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Ecole d’Economie de la Sorbonne

Licence 3 de Sciences Economiques

TD d’histoire de la pensée économique

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Cours de Nathalie Sigot et Goulven Rubin

DOSSIER 1

Economie et morale - le cas de l s re

Remarque : ce dossier ne comporte pas de guide de lecture. Il s’agit du


premier dossier, que vous étudierez avec l’aide de votre chargé.e de TD. La
lecture des textes avant le TD est indispensable.
DOSSIER 1 – Economie et morale

TEXTE 1 : ARISTOTE

Les politiques, trad. P. Pellegrin, Paris : GF-Flammarion


(extraits pp. 115-122).
une quand la communauté s'agrandit. Car
CHAPITRE 9 les membres de la famille mettaient toutes
les choses en commun, alors que ceux qui
La chrématistique s'étaient séparés en familles distinctes en
avaient certes beaucoup en commun, mais
« Mais il y a un autre genre d'acquisition aussi d'autres manières qui,
que l'on appelle proprement, et il est juste nécessairement, selon les besoins firent
de l'appeler ainsi, la chrématistique du fait l'objet d'échanges, comme cela se pratique
de laquelle il semble n'y avoir nulle borne à aussi dans beaucoup des peuplades
la richesse et à la propriété. Beaucoup a barbares, selon la formule du troc. Car
pensent qu'elle ne fait qu'un avec l'art dont alors on échange des choses utiles les
on vient de parler du fait de leur proximité. unes contre les autres et rien de plus, par
Mais elle n'est ni identique à l'art en exemple on donne et on reçoit du vin contre
question ni beaucoup éloignée de lui : de du blé, et ainsi pour chaque chose de cette
ces deux arts l'un est naturel, l'autre n'est sorte. Et cet échange-là n'est ni contraire à
pas naturel mais provient plutôt d'une la nature ni une espèce de chrématistique ;
certaine expérience technique. il existait, en effet, pour compléter l'autarcie
naturelle. C'est pourtant de lui qu'est
Commençons l'étude de la chrématistique logiquement venue la chrématistique.
par ceci : de chaque objet possédé il y a un
double usage ; dans les deux cas il s'agit Car quand on eut plus recours à l'étranger
d'un usage de la chose en tant que telle, pour importer ce dont on manquait et
mais pas en tant que telle de la même exporter ce qu'on avait en surplus,
manière : l'un est propre et l'autre n'est pas nécessairement s'introduisit l'usage de la
propre à l'objet. Ainsi une chaussure sert à monnaie. Il n'est pas aisé, en effet, de
chausser et à être échangée ; ce sont bien transporter toutes les denrées
deux usages d'une chaussure, car celui qui naturellement indispensables; c'est
troque une chaussure avec celui qui en a pourquoi pour les troquer on convint de
besoin contre de l'argent ou de la nourriture quelque chose que l'on pût aussi bien
se sert aussi de la chaussure en tant que donner que recevoir, et qui, tout en étant
chaussure, mais pas selon son usage elle-même au nombre des choses utiles, ait
propre. En effet, elle n'a pas été fabriquée la faculté de changer facilement de mains
en vue du troc. pour les besoins de la vie, par exemple le
fer, l'argent et toute autre matière
Et il en est de même pour les autres choses semblable, dont la valeur fut d'abord
que nous possédons. Car il y a échange de simplement définie par les dimensions et le
tout : il a son origine première dans ce fait poids, puis finalement par l'apposition d'une
conforme à la nature que les hommes ont empreinte, pour éviter d'avoir sans cesse à
parfois plus, parfois moins des choses qu'il les mesurer ; l'empreinte, en effet, fut
faut. En ce sens il est clair que le petit apposée comme signe de la quantité du
commerce n'appartient pas par nature à la métal. Une fois donc la monnaie inventée à
chrématistique, car c'est seulement dans la cause des nécessités du troc, naquit une
mesure où il le faut qu'on en vint autre forme de chrématistique, la forme
nécessairement à pratiquer le troc. commerciale qui se manifesta sans doute
d'abord de manière simple, puis,
Certes, dans la première communauté, l'expérience aidant, avec plus d'art en
c'est-à-dire la famille, il est manifeste que le cherchant d'où et comment viendrait, par
troc n'a aucune fonction, mais il en acquiert l'échange, le plus grand profit possible.

