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TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PARIS

N°2306532/9 RÉPUBLIQUE FRANÇAISE


___________

SYNDICAT DES AVOCATS DE FRANCE et autres


___________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

M. Marino
Juge des référés
___________ Le juge des référés

Ordonnance du 28 mars 2023


___________

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 27 mars 2023 à 18h41, et un mémoire complémentaire,


enregistré le 28 mars 2023, le syndicat des avocats de France, la ligue des droits de l’homme, le
syndicat de la magistrature, l’union syndicale Solidaires et M. Patrick Baudouin, représentés par
le cabinet Andotte avocats (Aarpi), demandent au juge des référés :

1°) d’ordonner, sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-2 du code de justice
administrative, la suspension de :
o l’arrêté n° 2023-00343 du 27 mars 2023 du préfet de police portant mesures de
police applicables à Paris à l’occasion d’appels à manifester du lundi 27 mars 2023 à 17h00 au
mardi 28 mars 2023 à 3h00 publié au recueil des actes administratifs le 27 mars 2023 à 17h30 et
non affiché en préfecture ;
o la décision révélée du préfet de police d’interdire, chaque jour, en fin d’après-midi
et en soirée, tous les cortèges, défilés et rassemblements annoncés ou projetés non déclarés ;
o la décision révélée du préfet de police de publier les arrêtés portant mesures de
police applicables à Paris à l’occasion d’appels à manifester postérieurement à la date d’entrée en
vigueur fixée par les arrêtés et à la date de mise en œuvre effective sur le terrain ;

2°) de mettre à la charge de l’État une somme de 3 000 euros en application de l’article
L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :


- l’urgence est caractérisée dès lors que l’arrêté à vocation à s’appliquer le jour même
de son affichage ;
- l’arrêté du 27 mars 2023 porte une atteinte grave et manifestement illégale aux
libertés d’aller et de venir, d’expression, personnelle et de manifester ;
- l’arrêté est illégal en raison de son caractère général et absolu, la mesure n’est pas
nécessaire, d’autres mesures moins restrictives de liberté pouvaient prévenir plus efficacement les
troubles allégués, la mesure n’est ni adaptée, ni proportionnée, elle est disproportionnée tant dans
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son champ spatial que temporel, elle prévoit une délégation illégale du pouvoir de police
administrative du préfet de police aux représentants sur place de l’autorité de police ;
- la décision révélée du préfet de police d’interdire, chaque jour, en fin d’après-midi
et en soirée, tous les cortèges, défilés et rassemblements annoncés ou projetés non déclarés et la
décision révélée du préfet de police de publier les arrêtés portant mesures de police applicables à
Paris à l’occasion d’appels à manifester postérieurement à la date d’entrée en vigueur fixée par les
arrêtés et à la date de mise en œuvre effective sur le terrain portent atteinte au droit au recours
effectif dès lors que leur publication tardive ne permet pas de les contester devant le juge des
référés, au principe de non rétroactivité puisqu’ils sont appliqués antérieurement à leur publication
et permettent de mettre en œuvre des opérations de police sur la base de textes non publiés, ainsi
qu’aux libertés d’aller et de venir, de réunion et de manifester.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Le président du tribunal a désigné M. Marino pour statuer sur les demandes de référé.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : « Saisi d’une


demande en ce sens justifiée par l’urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures
nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit
public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public aurait porté, dans
l’exercice d’un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés
se prononce dans un délai de quarante-huit heures. ». Aux termes de l'article L. 522-1 du même
code : « Le juge des référés statue au terme d'une procédure contradictoire écrite ou orale.
Lorsqu'il lui est demandé de prononcer les mesures visées aux articles L. 521-1 et L. 521-2, de les
modifier ou d'y mettre fin, il informe sans délai les parties de la date et de l'heure de l'audience
publique (...) ». L'article L. 522-3 de ce code dispose : « Lorsque la demande ne présente pas un
caractère d'urgence ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève
pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal
fondée, le juge des référés peut la rejeter par une ordonnance motivée sans qu'il y ait lieu
d'appliquer les deux premiers alinéas de l'article L. 522-1. ». Enfin aux termes du premier alinéa
de l’article R. 522-1 du code précité : « La requête visant au prononcé de mesures d’urgence doit
(...) justifier de l’urgence de l’affaire. ».

