La Grande Époque

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ÉDITION 141
WWW.LAGRANDEEPOQUE.COM UN REGARD NOUVEAU SUR UN MONDE EN ÉVOLUTION 1 – 15 OCTOBRE 2008 • BIMENSUEL

► P. 14 Culture du monde ► P. 9 Nouveau regard ► P. 15 Art de vivre

Les mystères Chronique d’un Petite

des caractères critique du 7e histoire de
chinois la courge

Afrique du Sud p. 3
Les pirates somaliens ont-ils révélé
Fin de la
un trafic de combustible nucléaire ? période Mbeki

International p. 5

NTDTV :
l’enjeu de
la vérité

Simon Maina/AFP/Getty Images

Les pirates somaliens ont-ils révélé un trafic de combustible nucléaire venant de Chine ?
États-Unis et Inde renforcent leur partenariat stratégique
LA PRÉSIDENCE de l’Américain
George W. Bush tire à sa fin et certains
événements l’auront marquée de tra-
ces indélébiles. Parmi ceux-ci viennent
automatiquement en tête le 11-sep-
tembre, les guerres d’Afghanistan et
d’Irak subséquentes et puis la déban-
dade économique se déroulant actuel-
lement. Outre ses zones d’ombre, que
certains qualifient volontiers de trous
noirs, Bush aura peut-être aidé à don-
ner un nouveau souffle à Washington
sur la scène internationale en réus-
sissant peu à peu à amener dans son
orbite une Inde jusque-là réticente
mais en plein essor.
Les conséquences de ce rapproche-
ment ont des implications géostratégi-
ques majeures qui ne devraient tarder
à avoir un impact sur la scène interna-
tionale.
Le maillon fort de cette alliance
s’est concrétisé dernièrement par le
pacte de coopération nucléaire États-
Unis-Inde. Bien que l’Inde soit une
puissance nucléaire « rebelle », non
signataire du Traité de non proliféra-
tion (TNP), le Groupe des fournisseurs
nucléaires a levé l’embargo sur le com-
merce nucléaire avec celle-ci au mois
de septembre. Auparavant, l’Agence
internationale de l’énergie atomique
avait également donné le feu vert.
Pour Washington, la voie politique de
ce commerce s’est ouverte plus récem-
ment avec l’approbation de l’entente
Chine p. 5
Lire page 2
La sévère
répression
par le Congrès et le Sénat. En fin de
semaine dernière, Condoleezza Rice,
entre Washington et New Delhi ces
dernières années semble assez pro-
des Ouighours
secrétaire d’État américaine, était en
Inde pour régler certains détails admi-
fonde. Les États-Unis sont prêts à par-
tager leur technologie nucléaire avec
envenime le conflit
nistratifs. un État non-signataire du TNP, alors
L’ouverture de ce nouveau marché qu’ils font des pieds et des mains pour
des atomes ne profitera cependant empêcher – avec peu de succès – le Santé p. 7
pas seulement aux firmes américaines. développement d’un pays signataire,
L’Europe, avec la France en tête, et la soit l’Iran.
Russie pourront également s’aventurer
dans le domaine. D’ailleurs, certains
Affinité politique diront certains,
nécessité stratégique font valoir
Lait contaminé
soulignent que ces pays ont un avan-
tage en la matière sur les firmes amé-
d’autres. En réalité, une heureuse
combinaison des deux. L’Inde, malgré chinois : culture
ricaines, qu’on juge moins à la page tous ses défauts, demeure un gros îlot
technologiquement. démocratique collé sur l’instable Pakis- du secret et
Néanmoins, les États-Unis conser- tan et la Chine dictatoriale.
veront le crédit d’avoir fait débloquer étrangers « naïfs »
les choses. La confiance qui s’est bâtie Lire la suite page 4

ÉCONOMIE KIRGHIZISTAN ENVIRONNEMENT SANTÉ

De la crise financière vers une
dépression ou une mutation vers
une économie future ?
Page 7
Page 2 ................ International
Page 3 ................ International
Page 4 ................ International
La fonte des glaces menace
les moyens de subsistance.
Page 8
Page 5 .............................. Chine
Page 6 .............................. Chine
Page 7 ....................... Économie
Les forêts anciennes ont le vent
en poupe.
Page 10
Page 8 ................... Droits humains
Page 9 .................. Nouveau regard
Page 10 ................. Environnement
Rhumes et allergies dans la
médecine chinoise.
Page 11
Page 11 ............................... Santé et bien-être Page 14 ...... Culture du monde
Page 12 ............................................... Publicité Page 15 ................. Art de vivre
Page 13 ................................ Petites annonces Page 16 ........................ Culture

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2 International www.lagrandeepoque.com 1 – 15 OCTOBRE 2008 ● La Grande Époque