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DOSSIER 1 – Economie et morale

C'est pourquoi les gens pensent que la côté, il semble que toute richesse ait une
chrématistique a principalement rapport limite, alors que, d'un autre côté, nous
avec la monnaie, et que sa fonction est voyons le contraire se produire dans les
d'avoir les moyens de faire connaître d'où faits, car tous ceux qui pratiquent la
l'on peut tirer une grande quantité de chrématistique augmentent sans limite
valeurs : elle semble, en effet, produire de leurs avoirs en argent.
la richesse et des valeurs. Car on pense
souvent que la richesse c'est une masse de La cause de cette confusion c'est la
numéraire, parce que c'est au numéraire proximité de ces deux arts, car les emplois
qu'on rapporte la chrématistique sous sa des deux formes de l'art d'acquérir ont un
forme commerciale. point commun, étant emploi de la même
chose : la propriété est également utilisée
Parfois à l'inverse, on considère la monnaie par ces deux arts, mais pas de la même
comme bagatelle et pure convention en manière, l'une s'en servant en vue d'autre
rien naturelle, du fait que si ceux qui s'en chose, l'autre en vue de son pur et simple
servent changent leurs accords, elle n'a accroissement. Voilà pourquoi certains ont
plus ni valeur ni utilité pour se procurer l'impression que la pure et simple
aucun des biens indispensables, et tel qui augmentation du patrimoine est l'objet de
sera riche de numéraire manquera souvent l'administration familiale, et ils s'acharnent
de la nourriture indispensable. Et c'est une à penser qu'il faut préserver ou augmenter
étrange richesse que celle dont le sans limite son patrimoine en numéraire.
propriétaire meurt de faim, comme mourut
le fameux Midas, homme insatiable, dont la La raison de cette attitudes c'est qu'on fait
fable nous dit que, selon sa prière, tout ce effort pour vivre et non pour mener une vie
qu'on lui présentait était changé en or. heureuse, et comme le désir de vivre n'a
pas de limite, les moyens eux aussi on les
C'est pourquoi on cherche, et c'est à juste désire sans limite. Et même ceux qui
titre qu'on le cherche, une conception s'efforcent de mener une vie heureuse
différente de la richesse et de la recherchent ce qui procure les jouissances
chrématistique. Car la chrématistique physiques, de sorte que, comme celles-ci
diffère de la richesse naturelle : celle-ci semblent dépendre de ce qu'on possède,
concerne l'administration familiale, celle-là toute leur vie ils la passent occupés par
le commerce qui n'est pas créateur de l'acquisition de richesses, et c'est ainsi
valeurs absolument, mais par échange de qu'on en est arrivé à cette autre forme de
valeurs. Et elle semble concerner la l'art d'acquérir : la chrématistique.
monnaie, car la monnaie est principe et fin
de l'échange. Et cette richesse, qui provient Car la jouissance résidant dans un excès,
de la chrématistique ainsi comprise, les gens cherchent ce qui produit cet excès
est sans limite. De même en médecine il n'y qui donne la jouissance. Et s'ils ne peuvent
a pas de limite dans la recherche de la pas y parvenir par la chrématistique, ils s'y
santé, et chacun des arts poursuit sans efforcent par d'autres moyens, faisant de
limite son but, car c'est avant tout lui qu'ils chacune de leurs facultés un usage
veulent atteindre, par contre pour ce qui est contraire à la nature. Le but du courage, en
de m en mi en e a eind e la effet, n'est pas de faire de l'argent mais de
fin, ils ne sont pas sans limite, car la fin leur rendre hardi, de même pour la stratégie et
est à tous une limite. Il en est de même pour la médecine, dont le but n'est pas de faire
la chrématistique ainsi comprise : elle n'a de l'argent mais de donner la victoire et la
pas de but qui puisse la limiter, car son but santé. Pourtant ces gens-là rendent tout
c'est la richesse et la possession de cela objets de spéculation, dans l'idée que
valeurs. c'est cela le but et qu'il faut tout diriger vers
ce but.
L'administration familiale, par contre, à
l'inverse de la chrématistique, a une limite, Nous avons donc parlé de l'art d'acquérir
car ce genre de richesse n'est pas l'objet de non nécessaire, la chrématistique, en
l'administration familiale. C'est que, d'un
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DOSSIER 1 – Economie et morale

