers un billet complètement dématérialisé.
Aujourd’hui, le digital est partout. Le personnel de cabine dispose de tablettes ou de
smartphones, qui permettent de faire le service de cabine : accueil des passagers, vente
des repas ou des boissons sur les vols domestiques, etc. Le digital permet d’appréhender
l’univers de la cabine de toute autre manière, par exemple, en vérifiant d’un coup d’œil la
liste des passagers, mais aussi les menus, les vins qui ont été embarqués (et de vérifier
que ce sont bien ceux indiqués sur la carte).
L’arrivée du Wifi va peu à peu bouleverser le transport aérien. Arrivée en 2014 chez
Lufthansa et United Airlines, entre autres, il est désormais proposé par de plus en plus de
compagnies aériennes, sur les vols internationaux. Il s’appuie sur une liaison satellite, et
permet désormais d’offrir des débits très acceptables. La situation de contrôle total sur
les télécommunications dont bénéficie la compagnie aérienne une fois en vol justifie-t-elle
encore le prix proposé (8 à 10$ pour accéder au Wifi) ? Cela reste discutable. Mais il est
certain que l’accès à Internet pendant le vol en modifie complètement les conditions : le
passager n’est plus coupé du monde, sauf durant les phases de décollage et
d’atterrissage.
Le Wifi à bord offre également d’autres avantages, et notamment au niveau du poids – et
donc de la consommation, donnée essentielle en matière de transport aérien. En effet,
chaque passager ou presque disposant de son propre terminal (tablette, smartphone), il
n’est plus nécessaire de poser des écrans sur le dos des sièges. De plus, via l’accès au
réseau local de l’appareil en Wifi, on peut diffuser films, actualités et musiques, ainsi que
le magazine habituel, le menu ou le catalogue des produits proposés en duty-free. Il est
étonnant que les acteurs du low-cost ne s’y soient pas encore essayés.
Le digital a bien entendu profondément modifié les modes d’achat des billets, réduisant à
la portion congrue les services d’intermédiation qu’effectuaient jusqu’alors les agences de
voyage. Les comparateurs de prix, et notamment Google depuis quelque temps,
permettent de se faire une idée précise de l’offre tarifaire à tout instant, pour toute
destination. Et l’on pourrait croire que tout a été fait dans ce domaine… mais non ! Le
digital laisse de la place pour d’autres formes de services.

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Le co-avionnage, par exemple. Inventée par la start-up française Wingly, cette pratique
i
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est le pendant du covoiturage, mais pour l’aviation privée : plutôt que de faire un Béziers-
A
Orléans seul dans son quadriplace, un pilote privé peut désormais proposer ses places à
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des passagers occasionnels. À l’heure où ces lignes sont écrites, début 2017, la DGAC
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semble encore s’opposer au développement de cette pratique en France, différente de la


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possession partagée, qui n’intéresse que des personnes ou des entreprises disposant de
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moyens conséquents. Mais rien ne l’interdit en Allemagne ou au Royaume-Uni, où les


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fondateurs sont partis développer leur activité.


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D’autres pistes pourraient être suivies, en proposant, par exemple, des tarifs qui tiennent
compte des profils des internautes, sur la base des données collectées et d’une approche
« big data ». Une société comme « Le Jet » se présente comme l’Uber de l’aviation civile
» : imitant l’approche des VTC, Le Jet propose des vols en jets privés, sur des liaisons
européennes pour l’instant, à des tarifs établis en fonction du temps de vol, sur la base de
176€ de l’heure. Pour arriver à ce prix, Le Jet s’appuie sur une gestion fine du
remplissage de ses avions, en évitant qu’ils ne repartent à vide.
Le digital ne va pas sans soulever des problèmes majeurs, notamment au sujet de la
sécurité des appareils et la possibilité de « hacker » le système d’information durant un
vol, et de prendre ainsi le contrôle d’un avion à distance. La meilleure des protections, en
la matière, consiste à séparer les deux réseaux physiques, celui qui permet aux
passagers de communiquer via Internet, et celui qui permet de contrôler les commandes
de vol.
Enfin, il faut bien se dire que le drone fait partie aujourd’hui de l’arsenal dont disposent
militaires et forces de l’ordre, et que s’il commence à intéresser les géants de la
distribution comme Amazon, il finira bien, un jour, par concerner le secteur civil. Et après
tout, n’est-il pas la transposition à l’univers de l’aviation de ce que les constructeurs
automobiles tentent de faire avec le véhicule autonome ?

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Le digital et les transports terrestres
De tous les secteurs que nous avons décidé d’aborder dans cet ouvrage, celui des
transports terrestres se caractérise par un trait particulier : c’est celui dont les systèmes
peuvent être considérés comme les plus inefficaces. Prenez l’exemple des véhicules
particuliers : ils sont immobilisés près de 95 % du temps, sont utilisés à 25 % en moyenne
de leurs capacités fonctionnelles (charge utile, vitesse) et tuent chaque année un nombre
non négligeable d’individus. Et n’allez pas croire que l’univers des transports collectifs est
plus efficace : il suffit de s’intéresser aux taux d’occupation en heures creuses pour se
rendre compte qu’on est loin de l’optimum, tous moyens de transports terrestres
confondus – laissons de côté l’univers du transport aérien et maritime. Qu’est-ce que le
digital peut bien apporter à ce secteur ?
Pour la plupart des autres secteurs, le digital est synonyme avant tout de
désintermédiation, et permet d’améliorer les taux de remplissage, ou de réduire les taux
de vacances. C’est exactement ce que permet de faire un Airbnb, par exemple. Dans le
cas des transports, les taux de remplissage sont exécrables, et la moindre amélioration
peut avoir un énorme impact. Passer de 1,1 passager par véhicule – le taux d’occupation

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moyen sur les déplacements entre domicile et lieu de travail – à 1,5 serait synonyme

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d’immenses économies. On voit immédiatement l’impact du covoiturage et les
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perspectives extraordinaires qu’offre un Blablacar.
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Pour y parvenir, il faut changer les mentalités, et ce n’est pas toujours aussi simple. Dans
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certains pays, par exemple, des incitations fortes au covoiturage sont mises en place,
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pour faire croître ce taux de remplissage : aux États-Unis, en Espagne ou en Israël, on a


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développé le concept des HOV – « High Vehicle Occupancy Lane96 ». L’idée sous-jacente
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aux HOV, c’est de déplacer beaucoup plus d’individus que de véhicules : les véhicules qui
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transportent plus qu’un certain seuil de passagers – trois ou quatre selon les pays –
bénéficient d’un accès à ces voies à circulation rapide ou à péage adapté. Le covoiturage
a-t-il un effet visible sur le niveau de congestion des autoroutes ? Difficile à dire, en tout
cas cela ne se voit pas le matin en semaine : il est plus probable que cela transparait lors
des départs en weekend, le covoiturage étant privilégié sur des déplacements longs et
pour les loisirs. Le covoiturage n’a d’ailleurs pas eu d’impact sur les ventes de véhicules
en France : le parc automobile reste relativement stable autour de 38 millions de
véhicules. Le seul service qui a eu un impact significatif, en la matière, c’est probablement
Autolib qui a réduit le besoin d’acquérir un second véhicule en région parisienne.
Il ne faut pas non plus oublier qu’on parle avant tout de transport physique. On reste
dépendant d’un système qui se déplace, qui consomme de l’énergie, beaucoup d’énergie,
qui peut être dangereux quand il est mal manipulé, et qui par-dessus tout fait du bruit. Dès
lors, les changements les plus radicaux ne proviennent pas forcément des évolutions en
termes d’interfaces – irruption du mobile – ou du système d’information, mais d’un
changement de paradigme. On peut se focaliser sur le système d’information, c’est ce
qu’ont fait des sociétés comme Uber ou Waze, qui ont largement modernisé leur univers.
Mais le changement de paradigme le plus important que permet le digital, c’est
l’avènement du véhicule autonome, tant au niveau du particulier que du transport collectif,
les deux univers ayant d’ailleurs tendance à converger.
Le principal avantage du véhicule autonome, c’est de faire évoluer de manière drastique le
taux d’occupation du véhicule. Quand on ne s’en sert pas, c’est à dire 95 % du temps, on
laisse le véhicule à disposition d’une plateforme qui en aura l’usage, et qui pourra
distribuer ce véhicule auprès d’autres usagers. De là, on arrivera rapidement à la
conclusion qu’il est inutile de posséder son propre véhicule, et que le véhicule individuel se
transforme naturellement en transport collectif, en mode sériel : au lieu de transporter N
individus en parallèle, on transporte un individu (ou un groupe), puis un autre, puis un
autre, sur des trajets qui n’ont pas été définis au préalable et ne se répèteront
probablement jamais. Le véhicule autonome présente un avantage certain par rapport au
covoiturage : alors que ce dernier est asymétrique – le conducteur et ses passagers ne
sont pas impliqués de la même manière en termes de responsabilité, de gestion des
coûts ou des risques – le véhicule autonome, lui, rétablit une situation homogène entre
tous les passagers.
On assiste ainsi à l’affrontement entre deux logiques différentes : des véhicules à capacité
fixe, à itinéraire fixe, de nos jours, et demain des véhicules autonomes, connectés,

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capables de s’adapter à la demande et de supporter des taux d’occupation bien plus

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élevés. L’impact sur les types de compétences sera probablement aussi prodigieux : on
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aura besoin de moins de chauffeurs, mais on aura besoin de profils capables d’inventer et
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de faire fonctionner les services nécessaires pour gérer des flottes de tels véhicules.
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L’irruption du digital dans l’univers des transports pourrait également prendre des chemins
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plus traditionnels, comme la modernisation des moyens de paiement. Israël est à la pointe
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en matière d’innovation dans ce secteur : la taille modeste du pays en fait un laboratoire


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grandeur nature, et le dynamisme de l’écosystème digital fait le reste. La société


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Lazooz97, par exemple, propose une solution de paiement sur un modèle de « blockchain
», où les comportements responsables – par exemple le covoiturage – permettent
d’engranger des points qui permettront de payer l’accès à d’autres moyens de transport.
Une autre start-up israélienne innove quant à elle dans l’univers du transport collectif :
Moovit98 est une application mobile, qui permet non seulement de se renseigner sur les
trajets et les horaires, mais aussi de s’informer sur les conditions de service : pannes,
grèves, lignes bondées sont ainsi renseignées en temps réel, sur la base des informations
remontées par les utilisateurs. C’est une approche en mode « crowdsourcing » de
l’optimisation des moyens de transport. N’allez pas croire qu’un tel système soit un gadget
: le principal enjeu pour les exploitants, c’est tout simplement de fluidifier le trafic, et de ne
pas se retrouver bêtement dans la situation où les passagers en attente d’une rame
restent agglutinés en tête de station alors que les places disponibles sont essentiellement
à l’arrière de la rame de métro ou du tramway. Perdre une à deux minutes en station peut
complètement congestionner tout un réseau.
Enfin, le dernier volet dans lequel le digital peut trouver sa place, c’est sur la gestion de la
sécurité des transports. Il n’existe certes pas de solution universelle, mais tout ce qui peut
aider et faciliter l’identification et la détection de comportements suspects, que ce soit à
base d’algorithmes ou d’approches basées sur le monitoring passif – la contribution des
utilisateurs – peut un jour contribuer à sauver des vies. Qui a dit que le digital était inutile ?

Moovit, l’application qui organise vos trajets en transports en commun ... un peu partout dans le monde (source image:
Frandroid)

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Le digital et la banque

Le livre collectif sur la banque de demain par Athling, sorti fin 2015
Fin 2015 est paru le livre collectif « La banque, reflet d’un monde en train de naître99 »,
publié par nos confrères du cabinet Athling, et auquel nous avons tous deux collaboré.
Comme l’indique le texte introductif du site labanquededemain.com sur lequel vous pouvez
télécharger le document, « ce livre réunit 120 contributeurs venus d’univers différents pour
faire partager leur vision de la banque du futur […] Sous leurs plumes, le lecteur est invité

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à parcourir ces fragments de banque, appréhendée sans dogme, ni thèse, par des non
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spécialistes tout simplement curieux ». Mais cette vue de la banque par les non banquiers
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a fait émerger un très net hiatus entre l’image construite par ces 120 contributeurs et celle
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des professionnels du secteur. En nous gardant le plus possible des clichés et des
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jugements à l’emporte-pièce, nous avons essayé de prendre du recul et d’analyser la


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situation. Nous décrirons ensuite comment, à nos yeux, le monde est en train de changer
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dans ce secteur.
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Les banques ne veulent pas être considérées comme des dinosaures


Pour paraphraser Bills Gates, les banques n’aiment pas être traitées de « dinosaures ».
C’est compréhensible, personne n’aime la critique, surtout quand on produit collectivement
un gros effort pour perfectionner son service. Le livre blanc d’Athling100, dont nous
conseillons vivement la lecture, est cependant très nettement incisif à l’égard du milieu
financier. Selon qu’on est d’un côté ou de l’autre de la barrière, la description peut donc
paraître injuste, même si l’effort n’est jamais une garantie suffisante de résultat. En faisant
abstraction de cela, essayons de faire la part du vrai et du faux, de ce qui relève de la
critique justifiée ou du reproche partisan.
Pour les jugements à l’emporte-pièce du style « les clients se font plumer par les banques
», les participants au débat auquel nous avons assisté – tous banquiers – à l’initiative de
la société de conseil Athling, n’ont pas eu beaucoup de considération. Nous avons une
sympathie certaine pour ce rejet de la critique simpliste et de la mise aux orties des
principes de base de l’économie. Le concept de « banquier/voleur » est plus
symptomatique de l’ignorance totale des Français par rapport aux choses de l’argent que
le reflet d’une vérité du terrain. Rappelons que 86 % des Français, selon les intervenants
de cette table ronde, s’avoueraient ignorants des sujets liés à la finance, et pour travailler
dans ces secteurs, nous pouvons le confirmer : même les cadres ignorent la différence
entre une obligation et une action. Sans commentaire. Nous sommes en phase avec
Didier Moaté101 de la Banque postale qui a soulevé ce point
Ceci étant, il ne faut pas en rester là.
Banque de demain : la querelle des anciens et des modernes
Pour le reste de l’évolution de la banque par contre, la table ronde a montré un clivage net
entre les anciens et les modernes, avec une certaine propension à nier l’évidence et
refuser de se préparer à l’évolution du secteur qui est, de l’aveu de Benoît Legrand
d’ING102, autant humaine que technologique sinon plus.

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De gauche à droite : Nicolas Doze BFM, Benoît Legrand, Président d’ING, Guillaume Rousseau DG du Crédit Agricole
Brie Picardie, Didier Moaté Directeur de la banque de détail de La Banque Postale.
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« Au cœur du débat il y a les usages » (Didier Moaté, la Banque postale)


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Là où il y semble y avoir consensus c’est sur le fait que les fintech103 pourraient prendre
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rapidement 60 % de la valeur des institutions bancaires104. ING, au travers de son


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président Benoît Legrand, est d’accord sur le fait que cette révolution est « bien en cours
et qui faut la prendre au sérieux ». Il tempère tout de même en ajoutant qu’il « ne s’agit
pas d’une transformation digitale mais humaine et centrée sur les usages ». Nous ne
pouvons qu’abonder dans son sens, les banques sont déjà des entreprises de données
entièrement digitalisées depuis de nombreuses années, les marges d’amélioration sont
moins à trouver dans les équipements informatiques et logiciels que dans
l’accompagnement des utilisateurs et l’usage des technologies pour gagner en service et
en efficacité.
Les agences finiront-elles dans les Smartphones ?
Sur la banque de demain qui serait entièrement basée sur les smartphones, tout le monde
n’était pas d’accord : Guillaume Rousseau de Crédit Agricole Brie Picardie pense qu’il y a
un grand mouvement qui va vite nous renvoyer sur une distinction par la qualité et par
l’atout relationnel et la compétence du conseil. Selon lui « les transactions se finissent
toujours dans l’agence ». Mais tous les participants à la table ronde n’étaient pas d’accord
et notamment le DG d’ING Direct qui a bien ri à cet énoncé. Comme quoi, il n’y a pas que
les non banquiers qui peuvent se permettre une certaine acidité dans l’analyse.

Minter Dial n’a pas mâché ses mots pendant la conférence - https://twitter.com/mdialFR/status/652439284226629632

La banque par le conseil : ING rigole


Si le DG d’ING a bien ri, c’est que selon lui et en se basant sur une étude de Bain, « 86 %

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des visites en agences sont faites pour réaliser des opérations de base et non pour aller

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chercher du conseil ». Il n’est donc pas convaincu que le conseil « soit un véritable
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élément différenciateur » ou alors avec de l’intelligence artificielle pour décrypter « les
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centaines de produits incompréhensibles conçus par les responsables produits ».
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Le smartphone n’est pas du goût des banquiers traditionnels, mais il est de celui des consommateurs. Voilà une évolution
à laquelle il ne sera pas aisé de résister105.
Benoît Legrand, DG d’ING et auteur de Changeons la Banque106 pense que les banques
ont conscience qu’elles évoluent dans un monde en mouvement mais il n’est « pas sûr que
les banquiers ont compris comment répondre aux enjeux de cette crise ». Il est plus
confortable que ce soit quelqu’un du métier qui le dise, même s’il s’agit d’une banque sans
guichet, filiale d’une grande institution financière néerlandaise.
Notre modèle est très différent de ce qui se passe ailleurs en Europe et notamment aux
Pays Bas nous a-t-il dit, et cela prendra du temps, mais cela bougera. Il a trouvé
notamment assez « ridicule » qu’on propose de mette le client au centre des
préoccupations de la banque. Il en effet naturel, et également c’est notre avis, qu’il soit en
tout temps au centre de nos préoccupations, car « c’est bien lui qui paie notre salaire ».
Les choses vont plus bouger dans les 10 ans à venir qu’elles n’ont bougé dans les
10 ans qui précèdent
Cette saillie n’a pas manqué de provoquer des réactions. Et notamment celle de Didier
Moaté qui s’est un peu offusqué de la vision des banquiers comme des dinosaures par la
salle (ou du moins telle était sa perception). Il a cependant convenu que « les choses vont
plus bouger dans les 10 ans qu’elles n’ont bougé dans les 10 ans qui précèdent ».
Les agences bancaires pourraient-elles disparaître ? Avis divergents
Sur cette question de la disparition des agences bancaires, que nous avons déjà évoquée
notamment pour ce qui est du Royaume Uni, la France – en plein tourmente de fermetures
d’agences107 – semble encore opposer une certaine résistance par rapport au reste de
l’Europe. Pour combien de temps encore ? Nul ne le sait. Mais les avis sur ce point sont
très divergents. C’est qu’il est des implications non seulement humaines mais sociales
derrière ces points, qui ne sont pas neutres à l’heure ou le pays entier tremble à la
fermeture d’une usine de transformation d’aluminium, on imagine qu’il s’agit d’un sujet
tabou.
Interpellés sur le fait que les « banques pourraient être des taxis qui s’ignorent », les deux

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banquiers traditionnels sont restés un peu en retrait tout en insistant sur « l’historique de la

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banque et sa solidité ». Tout le monde a cependant reconnu l’importance du digital mais
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sans vraiment admettre, sauf le patron d’ING, que le métier allait vraiment changer
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profondément. Et d’affirmer mordicus que « ce modèle-là est là pour durer et exister ».


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D’ici à voir l’effet du tabou susnommé il n’y a qu’un pas.


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ING n’est pas d’accord


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Benoît Legrand d’ING, qui a avoué être client dans beaucoup de banques, ce qui lui
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permet de comparer, a fustigé quant à lui les mythes « le physique c’est bien » et « le
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digital c’est moderne ». Tout est en passe d’être dynamité selon lui et le paiement passera
sûrement par de nouveaux acteurs comme Amazon, Apple et Google. Il y a aussi des
sociétés comme Welend108 à Hong Kong qui « ne vous demandent qu’une chose : l’accès
à votre smartphone, et en quelques minutes ils vous accordent un crédit ».
Et pourtant la banque change, qu’on le veuille ou non
Pourtant les choses bougent, même à La Banque postale : 12 millions d’interactions par
mois sur mobile en 2013 en partant de zéro, et « on est passés à 30 millions aujourd’hui »
nous a-t-il confié. Mais Benoît Moaté refuse d’opposer les nouveaux et les anciens
modèles. Pourtant, ces nouveaux outils permettent aux clients de s’affranchir des
transactions de base réalisées dans les agences.
À la fin de ce débat, il a fini quand-même par l’avouer que la « banque fera appel à moins
de monde demain », sans toutefois aller jusqu’à qualifier la banque d’aujourd’hui « de
sidérurgie de demain109 ». Mais la transformation des collaborateurs vers les métiers
porteurs de relation client est néanmoins en cours et cette évolution est bel et bien
profonde. Et Benoît Legrand de conclure qu’il faut à coup sûr reconnaître qu’il y aura
moins de monde dans la banque. Or, c’est en regardant cette réalité en face qu’on
n’arrivera pas trop tard et qu’on pourra se préparer, non en niant l’évidence et en faisant
semblant que les choses n’ont pas changé. Cette méthode-là au contraire est la recette
parfaite pour arriver à un désastre aussi bien industriel qu’humain.
Demain, un monde sans banques ?
Témoin de la dichotomie de notre débat, sorte de réédition de la querelle des anciens et
des modernes, Benoît Legrand a répondu OUI sans hésiter à la question « peut-on
envisager un monde sans banques ? ». L’avenir nous dira si le modèle des anciens
périclitera totalement ou s’il sera au contraire préservé et qu’il évoluera à la marge. À
notre humble avis, de nombreuses surprises nous attendent, au-delà de ce simple débat
entre anciens et modernes.
Transformation digitale et secteur bancaire
Nous avons demandé à David Fayon110, expert de la transformation digitale des
entreprises, son point de vue sur l’impact de la digitalisation sur le secteur bancaire.
Le secteur bancaire est certainement le plus emblématique des enjeux liés à la
transformation digitale. En effet, si jadis le pouvoir résidait entre les mains des

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monarques, il est à présent entre celles des banques et des marchés financiers ainsi que
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de certaines grandes entreprises, les GAFAM111 en tête, qui guident nos vies. Or l’arrivée
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des Fintech, du crowdfunding ainsi que les ubérisations possibles des chambres de
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compensation et les affaires qui ont entaché le secteur (Kerviel à la Société Générale,
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Panama Papers, …) sont de nature à bouleverser la donne sans compter les fraudes aux
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cartes bancaires souvent sous-estimées ou avec peu de communication de la part des


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banques de façon à rassurer les clients. Si les banques ratent leur transformation digitale,
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on peut s’interroger sur l’impact de la vie de chaque citoyen demain.


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Il est possible de raisonner en fonction des 5 leviers décrits dans le livre Transformation
digitale, lequel vient en complément méthodologique à celui-ci. Il permet en effet de
mesurer le niveau de maturité d’une organisation à un instant donné. Par ailleurs, plusieurs
réflexions sont à mener pour alimenter la stratégie de la banque. Par exemple, avant
même de parler de transformation digitale, une étape préliminaire peut, pour certains
acteurs, être nécessaire : celui de la migration digitale où les gros systèmes des années
1970 en Cobol par exemple et encore fortement ancrés doivent évoluer vers des solutions
plus agiles et orientées Web. La stratégie peut également être à terme d’évoluer vers une
plateforme Bank as a Service (BaaS) ; avec API ouvertes, open data, big data
notamment pour fédérer un système autour, comme savent le faire Facebook ou Google
et lui donner ainsi une valeur supplémentaire avec des développements effectués par des
tiers de nature à augmenter l’intérêt, la valeur et l’audience de celle-ci.
Les challenges pour les 5 leviers pourraient être les suivants. Pour chacun d’eux et au
global, il est important pour toute banque de se benchmarker par rapport à la concurrence
:
Organisation : chiffre d’affaires réalisé sur les canaux numériques, utilisation d’une crypto-
monnaie à la bitcoin, instances dédiées au numérique, évolution du management vers
l’holacratie112 pour rendre les rôles et les actions plus transparents et qui demande une
vraie révolution du management, existence de digital factories, charte d’usage des outils
numériques par les collaborateurs, partenariats avec des tiers pour des APIs
développées ; revisiter le design organisationnel de Jay Galbraith à l’heure du 2.0 et du
3.0 et par exemple de l’holacratie est une nécessité pour réussir sa transformation digitale
;
Technologie et innovation : durée d’une indisponibilité en cas de panne et quels sont les
moments les plus cruciaux notamment par rapport au lieu de connexion des clients qui
peuvent par ailleurs utiliser une variété grandissante de devices depuis tout point de la
planète, utilisation des technologies de type Internet des objets, blockchain, impression
3D, monnaie virtuelle et conversion possible, géolocalisation des transactions,
cybersécurité, chatbot permettant d’automatiser par exemple des tâches effectuées par
des téléconseillers, du moins pour un premier niveau d’appel téléphonique avant
d’escalader vers un téléconseiller dont la fonction devra évoluer vers des missions à plus
haute valeur ajoutée, etc.

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Personnel : nombre de jours de formation par an et par collaborateur aux nouvelles

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technologies de nature à impacter la banque et également selon des catégories d’acteurs
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plus spécifiques et fortement exposés à certaines technologies numériques. Utilisation de
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primes et autres critères de motivation pour la conduite du changement pour la


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transformation digitale de la banque puis en régime stationnaire, échange de bonnes


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pratiques au sein de la banque et ses filiales et des éventuelles entités à l’international via
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éventuellement un outil collaboratif ou un réseau social d’entreprise. Éthique du personnel


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notamment des conseillers financiers et en patrimoine dans une optique de fidélisation,


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satisfaction client et rapport gagnant-gagnant et non axé sur des objectifs de placement
de produits et de services décorrélés des attentes premières (par exemple une incentive
sur l’assurance-vie), etc.
Offre : utilisation du crowdsourcing et de l’open innovation pour faire évoluer l’offre de
produits et de services bancaires, participation d’étudiants à des hackathons pour amener
des idées de nouveaux services et les faire plancher sur des maquettes en temps limité.
Lancement de services en mode bêta et expérimentaux auprès d’une partie de la clientèle
avant généralisation éventuelle et amélioration avec les retours et tests effectués.
Développement d’une logique omnicanale pour interagir avec les clients et même les
prospects, reporting en temps réel sur l’offre, le chiffre d’affaires et les transactions
générés. Evolution des cartes bancaires dans une logique big data et fourniture de
services gratuits ou à tarifs préférentiels en échange de l’exploitation des données par la
banque et un réseau de partenaires ;
Environnement : nombre de sociétés utilisatrices des APIs développées par la banque,
processus de veille concurrentielle sur les attentes des clients et en ayant une vision
globale quant à un client, ses projets et son environnement familial (études de ses
enfants, donation à sa famille, etc.) et ce, en fonction des générations, évolutions
réglementaires et des règles prudentielles auxquelles la banque doit se plier tout en
utilisant le numérique et la transformation digitale pour les optimiser, traçabilité, lutte
contre le blanchiment de l’argent et coopération interbancaire pour augmenter l’efficience
et la lutte contre la fraude.
Dans ce cadre, on peut s’interroger sur le scénario préférable que la banque pourra
adopter pour assurer sa transformation digitale sachant qu’un mix entre plusieurs
scénarios est souhaitable même si une dominante peut se dégager. L’enquête à
l’international conduite en décembre 2016113 esquisse 3 pistes pour la banque de demain :
collaborative, agile, orientée-données. En outre, la transformation digitale est à mener en
tenant compte des nouveaux entrants, en particulier les Fintech mais surtout l’évolution
des modèles économiques imposés par le numérique, l’automatisation des processus et
l’apport de l’intelligence artificielle.
Une certitude est que la banque de demain est celle qui réussira sa transformation
numérique par la voie d’un profil transformateur selon, entre autres, les bonnes pratiques
des GAFAM - contrairement aux attentistes, impressionnistes, externalisateurs,
intégrateurs114 qui peuvent, pour les deux dernières catégories, limiter les dégâts en

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matière de perte de clients, de chiffre d’affaires et de marges, d’images.

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Digital Me Up - La « Blockchain » : la technologie qui va
bouleverser le secteur de la finance
Par Carlos Manjon
https://goo.gl/ofbJBl

Ces dernières années, des technologies émergentes ont conduit à une transformation
digitale radicale de toutes sortes de business. Parmi celles-ci, citons :

Les solutions basées sur le cloud computing (IaaS, SaaS, PaaS)


Les objets connectés

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Les solutions de distribution de logiciel en open-source comme Git
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Les crypto-monnaies comme le Bitcoin
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Le Big Data qui, combiné à des solutions analytiques avancées, a permis


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l’émergence de dispositifs d’auto-apprentissage


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Les nouvelles technologies du Web et le secteur financier


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Le secteur financier n’est pas à l’abri de ces évolutions, et adopte même certaines d’entre
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elles à un rythme soutenu115. En fait, les acteurs traditionnels de la finance sont bousculés
par de nouveaux entrants : des start-ups, désignées globalement sous le vocable de
FinTech, combinent technologie et innovation pour conquérir rapidement de nouvelles parts
de marché. Tous les secteurs sont concernés, qu’il s’agisse des transferts d’argent, des
paiements mobiles, du financement de projet via des sites participatifs, ou même de
gestion de portefeuille.
Ce n’est pas une surprise, plusieurs entreprises ont déjà investi massivement dans les
technologies les plus récentes : certaines en créant des départements R&D en leur sein,
d’autres via des partenariats avec des FinTech, d’autres encore en rachetant tout
simplement des start-up.
Les crypto-monnaies dans le détail
En 2015, une innovation a fait l’objet d’un intérêt particulier de la part des médias : les
crypto-monnaies. Il s’agit de monnaies d’essence numérique, décentralisées, qui ne sont
contrôlées par aucun gouvernement ni banque centrale, et sont produites par une
communauté d’individus et d’entreprises, ce qui leur confère une touche « démocratique »
certaine, et les rend ainsi attractives. De plus, les transactions en bitcoins permettent de
préserver l’anonymat des parties, ce qui les a rendues particulièrement attractives auprès
des organisations criminelles, provoquant ainsi l’émergence d’un forum dédié à la lutte
contre les activités criminelles à base de Bitcoin et de Blockchain.
En dépit de l’excitation générale autour des crypto-monnaies, leur usage ne s’est pourtant
pas répandu. Leurs plus fidèles supporters diront « pas encore ». Alors que le nombre
moyen de transactions quotidiennes à l’échelle du monde s’élève 200 000, elles restent
bien en-deçà d’autres moyens de paiement, comme les cartes de crédit, qui représentent
un total de 9 milliards de transactions par an en France seulement (dont 600 millions
issues de paiements en ligne), pour un total de 420 milliards d’euros. Dans un article
intitulé « The resolution of the Bitcoin experiment 116 », Mike Hearn, développeur du
système Bitcoin, met en avant les raisons techniques et organisationnelles qui aboutiront,
selon lui, à son échec. Les monnaies traditionnelles émises par les banques centrales ont
encore un long avenir devant elles.
La Blockchain, la technologie sous-jacente aux bitcoins
Ceci étant, au-delà du Bitcoin et des crypto-monnaies et de leurs usages dans des
transactions financières, ce qui aura certainement un impact significatif sur l’industrie de la
finance, c’est la technologie qui la sous-tend. Cette technologie, appelée Blockchain,

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intéresse de plus en plus de monde. Il s’agit d’un registre organisé en blocs de données,
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ordonnés de manière chronologique, où chaque bloc contient des informations qui
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permettent de vérifier toutes les transactions, de la première à la plus récente.
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La base de données de la Blockchain est partagée (on peut même dire distribuée) par
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toutes les parties prenantes du système. Pour qu’une nouvelle information soit agrégée au
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système, il faut qu’elle soit validée par une majorité des participants. C’est ce mécanisme,
combiné avec la gestion de clefs publiques et privées pour assurer le respect de l’intégrité
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et de l’anonymat des données, qui rend la technologie de la Blockchain si intéressante : il


est pratiquement impossible de falsifier les informations contenues dans une Blockchain,
sans que cela n’empêche de préserver l’anonymat des parties impliquées dans une
transaction.
Les institutions financières commencent à peine à apprécier la variété des applications de
ce type de technologies : transferts internationaux, émissions d’obligations, gestion des
garanties, crédits syndiqués, etc. Tout en réduisant le coût des transactions, les délais de
traitement et en améliorant la sécurité des échanges. Le Nasdaq a ainsi développé une
plateforme, appelée Linq, qui enregistre tous les règlements commerciaux ; de son côté,
UBS a mis en place un laboratoire de recherche sur la Blockchain ; Santander a identifié
plus d’une vingtaine de cas d’utilisation possibles ; et Goldman Sachs envisage de l’utiliser
pour ses activités de trading.
Mais le signe le plus clair de l’intérêt croissant des institutions financières pour ces
technologies est la création d’un consortium de 42 des plus importantes banques
mondiales, sous l’impulsion de la FinTech R3, appelé R3 CEV, et qui vise à concevoir et
développer des produits commerciaux et des solutions de registre distribuées de niveau
financer, sur la base de la technologie de la Blockchain.
Dans les prochaines années, les experts conviennent que nous verrons l’émergence de
produits et de services basés sur ces registres distribués, allant des prêts hypothécaires
au vote par procuration, des moyens de compensations aux réclamations d’assurance …
même si la technologie sous-jacente restera incompréhensible pour le grand public,
comme c’est déjà le cas, d’ailleurs.

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Le digital et l’assurance
L’impact du digital sur le secteur de l’assurance prend plusieurs formes. La plupart des
entreprises de ce secteur l’ont bien compris, et ont lancé depuis quelques années déjà
des groupes de travail sur ce sujet épineux. Car au-delà de la transformation induite sur
tous les métiers de l’entreprise comme pour d’autres secteurs (voir à ce sujet la troisième
partie), le digital touche le secteur de l’assurance sur deux sujets important : la
souscription et la gestion de l’offre d’une part, et l’évolution de celle-ci en tenant compte
des évolutions des risques liés au digital d’autre part.
En ce qui concerne la souscription de l’offre, elle est déjà bien avancée. Selon une étude
du cabinet Siltéa menée en 2016 auprès d’une quarantaine d’entreprises de ce secteur,
63 % d’entre elles en offrent déjà la possibilité. « Peut mieux faire », aurait-on tendance à
dire, quand on sait que le secteur de l’assurance a été confronté depuis belle lurette à
l’impact du Web et des comparateurs en ligne, capables de diriger les internautes vers tel
ou tel prestataire en fonction de leur bon vouloir… et des données collectées en ligne.
Mais c’est bien là l’un des paradoxes du digital : plus on se digitalise, et plus on offre de
points de prise à des acteurs qui ne nous veulent pas forcément du bien.

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Du côté de la gestion de l’offre, là aussi, il faut bien sûr tenir compte de ce que permet le
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digital. La déclaration de sinistre avec prise de photos télétransmises par l’intermédiaire
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d’un smartphone fait figure d’évolution mineure, mais extrêmement pratique, dans les
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situations où un expert ne peut se déplacer avant plusieurs jours. Mais quand on sait qu’un
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smartphone permet de mesurer la vitesse d’un véhicule ou d’évaluer la qualité de conduite


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d’un automobiliste, on se dit aussi qu’on aurait tort de ne pas en tenir compte pour
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adapter le tarif de la police d’assurance contractée par celui-ci : un conducteur nerveux et


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qui prend des risques insensés devrait-il payer plus qu’un conducteur paisible ? Partant de
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ce principe, certains pourraient même penser faire évoluer les primes d’assurance-vie en
fonction du style de vie des souscripteurs, toujours en s’appuyant sur le smartphone ou
des appareils connectés : il y a là un pas difficile à franchir, en terme d’éthique et de
protection de la vie privée : êtes-vous prêts à l’accepter ?
Le digital introduit de nouvelles formes de risques, ou de prévention des risques, auxquels
les sociétés d’assurance et les mutuelles auraient tort de ne pas s’intéresser. Passons sur
l’assurance des smartphones, ordinateurs portables et autres appareils connectés : ils
font partie de notre quotidien, nous en sommes devenus quasiment dépendants, et leur
taux d’utilisation et de renouvellement est bien supérieur à celui de l’automobile. Pourtant,
on oublie souvent de s’assurer contre la détérioration, la perte ou le vol de ces outils
indispensables, négligeant ainsi les pertes indirectes liées à ces sinistres.
Mais le digital a permis l’émergence d’autres risques. Les risques liés à l’e-réputation, par
exemple : un salarié dont le nom trempe dans une affaire le concernant de près ou de
loin, risque d’avoir du mal à trouver un employeur, si son nom est diffusé dans la presse.
Une entreprise dont les produits réputés défectueux sont mal notés sur des sites d’avis de
consommateurs, aura bien du mal à les écouler. Que faire quand le Web regorge de
contenus qui nous portent préjudice ? Peu de dirigeants d’entreprise savent, en réalité,
comment y faire face : le digital fait peur.
Allons plus loin : les pratiques liées à l’hameçonnage, les vols de données informatiques,
les piratages de sites Web, les arnaques au président, et bien d’autres techniques
encore, sont apparues avec les technologies numériques : sites Web trafiqués, factures
retouchées avec Photoshop, appels émis depuis un faux numéro, voix déguisées, les
truands n’ont pas attendu pour se familiariser avec l’outil digital. Or une entreprise dont les
données ont disparu, ou dont le site Internet ne fonctionne plus, peut facilement se
retrouver dans une situation tendue, voire précaire, si rien n’est fait à temps. Prendre
conscience des risques, et s’y préparer, fait partie du rôle des dirigeants. Les sociétés
d’assurance ont une carte à jouer auprès de ceux-ci, aussi bien au niveau de l’information
que de l’offre.

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Le digital et les services
Arnaud Bouchard dirige l’organisation en charge de l’expérience utilisateur digitale chez
Capgemini. Nous lui avons demandé sa vision de l’impact du digital sur les métiers des
services.
Voyons ici les services et leur relation avec le digital. Par services, nous entendons ici les
professions contraintes dans un périmètre strict, ce qui inclut les avocats, les médecins, le
monde du conseil, de l’intérim ou du recrutement et pourquoi pas des services comme La
Poste. Mais nous n’inclurons pas dans notre réflexion les services financiers. Notre propos
concerne donc des professions intellectuelles. Or, on pourrait croire a priori que le digital,
qui crée une rupture forte dans les métiers de l’industrie, ne s’applique pas à ces métiers
intellectuels du service. Rien n’est plus faux.
Dans ces métiers, le digital évolue en deux étapes : d’abord via la dématérialisation des
back-offices, avec des choses assez simples comme le paiement en ligne ou la réception
des factures. C’est une première étape de la digitalisation qui a pu être réalisée assez
rapidement. Puis une deuxième étape qui est fondamentale, et c’est là qu’on parle
vraiment d’ubérisation dans ces domaines, est constituée par la relation client et surtout

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l’utilisation de l’intelligence artificielle. Prenons le cas de ce que l’on appelle le Legaltech
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(donc les avocats, à la mesure de la Fintech dans le secteur bancaire). On peut voir que
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de la documentation, que ce soit en B2C ou en B2B, est déjà automatisée. Ailleurs, dans
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le monde du recrutement, ce sont des plateformes qui se montent pour établir la relation,
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100 % digitale, entre le candidat et la société d’intérim. Il suffit de rentrer quelques


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éléments de compétences que des consultants de la société d’intérim ont pu classifier et


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la correspondance se fait automatiquement. La société d’intérim joue alors un rôle très


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fort, au-delà de celui-ci de prescripteur.


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L’intelligence artificielle va permettre de découvrir des cas pratiques beaucoup plus


importants et une capacité d’apprendre beaucoup plus large que celle d’un avocat par
exemple. La technicité-même de la personne sera moins mise en avant, en revanche sa
capacité à savoir utiliser l’intelligence d’autres cas d’usage au travers du digital lui
permettra d’interagir très différemment avec ses clients. Ce qui est particulièrement
intéressant dans ce mouvement, c’est justement qu’on laisse la technicité au digital et que
l’avocat, le responsable d’intérim ou le consultant sera quant à lui dédié à la relation client.
Il pourra mettre son émotion et son expérience au service de l’explication de ses choix.
C’est vrai pour l’avocat, c’est peut-être encore plus vrai pour un médecin demain.
Il y aurait erreur à croire que l’intelligence artificielle permet de se passer de l’intelligence
humaine. C’est même l’inverse. Ce n’est pas parce qu’on va mettre à disposition de
l’information qu’il y aura capacité à bien l’analyser. Le prisme de l’analyste est primordial.
Mais ce qui est le plus important, c’est la capacité à aller chercher les bons cas d’usage.
L’intelligence artificielle, au sens du « machine learning117 », c’est plutôt la capacité de
trouver de nombreux cas, à la manière d’un juriste qui va consulter un Dalloz et considérer
tous les éléments, analyser les cas et ainsi préparer sa procédure. Cet outil ne remplace
pas l’humain, au contraire, il met l’humain au centre du dispositif. Celui-ci a en effet la
capacité d’analyse et de restitution à une personne qui n’aura pas le recul pour
comprendre ce qu’une machine pourrait lui fournir, si elle avait accès directement à cette
information brute en accès direct sur Internet.
Qu’en est-il dans le conseil, certainement la plus intellectuelle des prestations de services
intellectuels ? On peut dire aisément que la révolution du consulting, dans son mode
opératoire, n’a pas encore été opérée, même si les modes d’achat du conseil ont bien
évolué. Il existe cependant des plateformes de mise en relation comme Hopwork, qui sont
très bien faites. La plateforme, à la manière d’Uber, permet de mettre en relation des
entreprises avec des prestataires de services dans des domaines de prestations
intellectuelles, en adéquation avec la demande. Ce type de plateformes va désormais
bien au-delà du graphisme et concerne désormais le conseil, avec des thématiques
pointues.
Cette mise en relation avec des freelances est aujourd’hui automatisée avec des critères
très précis. On y décrit son expertise, son domaine, son genre, son expérience et on
arrive rapidement à être mis en relation avec une personne. L’étape d’après dans le
monde du conseil ne repose pas sur la personne mais sur l’équipe. Le rôle d’un cabinet de

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conseil d’aujourd’hui est justement de trouver des talents, de savoir les recruter, et on

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recrute de plus en plus avec le digital. Mais un jour, ces plateformes vont être capables
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de former les meilleures équipes en fonction des demandes d’un client, et là on arrivera à
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un autre stade. Finalement, nous ne sommes pas plus à l’abri de la transformation digitale
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que les clients que nous conseillons.


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Le site Doctrine.fr propose un moteur de recherche juridique qui utilise les dernières innovations en matière de Big data et
de Machine learning
En fait, le premier élément de digitalisation dans les métiers de services est la
dématérialisation des processus pour gagner de la valeur et passer plus de temps chez
les clients. Deuxième point d’importance, la formation : il faut investir sur les COOCs et
les MOOCs où on rend la formation très ludique, avec des certifications à la clef, ce qui
est assez classique maintenant. Troisième axe, le recrutement. Capgemini, par exemple,
a lancé en 2016 un programme intitulé Smart Recruit, qui permet de faire passer par le
biais d’un site Web ou mobile, une grande partie de ce que l’entreprise réalisait
auparavant au travers d’un entretien. Cela leur permet de réaliser un premier filtre.
Chez Capgemini, 10 000 candidatures sont reçues chaque année, qui sont ainsi filtrées,
permettant d’économiser entre 25 et 30 % des entretiens. Ce filtre permet aussi, sur
différentes dimensions quantitatives ou de mises en situation (par l’intermédiaire de
vidéos) une meilleure sélection des candidats. Demain, on peut imaginer aisément qu’avec
de l’intelligence artificielle, on pourra utiliser la reconnaissance faciale et la détection de
réactions émotionnelles. Bien entendu, même avec ce nouveau processus, RH et
managers mènent toujours les entretiens, mais cela permet d’optimiser le processus.
Tout cela constitue le back-office du conseil. Le cœur de métier du conseil pourra aussi un
jour être changé par le digital. Cela arrivera sous l’angle de la plateforme de mise en
relation d’experts. Le conseil pyramidal tel que nous l’avons connu, basé sur la force de
frappe et une intelligence pyramidale devra évoluer car les clients recherchent de plus en
plus d’expertise.
Enfin, le digital va aussi jouer un rôle au travers de la quasi obligation dans laquelle sont
ces métiers intellectuels de communiquer et d’exprimer leurs compétences en ligne. Ces
professionnels du service se trouvent en effet dans la nécessité de devenir hyper
spécialistes de leurs domaines et à se former sans discontinuer.
Tous ces éléments digitaux dans ces métiers du service contribuent à remettre l’humain au

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centre.
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Les métiers du service, y compris le conseil, vont donc évoluer. Il y aura de moins en
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moins de secrétariat, de gestion des rendez-vous, de facturation, etc. Tout cela sera
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automatisé. Sur le métier lui-même, si l’on prend les avocats par exemple, ils peinent déjà,
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ils sont trop nombreux et ce n’est pas près de s’arranger. Nous avons déjà écrit que nous
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étions déjà dans une révolution Schumpetérienne118.


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Certes, la situation peut paraître inquiétante à certains, car nous ne maîtrisons pas tout.
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Mais nous allons nous adapter, comme l’humanité l’a toujours fait. Et à terme, ce sera
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bénéfique pour l’espèce humaine dans sa globalité. Cette révolution digitale va même
resserrer les liens. Enfin, n’oublions pas que nous avons encore beaucoup de progrès à
faire pour perfectionner ces technologies : le futur est porteur d’espoir.
Le digital et la santé
Comme dans les autres domaines, l’impact du digital sur l’univers de la santé se réalise à
plusieurs niveaux : patient, infrastructure, technologie, offre, parcours personnalisé, entre
autres. Les recenser de manière exhaustive pourrait faire l’objet d’un livre à part, aussi
nous allons nous contenter d’un très rapide aperçu dans les pages qui suivent.
Le premier niveau d’impact du digital concerne les outils de communication. Du côté du
patient, d’abord. Cela fait déjà belle lurette que celui-ci a compris tout le bénéfice qu’il
pouvait tirer d’outils comme Internet. Lancé en 2000, le site Doctissimo.fr figure dans le
top 50 des sites les plus fréquentés en France. Tout comme pour les achats en ligne, le
patient moderne sait qu’il peut aller en ligne à la recherche d’informations sur sa santé.
Peu importe d’ailleurs la fiabilité de ces informations, le patient se fera une opinion par lui-
même, ou pourra échanger avec d’autres patients, ou proches de patients, sur les
différentes pathologies qui l’intéressent. Si cela paraît anodin pour les pathologies
mineures, cela peut prendre des dimensions beaucoup plus importantes dans le cas de
maladies plus sérieuses, ainsi que pour les maladies rares, Internet offrant alors un point
d’accès entre les familles, et permettant de créer des communautés d’entraide. Mais

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aussi du côté des professionnels, qui s’organisent déjà en communautés de praticiens, sur

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des plateformes qui ne sont pas sans rappeler les réseaux sociaux habituels, comme la
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plateforme Comuniti mise à disposition par le laboratoire MSD.
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Le second concerne la prise en charge des patients, et en premier lieu les infrastructures.
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L’informatisation du dossier médical s’est faite de manière parcellaire : chaque praticien


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dispose aujourd’hui de logiciels lui permettant de gérer l’historique de sa patientèle, et


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toutes les données qui s’y rapportent. Chacun peut s’en rendre compte à l’occasion d’une
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visite chez le dentiste. L’unification entre les dossiers établis chez tous les praticiens n’est
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pas encore réalisée, sa mise en œuvre est en cours : le dossier médical partagé (DMP) a
été lancé par la loi du 13 août 2014, et son déploiement n’est pas encore achevé, même
s’il est déjà possible d’accéder au portail ouvert à cette occasion119. Des établissements
font figure de précurseurs en la matière, comme l’hôpital d’Arras
Le troisième niveau concerne les technologies. L’avènement du digital dans la salle
d’opération s’effectue par différents chemins : mesure, contrôle, ou collecte de données,
endoscopie, etc. Parmi les plus intrigants, on peut noter l’apparition de systèmes de
réalité virtuelle dans les blocs opératoires, comme par exemple le système proposé par la
start-up Surgevry120, et qui permettent à de jeunes chirurgiens de suivre les gestes de
spécialistes plus aguerris. La robotisation du bloc-opératoire est également en route :
l’exemple de Medtech est éloquent. Créée par le médiatique Bertin Nahum, cette
entreprise qui distribue des robots chirurgicaux, est passée entre les mains de Zimmer
Biomet, le leader mondial dans le domaine des appareils orthopédiques.
Mais le grand chambardement qu’apporte le digital, c’est au niveau de l’offre qu’il se situe
: la santé connectée, aussi appelée e-santé, est au programme de toutes les
conférences, toutes les études, tous les articles qui évoquent les grandes mutations de
cet univers. Au travers du smartphone, l’univers de la santé – laboratoires et hôpitaux
confondus – dispose d’un accès permanent, en temps réel, au patient. Cela ouvre des
possibilités énormes, par exemple de contrôle de la prise de médicaments, ou de divers
tests que le patient peut effectuer plus ou moins seul. De nombreuses start-up se sont
lancées sur cette voie, et la vitalité du secteur témoigne de l’enthousiasme des acteurs
industriels pour les possibilités offertes : citons par exemple CardioLogs, qui utilise une
approche Big Data pour analyser des électrocardiogrammes, ou HeartBit, un holter121
miniaturisé.
Le dernier niveau que nous allons évoquer est celui du parcours personnalisé dont dispose
désormais le patient. C’est l’avènement, tout comme pour réserver un cours de tennis ou
une leçon de piano, de plateformes de réservation en ligne, pour prendre rendez-vous
avec tel ou tel praticien, en consultant les créneaux disponibles sans passer par une
assistante : la désintermédiation touche aussi ces professions-là. À terme, c’est aussi la
possibilité d’effectuer des consultations à distance, par exemple dans des zones où il est
impossible de disposer de suffisamment de spécialistes. De nombreux acteurs se sont
d’ores et déjà lancés dans la conquête de ces millions de patients connectés, des start-up
comme Doctolib ou des acteurs historiques de la santé, comme Medelli, lancé par le

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laboratoire MSD.