Les étranges navires du golfe d’Aden

Les pirates somaliens ont-ils révélé malgré eux un trafic de combustible nucléaire ?
Les pirates somaliens ont com-
mencé par pêcher le thon
avant de prendre la détesta-
ble habitude de se servir sur les
bateaux croisant par le golfe
d’Aden. Aujourd’hui organi-
sés en petites armées et équi-
pés de fusils d’assaut AK-47 et
de lance-roquettes, ils sont défi-
nitivement sortis de l’artisanat
– et de l’anonymat – en saisis-
sant des yachts de milliardai-
res comme le voilier français Le
Ponant. Encerclés par les bâti-
ments de guerre des plus gran-
des marines du monde qui ont
décidé d’intervenir, ils créent
l’actualité en dévoilant les car-
gaisons inavouables des cargos
passant par leurs eaux : des
armes, des chars d’assaut et
de mystérieux containers venus
de Chine qui tuent en quelques
jours ceux qui les approchent.
S’IL S’AGIT bien, comme on le mur-
mure, de matériel radioactif, les hypothè-
ses les plus graves peuvent être faites.
Même si ce n’est que la moindre d’entre
elles qui se confirme, les pirates du Punt-
land, cette région du nord de la Somalie
qui s’est pourvue de son propre gouver-
nement – et de ses multiples administra- Simon Maina/AFP/Getty Images
tions mafieuses parallèles, auront donné
plus de moyens de pression diplomati- Un navire d’aide alimentaire escorté par des navettes rapides entre dans le port de Mogadiscio.
que à la communauté internationale que
« Je ne connais aucun agent chimique qui
des années de discussions au Conseil de que qu’il sont, au moment de la rédaction
Sécurité des Nations unies. de cet article, encerclés par six navires
Le 21 août, un groupe de pirates
somaliens a pris possession d’un discret fasse perdre les cheveux en quelques jours. américains et refusent toujours de resti-
tuer – sauf à recevoir les 20 millions de
cargo marchand iranien, l’Iran Deyanat.
Une belle prise de 45.000 tonnes, cen-
Cela suggère plutôt un haut niveau de perte dollars qu’ils ont exigés – le cargo ukrai-
nien MV Faina, chargé lui d’armes et de
sément chargée de minéraux et de pro- radioactive. » 33 tanks.
duits industriels. Le navire a été affrété Andrew Mwangura, déjà menacé de
par l’IRISL (Lignes maritimes de la Répu- envisager une information farfelue agitant Ce serait dans tous les cas une bombe procès par l’Iran pour ses déclarations
blique islamique d’Iran) – une entreprise D’après l’IRISL, la cargaison est à des- le spectre des armes de destruction mas- diplomatique sans précédent : les livrai- sur l’Iran Denayat, a été arrêté par la
d’État dirigée par l’armée iranienne et à tination d’un entrepreneur allemand et sive pour attirer l’attention sur le pays. sons d’armes envoyées par Pékin à police kenyane en début de semaine der-
qui le gouvernement américain repro- aucune rançon n’a à ce jour été payée Du côté du gouvernement somalien, on Robert Mugabe en juin cette année pou- nière pour avoir affirmé que ces armes
che de falsifier régulièrement les infor- aux pirates. Pourtant, les propos de affirme déjà sans avoir pu examiner l’Iran vaient encore passer relativement dis- étaient à destination du Sud Soudan.
mations sur ses cargaisons. Le bateau, l’IRISL, accusée d’avoir dans le passé Deyanat que celui-ci contient des armes crètement, mais avec cette nouvelle on L’information est confirmée par les ser-
si on en croit les documents de bord, est facilité l’envoi d’armes et de cargaisons envoyées par l’Iran à l’union des tribu- entrerait dans une dimension nouvelle, vices de renseignement américains mais
parti de la ville de Nanjing, en Chine, à chimiques pour le programme militaire naux islamiques, lesquels ont déjà repris à peine imaginable : l’aide apportée par extrêmement embarrassante pour le
la fin du mois de juillet et devait se diri- iranien, sentent le soufre. L’organisation le contrôle de tout le Sud de la Somalie. un membre permanent du Conseil de Kenya qui a pris une position centrale
ger vers la Hollande pour y décharger du est sur la liste noire de toutes les ban- Le temps trop long mis par le vaisseau Sécurité des Nations Unies à une ou des dans les accords de paix entre Nord et
fer et des produits industriels, indique le ques américaines. pour arriver au golfe d’Aden argumente- nations en pleine course à l’armement Sud Soudan en 2005 et se retrouve donc
Times sud-africain. Pour les experts militaires consultés, rait dans ce sens, de même que le fait nucléaire, et dont les objectifs militaires soupçonné de préparer une reprise du
Le ministre des Ports du Puntland, le tableau clinique des pirates somaliens que d’autres livraisons ont déjà eu lieu commencent par la destruction d’Israël. conflit – en se positionnant en faveur du
Ahmed Siad Nur, indique lui au site Inter- malades ou décédés n’est pas compati- par le passé, avec parfois le soutien du La presse iranienne affirme que les Sud, lequel possède les ressources de
net Long War que parmi les 50 pirates ble avec un empoisonnement chimique… Hezbollah libanais. Mais dans le cas de États-Unis ont offert de payer aux pirates pétrole du pays.
qui ont abordé le bateau, ceux qui sont il reproduit par contre précisément ce qui l’Iran Denayat, on a du mal à comprendre 7 millions de dollars pour avoir accès au Les mercantiles pirates somaliens,
allés inspecter les cales ont perdu leurs se passe lors d’exposition à des radia- qu’il soit passé par le Sud de la Soma- bateau, information que le Pentagone n’a anciens pêcheurs de thon, ont d’abord
cheveux en quelques jours, montré des tions. « C’est impressionnant », dit Jona- lie – fief des islamistes qui contrôlent par pas souhaité commenter. Sans détailler, simplement cherché à protéger leurs
brûlures graves et plusieurs sont morts. than Tucker, expert au Centre James exemple le grand port de Kismayo – sans un haut-responsable du Puntland indique eaux des grandes flottes commerciales
« Oui, certains sont morts », confirme Martin pour la non-prolifération, cité par débarquer les armes supposées, pour se lui laconiquement au journal Long War : lorsque l’appareil politique somalien a
Andrew Mwangura, directeur du pro- la chaîne Fox News. « Je ne connais faire ensuite bêtement arraisonner sur ce « Je peux vous dire que ce bateau explosé en 1991. Ils sont progressive-
gramme d’assistance à la marine est-afri- aucun agent chimique qui fasse perdre qui semble une route toute tracée vers le intéresse beaucoup de monde ». ment passés au racket organisé, contrôlé
caine. « Je ne sais pas le nombre exact les cheveux en quelques jours. Cela canal de Suez. par de grandes familles souvent liées
mais l’information que j’ai reçue est que suggère plutôt un haut niveau de perte L’hypothèse quasi-hollywoodienne FACE À L’ARMÉE à des membres des pseudo-gouverne-
certains d’entre eux sont morts. » radioactive ». que les premières apparences soutien- Avec plus de 60 attaques de bateaux ments successifs de la Somalie. Les
L’IRISL dément vigoureusement ces nent est rien moins que l’envoi d’une depuis début 2008, les pirates du Punt- voici aujourd’hui, involontairement, fai-
« mensonges éhontés », ajoutant dans INFO OU INTOX ? cargaison de combustible nucléaire par land, qui ont fait de cette zone maritime seurs de scoops médiatiques et d’embar-
une communication reprise par le Tehe- Dans un contexte où la Somalie déchi- la Chine, à qui ? à l’Iran en évitant le la plus dangereuse au monde, s’invi- ras diplomatiques. L’image romantique
ran Times : « Ce bateau – l’Iran Diya- rée tire sur tous les leviers possibles pour détroit d’Ormouz, étroitement surveillé tent donc aujourd’hui malgré eux dans la du pirate de jadis n’est pas si loin.
nat – n’a rien de dangereux à bord. » obtenir une aide internationale, il reste à par les forces américaines ? à la Syrie ? grande diplomatie. On en oublierait pres- AURÉLIEN GIRARD