disant ce qu'elle est et pour quelle cause indispensables. Puisque, d'un certain point
nous en avons besoin ; quant à la forme de vue, il appartient au chef de famille et au
nécessaire de l'art d'acquérir nous avons gouvernant de veiller aussi sur la santé, et
montré qu'elle est différente de la première, que, d'un autre point de vue, c'est l'affaire
qu'elle concerne l'administration familiale du médecin, il en est de même pour les
naturelle relativement au ravitaillement en biens : d'un certain point de vue c'est au
nourriture, et qu'elle n'est pas, comme chef de famille de s'en occuper, et d'un
l'autre, sans limite, mais qu'elle a une autre point de vue ce n'est pas son affaire
borne. mais celle d'un art subordonné.

Mais, comme on l'a dit plus haut, il faut


CHAPITRE 10 considérer que ces biens sont
essentiellement fournis par la nature : car
Acquisition naturelle et usure c'est la fonction de la nature de fournir de la
nourriture à l'être une fois qu'il est né : pour
Ainsi s'éclaire la difficulté rencontrée au tout vivant, en effet, ce qui reste de la
début : l'art d'acquérir des biens dépend-il matière d'où il a été formé sert de
du chef de famille et de l'homme politique, nourriture. C'est pourquoi est conforme à la
ou au contraire faut-il que ces biens soient nature pour tous les hommes l'art
déjà à leur disposition ? De même, en effet, d'acquérir aux dépens des fruits de la terre
que l'art politique ne fabrique pas et des animaux.
d'hommes, mais les reçoit de la nature pour
s'en servir, de même pour la nourriture Cet art d'acquérir, comme nous l'avons dit,
aussi il faut bien que la nature la donne en a deux formes, une forme commerciale et
donnant terre, mer ou une autre chose de une forme familiale celle-ci est
cette sorte. A partir de là il est du devoir du indispensable et louable, celle qui concerne
chef de famille de répartir ces biens. Car l'échange, par contre, est blâmée à juste
l'affaire du tisserand n'est pas de produire titre car elle n'est pas naturelle mais se fait
les différentes sortes de laine, mais de s'en aux dépens des autres ; et il est tout à fait
servir, et de reconnaître laquelle est de normal de haïr le métier d'usurier du fait
bonne qualité et appropriée à son dessein, que son patrimoine lui vient de l'argent lui-
laquelle est défectueuse et inappropriée. même, et que celui-ci n'a pas été inventé
pour cela. Car il a été fait pour l'échange,
Car s'il n'en était pas ainsi on pourrait se alors que l'intérêt ne fait que le multiplier. Et
demander pourquoi l'art d'acquérir serait c'est de là qu'il a pris son nom : les petits,
une partie de l'administration familiale, en effet, sont semblables à leurs parents, et
alors que la médecine n'en serait pas une l'intérêt est de l'argent né d'argent. Si bien
partie, alors même que les membres de la que cette façon d'acquérir est la plus
famille doivent posséder la santé au même contraire à la nature. »
titre que la vie ou toute autre des choses

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DOSSIER 1 – Economie et morale