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Dans un article paru dans la revue Variances122, Karim Hatem, du cabinet Ylios, recense
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la multitude de bénéfices qui découlent de l’innovation numérique : l’automatisation des
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tâches, la transmission de la connaissance à une plus grande échelle, l’abaissement des


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coûts de coordination facilitent l’industrialisation des pratiques de santé publique, rendue


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nécessaire par l’allongement de la durée de vie, et l’accélération de la hausse des


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dépenses de santé. La personnalisation de l’offre constitue l’autre grand volet.


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Industrialisation et personnalisation de l’offre, c’est au travers de la combinaison de ces


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deux approches que la transformation digitale de ce secteur s’opérera, pour le plus grand
bénéfice des patients, c’est à dire de nous-mêmes.
Le digital et l’immobilier
L’irruption du digital dans le secteur immobilier n’est pas si récente. Ce secteur a déjà
connu sa première grande transformation numérique il y a une trentaine d’années déjà,
avec l’irruption de services minitel rapidement transportés sur l’Internet : Se Loger,
Particulier à Particulier, sont des noms qui résonnent fortement à l’oreille de tous ceux qui
ont eu un jour à chercher un appartement. Les agences immobilières, prises de court, ont
mis du temps à réagir et à se lancer elles aussi à l’assaut du Web, au travers de services
en ligne et d’applications mobiles.
Mais la digitalisation de ce secteur s’est également produite par l’apparition de services
annexes, lancés par des opérateurs plus inattendus, comme Google ou Le Bon Coin. Le
moteur de recherche, par exemple, via l’application Google Street View, a longtemps été
le seul à offrir un moyen de visualiser les vues extérieures des produits mis en vente ou à
la location, ou les commerces à proximité. Google s’est ainsi retrouvé de fait comme une
solution complémentaire et totalement digitale aux catalogues de produits diffusés sur
papier par les promoteurs et les agents immobiliers. Quant au site Le Bon Coin, il
revendique aujourd’hui le statut de première plateforme de mise en relation entre

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particuliers, devant les acteurs spécialisés, ce qui ne va pas sans créer de réels

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problèmes même aux particuliers, qui se posent la question de savoir où diffuser leurs
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offres pour une meilleure efficacité.
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La digitalisation du secteur de l’immobilier laisse ainsi planer deux menaces sur les
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opérateurs traditionnels. La désintermédiation, d’une part, qui permet aux particuliers de


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se passer des services d’une agence ; le développement de nouveaux parcours digitaux,


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qui séduit une population qui ne veut plus se contenter d’une simple annonce et aspire à
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des services plus sophistiqués : visite virtuelle des logements, informations sur les
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services à proximité, niveaux d’imposition moyens, etc. C’est ce que proposent déjà
certains sites, comme les géants trulia.com aux États-Unis, ou realestate.com.au en
Australie : plutôt que de proposer des offres similaires à proximité du bien immobilier que
l’on consulte, ces sites présentent les avantages offerts par l’emplacement : type de
population environnante, commerces et écoles à proximité, etc.
Les sites d’information et de mise en relation ne constituent cependant qu’une facette de
la transformation digitale du secteur immobilier. La digitalisation touche aussi directement
les professionnels tels que les syndics et les gestionnaires d’immeuble. L’utilisation de
services en ligne, de plateformes de dématérialisation ou de partage de documents, ouvre
un large champ de collaboration et d’interactions entre propriétaires et syndics, ou entre
habitants d’un même immeuble, voire d’un même quartier. On a vu fleurir, depuis quelques
années, avec plus ou moins de succès, des sites de mise en relation entre voisins,
comme Ma-Residence.fr. Un réseau social de voisins a-t-il du sens ? Pas forcément, mais
une certaine dose de local dans des univers collaboratifs n’est pas inappropriée.
Du côté de l’immobilier de bureaux, la transformation digitale passe par un remodelage de
l’offre, à l’intention d’entreprises beaucoup plus regardantes sur le cadre de vie offert à
leurs collaborateurs. Les initiatives récentes de deux des plus gros opérateurs en France,
Nexity avec Blue Office, et Bouygues Immobilier avec NextDoor, illustrent parfaitement ce
point. Ces offres ont été spécialement conçues pour répondre aux nouveaux besoins des
entreprises clientes : mise à disposition d’espaces de coworking pour les entreprises qui
autorisent le télétravail ou celles qui n’ont pas les moyens d’investir dans des locaux plus
onéreux, espaces modulables, accès partagés et facilités aux technologies numériques,
services de conciergerie, aménagements plus respectueux de la qualité de vie avec une
grande clarté et des mobiliers modernes, salles de réunion qui facilitent les activités
collaboratives ou de brainstorming, et surtout, des tarifications d’une plus grande
souplesse.
Là encore, on doit à d’audacieuses start-up certaines des plus belles innovations.
WeWork, par exemple, le géant américain des espaces de coworking, qui s’est lancé
dans une stratégie de conquête dans la plupart des grandes agglomérations, en
s’adressant en premier lieu aux entrepreneurs et aux petites entreprises. Ou encore la
start-up française Bureaux à partager123, qui permet à n’importe quel propriétaire d’un
espace de réunion de le mettre à disposition de personnes qui cherchent une salle de
réunion pour une conférence, un séminaire, une formation ou un cocktail.

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L’exemple NextDoor
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En matière d’innovation digitale, l’exemple de Nextdoor est particulièrement éloquent. Voici
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une entreprise créée en 2015, et qui est en train de bouleverser le concept d’espace de
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travail collaboratif. L’idée germe dans les mois qui précèdent au sein de Bouygues
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Immobilier, où l’on observe une évolution des attentes des entreprises et de leurs
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collaborateurs pour des environnements de travail plus proches de ceux qui fleurissent
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dans la Silicon Valley que dans les tours ternes et grises du quartier de la Défense. Oui
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mais voilà : la plupart des expériences d’espace de « coworking » se sont soldées par
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des échecs dans les deux années qui ont suivi leur ouverture : comment assurer la
réussite de tels projets ?
La solution prend forme dans l’esprit de Philippe Morel et de Stephen André, en charge du
projet. L’idée maîtresse, c’est de mixer espaces de coworking et véritables bureaux, pour
que les entreprises qui réussissent puissent rester et se développer à la même adresse.
Chez Nextdoor, on croise donc aussi bien des entreprises unipersonnelles que des PME
de quelques dizaines de salariés. La modularité de l’offre assure son succès, et très vite
l’entreprise remplit un puis deux sites, alors qu’une dizaine doivent ouvrir en 2017.
Où intervient le digital dans un tel projet ? C’est plutôt la question inverse qu’il faudrait se
poser : où n’intervient-il pas ? De la gestion des ressources partagées entre les différents
occupants d’un bâtiment Nextdoor jusqu’à la typologie des occupants des bureaux mis à
disposition par la société, tout respire le digital. Ici, pas de clef de bureau, mais des
passes électroniques reprogrammables, évidemment. Pas de bureaux sans une
connectique parfaitement étudiée, bien entendu.
Mais c’est surtout autour du facteur humain que la différence se fait ressentir.
Contrairement à d’autres centres d’affaires, Nextdoor a joué sur la carte de la convivialité
et de l’appartenance à une même communauté. Un occupant Nextdoor peut, pour le
même tarif, accéder à tous les autres bâtiments Nextdoor. Des « meet-up » sont
régulièrement organisés pour que les occupants apprennent à se connaître. Des salles de
réflexion communes, des salles de sport, une librairie, tout est fait pour fonctionner à
l’inverse de ces espaces ou personne ne se connaît. Et si l’envie vous prend d’aller visiter
l’un des espaces Nextdoor, il vous suffit de passer par le site Internet pour réserver
l’heure de votre (prochaine) visite…
Le cas Nextdoor est particulièrement intéressant, car il illustre l’une de ces rares
occasions où un grand groupe a décidé de prendre les devants plutôt que de se faire
ubériser, en détachant une équipe interne d’intrapreneurs, pour concevoir, développer et
faire croître un projet qui aurait pu être concurrent. Il est encore trop tôt pour comparer
les activités respectives et la rentabilité de Nextdoor et de sa maison mère, mais la
démarche est suffisamment intéressante pour donner des idées à d’autres acteurs
historiques dans des domaines différents.

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Le digital et l’énergie
Par un heureux hasard des calendriers, la transition énergétique coïncide, avec la
transformation digitale des entreprises de ce secteur. Le digital offre en effet de
formidables espoirs du côté de la gestion durable des ressources naturelles. Mais par où
commencer ? Si l’on suit le parcours d’une entreprise comme EDF, cela commence par la
digitalisation de la relation client. Ce n’est pas un changement mineur, car au-delà du
changement technologique, il faut faire accepter cette transformation par le corps social.
En passant d’un mode de fonctionnement à l’ancienne, autour d’une relation humaine,
physique, par téléphone ou en boutique, à une relation majoritairement dématérialisée, ne
risque-t-on pas de perdre en qualité de service, et de bouleverser le travail des
collaborateurs de l’entreprise ? Comme pour tous les changements à l’échelle de
l’entreprise, l’enjeu organisationnel est majeur. Il ne faut pas que le digital reste en silo, et
pour cela, il faut impliquer les responsables produits. Ce n’est pas une question de
génération : tout le monde doit pouvoir s’approprier le concept.
Toute la panoplie des points de contacts digitaux doit alors être envisagée : interface
Web, réseaux sociaux, nouveaux modes d’interaction qu’on essaie d’intégrer dans le

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système de gestion de la clientèle, en attendant la relation client omnicanale. L’ensemble

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des services sont concernés, de la prise de rendez-vous à la gestion de factures
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dématérialisées. Début 2017, chez EDF, près de 40 % des transactions se font déjà via le
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digital.
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Il ne faudrait pas croire que la digitalisation de la relation client soit le seul enjeu dans le
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domaine de l’énergie. L’univers des objets communicants vient ajouter une complexité
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supplémentaire. De ce point de vue, deux types d’objets doivent être considérés : les
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compteurs et les objets connectés.


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Le compteur connecté apporte de la modernité sur un sujet qui était très en retard. Avec
lui, on n’a plus besoin du relevé du compteur. L’énergie doit accéder à un standard de
modernité qui est le standard partout ailleurs dans l’univers des services : je sais ce que je
paie, j’ai accès à toutes les factures, je peux régler mes problèmes de contrat via
Internet, changer la puissance, ajouter des services. Ce qui est envisageable pour la
téléphonie ou les services bancaires doit l’être tout autant pour l’énergie.
Le compteur connecté représente également un investissement colossal dans la
modernisation de l’outil technique du distributeur. Pour reprendre le parallèle avec la
téléphonie, on est sur des échelles similaires avec le déploiement de la 4G : 6 milliards
d’euros au total. Un investissement élevé, mais essentiel, qui sera un accélérateur de
modernité et de digitalisation. En parallèle, le compteur connecté peut rapporter aux
opérateurs une quantité d’informations suffisante pour personnaliser la relation. Attention,
on n’est pas dans les mêmes ordres de grandeur que pour la téléphonie mobile : un relevé
toutes les 10, 20 ou 30 minutes, cela fait peu de données par comparaison, on dispose
de peu de données précises. Mais on en possède suffisamment pour en tirer des
conclusions utiles. Par exemple le niveau de qualité de l’isolation de l’appartement
(données qu’on peut déjà déduire de la facture actuelle, toutefois).
Avec les objets connectés, on change de paradigme, car on peut collecter bien d’autres
données : température, niveau de bruit, etc. L’Idate124 recense déjà de l’ordre de 15
milliards d’objets connectés dans le monde, et en prédit de l’ordre de 80 milliards d’ici à
2020. Les possibilités sont immenses, à partir du moment où l’on peut faire participer
l’ensemble des partenaires de cet écosystème en train de se former. C’est là cependant
que se situe la bataille : les acteurs de l’Internet des objets (ou IoT, Internet of Things)
sont assez ouverts en consultation, mais assez peu en action.
Pour les fédérer, des initiatives au sein de filiales dédiées existent, comme celle qu’a
lancé EDF, et nommée Edelia. L’objectif est de préparer les produits, ou les offres, avec
des équipementiers comme Netatmo, Withings, avec les filières d’équipement du bâtiment
(fabricants de chaudières ou de domotique), ou avec plus de précautions, avec les
GAFAM (comme Nest, rachetée par Google en 2014).
Le sujet est sensible. Pour EDF, il s’agit de garder la main et de ne pas se retrouver
relégué au niveau d’un simple fournisseur d’énergie. Car le risque, pour les fournisseurs
d’énergie, c’est de se retrouver parmi une foule d’acteurs qui s’intéressent à la smart-

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home, chacun avec son standard, à base d’interfaces intelligentes et de machine learning.
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La menace que constitue Nest, est globale : via sa filiale, Google peut à la fois lorgner du
A
côté des assureurs et gérer tout seul le contrat d’électricité. La crainte d’une
y
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désintermédiation est parfaitement recevable. Nous vivons une formidable époque où


d

chaque grand acteur tente d’imposer sa plateforme domotique : Apple avec son
de

application « Maison », Orange avec sa nouvelle Livebox, chacun veut fédérer l’ensemble
oa

des équipements. Mais qui est vraiment le plus légitime pour le faire ? EDF avec son offre
pl

Sowee, ou Engie avec sa Zenbox souhaitent clairement ne pas se laisser dépasser.


U

Une autre voie d’analyse consiste à s’intéresser à ce qui se fait ailleurs. On se rend alors
compte que les situations sont très différentes d’un pays à l’autre. Le pays le plus avancé,
en Europe, aurait pu être l’Italie, qui a déployé le compteur intelligent il y a déjà dix ans,
mais sur des technologies bas débit, désormais dépassées : ils sont arrivés dix ans trop
tôt, et cela freine le développement de services plus évolués.
Les États-Unis, à la pointe dans bien des domaines – Nest a été conçu par des anciens
d’Apple – est dans une situation bien paradoxale. Le marché américain étant
complètement atomisé, autour de petits acteurs locaux devenus des monopoles sans
concurrence, aucun programme innovant de grande envergure n’a vu le jour. De plus, ce
marché se trouve au tout début de la préoccupation énergétique plus incitative, avec par
exemple des tarifs à la tranche ; en France, cela fait vingt ans que de telles initiatives sont
mises en œuvre. Finalement, c’est du côté du Royaume-Uni que la situation semble la plus
avancée : le marché y est concurrentiel, avec une chaîne de valeur pleine d’acteurs
différents. Pourtant, la « smart home » peine à y décoller.
En France, tous les grands acteurs de l’énergie ont leur filiale, leur entité « smart home »
ou « smart city ». Les pouvoirs publics sont assez présents, et l’ADEME a injecté des
financements conséquents pour développer ces concepts. Mais la question de la maturité
des besoins mérite d’être soulevée : on est encore loin de savoir ce qui plaît réellement
aux clients. Les dispositifs de sociétés comme Netatmo ou Withings couvrent des besoins
encore trop parcellaires, et restent des produits d’ingénieurs : il leur manque une couche
d’intégration, finalement comblée par le smartphone. Et pour l’instant, on n’a pas encore
trouvé le produit assez sexy et plug and play, dans lequel les clients seraient prêts à
investir de l’ordre de 500 euros.
Le problème majeur, c’est que le monde des acteurs de l’énergie vit un moment difficile,
économiquement. Le gaz de schiste américain a complètement déstructuré ce secteur :
alors qu’on est en pleine COP22, on continue de brûler du pétrole et du gaz comme si de
rien n’était, de par le monde. Et le prix de gros du MWh125 est en-dessous du tarif régulé
dans le cadre de l’ARENH126. Dans ces conditions, difficile d’investir à fond dans le
digital…

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Le digital et la grande distribution
100 000 postes à temps complet127. C’est le nombre proprement ahurissant de nouveaux
emplois qu’Amazon a annoncé, en janvier 2017, envisager de créer d’ici mi-2018 aux
États-Unis. Pour une entreprise qui compte déjà plus de 300 000 salariés à temps
complet ou partiel de par le monde, c’est une hausse vertigineuse, qui rend bien compte
de ce que le digital permet dans l’univers de la grande distribution. Car la dynamique
impulsée par cette entreprise va bien au-delà de son univers propre : quand Amazon
grossit, c’est tout un univers de partenaires qui en bénéficie, de ses propres fournisseurs
aux entreprises de livraison.
De l’autre côté de l’Océan Pacifique, le géant du e-commerce chinois se porte tout aussi
bien. Le 11 novembre 2016, jour de son Global Shopping Festival, Alibaba annonçait un
niveau de ventes record : en une journée, son chiffre d’affaires a atteint 17,8 milliards de
dollars, en hausse de plus de 30 % par rapport à l’année précédente, soit le quart du
chiffre d’affaires de l’e-commerce français, comme le rappelle le Journal du Net128. Un tel
succès auprès des consommateurs ne peut laisser indifférent ni les marques ni les
distributeurs.

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Les premières ont vite compris l’intérêt qu’elles pouvaient tirer de telles opérations : elles
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en deviennent peu à peu les partenaires. Le bouton Dash d’Amazon en est le signe le plus
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récent. Des couches-culottes au dentifrice en passant par la lessive, ces remarquables
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petits boutons très simples à installer, passent la commande de réassort


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automatiquement, dès que vous arrivez à court de produit. Technologiquement, il n’y a rien
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de miraculeux là-dedans. Mais d’un point de vue purement business, c’est absolument
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génial.
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Appuyez, c’est commandé


On se demanderait même pourquoi les acteurs traditionnels de la grande distribution n’y
ont pas pensé plus tôt. Ce qui leur manque, c’est ce savoir-faire insensé, accumulé en
près de vingt ans, par le géant de l’e-commerce américain. C’est cette capacité à tester
sans cesse de nouveaux produits, de nouvelles approches, en acceptant de faire face à
des échecs, comme ce fut le cas avec des produits comme son téléphone, le Fire Phone,
lancé en 2014 et arrêté en 2015.
Mais attention, tout n’est pas forcément tout rose entre Amazon et les marques. Via son
site Internet, la firme américaine dispose de tels volumes de données concernant les
consommateurs, leurs goûts ou leurs habitudes, que les marques pourraient en devenir
jalouses. Ne risquent-elles pas en effet de voir le site proposer des marques concurrentes
dans le seul intérêt d’accroître ses propres marges, au détriment du développement de
marques aux tarifs moins souples ? À ceux qui croient qu’un monde régi par Amazon
correspondrait à un jardin d’Eden, nous conseillons vivement la lecture de la biographie
non officielle de Jeff Bezos, The Everything Store, bien évidemment en vente sur
Amazon129 !
Du côté des distributeurs, l’attentisme des débuts a laissé place à une dynamique plus
intéressante. Tous sont passés au Web, et permettent d’acheter des produits en ligne : si
certains sont capables de vous livrer (comme Carrefour qui a racheté RueDuCommerce),
d’autres se contentent de réserver l’article en magasin, à charge au consommateur de
venir le chercher. Des initiatives révolutionnaires, comme le Drive, sont apparues. Et
certains se sont même lancés sur le territoire audacieux des comparateurs de prix,
notamment au travers d’applications mobiles, dont les prix sont parfois mis à jour par les
consommateurs eux-mêmes. C’est également Darty, rappelons-le qui a créé et déposé le
terme « click and collect130 ».
Quelles grandes tendances émergeront de ces transformations ? Voici quelques pistes
qu’il nous semble bon d’investiguer. D’abord, celle d’une convergence forte entre
distribution physique et e-commerce : à moyen terme, il ne sera plus possible d’exister en

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tant que distributeur, généraliste ou spécialisé, sans disposer d’un site e-commerce

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connecté à son réseau, à ses stocks, et à ses médias sociaux.
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Ensuite, des bouleversements auront lieu très probablement dans la partie acheminement
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: si Amazon annonce la livraison par drone, dont l’usage restera sans doute anecdotique,
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Uber pourrait très bien tirer profit de sa plateforme pour assurer la logistique urbaine et
de

concurrencer des acteurs déjà installés, comme UPS, TNT ou La Poste, si celle-ci survit
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aux mutations en cours. Enfin, l’achat impulsif, en mobilité, prendra le dessus sur l’achat
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réfléchi derrière un poste de travail : quelles en sont les implications en termes humains,
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d’interfaces ou de gestions des risques liés à l’addiction ?


Assurément, l’univers de la distribution n’est pas arrivé au terme de ses mutations.
Interview de Pierre Denis
Pierre Denis est le fondateur de Retail Explorer (Solocal Group) et expert de la
distribution. L’interview est aussi accessible en ligne sur https://www.youtube.com/watch ?
v=Ib1GmRyT6U0
Avec l’arrivée d’Amazon Prime Now en France, peut-on dire qu’Amazon va tuer la
distribution classique ?
Non. Il faut dissocier Amazon qu’on connaît tous et sur lequel on fait des commandes
plutôt de produits non alimentaires, du sujet Amazon Prime Now, qui a été mis en avant
plutôt sur la livraison à domicile notamment de l’alimentaire. En fait, il ne faut pas oublier
que dans le centre-ville, le petit commerçant c’est aujourd’hui Carrefour City, Monoprix ou
Franprix : il s’agit donc en fait de grands retailers, et non de petits commerces face
auxquels Amazon Prime Now cherche à se positionner. Le sujet pour nous est moins pour
Amazon de se lancer dans le commerce alimentaire que d’attirer de nouveaux clients dans
son système d’abonnement, par l’alimentaire en tête de gondole, et de parvenir à des
achats non alimentaires. Toute la stratégie, c’est soit d’augmenter la fréquence des clients
qui viennent sur Amazon, soit de s’en servir pour tous ceux qui aujourd’hui consomment via

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des services comme Auchan Direct, comme Houra.fr ou comme Ooshop, c’est à dire de
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la livraison en domicile en centre urbain. Eux vont souffrir. Mais cela représente une
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quantité négligeable : un Auchan Direct, ce n’est même pas l’équivalent d’un magasin d’un
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grand distributeur en termes de chiffre d’affaires.


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Donc la réponse est « non », mais demain, dans 5 ou 10 ans, la réponse pourrai-elle être
de

« oui » ?
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Je ne crois pas que sur l’alimentaire Amazon puisse prendre une part de business
pl

significatif en France, ce qui ne veut pas dire que c’est la même chose dans d’autres
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pays, compte tenu de l’importance du Drive, qui représente aujourd’hui à peu près 4 % du
chiffre d’affaires de la distribution alimentaire, qui poursuit sa croissance. Il y a deux
enseignes qui sont aujourd’hui très en avance dans ce domaine-là, Auchan et Leclerc. Le
maillage des commerçants terrain en France est tel que ça sera plus difficile. À moyen
terme, c’est certainement un coup gagnant.

Amazon va-t-il balayer les petits commerçants ?


Quelle est la part du digital au sein du commerce de distribution ? En ajoutant les Web to
store, les drive, Amazon etc., est-ce qu’on arrive à savoir ce que cela représente ?
Si on parle des grands retailers, aujourd’hui en dehors du Drive, c’est peu significatif. Ils
ont tous mis en place des initiatives importantes, tous intégré une dimension digitale, mais
ce sont des entreprises qui ont avancé à reculons. Quand on a été propriétaire de
magasins, on a vu le digital, pendant très longtemps, comme un concurrent qui allait faire
baisser la valeur patrimoniale de son magasin.
Ce n’est pas toujours vrai. Darty réalise déjà 30 % de ses ventes en Web to store, et si
on enlève le gros électroménager, ça monte à 50 %. Sous la pression d’Amazon, il s’est
passé quelque chose juste avant l’été.
En effet, c’est la fusion, ou plutôt le rachat de Darty par la FNAC. C’est un mouvement
tout à fait naturel et normal, un mouvement de survie, d’abord parce que ça va améliorer
leurs conditions d’achat – on est quand même dans un business où la problématique
numéro 1, c’est d’acheter bien pour vendre moins cher. La fusion des deux sociétés va
donc améliorer les conditions d’achat de ces deux retailers, et par ailleurs, ils sont assez
complémentaires. Maintenant, ce qui va être difficile à gérer dans cette fusion, comme
dans toutes les fusions, c’est la différence culturelle.

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Quelque chose d’important s’est passé : l’Autorité de la concurrence a donné son feu vert
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à cette fusion qui autrement n’aurait pas eu lieu, en raison du risque de position dominante
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de la FNAC à l’issue de cette opération.
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Position dominante si on ne considère que les magasins, mais là, on ne peut plus
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de

considérer que les magasins. Vous prenez toutes les places de marché non alimentaires,
vous ajoutez Amazon, l’ensemble de tout ceci fait qu’on ne peut plus considérer que la
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FNAC est en position dominante. Effectivement, dans le domaine non alimentaire, le poids
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du Web to store est important. Il va croître et ce qui est assez remarquable, c’est qu’on
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peut étendre cela à la manière dont le digital va rentrer dans tous les magasins. Prenez
une enseigne comme Leroy-Merlin : aujourd’hui, je ne crois pas que le Web to store
représente une part significative pour eux – bien que je n’aie pas de chiffres exacts. En
revanche, ce qu’ils réussissent à faire et qui est assez remarquable, c’est la continuité du
service à partir du digital : vous faites une commande en ligne, vous appelez Leroy-Merlin,
vous avez automatiquement un interlocuteur qui reconnaît votre numéro et qui vous
demande si vous appelez pour la commande en cours et si vous souhaitez venir la
chercher en magasin ou si vous souhaitez vous faire livrer. Cette continuité de service
digital, ça c’est remarquable, et c’est ce qui va se développer.
Finalement, le digital n’est pas un concurrent de la distribution, mais un moyen d’améliorer
l’expérience client ?
Exactement. Comme je l’explique régulièrement à des retailers ou des patrons de
magasin, penser que vous allez perdre de la valeur patrimoniale parce que vous allez faire
rentrer du e-commerce chez vous, c’est une vue de l’esprit, ce n’est plus possible, c’est
se tromper de débat de nos jours. Je leur suggère souvent de regarder comment se
comportent leurs enfants, ça permet de donner un autre éclairage au débat.
S’il est si difficile de faire passer le message auprès des acteurs classiques, que peut-on
imaginer dans le futur, où justement il y a des Amazon sur le terrain, même s’il n’y a pas
qu’Amazon, qui sont très actifs, et qui, eux, vont vers le magasin physique ?
Je ne crois pas beaucoup au succès des e-commerce qui vont tenter de bousculer le
marché avec des magasins. Je ne crois pas que l’histoire va s’écrire dans ce sens : je
peux me tromper, mais je n’y crois pas. Ce qu’on voit depuis 5 ans, c’est que si on prenait
les 10 plus grands retailers ou les 10 plus grands du e-commerce, il n’y avait pas un seul
acteur traditionnel « brick and mortar » dans ce top-là. Mais aujourd’hui, ils sont tous en
train de remonter, tous, les Walmart, les Carrefour et tous les autres, avec le temps, et
avec leurs difficultés. Le problème numéro un, dans ce secteur, ce n’est pas de mettre de
l’argent dans le e-commerce, mais c’est la logistique, c’est le système d’information.
Fondamentalement, quand vous avez, comme Intermarché, 1800 magasins à livrer, quand
vous avez des systèmes logistiques construits dans un monde qui était le monde du
magasin physique, et que vous devez passer dans le monde de la marketplace, et bien
vous mettez le doigt sur des systèmes qui ne marchent pas bien ensemble. Le premier
enjeu de la transformation digitale dans ce secteur, c’est celui du système d’information.
Mais cela demande du temps. Un changement de système d’information, c’est à peu près

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trois ans. Mais une fois qu’ils l’auront fait, je pense qu’ils seront capables de venir lutter.

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Dans le monde de ceux qui n’y arrivent pas, il risque aussi d’y avoir des consolidations ou
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de la reconfiguration.
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Oui, probablement. En fait, il y a deux phénomènes. Il y a le secteur de la distribution


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généraliste, qui est déjà très concentré en France. Est-ce qu’on va aller plus loin ? Je ne
de

le sais pas. Sur les verticales, que ce soit le bricolage, le jardin, là on aura certainement
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des concentrations plus importantes, parce qu’il est presque plus facile pour un e-
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commerçant d’aller attaquer des verticales, que d’attaquer des généralistes. Le problème
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des généralistes, c’est qu’ils se font grignoter un petit peu par tout le monde. Et
particulièrement pour les généralistes des retailers, ils se sont faits grignoter du non
alimentaire, qui était rentable, et ça c’est un vrai problème pour eux.
Mais justement, est-ce qu’ils pourront continuer avec la partie alimentaire qui est moins
rentable ?
Je n’ai pas de grosse inquiétude là-dessus. La seule et véritable inquiétude, c’est peut-
être la spirale déflationniste des prix en France, qui grignote les marges des deux côtés,
aussi bien du côté des fabricants que des distributeurs. Si vous écoutez les patrons des
grandes enseignes en 2017, ils vous disent tous qu’ils vont gagner 2 points de part de
marché à trois ans. Alors quand vous faites la somme des 2 points de part de marché,
vous arrivez à 120 %, donc il y a un petit souci. On peut prendre le cas de Géant par
exemple, une enseigne qui a toujours eu des difficultés depuis quinze ans, et qui a fait le
choix il y a trois ans de passer d’un statut d’hyper moyen à discounter de la distribution
alimentaire. C’est un choix du patron de Casino, Jean-Charles Naouri, qui a voulu faire un
vrai discounter avec Géant. Il leur a fallu trois ans pour voir le bénéfice de cette énorme
baisse de prix. Mais cela montre aussi que c’est en baissant ses prix qu’il a repris des
parts de marché.
Est-ce qu’il n’y a pas un besoin de différenciation entre les enseignes, comme le souligne
votre étude Panotrade 2016131, est-ce que le digital ne peut pas y contribuer ?
Si, le digital peut électriser. On va prendre un exemple récent : la réalité virtuelle ;
Carrefour, dans son « mois Carrefour », qui dure quatre semaines, a lancé une opération
avec la possibilité, un peu comme dans Pokemon Go, de voir au travers d’un casque de
réalité virtuelle surgir des produits, des promotions, des choses dans ce genre. On voit
bien que « l’événementialisation », qui est quand même extrêmement importante, peut
être une manière de se différencier. Je ne sais pas si le pari de la réalité virtuelle va se
transformer en succès, mais ça montre bien que ces enseignes sont capables d’être très
innovantes. La question importante, c’est de savoir si cela va concerner la masse : quelle
fraction des millions de personnes qui fréquentent leurs magasins peuvent-ils animer par
ce genre d’opérations ?

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Le digital, l’informatique et les télécoms
L’informatique et les télécoms sont un peu frères ennemis. Très proches l’un de l’autre, ils
ont tendance à fusionner de manière bi convergente : l’informatique (que les modernes
s’échinent à nommer IT, c’est plus cool), ne se conçoit plus sans réseau car elle est
omniprésente (c’est l’avènement de l’informatique omniprésente ou « ubiquitous
computing132 »). D’autre part, les télécoms ne se pensent plus sans informatique car tout
y est IP, numérique et piloté par ordinateur. À l’avenir, même le réseau mobile sera
virtualisé au travers de technologies OpenStack133. Et pourtant, ces deux métiers
continuent de coexister sans vraiment se parler. Les compétences réseau sont bien
différentes des compétences informatiques, les vocabulaires des deux populations restent
distincts et enfin, les logiques s’y affrontent souvent, aussi bien d’un point de vue
technique que marketing.
Ces deux filières sont cependant toutes les deux très fortement touchées par la transition
digitale. Cela pourrait paraître paradoxal, car ce sont justement les métiers qui sont
derrière la transformation digitale. Au-delà de ce point, force est de constater que
l’informatique a été la première profession à être ubérisée. Et ce n’est sans doute pas fini.

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Nous avons vécu ceci de l’intérieur, laissez-nous vous raconter cette histoire, riche

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d’enseignements. ss
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Guillaume Villon de Benveniste, auteur d’un excellent blog sur l’innovation134 où il
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interviewe divers acteurs des nouveaux marchés, se livre dans un article fort intéressant à
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une analyse sur le secteur des télécoms, à l’aube d’une « troisième révolution industrielle
d
de

» déjà évoquée plus haut. Cette analyse nous a intéressés et interpelés au premier plan.
oa

Cette révolution industrielle est déjà une réalité avec, en son cœur, un paradoxe assez
pl

étrange, fort bien souligné par Guillaume dans son article. Sans télécoms pas d’Internet,
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sans mobiles et sans 3G/4G/4G+ et bientôt 5G, pas d’Internet mobile et enfin, sans
innovation permanente, pas de satisfaction clients, car ceux-ci en veulent toujours plus et
plus longtemps. De l’autre côté de ce paradoxe de la transformation digitale, on trouve le
principe qui voudrait que ce soient les opérateurs qui investissent et les « OTT135 » qui
bénéficient auprès du public, de cette image d’innovation. Ils sont d’ailleurs responsables
des effondrements de marge et donc des difficultés actuelles des opérateurs en Europe
(aux Amériques, les prix et les marges sont confortables, comptez environ 150 dollars par
mois pour un accès fibre à faible débit au Canada et environ 60 à 75 dollars pour un
forfait mobile). Dans les pages qui suivent, Mathieu Destot, vice-président Europe
d’Alcatel Lucent Enterprise, explique ce phénomène de l’intérieur.
En résumé, les télécoms investiraient dans les réseaux, la transformation digitale et les «
over the top » récolteraient. Mais la réalité est-elle si simple ?
OTT et transformation digitale
Pour les béotiens, les « OTT136 » sont les services comme Google Hangout, Skype,
WhatsApp, Viber etc. et les nombreux services Internet qui viennent vendre de la valeur
ajoutée (avec aujourd’hui Netflix et ses confrères américains non encore arrivés en
France) sur les réseaux gérés par les opérateurs. En d’autres termes, l’argent changerait
de mains et ces services « OTT » vampiriseraient les revenus tout en aspirant des
volumes de plus en plus significatifs de la bande passante car ils sont très gourmands. Il
suffit de voir les débats, maintenant anciens137, sur le supposé blocage de la bande
passante de YouTube par les opérateurs. Sans parler des menaces, réelles ou
supposées, sur la neutralité du Net et de l’Internet à deux vitesses138.
Pourtant, la plus grande menace ces dernières années est venue non des géants du Web
mais de l’intérieur, en 2012139. La révolution que vont vivre les télécoms dans les quelques
années qui viennent sera bel et bien industrielle et aura pour enjeu d’une part les coûts
internes et d’autre part la taille et le poids de l’international140.
Il serait facile de croire que pour résumer la situation dans les télécoms, il suffirait de
prononcer le mot d’ « Ubérisation ». Encore faudrait-il comprendre ce qu’il y a derrière ce
terme, inventé par Maurice Lévy à l’occasion d’une interview dans le Financial Times141,
que sincèrement nous n’aimons pas beaucoup, tant il est caricatural, même s’il recouvre
une partie de la réalité.
Revenons plutôt sur la caractéristique commune à toutes les nouvelles ruptures de
l’Internet depuis ses débuts. Le but des nouveaux acteurs de ce que l’on a appelé

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anciennement la « nouvelle économie » est de jouer avec la loi et ses lacunes («
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loopholes142 » en anglais) et d’en tirer un avantage concurrentiel puis de rafler la mise (la
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fameuse loi de Zipf143) : cela fut le cas avec Amazon et eBay qui ignoraient la TVA en
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1995 par exemple. Ou celui de cet entrepreneur du Web qui en 1996 au Royaume-Uni
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avait cyber-squatté le nom de domaine de la BBC. Et bien entendu, c’est aussi le principe
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de l’ « économie collaborative », dont les acteurs, Uber en tête, tendent à contourner les
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paiements de contributions sociales afin de dégager un avantage concurrentiel144,tout en


pl

le combinant à une offre supérieure et adossée au digital.


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Mais dans les télécoms, la rupture vient aussi et surtout de trublions plus établis qu’Uber
(« giff gaff » au Royaume-Uni145, mais aussi le Free de Xavier Niel qui est plus proche
d’EasyJet que de la démarche d’Uber).
Informatique et télécoms, sommes-nous sur les mêmes sujets ? l’IT n’a-t-elle pas
déjà été « ubérisée » à la fin des années 90 ?
Voilà deux secteurs qu’on met facilement dans le même sac et qui sont pourtant très
éloignés. Leur vocabulaire est différent, leurs philosophies sont différentes, leurs histoires
aussi. L’IT est probablement un des premiers secteurs à s’être fait « ubériser » par les «
barbares » des années 90, qui nous ont amené l’informatique distribuée et Unix. Unisys,
où Yann Gourvennec travaillait entre 1988 et 1997 est passé de 120 000 à 30 000
employés sur cette période (moins de 20 000 à peu près aujourd’hui). Soit une réduction
de personnel de 75 %, ce n’est pas rien. Et nous ne parlons pas de tous les
informaticiens comme Control Data, DEC et d’autres encore qui ont purement et
simplement disparu.
À part cela, les télécoms ont toujours eu un problème avec Internet, dont ils ont eu du mal
à émuler les modèles « freemium » 146 et au forfait. Tout cela sur fond de réglementation
(l’informatique n’est pas une profession réglementée et cela change tout), les
perspectives d’avenir sont donc très différentes pour ces deux secteurs. D’ailleurs, des
géants de l’informatique comme Adobe ou Microsoft ont obtenu des résultats
spectaculaires en adoptant le modèle du cloud à la demande, différent du modèle
freemium mais proche de la logique des services en ligne.
L’avenir s’annonce incertain tout en promettant d’être passionnant car l’incertitude est
mère d’innovation en cela qu’elle oblige les entreprises à se sortir du train-train quotidien.

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Témoignage - le digital et les télécoms
Interview de Matthieu Destot, Executive Vice-Président, Global Sales & Marketing - chez
Alcatel-Lucent Enterprise
Entre les opérateurs historiques, les équipementiers d’antan et le paysage des télécoms
d’aujourd’hui, il y a un monde. Des leaders du marché ont d’abord émergé puis disparu à
une vitesse incroyable, puis de nouveaux acteurs, inconnus il y a à peine 20 ans, les «
OTT » se sont immiscés sur ce marché pourtant chasse gardée de quelques acteurs. S’il
est donc un secteur plein de bouleversements, c’est bien celui-ci, et nous avons demandé
à Matthieu Destot, Executive Vice-Président, Global Sales & Marketing - chez Alcatel-
Lucent Enterprise, de témoigner sur ce sujet.
Quel a été l’impact du digital dans votre métier durant les 20 dernières années ? Avez-
vous observé une accélération récente ?
L’impact du digital sur le secteur des télécoms a été extrêmement important. Pour le
comprendre il faut expliquer les fondamentaux de ce nouveau paradigme : quel que soit le
marché et quels que soient les clients, l’enjeu pour les fournisseurs est de garder le
contact avec l’utilisateur final. L’or de cette économie digitale est la donnée utilisateur qui

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va permettre de s’adapter à l’usage et de réaliser la « désintermédiation ». Cela s’est vu
i
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sur nombre de marchés, et on observe ce phénomène également dans le domaine des
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télécoms. Le propre du marché des télécoms est de développer des conversations entre
y
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personnes (et désormais entre objets connectés) et les acteurs des télécoms sont au
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cœur de ces interactions entre utilisateurs. Tant que les professionnels des télécoms,
de

opérateurs et équipementiers conservent le contact avec leurs utilisateurs, ils ne courent


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pas de risque de se faire « désintermédier ». La donnée de l’utilisateur est donc clé.


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Dans le domaine des télécoms ce sont les « OTT147 » qui se sont emparés des données
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utilisateurs. Cela ne se limite pas à des nouveaux venus comme WhatsApp, car de grands
acteurs du marché du cloud comme Microsoft et Amazon sont également présents.
Les opérateurs, pour commencer, se sont trouvés « désintermédiés » dans leur trafic,
leur rôle ravalé pour partie au rang de fournisseurs de tuyaux, leurs marges se sont
érodées. Les équipementiers quant à eux se trouvent face à de nouveaux acteurs qui
distribuent des matériels banalisés à des coûts défiant toute concurrence.
L’impact sur notre marché a été violent, car de nombreux leaders ont disparu. Nokia par
exemple, mais aussi BlackBerry, Motorola et Ericsson pour citer le monde des
smartphones. Ils ont été eux aussi « désintermédiés » par des acteurs comme Apple. Ces
changements ont été violents pour tous les acteurs de ce secteur.
Avez-vous observé une accélération de ce phénomène dans les années qui ont précédé ?
Après l’explosion de la bulle Internet, vers 2001, nous avons vécu une véritable explosion
du monde digital et de l’innovation. Puis, en 2007, Apple, avec la création de l’AppStore, a
fait décoller le smartphone148, et apporté ainsi une grande accélération au changement.
Ce qu’Apple a inventé est un véritable écosystème, où l’inscription sur iTunes puis l’App
Store était plus importante que l’achat du matériel lui-même. Depuis 2013 environ,
l’accélération est extrêmement forte à cause de l’ère du « data analytics », qui permet
d’accélérer le processus de désintermédiation. C’est ce qui nous a poussés à changer
aussi notre approche du marché.
Quels projets avez-vous lancé pour éviter cette désintermédiation ?
Nous avons agi dans trois directions principales. D’une part, la connaissance de nos
clients : il a fallu que nous nous positionnions nous-mêmes pour être maîtres de ces
données des utilisateurs. Nous vendons dans un modèle indirect à deux niveaux (le
VAR149, puis l’acheteur, l’utilisateur n’étant qu’au troisième niveau) et nous n’avons pas, en
principe, de contact avec l’utilisateur final. Nous avons donc décidé d’adapter le modèle en
opérant des solutions dans le nuage pour rétablir le lien avec l’utilisateur final tout en les
commercialisant avec nos partenaires. Ces solutions nous permettent de nous connecter
directement avec eux, à la manière des OTT. C’est un changement drastique, un virage
stratégique que nous avons pris il y a un an et demi.
Deuxièmement, nous avons travaillé sur le changement de notre cycle de vente, car nous
avons en face de nous des acheteurs hyper connectés, qui ne veulent plus être sollicités
de manière inopportune. Ils veulent piloter leur cycle de vente à leur manière. Ce sont des

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changements profonds qui nous obligent à améliorer la connaissance de nos clients, à
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être beaucoup plus présents sur Internet, en améliorant notre référencement naturel. Pour
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ce qui est de la force de vente, les changements sont profonds également. De simples
y
B

vendeurs, ils doivent évoluer pour devenir leaders d’opinion, reconnus pour leurs
d

compétences par leurs pairs. Il faut aussi qu’ils puissent éduquer les clients avant de se
de

décider. Cette transformation se réalise par la maîtrise de la donnée (pour la


oa

connaissance des clients) et l’évolution de la force de vente. Il s’agit d’une transformation


pl

majeure, qui est encore en cours.


U

Enfin, il nous a fallu opérer un changement radical dans la conception de nos offres :
avant la montée en charge des OTT, nous développions des matériels pour la revente
alors que maintenant, nous concevons et opérons des solutions clé en main dans le
nuage. Cela a changé la conception des offres ainsi que le support proposé aux
utilisateurs.
En somme, vous avez entièrement revu vos modèles économiques ?
Absolument. La digitalisation a eu trois impacts majeurs : premièrement, la digitalisation
de nos produits nous a amenés à transformer nos plateformes en plateformes
connectées.
Deuxièmement, nous avons basculé vers un modèle de souscription à l’usage.
Troisièmement, nous adoptons des démarches partenariales comme avec les hôtels qui
proposent des accès Wifi gratuit sur nos infrastructures. Pour les chaînes d’hôtel,
l’équivalent des « OTT » sont les sites comme booking.com, Tripadvisor qui s’approprient
une partie de la chaine de valeur ou de nouveaux entrants comme Airbnb. La
conséquence est toujours la désintermédiation et leurs marges qui s’érodent.
Nous avons travaillé avec une des plus grandes chaînes d’hôtels chinoises pour les aider
à contrer ces nouveaux acteurs. À la réservation, le visiteur s’enregistre gratuitement
grâce au Wifi de l’hôtel. Il télécharge ensuite la clé de la chambre sur son mobile (via
l’application cloud mobile de la chaîne), ce qui lui évite de faire la queue à la réception.
Ceci permet également à l’hôtel de capturer les données gratuites et donc de «
désintermédier les désintermédiateurs ». C’est un modèle nouveau avec facturation à
l’usage et partage de risques. Nous entrons ainsi dans une logique économique de
plateforme. Et si ces hôteliers sont venus nous voir, c’est qu’ils ont un grand nombre
d’interactions clients et qu’ils ne veulent surtout pas les soumettre à un acteur comme
WeChat afin de ne pas perdre l’interaction directe avec le client final. Dans la conception
des offres futures, nos équipements deviennent ainsi des équipements « as a service »
150
.
Cela veut-il dire que vous évoluez dans le même sens que les OTT ?
À l’ère du digital, le client devient plus habile et plus rusé. Avant même qu’il ait eu un
contact commercial avec nous, il est déjà soumis à une forte exposition digitale et est
beaucoup mieux renseigné qu’avant.
Nous sommes passés également à l’ère de l’abonnement : le client n’appelle plus pour

m
acheter un produit mais un service, une offre à la demande. Notre défi est de faire en
i
ss
sorte que nous puissions collecter les données (très difficiles à obtenir en B2B) et que
A
nous apprenions à les utiliser pour devenir plus performants auprès de nos clients.
y
B

Par ailleurs, ce nouveau paradigme implique une ouverture de plus en plus forte de nos
d

solutions. En mobilité par exemple, la tendance est à l’inclusion dans nos services de
de

protocoles ouverts qui gèrent l’Internet des objets.


oa

En conclusion, l’impact sur le cycle de vente est très fort. Dans le modèle traditionnel, il
pl

s’agit de viser le renouvellement après la vente. Dans le nouveau modèle, c’est l’utilisation
U

qui compte, la facturation s’effectuant à l’usage. Cela demande de réinventer entièrement


l’entreprise.
Le digital et le luxe
Nous avons demandé à Minter Dial, conférencier professionnel et spécialiste des marques
et du digital, de nous donner son point de vue sur l’impact du digital dans l’univers du luxe.
Le luxe et le digital ensemble, embarqués dans la même expérience client ? Quel
paradoxe !
D’un côté, n’est-ce pas, les codes classiques du luxe sont l’exclusivité, l’unicité de
l’expérience, la personnalisation, le contrôle, la discrétion, le facteur humain, et bien sûr
des prix élevés. De l’autre, le digital – qui pour certaines personnes se borne à un simple
accès Internet – est synonyme d’accessibilité, de démocratisation, de liberté
d’expression, ou de banalisation au travers d’algorithmes opaques, et enfin la perception
que le service à fournir est peu cher, voire gratuit.
Tout semble les séparer.
Internet151, pour de nombreuses personnes, est associé à San Francisco, à la Californie,
lieu de naissance du mouvement Hippie152, et ce n’est pas un hasard. Tous les ingrédients
de la contre-culture, de l’innovation et du capitalisme y étaient réunis pour donner
naissance à une révolution « techno-communicante ».

im
ss
Les marques de luxe sont l’héritage de l’aristocratie et de l’élitisme. Elles naissent et se
A
développent dans des pays autrefois dominés par l’aristocratie et les clivages sociaux.
y

Mais l’élitisme ne suffit pas à faire naître le luxe, un très fort terreau d’innovation et de
B

goût artistique lui est aussi nécessaire. L’Italie et la France sont deux exemples vivants de
d
de

cette nécessaire alchimie.


oa

Cinq siècles après la Renaissance, la révolution technologique offerte par le digital donne
pl

aux marques de luxe une chance remarquable, à condition de s’en rendre maîtresses et
U

d’embrasser l’innovation à bras le corps.


Le luxe a toujours été porté par l’innovation. La valeur ajoutée d’une marque de luxe réside
dans un produit et un service supérieur. Mais ce n’est pas tout. Le digital crée les
conditions idéales de la transformation du produit lui-même.
Comment le digital peut changer le produit ?
Il change la manière dont les marques travaillent en interne : par exemple, en améliorant
le fonctionnement interne des entreprises et en facilitant les échanges d’information.
Quant à l’intégration du digital directement dans le produit, l’imagination est sans limite.
Voici quelques exemples de produits luxueux dans lequel le digital figure :

La valise connectée de Louis Vuitton qu’on ne pourra pas perdre, prévue pour
2017.
Les montres connectées de TAG Heuer Carrera (1500 euros) et Breitling
Exospace B55 (compter plus de 6000 euros) qui communiquent avec le mobile.
La voiture Connected Drive BMW avec une multitude de services digitaux et
d’applications associés, ainsi que l’assistance digitale qui permet de maintenir un
contact permanent avec l’extérieur et une meilleure conduite.