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La Grande Époque ● 1 – 15 OCTOBRE 2008
Afrique du Sud : fin de la période Mbeki
L’ANC fragilisée et divisée.
Rien n’empêchait théorique-
ment le président sud-africain
Thabo Mbeki de finir son man-
dat, comme prévu, en avril
2009 et de laisser alors la tran-
sition se faire vers une pré-
sidence très probablement
offerte à son rival Jacob Zuma,
nouveau président de l’ANC.
Mais le choix des membres du
bureau de l’ANC a été d’hu-
milier Mbeki publiquement, de
l’envoyer au tapis. C’est évi-
demment la dernière étape d’un
règlement de comptes politique
entre les deux hommes, dont la
lutte n’est pas encore terminée,
ce qui ouvre une période d’in-
certitude pour l’Afrique du Sud.
LE CONGRÈS National Africain (ANC)
se déchire depuis le départ de Nelson
Mandela, au point que peu hésitent à
prévoir un éclatement de cette coali-
tion anti-apartheid datant de 1912. Le
20 septembre, l’ANC a lancé une véri-
table bombe en forçant le président
Mbeki à démissionner, suite aux révé-
lations d’un juge chargé des poursui-
tes pour corruption contre Jacob Zuma,
nouveau président de l’ANC et rival his-
torique de Thabo Mbeki. Des proches de
Thabo Mbeki auraient exercé des pres-
sions politiques pour arriver à une con-
damnation de Zuma.
Si Mbeki a immédiatement présenté
sa démission, le règlement de comp-
tes a pris une ampleur imprévue lors-
que près d’un tiers du gouvernement
l’a suivi en démissionnant de même.
Si certains départs sont jugés heureux
– par exemple, celui de la ministre de
la Santé Manto Tshabalala-Msimang,
célèbre pour avoir affirmé qu’on peut
guérir du SIDA en buvant du jus de bet-
terave – celui du ministre des Finances
Trevor Manuel a par contre immédiate-
ment fait dévisser les cours de la bourse
de Johannesburg. Trevor Manuel est
en effet largement considéré comme le
père de la croissance économique du
pays, et il a fallu qu’il précise qu’il res-
tait disponible pour participer à un nou-
veau gouvernement pour reoxygéner les
investisseurs.
Dernier élément pour rassurer le
pays et le continent, le nouveau prési-
dent choisi par l’Assemblée nationale
est Kgalema Motlanthe, homme de con-
ciliation et de compromis. Celui-ci aura la
tâche difficile de maintenir unie jusqu’en
avril prochain une ANC de plus en plus
divisée. « Les sœurs s’attaquent entre
elles et les camarades se sautent à la
Sri Lanka : premier convoi d’aide
pour les milliers de déplacés du nord
LE PROGRAMME alimentaire mon-
dial (PAM) a pu faire parvenir un pre-
mier convoi d’aide alimentaire destiné à
200.000 personnes déplacées dans la
zone contrôlée par le mouvement indé-
pendantiste des Tigres de libération de
l’Eelam Tamoul (LTTE), au nord du Sri
Lanka, a annoncé le 3 octobre l’agence
des Nations unies.
La population a été coupée de l’assis-
tance alimentaire pendant plus de deux
semaines en raison de l’escalade des
combats dans la région, a précisé le
PAM dans un communiqué.
Le convoi transportait suffisamment
de nourriture pour alimenter la popula-
tion pendant une semaine. Au cours des
semaines à venir, le PAM prévoit d’en-
voyer au minimum un convoi d’aide par
semaine qui voyagera de Vavunya par
le point de passage d’Omantai vers les
zones touchées par le conflit. Les con-
vois du PAM transportent également
des fournitures humanitaires au nom
d’autres agences d’aide d’urgence.
« Il est vital qu’un flux régulier d’aide
Des partisans de Mbeki opposés à son départ, devant le Parlement de Cape Town.
gorge », déplorait en décembre dernier
l’ex-femme du Nobel de la Paix, Winnie
Madikizela-Mandela. L’ANC regroupe en
effet des tendances politiques allant des
communistes aux conservateurs, dont
l’union en période de lutte contre l’apar-
theid n’a plus de sens aujourd’hui. Pour
certains, le seul ciment restant au sein
de l’ANC est le copinage : « Aujourd’hui,
nous sommes au gouvernement et les
gens baignent dans l’argent et le pou-
voir. Ils ne veulent pas tout lâcher »,
déplore Kebby Maphatsoe, un militant
historique de l’ANC durant les années de
lutte contre l’apartheid.
LES ÉTAPES D’UN RÈGLEMENT DE
COMPTES
Dans le monde généralement feu-
tré de la politique, quel conflit a pu être
assez grave pour que la revanche soit
une humiliation publique du premier per-
sonnage de l’État ?
Il faut remonter à la présidence Man-
dela, de 1994 à 1999, pour en voir les
premières marques. Thabo Mbeki, alors
humanitaire soit fourni aux victimes
du conflit qui sont extrêmement vul-
nérables et ont besoin des choses les
plus basiques », a déclaré le directeur
par intérim du PAM au Sri Lanka, Azeb
Asrat.
L’ONU et d’autres agences humani-
taires internationales se sont retirées
de la région de Vanni le 16 septembre
à la suite d’une directive du gouverne-
ment demandant aux employés de quit-
ter la zone contrôlée par le LTTE.
Le PAM au Sri Lanka fournit actuelle-
ment de l’aide alimentaire à 1,1 million
de personnes.
Centre de Nouvelles de l’ONU