TEXTE 2 : François QUESNAY

« OBSERVATIONS SUR L INTÉR T DE L ARGENT », Journal de


ag ic e, d commerce et des finances, Janv. 1766.
Le fur1 l in e ig le de an fai e a i, le e en il e
l a gen , e f nd de d i le a de engagé de payer au prêteur.
c nf mi il a a ec le e en de bien -
fonds et avec le gain que procure le Mais cette raison décisive prouve aussi que
commerce de revendeur. Avec de l a gen , ce revenu a manifestement ses bornes
n ac ie la i e le e en d n dan l d e de la na e e dan l d e de
bien-f nd ; la i d n bien ien lie la ju ice, i limi en le d i a le e
d ca i al de l a gen a l ac i i i n a e en il e e ige de l em n e .
de ce bien qui, en outre, rapporte Il e ai d nc inj e d e ige n e en i
annuellement un revenu. Ainsi par cet excéderait ces bornes, et les lois du
e em le de l a gen n ac ie n revenu souverain doivent avoir pour objet de
annuel avec la conservation du capital. réprimer une injustice si manifeste.
D nc a ec de l a gen n e , dan l d e
de la justice la plus exacte, acquérir un Le taux de l in de l a gen e d nc,
revenu annuel avec la conservation du comme le revenu des terres, assujetti à une
ca i al de l a gen i c e le e en . l i na elle i limi e l ne e l a e.
N di n dan l d e de la j ice la
l e ac e, i e c e le bien ac i Le e en de e e e l n e ac i
a ec de l a gen i d i ce e en an a ec de l a gen n e ne i n d
rien retrancher de ce qui appartient à autrui. produit net qui peut être vendue à
l ac e avec la propriété du fonds. Or
Q and el n e de l a gen , il ali ne c e ce e i n de d i ne c nn e d
donc une richesse qui de droit peut lui ende e de l ache e i d cide d i
rapporter un revenu avec la conservation de l ac i i i n.
d ca i al il ali ne.
La an i de e en e l n e
On ai bjec e e e de l a gen ac i a l acha d ne e e n e d nc
ne a ache e n bien i d i e n ni a bi ai e ni inc nn e ; c e ne mesure
revenu, sans rien retrancher de ce qui manifeste et limitée par la nature, qui fait la
appartient à autrui, sous le prétexte que cet l i a ende e l ache e ; e n
argent employé à un bien-fonds lui all n e e dan l d e de la
rapporterait ce revenu sans rien retrancher j ice, c e ce e m me l i i d i gle
de ce i a a ien a i ; e il e le a de l in d e en de l a gen
c nn e l a gen e l n em n e placé en constitution de rentes perpétuelles
ne a e a l em n e le e en dans un royaume agricole.
que le prêteur exige.
Il y a, dit- n, de i e lace l a gen
Mai ce e bjec i n n a ai a c ne constitution de rentes perpétuelles, qui
autorité contre le prêteur ; elle lui est même doivent inspirer des considérations en
totalement étrangère : car en aliénant son fa e de ce em l i de l a gen . S il a de
a gen , il e i e de l age d ne iche e risques, il y a aussi pour le rentier
qui peut lui rapporter un revenu avec la l a an age de n e in cha g d in de
conservation du capital sans faire tort à l en e ien de n e en , e de e c e
a i. C e l em n e , i de ien un état oisif. Il y a des incertitudes partout :
possesseur de cette richesse, à en faire un i le gen e d e en d n il agi ai
emploi par lequel elle puisse lui rapporter, l ab i de ince i de , la ma e de fa
revenus surpasserait de beaucoup celle

1
Synonyme ancien de « taux ».

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DOSSIER 1 – Economie et morale