Pourtant, il y a un problème. Aucune de ces initiatives n’était ni la première ni la meilleure


sur le marché. Pour chacun de ces exemples, d’autres entrepreneurs ont été plus vite, ou
plus astucieux, et souvent meilleurs en termes d’expérience offerte à l’utilisateur. Ainsi, un
des plus grands enjeux pour les marques de luxe est de repérer et comprendre en amont
les tendances, d’accélérer le temps de développement sans pour autant diminuer
l’exigence de qualité. Historiquement le luxe a toujours voulu être en amont des tendances,
influencer l’avenir au travers de l’excellence de ses produits. Les directeurs créatifs des
marques de mode préfèrent faite abstraction des clients et créer la tendance. Aujourd’hui,
le monde a changé et ils sont désormais dans l’obligation de prendre en compte les
tendances du moment, pour ne pas risquer de passer à côté des vraies innovations.
Comment le digital transforme le service ?
Le service est de plus en plus systématiquement utilisé comme facteur différenciant dans
la conception d’une offre de luxe. Le produit est ainsi réellement sublimé par les services

im
qui l’accompagnent. La renommée historique d’une marque de luxe ne suffit plus à faire
ss
son bonheur. Le digital a totalement bouleversé l’interaction entre le consommateur et la
A
marque. Le rapport de ce client à la marque de luxe passe désormais par sa réputation
y
B

en ligne (au travers des réseaux sociaux, des blogs et des forums), par sa position dans
d

le moteur de recherche de Google, l’accessibilité au produit et au service et même le


de

service après-vente. L’excellence du produit n’est plus suffisante. Tous les services de
oa

l’entreprise doivent se coordonner et être alignés, à l’échelle de la planète. Ceci n’est pas
pl

une mince affaire quand l’organisation a été pensée par pays, ou au mieux par grandes
U

régions géographiques.
La transformation du marketing de luxe
Le département marketing a toujours été le vecteur clé pour créer la valeur ajoutée et
justifier le prix d’un produit de luxe. Aujourd’hui, et plus encore demain, le marketing ne
peut plus travailler seul, ni encore moins régner sur le produit en maître absolu. Le
parcours des clients s’est complexifié, avec un mélange de visites en ligne et en boutique
l’importance croissante de l’Internet et des réseaux sociaux, et la frontière de plus en plus
floue entre parcours en ligne et parcours physique. Cette alchimie complexe a rendu le
service à la clientèle beaucoup plus ardu. Et ceci impose une coordination plus étroite
entre différents services qui auparavant pouvaient parfois s’ignorer.
Tel un VIP, le client du produit de luxe est censé être l’objet de toutes les attentions, tout
au long de son expérience d’achat. Ainsi, la façon dont la marque gère son client est jugée
non plus seulement en fonction des autres marques de luxe mais de l’ensemble d’un
écosystème digital.
Car désormais, chaque consommateur de produits de luxe voit, consciemment ou
inconsciemment, ses attentes en termes d’expérience utilisateur transformées par la
qualité de service à laquelle il s’est habitué au travers de ses parcours clients digitaux
habituels avec des marques comme Uber, Amazon, Apple et ses Apple Stores, etc.
Même si ces services ne méritent, ni du fait de leur prix, ni à l’aune de leur réputation,
d’être rattachés à la catégorie du luxe.
Autre exemple, dans le secteur de l’automobile cette fois. En quelques années à peine,
Tesla s’est imposé par son sens de l’excellence qui a créé un standard de fait : produits
extraordinaires, showrooms élégants, niveau de service haut de gamme et facilité de mise
à jour régulière du produit à distance.
Le marketing des 5E
Si le marketing classique des 4P (Prix, Produit, Promotion et Place) reste encore en
partie utile, l’ère de l’Internet a mis en exergue une nouvelle forme de marketing qui table
davantage sur des éléments plus abstraits.
On parle alors de marketing des 5E : Engagement, Émotion, Échange, Expérience et
Essence. Sur ces 5E, celui qui est vraiment capital dans une marque de luxe, c’est le sens

m
(l’Essence).

i
ss
Dans un monde marqué par les difficultés économiques et politiques, l’éveil international
A
des consciences en matière de réchauffement planétaire, et enfin de menaces terroristes,
y

le consommateur est plus que jamais en quête de sens.


B
d

C’est encore plus vrai avec l’arrivée d’une nouvelle génération qui commence à devenir
de

autonome financièrement, qui a grandi avec Internet et qui voit le monde bien
oa

différemment des générations précédentes. Ainsi, une marque de luxe doit faire en sorte
pl

qu’une aura entoure ses produits en alignement avec ses valeurs, pour créer des
U

expériences extra ordinaires pour le consommateur. À défaut de donner du sens à ses


produits, la marque de luxe sera jugée creuse ou peu sincère. Bien des marques dites de
luxe ont périclité par manque d’authenticité.
Autre grand enjeu du luxe, la protection des données
La personnalisation a toujours été un domaine de différenciation potentiel pour les
marques de luxe. Le digital rend possible un niveau exceptionnel de personnalisation, mais
le grand enjeu est celui de la captation des données qui permettent le bon niveau de
personnalisation sans pour autant compromettre la confidentialité des données de ses
clients. Comment gagner en proximité et fournir un service plus personnalisé, voire plus
intime, à travers un mécanisme de personnalisation connu pour son manque de
transparence ou de sécurité ? Voilà un enjeu de taille pour les marques de luxe.
Sommes-nous parfaits ?
Le digital est redoutable de par sa transparence. Il est délicat d’y garder des secrets. Or,
pour les marques de luxe qui ont préféré par le passé l’opacité et le mystère (ingrédients
essentiels des prix très élevés), la plus grande transparence offerte par Internet est
également un défi. Une marque de luxe ne peut plus garder pour elle des pratiques dont
l’éthique est discutable. Le mystère, en général, devient synonyme d’opacité, propre à
alimenter la rumeur. La communication institutionnelle est, elle aussi, sur la sellette, car
est le symbole d’une froideur inhumaine. Quand les clients cherchent une expérience
personnalisée et un rapport plus humain, l’acceptation de l’imperfection et de l’imprévu
forment une nouvelle figure imposée pour les marques de luxe.
L’état d’esprit e-luxe
Les décisions en interne doivent se prendre plus rapidement et le droit à l’erreur, dans les
contextes spécifiques du digital, doit être accepté afin de favoriser l’expérimentation et
l’innovation.
Dans un environnement où la transparence est à l’honneur, une marque de luxe se doit
résolument de définir et faire vivre son éthique tout au long de sa chaîne de valeur, en
commençant par ses propres employés. La tâche est d’autant plus difficile lorsqu’il s’agit
de recruter du personnel pour un centre d’appel, pour le service commercial ou le «
community management ».
Dans l’ère digitale, les valeurs de la marque et de l’expérience client doivent être

m
cohérents et identiques pour chaque point de contact. L’expérience se doit d’être unique.

i
ss
Et ceci partout sur la planète, car un client du luxe est, plus que tous les autres clients, un
A
citoyen du monde.
y

Le luxe a besoin de changer profondément ses habitudes, héritées de son passé glorieux.
B

Ce secteur a besoin pour envisager l’avenir, tout en préservant cet attachement


d
de

obsessionnel à la qualité du produit, d’intégrer le digital pour améliorer ce produit et les


oa

services qui l’entourent. Il s’agit plus que jamais d’avoir un pied dans ce passé prestigieux
pl

et l’autre dans un avenir numérique et technologique.


U
Le digital et le tourisme
Le digital a radicalement transformé le secteur du tourisme en une vingtaine d’années, et
on aurait tort de croire que tout le bénéfice en revient à Airbnb. En réalité, l’Internet n’a eu
de cesse de tarauder les monopoles établis, et de permettre l’essor d’acteurs originaux,
capables de profiter de brèches laissées béantes par les grands acteurs historiques.
La première transformation a eu lieu au siècle dernier, alors que les principaux acteurs du
secteur du tourisme découvrent à peine Internet : les premières plateformes de
réservation en ligne voient le jour à cette époque. Booking.com et Expedia naissent en
1996, Lastminute.com en 1998, Hotels.com quelques années plus tard. Tous trois ont
survécu à l’explosion de la bulle Internet. L’irruption de ces sites capables de référencer
une large partie de l’offre touristique, vols et/ou hôtels, n’a eu de cesse de fragiliser
l’activité en ligne des opérateurs historiques. À quoi bon, en effet, se rendre sur le site
d’une compagnie aérienne ou d’un hôtel spécifique, si on dispose d’un moteur capable de
comparer les offres, les emplacements, les horaires, et même de fournir des avis et des
commentaires de clients qui les ont déjà expérimentés ?
L’accès aux avis en ligne constitue peut-être la deuxième transformation radicale induite

m
par le digital. Si autrefois on pouvait se renseigner auprès de ses proches pour évaluer la
i
ss
qualité des prestations d’un opérateur, d’un hôtel ou d’une compagnie aérienne, il faut bien
A
avouer que depuis l’apparition des sites d’avis en ligne, cette possibilité est décuplée.
y

Créé en 2000, TripAdvisor a lui aussi largement semé le trouble : comment espérer de
B

nouveaux clients, si la note moyenne de votre établissement est largement inférieure à


d
de

celle de vos concurrents, et si les avis négatifs trônent en première page ? Cette
oa

dépendance aux avis positifs a conduit certains à se lancer dans une guerre des faux avis,
pl

positifs vis-à-vis d’eux-mêmes, négatifs vis-à-vis de leurs concurrents. Il va sans dire que
U

ces pratiques sont interdites en France153, mais comment les repérer ? Et comment cela
se passe-t-il dans d’autres pays ?
Un autre acteur risque probablement de prendre une place de choix aussi bien dans
l’univers des avis que des centrales de réservation. Google a en effet ouvert son propre
système il y a quelques mois, et pourrait fort bien finir par assécher certaines de ces
plateformes si elles ne s’appuient que sur le trafic issu des moteurs de recherche. D’où
l’intérêt, pour ces dernières, de développer une offre mobile de qualité, et de privilégier le
réflexe « application mobile » vs. moteur de recherche.
La troisième révolution digitale du secteur touristique provient de la formidable poussée de
sites qui permettent à tout un chacun de mettre ses biens à disposition de touristes.
Airbnb fait bien entendu figure de pionnier, mais il n’est pas le seul. D’autres sociétés,
essentiellement des start-up d’ailleurs, tentent de se faire une place en proposant aux
particuliers de louer leur véhicule (Drivy) ou leur bateau (ClickAndBoat), ou en spécialisant
leurs services pour des audiences spécifiques, comme MisterBandB (communautés
homosexuelles) ou DogBuddy (hébergements pour animaux de compagnie)
En soi, Airbnb n’apporte aucune nouveauté : la location de biens immobiliers pour des
séjours touristiques est une activité qui existe depuis plusieurs dizaines d’années. Le C2C
(customer to customer) a très bien fonctionné par le passé : des catalogues papier, on
est passé aux sites de réservation en ligne (comme Homelidays). Mais ce qu’apporte
Airbnb, c’est une plus grande flexibilité, tant au niveau des durées, des tarifs, que des
biens mis en location. Ajoutez à cela l’utilisation d’avis réciproques, un moteur de
recherche très bien pensé et un marketing bien rodé, et le tour est joué. Airbnb a, en
quelques années, bousculé non seulement le secteur de la location touristique, mais bien
entendu tout le secteur hôtelier, qui n’a eu de cesse, depuis lors, de tenter de trouver la
riposte adaptée.
Cette riposte prend plusieurs formes, comme celle orchestrée par Accor, tout d’abord en
devenant une place de marché : sur le site AccorHotels.com, on peut réserver des
chambres dans d’autres hôtels que ceux de la marque Accor. Les hôtels indépendants qui
participent à l’offre bénéficient alors d’un taux de commission inférieur aux autres OTA154.
Puis en intégrant les avis TripAdvisor sur leur propre plateforme de réservation. En
intégrant l’ensemble des offres et des marques du groupe dans une application mobile
unique. Ou en offrant de nouveaux services, au travers d’acquisitions ciblées, comme un

m
nouveau service de conciergerie.

i
ss
La transformation digitale peut également prendre d’autre formes, comme l’optimisation
A
des ressources et des services au sein d’un même établissement. Le chariot connecté,
y

par exemple, élaboré de concert avec l’InnovationFactory155 qui permet aux femmes de
B

chambre de remonter des informations en temps réel vers les autres services de l’hôtel.
d
de

Comme dans tous les secteurs, le digital permet de reconsidérer certains problèmes, et
oa

d’apporter des solutions originales, qui peuvent par la suite prendre une ampleur
pl

inattendue. C’est le cas de DayUse. Cette start-up française, lancée par David Lebée,
U

tient compte de ce que 70 % de chambres d’hôtel sont vides durant la journée. En


exploitant cette disponibilité, le site permet à des visiteurs occasionnels de louer une
chambre d’hôtel pour quelques heures, en pleine journée, à un tarif inférieur à celui d’une
location pour une nuitée. L’offre, initialement destinée aux professionnels en déplacement
en province ou à l’étranger, est en passe de séduire une clientèle inattendue, celle des
couples plus ou moins légitimes à la recherche d’intimité en pleine journée : le digital se
glisse souvent là où on ne l’attend pas…

Un cadre unique pour un rendez-vous d’affaire, ou une escapade romantique ?


Le digital et la culture
S’il est un secteur qui a difficilement vécu sa transformation digitale, c’est bien celui-là.
C’est la conséquence, probablement, à la fois d’un déficit de « culture digitale » et d’un
manque de vision stratégique. Remontons une trentaine d’années en arrière pour
comprendre ce qui s’est déroulé sous nos yeux. Au début des années 90, l’ordinateur
personnel se démocratise, et permet de numériser des contenus culturels – livres, films,
morceaux de musique – sans autre limite que la taille des supports d’enregistrement.
Deux phénomènes spectaculaires se produisent alors : d’une part, la chute vertigineuse du
coût du stockage, d’un facteur 200 000 en trente ans156, et d’autre part, le développement
d’un réseau d’interconnexion de dimension mondiale, Internet.
La combinaison de ces deux phénomènes a produit ce que l’univers de la culture a mis du
temps à appréhender : la mise à disposition d’une bibliothèque virtuelle, répartie aux
quatre coins du globe, accessible à tous ceux qui en comprenaient les codes d’accès. La
première étape fut la mise à disposition gratuite de ces contenus digitaux, par le
truchement de sites de téléchargement illégal comme Napster, Limewire et autres
Torrents. La réplique de l’univers de la culture s’est faite de manière brutale, à coup de

m
procès et de menaces d’intimidation, sans véritablement comprendre que ce qui se

i
ss
produisait sous ses yeux était une remise en cause pure et simple du système de
A
distribution des biens culturels. Pourquoi payer au prix fort le montant d’un CD de 15 titres
y

quand un seul vous intéresse ? Pourquoi être contraint de se rendre dans un point de
B

vente physique quand les contenus auxquels on souhaite accéder sont disponibles en ligne
d
de

? Pourquoi autoriser la vente de VHS et de lecteur de DVD réinscriptibles et en interdire


oa

l’usage personnel ?
pl

Le premier acteur économique de taille significative à avoir compris les ressorts de cette
U

crise, fut paradoxalement un acteur externe à ce monde : Apple. La structure ternaire de


son offre – device, logiciel, contenus – bien que fermée, a remporté un succès éclatant
auquel bien peu s’attendaient à son lancement. Mais comme toute innovation, celle-ci était
faite pour être dépassée. Apple propose du téléchargement légal, d’autres se sont rués
vers une offre légale de streaming : au lieu d’acheter ce qui finit par se démoder, pourquoi
ne pas plutôt payer un droit d’usage ? En quelques années, le streaming légal s’est
diffusé auprès de millions d’utilisateurs : Spotify, Deezer, Netflix en sont les parangons. Ils
n’ont fait, eux aussi, que profiter de la brèche géante laissée dans l’univers de la
distribution digitale de contenus culturels. Et d’autres acteurs ont suivi, tels Amazon ou
Google. Même Apple a été forcé de suivre. On ne prête qu’aux riches.
Le digital sème le trouble dans l’esprit des majors, mais également dans celui des
artistes, et particulièrement chez ceux âgés de plus de 40 ans. Alors que la réputation des
stars de la chanson se faisait et se défaisait à coup de classements de ventes de disques
il n’y a pas si longtemps, comment mesurer le succès d’un artiste de nos jours ? En
comptant le nombre de téléchargements, d’écoutes en streaming, même partielles,
d’abonnés à sa page Facebook ou de vues sur les multiples diffusions plus ou moins
légales de ses tubes sur YouTube ? À quoi correspond un Top of the charts à l’heure du
streaming ? Quant aux revenus issus de ces mêmes plateformes de diffusion, ils sont
encore loin de rivaliser avec ceux de l’âge d’or du vinyle. Jusqu’à quand ?
Mais au-delà de ces troubles légitimes, le digital ouvre de nouvelles perspectives, même
pour les artistes. Le digital est souvent vecteur de désintermédiation. Un artiste qui veut
se lancer peut, de nos jours, en s’appuyant sur les services d’amis un peu geeks, ouvrir
son propre site Web et y diffuser ses derniers titres ou y vendre des places de concert.
Tout cela, sans passer par aucune major. Le chanteur pour enfants Henri Dès a même, en
2010, lancé sa propre radio qui diffuse tous ses titres en continu157.
Les conséquences de cette désintermédiation sont colossales, et offrent aux acteurs
émergents des possibilités inouïes. L’exemple de Netflix est, à ce titre, particulièrement
instructif. Initialement conçu comme un service de location de DVD par abonnement
mensuel, Netflix fait face à une crise majeure avec le déclin de ce mode de consommation
: qu’à cela ne tienne, l’entreprise dirigée par Reed Hastings fait « pivoter » son modèle
économique pour basculer dans l’univers de la VOD, la vidéo à la demande diffusée par
Internet. Le succès est foudroyant : non seulement le catalogue est suffisamment doté,
mais le service est fiable, multi-support (ordinateur et mobiles), diffusé à l’international, et
fait la promotion d’un algorithme de recommandation unique, basé sur les goûts et les avis

m
des consommateurs. Avec près de 100 millions d’abonnés de par le monde, Netflix se

i
ss
lance dès 2015 dans … la production, avec « Netflix Originals ». Autrefois concurrent de
A
Blockbuster, Netflix est désormais devenu le concurrent de Canal+ ou de Gaumont. La
y

disruption digitale, loin de menacer une catégorie d’entreprise, peut complètement


B

bouleverser tout une filière.


d
de

Alors, le digital menacerait-il l’avenir des entreprises du secteur de la culture, ou est-il un


oa

eldorado pour de nouveaux acteurs partis à la conquête de nos habitudes de


pl

consommation ? L’étude The Digital Future of Creative Europe158 de 2015 publiée par le
U

cabinet PwC, exprime parfaitement la difficulté qu’il y aurait à opposer industries


culturelles et digital. Tous les segments de cette industrie sont portés par une dynamique
identique : l’érosion des revenus non liés au digital, l’explosion de ceux issus du digital, une
croissance essentiellement stimulée par les achats directs des consommateurs. C’est que
le digital accorde plus de poids aux choix des consommateurs alors qu’auparavant, le
pouvoir appartenait aux distributeurs, qui faisaient un peu le jour et la nuit. Sur la période
s’étalant de 2003 à 2013, l’étude précise que sur le territoire de l’Union Européenne
élargie aux 27 états membres, les revenus du secteur culturel ont crû de 22 milliards
d’euros : une hausse de 36 milliards des revenus issus du numérique (qui atteignent 60
milliards) vs. une baisse de 14 milliards des revenus issus de la composante non-
numérique (pour s’établir à 140 milliards). Mettre les difficultés du secteur sur le dos du
digital, c’est un peu facile.
Il faut aussi rappeler que le digital a favorisé l’essor de segments inattendus. Le jeu vidéo,
par exemple, est devenu la deuxième industrie culturelle en France, derrière le livre, mais
devant le cinéma et l’audiovisuel. Le secteur est particulièrement porteur en France, qui
est le 3e pays le plus attractif derrière les États-Unis et le Canada : il est créateur
d’emplois (800 en 2016), dont 2/3 en CDI. Et permet l’essor de nouveaux modes de
consommation, comme l’e-sport : aux États-Unis ou en Corée du Sud, le phénomène se
développe à une vitesse vertigineuse, certaines compétitions attirent plus de 20 millions
de spectateurs.
Digital et numérique ont également du mal à s’entendre du côté de la vision stratégique
des États, et particulièrement du côté de la Rue de Valois. Les acteurs institutionnels
semblent ne pas toujours savoir comment s’y prendre face à la digitalisation massive des
contenus par Google, à l’essor de Wikipédia ou à la gestion du droit d’auteur. L’essayiste
Alexandre Moatti y a consacré tout un ouvrage159. On y apprend, entre autres, que
l’iconographie en ligne des grandes figures de la vie politique française ou de l’histoire de
France doit malheureusement s’appuyer sur des contenus digitalisés hors de nos
frontières. C’est ainsi que la photo du Général de Gaulle qui illustre l’article qui lui est
consacré dans la version française de Wikipédia provient de la Bundesarchiv. Unglaublich !

im
ss
A
y
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La photo de Charles de Gaulle dans Wikipédia, œuvre de la Bundesarchiv. Unglaublich !


de

Un peu de bon sens ne ferait pas de mal. Aux États-Unis, il y a belle lurette que la
oa

Maison-Blanche sait gérer l’ensemble des contenus digitaux qui concernent les dirigeants
pl

américains. Pourquoi ne pas s’inspirer des bonnes pratiques mises en évidence de ce


U

côté-là de l’Atlantique, parfaire notre culture digitale et faire évoluer la législation autour du
droit d’auteur sur les contenus en ligne ?
Certaines initiatives, dans le domaine de la culture, peuvent servir d’exemple aux autres
acteurs de cette filière. La mise en place de l’application mobile des Cinémas Gaumont
Pathé en est un excellent exemple. Montée en puissance progressivement, elle permet
non seulement la réservation en ligne de places de cinéma à l’avance, le moins qu’on
puisse lui demander, mais a également permis d’introduire la réservation de places
numérotées, ce qui n’avait pas de sens auparavant. Le tout fonctionnant parfaitement à
base de QR code à l’entrée des salles, et de cartes de crédit préenregistrées sur le
compte des clients, qui s’identifient à l’aide de leur profil Facebook. Parfois, le digital c’est
aussi simple que cela.
Le digital et les experts-comptables
Les secteurs se suivent et se ressemblent parfois. Après les banques, voici les experts-
comptables. S’il y a bien une profession qui ne provoque pas énormément de débats c’est
bien celle-là. Et pourtant, il s’agit d’un métier riche, en pleine mutation, et au cœur
d’énormes dilemmes liés à leur transformation digitale (mais ce n’est pas que du digital :
nous l’avons déjà vu plus haut, les enjeux sont souvent liés et il serait faux de se cantonner
à l’impact technologique).
Nous avons ainsi pris conscience, au fur et à mesure de la préparation de cet ouvrage,
d’un phénomène bien connu des experts de la conduite du changement intitulé : « le
syndrome de la grenouille ». Voilà qui me semble caractériser la plupart des
problématiques liées à la conduite du changement dans un grand nombre d’entreprises qui
cherchent à aborder la transformation digitale. Prenons ici le modèle des experts-
comptables pour pousser cette réflexion au bout et voir où va le monde.
Une profession révélatrice des changements en cours
Les experts-comptables sont en fait, nous étions loin de nous en douter au départ, un

m
excellent révélateur des changements en cours, non seulement dans le domaine de la

i
communication digitale, mais également celui de transformation digitale et des métiers.
ss
A
Impact du « digital » sur les experts-comptables. Une vieille histoire
y
B

Si l’on oublie la communication digitale pour ne se focaliser que sur l’acception la plus
d

large du terme « digital », qui englobe l’automatisation et l’informatisation des processus,


de

on se rend vite compte qu’il s’agit là d’une vieille, et même très vieille histoire. Yann
oa

Gourvennec est bien placé pour en parler, car c’est probablement son père qui, en 1980,
pl

a été l’un des premiers, sinon le premier, à réaliser une comptabilité automatisée, depuis
U

la collecte des écritures, les stocks, jusqu’à l’édition des bilans et même la paie (qui
ensuite fut externalisée dans les années 90).
« Vous avez automatisé 90 % de notre travail ! »
Quand celui-ci présenta son travail au chef comptable de l’entreprise industrielle où il
officiait, les commentaires de ce dernier furent élogieux : « vous avez automatisé 90 % de
notre travail » lui annonça-t-il Un beau compliment, sauf que cela peut être lu de deux
manières différentes. Et que croyez-vous qu’il arrivât ? Rien, bien entendu. L’équipe
comptable continua son travail papier crayon de re-saisie des factures, s’enfonçant dans
le confort de sa routine et attendant bien gentiment la retraite, qui ne manqua pas
d’arriver.
Le B2500 – B3500 de Burroughs, une prouesse technologique, le premier ordinateur central (mainframe) à circuit
intégré160.

Flatter l’innovateur pour avoir la paix


Voilà une anecdote qui en rappellera bien d’autres à nos lecteurs. Flatter l’innovateur pour
avoir la paix, voilà un sport national et international qui permet à tous les opposants à
l’innovation de se débarrasser des gêneurs, de ceux qui n’ont de cesse de changer les
méthodes de travail, de faire que tout ne soit plus comme avant.
Il est en effet bien plus pratique de procrastiner et de se contenter de la routine. C’est
très pratique à court terme, mais dangereux à la longue, pour peu qu’on soit encore là

i m
bien-sûr. 35 ans plus tard, nous y voilà, comme le recommande l’ACCA (l’association des
ss
experts-comptables britanniques161), il va falloir changer de métier et évoluer vers le
A
conseil.
y
B

Sur le papier, rien de difficile. La population des experts-comptables a tout pour réussir :
d
de

compétences financières, savoir-faire, habitude du service à l’entreprise… Mais quand on


oa

regarde dans le détail, faire évoluer les employés qui saisissent des factures et préparent
ou certifient les comptes vers le conseil en gestion et finance, requiert de considérables
pl
U

efforts de formation et d’accompagnement.

Le véritable enjeu de cette révolution industrielle du XXIe siècle est la bipolarisation de la valeur ajoutée. À gauche la «
commoditisation » des fonctions basses y compris du service, à droite l’hyper spécialisation des fonctions intellectuelles.
Au milieu la disparition des emplois moyens de l’industrie (source : Alain Patchong sur son blog162)

Le syndrome de la grenouille
À défaut, il arrivera à la profession comptable la même chose qu’à la grenouille qui reste
dans l’eau bouillante depuis si longtemps, qu’elle n’avait pas vu ni compris qu’elle était en
train de cuire. D’autres professions (mutuelles, banques, organismes de formation,
services, tourisme) auront moins de temps que les experts-comptables pour s’apercevoir
de leur cuisson à petit feu. Puisse cet exemple – et cette présentation – leur servir à
préparer leur propre transformation digitale.
Pour clore ce chapitre, voici les 10 conseils de l’ACCA aux comptables britanniques qui
doivent faire face aux bouleversements de leur métier

1. En 2015 (le rapport date de 2012, rajoutez quelques mois/années) chaque cabinet
comptable mettra une application à disposition de ses clients, lui permettant
d’accéder à ses données d’entreprise/comptables depuis un smartphone ou une
tablette.
2. Les comptables devront suivre des formations pour se recycler afin de conserver
leur rôle de gardien du temple des données de l’entreprise.
3. La profession doit développer de nouveaux moyens de mesurer et d’évaluer les
coûts et les bénéfices technologiques du cloud computing.

m
4. La profession comptable va subir des réductions d’effectifs dès que les éditeurs de
i
ss
logiciels auront intégré l’expertise financière dans des produits de plus en plus
A
auto-apprenants.
y
B

5. Le directeur financier du futur devra en savoir autant sur le plan technologique que
d

sur le plan financier.


de

6. Si les comptables ne s’emparent pas de la technologie, ils disparaîtront à la


oa

manière des dinosaures (sic) : individuellement, et en tant que profession.


pl

7. Dès 2020 les audits pourront être menés en temps réel. Les auditeurs tireront
U

directement les données depuis les systèmes d’information, eux-mêmes liés aux
stocks en temps réel via des capteurs (stocks, cheptels, comptage des
employés).
8. Si les comptables ne se positionnent pas comme des experts des tendances
émergentes (ex : crowdfunding, nouvelles plateformes de paiement, etc.) d’autres
professions le feront pour eux.
9. Les comptables doivent exploiter les technologies émergentes pour attirer des
talents et développer les talents existants.
10. Dès 2025, toutes les données numériques comptables seront disponibles à tous.

Il est possible que ces conseils soient légèrement en avance sur leur temps, ou que la
réalité du terrain soit largement en deçà des prévisions. Et le lecteur attentif pourra faire
le lien avec le chapitre consacré à l’impact du digital sur la direction financière.
Que faire si votre secteur n’est pas cité ?
Il serait impossible de faire tenir une analyse complète et détaillée de ce qu’implique la
transformation digitale dans l’ensemble des secteurs qui contribuent à la vie économique
d’un pays : notre éditeur refuserait tout simplement de publier un tel pavé qui irait bien au-
delà des 4000 ou 5000 pages. Nous avons donc fait l’impasse sur l’éducation, les
cosmétiques, l’ameublement, la construction navale, l’agriculture, etc. Nous nous en
sommes tenus à un peu plus d’une quinzaine de secteurs, et cela nous semble suffisant
pour vous faire toucher du doigt les ressorts essentiels de la transformation digitale. Car
une fois que vous avez bien compris quels sont les enjeux, il est relativement aisé de les
transposer à votre propre univers.
De quels ressorts est-il donc question ici ? Nous allons vous en proposer quatre, qui nous
semblent essentiels.
Il faut d’abord comprendre ce que le digital change dans la relation client. C’est pour nous
un élément essentiel. Nous l’avons évoqué dès le début de ce livre, le grand
chambardement numérique provient du fait que nos clients – c’est à dire nous-mêmes en
réalité – sont devenus digitaux. Ils mangent du digital au petit-déjeuner, au déjeuner et au

m
souper, chez eux ou au travail, dans les transports. Leur mobile ne les quitte plus et
i
ss
devient la principale interface de dialogue et d’échange avec vous et nous, donc avec
A
l’entreprise qui vous emploie. Ce doit être le point initial de votre réflexion digitale, qui vous
y

guidera tout au long de vos prochaines transformations.


B
d

Le deuxième point qu’il faut comprendre, c’est que le digital implique des changements
de

culturels et comportementaux majeurs au sein de l’entreprise. Du digital découlent des


oa

remises en cause des processus, des produits, et parfois mêmes des individus, qui ne
pl

seront pas sans conséquence sur l’avenir. Prendre conscience de ces changements est
U

essentiel, pour les anticiper, les mener convenablement, c’est à dire sans faire trop de
dégâts, et pour réussir sa transformation.
Le troisième point, c’est qu’avec le digital, l’entreprise accède à une énorme quantité de
données dont elle ne s’est jamais préoccupée auparavant. Que faire de tout cela,
comment les exploiter à bon escient, dans le respect de la loi, de la société et des
individus ? Comment en tenir compte pour opérer les changements évoqués
précédemment ? C’est un chantier immense, une sorte de puits sans fond, un tonneau des
danaïdes, dans lequel nombre de responsables de la transformation digitale peuvent se
noyer.
Le quatrième point, enfin, c’est que la transformation digitale s’opère à la fois au sein et
au dehors de l’entreprise. Vos concurrents historiques subissent le même processus que
vous, mais le gèrent peut-être de façon différente. À côté de cela, de nouveaux acteurs
émergent, qui ne sont pas dépendants des mêmes contraintes : pas d’historique à gérer,
pas de référentiel à maintenir, pas de dette à rembourser, et des équipes jeunes et
motivées. Le jeu vous semble inégal ? Il l’est dans les deux sens. À vous les clients
historiques, la confiance dans un modèle vieillot mais fiable ; à eux, l’innovation, la prise de
risque, la séduction mais la disparition possible, du jour au lendemain. Comment tracer
votre voie vers le digital, entre vos anciens compétiteurs sur le déclin (ou non), et cette
bande de pirates furibonds prêts à tout pour vous déloger ? Dans un monde où les règles
évoluent tous les jours, le mieux est, probablement, de n’en respecter aucune. Mais est-
ce acceptable de la part d’un acteur historique ? À vous d’en juger…
Pour la définition, cf. http://www.definitions-marketing.com/definition/zmot
NDLR : « customer pain point » en anglais, une expression issue de la méthode de vente complexe « solution selling » de
Michael Bosworth http://bit.ly/solselling
La troisième révolution industrielle : comment le pouvoir latéral va transformer l’énergie, l’économie et le monde par
Jeremy Rifkin sur Amazon http://amzn.to/2kpo2Uz
L’expression a vu le jour en 2011 à la Foire de Hanovre
Voir cet article de Deutsche Welle http://bit.ly/2kphKV0 : Deutsche schlecht gerüstet für Industrie 4.0 (les [industriels]
allemands ne sont pas prêts pour l’industrie 4.0
Image Christoph Roser : http://www.allaboutlean.com AllAboutLean.com via Wikimedia Commons, 2015. Le concept fut
lancé lors de la fête de Hanovre en 2011.
Voir ce communiqué de presse « Optimdata développe la version cloud de l’application « industrie 4.0 » productinuse » de
janvier 2017 http://bit.ly/2kprG0P
Une vidéo de démonstration de ce véhicule est disponible ici : https://www.youtube.com/watch ? v=ve63xdzc3hg
Cf. http://bit.ly/autonomous-vehicle-decision-making-2013
Pour plus de détails : http://www.dot.ca.gov/hq/paffairs/faq/faq79.htm
www.lazooz.org
www.moovitapp.com/

m
Cf. http://labanquededemain.com/

i
ss
Ce débat a été organisé par Athling à l’occasion de la sortie de son ouvrage « la banque reflet d’un monde en train de
naître », un ouvrage collectif rédigé par des auteurs non banquiers et auquel nous avons eu l’honneur de participer.
A
Le DG de la banque de détail de la banque postale https://fr.linkedin.com/pub/didier-moate/88/109/ba1
y

Benoît Legrand est le DG d’ING https://fr.linkedin.com/in/benoitlegrand


B

« Fintech, ces start-ups qui veulent bousculer les banques » http://www.frenchWeb.fr/les-fintech-ces-start-ups-qui-


d

veulent-bousculer-les-banques/159580
de

Voir l’étude « panorama fintech » de McKinsey http://www.mckinseypanorama.com/products-services/panorama-


oa

fintech.aspx
pl

Source : Bain, novembre 2015 http://www.bain.com/publications/articles/customer-loyalty-in-retail-banking-2015-


global.aspx
U

Cf. « ING veut changer la banque » https://visionarymarketing.fr/blog/2016/01/ing/


« Coup d’accélérateur sur la fermeture des agences bancaires en France » Les Echos, mars 2016 http://bit.ly/2drIYFB
https://www.welend.hk/
L’expression est d’Alain Minc : http://archives.lesechos.fr/archives/2012/Enjeux/00294-027-ENJ.htm
David Fayon, @fayon, www.davidfayon.fr, co-auteur du livre Transformation digitale, Pearson, doctorant à Télécom
ParisTech : Transformation digitale dans le secteur bancaire : analyse de la maturité et processus d’évolution.
GAFAM, acronyme de Google - Amazon - Facebook - Apple - Microsoft
Cf. Frédéric Laloux, ouvrage cité.
http://digitalimpacts.fr/grande-enquete-transformation-digitale-des-banques
Le lecteur trouvera de nombreux exemples donnés pour cette classification en 5 catégories dans le livre Transformation
digitale, Pearson, 2014
Cf. http://www.journaldunet.com/ebusiness/le-net/1153061-comment-les-banques-font-face-a-la-vague-fintech/
Cf. https://blog.plan99.net/the-resolution-of-the-Bitcoin-experiment-dabb30201f7#.f3dv29olg
NDLR : soit les systèmes auto apprenants
Comme expliqué dans le numéro 5 du « Journal of Marketing Revolution », https://www.fr.capgemini-consulting.com/serie-
journal-of-marketing-revolution
http://www.dmp.gouv.fr/
http://www.surgevry.com/ et voir aussi la vidéo de démo https://www.youtube.com/watch ? v=pKT7zZ7Lo6w
Nom dérivé du docteur Norman Holter, voir les explications et les vidéos ici : http://bit.ly/2lkMTc1
http://variances.eu/ ? p=1793
https://www.bureauxapartager.com/
Cf. http://iotbusinessnews.com/2013/09/18/27009-idate-forecasts-80-billion-things-connected-in-2020/
Cf. http://www.lesechos.fr/06/12/2015/lesechos.fr/021536863795_electricite---la-baisse-des-prix-de-marche-fait-souffrir-
edf.htm
Cf. http://www.developpement-durable.gouv.fr/Le-prix-de-l-ARENH.html
Cf. http://bit.ly/amazon-jobs-2017
Cf. http://bit.ly/alibaba-record-2016
Achetez-le ici http://bit.ly/everything-store et cherchez le commentaire de la femme même de Jeff Bezos !
Voir ce témoignage de Darty sur le click and collect et ses expériences en magasin sur le blog Marketing & Innovation
http://bit.ly/2jprikC
Cf. http://www.retailexplorer.fr/panotrade-2016/
Voir notre chapitre intitulé « au fait c’est quoi le digital ? » à la page 52
Voir comment SK, l’opérateur de Singapour, déploie le 5G avec l’aide d’OpenStack http://bit.ly/2fDaOTH
Cf. son interview de Luc Bretones à http://bit.ly/2giU5U5 sur le blog http://theinnovationandstrategyblog.com
OTT ou services « over the top » c’est à dire littéralement qui viennent au-dessus du réseau.
http://en.wikipedia.org/wiki/Over-the-top_content
Cf. cet article de Korben en 2011 http://korben.info/fai-la-strategie-du-pourrissement.html, mais ce débat ressurgit à
longueur de forums ici et là
Voir cet article de Rue89, à ce sujet : http://bit.ly/2giY82U
http://theinnovationandstrategyblog.com/2015/01/free-marche-telecoms/
Voir à ce sujet l’excellente compilation de la revue européenne des médias et du numérique http://bit.ly/2gj3wTE
Cf. “Maurice Lévy tries to pick up Publicis after failed deal with Omnicom, Head of advertising group squares up to the
“digital tsunami” http://on.ft.com/2giYmah. Vous remarquerez qu’en anglais on ne dit pas “uberised” mais “ubered”
http://www.techeye.net/news/camerons-Internet-law-has-huge-loopholes
http://visionarymarketing.fr/blog/2014/10/concurrence-economie/

m
Certes, le service est supérieur et il serait faux de limiter l’ubérisation à ces aspects fiscaux et comptables, mais ils sont

i
l’élément déclencheur d’un mouvement de fond. Après tout, G7 a aussi une application assez bien faite depuis quelque
temps et personne n’en parle.
ss
A
https://www.giffgaff.com/
y

Combinaison de Free et Premium, modèle selon lequel l’essai et gratuit et où on tente de convertir l’utilisateur en
B

utilisateur payant dans un deuxième temps.


d

Voir définition plus haut.


de

NDLR : stricto sensu, Apple n’a pas inventé le smartphone en 2007 mais a complètement transformé le marché et
surtout, la firme de Cupertino a inventé un modèle économique qui fonctionne au point d’apporter la rupture sur le marché.
oa

Les premiers téléphones intelligents et connectés furent les Nokia Communicator 9000 en 1996. C’est un comble puisque
pl

Nokia a été contraint de se vendre à Microsoft, qui s’en est ensuite débarrassé en 2016 http://cnb.cx/2gJN0ze, du fait de la
U

toute-puissance d’Apple et d’Android qui ont marginalisé son OS, puis Windows phone.
NDLR, VAR : Value Added Reseller, un revendeur agréé dans le monde l’informatique ou des télécoms.
Cf. à ce sujet : Alcatel-Lucent Enterprise Touts Network on Demand Service à l’adresse http://bit.ly/2gJUEcS
NDLR : rappelons cependant, et même si certains Américains, à commencer par Barack Obama, pensent que le Web
est américain, que celui-ci a été développé en Europe par des Européens. Mais il est indéniable que la Silicon Valley est le
symbole de l’Internet marchand et de l’écosystème des start-ups. Le débat est ouvert : http://bit.ly/2jA97GP
Même si nous savons que l’Internet n’est pas sorti de la Silicon Valley, de nombreuses personnes continuent de l’imaginer,
à tort.
Cf. http://bit.ly/faux-avis-2017
OTA, ou Online Travel Agency
Le cluster de l’innovation digitale créé en 2014 http://www.innovationfcty.fr/
Un disque dur de 50Mo coutait 5000 francs en 1987. 1To sur Google coute moins de 10 euros par mois aujourd’hui. 20
000 plus de place pour 100 fois moins cher.
www.radio-henrides.net
Cf. http://www.strategyand.pwc.com/reports/the-digital-future-creative-europe
Au pays de Numérix, PUF, 2015
https://fr.wikipedia.org/wiki/Circuit_intégré
http://www.acca.co.uk
Cf. le billet d’Alain Patchong sur son blog, malheureusement arrêté en 2016 : http://bit.ly/2esOazz
Le digital dans tous les métiers
Après avoir fait le tour des secteurs d’activité, penchons-nous sur ce qui fait que nos
entreprises fonctionnent : les femmes et les hommes, qui par leur activité quotidienne,
créent de la valeur. Sont-ils tous concernés par le digital ? Oui, assurément, et c’est notre
credo. Il n’y a pas une fonction, pas une activité, au sein d’une entreprise, quelle qu’elle
soit, qui ne sera un jour ou l’autre confrontée à une transformation radicale à cause du
digital.
Pour vous en convaincre, nous avons décidé de vous emmener faire le tour des bureaux.
Un tour presque complet de vos bureaux. Nous passerons ainsi du marketing aux ventes,
de la R&D à la finance, sans oublier de dire bonjour au PDG ou à ses actionnaires. Tous
doivent faire face à ce défi majeur, alors autant comprendre ce qui pourrait les tracasser
et aller au-devant des problèmes, pour tenter de les résoudre avant même qu’ils ne se
posent.
Peut-être même découvrirez-vous, au hasard de ces rencontres avec les différents
départements de votre entreprise, des solutions originales que vous pourriez transposer

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d’une équipe à l’autre…

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Le digital et les RH
Nous avons vu dans un chapitre précédent, dédié au boss digital, que la transformation
digitale impose une refonte totale non seulement de l’organisation mais aussi et surtout
des modes de travail. Les impératifs de l’innovation qui sont au cœur de la transformation
digitale commandent en effet aux organisations, et donc aux entités qui la régissent, de
changer la façon dont ce travail en commun doit s’organiser, regarder la hiérarchie
différemment, réviser son point de vue sur les innovateurs et les « hauts potentiels », en
somme renverser son système de valeur et mettre en avant l’initiative et les personnes qui
l’incarnent, et intégrer l’impertinence et la remise en question. Comme vous l’imaginez, il y
a bien du travail pour en arriver là, alors voici nos conseils pour surmonter les défis des 6
injonctions paradoxales de la transformation numérique.
Les responsables RH des entreprises, éléments-clés de cette transformation, doivent
désormais s’approprier les codes de l’innovation, imposés par l’ère digitale, ceci alors
qu’eux-mêmes sont en pleine transformation de leur métier. Ces impératifs - nous en
avons choisi 6 - sont en contradiction avec les méthodes traditionnelles de pilotage des
entreprises si décriées par Frédéric Laloux dans son ouvrage de 2014163. Il va donc falloir

m
apprendre à vivre avec deux extrêmes et faire cohabiter ordre et disruption, car rupture
i
ss
ne veut pas dire « casser ce qui marche ». Il s’agit là d’une véritable gageure pour les
A
responsables RH, y compris dans les entreprises de taille intermédiaire (ETI).
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B

RH : révolutionnez vos entreprises, mais ne cassez rien !


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Les messages entendus ici et là, y compris en provenance des grands patrons, sont – en
apparence - simples et sans équivoque : il faut révolutionner l’entreprise, la rendre « agile
» (au sens informatique du terme), créer la rupture. Plus facile à dire qu’à faire en réalité.
C’est même toute la difficulté d’une transformation digitale : celle-ci ne s’adresse pas à
une start-up, mais à une entreprise établie. Or, il est plus facile de changer radicalement
l’entreprise neuve, surtout quand elle n’a pas d’impératifs de rentabilité (rappelons
qu’Amazon grand public n’a commencé à gagner de l’argent qu’avec l’avènement de sa
filiale B2B au bout de 20 ans) que de transformer une entreprise existante dont le volant
d’affaires est déjà conséquent.
RH, faites la révolution mais ne cassez rien (adapté d’une publicité de PwC de 2009)
Dans ce dernier cas, il va vous falloir ménager la chèvre et le chou : instaurer la rupture
sans jamais rien casser de ce qui existe. C’est une injonction paradoxale (l’imposition
d’une logique contradictoire en provenance d’une personne dominante) qui pourrait
rapidement vous rendre schizophrène. Pourtant, l’innovation et « l’intrapreneuriat » nécessitent
qu’on fasse vivre ces deux logiques apparemment incompatibles à tout moment. C’est ce
qu’Edgar Morin a appelé la « dialogique164 » : car les choses ne sont ni blanches ni noires
mais elles sont les deux à la fois. Il y a d’ailleurs fort à gagner à lire le livre d’Edgar Morin
sur la complexité165.

m
RH ou non, la transformation n’est pas un changement

i
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La première chose à retenir, une fois qu’on a compris la nécessité de faire cohabiter des
A
concepts apparemment contradictoires, c’est qu’un changement et une transformation ne
y

sont pas la même chose. Le changement implique l’évolution d’un état connu vers un autre
B

état connu. Il implique un travail sur soi-même (ou son organisation) pour évoluer, et les
d
de

méthodes (celles de la “conduite du changement”) sont maîtrisées. La transformation,


oa

quant à elle, implique qu’on évolue d’un état connu vers un état incertain, qu’on apprenne «
pl

à marcher en marchant » ; ce qui peut paraître naturel à n’importe quel enfant (donc à
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chacun d’entre vous lorsqu’il l’a été) et qui pourtant est si difficile à expliquer à un adulte.
Surtout que cette évolution vers un état incertain génère souvent de l’angoisse parmi les
salariés, un élément non négligeable avec lequel les RH vont devoir composer de plus en
plus souvent.
Les 6 injonctions paradoxales de l’innovation et de la transformation digitale
imposée aux RH
L’innovation, et a fortiori l’innovation digitale, a ses règles du jeu :

1. Pour innover, il va falloir sortir du cadre. C’est une banalité que de le dire. Il est
moins banal d’arriver à faire cohabiter cette logique de créativité et d’innovation
avec la nécessité de gérer l’entreprise. Et pourtant les deux sont obligatoires.
C’est là une injonction paradoxale. En clair, on observe des comportements assez
contradictoires dans les entreprises qui cherchent à se transformer. D’une part,
l’envie d’adopter des démarches proches du fonctionnement de la petite
entreprise, et nous n’aurons jamais autant entendu mentionner le vocable d’agilité
que ces dernières années, même chez des mastodontes de plusieurs milliers de
personnes. Il est même possible que ce terme y soit plus utilisé que dans les start-
up, où le concept va de soi. D’autre part, le rapprochement des grands groupes
auprès de ces mêmes start-up qui n’est pas souvent, loin de là, synonyme de
succès166. Les incantations à l’agilité ne suffiront pas, il faudra changer en
profondeur. Mais aussi apprendre à réfléchir à l’envers. Tant de groupes échouent
à innover en amenant du sang neuf à l’intérieur. Bien peu pensent, au contraire, à
exfiltrer leurs innovateurs et leur laisser le choix de se développer à l’extérieur en
leur donnant leur chance167. Et si ça marche, une clause de réintégration est
possible, si tant est qu’elle soit souhaitable.
2. Pour innover il faut être en veille permanente et s’inscrire dans le temps long de
l’innovation. Ce temps long dure de 5 à 15 ans, selon le secteur, la taille de
l’entreprise, le dynamisme du marché, et d’autres facteurs plus subjectifs. Il faut,
en effet, à peu près ce temps là pour qu’une technologie, lorsqu’elle réussit à sortir
du lot et à survivre, s’insère durablement dans le quotidien de ses utilisateurs.
C’est le cycle bien connu de la traversée du gouffre de Geoffrey Moore168. Pour
permettre à son personnel d’être en veille permanente, il va donc falloir gérer une
nouvelle injonction paradoxale : apprendre à perdre du temps pour en gagner.

m
Cette nouvelle injonction est rarement bien gérée dans les entreprises très court-

i
termistes où on a tendance à croire que l’innovation sort d’un chapeau et que la «
ss
recherche-développement » sert surtout à « trouver », ce qui est bien entendu
A
complètement faux.
y
B

3. Il va falloir écouter ses clients et ses employés. L’entreprise digitale en mouvement


d
de

sait en effet faire travailler son personnel en réseau. Il va falloir d’une part déléguer
la responsabilité de l’entreprise à ces « ambassadeurs de la marque », et
oa

accepter de brouiller les pistes entre vies professionnelle et personnelle. Outre les
pl

problèmes psychologiques que cela peut poser à l’entreprise, il est indéniable que
U

le flou entre vie privée et vie professionnelle est une contradiction avec laquelle les
RH vont devoir vivre et qui va devoir être gérée avec les employés mais aussi leurs
représentants syndicaux. D’une part, ce brouillage est demandé, recherché et
accepté par les salariés. En même temps, il suscite des interrogations fort
légitimes de la part de ces mêmes personnes. Témoin ce débat datant de mai
2015 au Royaume-Uni et diffusé publiquement sur la BBC, au sujet de la baisse
importante de productivité dans ce pays du fait de l’utilisation abusive de l’e-mail en
dehors des heures de travail. Paradoxalement, en France où on aime bien
protéger les employés au travers du sacro-saint code du travail, ce débat est
beaucoup moins présent.
4. Pour réussir l’innovation, il faut commencer petit et voir très grand. Il faut donc
accepter de structurer l’innovation une fois qu’elle est déjà apparue, et non
l’inverse. Il faut donc accepter la rupture et ne pas penser que l’innovation se pilote
uniquement du haut vers le bas. Certes, une impulsion managériale est
indispensable, mais elle doit être plus incitative que directive pour réussir. Il va
donc falloir apprendre, pour asseoir son pouvoir, à en perdre un peu. C’est le dur
prix à payer pour susciter l’innovation et la créativité dans ses équipes.
5. Il faudra apprendre le métier des autres. Demander au marketeur de devenir un
peu plus informaticien et acquérir une plus grande compétence dans l’utilisation des
données. Et d’autre part, les informaticiens, sous la poussée du Cloud Computing
d’infrastructure (IaaS), vont devoir devenir des maîtres d’ouvrage, en appui des
métiers. En un sens, ce n’est pas complétement nouveau, cette maîtrise d’ouvrage
déléguée dans les départements IT. Ce qui est nouveau, c’est que ce métier va
devenir majeur dans ces départements, et non plus une cerise sur le gâteau.
6. Il va falloir enfin faire travailler les générations et cesser de les opposer. C’est à
dire cesser d’infantiliser les jeunes (en leur refusant l’initiative et en leur barrant les
promotions) et de faire peur aux vieux avec la fameuse génération Y ou Z, cette
bande de Huns sur le chemin de la transformation digitale, prête à en découdre
avec les vieux croûtons, prétendument ignares en digital. La compétence digitale
n’est pas réservée à une classe d’âge. Les sociologues l’ont déjà expliqué et nous
aussi169.