« Une tentation du dirigeant élu sans
opposition est d’utiliser sa puissante
position pour s’occuper de ses détracteurs,
les marginaliser, dans certains cas s’en
débarrasser, et de ne s’entourer que de ‘oui
monsieur’. »
Nelson Mandela
vice-président, a rapidement assumé
des responsabilités exécutives et pré-
paré son accession au pouvoir en éloi-
gnant un à un tous les autres candidats
potentiels, en particulier le brillant Cyril
Ramaphosa, accusé de complot, qui
s’est alors tourné vers l’industrie pour en
devenir un des plus efficaces patrons.
Le choix de Thabo Mbeki comme suc-
cesseur de Mandela a été le choix d’un
style froid, « aristocratique ». Le père de
Mbeki était compagnon de cellule de
Mandela, et c’est le père de Mbeki aussi
qui, en prison, a formé Jacob Zuma, lui
apprenant à lire et à réfléchir en politique
durant ses 10 années d’incarcération.
Thabo Mbeki faisait lui de brillan-
tes et tranquilles études en Angleterre,
dont il est revenu avec un accent anglais
aussi impeccable que la tenue de ses
costumes. Mbeki était, d’une certaine
manière, légitime pour le poste de pré-
Le directeur de l’AIEA réclame plus de moyens pour
faire face à une activité en hausse
LE DIRECTEUR général de l’Agence inter-
nationale de l’énergie atomique (AIEA),
Mohamed ElBaradei, a réclamé le 29 sep-
tembre davantage de moyens pour répon-
dre aux besoins croissants de vérification
nucléaire et de conseils aux pays qui veu-
lent se doter d’un programme énergétique
atomique.
« Tout ne va pas bien à l’AIEA », a
déclaré Mohamed ElBaradei à l’ouverture
de la conférence générale de l’Agence, qui
réunira ses 145 États-membres pendant
une semaine.
Le directeur de l’agence s’est appuyé sur
un rapport remis par un « groupe d’experts
externes » qui a recommandé « plus de res-
sources financières et d’autorité ».
En matière de vérification nucléaire,
il a souligné que l’agence devait dispo-
ser « d’une autorité juridique adéquate, de
technologies de pointe, d’un accès rapide
aux informations pertinentes et de ressour-
ces humaines et financières suffisantes ».
« Nous avons encore des problèmes
dans ces quatre domaines », a-t-il souli-
gné, rappelant que l’AIEA menait des ins-
www.lagrandeepoque.com International 3
Rodger Bosch/AFP/Getty Images
sident qu’il a assumé à partir de 1999 :
son profil technocratique était rassurant,
occidental, et devait permettre de stimu-
ler les investissements étrangers.
Mais à l’époque déjà, Mandela alertait
son successeur contre ce qui lui a depuis
toujours été reproché, son hermétisme
hautain : « Une tentation du dirigeant
élu sans opposition est d’utiliser sa puis-
sante position pour s’occuper de ses
détracteurs, les marginaliser, dans cer-
tains cas s’en débarrasser, et de ne s’en-
tourer que de ‘oui monsieur’. »
Jacob Zuma, président de l’ANC
depuis décembre dernier et artisan de
l’élimination de Mbeki, est le profil exac-
tement opposé de son adversaire. Face
au gentleman froid, Zuma est lui un per-
sonnage exubérant et populiste, marié
puis séparé de 11 femmes. Ce zou-
lou qui a gardé du bétail en zone rurale
avant d’être formé par le père de Thabo
Getty Images
Mohamed ElBaradei.
pections dans 29 pays – dont l’Iran et la
Corée du Nord – comparé à 20 pays en
2007, et qu’elle avait pu clarifier la situa-
tion en Libye.
Mohamed ElBaradei a rappelé que
« tous les pays avaient le droit de met-
tre en place un programme énergétique
nucléaire, mais qu’ils avaient la responsa-
bilité de le faire dans les règles ».
Mbeki, a d’abord soutenu le président,
l’aidant à éloigner ses adversaires. En
1994, il réalise la prouesse de convain-
cre le parti zoulou Inkhata de participer
aux premières élections générales libres
qui consacreront l’arrivée au pouvoir de
l’ANC et mettront fin à une période de
violences dans le pays. Il y gagne la
reconnaissance et la confiance des plus
hauts cadres de l’ANC.
La popularité de Jabob Zuma, proche
du peuple et communicateur chaleureux,
est le reflet inverse de celle de Thabo
Mbeki, ce que n’ont pas entamé les dif-
férentes affaires de corruption dans les-
quelles il est accusé d’avoir baigné.
Après sa victoire facile aux élec-
tions de l’ANC en décembre dernier,
Jacob Zuma vient donc de franchir une
étape supplémentaire de son ascension
et dans sa revanche contre Mbeki qui
depuis des années tente de le noyer sur
le terrain judiciaire.
Dans ce coup bien préparé, Jacob
Zuma aurait été aidé en particulier par
Cyril Ramaphosa – lequel avait aussi
un vieux compte à régler avec Mbeki.
Mais le soutien le plus vigoureux à l’éli-
mination anticipée de Thabo Mbeki est
sans doute le bilan des dix années de
sa présidence. Si la croissance écono-
mique est bien présente en Afrique du
Sud, le gouvernement est socialement
en échec complet. Au printemps, des
émeutes liées aux pénuries d’électricité
et au chômage ont par exemple conduit
au lynchage de dizaines d’immigrés zim-
babwéens accusés de voler les emplois