de e en el d n a me. Ce fa d d mmage a, i il le e , a
revenus eux-m me n a aien d nc a l em l i de ce a gen m me, de la en e
de base ; ils dévasteraient le territoire. Il est il e cha ge de a e ann ellemen e
d nc e en iel il ai n c n e id e i , il n ein a ce e en e a le
qui en modère les progrès, autrement les remboursement volontaire du capital.
terres tomberaient à vil prix et dans le
d i emen : l a gen ne e ai em l Mais le prêteur ne peut présumer avec
en ac i i i n de en e ; mai bien raison, pour décider lui-même
l a gen man e ai a i, a ce n a bi ai emen d a de l in de n
a me i n a a de mine ne e a gen , e l em n e a l alemen
ac i de l a gen e a le d ci n se dédommager par un plus grand revenu
du territoire ; les propriétaires, les revenus que celui que les terres produisent,
des biens, les rentiers, les rentes, les puisq il n a e le e e i d i en
capitaux tomberaient dans le même ellemen n e en , e il n a e ce
précipice. revenu qui puisse servir de prétexte au prêt
de l a gen , en c n i i n de en e
Rien ne peut réellement produire de revenu perpétuelles. Car il ne saurait y avoir de loi
que la terre et les eaux. On peut dire positive, constante, qui puisse fixer
simplement la terre car sans terre les eaux éq i ablemen le a de l in de
ne produiraient rien. Ainsi le prétexte du l a gen , i n adme d a e l i e la l i
de l a gen in ne e d nc e na elle ; c e -à-di e l a el de
f nd dan l d e na el e dan l d e de revenus produits par la nature, et qui
la justice que sur le rapport de conformité e en e ac i a ec de l a gen : la l i
de ce in a ec le e en el n e du prince peut seulement assigner des
ac i a ec de l a gen a l acha de limites que le prêteur, qui pourrait abuser
terres : car il est impossible de concevoir d be in de l em n e , ne e a e,
d a e e en el n i e ac i en lai an d aille le c n ac an lib e
a ec de l a gen an le end e de traiter à un moindre intérêt ; mais elle
injustement sur ce qui appartient à autrui. n en e a m in j diciable a
débiteur dans les cas litigieux où le juge a
Je n ign e a e le fa e id e de à décider lui-m me le a de l in
iche e e l n c i e le c mme ce de l a gen , i al n e jamai l ba
produit, fourniront une multitude pour le créancier que celui qui est marqué
d bjections captieuses qui viendront a la l i, i en diff en em ce
échouer contre ce principe inébranlable ; taux soit exorbitant.
nous ne les préviendrons pas, pour éviter
ici une discussion prématurée et superflue Cependant il est nécessaire que le juge ait
; nous parlerons seulement dans la suite en tout temps un renseignement certain
des emprunts passagers usités dans le pour asseoir ses décisions ; mais il serait
commerce, qui sont d n a e d e e bien plus équitable de suivre une règle
les emprunts contractés à constitution de authentique qui serait renouvelée au moins
rentes perpétuelles. tous les dix ans, et qui ne serait que
déclaratoire du rapport actuel et le plus
On ai a e e l a gen c n id en l i- commun du prix des terres avec leur
même est une richesse stérile, qui ne revenu. Telle serait à chaque
d i ien, e e dan le acha il n e en ellemen , a e em le, l e ima i n
reçu que pour un prix égal à celui de la unanime des notaires du district de
ch e e l n ach e. Ain i l a gen ne chacune des villes principales de chaque
e c e de e en e a l acha ince, il e aien engag de
d n bien i en d i, en l ali nan remettre aux greffes des juridictions de leur
un emprunteur qui peut en faire le même ville pour y être confi m e ; e d il e ai
em l i, a ce e effec i emen l a gen envoyé des extraits aux greffes des cours
peut servir à cet emploi, et que celui qui le souveraines de la province.
prête à constitution de rente peut présumer
a ec ai n e l em n e le

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DOSSIER 1 – Economie et morale