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Il existe d’autres exigences de l’innovation. Nous en avons juste sélectionné six pour cet

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ouvrage, car elles nous ont semblé être les plus importantes. Peut-être en avez-vous
A
identifié d’autres au sein de votre entreprise ? Faites-le nous savoir sur le blog du livre.
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Témoignage - Abandonnons la marque employeur :
passons à l’expérience candidat / collaborateur
Nous avons demandé à Isabelle Moreau-Lovett, ancienne de la DRH de Devoteam, de
partager son expérience et sa pratique du pilotage et de l’animation de la marque
employeur acquise au sein d’une Entreprise de Services Numériques (ESN).
Ne parlons plus de marque employeur. Recentrons le sujet sur l’expérience candidat afin
de renforcer l’attractivité et sur l’expérience collaborateur en vue de favoriser la cooptation
et de conforter leur mobilisation. L’expérience permet de contextualiser, personnaliser,
cibler et de gagner en authenticité : il faut prendre en compte la symétrie des attentions
réciproques.
Voyons ici comment dès le départ intégrer les besoins du candidat quand il vient sur votre
site et comment convertir ces visites en expérience pour le candidat au travers d’une
interface utilisateur bien conçue.
Tout est question de contenu
De la publicité à l’ancienne au contenu de la marque, venons-en à la stratégie d’influence.

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D’une marque employeur assommante, non variée, trop rédigée et surtout autocentrée,
i
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elle devrait être tout le contraire : captivante, agréable à lire, imaginative, elle doit être
A
formatrice et même inspirante.
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Il s’agit donc de fournir un contenu de qualité, de donner du sens, de parler de qualité de


d

vie au travail, bref de démontrer l’envers du décor et non de faire du marketing de façade.
de

L’envers du décor, c’est d’abord montrer des « vrais » gens, insister sur l’aspect humain
oa

et sincère. Evitez-donc les banques d’images ! Prenez en photo vos vrais collaborateurs,
pl
U

les vrais dirigeants.


C’est aussi montrer les vraies situations. Par exemple, décrire nos processus de
recrutement ou d’intégration, parler de nos projets, des missions réalisées chez les clients
ou en interne. Faisons témoigner nos clients !
Prenons la parole, exprimons nos opinions et n’hésitons pas à prendre position sur des
sujets professionnels et sociétaux.
Trop de contenu tue le contenu
Il faut varier les formats de contenu. Pourquoi ne proposer que du format texte que
personne ne lira ? La marque employeur devenue marque expérientielle a besoin de
réactivité, de spontanéité et de simplicité. Cela rend l’entreprise plus authentique. Il faut
oser varier les formats : des textes certes, mais avec parcimonie. Des images, oui mais
uniquement quand elles sont très belles. Il peut s’agir de photos mais aussi de
pictogrammes, d’infographies, de nuages de mots, d’illustrations et surtout de vidéos.
Aujourd’hui, nous ne pouvons plus nous permettre d’ignorer la vidéo car elle crée de
l’interaction immédiate et elle offre un contenu engageant. Ce format sert un témoignage,
une mise en situation, un retour d’expérience candidat ou collaborateur, un apprentissage.
Bientôt, face au recrutement mobile multiplateformes, ce processus passera par la vidéo
où recruteurs et candidats présenteront leurs meilleurs atouts.
Pas de marque employeur sans ambassadeurs
Soyons humains et vrais. N’hésitons pas à mettre en valeur de vrais gens avec leurs vrais
portraits. Engageons les dirigeants à prendre la parole, à les mettre en avant. Qui mieux
qu’eux peuvent donner du sens, faire part de leur stratégie par exemple, de la
transformation digitale de leur entreprise ? Repérons et embarquons avec nous les
adeptes des réseaux sociaux. Leur engagement sera facilité, et cela permettra d’adopter
un ton plus personnel.
Les collaborateurs sont les premiers ambassadeurs de l’entreprise. N’oublions pas notre
écosystème : engageons les candidats, les partenaires et les fournisseurs et enrôlons
également nos clients. Certains seront certainement ravis de raconter leur expérience
commune.
Du sens, rien que du SENS. Et de l’audace
À quoi sert mon entreprise ? En quoi mon entreprise participe-t-elle à rendre le monde
meilleur ? Quelles contributions permettons-nous à nos collaborateurs d’avoir dans les

m
projets ? Quelles trajectoires me propose mon employeur ? Autant de questions qui
i
ss
peuvent contribuer au renforcement de la réputation de l’entreprise.
A

Les collaborateurs et les candidats attendent des réponses concrètes. Cela crée de
y
B

l’empathie et de l’émotion, propres à la mobilisation de tous les acteurs. Enfin de l’audace


d

: synonyme de différenciation par des initiatives collaboratives, productives et


de

engageantes.
oa
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U
Le digital et la communication
Le combat que nous avons mené pour le développement de la communication digitale est
loin d’être fini. Notre livre « La communication digitale expliquée à mon boss » sorti en
2013, a joui d’une belle diffusion, mais il reste encore beaucoup à faire.
Selon une étude de l’INSEE publiée en 2015170, la France est encore en retard par
rapport aux autres pays européens. Entre 2013 et 2015, l’usage des médias sociaux y a
progressé de 11 points dans les sociétés de 10 personnes ou plus implantées en France,
mais reste inférieur à celui de l’Union Européenne à 28 (31 % contre 39 %). Par ailleurs,
en 2015 comme en 2013, seuls les deux tiers des entreprises françaises disposent d’un
site Web.
En 2015, une société sur trois de 10 à 49 personnes n’a ni site Web, ni compte sur un
média social, contre seulement une sur dix pour celles de 50 personnes ou plus. Cela
nous met au même niveau que la Bulgarie ou la Grèce, loin derrière les pays nordiques ou
le Royaume-Uni.
Pourtant, depuis la sortie de notre ouvrage, l’offre de communication digitale s’est
développée de façon spectaculaire. Toute entreprise qui souhaiterait combler son retard

m
en matière de communication digitale pourrait trouver sans difficulté la réponse à ses
i
ss
questions : les agences de communication digitale ont fleuri un peu partout en France, tout
A
comme les livres sur ce sujet (même si nous considérons le nôtre comme précurseur et
y
B

référent). De nombreuses écoles de communication ont ajouté le digital à leur cursus et


d

au cas où on rechignerait à embaucher une personne compétente, il est facile de trouver


de

un stagiaire ou un alternant pour lui confier l’étude préalable à la mise en place, si ce n’est
oa

la mise en place elle-même, d’une stratégie de communication digitale.


pl

Quels seraient les composants d’une telle stratégie de communication ? Sans chercher à
U

résumer exagérément les 400 et quelques pages de notre livre de 2013171, voici quelques
recommandations.
Le site Web
Le socle de toute communication digitale, quoiqu’on en dise, reste le site Web de
l’entreprise. Le taux affolant d’un tiers des entreprises de plus de 10 salariés démunies de
site Web nous semble être une aberration économique. À quoi bon chercher à
communiquer sur d’autres canaux, si la moindre recherche Google renvoie un résultat
vierge, ou si elle renvoie le visiteur vers des contenus que l’entreprise ne contrôle pas ?
L’aveuglement de certaines entreprises et de leurs dirigeants en la matière ne cesse de
nous étonner.
Et quand bien même l’entreprise dispose-t-elle d’un site Internet, encore faut-il que celui-ci
serve ses intérêts. Que peut-on penser d’un site dont la dernière mise à jour remonte à
quatre ou cinq ans, dont l’affichage ne s’adapte pas aux contraintes d’un affichage sur
tablette ou sur smartphone, ou dont l’interface repose sur des standards révolus il y a une
décennie (du type technologie Flash, par exemple) ? L’internaute n’est pas bête, et sait
distinguer le site qui reflète une entreprise en bonne santé du site qui témoigne d’une
entreprise qui se cherche.
Au-delà de la fraîcheur du site, il faut aussi se poser les bonnes questions, en matière de
visibilité, de référencement, d’adéquation du contenu aux attentes des lecteurs, de
transformation des visiteurs en clients ou en prospects, bref, d’efficacité du site quant aux
objectifs qu’on se sera fixés en amont du projet de conception ou de refonte.
Enfin, le Web devenant de plus en plus mobile, il faut penser à décliner son site Web pour
des usages réalisés depuis un smartphone ou une tablette, c’est à dire dans des
conditions autres qu’assis derrière un bureau, un clavier et un écran. Le Web mobile se
consomme avec des débits aléatoires, dans les transports en commun ou dans des lieux
inhabituels : il faut en tenir compte à la fois en termes d’affichage (responsive design)
mais aussi de parcours et d’expérience utilisateur.
Les médias sociaux
Précurseurs, nous avions anticipé l’essor des médias sociaux au sein du dispositif de
communication des entreprises, aussi bien en B2B qu’en B2C. Ce fut d’ailleurs l’objet de
notre premier ouvrage, dès 2011172. Depuis, les médias sociaux se sont imposés comme

m
des standards de la communication interactive, des outils cruciaux pour les échanges

i
entre une entreprise et ses diverses communautés. ss
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Le paysage a cependant beaucoup évolué depuis 2011. Certaines plateformes ont été
y

rachetées, comme Instagram et WhatsApp qui ont été absorbées par Facebook, ou
B

LinkedIn racheté par Microsoft, ou ont complètement disparu comme Orkut. D’autres se
d
de

sont durablement installées, comme Facebook. D’autres, comme Twitter ou Snapchat,


oa

cherchent encore leur modèle économique, malgré un nombre d’utilisateurs gigantesque et


pl

des volumes de données brassées tout bonnement prodigieux. Enfin, certaines sont
U

mortes de leur belle mort, comme Google+, qui n’a pas survécu dans sa forme sociale, et
d’aucuns prédisent la fin de Twitter, même si celle-ci se fait attendre173.
De nombreuses entreprises ont pris le virage du Web social, c’est encourageant.
Certaines l’ont fait de manière plus ou moins organisée, en allant sur toutes les
plateformes à la fois (ce qui est inutile et coûteux) ou en oubliant de réfléchir à ce qu’elles
pourraient bien avoir à faire sur certaines plateformes. Peu à peu, les usages se
rationnalisent, les plateformes se spécialisent : à Facebook, Twitter, Pinterest, Instagram
ou Snapchat le B2C, à LinkedIn et SlideShare le B2B. Certains outils conservent des
usages mixtes, comme Twitter ou YouTube. Mais dans l’ensemble, les community
managers ont fini par comprendre où ils devraient mettre (ou non) les pieds.
Les emailings et les newsletters
L’emailing est loin d’être mort, et n’est même pas moribond. L’usage de l’e-mail n’a jamais
été aussi intensif. Certes, une bonne partie des messages électroniques que nous
recevons quotidiennement finit inexorablement dans nos corbeilles. Parmi ceux-ci, un bon
nombre de newsletters ou d’emailing non sollicités – les avertissements de la CNIL
semblent de moins en moins pris en compte. Mais au final, nous avons tous de deux à
cinq abonnements à des newsletters que nous n’annulerons jamais ou presque. Il s’agit de
celles qui présentent un intérêt professionnel évident, ou dont nous approuvons les
contenus jour après jour.
Dès lors, l’effort des communicants consiste non pas à multiplier le nombre d’abonnés174 à
l’infini, mais plutôt à rechercher les auditoires les plus efficaces, ces internautes qui
n’annulent pas leur abonnement. Comment les reconnaître et mieux les servir ? Voici ce à
quoi devraient réfléchir celles et ceux qui se livrent à ce genre d’activité.
Les achats média
Nous sommes tous les jours confrontés à une immense masse d’informations, de toute
sorte, issues de canaux les plus variés. Pour les sources émettrices de ces informations,
il est paradoxalement devenu de plus en plus difficile de se faire remarquer, de se faire
voir, de se faire entendre. Disposer d’un site Internet ne sert à rien si celui-ci ne voit aucun
trafic parvenir jusqu’à lui ; publier des contenus sur une page Facebook n’a aucune utilité
non plus si sa portée tend aujourd’hui à se rapprocher d’un taux très proche de 0 % 175.
Bref, nous créons de plus en plus de contenus qui ont, paradoxalement, de moins en
moins de chances d’être vus.

m
La monétisation des audiences est une des solutions à disposition des communicants pour

i
ss
rendre leurs contenus plus visibles. Bonne nouvelle, c’est le modèle économique majeur en
A
cours chez les principaux acteurs du Web : la majeure partie des revenus de Google,
y

Twitter, Facebook et dans une moindre mesure de LinkedIn, provient de la publicité.


B

À chaque plateforme son mode opératoire. Chez Google, c’est l’achat de mots-clés,
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de

univers dans lequel Google tient une position dominante depuis plus d’une décennie. Chez
oa

Facebook, c’est la publicité ciblée sur des critères sociologiques, ceux déclarés par les
pl

utilisateurs, combinés aux données collectées lors de partages sur la plateforme. Seul
U

LinkedIn se distingue, avec un modèle s’appuyant sur trois modes opératoires (publicité,
abonnements payants et solutions de recrutement).
Les budgets associés à de telles initiatives sont loin d’être négligeables. Certaines
entreprises françaises vont jusqu’à débourser entre deux et cinq millions d’euros par an en
achats de mots-clés pour être sûres d’être visibles sur certaines requêtes stratégiques
pour leur activité. Facebook réalise le cinquième du chiffre d’affaires de Google, avec une
rentabilité équivalente : c’est dire si ces pratiques sont devenues monnaie courante.
Les autres pratiques de monétisation des audiences n’ont pas disparu. La location de
fichiers d’adresses, l’affiliation, les campagnes display, ont encore cours très
fréquemment. Une entreprise qui cherche à se rendre visible via le digital a tout intérêt à
utiliser au mieux non pas un seul support, mais une multitude de supports pour toucher les
différents constituants de son audience, qui peut être très fragmentée176, en fonction des
âges, des lieux d’habitation ou du niveau d’étude.
L’univers de la publicité en ligne n’a eu de cesse d’évoluer depuis une vingtaine d’années,
et d’innover, avec l’apparition de nouvelles techniques, comme le reciblage (retargeting)
ou les DMP (data management platform). Bref, communiquer demande de plus en plus
d’efforts, de moyens, et une très grande capacité à s’adapter à de nouveaux standards
pour toucher des cibles différentes. Il faut donc vous y intéresser.
Les RP digitales
À l’heure du digital, la réputation d’une marque se fait et se défait en un rien de temps,
non plus à coup de communiqués de presse, mais de tweets ravageurs publiés par des
internautes mécontents. Peu importent les raisons ou l’origine de la rumeur, les
journalistes sont sur Twitter et sont les premiers à se renseigner sur ce qui fait qu’une
tendance se dégage, quitte à en démultiplier l’effet. La presse, en effet, a de plus en plus
tendance à s’alimenter à partir du Web, tandis que le Web social s’alimente de contenus
diffusés par la presse en ligne. Cette boucle de rétroaction, dont nous avions déjà décrit
les effets pervers dans un ouvrage précédent, n’a fait que s’amplifier depuis.
Les RP à l’heure du digital doivent faire face à des interlocuteurs de plus en plus
nombreux, mais beaucoup plus accessibles, moins professionnels mais beaucoup plus
engagés, accessibles à toute heure et par des moyens mobiles177. Rester cantonné à des
RP traditionnelles n’a absolument aucun sens, et la plupart des agences RP ont compris
les enjeux du passage au digital. Il serait souhaitable qu’il en soit ainsi au niveau des
entreprises, également.

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Les applications mobiles
ss
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L’autre facette du Web mobile, c’est celle façonnée par les applications mobiles, que tout
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un chacun peut découvrir et installer depuis l’App Store Apple ou Google Play. À la mi-
d

2016, il en existait près de deux millions178 sur chacun de ces environnements, qui se
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partagent l’univers des applications, les univers similaires chez RIM (BlackBerry) et
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Microsoft (Windows Store) n’ont jamais atteint la même popularité. Si la conception d’une
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application mobile ne présente rien de particulièrement difficile, il faut bien comprendre


U

que le succès n’est pas facile à atteindre. Bien que plus de 100 milliards de
téléchargements aient eu lieu sur l’App Store entre 2008 et 2015, un internaute n’utilise
que 3 applications pour 78 % de ses usages mobiles. Et il y a de fortes chances que
parmi celles-ci, on trouve Facebook, Twitter, Instagram ou Snapchat, les éditeurs des
réseaux sociaux ayant très tôt compris l’intérêt de disposer d’applications dédiées, pour
développer à la fois l’addiction des utilisateurs, et leurs propres revenus.
Au-delà de ces constats, il faut se demander comment une application mobile peut ou non
contribuer au dispositif de communication d’une marque ou d’une entreprise. À titre
personnel, faites le test avec les principales marques dont vous faites l’usage quotidien :
allez chercher leurs applications mobiles (si elles existent), testez-les, et posez-vous la
question de leur intérêt. Si à titre personnel vous n’en trouvez aucun, qu’en est-il dans ce
cas de la marque ou de l’entreprise pour laquelle vous travaillez ?
Digital Me Up - Comment gérer un « bad buzz »
efficacement ?
Par Céline Notelet
https://goo.gl/CTOXTS

La réputation d’une entreprise ne tient qu’à un fil. Les médias sociaux constituent en effet
à la fois une opportunité et une menace pour la réputation d’une marque. Les entreprises
peuvent tout aussi bien tirer parti d’un buzz qu’en sortir terriblement meurtries. Comment
gérer un « bad buzz », et le tourner à son avantage ?
Qu’est-ce qu’un « bad buzz » ?

im
Un « bad buzz » est un phénomène de bouche-à-oreille qui impacte négativement l’image
ss
d’une marque. On en observe de plus en plus souvent sur les médias sociaux. Pris à la
A
légère, un bad buzz peut détériorer la réputation globale d’une marque, toucher son
y
B

attractivité et détériorer ses ventes sur le long terme. C’est pourquoi les entreprises
d

doivent apprendre à réagir correctement pour y faire face.


de
oa

Anticiper un bad buzz


pl

Dans une étude menée en 2015, l’hebdomadaire Le Point a montré que les entreprises ne
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savent en général pas gérer un bad buzz. Seules 52 % des entreprises qui ont essayé de
réagir face à un bad buzz ont réussi à réduire le flot de critiques, ce qui montre
l’importance d’apprendre à gérer de telles crises et d’adopter une stratégie de défense
adéquate.
Pour empêcher un bad buzz de se produire, les entreprises doivent d’abord apprendre à
suivre le flot de contenus et de publications qui concernent leur (s) marque (s). Des
logiciels aux fonctionnalités puissantes existent pour mener à bien ce type de tâche,
comme Hootsuite, Linkfluence, Synthesio ou Talkwalker. Cette veille en ligne doit
également être étendue aux concurrents et à tous les contenus qui concernent le domaine
d’activité.
Traiter un bad buzz
Il n’existe pas de règle générale : tout bad buzz doit être interprété dans son contexte
propre, afin de trouver la solution optimale. Les entreprises doivent considérer les bad
buzz comme des crises majeures et les traiter comme telles.
En premier lieu, il s’agit d’identifier les influenceurs clés de la crise, et leur légitimité sur le
sujet. Une fois identifiés, il va falloir entrer en contact avec eux dans une forme de
dialogue amicale, et entamer une sorte de négociation. Il s’agit de réagir avec empathie.
La vitesse et la capacité de réaction sont des facteurs clés d’efficacité. Il vaut mieux
adopter une approche proactive que réactive. La réponse de l’entreprise doit suivre les
mêmes processus qu’une campagne publicitaire : trouver un ton, une accroche, adaptés à
une cible bien définie.
La marque ou l’entreprise doivent veiller à ne jamais détruire le contenu incriminé. Cela
aurait l’effet contraire, et risquerait de conduire à une prolifération sur une multitude de
comptes ou de plateformes. Il s’agit moins d’étouffer les messages négatifs que de les
réguler afin d’éviter l’amplification du bad buzz.
Dans le cas où du contenu utilisateur aurait été produit de manière à parodier l’univers de
la marque179, il faut procéder avec soin : la marque peut parfois tirer parti de ce contenu
utilisateur.
Bad buzz : l’exemple de l’univers du luxe
Le cas de la relation entre Kidult et les marques de luxe illustre les différentes manières

m
de réagir à un bad buzz. En 2013, de nombreuses marques de luxe furent la cible
i
ss
d’attaques de Kidult, un artiste spécialisé dans les graffitis antisystèmes. Pour protester
A
contre l’usage du street art par les marques de luxe, Kidult s’est mis à vandaliser des
y

boutiques de luxe, comme celle de Marc Jacobs ou de Chanel. Mais les réactions furent à
B

l’opposé l’une de l’autre.


d
de

Quand Mac Jacobs a lancé sa première collection street art en 2012, Kidult a réagi en
oa

taguant le mot « ART » sur les fenêtres de la galerie de leur principale boutique à New-
pl

York. En réaction, Marc Jacobs mit en vente un t-shirt avec une copie du graffiti de Kidult
U

au prix de 686$. La riposte de Kidult ne tarda pas : il copia le t-shirt avec la mention « Not
art by Kidult » et le mit en vente au prix de 6,86$ sur Amazon…

La réponse du berger à la bergère…


Au lieu de jouer le partenariat avec l’artiste, Marc Jacobs a préféré répondre avec
agressivité. Kidult a donc continué ses attaques, dans un processus qui aurait pu
s’éterniser au détriment du premier.
En 2014, Chanel a également lancé sa collection street art. Durant la Fashion Week,
Kidult a vandalisé le showroom Chanel et installé un faux camion au nom de la marque,
décoré de graffitis tirés du logo de celle-ci. Les visiteurs étaient invités à briser la fenêtre
du camion pour gagner un sac avec le graffiti de Kidult inscrit dessus.
Au lieu de lutter contre lui, Chanel a décidé de surfer sur le succès de l’artiste. La marque
a encouragé le public à poser devant le camion, à le prendre en photo et à partager les
photos sur les réseaux sociaux. Karl Lagerfeld a lui-même écrit à Kidult pour le remercier,
et ce dernier s’est empressé de poster sur Twitter les messages reçus du couturier et
designer, dans un dispositif qui semblait imaginé d’un commun accord entre le graffiter et
la marque. Cette manière positive de gérer la crise a permis de la dégonfler, et même de
la transformer à l’avantage de la marque.
Cet exemple montre comment les marques et les entreprises peuvent inverser un bad
buzz, et le transformer en opportunité. Même s’il n’y a pas de règle en la matière, chaque
situation doit être envisagée avec transparence, créativité et un certain sens de la
réactivité. Rappelons-le, le but n’est pas d’étouffer les critiques, mais bien de les réguler
afin de réduire les impacts négatifs de la crise.

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Le digital et le marketing
Nous avons demandé à Philippe Jourdan, Valérie Jourdan et Jean-Claude Pacitto180 quel
était l’impact du digital sur les pratiques marketing.
Le développement d’Internet dans le monde s’est accompagné de mutations rapides de la
façon de consommer : l’accès instantané à une information ciblée et le plus souvent
gratuite, le développement des réseaux sociaux et, partant, des communautés de
consommateurs, les applications d’achats et de services en ligne toujours plus
nombreuses, etc. Il s’ensuit que les rapports de force entre les fournisseurs et les
consommateurs, entre les marques et leurs clients se sont inversés et que les
consommateurs ont pris le pouvoir. Ces derniers ont en effet rapidement compris qu’ils
disposaient de nombreux moyens de pression, de négociation, voire de contrôle sur les
marques et les entreprises. Cette constatation a donné naissance à un courant appelé le
« customer empowerment » : ce courant milite pour de nouvelles pratiques en marketing
et en management, consistant à un partage plus équilibré du pouvoir et de l’information
entre les fournisseurs et les clients. Faut-il pour autant penser que le marketing
traditionnel est mort ? Nous ne le pensons pas.

m
Le marketing digital, un marketing de plus ?
i
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La tentation d’enterrer le marketing n’est pas récente. Elle emprunte le plus souvent des
A

voies détournées, dont l’exemple le plus frappant est la multiplication artificielle des sous-
y
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disciplines du marketing selon l’angle de vue que l’on adopte : celui de l’offre (marketing
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des produits, des services, etc.), celui des supports (marketing digital, marketing du point
de

de vente, communication marketing), celui des secteurs (marketing B2B, B2C, C2C), ou
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encore celui des leviers d’action (marketing émotionnel, cognitif, expérientiel, etc.).
pl
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Force est de constater que ce découpage artificiel des pratiques du marketing participe
de son affaiblissement, diluant sans véritable justification la nécessaire cohérence propre
à toute discipline scientifique ou de gestion. On perçoit difficilement en quoi cette sur-
segmentation de la discipline participe d’une clarification de sa mission essentielle, par
ailleurs parfaitement résumée par la définition qu’en donne l’Association Américaine du
Marketing : « le marketing désigne l’activité, l’ensemble des institutions et des processus
dont la mission est de créer, de communiquer, d’apporter ou de participer à l’échange
d’offres à valeur ajoutée pour les consommateurs, les clients, les parties prenantes et la
société dans son ensemble » (AMA, 2013).
Dès lors, en quoi le marketing digital est-il un autre marketing ? Nous pensons que le
marketing digital conforte les grands principes inhérents au marketing mais qu’il en modifie
certaines règles en prenant appui sur les technologies. En cela, le marketing digital n’est
pas un autre marketing, mais il est plutôt une autre façon de faire du marketing.
Examinons quelques-uns de ces bouleversements.
Un consommateur omniscient
Le marketing digital rétablit l’équilibre informationnel entre le fournisseur et l’acheteur, la
marque et son client. Le marketing s’est longtemps appuyé sur la notion d’asymétrie de
l’information entre les acteurs, un cadre théorique emprunté à l’économie et à la finance.
Nous renvoyons les lecteurs intéressés aux travaux de George Akerlof et à l’illustration
particulièrement parlante qu’il en donne sur le marché des voitures d’occasion aux États-
Unis181. Rappelons qu’un marché où il existe une asymétrie d’information au profit du
vendeur qui connaît la qualité du produit qu’il vend alors que l’acheteur ne peut que
l’entrevoir est d’abord inefficient. En effet, l’acheteur qui ne veut prendre aucun risque est
tenté de proposer un prix délibérément bas, ce qui se traduit par un processus d’anti-
sélection : les produits de qualité sont retirés du marché et seuls sont proposés à la
vente, pour le prix demandé, des produits de moindre qualité. En cela, l’accès à une
information disponible et accessible à un moindre coût permet de rétablir l’efficience des
marchés (en tout cas du point de vue de la théorie). Par conséquent, les technologies
digitales contribueraient donc à une meilleure efficience des marchés et on ne peut que
s’en réjouir.
Un consommateur omnipotent
Le marketing digital replace le client au centre de la stratégie des entreprises. Certains

m
diront qu’il n’y a ici rien de nouveau et que bien des organisations marchandes n’ont pas
i
ss
attendu l’apparition des technologies digitales pour placer le client au centre de leur
A
démarche entrepreneuriale. Le marketing a depuis longtemps, sinon depuis toujours,
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adopté une approche orientée vers le client (« customer-centric ») qui, de notre point de
d

vue, lui est consubstantielle. Une étude récente182, menée en 2012 auprès de 7.500
de

entreprises par deux chercheurs de l’université Paris-Dauphine, Sanja Pekovic et Sylvie


oa

Rolland, a par ailleurs démontré sans ambiguïté que l’impact de l’orientation vers le client
pl

sur les performances des entreprises est d’autant plus fort que ces dernières évoluent sur
U

des marchés en croissance, très concurrentiels et en situation de forte incertitude. Il est


donc fortement recommandé de ne pas « réduire la voilure » en matière d’orientation vers
le client, a fortiori en situation de crise.
La nouveauté qu’apporte la digitalisation du marketing réside dans une diffusion rendue
possible de la culture du client à tous les échelons de l’entreprise. L’exemple le plus
frappant est celui de l’entreprise californienne Zappos, qui aurait pu n’être qu’une société
de vente de chaussures par Internet de plus, n’eût été la forte culture du client initiée par
son fondateur Tony Hsieh et largement diffusée à tous les échelons de l’entreprise. Cette
diffusion et son appropriation par les employés sont rendues possibles par le partage des
outils numériques qui accélèrent la circulation de l’information, rendent transparentes les
remontées des clients (réclamations, attentes, avis, etc.) et mettent en relation le client et
l’employé le plus apte à résoudre son problème en un temps record.
La digitalisation du marketing participe donc d’une interaction plus forte entre le client et
l’entreprise et ce d’autant plus que le client peut être le salarié, le fournisseur,
l’actionnaire, le prospect, le prescripteur, l’influenceur, rendant d’autant plus nécessaire le
management digital de l’image à 360° auprès de l’ensemble des parties prenantes de
l’entreprise. Grâce à une bonne compréhension des enjeux et une forte culture du bien-
être des salariés, Zappos a pu ainsi consolider son image autour de dix promesses clés
dont la première n’est autre que « d’étonner le client par la qualité du service » : c’est
ainsi que plutôt que de multiplier classiquement les offres promotionnelles, Zappos préfère
faire livrer un bouquet de fleurs à ses meilleurs clients.
Un consommateur omniprésent
Autre conséquence et non des moindres de l’usage d’Internet par les consommateurs : un
processus de décision qui se complexifie. Il s’ensuit un parcours d’achat qui devient moins
prévisible. Les plans d’action marketing ont par le passé – et encore aujourd’hui pour
certains – bâti leur raisonnement sur deux hypothèses désormais remises en question par
l’essor des technologies digitales : la linéarité du processus d’achat et sa non récursivité.
En d’autres termes, le principe d’un tunnel allant de la prise de conscience jusqu’à l’achat
en passant par les phases de collecte d’information, puis de formation de l’univers de
référence et de préférence a longtemps structuré la démarche d’optimisation du
marketing mix. Il n’est aujourd’hui plus d’actualité comme le soulignent à juste titre Mark
Bonchek et Cara France dans un article prémonitoire de la Harvard Business Review
(2014) 183. En effet, l’essor des technologies digitales, parce qu’elles favorisent en

im
particulier la comparaison des offres (sites de marque, comparateurs d’offres, blogs et
ss
forums spécialisés, avis de consommateurs, réseaux sociaux, etc.) et qu’elles élargissent
A
considérablement l’ensemble de considération pour un même achat sans parler du champ
y
B

des possibles (achat en magasin, en ligne, neuf, d’occasion, location plutôt


d

qu’acquisition, etc.), remet en cause l’hypothèse d’un comportement linéaire du


de

consommateur. Ce dernier peut en effet mûrir sa décision d’achat, s’informer, comparer


oa

les offres puis soudain renoncer temporairement ou définitivement, jugeant préférable de


pl

prendre le temps nécessaire pour examiner d’autres alternatives ou de surseoir à son


U

achat.
La récursivité est aussi de mise, ainsi que l’attestent les stratégies d’achat qui consistent
à surfer sur Internet pour finir par acheter en magasin (« Web-to-store ») ou bien
inversement à venir s’informer en magasin pour ensuite acheter sur Internet (« store-to-
Web »). L’utilisation croissante des smartphones sur les lieux de vente est bien entendu
de nature à favoriser ces comportements.
Il s’ensuit que le consommateur est devenu imprévisible lorsqu’il s’agit de connaître le
moment précis où il décide d’acheter et que le processus d’achat prend davantage l’allure
d’un cheminement circulaire plutôt que linéaire184. Il en découle que repérer les moments
appropriés pour communiquer sur le besoin en amont, sur les spécificités de son offre à
l’étape de la comparaison, sur la disponibilité de son produit préalablement à l’achat, sur
l’offre promotionnelle susceptible d’emporter la décision est fortement problématique.
Le marketing est aujourd’hui confronté à une réelle difficulté : quand exercer sur le
consommateur l’action la plus adéquate pour être certain de l’influencer au moment
opportun sinon décisif ? La nécessité de multiplier les points de contact avec le
consommateur en est la conséquence logique : si elle reflète bien la réalité d’un
consommateur omniprésent, cette nécessité se traduit par davantage de complexité et
d’incertitude dans la mise en œuvre de stratégies marketing efficaces de conquête et de
fidélisation.
Pour conclure, la digitalisation a rendu le consommateur omniscient, omnipotent et
omniprésent. En cela, il a bouleversé l’équilibre informationnel entre les marques et les
clients, en faveur de ces derniers mais pas nécessairement au détriment des premiers. Il
appartient aux marketeurs de tirer profit des outils digitaux pour renforcer, enrichir et faire
évoluer la relation entre les consommateurs et les marques. Nous sommes profondément
convaincus que le marketing digital ne participe pas de la mort des marques, pas plus que
de celle du marketing, mais plutôt de sa révision en profondeur.

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Big Data ou Big Fad (gros effet de mode) ?
Le Big Data n’est pas la solution miracle à tous les maux de l’entreprise, et notamment en
matière de transformation digitale. C’est ce que nous explique Christophe Faurie,
spécialiste de la conduite du changement, et auteur de « J’ai pensé à tout et pourtant ça
ne marche pas » 185.
Quand vous lirez ce texte, le « Big Data » aura été oublié. Gartner publie chaque année
son fameux « hype cycle » qui décrit les tendances pour toutes les technologies. On y voit
les nouvelles idées atteindre des sommets d’espoir, sombrer brutalement, puis s’installer
dans la grisaille quotidienne. C’est ce que l’on appelle « management fad » aux USA, en
français : un mode de management. Les livres sur ce sujet sont des best sellers. C’est
propre à la culture du pays. C’est une forme de spéculation. Elle joue de l’ambition des
natifs et cela nous affecte depuis quelques décennies. Mais nous ne sommes pas toujours
capables de décoder le vrai du faux. Voici, à partir de l’exemple du Big Data, ses
symptômes, et comment tirer les marrons du feu. Car toute mode de management a son
fond de vérité.
« Marketing bullshit »

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On nous dit qu’on a produit autant de données en 6 mois que dans toute l’histoire de
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l’humanité. Mais de quelles données s’agit-il ? De vos cookies à la position de votre
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portable, on sait tout de vous. Or, voyez-vous beaucoup de publicités pertinentes ? Tentez
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une analyse de données, dans votre entreprise. Vous constaterez que celles dont vous
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disposez sont inutilisables. Et tout le monde le sait. Elles sont le résultat d’arrangements.
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Ils permettent de garantir « la paix sociale ». En échange de services, on masque ce qui


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pourrait gêner. Tout travail d’analyse de données demande, presque systématiquement,


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de partir de zéro. En prenant bien soin de ne froisser personne.


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Le propre du mode de management, c’est ce type de sophisme. Pour s’en protéger, il faut
revenir à la pratique. Un exemple, concernant le Big Data : voici un type de problème
auquel l’entreprise est confrontée. Imaginez que vous dirigiez un organisme de crédit à
l’achat de poids lourds. Il a été acquis par une multinationale. Elle vous propose un
accord. Vous conservez votre emploi en échange d’une amélioration radicale des
résultats.
Pour y parvenir, vous avez l’idée d’un nouveau produit qui combine prêt et maintenance du
véhicule. « Quelle est la taille de mon marché ? » vous demandez-vous.
L’analyse montre qu’il y a deux types de transporteurs : les gestionnaires et les autres.
Les premiers sont les clients des banques, vos concurrents. Leur saine gestion leur vaut
des taux bas que vous ne pouvez leur offrir. Les autres tirent le diable par la queue. Ils
font eux-mêmes la maintenance de leur flotte.
Triste conclusion, votre produit n’intéresse donc personne.
Il faut de ce fait le modifier pour répondre au besoin de professionnels qui ont une gestion
opportuniste, et financièrement tendue, de leurs affaires. C’est-à-dire, des prêts « coup
dur », qui permettent de ne pas être en défaut quand on ne peut rembourser une traite, et
des crédits-baux courts, pour acquérir le poids lourd nécessaire à une période de test
demandée par un nouveau client. L’intérêt du marché se vérifiera par sondage.
Comparons cette situation, concrète et proche du réel, au discours marketing entendu sur
le Big Data. Il nous parle de data scientists et de données « numériques ». Pensez-vous
que ce couple puisse faire l’analyse qui précède ? L’entreprise a besoin, au contraire, de
ce qu’Edgar Schein nomme un « process consultant ». C’est quelqu’un qui, en posant les
« bonnes questions », fait sortir, des têtes et des ordinateurs, l’information utile, et aide
l’entreprise à trouver, elle-même, les solutions qui lui permettent de résoudre son
problème.
La grande démocratisation
Second exemple. Le Big Data permettrait de brasser un flot continu d’informations non
structurées. Mais revenez à la réalité : en dehors de la NSA ou de Google, peu de gens
sont dans cette situation. Comme dans l’exemple précédent, les questions critiques pour
l’entreprise demandent de l’analyse traditionnelle des données. Or, là, il se passe quelque
chose de révolutionnaire qu’on pourrait appeler la grande démocratisation.

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Il existe de remarquables outils d’analyse, qui ne requièrent aucune formation particulière.

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De plus, ils offrent une grande puissance de calcul à très bas prix, grâce au cloud. Les
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logiciels d’aide à la décision les plus performants sont donc à la portée du plus grand
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nombre.
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Voilà qui explique que les monstres de jadis, les IBM, HP et autres Oracle, tremblent.
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Leurs grosses machines et leurs gros logiciels, qui demandaient de doctes experts pour
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être paramétrés, installés et opérés, sont attaqués par des solutions plus efficaces et
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bien moins chères, que n’importe qui peut utiliser.


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On en arrive à une conséquence imprévue d’un mode de management. Un marketing


outrancier conduit à masquer une innovation utile. On nous abreuve de messages sur
l’analyse de données non structurées qui n’a aucun intérêt et on nous cache l’information
importante sur la démocratisation de l’analyse des données.
Tout cela s’explique par le fait que le propre du marketing et des modes de management
est de nous dire ce que nous voulons entendre : à savoir que le changement se fera
comme par miracle.
Conduite du changement et anomalie
Une fois débarrassés de ces idées fausses, comment mettre au jour ce que le mode de
management a d’utile ? Toujours de la même façon. En vous retroussant les manches. En
apprenant à utiliser la nouveauté à partir d’un problème concret. Vous avez sûrement
entendu les experts du Big Data vous conseiller :
1) de vous attaquer à une question bien posée, pas d’affronter brutalement une masse
de données en attendant une illumination, et
2) vous dire que le succès était dans la « conduite du changement ».
Qu’entendent-ils par là ?
Le data scientist fait une description exhaustive, « scientifique », des données. Or, ce
n’est pas ce qui intéresse l’entreprise. La source de la performance c’est la gestion de la
connaissance ou, en anglais, le « knowledge management ». Par exemple, un commercial
a trouvé un moyen de faire un bien plus gros chiffre d’affaires que ses collègues, ou un
industriel met au point un réglage de paramètres de processus industriels qui élimine les
rebuts, etc. C’est de la généralisation de ces meilleures pratiques (dans le sabir franglais
des consultants, on nomme cela du « business process reengineering ») que vient la
performance de l’entreprise. Ce qu’elle recherche, c’est l’exception, et donc elle a besoin
de logiciels de recherche d’anomalies.
Les logiciels de recherche d’anomalies sont des logiciels d’enquête qui vous indiquent où
regarder : qui interviewer ? Quel composant d’un processus est important ? Quel réglage
est critique ? etc. Ce ne sont pas des boîtes noires. Sans votre intuition ils ne sont rien.
D’où la notion « d’intelligence augmentée » ou de « réalité virtuelle » des années 80.
Et la conduite du changement dans tout cela ? Toute innovation modifie la façon dont
fonctionne une organisation humaine. Donc est susceptible de la faire dérailler. Chaque
innovation déclenche ainsi une réaction de résistance au changement de la part des

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populations concernées. Ne nous y trompons pas, il s’agit d’un réflexe sain et protecteur
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des excès potentiels induits par une démarche trop brutale. La conduite du changement,
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quant à elle, consiste à amener l’organisation à utiliser cette innovation sans (trop de)
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résistance ni déraillement.
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Qu’en est-il pour le Big Data ? Comme on l’a vu, la collecte d’informations est un exercice
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difficile. Pour s’y livrer sans risque, il faut adopter une formulation de la question qui
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promette un bénéfice à ceux qui possèdent l’information dont on a besoin. C’est ce que
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l’on nomme le « process consulting ».


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Mais il y a plus dangereux, la bombe sociale à retardement


On lit dans la Harvard Business Review186 que la plaie de l’entreprise est son
management. 30 à 60 % de ses cadres produiraient un travail destructeur de valeur pour
l’entreprise. Ce qui générerait un manque à gagner annuel, pour les USA, de l’ordre de
350 milliards de dollars (soit 2 % du PIB).
C’est sur ce type de résultat qu’aboutit ordinairement l’analyse de données. Il faut à tout
prix éviter la bombe sociale. En conséquence, l’analyse de données ne peut se mener
sans contraintes. Certaines choses peuvent être changées et d’autres non. Tous les
managers ne peuvent s’improviser meneurs d’hommes. Il faut dans ce cas chercher ce
que la systémique nomme « effet de levier », c’est-à-dire le moyen de transformer
l’organisation radicalement, sans lui demander l’impossible. Là encore, on va s’intéresser
aux anomalies et aux exceptions. Qui sont les bons cadres (40 à 70 % du total) qui
viennent compléter les effectifs identifiés par la Harvard Business Review cités
précédemment ? Et comment tirer de leurs pratiques des idées que leurs collègues
pourraient appliquer ?
Surfer sur un tsunami
Le directeur scientifique d’une multinationale m’a écrit un jour : « on observe un glissement
sémantique dans les colloques où l’on entend parler de Smart Data en lieu et place de Big
Data. C’est la preuve du constat de décès du Big Data, qui est réservé aux GAFAM et qui
a tendance à faire peur. D’où l’introduction du mot « Smart ». Il en est ainsi de tous les
phénomènes de mode. J’ai connu successivement les termes suivants : Recherche
Opérationnelle, Aide à la Décision, Data Analysis, Réseaux de Neurones & Intelligence
Artificielle, Data Warehousing & Data Mining, Reticular Analysis, et depuis 2008, Big Data,
Big Analytics, le Renouveau de l’IA, le Deep Learning. Plus récemment (depuis 2013), il
est question de transformation numérique.) Ce qu’il y a de particulier à tous ces domaines
techniques c’est que ce sont les mêmes scientifiques ou pseudo scientifiques qui tiennent
les manettes, voire tirent les ficelles, même si les utilisateurs de ces techniques changent
de façon opportuniste suivant les contextes. Les problèmes à résoudre existent toujours
et sont souvent les mêmes qu’avant, seul le vocabulaire associé évolue. » Eh oui, tout ne
change pas : « Travaillez, prenez de la peine : c’est le fonds qui manque le moins ».
Les Anglo-saxons parlent de « boire à une bouche d’incendie ». On dit aussi « surfer un
tsunami ». Bienvenue dans le monde des modes spéculatives.

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Le digital et les forces de vente
De tous les salariés d’une entreprise, on aurait pu croire que les commerciaux étaient les
moins concernés par la transformation digitale. Ce faisant, on aurait commis une énorme
bévue. Car si les métiers de la vente font partie des plus anciens – ou des moins
modernes – ils n’en sont pas moins concernés par les changements induits par la
révolution numérique.
Laissons à part l’e-commerce, et focalisons-nous sur les forces de vente en B2B, ces
bons vieux commerciaux qu’on affuble de tous les maux, qui ont si mauvaise presse dans
bon nombre d’entreprises, mais sans qui aucune entreprise ne pourrait fonctionner de
manière durable. Que leur demande-t-on ? De vendre, un point c’est tout. Et tous les
moyens légaux pour y parvenir, ou presque, sont bons. Bien sûr, avec le temps, des
spécialistes de la vente se sont intéressés à la performance de certains commerciaux,
capables de réaliser des ventes d’un montant supérieur à celui de leurs collègues, ou de
manière plus régulière. Des techniques de vente se sont développées, pour aider les
jeunes commerciaux ainsi que ceux plus expérimentés, à bénéficier de méthodologies plus
élaborées : on a vu fleurir les appellations comme Insight selling, Solution selling, etc.

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Certaines entreprises, comme IBM ou XEROX, sont allées jusqu’à développer leurs

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propres écoles de vente, à instaurer des processus maison en 5, 6 ou 7 étapes, de
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manière à rationnaliser au maximum les démarches de leurs équipes.
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Mais un changement majeur est venu perturber ce bel équilibre, il y a quelques années.
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Internet a fait irruption dans la petite vie tranquille des commerciaux, et redistribué les
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rôles entre les vendeurs et leurs clients. En effet, les commerciaux ont longtemps eu
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l’avantage dans la relation commerciale : c’était par leur biais, par exemple, que les clients
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découvraient les offres de leurs fournisseurs, les tarifs, les nouveautés. Un commercial
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habile pouvait aisément tirer profit de cet avantage, en dissimulant certains produits ou en
mettant en avant les caractéristiques de ceux sur lesquels les marges étaient les plus
avantageuses. Internet a tout bouleversé : désormais, tout prospect peut aller se
renseigner tout seul, se forger une idée, comparer les produits offerts par des entreprises
concurrentes, et orienter son choix avant même d’avoir rencontré le moindre commercial.
Il va sans dire que la prospection téléphonique, dans un tel environnement, est devenue
de plus en plus difficile, voire inutile, et même souvent considérée comme intrusive par les
prospects.
Ce changement radical du processus décisionnel dans la vente B2B doit conduire les
forces de vente à repenser leur rôle dans la relation client-fournisseur, et identifier les
moyens de retrouver la confiance des acheteurs. Le premier de ces moyens, c’est de
parfaitement connaître son client. Des outils existent pour cela, comme les plateformes de
CRM, à condition, bien entendu, de les maintenir à jour.
Le second, c’est de bien comprendre que le flux d’information a changé de direction : ce
n’est plus le commercial ou l’expert qui renseigne son client, c’est le prospect qui va tout
seul à la chasse aux informations, en s’aidant du digital, à travers Google ou les réseaux
sociaux. Il est désormais quasiment impératif d’être présent sur ces derniers, et de
manière impeccable. Le personal branding a fait irruption dans la sphère commerciale : si
les réseaux sociaux permettent à un commercial d’en apprendre long sur un prospect, la
réciproque est aussi vraie. Ce n’est pas qu’une affaire de posture : produire du contenu
de qualité, le partager sur son profil LinkedIn, relève désormais du comportement
standard. Principal réseau social B2B au monde, racheté par Microsoft dans le courant de
l’année 2016, LinkedIn revendique plus de 450 millions de profils début 2017, et ne cesse
de progresser dans certains pays. Bref, la mise en place d’un dispositif de Social
Selling187 au sein d’une entreprise fait partie des objectifs de plus d’un tiers des
entreprises en B2B.
Mais ce n’est pas tout. Depuis plus de vingt ans, l’analyse statistique des performances
des vendeurs et des comportements des clients a fait l’objet d’un soin particulier. Les
directions commerciales ont été parmi les premières à s’orienter vers ce qu’on appelait
encore la business intelligence, à la fin du siècle dernier. Le terme est passé de mode, au
profit de celui plus impressionnant de big data. Entre les deux, un gap technologique, un
saut quantique en termes de taille des données manipulées, mais une démarche somme
toute assez similaire : croiser des informations d’origines différentes, en tirer les

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conclusions les plus pertinentes pour augmenter l’efficacité des vendeurs.

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Évolution des postures, approche plus centrée sur les besoins réels des clients, analyse
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plus poussée de la donnée, les équipes commerciales sont loin d’être tenues à l’écart de
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la transformation digitale. Encore faut-il en être conscient.


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Le digital et la R&D
« Il y a trois manières de se ruiner, disait le grand Rothschild : le jeu, les femmes et les
ingénieurs. Les deux premières sont plus agréables, mais la dernière est plus sûre »,
affirmait Auguste Detœuf, dans son livre Propos de O.L. Barenton, confiseur188. Cachés
derrière leur savoir-faire technologique et leur vocabulaire parfois ésotérique, les
ingénieurs constituent une classe à part dans l’entreprise. Tout le monde compte sur eux
pour élaborer les produits les plus sophistiqués, mais personne n’a réellement confiance
dans les délais qu’ils indiquent, les montants qu’ils évoquent ni les risques qu’ils prennent.
Dans nombre d’entreprises technologiques, les ingénieurs constituent une élite qui
alimente les postes de direction au détriment de fonctions moins nobles comme le
marketing ou surtout la vente189.
Digital et R&D : pas si simple
Parler de digital et de R&D n’est pas chose simple. D’abord, parce que derrière ces deux
termes – recherche et développement – se cache une très grande diversité de métiers,
de parcours et de savoir-faire. Un ingénieur de développement qui travaille chez Google
n’a rien à voir avec un spécialiste d’électronique chez Thalès, ni un chimiste d’Arkema, ni

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encore un ingénieur travaux publics chez Vinci. Ils ont étudié des domaines très différents,
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les cycles de développement n’ont rien à voir d’une entreprise à l’autre, et alors qu’un
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marketeur peut plus facilement exercer une reconversion en passant d’une entreprise de
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BTP à une entreprise du secteur agroalimentaire, c’est loin d’être aussi simple dans le
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domaine de la R&D. Il nous sera donc difficile de proposer une approche unique, en
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raison de cette grande variété de domaines.