des sud-africains. Et la construction de
deux millions de logements ne dissimule
pas la croissance incontrôlée des bidon-
villes.
Les années Mbeki resteront égale-
ment marquées par le refus de donner
accès aux médicaments contre le SIDA
et par le refus de reconnaître tout lien
entre une infection VIH et la maladie.
Politiquement enfin, sur le continent,
l’Afrique du Sud – dont les positions sont
de plus perçues comme impérialistes –
s’essouffle et est régulièrement contes-
tée. Le dernier exemple en date étant le
soutien à Robert Mugabe au Zimbabwe,
malgré l’évidence de la défaite de celui-
ci aux élections présidentielles de juin.
L’Afrique du Sud reste donc en
période de turbulences, avec une ANC
fragilisée et une cocotte-minute sociale
à contrôler. De plus, Thabo Mbeki ne
se privera probablement pas de faire
jouer ses réseaux pour agir contre Jacob
Zuma en particulier, contre d’autres
cadres de l’ANC. Il a d’ailleurs dès la
semaine dernière commencé à riposter
sur le terrain judiciaire en introduisant un
recours devant la Cour constitutionnelle
contre les attendus du jugement le met-
tant en cause.
AURÉLIEN GIRARD
Ces deux dernières années, 50 États-
membres ont exprimé un intérêt en ce
sens, ce qui signifie que l’AIEA devra multi-
plier ses conseils pour « le choix des infras-
tructures, de la législation, des marchés
publics, le choix des sites et la construc-
tion ».
Le directeur de l’AIEA a aussi réclamé
plus de moyens pour répondre à un éven-
tuel accident à grande échelle.
Enfin, il a regretté la décision de l’Orga-
nisation des Nations Unies pour l’alimenta-
tion et l’agriculture (FAO) de se retirer de la
Division conjointe FAO/AIEA, l’agence ato-
mique ayant en effet un rôle méconnu dans
la sécurité alimentaire. Cette décision doit
être confirmée.
De son côté, le Secrétaire général de
l’ONU, Ban Ki-moon, a salué le travail de
l’AIEA. « L’agence continue à s’occuper de
la République populaire démocratique de
Corée et de l’Iran. Sa contribution béné-
ficie au régime mondial de non proliféra-
tion nucléaire », a-t-il dit dans un message
adressé à l’agence.
Centre de Nouvelles de l’ONU
4 International
États-Unis et Inde solidifient leur partenariat stratégique
Suite de la première page
L’industrie nucléaire peut certes se
réjouir de ce nouveau débouché et les mar-
chands d’armes américains en font tout
autant. L’Inde achète traditionnellement
une bonne partie de son armement en Rus-
sie, mais cela a commencé à changer der-
nièrement.
Le groupe Jane’s, spécialisé en rensei-
gnement militaire, rapportait en septembre
la probable vente des États-Unis vers l’Inde
de missiles Harpoon anti-navires d’une
valeur de 170 millions de dollars. Toujours
selon Jane’s, New Delhi négocierait l’achat
de huit avions Boeing P-81 de reconnais-
sance maritime (valeur de 2,2 milliards de
dollars). Ceci fait suite à l’achat de six avi-
ons de transport C-130J-30 de Lockeed
Martin au coût de 962 millions de dollars
plus tôt cette année.
L’Inde cherche également à se doter
de nouveaux avions de chasse et plu-
sieurs fabricants de différents pays sont en
lice pour obtenir le contrat de 10 milliards
de dollars. Advenant l’octroi du contrat à
une firme américaine, Boeing ou Lockeed
Martin, l’engagement de New Delhi envers
Washington ne laisserait plus beaucoup de
doutes.
Outre l’armement, les deux pays négocie-
raient pour conclure une entente permettant
aux armées des deux pays d’utiliser récipro-
quement les installations militaires de l’autre
pour l’entretien, les soins médicaux, le ravi- Rencontre entre le président américain George W. Bush et le Premier ministre Manmohan Singh dans le
taillement et les communications.
CONTRER LA CHINE
Chez les analystes, il n’y a aucun doute.
Le rapprochement indo-américain vise
avant tout à contrer l’influence de la Chine
dans la région.
Si des percées diplomatiques sont surve-
nues entre New Delhi et Pékin ces derniè-
res années, les deux pays les plus peuplés
de la terre possèdent davantage de pom-
mes de discorde que de fruits à partager.
D’une part, des disputes territoriales ne sont
toujours pas résolues et s’étaient soldées
par une guerre à l’avantage de la Chine en
1962. D’autre part, l’Inde abrite le gouverne-
ment tibétain en exil et celui que le régime
chinois considère comme le diable en per-
sonne, soit le Dalaï-lama. Plus encore,
Pékin demeure un soutien de longue date à
Islamabad, ennemi juré de New Delhi.
Outre ces aspects que certains pour-
raient être tentés de ramener à du simple
folklore, il y a des réalités stratégiques qui
commencent à inquiéter le leadership des
deux pays.
L’approvisionnement en hydrocarbures
Des défis importants pour la nouvelle chef de Kadima
Nul besoin d’affirmer que
Tzipi Livni, la nouvelle chef de
Kadima, fait face à des défis
importants tant sur le plan poli-
tique, sécuritaire, économique
que sur le plan international et
du processus de paix, si elle