Ce renseignement aurait, dans le cas le commerce des revendeurs est toujours


li igie le a de l in de l a gen , dans une nation en raison des achats
le même effet pour asseoir les décisions de elle e fai e. Ce c mme ce n a a
la justice que celui des mercuriales qui be in d e . Le ma chand
chaque marché consignent au greffe de la surabondent toujours dans les royaumes
juridiction du lieu le prix des grains, pour opulents ; mais ce ne sont pas les
décider sur les redevances en grains dans marchands qui enrichissent un royaume, ce
les cas litigieux, le taux du revenu qui doit n le iche e d n a me i
être payé par les débiteurs aux créanciers. multiplient les marchands et qui y font
Le rapport naturel de conformité du taux de fle i ce n a elle le c mme ce, c e -
l in de l a gen a ec le i e le e en à-dire le commerce des revendeurs,
des terres, exige la même règle pour c mme ce i n a be in d a e ec i n
décider équitablement entre le créancier et e l a ai de iche e de la na i n ;
le débiteur dans les cas litigieux. mais le commerce des marchands, le
c mme ce de la na i n, l ind ie, le l e,
Le e d a gen in , i e les revenus du royaume, les frais du
couvrent du manteau de commerce pour le commerce, tout ce qui a quelque
a a bi ai e de l in de l a gen , ne communication avec le commerce, a été
man e n a d bjec e e ce e ai confondu ou enveloppé sous la
détruire le commerce si on assujettissait le dénomination générique et équivoque de
a de l in de l a gen ce inci e commerce et dans cette confusion on a
rigoureux du rapport de conformité du taux toujours regardé sans distinction toute
de l in de l a gen a ec le revenu des e ce d em n d a gen in c mme
e e ; ca che e l e e i n ag e de la cheville ouvrière du commerce, et cette
commerce brouille tout : on y confond des opinion triviale a toujours favorisé la
emprunts qui ne sont point de la sphère du c idi de e d a gen in .
commerce, et on légitime même des prêts
à intérêt, très illicites, qui se font dans le Pour se tirer de ce chaos en attendant que
commerce et qui sont également la lumière dissipe les ténèbres, il suffit de
préjudiciables au commerce et à la société. remarquer : 1° que les emprunts à
On c ncl enfin e le i de l a gen c n i i n de en e e elle n n
prêté à intérêt doit être aussi libre et aussi presque jamais lieu dans le commerce,
variable que le prix des denrées aux parce que les fonds des commerçants
marchés, à condition néanmoins que le revenant promptement dans leurs mains,
a de l in i a a i l ne par le débit de leurs marchandises, les
change a in . Ain i n e e l effe eme en m emen en a d ac i e
d ne ca e c n in ellemen a iable, e e le em n a age il n be in
invariable, tandis que le revenu des biens- de faire pour des payements ou pour des
fonds est exposé à des changements achats dans des temps où le courant de
considérables, relativement au prix de le c mme ce ne e i ;2 il
l ac i i i n. Ce c n a i , gg e y a proprement entre les marchands une
par la cupidité de e d a gen e de c mme ce d a gen in i e
in , e c n ai e l d e de la j ice, trafique sur la place comme dans un
ont pour prétexte les prétendus avantages ma ch , e i n a lie en e e ; 3 e
d c mme ce, d n n n a e de n i n les emprunts les plus ordinaires des
erronées et confuses. commerçants sont les emprunts des
marchandises mêmes dont le payement est
On invoque sans cesse la protection du remis au terme prévu par le débit de ces
g e nemen le c mme ce, e c e marchandises ; en sorte que les marchands
toujours pour le commerce de revendeur ne sont, pour ainsi dire, que
e l n a le e jamai le c mme ce commissionnaires les uns des autres ; et
de la vente des productions en première les marchandises elles-mêmes forment en
main, qui forme les revenus du royaume. l g ande a ie le f nd d em n de
Ce endan la na i n ne e ache e leur c mme ce ; 4 il n ne j idic i n
raison de ses ventes ou de ses revenus ; et consulaire pour les affaires contentieuses