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Une seconde difficulté apparaît du fait que le digital a déjà, en réalité, largement percé au
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sein des départements de R&D des entreprises. C’est d’ailleurs assez souvent par ce
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chemin que le digital fait sa première apparition. Prenez, par exemple, le secteur de la
construction automobile. Il y a bien longtemps que la planche à dessin a disparu des
bureaux d’étude des entreprises de ce secteur. Les logiciels de conception 3D sont
apparus dès le début des années 80, et n’ont cessé d’évoluer depuis, et de diffuser au
sein de l’entreprise. On ne parle d’ailleurs plus de CAO (Conception Assistée par
Ordinateur) mais de PLM (Product Lifecycle management), tant les outils digitaux ont pu
se disséminer dans les différents départements, afin que les mêmes données servent aux
ingénieurs qui conçoivent les produits, aux marketeurs qui les mettent en valeur, ou aux
commerciaux qui vont les vendre.
Mais alors, qu’entend-on par transformation digitale des équipes de R&D ? Cela consiste,
probablement, à replacer les efforts techniques de ces équipes dans le contexte de
l’évolution numérique telle qu’elle se déroule en dehors de l’entreprise. Autrement dit, de
faire en sorte que les produits développés correspondent à leur époque, et non à l’époque
révolue. Quelques exemples vous permettront de mieux comprendre.
Palm, le contre-exemple
Au début des années 2000, la société Palm vient de racheter Handspring, qui développe
des smartphones – déjà – composés d’un Palm auquel on adjoint les capacités d’un
téléphone. Le succès est fulgurant, et Palm peut se targuer de tenir la seconde place en
vente de smartphones, juste derrière BlackBerry. Mais les ventes finissent par stagner,
les modèles évoluent peu, les clients sont mécontents. En 2007, Palm sort enfin un
nouveau produit, qui n’a rien à voir avec ce que demandent les afficionados de la marque :
alors que ceux-ci attendaient la connectivité Wifi, ou un GPRS190 plus performant, Palm
sort un appareil hybride, mi ultra-PC mi smartphone, le Treo 500191.

Le Treo 500 et le test du magazine Les Numériques en 2008 … http://bit.ly/treo-500-2008

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Quelques mois plus tard, l’affaire est entendue : Apple a lancé l’iPhone, on n’entendra plus
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jamais parler de nouveaux produits chez Palm192. Pourtant, les ingénieurs de Palm avaient
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tout en main pour se maintenir dans le trio des revendeurs de smartphones. Mais ils ont
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écouté leur ego, plutôt que les demandes des clients fidèles de la marque.
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Waze : l’étoile filante


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La percée de Waze ces dernières années constitue un autre exemple, dans le domaine du
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logiciel. Avant 2009, l’univers des navigateurs GPS pour automobilistes est réduit à
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quelques acteurs, TomTom, Navigon193, qui vendent principalement un terminal dédié, peu
évolutif, sur lequel on ne peut installer de nouvelles cartes qu’en les payant au prix fort.
L’arrivée des plateformes iOS et Android pousse ces entreprises à proposer une
application similaire dédiée, mais elle est vendue elle aussi au prix fort, et chaque nouvelle
carte est vendue séparément. Même les informations trafic requièrent un abonnement
supplémentaire. Bref, l’automobiliste est prisonnier d’un système archaïque, qui ne tient
pas compte de la révolution mobile en cours. La place est libre pour qu’un petit acteur
israélien, du nom de Waze, vienne balayer tout cela. Dès janvier 2009, le jeune éditeur
propose un navigateur GPS gratuit, qui s’appuie sur des données diffusées en temps réel
via la 3G et qui s’appuie sur les données de trafic remontées par les terminaux des
utilisateurs. Ceux-ci n’ont pas un sou à dépenser pour disposer d’une carte
supplémentaire (nonobstant le coût des forfaits itinérance à l’étranger, qui était encore
prohibitif à l’époque) et de données de trafic en temps réel. Mieux, Waze permet de gérer
toutes les informations additionnelles comme les travaux sur les voies, les accidents ou
encore les radars mobiles.
Le devoir des équipes R&D : rester dans la course
Un fabricant de téléviseurs, de nos jours, se doit de proposer un certain niveau de
connectivité, une interface de pilotage via un smartphone. Les systèmes de stationnement
payant, quant à eux, sont désormais accessibles à distance, sans qu’on ait besoin de
glisser une pièce dans le parcmètre. Des serrures électroniques permettent de fermer
des appartements. Des cuisinistes proposent des connecteurs USB pour recharger les
smartphones tout en étant à table. Le Bluetooth règne en roi sur les autoradios de la
plupart des véhicules neuf. Le digital est partout et la liste des évolutions techniques liées
au digital ne cesse de s’allonger.
Pour ne pas rater cette révolution majeure, les équipes R&D doivent donc non seulement
être au fait des principales normes et des tendances, mais aussi les intégrer dans des
délais raisonnables pour ne pas rater la marche. L’effort ne peut, bien entendu, pas être
porté seulement par ces équipes. Le digital contraint – enfin, oserait-on dire – à une
meilleure collaboration avec les équipes marketing, notamment marketing produit, pour
prendre en compte les spécificités propres aux marchés visés. Et les ingénieurs
s’intéressent de plus en plus aux usages que les clients font des produits qu’ils conçoivent.
Avec le digital, tout irait-il enfin pour le mieux dans le meilleur des mondes ?

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Le digital et le service clients
Nous l’avons déjà évoqué plusieurs fois tout au long de ce livre, le digital impacte de
manière durable la relation entre une marque et ses clients. Comment cela se traduit-il au
quotidien ? Tanguy Moillard, directeur de la communication chez Bouygues Telecom, nous
livre ici tout à la fois son témoignage, tiré de son expérience quotidienne, et sa vision sur
l’avenir de la relation client à l’ère du digital.
Le digital ne sert pas qu’à la communication, loin de là. Il sert aussi et surtout à converser
avec ses clients. Ceci pour répondre aux questions les plus directes, mais aussi pour
prévoir l’avenir, dégager des insight clients et préparer les produits et services de demain.
Voici donc ma vision de la relation client au travers du digital, sur la base de notre
expérience du terrain.
Pour bien comprendre ses clients, le mieux est encore de les écouter
Pour bien comprendre les attentes d’un client, le plus simple c’est de commencer par
l’écouter. Et pour s’assurer qu’on répond aux attentes de l’ensemble des clients, le plus
simple encore est probablement d’en écouter beaucoup et en continu. Vous me direz que

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c’est plus facile à dire qu’à faire ? Pas si sûr. C’est ici que les réseaux sociaux excellent :

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vous fournir en permanence une multitude d’insight clients.
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Les outils d’écoute sur le Web social (social listening) sont désormais très nombreux,
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intuitifs et surtout faciles à déployer pour le bénéfice de tous les collaborateurs en mode
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SaaS. Cette première démarche est indispensable pour jauger de son e-réputation, mais
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surtout pour cerner au mieux les attentes de ses clients.


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La phase d’écoute permet de procéder à un état des lieux en s’appuyant sur 3 critères :
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Le volume : il permet de se faire une idée du volume de questions à adresser et


donc des ressources à mobiliser
La tonalité : il permet d’anticiper les points de faiblesse ou de force de votre
entreprise et d’anticiper des améliorations, des argumentaires, des solutions à
proposer à vos clients.
Les sources : Elles vous permettent de comprendre où vos clients parlent le plus
de vous et où il est bon que vous interveniez : Twitter, Facebook, Instagram,
Snapchat, LinkedIn, ou simplement chez vous via votre site, votre appli…

Faut-il prendre la parole ?


Les premiers résultats d’un tout premier bilan d’e-réputation peuvent être anxiogènes. Les
fans sont en effet souvent plus discrets que les mécontents, et la tentation est donc forte
de rester en retrait à cause de cela. Ce serait une erreur, car cela ne changerait rien aux
critiques, et l’e-réputation est bien un domaine où la critique est particulièrement
transparente. En partant du principe que les consommateurs se renseignent tous sur le
Web avant d’acheter, l’internaute n’est jamais à plus d’un clic d’un avis négatif sur votre
marque, ce qui pourrait bien le dissuader de vous choisir.
C’est donc à vous de créer le lieu du rendez-vous (Facebook, Twitter, forums, etc.) afin
d’y amplifier les verbatim positifs de vos fans, de vous nourrir des remarques
constructives des mécontents pour les traduire en insights clients, tout en leur apportant
une réponse, une assistance.
En fonction de votre audience et de vos cibles, vous choisirez la plateforme adaptée en
prenant soin de construire une ligne éditoriale adaptée qui devra respecter quelques
règles évidentes :

Etre en parfaite cohérence avec votre plateforme de communication ;


Porter les valeurs de votre entreprise ;
Vous adapter au canal choisi : tout en restant vous-même, vous ne vous
exprimerez pas de la même façon sur Facebook, Twitter, Snapchat ou un blog
d’entreprise ;
Enfin et surtout, apporter une information utile à vos clients.

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La relation client digitale
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Dès qu’il y a prise de parole sur les réseaux sociaux, il y a conversation. C’est même le
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but principal, au-delà de la simple diffusion d’information, de l’animation d’une vitrine, le but
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est bien d’engager la conversation avec une communauté pour susciter l’adhésion, puis la
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recommandation. Pour ce faire, le rôle du community manager est évidemment essentiel,


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mais il n’est pas suffisant. En tant qu’opérateur nous avons eu à répondre très rapidement
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aux attentes « SAV » individuelles de nos clients.


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En fonction de nos clients, nous avons fait le choix d’être présents sur trois plateformes
principales :

Facebook : parce qu’il regroupe la plus forte audience.


Twitter : parce que c’est là que démarrent les buzz, qu’ils soient bons ou mauvais,
et les rares crises.
Un forum d’assistance sur notre site.

Ce dispositif est complété par une présence claire sur les quelques forums indépendants
spécialistes de notre secteur d’activité.
Quelle organisation ?
En l’occurrence, il s’agit de l’ouverture d’un nouveau canal de relation clients, qui nécessite
un travail en commun des équipes marketing clients, relation clients et marque. Des
indicateurs de performance doivent être définis dès le départ comme pour n’importe quel
canal. La notion de taux de prise en charge reste pertinente mais sera assouplie, par
rapport à celle d’un centre d’appels, pour prendre en compte l’autogestion d’une partie
des publications par la communauté. Des indicateurs de productivité sont également
nécessaires, tels que le délai avant la première réponse et le nombre de tickets fermés
par heure. Des enquêtes de satisfaction client qualitatives sont enfin nécessaires pour
cerner l’attente des clients et monitorer au mieux ce nouveau canal.
Pour travailler efficacement, assurer de bons délais de traitement, une historisation des
publications et des réponses et, autant que possible, un enrichissement du CRM, l’idéal
est de choisir une plateforme de conversation (dans notre jargon on parlera de «
plateforme d’engagement ») capable d’absorber les flux de l’ensemble de vos sources et
d’y répondre de manière centralisée. De nombreux outils sont disponibles sur le marché,
certains sont plus centrés que d’autres sur l’animation communautaire, d’autres sur la
fonction de workflow de la relation client. Pour notre part, nous avons avons opté pour un
outil permettant de faire les deux : Dimelo (qui plus est, c’est un éditeur français).
Nous avons formé une centaine de nos conseillers de clientèle à la relation client digitale.
Les compétences de relation client étant déjà là, il s’agit principalement d’un
apprentissage de l’outil et du partage d’une charte rédactionnelle vivante et évolutive que
nous améliorons sans cesse, au fil des situations rencontrées. Il y a une dimension à ne

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pas sous-estimer. Via ses conversations publiques, le conseiller de clientèle va au-delà de

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son métier initial, il devient un porteur visible de la marque. Cela peut créer des stress
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comme des joies, mais quoiqu’il en soit c’est une opportunité forte de fédérer l’interne et
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de valoriser les équipes.


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Après 5 ans d’expérience, le constat est assez clair :


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Le volume de questions SAV en provenance des réseaux sociaux est en croissance


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constante mais lente.


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Il reste très loin derrière les canaux historiques que sont les centres d’appels et les
magasins.
Les clients cherchent de plus en plus à faire par eux-mêmes pour gagner du
temps. Le choix du forum qui rend consultables à nouveau et sans limites de
temps, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, toutes les questions déjà traitées et utiles
aux autres clients favorise cette attente de « selfcare » [NDLR, c’est le terme
utilisé dans le métier pour décrire le service client auto-administré] et s’avère un
investissement très rentable pour la satisfaction du client comme pour l’économie
de votre relation client.
Malgré leur flux relativement limité, les réseaux sociaux sont à la fois une vitrine
essentielle pour informer rapidement les clients, mais aussi une source
d’information temps-réel propre à alerter les responsables de l’entreprise. Ils sont
extrêmement efficaces et permettent de réagir très rapidement.

À noter cependant que ces démarches ne remplacent aucunement la nécessaire


amélioration continue de vos espaces clients desktop ou mobile.
Quel avenir pour le service client et le digital ?
Plusieurs tendances se dessinent pour le futur de la relation client avec le digital.
La première tendance est liée à l’essor des « bots194 ». Ceux-ci s’avèrent déjà être des
outils utiles d’accompagnement du client dans les parcours. Même s’il s’agit d’une aide au
choix, d’un guidage au sein d’un parcours balisé, le potentiel est important.
L’émergence de la messagerie instantanée est la deuxième tendance nette du futur et son
potentiel est énorme : moins de taux de rebond que l’e-mail, meilleure satisfaction client,
meilleure productivité ; ses avantages sont nombreux. La question se pose de l’intégrer en
marque blanche dans vos outils existants (application, espace client) ou de choisir les
plateformes leader telles Facebook Messenger. C’est avant tout un choix entre puissance
et maîtrise de vos données, mais quel que soit le choix que vous ferez, la messagerie
instantanée est clairement un choix d’avenir.
Ces nouvelles options vous pousseront à faire d’autres choix. Click to chat, réseaux
sociaux, messagerie instantanée, e-mail, forum, … chaque solution a ses avantages, mais
les multiplier à l’infini n’a pas de sens, car ce serait une dispersion coûteuse et finalement
peu visible de vos efforts. En conclusion et sans risque de me tromper, il est certain que
pour tous ces nouveaux outils, le meilleur critère de choix est et restera, toujours, la

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satisfaction de vos clients. ss
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Digital Me Up - Les nouveautés de Google en 2016
Par Sébastien Faye
https://goo.gl/gSqiS2

En 2015, les investissements en achats de mots-clés ont augmenté de 19 % par rapport


à 2014, pour atteindre 1,55 milliard d’euros en France, en évolution constante tout au long
de l’année. Comme chaque année, les investissements ont été encore plus importants sur
le dernier trimestre, mais leur croissance a été encore plus forte cette fois, avec un
montant total de 470 millions d’euros. La recherche payante (SEA) peut s’avérer un
modèle très performant, et de nombreuses entreprises y font appel pour développer leur
visibilité. Mais que se passera-t-il si ce marché continue d’évoluer et de changer ?

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Google occupe une position dominante sur le marché des moteurs de recherche en
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France, avec 95,5 % de part de marché. Son moteur de recherche n’a eu de cesse de
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s’améliorer ces dernières années, avec de nombreuses évolutions. La plupart du temps,
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ces évolutions bouleversent la règle du jeu.


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Une page de résultats sur Google contient une liste de liens vers des sites qui apportent
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une réponse pertinente à une requête donnée. Une telle liste contient deux types de liens :
les liens issus du référencement naturel, et les liens payants. La différence entre ces deux
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types de liens provient du fait que les entreprises ont payé pour apparaître dans la
seconde catégorie, et non pour apparaître dans la première. Cette notion de liens
payants (encore appelés liens sponsorisés) constitue l’une des principales sources de
revenus de Google. Ce système fonctionne à base d’enchères automatisées. Plusieurs
facteurs entrent en ligne de compte : le montant de l’enchère, la qualité de l’annonce, et
votre classement en tant qu’annonceur (sur la base de la performance de vos annonces
précédentes).
Google offre aux entreprises de nombreuses manières de se rendre visible : via les liens
sponsorisés au-dessus ou à droite des résultats « naturels », via « Google shopping » qui
référence les offres issues de sites de e-commerce, via le « knowledge graph » issu des
avis de véritables personnes, via Google Place, etc. Et ce n’est pas tout. Toute entreprise
qui souhaite développer sa présence en ligne doit se tenir au courant si elle veut rester
dans la compétition.
Google a lancé un 4ème type de liens sponsorisés, et a décidé de supprimer ceux qui
apparaissaient à droite du résultat de recherche, à l’exception des publicités qui
concernent « Google Shopping » et le « knowledge graph ». Les marketeurs ont réagi de
différentes manières à ce changement. Certains ont estimé que le niveau des enchères
allait monter, alors que d’autres en ont conclu que cela n’aurait aucune incidence.
En réalité, l’impact dépend largement de votre secteur d’activité et de votre
positionnement sur le référencement payant. Si c’est au cœur de votre business, et si
vous êtes un « pure player », vous ne devriez pas être fortement affecté, puisque vous
devriez principalement faire appel au format Google Shopping. En revanche, les
entreprises qui ont une offre principalement de services devront probablement payer plus
cher pour apparaître parmi les 4 liens sponsorisés affichés. Google est probablement
parvenu à un stade où, quoi qu’il fasse, le marché finira par suivre cette entreprise, à
cause de sa domination hégémonique. De cette évolution d’apparence mineure en termes
d’interface, Google tirera probablement un accroissement de ses revenus, renforçant
cette position dominante. Les marketeurs devront en tenir compte, assurément.

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Le digital et la DSI
Les DSI survivront-ils à l’avènement du digital ? Cette question peut vous paraître
paradoxale, elle n’en est pas moins justifiée. Car avec l’essor du digital et la prise de
conscience globale qu’il nécessite de la part de toutes les structures, c’est à un véritable
chambardement des rôles et des responsabilités que nous assistons. Tout le monde veut
faire du digital, tout le monde peut faire du digital, mais rares sont celles et ceux qui
passent par leur DSI pour cela.
Pour comprendre ce phénomène, il faut remonter aux origines du terme même de DSI –
qui évoque aussi bien l’organisation (direction des systèmes d’information) que l’individu
(directeur ou directrice des systèmes d’information). Le terme est apparu au début des
années 90, d’abord dans sa forme anglaise « CIO » - Chief Information Officer, un terme
popularisé par William Gruber, professeur à la MIT Sloan School of Management, et par
William Synnot, senior vice-président de la Bank of Boston. La DSI se définit d’abord par
son rôle : celui de la gestion des ressources informatiques et technologiques d’une
entreprise. Cela couvre aussi bien les aspects logiciels, matériels et humains, y compris
les processus et les données.

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À l’aube du XXIe siècle, le DSI apparaissait comme l’un des personnages les plus
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puissants de l’entreprise : à lui le contrôle des accès, des données et des outils de plus
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en plus informatisés. Besoin d’accéder à Internet depuis le réseau de l’entreprise ?
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Contactez la DSI. Besoin d’utiliser un nouveau logiciel ou de changer d’ordinateur ?


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Contactez là encore la DSI. L’explosion technologique qui dure depuis une vingtaine
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d’années – le cloud, les outils collaboratifs, les mobiles, la business intelligence – tout
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convergeait pour rajouter plus de pouvoir dans l’escarcelle des DSI.


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Mais comme souvent, abondance de biens nuit. Avec un tel emballement technologique,
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les DSI ont dû faire face à plusieurs problèmes. Le premier, c’est le manque cruel de
compétences pour gérer et superviser l’ensemble des biens et des produits sous le
contrôle de notre chère DSI. L’accélération technologique qui n’a eu de cesse depuis le
début du siècle rend difficile le recrutement de profils ayant les compétences pour
maîtriser les technologies les plus modernes, tout en ayant l’expérience nécessaire pour
asseoir son expertise auprès des métiers.
Ensuite, les DSI ont dû faire face à une certaine obsolescence de leurs outils. La mise en
place d’un ERP, par exemple, est affaire de mois, voire d’années : le temps que l’ERP soit
déployé, et on se rend compte que ses interfaces sont dépassées, que ses moyens
d’interconnexion ne suivent pas les évolutions des autres outils. Bref, on lutte d’arrache-
pied pour maintenir un système obsolète dès lors qu’il passe en production. Par ailleurs,
pour des raisons de maîtrise des coûts, les versions des logiciels installés ont tendance à
évoluer à une vitesse moindre que ces mêmes logiciels, d’où des problèmes de
compatibilité lors d’échanges avec des fournisseurs ou des clients. Ce qui ne renforce pas
le capital sympathie de notre chère DSI auprès de ses utilisateurs, loin s’en faut.
Le troisième problème est corrélé aux deux premiers. Les DSI ayant eu du mal à suivre
l’évolution technologique par faute de moyens, les organisations métiers se sont peu à
peu mises à gérer elles-mêmes leurs besoins informatisés : à la DSI les problèmes
d’infrastructure à l’échelle globale (annuaire d’entreprise, messagerie, ERP) et aux
métiers la gestion de leur parc matériel et logiciel en propre. La mode du BYOD (bring
your own device) est venue matérialiser un peu plus cette indépendance : plus besoin de
faire appel à la DSI pour commander un nouvel ordinateur, laissons les collaborateurs
venir avec leur propre matériel. L’essor des dispositifs mobiles, de la mode du SaaS
(software as a service) et de l’accès aux outils via des systèmes de licence en ligne n’y
est pas pour rien.
Pourtant, la digitalisation des organisations ne remet nullement en cause la nécessité des
DSI. Face à la démultiplication des attaques et des risques liés à l’utilisation du digital,
face à la multiplication des plateformes et des systèmes appelés à interagir, le rôle des
DSI nous paraît tout aussi justifié qu’auparavant. Mais si ce rôle reste justifié, sa mise en
scène nécessite, elle, des ajustements. On ne demandera pas en 2020 à sa DSI les
mêmes choses qu’on lui demandait en 2000.
Aux DSI incombe le rôle de superviser ce que nous appellerons les couches basses du

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digital : le réseau filaire, les bornes Wifi, l’infrastructure physique, bref, ce qui permet au

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digital de fonctionner. Cette tâche doit être menée avec intelligence : s’il est hors de
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question de laisser n’importe quelle équipe prendre un abonnement Internet pour
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contourner le réseau d’entreprise – ne rigolez pas, cela s’est déjà vu, et dans de grands
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groupes – il faut considérer les demandes de chaque organisation avec bienveillance. Et


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apprendre à gérer listes blanches et listes noires en fonction des besoins des uns et des
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autres.
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On demandera également aux DSI de préserver une vision globale de l’infrastructure


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digitale, tant en termes de logiciel que de données. Cela permet à la fois de réaliser des
économies d’échelle quand c’est nécessaire, et de tenir un rôle de conseil auprès des
équipes, à la recherche de la bonne solution. On ne demande plus aux DSI d’avoir LA
solution, mais d’aider à choisir entre plusieurs solutions possibles, et c’est là le principal
changement.
Se pose également le rapport entre la DSI et le CDO – le Chief Digital Officer. Le DSI
fait-il un bon CDO ? Doit-il en dépendre ou bien les relations doivent-elles être inversées ?
Doit-on aller cherche le CDO au sein de la DSI d’un concurrent, ou d’une entreprise
évoluant sur un marché similaire ? Nous n’avons pas de réponse toute faite à ce genre de
question, et les critères humains doivent l’emporter, plus que des considérations d’ordre
théorique. Un DSI qui prendrait le rôle de CDO prendrait aussi le risque de voir son
agenda exploser au détriment de ses missions essentielles. Un binôme fonctionnant en
bonne intelligence semblerait de meilleur augure, mais c’est souvent difficile à obtenir sans
faire de terribles concessions d’ordre politique ou managérial.
La transformation digitale des entreprises marque donc la fin probable de l’essor du poids
des DSI dans l’entreprise, mais nullement leur disparition : tout comme l’entreprise doit se
transformer pour tirer parti du digital, les DSI doivent se transformer pour permettre que
cette transition se réalise dans les meilleures conditions. Car en cas de problème, ne
nous leurrons pas, le responsable sera facile à trouver, et on le cherchera, probablement,
du côté de cette même DSI…

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Le digital et la formation
L’impact du digital sur la formation est déjà visible depuis de nombreuses années, c’est-à-
dire les premiers pas de ce qui s’appelle le e-learning au tout début des années 2000195.
Le premier niveau de perception de cette évolution, c’est bien évidemment au niveau de
l’accès à l’offre de formation : cet accès se fait désormais en ligne aussi bien lors des
phases de recherche de programmes de formation, que de demande de renseignement
ou de financement, ou encore d’inscription. Cet accès digital a des répercussions qui vont
bien au-delà de la mise en ligne de l’offre : chacun peut librement comparer les prix ou les
contenus des programmes de formation, en attendant les avis en ligne des stagiaires, qui
apparaîtront bien un jour.
Le second impact se voit sur les formats des cours. L’e-learning s’est durablement installé
dans le décor. La notion de LMS (ou Learning Management System) s’est développée : il
s’agit de plateformes permettant de gérer les parcours pédagogiques, les contenus des
programmes de formation, via des outils dont la complexité s’est peu à peu réduite, pour
en faciliter l’accès aussi bien aux administrateurs qu’aux utilisateurs.
Ces dernières années ont vu l’essor de formats diffusés en ligne, les MOOC (Massive

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Open Online Course) et leur déclinaison en entreprises, appelées COOC (Corporate
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Open Online Course). Le principe en est simple. Un internaute décide de suivre un cours
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en ligne en s’inscrivant à une plateforme et à un programme donnés. Il dispose alors
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d’accès à des contenus multimédia – vidéos, et parfois retranscription textuelle des


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contenus de ces vidéos – pour accroître ses connaissances. Ces vidéos sont conçues
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spécialement pour un public qui se formera en ligne, il faut donc les concocter en gardant
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à l’esprit que la durée, le rythme, la lisibilité, auront un impact sur la qualité du message
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délivré. Des sessions de contrôle des connaissances, sous la forme de quiz en ligne
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également, permettent de mesurer les progrès.


La distinction entre MOOC et COOC est importante. Via un MOOC, un salarié peut, par
exemple, décider de s’auto-former en dehors de tout processus de formation intégré à
l’entreprise, sur la base de contenus diffusés en ligne par une multitude d’établissements,
universitaires ou non, gratuits ou non. Du jour au lendemain, votre spécialiste base de
données peut se former au « big data » et venir postuler en interne à un nouveau poste,
sur la base des acquis personnels. La multitude de MOOC disponibles en fait toute sa
richesse. L’offre de COOC, à l’inverse, est limitée à ce que l’entreprise décide de
proposer à ses salariés.
Les cours en présentiel ont-ils disparu ?
Cela ne signifie pas pour autant que les cours en présentiel ont disparu, loin de là. Mais
comme pour l’enseignement traditionnel, il faut comprendre que l’irruption du digital dans
la salle de formation n’est pas sans conséquence. Les formateurs sont, comme les
enseignants dans tous les établissements universitaires, confrontés à l’impact du stagiaire
connecté : sur le poste de travail la plupart du temps, mais aussi, parfois, sur son
smartphone. Ce stagiaire connecté est non seulement moins concentré, mais peut aussi
challenger le contenu du cours auquel il assiste, sur la base de requêtes Google lancées
en direct, depuis la salle de classe, mettant plus de pression sur les épaules des
formateurs, qui doivent s’adapter à ces nouveaux modes de transfert des connaissances.
Les serious games : des jeux pour apprendre
D’autres tendances émergent également dans l’univers de la formation. Les « serious
games », par exemple, ont fait une percée remarquée il y a quelques années. Ils
permettent de mettre les stagiaires en immersion dans des environnements censés
représenter le futur de leur cadre professionnel. Des sociétés, comme le français Serious
Factory, proposent même des programmes de formation qui simulent l’immersion dans un
environnement 3D purement virtuel. Ces programmes permettent de former pour des
métiers allant de la relation client à la prévention des risques, et agissent comme de
véritables simulateurs, mais pour des métiers moins pointus que le pilotage d’avions ou
d’engins de chantier.
Pour une entreprise, les liens entre digital et formation ne concernent pas uniquement
l’usage interne, mais aussi l’externe. Une entreprise qui souhaite former ses utilisateurs à
ses produits ou à ses services, doit envisager de le faire également à l’aide du numérique.
Des entreprises comme 360 Learning ou Gutenberg Technology ont développé des offres

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parfaitement adaptées à ces besoins : elles s’adaptent à une multitude de contenus et de
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supports, pour débarrasser les entreprises et leurs clients des contraintes liées à une
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technologie ou à un système d’exploitation spécifique. Pour faire simple, il est également
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possible de lancer des formations au travers de la Web conférence, ce qui permet


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d’abaisser les coûts de manière spectaculaire. Ainsi, pas besoin de logiciels spécifiques,
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ni de développements particuliers. Yann Gourvennec pratique cette méthode dans ses


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sessions de formation depuis 10 ans.


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Le digital ouvre d’autres perspectives à l’univers de la formation. N’importe quel


spécialiste ou expert des produits d’une entreprise peut, par exemple, concevoir ses
propres programmes de formation et les diffuser via des plateformes numériques. La
formation digitale n’est pas l’apanage d’une seule entité, mais d’une multitude
d’intervenants qui peuvent, à tout moment, modifier, influencer et enrichir l’offre de
formation digitale.
Le futur de la formation digitale verra-t-il l’essor d’une sorte de Spotify de la formation ?
Une plateforme purement digitale de diffusion de contenus, où tout un chacun pourrait
décider de diffuser des contenus de formation, et où le modèle de rémunération
permettrait à chaque contributeur d’être intéressé au succès des programmes auquel il
aura participé ? LinkedIn a fait ce pari en rachetant Lynda.com en 2015196, lui-même en
concurrence avec de nombreux acteurs qui se sont positionnés sur ce domaine197. L’avenir
nous dira si c’est le bon modèle. Ce qui est certain cependant, c’est que la bonne vieille
salle de classe aura bientôt vécu, la seule véritable question est de savoir ce qu’on va
pouvoir en faire.
Le digital et la direction financière
Dans l’imaginaire collectif, le numérique a longtemps été associé à une population de
technophiles, des « geeks198 », plutôt jeunes (dans l’imaginaire populaire) et toujours
connectés, sans réel impact sur l’économie réelle. Mais la révolution numérique s’est
brutalement accélérée ces dernières années : Internet mobile, réseaux sociaux et
ubérisation font partie de notre quotidien, tant sur le plan personnel que professionnel.
Nous vous proposons ici 10 sujets de réflexion pour les directions financières, 10 actions à
mener de toute urgence, à l’intention de celles et de ceux qui ne voudraient pas passer à
côté de ces bouleversements.

1. Passer d’une économie de produits à une économie de services


L’un des premiers sujets de réflexion, c’est le passage d’une économie de produits à
une économie de service, comme l’expliquent si bien les auteurs Éric Hanoune et
Philippe Very dans leur livre Du produit vers le service199. Le logiciel, les transports, le
bricolage, et bien d’autres secteurs, passent d’un modèle de vente à un modèle de
location du droit d’usage. Des entreprises comme Hilti, Nespresso ou même Apple

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ont largement amorcé ce virage. Quels enseignements peut-on en tirer ? À chacun

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d’y voir clair selon son domaine d’activité, et d’anticiper les mutations à venir.
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2. Penser la dématérialisation comme un facteur de compétitivité
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Une fois cette réflexion sur l’économie de services lancée, il faudra bien s’intéresser
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pour de bon à la dématérialisation. Celle-ci ne concerne pas uniquement le traitement


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des factures et des fiches de paie – quoique cela puisse avoir un impact non
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négligeable sur certains frais généraux – mais également la relation avec le client.
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Les applications mobiles lancées par la SNCF ou la Française des jeux illustrent le
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type de révolution que cela induit sur l’acte d’achat et la qualité de service offerte aux
clients. Les taux d’usages constatés sont éloquents. En 2013, le mobile représentait
… 15 % des billets vendus. Vous êtes-vous déjà demandé quel impact une utilisation
correcte de l’Internet mobile aurait sur votre secteur ?
3. Repenser le M&A
Cette révolution digitale doit vous ouvrir les yeux sur certaines perspectives de
développement, notamment en termes de croissance externe. À investissement égal,
vaut-il mieux s’associer avec un concurrent historique ou investir dans une startup
prometteuse - du genre Uber ou Airbnb – dans leurs premières années ? Une jeune
pousse ne menacerait-elle pas votre entreprise et même l’ensemble de votre filière ?
Pour être crédible et efficace, dans ces phases-là, il va vous falloir développer de
nouveaux contacts, vous impliquer dans de nouvelles filières, et apprendre à repérer
ces talents. Et pourquoi pas, ouvrir cet incubateur ou cet accélérateur, cette
pépinière où vos salariés les plus audacieux pourront innover sans rompre avec leur
écosystème ni devenir menaçants. À condition de savoir les financer et d’en favoriser
le développement sur le long terme.
4. Réévaluer le capital humain
Puisqu’on parle de talents, faisons un court détour par vos équipes, au sein de la
direction financière, et même ailleurs dans l’entreprise. Sont-elles au fait de la
révolution numérique, prêtes à la transformation digitale ? Avez-vous suffisamment
investi en formation sur ces sujets ? Vos méthodes de management traditionnelles
(pas de télétravail, pas d’accès aux réseaux sociaux depuis le réseau d’entreprise,
interdiction du BYOD, des applications SaaS, etc.) ne risquent-elles pas d’effrayer
les profils les plus prometteurs ? Les jeunes générations s’adapteront-elles à votre
organisation ou est-ce à vous de vous adapter à ces salariés d’un nouveau genre ?
5. Redéfinir les risques
La notion de risque est elle aussi complètement bouleversée par le numérique. Aux
risques traditionnels – incendies, transports, vols - viennent se greffer des risques
plus particuliers : risques sur la réputation de l’entreprise ou de ses dirigeants,
tentative d’infiltration, faille technique, indisponibilité des données de l’entreprise
hébergées sur des serveurs externes (type Google Apps). Sur les réseaux sociaux
éclosent, chaque semaine, de 4 à 5 crises parfois passagères, mais parfois
dévastatrices, comme celle qu’a dû traverser Findus, il y a quelques années. Autres

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risques, ceux liés aux pertes ou à l’évasion de données, qui sont au cœur du
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fonctionnement de l’entreprise. Une multinationale comme Sony Pictures l’a bien senti,
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lors du piratage de ses mails fin 2014, acte toujours impuni mais qui a bien failli
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ébranler l’entreprise.
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6. Accepter l’importance de la donnée


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L’irruption de flots ininterrompus de données est une des conséquences du digital :


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données sur les clients ou sur les commerciaux, sur les produits eux-mêmes, sur les
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concurrents, les partenaires, les processus. L’exploitation de ces données, souvent


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massives (on parle alors de « Big Data ») requiert des méthodes connues des CFO –
business intelligence, notamment – mais désormais adaptées à de nouvelles tailles
de bases de données, et à de nouveaux schémas d’exploitation, qui permettent
d’effectuer des analyses sur des données non structurées. Ce sujet des données doit
être l’une de vos préoccupations principales : de leur mesure efficace et intelligente
dépend l’établissement d’un tableau de bord optimal. Mais il ne faudra pas prendre
des vessies pour des lanternes et pour cela, il vous faudra lire le chapitre, « Big Data
ou Big Fad » page 173 qui vous permettra de séparer le bon grain de l’ivraie et de
faire la part entre la mode et la véritable tendance de fond.
7. Automatiser ce qui peut l’être
Mais allons au-delà du simple pilotage de l’entreprise. Qu’est ce qui peut également
sortir de cette analyse pointilleuse des données ? De nouvelles sources
d’optimisation. Les processus d’une entreprise ne doivent pas être figés, et le digital
permet bien évidemment de travailler sur leur optimisation, sur l’automatisation de
certaines tâches inutilement coûteuses. Le digital permet de lutter contre la lourdeur
administrative et de s’appuyer sur des équipes plus légères là où des armées de
consultants étaient parfois mobilisées. Qui dit digital dit, à terme, robotisation.
Pensez-y, le digital aura des impacts lourds en termes de capital humain et rien ne
sert de les nier. Après tout, il ne vous viendrait certainement pas à l’idée, sauf peut-
être pour une reconstitution historique, de conseiller à un agriculteur de revendre son
tracteur et d’acheter un cheval de trait et une herse.
8. Former les équipes
Nous l’avons déjà évoqué, cette transformation ne peut se réaliser qu’à la condition
de s’appuyer sur des équipes non seulement motivées, mais aussi bien formées.
Comprendre les enjeux, les termes, les usages, les impacts, cela ne se réalise pas
seulement durant la formation initiale, mais tout au long de son parcours

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professionnel. De nombreuses formations existent désormais, poussez vos équipes à
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les suivre. Et ne croyez pas qu’en recrutant des jeunes vous pourrez faire des
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économies de formation : la génération Y n’est pas mieux armée que vos équipes
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actuelles : tout aussi précoce soit-il, un jeune embauché n’aura jamais la même
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expérience qu’un salarié qui connaît son métier et a su développer un réseau de


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contacts en interne. Sans oublier que la croyance qui veut que jeune = doué en
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informatique et vieux = has-been est tout aussi insultante qu’erronée, non soutenue
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par les faits ni les observations des sociologues200.


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9. Repenser la chaîne de sous-traitance


Ce qui vaut pour vos équipes vaut également pour vos partenaires et vos sous-
traitants. Sont-ils aussi digitaux qu’ils le prétendent ? Posez-vous bien la question, car
votre performance dépend parfois tout autant des capacités de vos salariés que de
celles de vos fournisseurs. Tout ce que nous venons de dire plus haut, de la formation
aux risques en passant par les processus, s’applique à votre chaîne de sous-
traitance, ainsi qu’à vos partenaires de développement. Si votre taille l’impose, ce
sera à vous de mener cette transformation. SAGE France, par exemple, a mis en
place un programme de formation au « social selling » non seulement pour ses
propres forces de vente mais aussi pour son réseau de distributeurs. Ces nouveaux
investissements vont sans doute se développer dans le futur.
10. Se relaxer : il y a pire

À la lecture des neuf sujets précédents, on pourrait croire que la digitalisation de la


direction financière est un objectif quasi-impossible à atteindre, un véritable cauchemar :
tous ces sujets sont-ils vraiment du ressort du CFO et non du CDO qui vient d’être recruté
? Il n’en est rien. Tous les sujets abordés précédemment concernent, de près ou de loin,
la direction financière de l’entreprise, qui aura à prendre des décisions et faire des
arbitrages, ce qui est déjà son lot quotidien.
Mais dites-vous qu’il y a pire, comme victime de la révolution numérique : d’autres métiers
souffrent ou souffriront bien davantage de cette transformation, il suffit de regarder autour
de soi. En réalité, une bonne compréhension des enjeux et des initiatives suffit sans doute
à renforcer l’importance et la mainmise de la direction financière sur le reste de
l’entreprise, grâce au digital. Cessez donc de vous effrayer du digital : il représente une
véritable opportunité pour celles et ceux qui sauront le maîtriser. Après tout, les financiers
sont loin d’avoir été les derniers à se mettre à l’informatique, et de l’informatique au
digital, il n’y a qu’un pas.

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Digital Me Up - Comment créer un modèle freemium qui
réussisse ?
Par Claire Roversi
https://goo.gl/DQPLUe

L’époque digitale dans laquelle nous sommes entrés nous plonge dans un maelstrom de
contenus illimités, d’information, de loisirs ou d’outils digitaux. Pour nombre d’entre nous,
ces ressources devraient être mises gratuitement à disposition. Rares sont ceux qui sont
prêts à payer avant de tester ces services, qui proposent presque tous une période
gratuite de test avant de passer à un mode payant, comme Netflix ou Amazon premium

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avec leur premier mois gratuit. Cela permet aux consommateurs de goûter à un produit,
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et ainsi de se faire une idée avant de se décider à payer.
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Qu’est-ce que le modèle freemium ?


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Ces dernières années, un nouveau modèle économique s’est développé : le modèle


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freemium. On en entend parler de plus en plus souvent, au sujet d’applications ou de jeux


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sur mobiles, mais ce modèle est apparu bien avant le premier smartphone. Runescape,
un jeu de rôle en ligne massivement multijoueur (ou « MMORPG ») créé en 2001,
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proposait déjà à ses joueurs deux types de comptes, un gratuit et un premium, bien avant
que cette tendance ne se développe.
En quoi consiste exactement le modèle freemium ? L’épisode 6 de la 18ème saison de
South Park en donne une définition satirique mais assez exacte : un modèle est dit
freemium lorsque l’accès au produit est gratuit, et que sous réserve de payer un
supplément, on accède à une expérience consommateur plus riche et plus agréable.
Candy Crush, par exemple, est gratuit, mais si l’on accepte de payer (d’acheter des «
cœurs »), on dispose de plus de fonctionnalités. Et cela marche : en 2014, 1,3 milliards
d’utilisateurs ont acheté des évolutions sur Candy Crush.
La stratégie freemium
De nombreux jeux mobiles ont adopté cette approche qui permet de télécharger
l’application, de s’inscrire et même d’effectuer quelques actions de jeu gratuitement. Il y a
bien plus de chances de séduire une grande quantité de joueurs lorsque le coût d’entrée
est nul. Mais attirer un large public ne suffit pas, encore faut-il les convertir en utilisateurs
compulsifs : c’est loin d’être facile. Des millions d’applications gratuites sont téléchargées
chaque jour, mais une grande partie sont supprimées avant même que leur utilisateur n’ait
payé le moindre centime. Les mobinautes savent décider très rapidement si un jeu ou une
application leur plait ou non.
Ceci a un impact considérable sur la manière de concevoir un jeu. La rétention des
utilisateurs est bien plus faible pour les jeux freemium que pour ceux pour lesquels il a fallu
payer. Une fois qu’un utilisateur a payé pour un produit, il y a plus de chance qu’il continue
à l’utiliser que si le produit était gratuit. Un produit freemium doit accorder une attention
particulière à la rétention des utilisateurs. Et même si les premières actions sont gratuites,
il faut maintenir l’intérêt jusqu’à convaincre l’utilisateur de payer pour poursuivre
l’expérience. Cela signifie que la partie gratuite doit être aussi intéressante que la partie
payante.
Des applications comme Candy Crush ou Angry Birds ont parfaitement intégré cet aspect
: ces jeux sont superbes, et les utilisateurs sont encouragés à chaque bon résultat. Cela
peut vous paraître superficiel, mais c’est essentiel. Les premiers niveaux sont gratuits, et
permettent au joueur de se sentir à l’aise. Une fois que les joueurs sont bien engagés, ils
auront beaucoup moins de réticences à passer au modèle payant lorsque le jeu se
complexifie.
C’est d’ailleurs une des caractéristiques du modèle freemium : jouer sur la frustration des

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joueurs. Dans Candy Crush, c’est la frustration du dernier mouvement pour finir un niveau.
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Il faut payer pour pouvoir effectuer ce dernier déplacement et faire cesser la frustration.
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Dans Clash of Clans, attendre 8 heures pour voir un bâtiment se construire est frustrant.
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En payant, la construction est immédiate. Et la frustration s’entretient : si on a payé pour


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un bâtiment, pourquoi ne pas payer pour le suivant ?


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Certains utilisateurs ne paieront jamais, d’autres paieront parfois et continueront de jouer


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de temps à autre. D’autres paieront des sommes importantes pour pouvoir continuer à
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jouer. Les concepteurs de jeux en ligne les surnomment whales, des baleines à la chasse
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desquelles ils sont prêts à partir. Pour la plupart des modèles freemium, il n’y a pas de
limites aux montants qui peuvent être investis. La plupart des jeux, cependant, font appel
à des monnaies virtuelles, pour diminuer le frein psychologique associé au paiement.
On ne trouve pas ces « whales » par hasard. Des études ont été faites pour vous aider à
les trouver en fonction de votre produit. Si vous êtes dans le business des jeux mobiles, la
meilleure stratégie pour les trouver consiste à vous lancer sur le marché coréen ou
japonais. Ce sont les pays où la population paie le plus pour jouer en ligne. Les Japonais
dépensent 4 fois plus que les Américains, et passent trois fois plus de temps à jouer.
Les limites
Les modèles freemium ont leurs limites, qui touchent souvent à l’éthique du modèle
économique. Comment baser un modèle économique durable sur la frustration ?
Comment baser un modèle économique sur une faible fraction de joueurs qui dépenseront
une fortune alors que la majorité des joueurs joueront gratuitement ? Comment baser un
modèle économique sur un jeu gratuit sans renoncer à la qualité, faisant fi du travail et de
l’investissement réalisé dans le développement, le graphisme ou la conception du jeu ? Ce
sont des questions que beaucoup se posent.
D’autres ont travaillé sur l’impact psychologique des modèles freemium, et prétendent que
ces jeux sont conçus pour conduire les joueurs à des comportements addictifs. Cet
argument n’est cependant pas évident. La plupart des éditeurs veulent juste créer des
jeux extraordinaires, et le modèle freemium est simplement le modèle le plus rentable
pour se développer sur un marché ultra-compétitif et à la limite de la saturation.

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Le digital et les boss
Au-delà de la transformation digitale, l’univers du numérique permet également, voire
même essentiellement, de communiquer. Avec le numérique, tout devient communication.
Votre boss doit-il donc sauter sur la communication digitale avec un appétit de premier
communiant ? Si nous pensons que la communication digitale, à l’heure où le monde entier
s’est emparé des médias sociaux, est cruciale, nous pensons également que cette mise
en musique par les directions générales mérite réflexion. Voici donc les conseils que nous
pouvons prodiguer aux boss qui veulent se jeter à l’eau sans risquer de se noyer.

1. Un patron peut-il se désintéresser de la communication et notamment de


la communication digitale ?
La communication est au cœur de la stratégie des marques et de la notoriété des
entreprises. Il ne suffit pas de fabriquer un produit, encore faut-il le faire connaître.
C’est crucial : le faire-savoir est aussi important que le savoir-faire. La communication
valorise l’image et la notoriété de l’entreprise. Et surtout, elle fait vendre. Notamment
sur le long terme. À condition que le produit soit assez distinctif et que les

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campagnes suivent quelques principes comme avoir un lien clair avec la marque, être

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facilement reconnaissables et s’inscrire dans la durée.
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2. Le dirigeant doit-il s’impliquer personnellement ?
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Il n’y a pas de règle. C’est une question de tempérament. Il faut en avoir le goût et
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surtout des choses intéressantes à dire. Et c’est encore mieux si le boss est un peu
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charismatique.
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Les grands capitaines d’industrie comme Steve Jobs, Bill Gates ou Richard Branson
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ont assuré la renommée de leurs entreprises. Elon Musk, (entre autres) fait partie de
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ces entrepreneurs qui font rêver les gens avec des produits et des services capables
de changer le monde.
Les enjeux d’une personnification sont importants : affirmation d’un rôle de leader,
capacité d’influer sur le marché et d’inspirer clients et employés. Chez nous, un
patron comme Michel-Édouard Leclerc fait cela très bien. S’appuyant sur une
tradition coopérative, il a adopté une stratégie originale pour un distributeur, en se
positionnant du côté des consommateurs. Il développe un lobbying efficace –
notamment au travers de son blog – qui fait bouger le marché avec d’incontestables
réussites comme dans l’univers informatique.
3. Cette personnalisation ne comporte-t-elle pas des risques ?
C’est le revers de la médaille. Les patrons médiatiques, qui portent un groupe et ses
marques, sont en première ligne, donc très engagés et, partant, plus exposés. Cette
personnalisation, aujourd’hui positive en termes de notoriété et de visibilité pour
l’entreprise, peut devenir demain très négative si l’image de son patron est abîmée.
On rappellera l’impact plutôt désastreux des polémiques, très médiatisées, sur les
salaires de Carlos Ghosn ou d’autres grands patrons.
4. Un patron doit-il être présent sur les médias sociaux ?
La réponse n’est pas simple. Comme sur les médias traditionnels, il faut d’abord qu’il
ait des choses intéressantes à dire. Mais aussi qu’il comprenne le digital et fasse
confiance à ses équipes et/ou ses consultants. Car on ne se transforme pas en
blogueur ou twittos influent d’un coup de baguette magique. Une fois cela établi, sa
communication doit s’articuler sur un discours pertinent et une implication personnelle.
Et assumer les éventuelles conséquences. Le milieu des années 2000 avait vu
l’éclosion de blogs entièrement dédiés à des patrons d’entreprises, et non des
moindres : Sun Microsystems, Hôtels Marriott, Hypermarchés Leclerc, etc. Des trois
cités, seul celui de Bill Marriott continue d’exister. Beaucoup ont fermé depuis, parce
que cette première génération de blogs était très Corporate, trop langue de bois et
n’intéressait personne. Ou aussi parce que leurs auteurs se sont révélés incapables
de les nourrir régulièrement, parce qu’un blog c’est presque un journal quotidien. En
fait, la véritable question à se poser n’est pas celle d’être ou non sur les médias
sociaux, mais de l’objectif que cette présence doit servir.