entend devenir Premier minis-
tre. Mandatée par le président
Shimon Peres, elle a 42 jours
au plus pour établir son nou-
veau cabinet. Si elle échoue à
créer une coalition, Israël devra
s’orienter vers des élections
anticipées, une perspective
favorable à Benjamin Neta-
nyahu, le chef du Likoud.
FACE à ces défis, Tzipi Livni a appelé
les membres de son parti à s’unir et à
déployer des efforts concertés pour sur-
monter les difficultés. Elle a déclaré que
même si Israël tenait des élections anti-
cipées, elle dirigerait le parti de Kadima
pour les gagner. Lors d’un bref discours,
Tzipi Livni a affirmé que sa « priorité est
de constituer un gouvernement d’unité
nationale » qui rassemblerait les partis
de la majorité actuelle et le Likoud, prin-
cipal parti d’opposition israélien. « J’ap-
pelle Benjamin Netanyahu à se joindre à
un gouvernement d’unité nationale sous
ma direction », a-t-elle ajouté. Le Likoud
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bureau ovale de la Maison Blanche le 25 septembre 2008 à Washington. George Bush a dit à M. Singh
qu’il « travaillait dur » pour faire passer l’accord en attente sur le nucléaire civil au Congrès américain.
de la Chine se fait largement par voie mari-
time, si bien que certains analystes consi-
dèrent actuellement le détroit de Malacca
– entre la Malaisie et l’Indonésie – comme
le talon d’Achille de Pékin. L’Inde, en tant
que net compétiteur pour les ressources
naturelles et pour l’influence politique dans
la région, représente un obstacle dans le
plan de domination asiatique de la Chine.
« Si vous désirez établir l’hégémonie sur
le territoire asiatique, la puissance avec
laquelle vous devez compter c’est l’Inde »,
affirme au Telegraph le général indien G. D.
Bakshi. « L’Inde est comme un porte-avion
impossible à couler au milieu de l’océan et
de leurs voies maritimes essentielles. »
Si l’Inde, avec sa marine respectable,
imposait un blocus dans la région du détroit
de Malacca, cela porterait un coup dur à
l’économie chinoise et aux capacités opé-
rationnelles du régime. L’envoi de navires
de guerre chinois pour protéger ses routes
maritimes pourrait faire des flammèches.
Le quotidien britannique Daily Telegraph
refuse de se joindre au futur cabinet de
Livni et tente de persuader d’autres par-
tis de soutenir l’entreprise d’élections
anticipées.
La difficulté première dans l’établisse-
ment d’un nouveau cabinet réside dans
le fait que la coalition devra reposer sur
le rassemblement de plusieurs partis
parfois opposés idéologiquement. L’ave-
nir de la future coalition semble dépendre
en grande partie du Shass, parti religieux
ultra orthodoxe, avec ses douze députés
au Parlement contre 120 en tout. Mais
là où le bât blesse, c’est que le chef de
cette formation, Eli Yishaï, s’oppose à
toute négociation sur le statut de Jéru-
salem avec les Palestiniens. Or Tzipi
Livni, qui est engagée dans le processus
de paix et qui sait que le statut de la par-
tie orientale de la ville – annexée par les
Israéliens après leur conquête en 1967 –
est une des principales pierres d’achop-
pement dans les négociations avec les
Palestiniens, se trouve face à un difficile
compromis. De plus, le Shass a égale-
ment demandé une hausse des alloca-
tions familiales, ce que Tzipi Livni exclut
pour le moment.
Une tâche qui augure d’autant plus
de difficultés qu’il faudra compter avec
le Parti travailliste, dont le dirigeant, le
ministre de la Défense Ehud Barak, se
montre prudent dans son appui. Il a ren-
contré Benjamin Netanyahu et a appelé
à la création d’un gouvernement d’ur-
gence.
La formation des gouvernements en
Israël repose sur la représentation pro-
explique les derniers développements.
Pour contrer l’éventualité d’un blocus, la
Chine a entrepris la construction d’un port
à Gwadar, au Pakistan, qui pourrait deve-
nir un point d’attache pour ses navires de
guerre. Un pipeline pourrait également y
commencer pour acheminer le pétrole venu
du Moyen-Orient vers la Chine, sans avoir à
contourner l’Inde. Sur le flanc est, la Chine
construit un port et un terminal pétrolier à
Kyauk Phyu, en Birmanie, pour acheminer
les hydrocarbures par pipeline vers la ville
chinoise de Kunming, dans la province aus-
trale du Yunnan.
Ajoutant la pièce moins stratégique du
Népal, récemment passée par voie électo-
rale aux mains des maoïstes, les stratèges
militaires indiens ressentent l’encercle-
ment.
Pour les États-Unis, une alliance avec
l’Inde augmente les possibilités de pouvoir
contenir la Chine. C’est un atout majeur sur
le front sud, tandis que le front du Nord-Est
est gardé par le Japon, dans le giron amé-
portionnelle pure. Selon le directeur de
l’Institut d’études pour la sécurité natio-
nale, Oded Oran, « la société israélienne
compte des groupes ethniques et religieux
très différents. Les groupes doivent abso-
lument être représentés au Parlement si
l’on veut se prétendre une vraie démo-
cratie ». Pour renchérir ces propos, selon