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DOSSIER 1 – Economie et morale

qui sont, privativement à toute autre, du de e g n ale i de ien d a an l


ressort du commerce ; en sorte que la f ne e ne e a en if en a e le
j i dence e d c mme ce n infl e progrès.
point sur les affaires contentieuses des
autres classes des citoyens, et que la Ce e cha ge d a de l in de
jurisprudence contentieuse de ceux-ci l a gen a -delà du rapport de la conformité
n infl e in n n l le affai e de où il doit être au plus haut, comme le prix
pur commerce exercé entre marchands. de e e e a ec le e en elle
produisent, cette surcharge, dis-je, est
Ain i le e d a gen in , i ne nécessairement imposée sur ce qui
sont pas marchands par état et qui prêtent a a ien a ci en e l a : a ce
à constitution de ren e e elle , n n elle e c de dan la ali le e en e
a c n d i d in e le c mme ce l n e ac i a ec de l a gen a
je e de la c nf i n dan l d e na el d l acha de e e i, e le , e en
a de l in de l a gen d i e de e en ; ain i il n a l de
constitution de rentes perpétuelles et pour i n en e ce em l i de l a gen e
soutenir, sous le prétexte des avantages du celui du prêt à intérêt démesuré ; car cet
commerce, que le ta de l in de in i e c de l d e na el de
l a gen c n i i n de en e revenus relativement au prix de leur
perpétuelles, doit hausser ou baisser à acquisition, est une déprédation qui
raison de la concurrence du nombre plus retombe injustement sur toute la nation et
ou moins grand de prêteurs ou l a ; mai elle e bien l
d em n e , d l e ai la ine de ed able enc e l e l a e l i-
la nation ; car dans les temps malheureux même le principal débiteur des rentiers, qui
le nombre des emprunteurs surpasserait de ont abusé des besoins pressants de
beaucoup celui des prêteurs : l in de l em n dan de em malhe e
l a gen m n e ai n a e me ; le i d m in n ign e la d n
rentes enfin absorberaient les revenus des intérêt trop fort rend cet intérêt dangereux
biens-fonds ; la culture des terres dépérirait pour eux-m me , a la ai n il e
de l en l ; le be in d em nter f ne e l a e la na i n. Ca l a
deviendraient encore plus pressants ; à ne al e la na i n elle-même
mesure que les revenus diminueraient, le cha g e d n fa dea i e c de le
a de l in de l a gen a gmen e ai f ce e i menace a i d accable ce
sans bornes ; les hypothèques i le enden l e an il ne d i e
expulseraient les propriétaires de leur naturellement.
patrimoine, les terres dégradées et
tombées en friches seraien l ni e Le diff en m en e l n ai
ressource des rentiers qui, eux-mêmes, tenter pour parvenir indirectement à
seraient ruinés par la défection de ceux l all ge , aien n a i as dans un état
il a aien in . d i emen le cc e l n en
espérerait. Il y a alors tant de circonstances
D aille , l e l in m n e l ha i en dan n a me ag ic le
e n a na el, la cha ge end et tant de besoins qui en dérangent les
sur tous les citoyens ; les commerçants, qui effe , il e bea c l de
ne calc len e a l a gen e a le revenir à la règle prescrite par la loi
in il a e, a gmen en le f ai na elle e a la i de l i
de leur commerce à raison du prix du taux abli l d e ; ca n fa e en i
e ce if de l in c an de l a gen , i e c de l d e d e en el e ne
fait baisser le prix des ventes des excroissance parasite dans une nation et
productions en première main et qui un dérèglement désastreux dans
augmente celui des reventes faites par les l c n mie g n ale d n a me
marchands ; ce qui établit une contribution agricole.

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DOSSIER 1 – Economie et morale

TEXTE 3 : Adam SMITH,

Richesse des Nations, (trad. de l'anglais par J.G. Courcelle-


Seneuil), Paris : Guillaumin, 1888.

(Extrait du chapitre IV, Livre II)

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DOSSIER 1 – Economie et morale

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DOSSIER 1 – Economie et morale

Texte 4 : Jeremy BENTHAM

Défense de l'usure, ou Lettres sur les inconvénients des lois


qui fixent le taux de l'intérêt de l'argent (trad. de l'anglais sur la
4e éd. par Saint-Amand Bazard), Paris : Malher, 1828

[...]

[...]

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DOSSIER 1 – Economie et morale

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DOSSIER 1 – Economie et morale

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