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5. À quoi et comment cette présence peut-elle servir à un patron ?
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Une telle présence peut servir, c’est le premier niveau, à s’approprier par exemple les
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outils du grand public pour mieux comprendre la digitalisation de la société. Mais aussi
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comme un outil de management. Surtout si le reste de l’entreprise est sur Twitter. Pour
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autant, les salariés ne sont nullement obligés de s’abonner au compte Twitter de leur
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patron, ni de retweeter ses messages. Il serait même non éthique de les y obliger.
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Être sur les réseaux, c’est aussi développer un mode de communication personnel plus en
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prise avec l’époque et plus dynamique201. C’est peut-être l’objectif le plus simple à
atteindre, également le plus risqué. En passant du temps sur Twitter, nombre de ministres
se sont fait reprendre, au prétexte qu’ils avaient des choses plus sérieuses à faire que
raconter leur journée. Cela pourrait arriver aussi à un dirigeant très gazouilleur, le jour où
ses résultats chagrineraient ses administrateurs. Mais mêler points de vue personnels et
propos officiels, comme le fait Alexandre Bompard, le PDG de la FNAC, peut faire
ressortir les aspects les plus humains de sa personnalité.
Alexandre Bompard sait communiquer autour de sa passion, même sur Twitter

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Le digital et les actionnaires
Premiers intéressés par la performance économique des entreprises dans lesquelles ils
ont investi, les actionnaires, qu’ils soient petits ou gros, sont tous concernés par la
transformation digitale. Bien sûr, il ne s’agit pas ici de vanter les mérites de telle ou telle
plateforme de financement collaboratif, ou de réclamer la mise en place de procédures
digitales de prise de participation ou de vente d’actions – cela existe d’ailleurs déjà, sous
différentes formes. Non, notre propos, ici, et de faire prendre conscience aux actionnaires
des entreprises – privées aussi bien que publiques – de l’importance que revêt le niveau
de familiarisation avec le digital des sociétés dans lesquelles ils ont investi.
Il en va de la valeur réelle de leur prise de participation. Investir dans une entreprise qui
passe à côté de la révolution numérique, c’est prendre le risque de lourdes déconvenues
en cas d’accélération de la transformation du marché dans lequel elle évolue. Investir
dans des entreprises trop digitales, ou positionnées de manière trop risquées sur ces
technologies, c’est prendre un risque tout aussi gros de voir ses économies partir en
fumée. Une excellente compréhension de ce qui est en jeu est nécessaire, si l’on veut
maximiser ses chances de plus-value. Voici quelques exemples qui illustreront sans doute

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mieux notre propos.

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3 entrées en bourse digitales qui ont fait du bruit, bilan et perspectives
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Entre 2011 et 2014, trois sociétés américaines âgées d’à peine une dizaine d’années sont
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introduites en bourse avec éclat. Twitter, Facebook et LinkedIn sont trois plateformes
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prometteuses, trois réseaux sociaux qui revendiquent des centaines de millions


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d’utilisateurs, des modèles économiques assez proches et basés sur la publicité, et


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cherchent à convaincre les investisseurs de l’opportunité qu’elles représentent.


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Début 2016, que représenteraient une mise de 100$ le jour de leur IPO ? Pour
l’actionnaire de Twitter, le réveil serait douloureux : le cours de bourse de la plateforme de
microblogging a été divisé par trois entre novembre 2013 et mai 2016. De son côté,
l’actionnaire Facebook serait tout sourire : le cours de l’action Facebook est passé de 38$
à plus de 120$. L’actionnaire LinkedIn ne serait pas plus mal loti, son action étant passé
de 90$ à plus de 190$. Trois entreprises assez proches aux yeux du grand public, mais
trois modèles économiques très différents : être digital n’est pas synonyme de succès
boursiers.
Forbes a jeté fin 2015 un regard croisé sur les capitalisations boursières de ces 3 sociétés du digital (http://bit.ly/2jIPtaK)
Rester à distance raisonnable de tout sujet digital n’est pas moins risqué cependant. Il
suffit de voir ce qui est arrivé au secteur de la vente à distance ces vingt dernières années
pour comprendre comment tout un secteur peut sombrer du fait de postures réfractaires à
toute évolution sans aller jusqu’à la remise en cause du modèle économique.
L’évolution du secteur de la musique est, à cet égard, tout aussi intéressante. Longtemps,
les principaux acteurs de cet univers – producteurs et distributeurs – se sont contentés de
lutter contre la copie et le téléchargement illégal, au lieu de s’intéresser au développement
de l’offre légale : pourtant, la demande était là, le succès foudroyant d’iTunes l’a
parfaitement illustré. En évitant de se poser les bonnes questions sur l’offre de musique
digitale, les acteurs historiques ont laissé la porte grande ouverte à Apple, qui n’a eu qu’à
se lancer pour prendre une situation dominatrice en quelques années.
Mais comme dans le digital les changements vont très vite, Apple lui-même peut à tout
moment voir sa suprématie remise en question par le développement d’offres légales de
musique en streaming : la réaction de la firme de Cupertino ne s’est pas faite attendre, et
Apple dispose, tout comme Google d’ailleurs, d’une offre de streaming tout aussi
intéressante que celles des pionniers du domaine, Deezer ou Spotify.

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L’absence de stratégie digitale peut coûter cher. Les actionnaires, petits porteurs ou
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fonds d’investissement, doivent impérativement en tenir compte.
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Remettre l’individu au cœur du digital
Michaël Tartar est vice-président de ROK Solution. Au cours de sa carrière, il a conduit de
nombreuses missions de conseil dans le cadre de projets de transformation digitale,
notamment chez Bearing Point. Avec David Fayon, il est le co-auteur du livre
Transformation digitale : 5 leviers pour l’entreprise202 (http://qr.net/transdig).
Le management de l’entreprise décide de lancer un vaste programme de transformation
digitale. Les objectifs ont été définis en amont, des chantiers cadrés, une équipe pilote le
programme. Sur le principe, tout est en place pour réussir. Très vite, les premières
résistances apparaissent. D’abord moquées, elles font plus tard place à un constat plus
amer : le programme ne tient pas ses promesses. L’équipe qui pilote la transformation
trafique le tableau de bord de pilotage du programme. Dans un premier temps le
management se convainc que le programme avance bien. Trop éloigné du terrain, de la
réalité quotidienne des collaborateurs, la vision simplifiée du tableau de bord le rend
aveugle, au mieux mal voyant.
Un détail a cependant été ignoré en amont lors du cadrage du programme : les
collaborateurs, les sous-traitants, les intervenants multiples qui contribuent chaque jour à

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la création de valeur de l’entreprise. Chacun de ces individus soumis à des injonctions
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contradictoires, à qui l’on demande de traiter toujours plus d’information, d’en créer
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toujours plus, voit son quotidien se transformer en véritable cauchemar. Pourtant, une
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autre approche est possible.


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Prenons des exemples simples pour illustrer le propos. Imaginons une entreprise
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disposant de plusieurs centaines de sites opérationnels répartis sur tout le territoire


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national. Les responsables de ces sites sont des hommes et des femmes dont le
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quotidien est rythmé par les opérations à traiter, les problèmes à gérer, le personnel à
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encadrer. Ils sont amenés à faire travailler des fournisseurs, nombreux, locaux. La
direction des achats souhaite appliquer une nouvelle politique vis-à-vis de ces
fournisseurs, mettre en place un centre de services partagés chargé de gérer le
référentiel de fournisseurs pour toute l’entreprise, créer en central un nouveau métier à la
direction des achats pour contrôler toute demande de création de fournisseur. Un vaste
projet conduisant à la mise en œuvre d’une plateforme digitale est lancé. Plusieurs
centaines de personnes sont concernées par ce projet. Les nouveautés à assimiler dans
un temps limité sont nombreuses. Mettre l’individu au cœur de la réflexion, c’est prendre
en compte les particularités de chacun. En amont de la chaîne, un opérationnel se verra
demander de fournir le numéro SIRET du fournisseur. Pour le contrôle, l’outil présentera
automatiquement toutes les données fiables issues d’une source extérieure à l’entreprise,
sans que les approbateurs n’aient d’effort à fournir pour les récupérer.
Au cœur du dispositif, les gestionnaires du référentiel disposeront de toutes les
informations et tous les documents nécessaires pour alimenter l’outil comptable. Les aller-
retours entre les intervenants se réduiront à un clic. Les approbateurs amenés à travailler
sur plusieurs sites pourront valider les demandes avec leur mobile pendant leur temps de
transport. Les responsables achat pourront piloter en temps réel les demandes au moyen
d’un tableau de bord disponible à tout moment et à jour. Les communications entre les
intervenants seront facilitées sans qu’il soit nécessaire de sortir de l’outil. L’administrateur
de l’outil pourra à tout moment réaliser des adaptations prenant en compte des
changements d’organisation. Les nouveaux intervenants trouveront immédiatement toute
l’information pédagogique nécessaire à une prise en main rapide. Cet exemple illustre
comment mettre l’individu au cœur du projet. En se focalisant sur l’expérience utilisateur
de chacun, et non uniquement sur les attentes du management. Ainsi chaque intervenant
prend conscience de la valeur apportée par la solution mise en œuvre. Un véritable
facilitateur de leur quotidien entrainant une adoption rapide d’une solution qui les aide dans
leur travail.
Prenons un autre exemple. Cette fois-ci, nous allons nous préoccuper des agents d’une
direction de la relation client, chargés de suivre les opérations de déploiement d’un
service. Les opérations sont multiples, certaines sont réalisées par des collègues des
chargés de clientèle, d’autres sont réalisées par des collaborateurs d’entreprises
partenaires. Chaque dossier suppose ainsi la coordination d’une multitude d’intervenants,
s’occupant chacun d’une partie de la chaîne de valeur. Un chargé de clientèle se retrouve

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ainsi au carrefour d’une multitude d’échanges, brasse des centaines de données pour

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chaque dossier, communiquées au travers d’une dizaine d’outils aux interfaces plus ou
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moins conviviales. Le directeur commercial envisage d’accélérer le déploiement, et déjà
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l’angoisse est perceptible chez les chargés de clientèle. Ils se projettent dans un quotidien
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de plus en plus stressant. Devant leurs yeux défileront toujours plus de données à copier-
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coller dans toujours plus d’écrans toujours aussi moches, si différents des applications
conviviales qu’ils utilisent à titre personnel. Le directeur de la relation client construit des
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tableaux de bord pour suivre les opérations, demandant un reporting de plus en plus
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fréquent aux responsables d’équipes.


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Mettre l’individu au cœur du projet, c’est être attentif à cette angoisse qui s’exprime de
manière sourde avant même que le projet ne soit lancé. Chasser les copier-coller sources
d’erreurs et donc de stress pour tous les intervenants, c’est utiliser les solutions
technologiques permettant d’interfacer les applicatifs. Construire une solution en ayant en
tête d’alimenter les indicateurs de pilotage opérationnel, c’est réfléchir à ce qu’il est
important de suivre, dès le début des travaux. Ainsi pensée, la solution facilite le travail au
quotidien de chaque intervenant. Les chargés de clientèle ouvrent leur ordinateur chaque
matin en sachant qu’ils seront guidés. Ils reviennent de vacances avec le sourire, sachant
que la solution a été pensée pour eux et qu’elle leur fera gagner un temps précieux. Le
directeur de la relation client est apaisé car il dispose en temps réel d’une vue sur les
opérations, sans avoir besoin de demander à ses responsables d’alimenter des reporting
parfois faux. Il sait aussi que la montée en puissance de son équipe sera facilitée par une
prise de poste rapide, guidée, dont la documentation est disponible en quelques clics, une
documentation totalement cohérente avec les outils en place. Enfin le directeur
commercial est rassuré sur l’exécution de son plan de déploiement. Chaque individu se
voit ainsi servi par un dispositif tenant compte de ses préoccupations quotidiennes, en
supprimant les étapes laborieuses qui accompagnent bien souvent le digital. Ce faisant,
une solution ainsi pensée pour chaque individu contribue au bien-être de l’entreprise, à sa
fluidité, promesse du digital.
Prenons enfin un dernier exemple. Cette fois-ci rendons-nous dans une agence bancaire.
Les agents au comptoir reçoivent des clients de plus en plus rarement, de plus en plus
informés, de plus en plus précis dans leurs demandes nécessitant un niveau d’expertise
toujours plus élevé dans la mesure où les clients multi-bancarisés sont désormais
totalement autonomes pour bien des opérations bancaires courantes, et se rendent en
agence pour des opérations qu’ils ne peuvent réaliser seuls. Les agents sont ainsi soumis
à un stress d’autant plus important que le temps que leur accordent les clients pressés
pour répondre à leurs questions est toujours plus réduit. La contraction du temps
augmente le risque d’erreur. Dans une industrie soumise à une règlementation stricte,
cette contraction du temps s’accompagne d’une obligation de mise à jour des
connaissances de chacun, pour que les opérations soient réalisées dans le strict respect
de la règlementation, au risque pour la banque de se voir infliger de lourdes pénalités par
les régulateurs. Pour assurer que les dernières règlementations sont bien connues des
agents, il peut être séduisant de mettre en place un Intranet doté d’un moteur de

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recherche permettant de rechercher les descriptions d’opérations à mener.

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Cependant, cette approche se heurte aux capacités des moteurs de recherche, bien
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incapables de prendre en compte le contexte de la recherche et surtout le rôle de
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l’individu qui la mène. Mettre l’individu au cœur du dispositif, c’est lui offrir un accès
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personnalisé au référentiel de procédures, tenant compte de son rôle. Un référentiel


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construit pour permettre à l’agent de naviguer dans un plan de classement clair. Un


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référentiel offrant en quelques clics les descriptions, mais aussi les documents
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nécessaires à l’exécution des opérations. Un référentiel permettant de responsabiliser les


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individus chargés de mettre à jour le contenu et ceux chargés de valider que ce contenu
respecte la règlementation. Ainsi, la communauté des intervenants, qu’ils soient lecteurs
ou rédacteurs, se retrouve cadrée et animée de manière cohérente. Les risques d’erreurs
diminuent. Les connaissances à jour nécessaires sont immédiatement accessibles. Les
agents au contact des clients sont plus efficaces, sans effort. Leur niveau de stress
diminue, ce qui contribue là encore au bien-être dans l’entreprise.
Ainsi, mettre l’individu au cœur du digital, c’est réconcilier les hommes et les données.
C’est servir les collaborateurs au lieu de les asservir sous un flot d’informations. C’est
passer d’une logique d’apprentissage par la contrainte à celle du plaisir de traiter les
problèmes courant rapidement. Une approche résolument au service de l’entreprise
digitale, fluide et agile.
Cf. Frédéric Laloux, ouvrage cité.
Cf. http://ciret-transdisciplinarity.org/bulletin/b12c1.php
Introduction à la pensée complexe, Edgar Morin, Le Seuil, 1990, bien plus abordable que son œuvre majeure et plus
difficile, La Méthode
Voir à ce sujet cet article du Monde d’avril 2016 http://www.lemonde.fr/idees/article/2016/04/15/rapprochements-entre-
grands-groupes-et-start-up-peu-de-vrais-succes-dans-la-duree_4902886_3232.html il est difficile de faire prendre la
greffe, pour reprendre les termes du journal.
Cf. le cas de NextDoor, exposé dans la deuxième partie, page 118.
Cf. http://www.buschini.com/crossing-the-chasm-de-geoffrey-a-moore/
La communication digitale expliquée à mon boss, op. cité.
Cf. http://bit.ly/observatoire-numerique-2015
La communication digitale expliquée à mon boss, op. cité.
Les médias sociaux expliqués à mon boss, op. cité.
Voir l’excellent billet de Frédéric Gonzalo, notre confrère canadien http://bit.ly/2jiBR94
Pour ne pas dire « fans » ou « followers »
Voir cette analyse http://bit.ly/2jj2XgD des taux d’interaction (nommés « engagement » dans le jargon des médias sociaux)
sur les pages Facebook les plus populaires. Ceux-ci sont tous proches de 0, y compris sur la page de Facebook. Comme
quoi il n’y a pas de traitement de faveur. À noter cependant que les chiffres absolus de ces pages populaires restent
impressionnants en termes d’interactions quotidiennes. Les marques ne sont pas toutes aussi chanceuses. Mieux vaut
se reconvertir dans la chanson apparemment. À noter enfin que Twitter, depuis la mise en œuvre de son algorithme a
réussi à faire pire que Facebook. Voici ici les chiffres 2016 en B2B aux USA http://bit.ly/2jiZKgH.
Cf. danger : la fragmentation des marques face au multimedia, le livre d’Arabella Ignatieff aux éditions Kawa
https://www.editions-kawa.com/home/180-danger-la-fragmentation-des-marques-face-au-multimedia.html
Cf. les relations presse à l’heure du digital - des influenceurs aux ambassadeurs… aux éditions Kawa
https://www.editions-kawa.com/home/179-les-relations-presse-a-lheure-du-digital-des-influenceurs-aux-
ambassadeurs.html
Source : https://www.statista.com/statistics/276623/number-of-apps-available-in-leading-app-stores/
Cf. la crise Findus, traitée dans La communication digitale expliquée à mon boss, op. cité.
Promise Consulting, auteurs du Marketing de la Grenouille, Editions Kawa, 2016
Akerlof George A. (1970). “The Market for ‘Lemons’ : Quality Uncertainty and the Market Mechanism”. The Quarterly
Journal of Economics, 84 (3), p. 488-500. Août.

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Pekovic Sanja, Sylvie Rolland (2012). « L’impact de l’orientation client sur la performance des entreprises françaises :

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étude empirique des effets directs et modérateurs ». Recherche et Application en Marketing, 27 (4), p. 11-38. Décembre.
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Bonchek Mark, Cara France (2014). « Marketing Can No Longer Rely on the Funnel ». Harvard Business review, 07 Ma
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2014i.
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Court David, Dave Elzinga, Susan Mulder, and Ole Jørgen Vetvik. « The Consumer Decision Journey ».
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McKinsey&Company.
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Éditions Kawa, 2015


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What science tells us about leadership potential, Harvard Business Review, septembre 2016 https://hbr.org/2016/09/what-
science-tells-us-about-leadership-potential
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Cf. Le social selling expliqué à mon boss, Sylvie Lachkar et Hervé Kabla, 2015, Éditions Kawa
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Éditions du Tambourinaire, 1962.


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S’occuper du client, quelle déchéance. Le métier de commercial est sans cesse en déficit de candidats en France, et
sans discontinuer depuis notre sortie de classes (et peut-être avant). Les amoureux de la vente, et ceux qui croient,
comme nous, que sans client l’entreprise n’est rien, sont invités à découvrir ou redécouvrir les articles de Yann
Gourvennec sur le blog de son client Sparklane : http://www.sparklane-group.com/fr/blog/ (http://bit.ly/2jikQMB pour un lien
direct).
La connectivité 2G, la norme General Packet Radio Service : http://www.commentcamarche.net/contents/1121-le-
standard-gprs
Pour un panel complet des spécifications : http://bit.ly/2jizFPD
Allez ! Nous vous l’accordons, il y eut encore une (timide) itération en 2008 https://en.wikipedia.org/wiki/Palm_Treo
Pour découvrir cet acteur moins connu : http://www.navigon.com
Le terme de « bot » est à l’origine une contraction du mot « robot », popularisée dans les pays anglo-saxons dans les
années 60. Elle provient des ouvrages, nombreux à cette époque, de science-fiction. Dans le langage de l’Internet, un «
bot » informatique désigne un logiciel autonome automatique ou semi-automatique (un « agent logiciel » dans le langage
informatique) qui interagit avec des serveurs.
Le terme e-learning date de 1999 pour être précis. Mais le mariage de la technologie et des sciences de l’éducation ne
date pas d’hier. Yann a développé pour sa part des programmes de CBT (Computer Based Training) dès la fin des année
80 et surtout à partir de 1990 avec l’arrivée de logiciels dédiés sur ce marché. Ces logiciels étaient à l’origine réservés à
l’apprentissage de l’usage des systèmes d’information et des langages informatiques.
Pour le communiqué de presse sur le rachat de Lynda par LinkedIn : https://www.lynda.com/press/pressrelease ?
id=4563
Citons notamment la société française OpenClassrooms https://openclassrooms.com/about-us
Terme intraduisible, le « geek » est avant tout une personne « intelligente ni sociale ni populaire ».
Du produit vers le service, Éric Hanoune, Philippe Very, De Boeck 2011, http://livre.fnac.com/a3388637/Philippe-Very-Du-
produit-vers-le-service
Pour de plus amples informations sur ce sujet, se référer au marronnier du blog de Visionary Marketing Les digital natives
n’existent pas : http://bit.ly/2jIQWh5
D’une certaine manière, on pourrait dire que Donald Trump a bien compris le fonctionnement de Twitter, qu’il utilise pour
contourner les médias établis, souvent hostiles à son égard. Cela prouve en effet qu’il a compris la puissance de l’outil en
tant nouveau média. En même temps, son usage intensif de l’outil provoque l’ire des utilisateurs qui le bloquent ou le
cachent et d’autre part, freine les investissements publicitaires de la part des marques qui ne veulent pas être associées
à ses messages enflammés et souvent racistes et outranciers. En parallèle de son usage intensif de l’outil, il le dénigre
régulièrement. Pour une analyse fine et perçante de Trump et Twitter, voir le site du Washington Post sorti en février 2017
: The Fix (http://wapo.st/2kXdeAX)
Editions Pearson, octobre 2014 (http://qr.net/transdig).

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Mythes et réalités du digital
Dans son Invitation à la philosophie des sciences203, l’écrivain Bruno Jarrosson rappelle
que l’un des paradoxes de l’approche scientifique, c’est que la science progresse par
remise en cause des savoirs acquis par la génération précédente. « Plus j’apprends, et
plus je sais que je ne sais pas grand-chose », pourrait être le leitmotiv de toute approche
scientifique.
Il en est de même avec le digital. Chaque évolution, chaque révolution devrait-on dire,
vient balayer ce qu’on croyait fermement établi quelques années plus tôt. Les temps de
cycle se raccourcissent, l’expertise ne dure que quelques années, le gourou d’hier est
rapidement dépassé. Contrairement au vin, le digital vieillit plutôt mal : il faut sans cesse le
remplacer.
Cette caractéristique essentielle s’accompagne pourtant de la perdurance de mythes
autour de certains usages, ou de certaines pratiques, qu’il nous semble impératif
d’évoquer dans cette quatrième partie. Ne serait-ce que pour s’en prémunir.
Invitation à la philosophie des sciences de Bruno Jarrosson, éditions du Seuil, http://bit.ly/2jzZJmx

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Mythes et réalités de l’ubérisation
« FNAC et Darty fusionnent pour résister aux e-commerçants204 » la nouvelle est tombée
fin 2015. Elle avait l’air innocent, cette nouvelle et pourtant. Au-delà des jugements à
l’emporte-pièce qu’on entend répéter à l’envi sur l’ubérisation, un phénomène de fond,
beaucoup plus profond, est en passe de se produire. Et ce n’est pas forcément ce qu’on
croit. Cette nouvelle, quoiqu’il en soit, à la fois impressionnante et banale, de cette
résistance organisée aux « e-commerçants » était-elle symbolique d’un monde qui change
?
D’ailleurs, quand on parle de résistance aux e-commerçants, devrait-on dire à Amazon,
qui venait d’ouvrir son magasin à Seattle et qui s’apprête à croquer le commerce «
phygital » tous azimuts en ouvrant des magasins révolutionnaires nommés Amazon Go205
? Pourtant, cet e-commerce triomphant que d’aucuns ont refusé de prendre au sérieux à
ses débuts, nous le voyons arriver depuis longtemps, très longtemps. Zoom sur ce
bouleversement qui nous attend tous, cette révolution des métiers probablement pas 100
% digitale, mais où le digital va jouer un rôle de plus en plus évident.

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Ubérisation : arrêt sur image

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L’image est dans toutes les mémoires. Elle fut même projetée par David Shing le 5
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novembre 2015 au SAS Forum qui s’est tenu au palais des congrès : « vous y allez les
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gars ! » S’est exclamé le « prophète (sic) digital » australien d’AOL. « J’aime bien ça ! » :
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il a dit cela car il est atypique, mais les critiques contre la France, dont la violence de rue
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n’est plus à démontrer, ont fusé. Ceci, même si les luttes ont eu lieu, parfois aussi
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violemment, dans tous les coins du monde. Et le truculent et excellent Maurice Lévy d’en
profiter pour parler d’une « ubérisation206 » du monde. Que faut-il en penser ?
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Le prophète (sic !) digital d’AOL, David Shing, : en vidéo chez Visionary Marketing à l’adresse http://bit.ly/2jJ6JMS

Le spectre de l’ubérisation a fait peur à tout le monde mais la peur n’évitera pas le
danger
La peur n’évite pas le danger : article de la Tribune en 2014, avec le futur retraité Maurice Lévy. Il va nous manquer.
Ceci nous rappelle les débuts du Web, où les évangélistes décrivaient les nouveaux
acteurs de l’Internet naissant comme les « hordes barbares » qui, tels Attila,
supprimeraient tout sur leur passage. En 1996, on ne donnait pas cher de la peau du
commerce physique ni des rues commerçantes, et encore moins des banques que Bill
Gates traitait de « dinosaures207 ». Vingt ans plus tard, les choses n’en sont plus là, et
beaucoup de changements ont eu lieu.
Nous ne sommes pas favorables aux exagérations, et nous ne nous sentons pas non plus

i m
très enthousiasmés par ce terme d’ubérisation. Pourtant, il n’est pas (complètement) faux,
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même s’il est ultra simplificateur. Mais au-delà de cela, c’est surtout qu’il y a toujours la
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même idée, archaïque et bien ancrée dans les têtes, que l’économie est un jeu à somme
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nulle.
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Or la réalité est bien plus complexe, et bien éloignée de la simplicité de ce jeu gagnant /
perdant. Notre côté optimisme tend plutôt à nous intéresser à un jeu gagnant-gagnant où
ceux qui perdraient (conditionnel de mise) leur job, pourraient très bien en profiter pour se
former, apprendre, évoluer, changer de spécialité, voire même créer, inventer,
entreprendre. Ces bouleversements sérieux qui sont en cours et que l’on ne peut pas
forcément ramener à une société de taxi, ne vont cependant pas simplifier les choses
pour les moins qualifiés d’entre nous.
L’ubérisation, énième symptôme d’une discussion de sourds
C’est que cette ubérisation est le symptôme d’une discussion de sourds qui perdure
depuis 20 ans. D’une part les technologues, qui se laissent emporter par leur fougue, et
qui pensent que la peur est un argument de vente. Souvent, les prédictions hâtives et
exagérées (celles qui ne tiennent compte ni du temps long de l’économie, ni des
corrections régulières de la bourse) des apôtres de la « disruption », souvent démentis
par les faits comme l’a démontré Joanne Jacobs dans le chapitre qui suit et intitulé «
mythes et réalités de l’innovation digitale de rupture », subissent la correction dès qu’une
bulle a un peu trop grossi.
Alors l’exagération se retourne contre eux. Nous avons déjà vécu cela une ou deux fois, et
il ne manque pas de spéculations, y compris parmi les professionnels du digital, sur
l’éclatement de la future bulle208.
De l’autre côté, les goguenards qui ricanent en écoutant les technologues sus-cités, et qui
savent pourtant que les faits sont têtus tant ils voient bien le monde qui change - quand
même - mais qui préfèrent que le monde les change plutôt que de changer le monde.
C’est moins risqué, du moins à court terme, et comme nous le faisait remarquer le DG
d’une grande institution : « que voulez-vous qu’ils se risquent à changer quelque chose ?
Ils ont bien compris mais ils sont près de la retraite. Ils n’ont pas envie de reclasser
massivement des personnels pour ensuite se prendre un coup de fil de Bercy ».
La vérité de la transformation digitale est ailleurs
En témoignent de nombreux travaux déjà menés sur des secteurs divers et qui parsèment

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ce chapitre, on retrouve à chaque fois les mêmes ingrédients :

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Réglementation/déréglementation, organisation du travail, aspirations contradictoires des
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populations et des marchés et enfin, cerise sur le gâteau, spécialisation des nations sur
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leurs points forts économiques (à l’image du concept des avantages comparatifs,


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développé par Ricardo209). Tels sont quelques-uns des points les plus fréquemment
d
de

rencontrés sur la scène économique actuelle. Et le « digital » (car celui-ci reste difficile à
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délimiter précisément) dans tout cela ?


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Le terme de transformation digitale est probablement impropre, on devrait parler de


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transformation avec le digital, ce digital qui n’est pas la cause unique de ces ruptures mais
qui en est indéniablement l’accélérateur et le catalyseur. Les philosophes, à l’instar de
Bernard Stiegler210, parlent de Pharmakon, ce remède qui est aussi un poison.
Qu’on nous permette de nous focaliser sur le remède et de mettre d’accord technologues
et techno-sceptiques. Il est possible d’inventer les jobs de demain, il ne tient qu’à nous de
le faire.
Témoignage - Vivons-nous dans une bulle d’innovation ?
Quel regard doit-on porter sur les stratégies de rupture ? C’est en filigrane la question
que pose Joanne Jacobs, conférencière, spécialiste du digital, basée à Sydney.
En examinant de près la littérature publiée sur les stratégies de rupture (appelée parfois
par le néologisme de « disruption » en français), on remarque un certain nombre
d’exagérations qui méritent d’être soulignées. Sur la constitution de l’innovation de
rupture211, son impact présumé sur les entreprises et leurs employés212, et enfin ce qui
peut être fait pour rendre cette innovation productive213.
Ce bruit ambiant pourrait faire croire aux observateurs qu’ils se trouveraient dans une
bulle d’innovation214, et que les attentes qu’ils ont envers cette innovation de rupture sont
démesurées par rapport à ce qu’elle peut leur apporter. En conséquence, on pourrait
croire qu’à un moment donné, cet appétit pour l’innovation de rupture pourrait disparaître.
La stratégie de rupture n’est pas une mode.
En vérité, la « disruption » des modèles économiques, n’est pas réductible à une mode.
Ce n’est ni un « buzzword » pour faire bien dans les réunions, ni un truc de communicant.

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La « disruption » découle au contraire de la convergence de trois facteurs concomitants
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qui sont les technologies émergentes, le changement du besoin client et enfin la
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disponibilité des ressources. Ensemble, ces facteurs rendent possible l’émergence d’un
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nouveau produit, ou d’un point de bascule qui va faire évoluer votre modèle économique.
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Nous avons observé ce phénomène de nouveaux entrants sur des marchés pourtant
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stables et même saturés. Airbnb est maintenant à la troisième place215 en termes de


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capitalisation boursière des entreprises du secteur hôtelier. Uber est également le service
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de transport de passagers qui connaît la plus grande croissance dans le monde et


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probablement même la plus importante jamais enregistrée216.


Il existe tout une gamme d’entreprises ayant apporté la rupture217, depuis Dropbox et
SurveyMonkey, au discret Palantir Technologies218 et l’audacieux SpaceX. Ces acteurs
redéfinissent les entreprises pour ce qui est de leur communication, leur R&D et leur
développement produit. Ils suscitent beaucoup d’intérêt et attirent les fonds
d’investissement. Tous ces nouveaux entrants ont crû dans un temps record, simplement
parce que les outils, les ressources et le besoin de changement sont arrivés au même
moment.
Et pourtant, nous n’avons encore vu que le début de ce qui est possible en matière de «
disruption ». Au fur et à mesure que la collecte des données deviendra plus sophistiquée,
en partie du fait de notre addiction croissante au mobile, que l’intelligence artificielle
progressera et que l’on observera de brusques changements en matière de
consommation et de consommation de contenus, de nouvelles ressources et de nouvelles
technologies se feront jour pour challenger la manière dont les entreprises traditionnelles
fonctionnent. Au gré du durcissement des environnements réglementaires qui gouvernent
notre accession au contenu et aux services, et particulièrement là où la réglementation
s’applique à protéger les acteurs en place, des industries de rupture naîtront qui viendront
renverser le statu quo.
Nous avons vu cela arriver dans le domaine des VPN (assurément entouré d’un vide
juridique), afin de surmonter en certains point la censure des contenus dans certains pays
et la montée des services de transports internationaux tels ComGateway, partout où il y
avait un besoin de contourner les interdictions de livraisons depuis certains pays219. La «
disruption » est faite d’opportunisme et les opportunités continuent d’abonder.
Il se pourrait bien que nous vivions dans une bulle d’exagération sur la « disruption ». Mais
ne la confondons pas avec une bulle de la « disruption ». Ces pratiques profondément en
rupture sont un moyen d’établir un avantage concurrentiel et en réalité, un bénéfice à long
terme.
Faisons bien attention à ne pas avaler tout cru la littérature sur les nouveaux entrants
lorsque nous évaluons de nouveaux marchés. En même temps, restons conscients que le
protectionnisme n’existe plus. La rupture apparaît parce qu’une opportunité de
changement se fait jour. Accueillons-la avec bienveillance.

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Le digital, c’est pour les digital natives
C’est un des mythes les plus fortement répandus et contre lequel nous nous érigeons
depuis quelques années déjà, tant il produit de ravages dans les esprits de celles et ceux
qui y croient : non, le digital n’est pas affaire de digital natives ! Au contraire, il nous
semble éminemment important de rétablir la vérité : le digital concerne toutes les couches
de la population, toutes les tranches d’âge, et bien plus fortement les tranches les plus
âgées qu’on ne pourrait le croire.
Il y a plusieurs raisons qui nous poussent à formuler ce jugement. La première, c’est que
si on s’en tient aux données statistiques, communiquées aussi bien par les principales
plateformes technologiques - les GAFAM – que par les instituts d’étude ou les
administrations, on observe le même phénomène : le digital concerne une fraction
significative de la population à l’échelle de la planète : un être humain sur deux possède un
smartphone (et certains en possèdent même plusieurs), un être humain sur deux à peu
près se connecte à l’Internet quotidiennement, et un sur trois à un réseau social au moins
une fois par jour. Les durées de connexion, les plateformes utilisées varient bien entendu,
selon qu’on s’intéresse à telle ou telle frange de la population, mais les données le disent

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clairement : le digital ne concerne pas uniquement les jeunes.

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La seconde raison que nous avançons, c’est qu’il est impossible de se passer de digital
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quel que soit l’âge, du fait que des pans entiers de l’industrie ont basculé dans l’ère
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digitale. Prenez par exemple la télévision. Alors qu’il y a vingt ans à peine les foyers
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étaient connectés par une antenne hertzienne devenue numérique, près de 50 % des
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foyers accèdent désormais aux programmes télévisés via une box internet220. Le passage
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d’un mode de réception à l’autre n’est pas si transparent que cela, car la configuration
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d’une box internet est bien plus complexe que de brancher un câble et de lancer la
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détection automatique de chaînes. La télévision par ADSL s’accompagne souvent de la


mise au rebut d’appareils autrefois indispensables, comme les lecteurs VHS ou DVD, tout
en permettant d’accéder à des offres plus riches et plus élaborées, de programmes en
replay ou de vidéo à la demande. Tous, petits et grands, sont concernés par cette
transmutation.
La troisième raison que nous évoquons, est d’ordre culturel. Nous sommes de fervents
défenseurs de la théorie, selon laquelle la difficulté d’accès au numérique n’est pas affaire
d’âge, mais affaire de culture ou d’appétences personnelles. Il existe des jeunes qui ne
sont pas à l’aise avec le digital, tout comme il existe des seniors qui sont de véritables
champions du numérique. L’âge n’y fait rien, c’est beaucoup plus l’intérêt personnel et la
volonté d’y consacrer du temps qui conduisent à une plus grande familiarité avec les
concepts digitaux.
La quatrième raison, c’est que nous sommes convaincus que d’un point de vue
professionnel, l’expérience est un facteur de succès des offres digitales. Certes,
l’expérience peut conduire certains à figer leur pensée et à refuser toute évolution et tout
changement. Mais comme le dit Hugo221, « …on voit de la flamme aux yeux des jeunes
gens, mais dans l’œil du vieillard on voit de la lumière ». La connaissance accumulée par
un professionnel permet d’éviter aux plus jeunes de tomber dans les mêmes pièges ou de
répéter les mêmes erreurs. Et si les profils les plus expérimentés perdent en agilité, ils
conservent un atout essentiel : le réseau accumulé au fil des ans. En matière de digital,
cela peut aussi servir.
Malgré cela, certains pensent encore, à tort, que digital signifie nécessairement
génération Y ou Z. C’est une grave erreur, qui peut conduire à des choix de recrutement
ou de management inefficaces, ou à l’inverse, conduire des chefs d’entreprise à se
désintéresser de la chose, au risque de maintenir des préjugés qui constituent autant de
freins à la transformation digitale (cf. le chapitre consacré aux boss et au digital dans la
3e partie).
Alors que faut-il faire ? Confier la transformation digitale au jeune MBA sorti d’école ? Ou
plutôt au manager aguerri par plus de vingt années passées au service de son entreprise
? La solution consisterait-elle à former des binômes, ou des équipes mixtes, où les plus
jeunes viennent apporter aux plus expérimentés une vision différente des mêmes
problèmes, et des solutions plus adaptées à leur époque. C’est la solution choisie par
Sébastien Bazin, PDG du groupe Accor, qui a doté l’entreprise qu’il dirige d’un « shadow

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comex »222, constitué de salariés de moins de 35 ans, et appelé à traiter des mêmes

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sujets que le véritable Comex avec deux semaines d’avance, de manière à proposer au
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PDG des solutions différentes que celles que lui fourniront les autres cadres du groupe.
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Verrons-nous de telles approches se généraliser ?


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Digital Me Up - En matière d’écran aussi, la taille compte !
Par Ana Pia Hopf-Valenzuela
https://goo.gl/RFoaJY

Alors que j’effectuais des recherches sur les usages mobiles et l’évolution du e-
commerce, je suis tombée sur un article intéressant223, qui suggérait que les internautes
préfèrent acheter en ligne sur une tablette ou un ordinateur, que sur leur téléphone. La
taille de l’écran aurait-elle une incidence sur les habitudes d’achats en ligne ? C’est
l’hypothèse que je vous propose de discuter ensemble.
Commençons par analyser le temps passé sur les téléphones portables, pour mieux
comprendre comment les utilisateurs se comportent sur leur smartphone. Selon une étude

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comScore224, le nombre de mobinautes a dépassé en 2014 celui des internautes, et il
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continuera à croître encore quelques années, alors que la durée de navigation sur un
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smartphone ne cesse de progresser, pour représenter 30 % du temps d’usage d’un écran
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aux US en 2015, une valeur probablement sous-estimée.


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Les marketeurs confirment cette tendance, et les investissements sur les mobiles ne
de

cessent de croître rapidement dans différents secteurs, tout comme les investissements
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média. Et bien que le mobile soit le compagnon de tous les instants d’une multitude de
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jeunes adultes, il semblerait que les ordinateurs fixes ou portables restent le support
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préféré pour procéder à des recherches en ligne plus élaborées, ou à des achats en
ligne.
Il faut aussi prendre en compte un facteur important, qui pourrait affecter les taux de
conversion : les mobinautes passent près de 80 % de leur temps sur leur mobile à
consulter des applications bien spécifiques, principalement celles des réseaux sociaux ou
des applications de messagerie instantanée, au détriment du temps passé à surfer.
Le taux de conversion sur mobile resterait donc autour de 5 %, alors qu’il atteint 9 % sur
les ordinateurs et tablettes, ce qui tendrait à conforter cette hypothèse de préférence
pour les écrans plus larges. Mais pourquoi sommes-nous plus à l’aise quand nous
achetons depuis un ordinateur ?
Selon l’article cité plus haut, la taille de l’écran a une incidence sur les intentions d’achat,
parce que les internautes se sentent plus immergés quand ils utilisent des écrans larges,
ce qui accroit leur sentiment de confiance et les rassure au moment de procéder à un
achat impulsif. Faites votre propre introspection, et vous réaliserez que l’expérience sur
mobile n’est pas du tout la même que sur un écran plus large. Mais je n’avais aucune idée
de l’impact que cela pouvait avoir.
On comprend mieux, ainsi, la course à la taille de l’écran que se livrent les fabricants de
smartphone. Selon l’étude citée dans l’article, les chercheurs ont pu détecter une
différence de comportement entre les utilisateurs d’écrans de 3,7’’ ou de 5,3’’. Imaginez
l’incidence que cela peut avoir, par exemple, dans le cadre d’application de réalité virtuelle
!
Personnellement, je suis impatiente de découvrir les nouvelles technologies qui seront
développées et les expériences marketing que les marques en tireront pour le bénéfice de
leurs clients. Mais ce qui est certain, c’est qu’il faut dès à présent prendre en compte les
informations précédentes, et créer des publicités plus engageantes et plus pertinentes sur
les mobiles si l’on veut augmenter les taux de conversion, et en particulier sur les
appareils dotés d’écrans de petite taille.

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Le digital va booster mes ventes
La nature humaine a horreur du changement. Entendons-nous bien : tout le monde est
prêt à changer de voiture pour un véhicule plus luxueux, de job pour un salaire plus
attractif, ou de lieu de travail pour bénéficier d’un plus grand confort de vie. Mais toutes
choses égales par ailleurs, l’individu moyen a horreur qu’on lui change un iota de sa
routine. Un ingrédient inconnu dans une recette, un nouveau chef, un trajet inhabituel,
toutes ces choses sont vécues comme des générateurs de stress inutiles. On préfère le
cocon du train-train quotidien.
Malheureusement, il n’y rien de plus dangereux que de se satisfaire de ce cocon-là. Le
confort, la routine, nous privent de ce « système 2 » dont Daniel Kahneman vante les
mérites225. Le système 1, c’est cette partie de notre cerveau qui nous permet de réfléchir
de manière mécanique, rapide et efficace dans les cas les plus fréquents, comme se
saisir d’un verre ou presser un interrupteur. Mais quand il s’agit de prendre une décision
dans un environnement risqué, c’est le système 2 qu’il faut privilégier : plus lent, il prend
en compte la diversité d’une situation, nous fait mesurer avantages et inconvénients, de
manière à ne pas nuire à nos intérêts. Seulement voilà, le système 2 nous coûte cher en

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temps, en énergie, en stress. Nous le fuyons la plupart du temps. Jusqu’au jour où nous

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n’avons plus le choix. ss
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Et bien figurez-vous que c’est souvent le cas avec le digital. La transformation digitale est
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pénible, elle relève du système 2. Elle demande des efforts gigantesques en matière
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d’apprentissage, de réflexion, de prise de décision. Et souvent, on n’y fait appel qu’en


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dernier recours, qu’au dernier moment, quand le bateau commence déjà à sombrer, que
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les murs se fissurent : bref, quand les ventes se raréfient et que le chiffre d’affaires
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s’effondre.
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Que n’aurions-nous dû l’effectuer avant, cette transformation digitale, et éviter de nous


retrouver en pareille situation. Du coup, on se lance, on accélère, et on affirme partout,
haut et fort, que youpi ! grâce au digital, on va se sortir de cette mauvaise passe, qu’on
va redresser le tir, retrouver les bénéfices : bref, que le digital va faire croître nos ventes.
Il n’y a pas pire que pareil mensonge.
Là aussi, entendons-nous bien. Le digital peut vous aider à développer votre activité
commerciale, tant en B2B qu’en B2C. Le « social selling », par exemple, cette pratique
que nous avons déjà évoquée et qui consiste, entre autres, à apprendre à vos
commerciaux à se servir correctement des réseaux sociaux, peut contribuer à les rendre
plus efficaces. Mais cela peut tout aussi bien avoir l’effet inverse, sur les commerciaux qui
n’y verraient qu’une manière de spammer leurs contacts. La vente en ligne, dont nous
avons indiqué les remarquables progrès à plusieurs reprises dans ce livre, fait partie des
pratiques incontournables, auxquelles doivent s’intéresser non seulement les plus grands
groupes de distribution (d’Auchan à la FNAC), mais aussi, dans une moindre mesure, les
plus petits commerçants, sur des secteurs de niche. Mais en réalité, ce n’est pas que le
digital va booster leurs ventes : non, en l’occurrence, le digital est simplement devenu un
impératif vital, sans lequel toute vente peut, à terme, disparaître. Ce n’est pas que votre
chiffre d’affaires va se développer avec le digital, mais plutôt que la génération de chiffre
d’affaires nécessitera de plus en plus de digital pour se produire.
La dimension temporelle est essentielle ici. Plus vous retardez la prise de décision, et plus
l’effort sera difficile à réaliser. Au-delà d’un certain temps, tout effort sera d’ailleurs
devenu inutile : vous ne pourrez simplement plus exister sans avoir mené cette
digitalisation. Mais au-delà du sens du timing, c’est aussi sur la durée de l’effort que doit
se porter votre appréciation. N’allez pas croire que c’est une affaire de jours ou de
semaines : la transformation digitale est affaire d’années. Une fois lancée, d’ailleurs, il est
peu vraisemblable qu’elle prenne fin. Comme le disait un humoriste, « perpète, c’est pour
longtemps ». Avec le digital, vous entrez dans un monde dont on ne sort pas. Et qui
concerne - si vous ne l’avez pas encore compris, lisez illico la seconde partie – à peu près
tout le monde.

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Digital Me Up - Comment développer votre business à
l’aide des smartphones
Par Alice Brehaut
https://goo.gl/ExVHWw

Les ventes depuis un mobile, smartphone ou tablette, représentaient déjà 10 % des


quelques 835 millions de transactions de l’e-commerce en 2015226, un nombre en hausse
de 19 % par rapport aux 700 millions de 2014, pour un volume de 64,9 milliards d’euros,
soit une hausse de 14,3 %, bien supérieure aux prévisions (10 % soit 62,5 milliards
d’euros). Cette tendance haussière, qui s’accompagne d’une explosion du nombre
d’applications mobiles, représente une véritable mine d’or pour les entreprises qui les ont

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lancées ainsi que pour celles qui les ont développées.
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Le smartphone, c’est le futur
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L’achat en ligne est devenu si courant que les internautes n’hésitent plus désormais à
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utiliser leur mobile ou leur tablette pour acheter des produits ; les transactions en ligne
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depuis un mobile ont plus que doublé en un an, passant de 40 % en 2014 à 88 % en


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2015. Bien que l’ordinateur reste le principal canal d’achat en ligne, le smartphone gagne
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du terrain et permet de générer des ventes additionnelles. Au-delà du fait que les mobiles
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sont d’un usage simple et pratique, un tel succès tient également à l’évolution du marché
des ventes d’appareils : les ventes de mobiles ont dépassé celles d’ordinateurs depuis
longtemps.
81 % des acheteurs en ligne possèdent un smartphone, en particulier les plus jeunes
d’entre eux (95 % dans la tranche des 18-24 ans, 89 % dans la tranche des 25-34 ans),
et 57 % ont une tablette. 32 % des personnes qui en sont équipées ont utilisé leur tablette
lors d’achats en ligne en 2015 (contre 29 % en 2014) et 20 % ont utilisé leur smartphone
(contre 17 % en 2014).
L’âge d’or des applications mobiles
Au-delà de l’e-commerce, une multitude d’opportunités s’offrent à ceux qui savent tirer
parti d’un smartphone. La meilleure preuve en est, en 2015, le succès des applications qui
gèrent les déplacements ou le co-voiturage (Uber et Blablacar), la musique diffusée en
streaming (Spotify ou Deezer), les sites de rencontre (Tinder, Happn ou AdopteUnMec).
Un succès qui attire de plus en plus d’entreprises de toute taille, internationales ou non,
qui souhaitent lancer leur propre application mobile de souscription à un service ou d’achat
en ligne. Des milliers de start-up se sont lancées, et permettent de développer de telles
applications, pour un prix qui varie de 5000 à 15000 euros, et jusqu’à 100000 euros pour
les plus complexes, comme celles qui intègrent un système de paiement électronique.
Yves Rocher, un pionnier du « mobile-to-store »
Avec 1700 points de vente dans le monde dont 650 en France, Yves Rocher se fait fort,
avec le mobile, de préparer les internautes à venir visiter ses boutiques : c’est ce qu’on
appelle communément le « mobile-to-store ». « 60 à 70 % de nos clients cherchent de
l’information en ligne avant de venir en magasin », précise Christophe Coussen,
responsable du marketing digital au sein du groupe de cosmétiques.
Ainsi, le site Yves Rocher lancé en 2012 fait systématiquement la promotion des
boutiques, via un « store-locator » et la possibilité de chercher la boutique la plus proche.
Via l’application, les clientes peuvent prendre rendez-vous (20 % des rendez-vous sont
pris depuis un mobile), consulter leur solde de points de fidélité ou obtenir des conseils
personnalisés.
La stratégie cross-canal de BrandAlley
Premier grand magasin en ligne français, et seconde plateforme de ventes privées en

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France, BrandAlley se targue de réaliser 35 % de ses revenus via des terminaux mobiles,
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et envisage de lancer son application mobile pour atteindre le cap des 50 %
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Ce canal de vente vient compléter celui des PC connectés. Il convient parfaitement avec
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le concept de ventes privées, quand la réactivité est un facteur d’efficacité. Les ventes
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démarrent tôt le matin sur BrandAlley, à une heure où les acheteurs ont quitté leur
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domicile et sont déjà sur le trajet vers leur travail. Avec l’application, les clientes peuvent
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agir de manière plus efficace. Le site revendique également de nombreux achats cross-
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device, les clientes découvrent l’offre sur leur mobile et procèdent à l’achat depuis leur
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ordinateur.
Comment mieux développer les ventes avec les mobiles
Les smartphones constituent un excellent moyen pour développer les ventes et offrent de
nombreux atouts pour développer les revenus. Les entreprises qui se sont déjà lancées
dans une approche cross-canal devraient songer à développer des applications encore
plus efficaces, qui offrent une expérience utilisateur améliorée, pour que la recherche de
produit et l’acte d’achat se déroulent encore plus rapidement. La clef est sans doute
d’offrir aux clients une expérience cross-device la plus libre et souple possible, avec de
nombreux points de repères communs aux différents usages, mais en tenant compte des
spécificités propres à chaque type d’interface.
Le digital ne concerne pas mon secteur
Il n’y a rien de pire que de refuser d’affronter une réalité : le déni est la source des plus
grands échecs et des plus grandes frustrations. Le refus de considérer l’éventualité d’une
déferlante digitale sur son propre secteur en fait partie. Car dites-vous bien que le digital
concerne tous les secteurs. Tous. Sans exception.
Vous voulez des exemples ? Prenez celui des taxis. Il y a une dizaine d’années, un peu
avant l’arrivée des smartphones, tout allait bien. En France, quelques sociétés se
partageaient le monopole. La licence, chèrement acquise, constituait une barrière à
l’entrée infranchissable par le tout-venant. Et les clients pouvaient bien râler sur la qualité
du service (en constante dégringolade), l’opacité des tarifs ou les pratiques
moyenâgeuses (comme refuser de prendre quatre passagers dans une berline), rien ne
semblait pouvoir faire changer ou évoluer cette profession.
Et puis Uber est arrivé. Oh, la transformation ne s’est pas faite en quelques mois : Uber a
été créé en 2009, il a fallu quelques années avant que la déferlante numérique n’embrase
le secteur des transports payants. Il y a également eu besoin d’une combinaison habile,
d’une forme de conjonction des astres. En France, c’est d’abord le statut de VTC,

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dérégulé dès 2009 par la loi de modernisation des services touristiques, qui connaît une
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forte progression alors que la diffusion des smartphones et des applications mobiles se
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fait de pair. Le terrain devient dès lors évidemment favorable pour que des applications
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permettant de localiser, contacter ou réserver des VTC inscrits sur une base de données
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commune, prennent leur essor.


