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Etude linéaire 2 Le malade imaginaire de Molière

« Castigat ridendo mores », corriger les vices par la vertu du rire, telle était la
devise de Molière quand il écrivait ses pièces de théâtre. Le malade Imaginaire
a été mis en scène en 1673, c’est une comédie –ballet commandée par le roi à
Molière, il y critique les hommes qu’on appelle aujourd’hui Hypocondriaque, et
les médecins de son époque à travers le personnage d’Argan, un riche
bourgeois qui se croit malade, aimant les médecins, il va jusqu’à contrarier les
projets de mariage de sa fille Angélique avec Cléante.
Le passage à étudier est extrait de l’acte III, scène 10, « donnez-moi votre
pouls…votre médecin est une bête »Toinette la domestique de la maison, se
déguise en médecin pour dégouter Argan de la médecine en l’effrayant. C’est
une scène comique à laquelle Béralde, son frère assiste. Molière fait la satire
des médecins. Le texte se divise en trois parties :
-La palpation du pouls de « donnez-moi votre pouls….d’autres disent que c’est
de la rate »
-l’interrogatoire en vue du diagnostic « ce sont tous des ignorants, c’est du
poumon que vous êtes malade….et surtout de boire mon vin fort trempé »
- le diagnostic contradictoire final « Ignorantus…votre médecin est une bête »
Première partie :
L’auscultation commence par le comique de geste « donnez-moi votre pouls »
au lieu de donnez-moi votre bras. Les paroles de Toinette font rire car elle parle
comme si le pouls est une personne « allons que l’on batte comme il faut….ce
pouls-là fait l’impertinent » Il y a une personnification du pouls.
Ensuite, le fait qu’elle se déguise en médecin pour jouer la comédie à Argan
c’est du théâtre dans le théâtre. C’est le comique de situation. Elle se met en
valeur et vante ses compétences « je vous ferai bien aller comme vous
devez » ; elle parle avec autorité et devance les éventuels doutes qu’Argan
pourrait avoir à son sujet « je vois que vous ne me connaissez pas encore. Qui
est votre médecin ? » « Cet homme-là n’est pas écrit sur mes tablettes entre
les grands médecins ! » Elle discrédite le médecin d’Argan, monsieur Purgon,
afin de détruire la confiance qu’il a en lui. En effet, à l’époque, il existe deux
écoles importantes pour former les médecins, celle de Paris et celle de
Montpelier, les autres ne sont pas reconnues. Toinette veut qu’Argan
réfléchissent à cette éventualité, que Mr Purgon pourrait être un charlatan.
Ensuite elle lui demande son diagnostic pour mieux le contester » De quoi dit-il
que vous êtes malade ? » La réponse d’Argan donne la possibilité à Toinette de
montrer que les diagnostics ne sont pas fiables et dépendent du médecin : » il
dit que c’est du foie et d’autres disent que c’est de la rate ». La diversité des
diagnostics permet à Toinette d’affirmer un résultat fantaisiste aussi « Ce sont
tous des ignorants, c’est du poumon que vous êtes malade »
On en arrive à la deuxième partie avec l’interrogatoire du malade qui
s’effectue avec le comique de mot et la stichomythie. On a la répétition
mécanique d’un mot dans cette scène qui fait la satire des médecins. Ce sont
les mots « le poumon » et « ignorant » qui sont répétés à plusieurs reprises
avec autorité sans que ces mots soient logiques avec ce qui aurait été dit avant.
Il y a un décalage dans le dialogue qui fait rire. Elle lui demande ce qu’il ressent
« que sentez-vous ? » Argan lui décrit tous ces petits mots quotidiens « maux
de cœur, lassitude par tous les membres, douleurs de ventre, douleur de tête,
voile devant les yeux » il décrit les douleurs normales d’un homme de son âge,
donc rien de grave. La répétition de Toinette « le poumon » fait donc rire et
ridiculise Argan qui fait apparaitre un comique de caractère. C’est un
hypocondriaque. Tout est prétexte à la maladie.
De la même manière, elle conduit l’interrogatoire vers ses habitudes car elle le
connaît bien, mais lui l’ignore et va croire que c’est un effet de ses
compétences qu’elle puisse connaitre si bien ce qu’il aime. « Vous avez appétit
à ce que vous mangez ? Vous aimez boire un peu de vin ? Il vous prend un petit
sommeil après le repas et vous êtes bien aise de dormir ? » Ces trois faits ne
sont pas des signes de maladie mais des signes de bonne santé. Le « oui
monsieur » d’Argan montre qu’il ne se rend pas compte combien Toinette se
moque de lui. Puis elle l’interroge sur ce qu’il mange, et il en donne la liste
« du potage, de la volaille, du veau, du bouillon, des œufs frais, du vin coupé
avec de l’eau » c’est un régime pour malade à l’époque. Il y a encore la
répétition mécanique d’un mot « ignorant » qui fait rire.
Troisième partie :
Le dernier argument apporté par Toinette pour convaincre son patient réticent
à la croire est le latin « ignorantus, ignoranta, ignorantus » elle imite les
médecins de l’époque de Molière qui utilisait cela pour abuser de leur patient
et tromper leur confiance. Cela fait savant. La répétition vaut pour
argumentation pour Toinette. Ensuite, elle s’empresse de dire le contraire de
ce qu’on a prescrit « il faut boire votre vin pur…pour épaissir votre sang qui est
trop subtil » le vin est reconnu pour ses vertus médicinales en quantité
raisonnable à l’époque. Puis, elle utilise des hyperboles « bons gros bœuf, bon
gros porc, bon fromage de Hollande, du gruau et du riz, des marrons et des
oublies » c’est un régime alimentaire riche en graisse et en sucre, lourd et long
à digérer. Elle termine, enfin, par une critique méprisante de monsieur Purgon
« votre médecin est une bête » l’adjectif est utilisé à double sens, c’est à dire
qui malmène ses patients et qui est un ignorant.

Cette scène offre une richesse de procédé comique au théâtre, on a le


comique situation, avec Toinette déguisée en médecin, le comique de
caractère avec Argan en malade naïf, le comique de mot dans la stichomythie,
le comique de geste avec la palpation du pouls, et la satire avec la critique du
comportement des médecins du 17 ème siècle. Molière s’est vengé de ceux qui
ont été incapable de le soigner de sa tuberculose.

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