Sergio Della Pergola, démographe à l’uni-
versité hébraïque de Jérusalem, si ce
schéma « est très démocratique, il n’est
pas gouvernable ». C’est la raison pour
laquelle Tzipi Livni, en fondant sa coali-
tion, devra nécessairement compter avec
quatre ou cinq partis pouvant être oppo-
sés idéologiquement. « Des petits partis
ont le pouvoir de faire monter les enchè-
res en échange de leur soutien. C’est
pourquoi les partis religieux ont un poids
politique nettement supérieur à leur poids
démographique », ajoute Della Pergola.
Selon certains analystes politiques,
Tzipi Livni bénéficierait de l’appui con-
sidérable de son mari, l’homme d’af-
faires Naftali Spitzer, qui est très bien
entouré politiquement et économique-
ment. Même si une machine politique
très bien orchestrée la soutient, d’aucuns
considèrent que sa marge de manœuvre
est mince et que le gouvernement Livni
ne pourra procéder à de véritables chan-
gements.
D’autres soutiens peuvent provenir de
plus petits partis et même de certains
partis arabes israéliens ou de l’Autorité
palestinienne qui entretient de bons rap-
ports avec Tzipi Livni depuis qu’elle est
responsable des négociations avec les
1 – 15 OCTOBRE 2008 ● La Grande Époque
TIM SLOAN/Getty Image
ricain depuis la fin de la Seconde Guerre
mondiale.
LE JEU DU TRIANGLE
M. D. Nalapat, un analyste du centre de
réflexion Jamestown Foundation, souligne
dans un essai de janvier 2008 les similitu-
des entre les dénouements stratégiques
d’aujourd’hui et ceux du début des années
70, concernant la politique étrangère amé-
ricaine.
À cette époque, le président américain
Nixon et son secrétaire d’État Kissinger
avaient établi des relations diplomatiques
avec Pékin pour faire jouer la Chine commu-
niste contre sa rivale l’Union soviétique. Un
jeu du triangle que beaucoup ont considéré
comme un coup de maître stratégique. Une
théorie que rebute M. D. Nalapat. Il explique
que l’antagonisme entre Pékin et Moscou
était assez prononcé, de sorte qu’il n’y avait
aucun besoin d’un rapprochement sino-
américain. Mais il note surtout que ce coup
de maître a finalement permis à la Chine de
Palestiniens. Le Meretz, parti de gauche
qui est représenté par quatre sièges au
Parlement, lui apportera probablement
un soutien inconditionnel.
Le véritable danger réside dans l’éven-
tualité d’élections anticipées, car si le
Likoud l’emportait, les pourparlers enga-
gés dans le processus de paix pourraient
être stoppés et faire pencher la balance
du côté du Hamas plutôt que du côté de
l’Autorité palestinienne. Les deux camps
seraient confrontés au durcissement de
leurs positions. Si le Hamas devenait
plus fort et plus soutenu, il ne manque-
rait pas de renforcer ses positions idéolo-
giques et de geler les négociations avec
les Israéliens.
La plupart des analystes politiques
pensent que les négociations autour du
statut de Jérusalem ne mèneront nulle
part, car sur le terrain, l’occupation
coloniale s’est intensifiée en Cisjorda-
nie. La superficie des colonies y repré-
sente aujourd’hui 300 % ou 400 % de
ce qu’elle était en 1994, au moment des
accords d’Oslo.
De plus, à cause du processus enclen-
ché pour la formation du nouveau gou-
vernement israélien, les négociations
avec les Palestiniens sont pour le
moment suspendues.
Amjad Rafeeq Shibab, professeur de
sciences politiques à l’université Al Kuds,
s’est montré guère optimiste. « Tzipi
Livni », dit-il, « a manifesté une capa-
cité d’écoute remarquable, une volonté
de faire bouger les choses, mais elle n’a
aucun pouvoir de décision. Qu’en sera-
devenir à ce jour un compétiteur stratégique
de taille pour les États-Unis.
Washington a donc créé lui-même son
problème, en croyant obtenir des gains à
court terme. Les États-Unis avaient ouvert
le bal à une plus grande reconnaissance de
la Chine communiste sur la scène interna-
tionale. Maintenant il fait peu de doutes que
sans l’afflux massif de capitaux étrangers
sous les réformes économiques de Deng
Xiaoping, l’économie chinoise se serait
effondrée et le régime aurait très probable-
ment subi le même sort.
C’est là où intervient l’Inde, plus de 30 ans
plus tard. La Chine se fait servir la même
médecine que l’URSS. Après avoir misé sur
Pékin, finalement à son détriment, Washing-
ton mise sur New Delhi pour contrer Pékin.
Mais cette fois, l’issue pourrait être plus
avantageuse pour les États-Unis, car le nou-
vel allié est plus compatible politiquement et
même culturellement, l’Inde ayant un passé
sous contrôle britannique et la présence de
la langue anglaise y est toujours importante.
ET APRÈS ?
Pour l’establishment indien, tout cela est
une très bonne nouvelle. Ce sera bon pour
l’économie et ça rassurera les dirigeants
préoccupés par l’encerclement. Pour les éli-
tes américaines, c’est un pas dans la bonne
direction. L’idée que les États-Unis ont sacri-
fié beaucoup de leur sécurité en renforçant
le régime chinois est courante, et cela con-