2. Par une requête enregistrée le 27 mars 2023 à 18h41, le syndicat des avocats de
France, la ligue des droits de l’homme, le syndicat de la magistrature, l’union syndicale Solidaires
et M. Patrick Baudouin demandent au juge des référés d’ordonner, sur le fondement des
dispositions de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, la suspension de l’arrêté
n° 2023-00343 du 27 mars 2023 du préfet de police portant mesures de police applicable à Paris à
l’occasion d’appels à manifester du lundi 27 mars 2023 à 17h00 au mardi 28 mars 2023 à 3h00
dont ils font valoir qu’il a été publié au recueil des actes administratifs le 27 mars 2023 à 17h30 et
n’a pas été affiché en préfecture. Par cet arrêté, le préfet de police a interdit tout rassemblement
non déclaré ainsi que le port et le transport d’armes dans certains secteurs de Paris et a autorisé les
représentant sur place de l’autorité de police à prendre des mesures complémentaires à celles fixées
par l’arrêté en fonction de l’évolution de la situation lorsque les circonstances l’exigent.
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3. Par cette même requête, le syndicat des avocats de France, la ligue des droits de
l’homme, le syndicat de la magistrature, l’union syndicale Solidaires et M. Patrick Baudouin
demandent également au juge des référés d’ordonner, sur le fondement des dispositions de l’article
L. 521-2 du code de justice administrative, la suspension de la décision révélée du préfet de police
d’interdire, chaque jour, en fin d’après-midi et en soirée, tous les cortèges, défilés et
rassemblements annoncés ou projetés non déclarés et la décision révélée du préfet de police de
publier les arrêtés portant mesures de police applicables à Paris à l’occasion d’appels à manifester
postérieurement à la date d’entrée en vigueur fixée par les arrêtés et à la date de mise en œuvre
effective sur le terrain.

4. En premier lieu, s’agissant de l’arrêté du 27 mars 2023, compte tenu des conditions
de la saisine du juge des référés, et nonobstant l’heure de publication invoquée de cet arrêté, cette
saisine ne permet pas la convocation des parties à une audience avant le début prévu des
rassemblements faisant l’objet de l’interdiction contestée et ne permet ainsi pas au juge des référés
de statuer utilement, au terme d'une procédure contradictoire, avant le début de ces
rassemblements. Par suite, au moment où l’ordonnance est rendue, il y a lieu de constater que la
requête a perdu son objet. Il n’y a pas lieu d’y statuer.

5. En second lieu, la circonstance que le préfet de police prenne régulièrement des


arrêtés similaires à l’arrêté du 27 mars 2023 précité ne révèle pas l’existence de décisions révélées
distinctes des arrêtés en cause. Dès lors les requérants ne sont pas recevables à demander au juge
des référés de suspension les décisions révélées qu’ils invoquent.

6. Il résulte de ce qui précède que, la requête doit être rejetée selon la procédure prévue
à l’article L. 522-3 du code de justice administrative, y compris les conclusions présentées au titre
de l’article L. 761-1 du même code.

ORDONNE:

Article 1er : La requête du syndicat des avocats de France, de la ligue des droits de l’homme, du
syndicat de la magistrature, de l’union syndicale Solidaires et de M. Patrick Baudouin est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée au syndicat des avocats de France, premier
dénommé, pour l’ensemble des requérants.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Fait à Paris, le 28 mars 2023.

Le juge des référés,

Y. MARINO

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne


ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre
les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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