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On connaît les conséquences de la diffusion quasi planétaire d’Uber. Partout, ou presque,


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des affrontements, parfois mortels (comme en Afrique du Sud227), entre chauffeurs de


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taxis et chauffeur Uber. On laissera à chacun la liberté de se faire une opinion sur les
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bénéfices ou les dérives qui découlent du succès d’Uber et de ses clones. À côté d’une
supposée paupérisation des chauffeurs – qui ne sont plus salariés d’une seule
compagnie228 mais indépendants – il ne faut pas négliger l’impact réel sur la profession.
La carte bleue ne fait plus figure d’épouvantail, et comme les chauffeurs Uber, les taxis
traditionnels se sont mis à soigner leur présentation, l’aspect de leurs véhicules ou les
services à bord : bouteille d’eau et petits bonbons sont devenus monnaie courante.
Cet exemple, connu de tous ou presque, est suffisamment représentatif de l’état d’esprit
dans lequel il faut se mettre quand on parle de digital : comme le préconisait Napoléon III,
« il ne faut jamais dire jamais229 ». Même les secteurs les plus archaïques, ou les plus
décorrélés de toute approche numérique, peuvent un jour ou l’autre basculer dans une
démarche digitale. La réservation de baby-sitters, les courses de chevaux, la prospection
par les chercheurs d’or, la location de bateaux, la prière, toute activité humaine peut être
considérée sous un angle digital. Saviez-vous qu’il existe une application, par exemple,
pour calculer les horaires du Chabbat quel que soit le lieu où l’on se trouve sur la planète
? ou une autre pour identifier le type de moustique qui nous a piqué (si l’on dispose d’une
photo de ce dernier) ? ou encore une autre qui résout n’importe quelle équation
mathématique que vous prenez en photo ? une application pour suivre le trajet des avions
commerciaux à partir de leur numéro de vol ou de leur destination, et une autre qui permet
d’identifier les yachts qui mouillent dans la baie de Cannes ? un site pour repérer la boîte
aux lettres la plus proche de chez vous ? et un autre pour expédier des cartes postales à
partir de vos propres photographies ? On peut enfin laisser libre cours à son imagination
digitale230.

Avec FindShip, on identifie en un rien de temps les yachts qui mouillent en baie de Cannes ou dans le port de Monaco.
Une application utile aux paparazzis… et au fisc ?
En fait, il n’y a pas de limites à l’innovation digitale. Il suffit en réalité qu’un besoin se fasse
ressentir, et qu’un esprit suffisamment curieux et inventif se penche sur le problème avec

i m
une approche digitale, pour que tout s’enchaîne. La beauté de la chose réside, sans
ss
doute, dans le fait qu’il n’y a pas de profil type pour s’y mettre : n’importe qui peut avoir
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l’idée. En revanche, la réalisation nécessite un minimum d’expérience.
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La principale question, désormais, est de savoir quand et comment le digital va faire


d

irruption dans votre secteur. Y répondre est sans doute bien plus difficile. Et méfiez-vous
de

de celles et ceux qui veulent écrire l’histoire à l’avance, et vous prédisent, sans rien y
oa

connaître, que « ça ne marchera jamais ». C’est d’eux qu’on va d’ailleurs parler au


pl

chapitre suivant…
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Le mythe du « ça ne marchera jamais »
Dans une intervention remarquable lors des « Rencontres de la Niaque » organisées par
Bpifrance, le président de Speedy, Jacques le Foll s’en prenait à l’expression contre
laquelle il s’est toujours battu : « ça ne marchera jamais » 231. Ne rien lâcher, oser sans
cesse, ne pas se laisser décourager, c’est le leitmotiv des entrepreneurs, des créateurs
de start-up mais aussi des champions de la transformation digitale.

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À ne rater sous aucun prétexte, la publicité Renault de 1997, pour la vidéo c’est ici : http://bit.ly/2jJ1j4T

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Les motifs de découragement sont pourtant nombreux, et vous apprendrez vite à les
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reconnaître, à force de les croiser dans votre entourage. Sous sa forme la plus simple, le
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« ça ne marchera jamais » consiste à renoncer à l’innovation dans des cas de quasi-


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monopole ou de marché florissant. À quoi bon s’intéresser à la photographie numérique232


de

quand la totalité de l’humanité sait se servir d’un bon vieil appareil photo argentique ?
oa

Pourquoi prendre le risque d’investir dans une technologie à peine mature quand le
pl

business traditionnel fonctionne à merveille ? On sait ce qu’il est advenu de Kodak


U

quelques années plus tard. On ne reconnaît que ce que l’on connaît déjà…
Le « ça ne marchera jamais », c’est peut-être tout simplement le signal de l’incompétence
de votre interlocuteur, incapable d’envisager le marché dans lequel vous évoluez dans une
dimension plus large, en tenant compte du temps et de la nécessité, pour vos
adversaires, de modifier les règles. La vie des entreprises ne se déroule pas en vase
clos. Tous les jours, des entreprises naissent, d’autres disparaissent, et il vous faudra
parfois longtemps avant de repérer le futur champion de votre secteur. Ces situations de
challenger sont particulièrement appréciées par les entrepreneurs du digital.
Penser que « ça ne marchera jamais », cela correspond plus à la posture de celui ou celle
qui craint les échecs. Une posture traditionnelle dans certains pays qui ont une culture peu
portée vers la prise le risque, comme c’est hélas le cas en France, où l’échec est
synonyme de mort économique. Echouer aux examens, planter son projet ou sa société,
perdre un emploi, c’est basculer de l’autre côté de la barrière, dans le monde des loosers
: étonnant terme britannique, qui sert d’épouvantail chez nous, alors que la culture de
l’échec fait partie du substrat des pays anglo-saxons.
Une nouvelle relation à l’échec
Pourtant, les choses sont en train d’évoluer. La relation à l’échec est en train de prendre
une autre dimension. Parler de ses échecs est devenu une mode, une tendance. On voit
même, çà et là, éclore des failcon, diminutif issu de l’anglais « fail conference », des
événements ou l’on vient relater ses propres échecs pour expliquer comment on a su
rebondir par la suite, et donner du courage aux autres. Un peu partout dans le monde, on
voit se dérouler des Fuck-up Nights233. Il faut dire que la société américaine adore tout ce
qui symbolise ces sortes de renaissances, comme celle qu’incarnait Steve Jobs de son
vivant. La culture du come-back est intimement liée à celle de l’acceptation de l’échec.
En France, des philosophes, comme Charles Pépin, se sont emparés du sujet. Dans son
livre « Les vertus de l’échec » 234, cet auteur rappelle que l’échec est à la base de
l’apprentissage : nous apprenons en évaluant des tas d’options, de chemins possibles, et
en ne sélectionnant que les meilleurs. En reprenant l’affirmation de Sartre – « l’existence
précède l’essence » – Charles Pépin nous rappelle que l’échec nous permet de nous
réinventer, de sortir de la routine ou des chemins peu valorisants. Comme il l’affirme, «
oser, c’est oser l’échec ». Pourtant, et c’est là que réside tout le problème, le système
éducatif français ne nous apprend pas à oser : tout est fait pour nous apprendre à

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craindre l’échec, alors que c’est lui que nous devrions rechercher avant tout. On n’apprend

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rien d’une expérience qui réussit : on apprend plein de choses d’une expérience ratée. La
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science, et le progrès en général, se nourrissent d’échecs.
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La transformation digitale relève des mêmes principes. Dans le digital, ce n’est pas la
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théorie qui prime, mais la pratique : comme le répétait le regretté Henri Egea235 à l’envi,
de

on apprend à marcher en marchant : ce livre vous en apprendra dix fois moins sur le
oa

digital que l’expérience pratique (mais il n’en reste pas moins nécessaire pour vous donner
pl

du cœur à l’ouvrage). Le digital permet de se réinventer, à condition d’accepter de le


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faire, ce qui n’est pas le cas de tout le monde. Le digital est fait d’audace et de
persévérance, d’affinages successifs : ça ne marchera pratiquement jamais du premier
coup, et si cela parvenait à marcher du premier coup, ce serait plus dangereux qu’autre
chose, car cela signifierait que n’importe qui pourrait venir vous concurrencer, sans
véritable barrière à l’entrée…
Ainsi, notre adepte du digital doit-il se méfier des porteurs de mauvaises nouvelles, de
ceux qui lui annoncent que « ça ne marchera jamais ». C’est justement parce qu’au début,
cela ne marche pas, que l’on doit persévérer, avant que d’autres ne le fassent, à notre
place. Ce qui serait, convenons-en, le véritable échec.
J’ai déjà effectué ma transformation digitale, merci
C’est probablement l’un des mythes les plus dangereux : croire qu’on arrive un jour au
terme de sa transformation digitale. C’est en réalité tout aussi ridicule que de croire que
Microsoft, en 1995, était arrivé au faîte de son évolution technologique et aurait pu
s’arrêter là. L’histoire a montré, hélas, que l’évolution technologique avançait souvent plus
vite que les organisations.
Nul ne peut se prévaloir d’avoir effectué sa transformation digitale, parce que la
transformation digitale est un processus continu, pour plusieurs raisons. Tout d’abord,
l’innovation technologique, qui se fait non seulement au sein de l’entreprise mais aussi, et
surtout, en dehors, chez les concurrents et désormais au sein de structures plus légères
et plus dangereuses, les start-up. La digitalisation que vous avez pu mener jusqu’à
présent sera menacée un jour ou l’autre par les innovations développées par des
compétiteurs que vous n’aurez peut-être même pas encore identifiés comme des
compétiteurs.
Qui aurait pu croire, en 2000, qu’une société comme Apple deviendrait un des acteurs
incontournables de l’édition musicale ? Ou que le PMU deviendrait un site de paris sportifs

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portant sur autre chose que les courses hippiques ? Ou qu’un site de partage de vidéos et
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de didacticiels deviendrait un acteur de l’e-learning ?
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Deuxième raison de ne pas vous endormir sur vos lauriers : la propension de l’être humain
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à se satisfaire de ce qui réussit une première fois sans aller chercher une seconde, ou
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une troisième victoire. Rien n’empêche de féliciter les auteurs d’une très belle percée
de

digitale, mais cela ne signifie pas qu’il faut arrêter de se remettre en cause. On le
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constate souvent, d’ailleurs, même auprès de start-up ayant réussi à s’imposer. Prenez
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LinkedIn ou Waze : leur contenu fonctionnel évolue finalement assez peu depuis quelques
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années, comme si l’effort surhumain qu’avait requis la mise au point de ces produits
justifiait un coup d’arrêt de la part des équipes de développement. Quelle imprudence…
Troisième raison, l’obsolescence induite par l’évolution technologique non pas de vos
produits ou de ceux de vos concurrents, mais du substrat sur lequel ceux-ci fonctionnent.
Lancer un service minitel au début des années 90 était peut-être une démarche de
visionnaire, mais quelques années plus tard, il aurait été criminel de ne pas porter le
même service sur internet, ce qui demandait non seulement des efforts en termes de
développement, mais également en termes d’élaboration de modèle économique. Et
quelques années plus tard, le portage vers une application mobile du même service est
rendu nécessaire par la migration des utilisateurs vers ces nouveaux appareils. Faire,
défaire, refaire, c’est le lot des acteurs du digital…
Quatrième raison, et c’est sans doute la plus importante, qui vous dit que votre stratégie
digitale était au point ? Comme nous l’avons dit, c’est déjà très bien de se lancer, mais
rien n’est jamais certain, et la plupart du temps, vous vous tromperez. Ce n’est pas grave,
mais ça reste délicat à gérer, parfois. Vous souvenez-vous de tous ces échecs digitaux
dont l’évocation du nom provoque invariablement un sourire ironique ? Le lecteur Zune de
Microsoft, l’application Google Wave, le Bi-Bop de France Telecom, le réseau social
Bluenity d’Air France, le cimetière des projets digitaux ratés n’en finit pas de se remplir. Et
pourtant, ces entreprises n’ont pas abandonné le sujet pour autant. Google est allé au
bout de son Google+, en faisant le socle sur lequel s’appuient d’autres produits. Air
France est devenue une société très agile sur les réseaux sociaux. Et Orange réalise de
substantiels bénéfices avec d’autres appareils mobiles. Seul Microsoft a renoncé à se
lancer dans la distribution de musique, mais après tout, quand on voit les initiatives
d’Apple, de Google ou d’Amazon dans ce domaine, on se dit que la firme de Redmond
pourrait encore avoir ses chances…
En réalité, le fait de se dire qu’on a réussi sa transformation digitale devrait résonner
comme un signal d’alerte, le signe d’une baisse de régime ou d’un manque de focalisation
sur les prochaines étapes de développement.
Le meilleur moyen d’y remédier, c’est de redoubler d’efforts. Et d’accepter de prendre
des risques.
Le titre est de BFMTV et a été noté sur l’instant.
Pour les explications sur ce qu’est Amazon Go si vous faites partie des martiens qui n’ont pas vu passer la vidéo :
http://amzn.to/2jJ66D0
Cf. cet article de la Tribune, où Maurice Levy rappelle que tout le monde a peur de se faire « ubériser » http://bit.ly/levy-

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uberiser

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Voir à ce sujet notre chapitre dédié à la banque et au digital. ss
Un des nombreux avatars de ce débat sans fin ici sur Marketing land mi 2016 http://bit.ly/Digitalbubble
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Voir ce blog pour une analyse de la théorie de Ricardo http://bit.ly/Avantricardo
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lire notamment « l’emploi est mort, vive le travail » dont voici un commentaire par l’auteur
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http://www.culturemobile.net/visions/bernard-stiegler-emploi-est-mort-vive-travail
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Voir par exemple cet article de 2015 http://www.entrepreneur.com/article/245794


de

Et si les robots prenaient nos jobs ? http://fortune.com/2015/05/29/robots-jobs-automation/


oa

L’innovation est d’abord pensée comme une source de productivité http://www.inc.com/peter-economy/8-powerful-ways-


to-build-a-faster-more-agile-business.html
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Comme le précisait récemment Olivier Ezratty http://www.e-marketing.fr/Thematique/etudes-1000/Breves/-Innovation-


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Olivier-Ezratty-consultant-vit-phase-bulle-innovation-experimentale-254197.htm
Des licornes aux valorisations parfois abracadabrantes http://skift.com/2015/03/25/airbnbs-revenues-will-cross-half-billion-
mark-in-2015-analysts-estimate/
Cf. http://techcrunch.com/2015/05/05/google-ventures-bill-maris-says-uber-is-the-fastest-growing-company-weve-ever-
seen/
CNBC dresse une liste impressionnante des 50 entreprises qui symbolisent la rupture
http://www.cnbc.com/2015/05/12/cnbc-disruptor-50.html
Dont on dit qu’il aurait contribué à la traque de Ben Laden
On nage parfois en pleine illégalité … https://zitseng.com/archives/12055
Source Médiamétrie 2014 : http://www.recevoirlatnt.fr/fileadmin/contenu/PART_Comment_faire/Observatoire_CSA_-
_S2_2014.pdf
Booz endormi, librement publié ici : http://poesie.webnet.fr/lesgrandsclassiques/poemes/victor_hugo/booz_endormi.html
S. Bazin en a parlé lors de la remise des trophées des CODIR 2015 : http://www.hervekabla.com/wordpress/les-
trophees-des-codir-2015/
Cf. https://phys.org/news/2015-11-bigger-smartphone-screens-customer-intentions.html
Cf. http://www.comscore.com/Insights/Presentations-and-Whitepapers/2014/UK-Digital-Market-Overview-February-2014
Thinking fast and slow, Daniel Kahneman, Penguin Books, 2012
Pour tout savoir du e-commerce, voir les chiffres de la Fevad : http://bit.ly/2j3Q9a9
Uber driver shot dead in Cape Town http://bit.ly/2jITWdo
En réalité, beaucoup sinon tous émargent chez toutes les compagnies de VTC et n’hésitent pas à dédier un smartphone
par service, jusqu’à en posséder 2, 3 ou 4.
Voir ici pour les explications : http://citations.savoir.fr/il-ne-faut-jamais-dire-jamais/
Ce site répertorie les applications iOS les plus étranges http://weirdios.com/
À voir en ligne : http://bit.ly/ca-ne-marchera-jamais
C’est un comble, il faut noter que la photo numérique a été en fait inventée par Kodak. De même que le Smartphone a été
inventé par Nokia (Nokia 9000, 1996 https://en.wikipedia.org/wiki/Nokia_9000_Communicator). Pour tout savoir de
l’invention de Kodak en 1975, de ses brevets associés, et même voir l’appareil en question (ecam) aller sur le billet de The
Australian Financial Review http://bit.ly/2lH4koo
Le site http://fuckupnights.com/ les liste sur une très belle carte Google Maps
Paru aux Editions Allary
Henri Egea a été directeur du conseil d’Unisys entre 1995 et 1996 et a ouvert les voies d’un nouveau conseil basé sur les
préceptes de la complexité, développés par Edgar Morin et Henri Atlan, entre autres. Yann Gourvennec a travaillé avec
Henri Atlan, disparu fin 2013 (http://bit.ly/2jIVPa3). Il répétait sans arrêt cette phrase, parmi beaucoup d’autres, qui nous a
marqués profondément tout au long de notre carrière et de nos vies personnelles.

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Par où commencer ?
Voilà, vous êtes presque parvenus au terme de ce livre. Devenu fervent partisan du digital,
vous aimeriez bien démarrer au plus vite et lancer votre entreprise sur le chemin vertueux
de sa transformation digitale. Sage décision.
Oui, mais par où commencer ? Quelles actions mener en premier ? Qui impliquer ? Dois-
je recruter de nouvelles équipes, ou trouver des champions digitaux en interne ?
Qu’adviendra-t-il de ceux-ci une fois ma transformation digitale bien enclenchée ? Et
comment mesurer l’efficacité de tout cela ?
Les chapitres qui suivent vont vous aider à prendre les bonnes décisions…

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Je commence par nommer un CDO
Dans de nombreuses entreprises, la transformation digitale s’accompagne de la création
d’un poste ad hoc, celui de Chief Digital Officer, CDO en abrégé (qu’il ne faudra pas
confondre avec un autre CDO, le fameux Chief Data Officer236). D’après une étude menée
par Novamétrie237 à l’été 2016 auprès de 300 entreprises, plus du quart d’entre elles se
sont dotées d’un tel profil. Parfois appelé directeur de la transformation digitale, celui ou
celle à qui incombe cette charge est en général un cadre de 35 à 40 ans maximum, ayant
évolué dans le numérique, qui n’est pas forcément issu de la branche ou de la filière dans
laquelle opère la société qui le porte à ce poste, et sur qui va peser la lourde
responsabilité de réussir la transformation digitale tant attendue. Et en deux ans si
possible, trois ans maximum. Tâche inhumaine, mais excellent salaire à la clef.
Car le cahier des charges du CDO est bien plus complexe qu’il n’y paraît. Son poste
implique à la fois des capacités analytiques pour établir un rapide bilan de la situation, et
des compétences opérationnelles très poussées, pour réussir la transformation. Avant
d’aller voir ailleurs.
Parlons déjà de la première facette de ce job. Le CDO devra, très rapidement dresser un

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audit extrêmement fin et précis de la situation. Cela passe, souvent, par un gel des
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investissements digitaux, par exemple jusqu’à la fin de l’année pour un poste de CDO
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opérationnel à l’été. Cela permet à la fois de marquer son territoire – d’indiquer qui est le
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boss des sujets digitaux – et de recenser l’ensemble des initiatives déjà menées, parfois
d

de manière non coordonnée, avec duplication des efforts et des coûts. Cela passe
de

également par une analyse de la situation, du positionnement de l’entreprise dans son


oa

écosystème. On attend du CDO qu’il ou elle ait une vision précise de la chaîne de valeurs,
pl

du modèle économique, et des éléments appelés à être plus ou moins digitalisés. À l’issue
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de cette phase, qui ne doit pas durer plus de quelques semaines, notre CDO devra
disposer à la fois des rênes des sujets digitaux, mais aussi d’une roadmap.
CDO ou femme (homme) à tout faire
Mais ce n’est pas tout. On attend de ce CDO qu’il ou elle change tout : la mentalité, les
processus, l’offre, les produits, les partenaires, bref, tout ce qui est appelé à être
transformé. Ce n’est pas chose facile. On ne conduit pas de tels changements en
quelques jours. Les impacts de certaines décisions peuvent s’avérer ravageurs. Les
réticences de collaborateurs peuvent constituer des freins terribles, parfois complètement
justifiés. Les cycles de développement peuvent parfois prendre plusieurs années :
comment marquer une empreinte digitale rapide quand la prochaine génération de
produits sortira dans deux ou trois ans ?
Pour quelqu’un qui vient tout juste de débarquer dans l’entreprise, comme c’est souvent le
cas, la tâche peut paraître insurmontable. D’autant plus que certains « barons » déjà en
place ne l’entendent pas de cette oreille : la transformation digitale risque de leur faire
perdre du pouvoir, et certains pourraient même considérer que ce rôle de CDO leur
revenait de droit, si ce n’est de fait. Et puis n’oublions pas que l’existence du CDO révèle
avant tout l’inefficacité des méthodes employées jusque-là : il est un désaveu personnifié
en face de ses interlocuteurs.
Poussons plus loin notre raisonnement. Si l’existence du CDO se justifie par l’absence ou
l’inefficacité de la stratégie digitale de l’entreprise, est-ce à dire que son poste disparaît
dès lors que l’entreprise est enfin convenablement passée au digital ? La réponse est bien
évidemment positive : les entreprises « digitales » par essence, n’ont absolument pas
besoin de CDO. Qu’aurait-il à faire dans une entreprise dont chaque salarié respire le
digital à longueur d’année ? C’est le paradoxe de cette fonction : elle cesse de devenir
utile dès lors qu’elle a rempli sa mission.
L’autre paradoxe, et il n’est pas des moindres, c’est qu’en réalité, il n’est pas nécessaire
d’aller chercher bien loin le CDO. En effet, un des cadres supérieurs de l’entreprise
pourrait fort naturellement porter ce titre et mener cette mission : le chef d’entreprise. Qui
d’autre qu’elle ou lui connaît le modèle économique, l’univers dans lequel évolue
l’entreprise ? Qui d’autre doit être à même d’identifier les faiblesses dues à une
appropriation inefficiente du digital ? Qui d’autre dispose de l’autorité nécessaire pour
faire passer – avec les précautions qui s’imposent – les mesures qui permettront à cette
transformation d’être menée à bien ?

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Hélas, tous les chefs d’entreprise ne font pas de bons CDO. Leur faible culture digitale,
i
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comme nous l’avons évoqué dans la quatrième partie, constitue un frein majeur. Des
A
solutions de contournement existent, comme celles mises en œuvre chez Accor, avec son
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« shadow Comex ». Ce ne sont que des solutions transitoires. Pour nous, il est clair que
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le meilleur CDO devrait être le principal dirigeant de l’entreprise. Et que tant que ce
de

dernier n’a pas lui-même effectué sa propre transformation digitale, les mesures portées
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au niveau de l’entreprise ou du groupe resteront d’une efficacité limitée.


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Recruter ou nommer un CDO peut vous paraître la première mesure à prendre. Mais il y
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en a d’autres, et bien plus efficaces…


Les silos organisationnels ne sont ni bons ni mauvais, il faut savoir en tirer partie
Rien ne sert de s’énerver, comme nous l’entendons systématiquement à chaque fois que
la transformation digitale et l’innovation sont évoqués, sur ces pauvres silos
organisationnels qui n’ont rien fait à personne238. L’organisation étanche par processus se
crée voire se recrée naturellement, de façon à protéger le pouvoir, exécuter les processus
plus facilement et permettre aux responsables des organisations de mesurer les résultats
de façon plus aisée. On peut écrire des livres de 300 pages pour expliquer qu’il est plus
efficace de travailler avec son voisin. Il est par contre beaucoup plus difficile d’aller
expliquer comment mesurer ce qui ne peut être mesuré et notamment la capacité à
travailler à plusieurs en transverse d’une organisation.
Quiconque a travaillé dans une organisation pluri-matricielle sait l’inefficacité et la
paralysie engendrée par ce type d’organisations. Quand tout le monde « reporte239 » à
tout le monde et que tout le monde travaille avec tout le monde, le résultat est loin d’être
bon. C’est pour cela, que l’on aime ou que l’on n’aime pas, que la pression soit importante
et la frustration élevée ou non, que les silos organisationnels sont là pour durer. Mieux
vaut vous en faire une raison.

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En fait, quiconque a étudié les organisations dans le cadre de l’innovation sait qu’aucun

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dispositif organisationnel n’est parfait. Ce qui permet de résoudre ces équations subtiles,
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ce ne sont pas des organigrammes, mais des femmes et des hommes, des compétences
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et le leadership qui favorise, ou non, leur travail.


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Le travail de l’innovation transverse peut et doit prendre pied au travers des silos
de

organisationnels
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Mais le travail transverse, indispensable préalable à l’innovation, peut et doit prendre pied
pl

au travers de ces différents silos, en faisant fi de ces difficultés. Ceci ne veut pas dire que
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nous glorifions l’organisation en silos (répétons-le, il n’existe pas d’organisation parfaite


pour l’innovation) ; ce que cela veut dire vraiment c’est qu’il n’est pas nécessaire de «
casser » ni les organisations ni les personnes qui les représentent pour innover. Il existe
d’autres méthodes qui permettent de contourner la difficulté.
L’intrapreneur : le vrai « casseur » de silos240
C’est là qu’entre en jeu « l’intrapreneur ». Non, il ne s’agit pas d’une faute de frappe.
L’intrapreneur est la personne, ou le groupe de personnes, qui arrive à innover à la
manière des entrepreneurs à l’intérieur d’une (grande) organisation. Pour réussir,
l’intrapreneur se moque complètement de l’organisation. Les organigrammes peuvent
changer au jour le jour, voire même ne pas exister (ne riez pas, c’est la majorité des cas :
l’organisation change tellement vite que l’organigramme n’a même pas le temps de
s’adapter et que personne ne connaît vraiment la hiérarchie qui se reconfigure en
permanence). Il se moque tout à fait de cette organisation, non parce qu’il est un
anarchiste, ni parce qu’il cherche à renverser le pouvoir, même si certaines personnes
peuvent le penser. Il se moque de cette organisation parce qu’elle n’a pas d’importance.
Les 4 types d’organisation les plus courants pour l’innovation. Le cabinet CCA en 2010 a démontré qu’aucune de ces
organisations n’était bonne ou mauvaise. Seuls comptent le leadership et la mise en œuvre
La seule chose qui compte, ce sont les personnes de qualité, sur lesquelles il ou elle va
pouvoir se reposer. À la manière du demi de mêlée, l’intrapreneur est agile, il va vite et il
se débrouille pour trouver une solution à un problème a priori insoluble (il est petit et léger
alors que ses adversaires sont lourds et énormes). L’intrapreneur ne lutte pas contre des
adversaires, il lutte contre l’immobilisme et les freins au changement. Pour ce faire, il va
s’appuyer sur la hiérarchie de la compétence qui mènera à une auto-organisation de
l’innovation qui ensuite, sur la base des preuves qu’il aura établies permettra de structurer
une organisation, si cela est nécessaire.

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L’innovateur ne demande pas s’il vous plaît, il demande pardon (David Armano)
En conclusion, l’intrapreneur ne demande jamais s’il vous plaît, il ne pose jamais la
question de savoir où il se situe dans l’organisation ni si son « job description » contient
l’objectif de réussir l’innovation en question, il prend l’initiative et cherche les acteurs du
changement sur lesquels s’appuyer. Ceci ne veut pas dire bien entendu que l’innovation ne
peut pas arriver par le haut, cela est tout à fait possible, et même souhaitable. Ceci étant,
la méthode ne change pas : même si vous êtes soutenus par le haut, soyez humbles et
travaillez comme des intrapreneurs car telle est la méthode pour faire réussir l’innovation
qui, par définition, vient bousculer l’ordre établi et nécessite donc qu’on change aussi les
méthodes de travail si l’on veut changer le résultat.
Je commence par recruter les bons profils
On pourrait aussi se dire que pour combler la culture digitale de l’entreprise, il suffit d’aller
chercher les talents à l’extérieur. C’est d’ailleurs un peu la suite logique du recrutement
d’un CDO : quitte à changer les équipes, pourquoi ne pas changer en profondeur ? Et
après tout, Internet regorge d’outils digitaux pour procéder à ce type de recherche. Il
suffit d’aller sur LinkedIn et de se servir du moteur de recherche ultra sophistiqué que cet
outil met à votre disposition.
Justement, le recrutement de tels profils fait partie des missions de votre DRH digitale, et
vous pourrez évidemment mesurer sa capacité à effectuer les prémices de sa
transformation. Mais cela ne sera pas si simple, et pour plusieurs raisons.
La première, c’est que toutes les entreprises n’ont pas forcément les moyens de recruter
à tour de bras. Intégrer de nouveaux talents, tout digitaux qu’ils soient, ce n’est jamais
gratuit. Dans nos entreprises traditionnelles, les créations de poste coûtent cher, et rares
sont celles qui disposent de budgets suffisants.
Le second écueil provient probablement de la réticence que vous rencontrerez de la part
des candidats. Si ceux qui prétendent vouloir devenir CDO sont nombreux, plus rares sont

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ceux qui s’enthousiasment à devenir les grognards de la transformation digitale. D’autant
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plus qu’il va falloir les convaincre de rejoindre une entreprise qui, a priori, n’est pas au
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meilleur de sa forme, du moins sur les sujets digitaux. Et si les plus grands groupes s’en
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tireront sans trop de dégâts, il est probable que cela sera plus difficile pour les
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entreprises de taille intermédiaire. La question des salaires se posera inévitablement.


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Troisième écueil, celui du changement de culture. Ces nouveaux talents, ces profils
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digitaux qui vont vous aider à réaliser votre transformation digitale, réussiront-ils à
pl

s’intégrer dans un environnement différent ? Et leurs futurs collègues seront-ils prêts à


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jouer le jeu ? Autrement dit, la greffe prendra-t-elle ? C’est peut-être la plus grande
difficulté à laquelle vous aurez à faire face si vous choisissez la voie du recrutement. Tous
les moyens sont bons pour y parvenir, des binômes opérationnels aux séminaires
d’intégration. La clef, c’est de parvenir à une osmose entre deux populations : d’un côté,
vos équipes historiques, qui ont pour elles l’histoire et la culture de l’entreprise, ses
processus, ses jeux de pouvoir, ses modes de fonctionnement explicites et implicites, sa
connaissance des produits, des circuits de distribution, bref de tout ce qui fait votre
société ou marque. De l’autre, des profils aguerris au digital, mais qui ont tout à
apprendre à votre sujet. Comme lors d’un mariage, il va falloir faire en sorte que ces deux
familles, qui s’ignoraient quelques jours plus tôt, apprennent à se connaître et s’apprécier.
Sacré challenge !
« Business as usual » ? Rien n’est moins sûr, car en cas d’échec, la sanction tombe
rapidement : vos jeunes recrues risquent de s’essouffler et d’aller voir ailleurs si l’herbe
digitale est plus verte.
Sans compter sur les risques de démotivation en interne : « tu vois, on a fait venir les
spécialistes et ça n’a pas marché ». Ou de rumeurs inquiétantes chez vos concurrents,
que certains de ces jeunes experts du digital, déçus par les quelques mois passés chez
vous, n’hésiteront pas à aller rejoindre. Bref, recruter en masse n’est pas la solution
idéale. Mais alors, comment faire venir les bonnes compétences ? Peut-être par la voie
d’une acquisition ?

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de
oa
pl
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Je commence par acquérir une entreprise digitale
L’option « croissance externe » est, dans une certaine mesure, une variante de l’option «
recrutement ». Mais au lieu d’aller chercher des compétences à l’unité, on va, dans ce
cas, intégrer d’un seul coup tout un pôle de compétence, avec ses propres équipes, ses
marques, son histoire, parfois bien courte s’il s’agit d’une start-up.
Ne le nions pas, cette option présente un sérieux avantage : la rapidité. Nul besoin de
passer par un processus d’acculturation, par définition lent et pénible, l’acquisition d’un
concurrent plus digital permet d’accélérer la transformation, de manière artificielle. La
recette a de quoi séduire, notamment les entreprises qui ont déjà une forte culture du
M&A. Dans une certaine mesure, le processus de rachat lancé par Microsoft sur LinkedIn
relève de cette catégorie. D’autres entreprises ont adopté cette stratégie, et non des
moindres : Boeing, Mastercard, la banque espagnole BBVA, entre autres241. Mais
attention, il ne faut pas confondre l’acquisition d’une nouvelle ligne de produits avec la
transformation digitale d’une entreprise. Le risque de voir les champions de la nouvelle
entité rester enfermés dans leur forteresse est loin d’être négligeable. À l’inverse, la
dilution trop rapide des effectifs d’une telle start-up dans votre organisation risque fort de

m
lui faire perdre tout son potentiel. Et on a vu nombre d’acquisitions se terminer en eau de

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boudin. ss
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Parfois, pourtant, ce type d’approche permet d’obtenir des résultats étonnants. Qu’il
y

s’agisse d’acquérir de nouveaux services ou produits plus digitaux, de développer de


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nouveaux modèles économiques ou de numériser toute une chaîne de valeur.


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Comme dans le cas de recrutement, il vous faudra alors faire face à des risques à chaque
oa

phase du processus : comment repérer le ou les bons candidats, comment calculer leur
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valeur réelle de manière à ce que le coût de l’acquisition ne mette pas votre entreprise en
U

péril, comment retenir les talents qui ont su développer l’objet de votre attention, comment
garantir leur bonne intégration ?
Bref, une acquisition bien menée peut donner une bonne impulsion sur le chemin de la
transformation digitale. Mais elle ne suffira sans doute pas. Il faut viser plus haut, et
notamment s’appuyer sur le potentiel existant : vos équipes déjà en place. Pour cela, un
maître mot : la formation.
Je commence par former tous les employés
Ainsi, vous envisagez de procéder à une transformation digitale de votre entreprise : c’est
bien. Mieux, vous décidez de conserver vos équipes, et de les faire monter en
compétence : éthiquement, c’est le meilleur choix, puisque vous emmenez votre entreprise
avec vous. Mais c’est aussi un choix risqué, car qui dit transformation, dit changement, et
nous le savons bien, l’espèce humaine est réfractaire au changement, même si elle
prétend y aspirer. Sur les épaules de votre département formation reposent désormais de
lourdes responsabilité : il va falloir contribuer, et pas qu’un peu, à cette transformation des
individus et des esprits.
La première chose à comprendre, c’est qu’il n’existe pas une formation au digital, mais
des formations au digital. À chaque métier ses propres programmes de formation. On ne
demandera pas la même chose aux forces de vente, aux ingénieurs ou aux équipes de
recrutement. C’est évident, et pourtant combien voyons-nous fleurir de programmes de
formation au digital, génériques et péremptoires.
Ces formations, nous vous préconisons de les réaliser sur mesure. On ne transforme pas
de la même manière un grand groupe automobile et une PME du secteur agro-alimentaire

m
: les cursus ne sont pas les mêmes, les outils et les clients non plus, sans parler des
i
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tarifs. Vous voilà donc face à une double complexité : gérer des programmes de formation
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adaptés à vos métiers et à votre entreprise. Il ne va pas être facile de les mettre au point.
y

Nous vous proposons, cependant, quelques pistes à étudier.


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Les organismes de formation.


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Ils ont tous pris le virage du digital : CEGOS, DEMOS, ORSYS, vous trouverez auprès de
tous ces organismes de formation de véritables cursus s’étalant sur plusieurs journées,
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dont les modules couvrent, comme ce livre, presque tous les aspects de la transformation
digitale, métier par métier.
Les programmes de type MBA
La plupart des écoles de management ont intégré un cursus spécialisé, d’une longueur de
6 à 18 mois, axé sur le digital. C’est le cas de Grenoble EM et son mastère spécialisé
Stratégie digitale, que dirige Yann Gourvennec, ou encore de l’ESSCA avec son mastère
Digital et Stratégie de marque, où intervient Hervé Kabla. Ces programmes longs
s’adressent à des étudiants qui souhaitent acquérir une compétence digitale à l’issue de
leur formation initiale, mais aussi, et surtout, à des personnes ayant une première vie en
entreprise, et qui sentent qu’il est temps d’inclure une expérience professionnelle plus
digitale à leur parcours.
Les programmes « Executive education » se sont également mis à la mode digitale,
comme ceux proposés par HEC et Mines Paristech, ou par l’Ecole Polytechnique
Executive Education, et qui s’étalent sur une quinzaine de jours répartis sur une année.
Il est encore trop tôt pour établir un classement de ces cycles de formation, mais
gageons qu’à moyen terme, les écoles et universités de premier rang joueront de leur
réseau et de l’attractivité de leurs associations d’anciens pour se valoriser.
Les consultants externes
Ils sont désormais légions, ces consultants spécialistes du digital, chacun dans son
domaine. Indépendants ou rattachés à un cabinet de conseil ou à une agence, leurs
compétences réelles varient d’un profil à l’autre, et il faut vous assurer de la performance
de leur mise en œuvre opérationnelle avant de vous engager avec eux, sur un
accompagnement plus ou moins long. Mais lorsque vous avez trouvé le bon profil, et que
cela fonctionne bien avec vos équipes, vous auriez tort de vous en priver.
Car ces intervenants apportent un véritable sang frais, un regard neuf sur vos activités : ils
challengent vos décisions opérationnelles, posent les bonnes questions sur votre stratégie
digitale (ou en passe de le devenir), et vous permettent de limiter le risque d’un raté ou
d’un oubli de dernière minute. Leur rémunération varie selon la pertinence de leurs
recommandations, et ils se mettront en quatre pour que cela fonctionne, car la poursuite
de leur mission dépend de son succès.
Leur champ d’action ne couvre pas que la formation, mais il nous semble bon de le
mentionner : en début de mission, notamment, une mise au point sur le vocabulaire, les

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insights, les risques opérationnels, les indicateurs de performance ou les outils ne pourra

i
ss
faire que du bien à vos équipes. Parlez-en à votre consultant préféré, il saura vous
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orienter convenablement.
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Former les collaborateurs au digital devrait être une priorité pour bon nombre
B

d’entreprises, avant même de se lancer dans un processus de recrutement ou de


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de

nomination de CDO, car cela portera ses fruits de manière transverse, au sein de
oa

l’entreprise. Mais ce n’est pas non plus la seule manière d’aborder la transformation
pl

digitale.
U
Digital Me Up - Comment choisir un Mastère en digital
(quand vous êtes Français et avez 36 ans) ?
Par Maxime Mario
https://goo.gl/u4pabZ

Comment poursuivre ses études et les compléter d’un bon diplôme, tout en progressant
dans le digital ? C’est la question que je me suis posée il y a un an. Je vais donc vous
raconter mon histoire personnelle, celle qui a abouti au Master que j’ai rejoint242.
Au fait, bonjour, je me prénomme Max, j’ai 36 ans, et je vis en France. Ces quinze
dernières années, j’ai travaillé dans l’univers du digital, plus spécialement dans le domaine

m
du marketing. Mais d’un point de vue digital, je suis un autodidacte, je n’ai jamais obtenu

i
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aucun diplôme dans cette matière (dites-vous bien que cela n’existait pas à cette époque).
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J’ai donc décidé, l’an dernier, de me remettre à étudier, afin d’améliorer mes
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connaissances en apprenant de nouvelles méthodes et d’obtenir enfin un diplôme dans le


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digital.
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Comment poursuivre ses études dans le digital


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J’ai commencé par explorer le Web à la recherche du Saint Graal :


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Le meilleur contenu : un programme d’une grande richesse, 100 % orienté digital.


Un emploi du temps flexible : comme je fais partie des principaux cadres de mon
entreprise bordelaise, j’ai accordé une importance capitale à l’emploi du temps, qui
devait me permettre de travailler tout en étudiant.
Le bon niveau : comme j’étais déjà titulaire d’un Master en marketing et que je
cherchais à perfectionner mes connaissances, je me suis mis à la recherche d’un
Master scientifique, ou d’un niveau équivalent.

J’ai donc commencé par classer tous les Masters que j’ai trouvés en ligne, j’ai même
utilisé un comparateur de cursus universitaires (www.meilleurs-masters.com, en français),
et je me suis finalement orienté vers le Master en stratégie digitale de l’Ecole de
Management de Grenoble.
Voici pourquoi, selon moi, il s’agissait – et il s’agit toujours - du meilleur Master sur le
digital :
Le directeur du programme et les enseignants sont des professionnels du digital,
qui travaillent dans différents domaines, tous en lien avec le digital. Cela fait
réellement une grande différence : on y développe des compétences pratiques,
qu’on peut appliquer au travail dès le premier jour. Et on y couvre plusieurs
secteurs industriels, du luxe à Google.
Le contenu est intégralement en anglais. Ce n’était pas essentiel pour moi, au
début. Mais après tout, Internet est global, n’est-ce pas ? Et quelle est la langue la
plus pratique pour évoluer dans un monde digital ? Ce n’est malheureusement pas
le français. Et 50 % de notre jargon est en anglais. Donc c’est un bon point pour
progresser.
Tous les cours sont à Paris. On a vu pire, n’est-ce pas ?
Le programme dure 15 mois, à raison de 3 jours par mois. Vous pouvez donc
conserver votre job, ou éventuellement chercher un stage de longue durée (ou un
contrat en alternance). Et même s’il y a pas mal de travail à produire, cela ne
requiert pas une attention permanente.
Le principal avantage de ce programme ne figurera dans aucune brochure, mais il
est essentiel : une émulation colossale. En travaillant sur le digital chaque jour et en

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partageant ses expériences avec chaque étudiant et chaque intervenant, la
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motivation va croissant, et cela vous permet de développer de nouvelles idées, de
A
nouveaux projets. Votre esprit bascule dans un mode 100 % digital.
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Je vais encore passer quelques mois au sein de ce programme, et ma liste de courses


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est déjà pleine. Et quand cela aura pris fin, je suis certain que cela ne sera que le début
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d’une nouvelle ère remplie d’idées digitales à tester et à développer243.


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Je commence par écouter mes clients
« Si j’avais demandé à mes clients ce qu’ils attendaient, ils auraient répondu ‘un cheval
plus rapide’ et non une voiture ». Ce bon mot, attribué à Henry Ford244, fait écho aux
propos de Steve Jobs, qui affirmait de manière péremptoire que les gens ne savent pas
ce qu’ils veulent, jusqu’à ce qu’on le leur montre : « It’s really hard to design products by
focus groups. A lot of times, people don’t know what they want until you show it to them245
». Mais nous aurions tort de prendre ces propos au pied de la lettre. Le point commun de
ces deux chefs d’entreprise américains a été d’être des visionnaires capables d’influencer
le cours des choses par la puissance de leur projet. En est-il de même pour chacun de
nous ? Permettez-nous, humblement, d’en douter.
En réalité, nous avons constamment besoin d’écouter nos clients. Pour la simple et bonne
raison que ceux sont eux qui passeront, au final, le plus de temps aux prises avec les
produits et les services que nous mettons au point. Pouvons-nous réellement nous priver
du bénéfice des millions d’heures passées par ces utilisateurs, et ne pas nous en servir
pour améliorer la qualité de ce qui sort de nos entreprises, imaginer de nouveaux produits,
et transformer le lien commercial en une relation de longue durée ? Nous vous laissons le

m
soin d’en décider.

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Pour nous, simples mortels, l’écoute des clients est un élément essentiel. Pourtant, celle-
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ci est souvent négligée par bon nombre d’entreprises, plus occupées à régler leurs
y

problèmes d’efficacité interne que de répondre aux attentes de leurs clients. Or, comme
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nous l’avons évoqué dès la première partie de ce livre, la relation client est l’un des quatre
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de

piliers de la transformation digitale.


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Comment s’établit donc le lien entre digital et écoute client ? Le digital influence la relation
pl

client de deux façons.


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La première, c’est l’apparition de nouveaux canaux, ces dernières années, qui ont multiplié
les opportunités de mise en relation avec les clients. Les médias sociaux, comme nous
l’avons déjà évoqué dans nos précédents ouvrages246, sont des canaux de communication
naturellement bidirectionnels, où la marque et l’entreprise peuvent, certes, prendre la
parole, mais où l’essentiel réside dans l’interaction avec leurs publics. L’important, quand
on se lance sur les médias sociaux, ce n’est pas le nombre d’abonnés ou de fans, c’est ce
qu’on en fait : comment répond-on à leurs questions, positives ou négatives ? comment
sont prises en compte leurs remarques, leurs sollicitations ? comment tient-on compte du
contenu produit par les utilisateurs, le fameux UGC247 qui peut tout autant faire plaisir que
détruire la réputation d’une marque ?
Cette interaction digitale ne se limite pas aux médias sociaux. Les smartphones, ces
ordinateurs miniatures dont s’est dotée la moitié de l’humanité, offrent différents
mécanismes qui permettent une interaction digitale avec des entreprises, au-delà de
l’usage même des versions mobiles des médias sociaux cités précédemment, et qui ont
bien compris, de leur côté, que leur avenir passait par le mobile. Un réseau de salles de
cinémas, un voyagiste ou une banque savent très bien à quel moment leurs clients font
usage des produits et des services qu’ils proposent : pourquoi ne pas leur demander de
poster leur avis à l’issue de cet usage, via un SMS ou une notification sur le smartphone
du client : « donnez une note à ce film », « voici votre nouveau décompte de points sur
notre programme de fidélisation », « attention votre compte approche du découvert
autorisé », c’est typiquement le style de message qui, publié au bon moment, suscite une
interaction positive ou utile avec le consommateur.
Attention, il ne s’agit pas non plus de solliciter les clients au mauvais moment, ou de
manière inutile. Toute interaction doit être pensée de manière à améliorer le produit ou le
service, ou la relation avec le consommateur. Une des pistes à suivre consisterait à poser
des questions dont les réponses seront utiles au client dans un avenir proche, ou à
d’autres utilisateurs. L’échange ne doit jamais être perçu comme une perte de temps.
Ces nouveaux canaux de communication digitaux ont un impact aussi bien après qu’avant
le processus d’achat. Le digital influe sur les approches multicanal et omnicanal qui posent
de sérieux casse-têtes à de nombreux marketeurs, ces dernières années. Qu’il achète en
ligne, depuis un ordinateur ou un smartphone, ou dans un magasin, le consommateur
considère qu’il reste le même individu : mais comment le voit le système d’information
dans lequel il est représenté ? comment associer cet internaute venu faire des recherches

m
en ligne à ce consommateur déçu venu rendre le produit qu’il s’est fait livrer en magasin ?

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Les objets connectés, enfin, sont également de remarquables dispositifs de remontée des
A
clients vers les entreprises, qui ne servent pas uniquement à alimenter des bases de
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données, mais aussi à comprendre leur contexte d’utilisation et à prendre les bonnes
d

décisions quand c’est possible, ou nécessaire. Ils forment des canaux de communication
de

implicites qu’on aurait tort de négliger.


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Le deuxième impact du digital sur la relation client, c’est la perception qu’ont ces mêmes
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clients que le digital devrait faire évoluer l’offre de produits ou de services à laquelle ils
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font appel. C’est précisément l’un des piliers de l’ubérisation : comprendre où l’offre fait
défaut et utiliser le digital pour lancer une offre concurrente beaucoup plus adaptée aux
conditions d’utilisation de notre époque. En introduisant la géolocalisation des chauffeurs,
la commande facile depuis un smartphone et le paiement enregistré sur une application,
Uber a digitalisé la relation client au-delà de tout ce qu’aucune compagnie de taxis n’avait
osé créer jusqu’alors. Et pourtant, ce n’était pas faute d’avoir essayé comme l’indique un
article écrit par Hervé Kabla en 2007, déjà248.
Cette réflexion sur les usages digitaux possibles de nos propres clients est probablement
le point d’entrée principal à l’élaboration d’une stratégie digitale, car on évite ainsi de se
disperser sur des projets qui ne font du digital que pour le plaisir de faire du digital, et
sans réel impact sur la vie de nos clients. Ne souriez pas, cela existe réellement : quand
une entreprise, grand fournisseur d’accès Internet, met à disposition de ses clients une
application mobile pour écouter des stations de radios diffusées par Internet, on est
exactement dans le cadre de cette approche inefficace du digital. À quoi cela sert-il, pour
une telle entreprise, de fournir une application de ce type, alors qu’il en existe des dizaines
d’autres sur le marché, mieux maintenues et plus complètes ? Celle de notre fournisseur
d’accès, par exemple, ne pivote pas horizontalement sous Android. Ces autres
applications, plus stables, plus rapides et proposant plus de chaînes de radio, ne lui
laisseront aucune chance de réussite.
L’effort mené pour développer une telle application ne devrait-il pas plutôt être consacré à
améliorer les applications existantes, plus proches du cœur de métier et de son offre
client, comme celle qui permet d’enregistrer des programmes télé depuis un smartphone
? Voilà une application véritablement centrale pour un fournisseur de box Internet, et qui
pourtant refuse régulièrement de fonctionner ; de quoi inciter l’entreprise en question à
repenser ses priorités.

m
Pour tout savoir du superbe dispositif d’innovation, pragmatique et sophistiqué, de Voyages SNCF, voir cette interview de

i
Benoît Bouffard réalisée par Yann sur son blog (http://bit.ly/2jkc0Od)
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Écouter ses clients, c’est étudier leurs comportements pour imaginer – avec eux, parfois –
A
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les évolutions possibles de ses propres produits. Cela peut se faire à l’ancienne, avec des
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groupes d’utilisateurs, ou de manière plus moderne, en écumant les forums, en lançant


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des pilotes, ou en gérant des communautés de bêta-testeurs. Certaines démarches de


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co-construction que l’on voit fleurir çà et là relèvent exactement de cette philosophie. C’est
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la démarche suivie en 2014 par Voyages-Sncf, pour repenser son application mobile.
pl
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Écouter ses clients, c’est savoir aller lire les commentaires des utilisateurs sur les
plateformes de téléchargement, pour comprendre qu’est ce qui pèche, et qu’est ce qui
doit être amélioré. C’est ce qu’a fait la Française des jeux en 2014, pour intégrer les
fonctionnalités qui ont fait tout le succès des déclinaisons mobiles des loteries nationales,
et notamment une fonction de scan des documents d’identité, fonction qui s’est avérée
être un facteur d’accélération dans l’appropriation de l’application par les nouveaux
utilisateurs, leur évitant d’aller s’enregistrer via le site, alors que ce qui les intéressait,
c’était de jouer depuis un smartphone…
De nombreuses entreprises ont su prendre la transformation digitale par le bout de la
relation client. Mais d’autres sont allées encore plus loin. Comment, c’est ce que nous
allons voir au chapitre suivant.
Je commence par essayer, tester, avancer
Recruter, former, écouter, nous avons vu, dans les paragraphes précédents, de
nombreuses manières d’aborder le digital. Mais il en est une qui est probablement encore
plus efficace : c’est d’utiliser les méthodes mêmes de l’univers digital. Et pour vous
simplifier les choses, nous allons vous en proposer une qui est à la base même de tout
processus digital. Elle fonctionne en trois étapes : essayer, tester, avancer. Puis on
recommence.
Essayer
La première étape, c’est d’essayer. On ne fait pas de digital sans mettre les mains – voire
les doigts, c’est le cas de le dire – dedans. Le digital passe par la prise de risque,
l’audace, l’expérimentation. Il n’y a pas de mauvaises idées, il n’y a que des idées qui
marchent ou qui ne marchent pas (et encore, nous le verrons, cela peut dépendre de
facteurs externes). Il va donc vous falloir susciter de nouvelles idées.
Comment ? Une des meilleures méthodes consiste à vous imaginer comme votre
compétiteur le plus dangereux. Qu’est-ce que feraient vos concurrents pour vous déloger

m
ou vous prendre des parts de marché ? Sans aucune hésitation, ils s’appuieraient sur les

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faiblesses de vos produits, de vos circuits de distribution, de votre service-client, bref, sur
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toute les failles du système. Si vous les connaissez, bingo ! vous savez par où
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commencer, en essayant de remédier à ces défauts en y incorporant la dose nécessaire


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et légitime de digital.
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Vous ne les connaissez pas, ou pire, vous pensez ne pas en avoir ? Reportez-vous deux
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chapitres plus haut, et allez parler à vos clients. Eux vous diront, sans hésitation, ce qui ne
marche pas ou pas bien, et comment l’améliorer. Attention, cela risque de piquer, parfois.
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Vous allez découvrir des choses qui fâchent, des petits secrets qu’on vous a cachés
jusqu’alors, de petites compromissions qui se sont avérées catastrophiques au fil de l’eau.
Ce n’est pas grave, si vous avez la dose de courage et d’empathie requise, vous
parviendrez sans aucun doute à y remédier.
Pour cela, il va falloir vous appuyer sur des individus prêts à essayer, et ce sera peut-être
le plus difficile. Un CDO ne suffira pas, comme nous l’avons évoqué plus haut. Recruter
des équipes déjà expérimentées pourra servir, former celles déjà en place est
indispensable. Mais c’est surtout au niveau des mentalités que votre choix doit s’opérer.
Expérimenter, c’est prendre des risques, ce qui, dans une entreprise, et particulièrement
une entreprise française, peut s’apparenter à de la folie en termes de gestion de carrière.
Vous devrez partir à la recherche des bonnes personnes, prêtes à jouer le jeu.
Mais attention ! Ces profils-là sont à la fois rares et sensibles. Il va falloir les protéger,
leur assurer une voie de sortie honorable en cas d’échec, toujours possible, et une
considération acceptable au sein de l’entreprise, même s’ils travaillent sur des projets
expérimentaux à long terme qui ne contribuent pas directement à l’activité quotidienne de
celle-ci.
Le profil type, c’est celui de l’intrapreneur, si cher à Yann Gourvennec, et que vous avez
surement rencontré un jour, en vous demandant, soit ce qu’il faisait dans les murs de la
société, soit comment vous pourriez mettre son talent au service de l’entreprise.
Tester
Les cycles de développement dans le digital sont des cycles courts. Autrement dit, inutile
de passer des années à mettre au point votre petit bijou d’application, à fignoler vos
processus ou à alimenter votre nouveau site web. Rien ne sert de passer des heures et
des jours à développer une fonctionnalité qui ne sera pas utilisée : et pour le savoir, rien
de tel que de demander aux utilisateurs ce qu’ils en pensent … en la mettant à leur
disposition.
Pour cela, il existe plusieurs méthodes, comme le « corridor testing » (on demande au
premier qui passe dans le couloir de venir tester notre nouveau produit, sans en avoir lu la
documentation, et sans solliciter plus de trois fois la même personne), les communautés
de bêta testeurs (on invite des groupes d’utilisateurs pionniers à tester une version du
produit dans un état assez avancé), et même la version bêta permanente, que Google a
popularisé lors du lancement de sa messagerie Google Mail, restée en version bêta de
2004 à 2009, le temps de convaincre près de 150 millions d’utilisateurs.

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Dans tous les cas, il faudra porter une attention soutenue aux problèmes et défauts
A
remontés pendant ces périodes de test. L’utilisation d’un site ou d’une application dédiés
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est même recommandé, de manière à pouvoir suivre l’évolution du produit : réduction du


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nombre de problèmes découverts, non régression lors de versions successives, etc.


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Avancer
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Ça y est, vous avez lancé de nouveaux produits ou de nouveaux services, vous avez
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réussi à digitaliser vos processus, ne vous attendez pas à prétendre au repos du guerrier.
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Bien au contraire, c’est maintenant que les choses intéressantes commencent. Le digital
vous donne une plus forte exposition, qui va nécessiter une plus grande attention de votre
côté, au niveau de l’attention portée aux retours des clients, des évolutions nécessaires
de vos initiatives.
Ce qu’il faut comprendre, c’est que la digitalisation est une sorte de coup d’état
permanent249, qui ne prend jamais fin. Chaque transformation appelle à sa propre mort
programmée, par une nouvelle transformation. De sorte qu’en matière de stratégie
digitale, vous ne pourrez jamais viser le long terme, mais une succession de courts termes
qui s’anéantissent les uns les autres. N’y voyez pas un panégyrique de l’obsolescence
programmée, c’est l’innovation technologique qui conduit, qu’on le veuille ou non, à
l’obsolescence de produits qui ont révolutionné leur époque. Qui voudrait, de nos jours,
d’un iPhone 3 ou d’un iMac de 1998 pour travailler ou se divertir ? Et pourtant ces produits
étaient non seulement de superbes innovations digitales à leur sortie, mais de véritables
succès commerciaux. Les produits digitaux ne peuvent pas être pérennes, et vous devrez
en tirer les conclusions qui s’imposent pour élaborer et entretenir votre stratégie digitale.
Nous voilà bien avancés dans cette section consacrée à la mise en œuvre de la
transformation digitale. Il ne nous reste plus qu’une méthode à voir ensemble pour que
vous soyez à même de commencer votre démarche digitale, et c’est ce que nous allons
faire au chapitre suivant…

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Je commence par créer une check-list et des tableaux de
bord
Combien de fois n’avons-nous été interpelés sur nos trucs et astuces pour élaborer une
stratégie digitale, quels sont les outils et les méthodes, par quoi faut-il commencer et que
faut-il mesurer ? En procédant de la sorte, nos interlocuteurs montraient à quel point ils
étaient démunis face aux défis qui les attendaient. Alors pour bien fixer les idées, voici
quelques conseils à lire et à relire avant de vous lancer.
Il n’existe pas de check-list pour établir votre stratégie digitale
C’est triste, mais c’est ainsi. Il n’existe pas deux sociétés, même évoluant dans le même
secteur, qui auront la même stratégie digitale. D’innombrables facteurs peuvent intervenir,
allant de la trésorerie à la culture digitale du dirigeant, en passant par le catalogue
produit, le réseau de distribution ou l’histoire de la marque. Croyez-vous sincèrement que
Renault ou PSA peuvent avoir la même stratégie digitale ? Que Boeing et Airbus suivent
les mêmes voies ? Que Klepierre et Unibail doivent appliquer les mêmes recettes ?
Evidemment non. Si les objectifs à long terme de sociétés voisines peuvent se

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ressembler, leur réalisation requiert une analyse fine des conditions de mise en œuvre.

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Ceci étant, rien n’empêche de se fixer des priorités, et de déterminer une liste d’étapes
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intermédiaires, de paliers de progression, qui permettront de jauger l’évolution des
y

mesures visant à mettre en œuvre une stratégie digitale.


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Il n’existe pas de tableau de bord de la transformation digitale


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Et c’est le second secret que nous partageons avec vous dans ce chapitre décidément
endiablé. Si tout ce qui est digital (ou presque) peut être mesuré, s’il est relativement
pl
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facile d’établir un tableau de bord pour mesurer un certain nombre de critères et leur
évolution, il est peu probable que vous réussissiez à construire le tableau de bord de votre
transformation digitale.
Là encore, n’allez pas croire que nous nous moquons de vous à ce stade du livre. Bien au
contraire, si vous êtes passés par les chapitres précédents, vous devez avoir pris
conscience que le digital va vous mener sur des terrains mouvants, non balisés, où
chaque initiative nouvelle crée de nouvelles conditions de progression. Ce que vous
mesuriez au démarrage du projet peut très bien s’avérer ne plus être tout à fait ce qui doit
l’être au bout de quelques mois. Par exemple, vous pouvez très bien vous focaliser sur
certains critères au lancement de votre application mobile (le nombre de téléchargements,
segmenté par système d’exploitation, le nombre d’utilisateurs inscrits) pour ensuite vous
intéresser à d’autres une fois que le déploiement prend forme (le coût d’acquisition d’un
utilisateur, la part de chiffre d’affaires généré via le mobile, le taux de réutilisation, etc.).
Se focaliser sur les seconds au démarrage du projet n’aurait pas grand intérêt tant que
les chiffres ne sont pas significatifs, et aurait plutôt tendance à dévaloriser le projet : «
quoi, c’est tout le chiffre d’affaires généré par l’application mobile lancée le mois dernier ?
… ».
Ceci étant, rien n’empêche de construire des tableaux de bords d’étape en étape, de
manière à mesurer la progression de projets élémentaires, et c’est même une bonne
habitude que nous vous invitons à mettre en œuvre, si ce n’est pas déjà le cas.
Il n’existe pas de trucs et astuces pour construire votre stratégie digitale
Troisième révélation, et non des moindres. La transformation digitale n’est pas l’affaire de
trucs maîtrisés par quelques gourous du digital allant porter la bonne parole de
conférence en conférence. Non, c’est plutôt l’inverse : la transformation digitale est
l’affaire d’hommes et de femmes de métier, qui ont compris les enjeux et les conditions de
mise en œuvre du digital, et comment ces enjeux et ces conditions s’appliquent dans le
contexte de la société dans laquelle ils évoluent.
Ceci étant, chaque individu construit sa propre expérience, et élabore sa propre liste de
trucs et astuces dans son métier, et les spécialistes de la transformation digitale ne sont
pas des exceptions. Accepteront-ils de vous les livrer ? Là est toute la question…

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Comment innover pour réussir sa transformation digitale
La transformation digitale impose qu’on comprenne le langage de l’innovation. Les vrais
travaux de transformation se font sur le terrain, étape par étape, en partant du concret.
Pour cela et pour mener à bien ces projets, il faut maîtriser un certain nombre de
principes d’innovation et adopter une méthodologie pertinente. Au-delà de la méthodologie
cependant, l’innovation et sa mise en œuvre est avant tout affaire d’état d’esprit. Voici 10
étapes importantes pour donner à votre transformation digitale toutes les chances de
réussir. Nous vous conseillons néanmoins de les adapter néanmoins au contexte de votre
structure.

1. Soyez curieux de tout, ne négligez rien et soyez patient


Les technologies les plus efficaces sont, comme le disait Mark Weiser du PARC,
celles qui se font le mieux oublier. Mais avant d’en arriver là, encore faut-il être en
mesure de distinguer entre les technologies promises à un bel avenir, celles qu’on
peut qualifier de gadgets, ou encore celles qui, bien que prometteuses, n’auront que
peu de chances de s’imposer. Pour ce faire, il vous faudra du flair et de

m
l’entraînement. En effet, la détection des tendances est loin d’être une science

i
exacte. ss
A
Voici quelques exemples
y
B

Les Google Glass : malgré un buzz incroyable, relayé par tous les journalistes
d

du monde entier, les lunettes made in Google ont fait un véritable flop dans le
de

grand public250, au point que leurs propriétaires étaient surnommés « Google


oa

Glasshole251 ». Qu’on se rassure, les Google Glass sont mortes, ou presque,


pl

mais Snapchat Spectacles est arrivé pour satisfaire notre insatiable besoin de
U

croire au Père Noël. Il en est des innovations comme du reste, les phantasmes
des utilisateurs sont souvent immémoriaux et recyclables. Certes, il est encore
quelques journalistes pour faire leur travail et croiser l’information, et s’assurer
qu’on n’est pas en train de nous faire prendre des vessies pour des lanternes
(voir l’Irish Times qui ne s’en laisse pas compter252).

En vente depuis février 2017…


Des lunettes de ce style existent cependant depuis des années dans le domaine militaire
et d’autres fournisseurs proposent ce type de produits – avec moins de bruit médiatique
mais plus d’efficacité – dans les domaines de la sécurité ou de la surveillance ; domaines
B2B où la question de l’acceptabilité par le public n’est pas en question.

Le Newton : à sa sortie dans les années 90, cette tablette Apple n’a pas du tout
séduit les consommateurs. On connaît pourtant aujourd’hui le succès de l’iPad et
du Kindle qui sont arrivés bien plus tard sur le marché. Mark Weiser en avait prédit
le futur dès 1986253. Il faut savoir être patient dans le domaine technologique,
contrairement à une idée reçue qui voudrait que tout aille vite.
L’impression 3D : qui permet notamment de faire du pilotage de processus
industriels par ordinateur. En Chine, une société a trouvé, grâce à cette
technologie, comment injecter du béton et construire une maison en 24H. Cette
technologie a été inventée dans les années 80. Son futur n’est probablement pas
dans les usages grand public mais aussi dans les applications industrielles et sur
les petites séries. Les journaux et le Web nous ont pourtant abreuvé d’histoires à
dormir debout pendant des années en nous expliquant que nous en aurions tous

m
une chez nous (nous connaissons même quelques geeks qui en ont acheté et qui

i
ss
ont essuyé les plâtres). Mais derrière les histoires trop rapides des médias pointe
A
une véritable révolution industrielle254, avec de vrais leaders français visionnaires
y

comme Sculpteo255.
B
d
de

En conclusion, il faut rester curieux et positif mais ne pas croire tout ce qu’on lit, garder un
oa

œil critique, et accepter de se tromper car soyons francs, personne ne sait prédire
pl

l’avenir. En principe.
U

2. Écoutez vos clients… et vos employés


Cela peut paraître une évidence et pourtant. Prenez la plupart des comptes
Facebook de marques, même les grandes qui sont très fortes en communication
digitale, et vous verrez la plupart du temps (en regardant les commentaires des
clients en-dessous de leurs publications) que le temps dispensé à l’écoute active par
ces marques est bien maigre. Les marketeurs doivent s’impliquer activement dans la
communication digitale afin d’écouter les signaux faibles et améliorer leurs produits et
leurs services. De bonnes idées sont à pêcher dans les critiques des clients. Même si
cela peut paraître contre-intuitif, il est plus facile de s’améliorer par la critique que de
demander aux clients d’émettre des besoins sur des produits futurs et abstraits.
Cette démarche doit aussi être adoptée en ce qui concerne les suggestions des
employés. Il ne faut pas longtemps pour faire le tour d’une entreprise et trouver un
grand nombre de bonnes idées qui ont été mises sur la touche pour des raisons
diverses. Voilà de l’innovation qui ne coûte pas cher et augmente les taux de
satisfaction, aussi bien internes qu’externes.
3. Commencez petit et voyez grand
Pour transformer son entreprise, il faut être capable de mettre en œuvre le
changement, ce qui requiert non seulement la force de persuasion, mais aussi la
maîtrise de quelques tactiques de base, essentielles pour la réussite de vos projets.
Avant toute chose, il faut être capable de penser grand, avec ambition, et savoir
commencer petit et modestement, prouver la réussite et convaincre pour passer à
l’étape suivante.
Paradoxalement, les meilleures initiatives d’innovation ne sont pas celles où on
dépense le plus d’argent ; ou à tout le moins, elles ne commencent pas par là. Pour
les intrapreneurs comme pour les entrepreneurs, il faut d’abord faire ses preuves,
avancer concrètement puis se préoccuper du financement. Ce qui est d’ailleurs plus
facile dans la mesure où un résultat préalable est établi.
4. Sachez trier le bon grain de l’ivraie
Avant de se lancer sur n’importe quelle innovation, il faut être capable d’en faire le tri.
Lesquelles de ces innovations sont pertinentes pour votre métier ? Lesquelles vont
mettre beaucoup de temps et beaucoup d’énergie pour être mises en œuvre ?
Lesquelles peuvent constituer des victoires rapides, capables d’impressionner vos

im
sponsors et vos investisseurs ? Il va falloir passer par une phase dite « d’idéation »,
ss
qui permettra de trier ses idées et de choisir un chemin critique.
A
y

Dans cet exemple, issu d’un travail d’innovation conjoint avec une banque d’affaire
B

Suisse, est présentée une cartographie d’innovations potentielles rangées dans 4 «


d
de

paniers d’innovation » types. Les idées sont d’abord décrites puis classées en
fonction de leur difficulté du temps nécessaire à leur mise en œuvre. La plupart du
oa

temps, le problème n’est pas de trouver des idées mais de les classer dans l’ordre
pl

d’importance et surtout d’être capable de montrer un résultat rapidement (d’où


U

l’importance du panier nommé « low-hanging fruits ».


5. Levez la barrière entre informatique et métiers
C’est probablement l’exercice le plus difficile, celui sur lequel la plupart des initiatives
d’innovation et de conduite du changement échouent. Pas pour des problèmes
techniques, ou des problèmes d’organisation, mais pour des raisons humaines et de
rapport entre les personnes. En effet, délimiter les deux territoires est souvent lié à
une guerre de position entre marketeurs et informaticiens.
Pourtant, 25 ans après l’invention de l’Internet, et plus de 60 ans après celle de
l’informatique, ces outils n’appartiennent plus à personne. L’informatique se
démocratise, et l’Internet est entre les mains de tous ou presque. Il est donc temps
de faire tomber ces barrières artificielles, d’autant plus que sous la pression de la
généralisation du cloud computing d’infrastructure (IaaS), le métier d’informaticien
évolue vers ce qu’on appelle la maîtrise d’ouvrage, qui consiste à mieux écouter les
métiers et à mieux les servir.
6. Choisissez vos champions
Pour mettre en œuvre le changement, il faut aller chercher les agents du
changement. Les personnes qui sont plus avancées peuvent guider les autres. Nous
ne recommandons pas de choisir ces acteurs de changement uniquement parmi la
fameuse « génération Y » Les champions se trouvent dans toutes les générations et
faire travailler l’entreprise de manière intergénérationnelle est un critère de succès
indispensable pour la réussite de l’innovation.
7. Financez l’innovation
Si vous avez suivi les conseils ci-dessus, et que vous avez déjà obtenu quelques
résultats concrets, vous pouvez maintenant vous lancer à la recherche de partenaires
financiers (internes ou externes selon votre contexte) pour donner vie à vos ambitions
et vos projets de transformation digitale.
Il y a plusieurs manières de financer des projets d’innovation. Celles-ci peuvent aussi
bien prendre corps à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’entreprise, notamment par la
recherche de nouveaux sponsors, en particulier lorsque l’innovation est très en
rupture avec l’ordre établi. Cela permet de mener ses expériences, de les
développer, à l’abri du cœur de métier de votre business et, dans le meilleur des cas,
de les rapatrier si l’expérience réussit et que la greffe prend.

im
8. Mesurez le succès et apprenez à communiquerss
A
Il faut se garder des deux extrêmes en matière d’innovation : les innovateurs qui
y

pèchent par excès de communication et à l’opposé, ceux qui font montre d’une
B

absence de faire-savoir. Les premiers font des annonces alors que rien n’existe, ce
d
de

qui génère parfois des projets dispendieux, qui génèrent eux-mêmes des attentes
rarement atteintes. Quant à aux projets géniaux en mal de publicité, ils meurent dans
oa

l’œuf, avant même qu’on ait pu se rendre compte qu’ils existaient. Apprenez donc à
pl

mesurer vos résultats, et surtout à savoir les présenter en temps voulu, et faites-en
U

sorte que votre communication soit concrète et réaliste.


9. Mettre en place un processus d’innovation
Certains feront le choix de commencer par la mise en place du processus
d’innovation. C’est une erreur couramment commise. Celui-ci doit être établi une fois
que l’innovation a décollé, que vous avez réussi à rétablir les dialogues autrefois
dysfonctionnels, et que vous avez déjà démontré quelques résultats. Alors, et
seulement, vous pourrez mettre en œuvre un processus transverse d’innovation, le
plus discret possible de préférence, afin d’éviter bureaucratisation et sclérose.
10. Pourquoi innover ? Où ne pas innover ?

On a vu quelques idées du terrain et quelques conseils pour savoir comment innover. Mais
pourquoi innover ? Il est courant de croire que l’innovation est hautement désirable et
valorisée, mais il s’agit d’un mythe très répandu, comme l’a démontré Scott Berkun dans
son ouvrage sur les mythes de l’innovation. L’innovation attire autant de critiques et de
résistances que de louanges, une fois sur le terrain. Cela se comprend aisément, car
innover, revient à bousculer les habitudes. En Angleterre, par exemple, dans les années
1811-1817, dans la région de Manchester où l’on a reçu les premières machines à tisser,
est né un courant dit des Luddites. Mot qui provient de John (Ned) Ludd et de ses
disciples. Ces derniers cassaient à coup de marteaux les nouvelles machines, car ils
estimaient qu’à terme cela allait remplacer l’homme.
L’innovation est importante, mais elle ne vient pas forcément d’un besoin clairement
exprimé. L’exemple des Taxis Bleus le prouve. La société de taxi traditionnelle, fortement
concurrencée par de nouveaux entrants se trouve forcée d’innover pour survivre à la
concurrence.
On peut donc innover offensivement ou défensivement. Les raisons pour lesquelles une
entreprise se lance dans l’innovation peuvent être multiples :

Pour se démarquer, distancer la concurrence.


Pour affiner sa gestion.
Pour développer son chiffre d’affaires.
Pour augmenter sa rentabilité.

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Pour améliorer son image de marque.

i
Pour ss
profiter et se laisser porter par une vague d’innovation.
A
Pour ne pas régresser car en économie : « qui n’avance pas, recule » ;
y

Pour éviter d’être déclassé.


B
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de
oa
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Bonus : Les mythes et les pièges de l’innovation
En fait, les vrais innovateurs ne parlent jamais d’innovation, car c’est l’affaire de tous.
C’est ce qu’a démontré un livre célèbre, sur les mythes des innovations, que tout
marketeur se doit de lire : The myths of innovation de Scott Berkun256, en 2007. Il en
existe 10 au total. Résumons-les ici.

1. Nous sommes capables prédire l’avenir


Les vrais innovateurs sont toujours capables de faire un pivot. En effet, ils doivent
être en mesure de changer de direction en toute situation afin de réorienter leurs
projets et leurs structures. Avec plus de 70 % de part de marché en 1996, tout le
monde croyait Netscape immortel. Qui eût cru, par exemple, que son navigateur
déclinerait de façon ultra rapide, à peine un an après. Il en fut de même pour le
nouveau leader des navigateurs, Internet Explorer, aujourd’hui abandonné et dont le
successeur peine à faire ses preuves. De même pour Yahoo ! d’abord largement
dominant, puis amené progressivement au bord du gouffre par Google qui s’est
imposé en à peine 2 ans.

m
2. Le mythe du « Eurêka j’ai trouvé ! »
i
ss
Il s’agit de croire en une prise de conscience soudaine et lumineuse du caractère
A
impérieux d’une innovation et de sa solution technique. Or, l’innovation ne se passe
y
B

que rarement, voire jamais comme cela. Il y a souvent plusieurs personnes qui
d

inventent la même chose en même temps, mais il est nécessaire de prendre le temps
de

de la maturation.
oa

Prenons l’exemple d’eBay. À son lancement, la société était loin d’être attractive au
pl

regard des médias. Les fondateurs du site américain ont alors inventé une histoire, un
U

mythe fondateur, qui a eu beaucoup de succès auprès des journalistes et qui a


contribué à fonder une légende. Celle de la création d’une place de marché, servant à
revendre les distributeurs PEZ de la collection de la femme de son fondateur.
3. Il existe une méthodologie d’innovation
C’est également un mythe, car l’innovation est initiée de diverses manières :
Le travail acharné dans une direction particulière, comme dans l’exemple du
photocopieur Xerox.
Une erreur, un travail acharné avec pivot (s). Exemple de Post-it, qui est plus
le résultat d’un raté que d’une stratégie.
La curiosité et la coïncidence. Exemple de Velcro né de la découverte des
fleurs de bardane accrochées sur les vêtements.
Un manque de financement. Exemple de Google qui était à la base un
algorithme et dont les fondateurs sont allés voir Yahoo ! À l’époque Yahoo !
rejette leur projet pensant qu’ « on ne peut pas faire d’argent avec un moteur
de recherche ». Mêmes déboires avec AltaVista. En conséquence, les
fondateurs de Google ont créé eux-mêmes un moteur de recherche qui utilise
cet algorithme et la suite est connue de tous.
La nécessité. Exemple de Craigslist, fondé par Craig Newmark qui, nouvel
arrivant à San Francisco en 1995, a trouvé que les gens échangeaient des
petites annonces papier et qui a créé un site de petites annonces. Il est
actuellement leader dans son domaine.
La chance et le hasard jouent également un rôle non négligeable comme dans
toute réussite.

Par ailleurs, les chances de réussite d’une innovation sont équivalentes à la multiplication
des chances de réussite de chacun de ses composants. Les probabilités se multiplient
donc, elles ne s’ajoutent pas, et c’est une tout autre histoire. Plus il y a d’éléments qui
interviennent dans la composition d’une innovation ou qui lui sont couplés, plus les chances
de réussite sont réduites.

4. Tout le monde aime l’innovation

m
Il n’y a rien de plus faux. Il est même fort à parier que cette croyance soit la première

i
raison d’échec des innovations. Lorsqu’on introduit une innovation, il faut s’attendre à
ss
devoir faire face à la peur que celle-ci provoque. En effet, toute innovation voit son lot
A
de détracteurs. Nous l’avons vu plus haut avec les Luddites. Sachez que même la
y
B

Tour Eiffel n’a pas séduit tout le monde, elle fut l’objet de sévères critiques de la part
d

des lettrés de l’époque qui la considéraient comme une monstruosité technique. Elle
de

ne dut sa survie qu’à sa transformation en tour pour le télégramme et à l’interception


oa

des messages non cryptés de l’ennemi qui s’apprêtait à envahir Paris en 1914.
pl
U

5. Le mythe de l’inventeur solitaire


À l’instar du mythe du « Eurêka j’ai trouvé ! », on s’imagine bien souvent qu’un
inventeur est toujours seul. Au contraire, les innovateurs fonctionnent souvent par
couples. C’est le cas des plus connus comme Anita Roddick (Fondatrice de The Body
Shop), Richard Branson (Virgin), Steve Jobs (Apple), Bill Gates (Microsoft) et ainsi
de suite. Cependant, il faut savoir que dans la majorité des start-up si les fondateurs
sont au départ deux ou trois, et il y en a toujours un qui prend le dessus sur les
autres. Guy Jacquemelle, l’explique fort bien dans son ouvrage titré « La malédiction
des start-up257 ».
6. Il est difficile de trouver de bonnes idées
Ce n’est pas tout à fait vrai. Il suffit d’aller dans une entreprise pour se rendre compte
qu’il y a pléthore de personnes imaginatives mais qui ne savent pas comment s’y
prendre pour aller à l’étape suivante. Il y a en effet tout un mythe autour du
brainstorming. Rien ne sert de se focaliser sur le fait de trouver des idées alors que
la vraie difficulté réside dans le tri entre les bonnes et les mauvaises, celles qui ont un
intérêt ou non, et surtout le fait que vous allez pouvoir les mettre en œuvre plus ou
moins facilement. Il faut alors se référer à la matrice vue au préalable, et que Yann
Gourvennec a intitulée les « paniers d’innovation », qui permet de faire le tri entre ce
qui est faisable (et à quelle échéance) de ce qui ne l’est pas258.
7. Votre boss en sait plus que vous
C’est un phénomène souvent rencontré. Celui qui veut que l’on attende que le patron
vous donne ses instructions pour innover et qu’ensuite, tout est possible. Si tout le
monde suivait cette démarche, aucune entreprise n’innoverait. En effet, il faut bien le
souligner, souvent l’innovation arrive là où on l’attend le moins. En témoigne l’exemple
de Chester Carlson, inventeur de la première photocopieuse. À l’époque, ses
supérieurs ne croyaient pas du tout en son invention, et pensaient qu’elle ne
marcherait jamais. Tout le monde a le droit d’innover et en est capable.
8. Les meilleures idées l’emportent toujours
« Cela ne marchera jamais. Ce produit n’est pas le meilleur ! ». Combien de fois
avez-vous entendu ce genre de phrases ? Or, il existe beaucoup d’exemples où le
produit le moins bon est celui qui se vend le mieux, pour des raisons de praticité, de
notoriété, d’attachement à la marque ou au design. L’exemple de la Sony Betamax
Technology et du Video Cassette Recorder (VCR) sont dans toutes les mémoires.

im
Tous deux rendaient la vidéo possible, mais c’est le VCR qui a décollé, en dépit du
ss
fait que Sony proposait un produit beaucoup plus performant et beaucoup plus
A
qualitatif, mais trop encombrant.
y
B

9. Des idées décorrélées de tout problème


d
de

Souvent l’innovation arrive par l’identification d’un problème. Il faut autant d’ingéniosité
oa

pour découvrir les problèmes de vos clients, que pour créer les solutions qui les
pl

résoudront. Un des exemples d’innovation par le problème est celui du Dr Percy


U

Spencer, qui trouva une barre de chocolat fondue dans sa poche alors qu’il se
trouvait dans une salle radar. C’est en cherchant à comprendre la source du
problème et à la manière de le transposer de façon positive, qu’il a trouvé le principe
du four à micro-ondes (dont la commercialisation est intervenue bien plus tard,
cependant).
10. L’innovation est toujours bonne et bienveillante

Nombreux sont les cas qui démontrent le contraire. Un exemple marquant est celui des
frères Wright qui, pour mettre fin aux guerres, ont inventé l’avion afin de permettre
d’observer les mouvements de l’ennemi. Leur raisonnement était qu’avec un tel appareil, la
guerre deviendrait impossible car tout mouvement sur le terrain serait immédiatement
connu du camp adverse. Tout le monde connaît l’histoire et sait qu’au contraire, l’homme
s’ingénia à perfectionner ses aéroplanes, jusqu’à en faire de terribles machines à tuer et à
bombarder les positions ennemies, et ce qui est encore plus répréhensible, les civils. Ce
qu’il faut savoir, c’est que l’innovation peut être bonne pour vous, et néfaste pour d’autres,
votre secteur, la société ou encore le monde. Ceci ne doit cependant pas nous
décourager d’innover, bien au contraire. Ce point doit servir à vous rappeler, si besoin
était, de l’importance de l’éthique au cœur de nos démarches d’innovation.
Cela fait au passage deux concepts relativement proches pour le même acronyme. Nul ne sait combien de temps cette
ambiguïté durera. Probablement pas très longtemps, il faudra donc s’attendre à changer de jargon.
Cf. http://www.usine-digitale.fr/article/attention-un-cdo-peut-en-cacher-un-autre.N452462
Voir aussi le blog de Claude Super : « Cassez les silos, ils reviennent au galop » http://bit.ly/2jvnXOL
Au sens anglais du terme, qui est directement intraduisible.
Voir cette vidéo enregistrée par Bruno Fridlansky pour son blog Consonaute http://bit.ly/2jvoZdB fin 2014
Voir l’excellent article sur ce sujet dans Strategy+Business, la revue de PwC http://www.strategy-
business.com/article/Will-You-Be-Mine
Dans la promotion 2015-2016
À l’issue de son Mastère en Digital Business Strategy, au moment-même où il soutenait sa thèse, en décembre 2016,
Maxime Mario est devenu directeur associé de l’agence de conseil dédiée à la transformation digitale Digitall, située à
Bordeaux.
Le site Goodreads l’affirme (http://www.goodreads.com/quotes/15297-if-i-had-asked-people-what-they-wanted-they-
would) mais Harvard Business Review réfute cette information (https://hbr.org/2011/08/henry-ford-never-said-the-fast). Il
semblerait, au-delà de l’absence de preuve sur la véracité de cette citation que Ford ait effectivement procédé ainsi et ait
ainsi tiré un bénéfice initial de son invention en dehors de toute écoute de ses clients. Mais cette absence d’écoute aurait
en fait posé quelques problèmes à l’entreprise par la suite. Il ne faut donc pas conclure de ce précepte – à défaut de parler
de méthode avouée – que ne pas écouter les clients est une bonne chose, mais qu’il y a un temps pour penser à leur
place, et un autre pour les écouter. Pas simple, mais néanmoins une remarque de bon sens qui se trouve développée
dans sa deuxième partie à l’intérieur de ce chapitre.
Dans une interview à Business Week, en mai 1998

m
Voir la liste de la collection à mon boss sur http://amonboss.com

i
UGC = User Generated content ss
Cf. http://www.hervekabla.com/wordpress/ce-quun-site-Internet-ne-doit-pas-etre/
A
Rendons à François Mitterrand la paternité de ce titre génial
y

Voir cet article qui finit de les enterrer en 2015 http://bit.ly/2jveaIl et pourtant, Dieu sait qu’on nous en a rebattu les oreilles
B

jusque plus soif. Quand la presse tient une histoire, il est rare qu’elle la lâche sans avoir eu un autre os à ronger.
d

Cf. https://techcrunch.com/2014/02/18/google-explains-how-not-to-be-a-glasshole/
de

L’article de l’Irish Times « Les lunettes de Snapchat passent-elles le hype-test ? » http://bit.ly/2jvj743


oa

L’ordinateur du XXIe siècle, Ibid.


pl

Ici comment l’impression 3D réinvente la supply chain


https://www.sculpteo.com : cofondée par Éric Carreel, Clément Moreau et Jacques Lewiner..
U

Scott Berkun est un ancien de Microsoft. Il fut notamment à l’origine du succès fulgurant de Internet Explorer 4 à la fin des
années 90. La firme de Redmond pourrait sans doute faire appel à lui maintenant pour raviver la flamme de son
navigateur Web.
Cf. Tout savoir sur… La malédiction des start-up - Les créateurs se séparent. Pourquoi ? par Guy Jacquemelle, Éditions
Kawa, 2012 La malédiction des start-up Editions Kawa, 2012.
Voir à ce sujet le livre blanc de Visionary Marketing intitulé Bringing Ideas To Reality http://bit.ly/2lH8ooA qui explique le
détail de ces paniers d’innovation et comment ils fonctionnent.
Conclusion

U
pl
oa
de
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y
A
ss
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Rangeons les chiffons rouges, et allons de l’avant
War Araog A’tao259
Vous voici arrivés au terme de cet ouvrage, et nous, à celui d’un long périple. Toutes ces
années à travailler dans le digital, à changer des organisations, transformer des métiers,
ou analyser les métiers des autres. De nombreuses années, passées à nous deux sur le
terrain, dans toutes les fonctions : informatique, marketing, vente, conseil, R&D,
communication, direction digitale, organisation, maîtrise d’ouvrage et médias sociaux.
Nous vous passons les pays et les différents secteurs. Nos deux précédents ouvrages
étaient d’ailleurs centrés sur les aspects de communication, mais notre envie d’aller plus
loin se faisait impérieuse.
Cette vue à 360 degrés de notre métier est aussi notre assurance. Celle qui nous
protège, et protège le lecteur, d’une analyse trop hâtive, à l’emporte-pièce, dans un sens
comme dans un autre, vers l’exagération indue de l’impact du digital, ou sa minimisation
aveugle.
Tout au long de cet ouvrage, que nous avons voulu aussi complet que possible, nous
avons balayé le champ d’action très large du digital.

im
ss
La tentation de mettre la peur au ventre de tous les professionnels avec le spectre d’une
A
révolution digitale censée renverser tout et tout le monde sur son passage est forte ici et
y

là. C’est un argument pratique, un bon moyen de secouer les consciences et de les
B

réveiller. Il est vrai que pour de nombreux métiers - et nous en avons décrits beaucoup ici
d
de

- se fait jour une angoisse sourde de perdre des milliers d’emplois, de voir des entreprises
oa

séculaires disparaître. Beaucoup de consultants, d’analystes et d’économistes en profitent


pour attiser ces peurs.
pl
U

C’est tout simplement inutile. Il faut au contraire donner envie, encourager, stimuler, aller
de l’avant.
Car le digital - oublions ce barbarisme, d’ailleurs, a-t-il une quelconque importance ? -, ces
outils qui sont à notre disposition pour réinventer nos métiers, sont de formidables
opportunités de créer et de nous réinventer. « Qui n’avance pas recule » nous répétait
notre professeur d’économie sur les bancs de l’école. Cette règle ne doit rien au digital,
n’a pas été inventée hier et notre époque n’est pas non plus, malgré les croyances, celle
de la mort des métiers ni des entreprises. De tous temps, ceux-ci ont dû s’adapter au
monde qui change. Le XIXe siècle a eu son lot. Relisez Hard Times260.
Les écrits et les rapports sur les entreprises et l’entrepreneuriat sont légion261, même si
les spéculations politiques ou pseudo économiques sur le sujet sont encore bien plus
nombreuses. Mais les démonstrations rationnelles sur l’impact des innovations sur un plan
macroéconomique ne sont pas convaincantes, c’est un euphémisme. Il est en effet facile
de démontrer les effets d’un phénomène d’un point de vue microéconomique mais en tirer
des conclusions générales est bien plus malaisé, car les chiffres font souvent défaut et les
comparaisons internationales sont difficiles également. Restent les impressions et les
sentiments, mais cela ne fait pas la science.
En d’autres termes, la loi qui voudrait que la technologie (si tant est qu’on est capable de
la délimiter, et cela vaut pour le secteur digital également) détruise plus d’emplois qu’elle
n’en crée262 est étayée par certains chiffres et études, et démentie par d’autres263. On
pourra ratiociner à l’envi, cela ne changera rien. En somme, des entreprises meurent et
d’autres naissent, un point c’est tout. C’est la nature même du capitalisme. Et ce n’est pas
une grande découverte264, les périodes de crise comme celle que nous venons de
traverser sont particulièrement lourdes en termes de mortalité des entreprises.
Quoi qu’il en soit, le digital, malgré les spéculations, malgré les doctes discours sera
toujours là. Sauf cataclysme à la Barjavel, il sera bien présent quand nous aurons pris
notre retraite. Toujours là, sous une autre forme et un autre nom, sans doute. Allons !
Soyez braves, et osez voir plus loin, il n’est pas impossible que tout ce jargon indigeste ait
disparu d’ici là, et que l’Internet et tous ses satellites soient devenus si naturels que nous
n’en parlions même plus ou que nous n’ayons plus besoin de les nommer. L’avènement de
l’informatique omniprésente chère à Mark Weiser signifiera la fin de l’informatique, et
Wired d’annoncer d’ailleurs la fin du code.

m
Les entreprises qui n’auront pas appris à utiliser ces outils, quant à elles, seront dans le
i
ss
même état que celles qui, il y a quelques décennies, ont refusé les innovations de leur
A
époque, ni plus ni moins.
y
B

Il n’y a donc pas de temps à perdre en conjectures pour savoir s’il faut se transformer en
d

embrassant les innovations de notre siècle. Mais quand vous le faites, ayez bien cette
de

question en tête : pourquoi (et pour quoi) vous transformer ? Certainement pas pour le
oa

simple plaisir d’être à la mode et de faire le beau dans les journaux.


pl

Alors comment répondre à la question précédente ? En soulignant qu’avant tout, c’est


U

votre entreprise qui en a besoin et non un quelconque gourou du digital, quel qu’il soit.
Votre entreprise peut, avec ces outils, au pire rattraper son retard, mais probablement
mieux, en tirer un avantage concurrentiel. Elle doit aussi apprendre à connaître les
tendances de son secteur, les pratiques du marché et les techniques de base. C’est à ce
prix-là que vous éviterez les erreurs, choisirez les bonnes plateformes, les bonnes
solutions, les bons prestataires, recruterez les bonnes équipes et suivrez les bons
conseils. Peut-être y a-t-il matière à écrire un nouveau livre sur ce sujet, n’hésitez pas à
nous le dire au travers de vos commentaires sur le site amonboss.com ou via les médias
sociaux. Et si votre propre réponse à la question s’éloigne de celle-là, reprenez donc la
lecture de ce livre depuis le début.
En somme, ne vous préoccupez pas des chiffons rouges. Et cultivez votre jardin.
En avant toujours, devise du château de Leskelen dans le Léon
Charles Dickens.
Même cela est discutable en fait, mais il faut bien positiver. En l’occurrence, nous aimerions bien pouvoir bénéficier d’une
mise à jour de l’excellent rapport du Credoc de 2000 : http://bit.ly/credoc2000 malheureusement devenu obsolète
Le point de bascule entre emplois créés et supprimés par la technologie : http://bit.ly/ukemplois
Voir notamment cet article du digital society forum, sponsorisé par Orange : http://bit.ly/digsocforum
Voir ce rapport complet de la CCI de Paris Ile de France d’octobre 2016 : http://bit.ly/CCIdefaillances. La courbe en
question se trouve à la page 4

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Postface
Avec brio, les auteurs de cet ouvrage remettent en perspective l’évolution de la
technologie numérique, comme condition de survie pour les entreprises. En réalité,
l’accélération de l’innovation nous entraîne, en tant qu’être humain tout entier, dans un
écosystème inédit. Car au-delà des organisations commerciales, ce sont les formes
même de nos sociétés qui mutent, et plus profondément encore, la propre intégrité de
notre espèce qui s’effondre.
Car l’être humain tel que nous le connaissons vit sans doute ses derniers instants.
Vous allez me dire que notre espèce n’a pas duré bien longtemps, et vous aurez raison.
Le T-Rex a régné sur la planète pendant des millions d’années, Homo Sapiens dans sa
forme actuelle règne sur le monde depuis quelques milliers d’années. Quant à la
technologie, autant dire qu’elle représente une infime partie de notre Histoire. Un rien, un
instant fugace, une étincelle.
Ce feu qui nous anime donne pourtant naissance à un brasier d’une puissance improbable.
Nous faisons changer le monde à une vitesse sidérante. L’intelligence dite « artificielle »,
la réalité dite « virtuelle », deviennent absolument concrètes, et feront bientôt partie

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intégrante des êtres qui vous nous succéder. Pour la première fois, dans l’Histoire de la
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planète Terre du moins, un être a développé la formidable capacité de donner naissance
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lui-même à sa propre descendance, d’en forger l’essence et les contours. Quand la
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biotechnologie dépasse la biologie, c’est une nouvelle ère qui s’ouvre sous nos pieds.
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Et vous et moi, dans ce maelström ? Une alternative s’offre à nous. Rester sur le bord du
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chemin, à ruminer comme un mantra que « c’était mieux avant », et qu’il faut tout changer
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pour que rien ne change ; une ritournelle à la mode. Ou partir à l’aventure, agir sur le
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monde, lui donner forme, et embarquer pour l’avenir avec l’enthousiasme des explorateurs
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d’autrefois. C’est peut-être la meilleure définition d’un « Chief Digital Officer », en


l’occurrence.
Yann Gourvennec et Hervé Kabla nous poussent clairement à larguer nos amarres. Ils
nous font voyager dans les méandres des enjeux technologiques, économiques, politiques
et humains qui rythment l’existence de celles et ceux qui tentent de faire bouger leurs
organisations, leurs patrons, leurs salariés. Leur vie n’est pas simple, et il faut avant tout
une bonne dose de conviction pour avancer. Il faut du courage, de la persévérance. Il faut
de l’énergie, et si possible, une vision.
Telle est ma philosophie de patron d’agence de communication. Métier ô combien
challengé, envahi par les nouvelles générations, balloté par le chaos de la réinvention de
ses propres clients – les marques. Notre devoir est d’innover, d’élaborer et de porter les
discours, d’échafauder les plans d’un futur radieux. Comment l’imaginer dans un monde
révolutionné par le pouvoir du consommateur, l’irruption permanente de la rupture
technologique ou économique, les incertitudes géopolitiques ? En plaçant, au centre de
tout, le bonheur.
Les motivations profondes des consommateurs n’ont pas changé. L’être humain qui a
satisfait ses besoins primaires ne recherche au fond qu’une seule chose : le bonheur,
quelle que soit sa définition, qui, elle, évolue. J’exhorte les communicants, mais aussi les
gouvernements, les marques, les entreprises, toutes les organisations, et chacun d’entre
nous, à le cibler comme objectif principal. Le reste en découlera.
Avec humour, enthousiasme, décalage et précision, « Le digital expliqué à mon boss »
nous renvoie en creux à cette réalité bien humaine. Car ce qui caractérise Yann
Gourvennec et Hervé Kabla, c’est bien leur état d’esprit positif.
Mûs par quelque chose de plus grand que nous, quel moteur plus puissant pour réussir à
transformer notre quotidien ? Je ne vois rien d’autre que la visée du bonheur pour donner
du sens à la mutation numérique qui nous emporte.
Pierre Calmard
CEO – iProspect France - @PierreCalmard

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Bibliographie
Le digital évolue sans cesse, et vous l’avez sans doute compris, il serait prétentieux de
fixer une liste de livres incontournables pour se familiariser avec ses concepts. La liste de
références que nous vous donnons ici vous permettra d’approfondir quelques notions, ou
de retrouver certaines des idées évoquées dans ce livre. Mais elle ne saurait être
exhaustive, et elle pourra être complétée par d’autres ouvrages à paraître. D’ailleurs, tous
ne traitent pas de digital…
39 Leçons d’économie contemporaine, Philippe Simonnot, Folio, 1998
Au pays de Numérix, Alexandre Moatti, PUF, 2015
Changeons la banque, Benoit Legrand, Le Cherche-Midi, 2015
Du produit vers le service, Eric Hanoune, Philippe Very, De Boeck, 2011
Introduction à la pensée complexe, Edgar Morin, Le Seuil, 1990
Invitation à la philosophie des sciences, Bruno Jarrosson, Éditions du Seuil, 1992
J’ai pensé à tout et pourtant ça ne marche pas, Christophe Faurie, Éditions Kawa, 2015

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La communication digitale expliquée à mon boss, Yann Gourvennec et Hervé Kabla,

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Éditions Kawa, 2013 ss
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La marque et le luxe expliqués à mon boss, Audrey Kabla, Éditions Kawa, 2016
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B

La troisième révolution industrielle : comment le pouvoir latéral va transformer l’énergie,


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l’économie et le monde, Jérémy Rifkin, Amazon Media, 2012


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Le grand bestiaire de la philosophie, par Christian Godin, Éditions du Cerf, 2016


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Le Marketing de la Grenouille, Philippe Jourdan, Valérie Jourdan et Jean-Claude Pacitto,


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Éditions Kawa, 2016


Le social selling expliqué à mon boss, Sylvie Lachkar et Hervé Kabla, Éditions Kawa,
2015
Les médias sociaux expliqués à mon boss, Yann Gourvennec et Hervé Kabla, Éditions
Kawa, 2011
Les start-up expliquées à mon boss, Alexandre Steiner et Matthieu Vetter, Éditions Kawa,
2016
Les vertus de l’échec, Charles Pépin, Éditions Allary, 2015
L’homme à venir, Pierre Calmard, Éditions Télémaque, 2015
L’innovation destructrice, Luc Ferry, Plon, 2014
Propos de O.L. Barenton, confiseur, Auguste Detoeuf, Éditions du Tambourinaire, 1962
Reinventing organizations : a guide to creating organizations inspired by the next stage of
human consciousness, Frédéric Laloux, Nelson Parker, 2014
The myths of innovation, Scott Berkun, O’Reilly, 2007
Thinking fast and slow, Daniel Kahneman, Penguin Books, 2012
Tout savoir sur… La malédiction des start-up - Les créateurs se séparent. Pourquoi ? Guy
Jacquemelle, Éditions Kawa, 2012
Tout savoir sur la sérendipité Henri Kaufman, 2012, Éditions Kawa
Traction : A Startup Guide to Getting Customers, Justin Mares & Gabriel Weinberg, S-
curves Publishing, 2014
Transformation digitale, 5 leviers pour l’entreprise, David Fayon et Michael Tartar,
Pearson, 2014

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La transformation digitale dans les services (hors Banque et Assurance) en chiffres
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Un livre à mettre dans toutes les mains : les 39 leçons d’économie contemporaine du professeur Simonnot
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Xavier WARGNIER
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Dépôt légal : Février 2017
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