tinue d’être alimenté par des rapports signa-
lant le rapide développement du dispositif
militaire chinois. Dans ce contexte, pouvoir
renforcer l’armée indienne en équipement
et en partage de savoir-faire sera une béné-
diction.
Le brouillon d’un nouveau rapport du
Département d’État américain, dont le
Washington Times a obtenu copie, reflète
cette préoccupation plus accrue vis-à-vis
la Chine. « Utilisant des capacités militai-
res techniques américaines supérieures, les
États-Unis devraient entreprendre le déve-
loppement de nouvelles armes, capteurs,
communications et autres programmes et
tactiques pour convaincre la Chine qu’elle
ne pourra pas supplanter l’armée améri-
caine. »
La course aux armements en Asie est une
réalité. L’interconnexion des économies et la
bombe nucléaire sont souvent présentées
comme des dissuasifs importants permet-
tant d’éviter l’éclatement de conflits majeurs,
mais la course aux ressources et l’expan-
sion des puissances combinent deux élé-
ments pouvant avoir le dessus sur la raison :
le besoin et le désir.
NOÉ CHARTIER
t-il si elle devient Premier ministre ? Je
suis pessimiste. Ce n’est pas que je
doute de ses intentions, mais de la liberté
de manœuvre que lui laisseront ses par-
tenaires de la coalition, en particulier, le
Shass. Ce parti, vous le savez bien, s’op-
pose à ce que la question de Jérusalem
soit débattue. Et sans Jérusalem, aucun
accord n’est envisageable ».
Ehud Olmert a soumis l’hypothèse
d’un accord partiel aux dirigeants pales-
tiniens qui mettraient de côté les points
litigieux du conflit comme le sort de Jéru-
salem, mais Ahmed Korei, l’un des prin-
cipaux négociateurs palestiniens, a
déclaré que les accords partiels avaient
débouché sur des désastres dans le
passé.
« Nous voulons un accord global et
détaillé qui mette fin à l’occupation », a-
t-il martelé.
« Les Palestiniens continueront à
négocier. Mais si les discussions abou-
tissent à une impasse, que ferons-nous ?
Capituler ? La résistance sous toutes ses
formes est un droit légitime », a prévenu
Korei.
Tout le monde sait désormais que les
possibilités d’un accord israélo-palesti-
nien avant la fin de l’année comme prévu
en novembre 2007, lors de la conférence
d’Annapolis, sont nulles depuis la démis-
sion d’Olmert, mais ce dernier précise
pour la forme qu’il cherchera une voie de
compromis avec les Palestiniens jusqu’à
la fin effective de son mandat.
STÉPHANIE KRUG
Collaboration spéciale
La Grande Époque ● 1 – 15 OCTOBRE 2008
NTDTV : l’enjeu de la vérité
Un opérateur satellite interrompt la
diffusion de la seule télévision chi-
noise non censurée. ♦ L’enregis-
trement d’un appel téléphonique
secret met à jour les véritables rai-
sons ♦ « La perte de NTDTV est
préjudiciable pour les Chinois et
dangereuse pour nous tous »,
déclarent les critiques.
L’OPÉRATEUR satellite français Eutelsat a
fermé le canal Asie de New Tang Dynasty
Television, la seule télévision libre qui pou-
vait diffuser des informations non censurées
vers la Chine.
« Ne plus pouvoir regarder NTDTV,
c’est comme ne plus pouvoir respirer d’air
frais », à écrit Liu Yushi, un téléspectateur
de Chine. « On étouffe quand on voit les
fausses nouvelles et les comptes-rendus
des autres chaînes ».
Eutelsat prétend que ce sont des raisons
techniques qui sont à l’origine de la cou-
pure. Mais les récents développements et
une enquête secrète suggèrent que l’opéra-
teur s’est au contraire incliné devant Pékin,
soulevant des inquiétudes internationales
sur la crédibilité d’Eutelsat.
La chaîne de télévision en langue chi-
noise et Eutelsat ont signé un accord jus-
qu’en 2011. Cependant, le 16 juin, sept
semaines avant les Jeux Olympiques,
Eutelsat a soudain coupé le signal de
NTDTV en direction de la Chine. L’opéra-
teur satellite a déclaré que cela était dû à
« une anomalie sur une pièce d’un sous-
système du générateur ».
Mais les organismes de surveillance des
média disent qu’Eutelsat est tout à fait en
mesure de rétablir le signal de NTDTV et
ne fait que se cacher derrière des excuses
techniques. Reporters sans frontières et la
Fédération Internationale des Journalistes
accusent Eutelsat d’avoir arrêté le signal à
cause de pressions politiques. Selon eux
et selon d’autres observateurs, l’opérateur
annulerait son contrat dans le but de con-
clure des accords commerciaux avec le
gouvernement chinois.
« Les prétendues raisons techniques sont
pure imagination », a déclaré Bart Staes, un
député européen de Belgique.
« SUR LES CHARBONS ARDENTS »
Les programmes gratuits de NTDTV peu-
vent être captés par plus de 200 millions de
téléspectateurs dans le monde entier, y
compris par les 40 à 60 millions d’anten-
nes paraboliques en Chine, un fait qui irrite
tout particulièrement les dirigeants du Parti
communiste.
Établie en 2001 par des Chinois vivant
à l’étranger, NTDTV, dont le siège social
se situe à New York, s’est rapidement fait
une réputation internationale pour ses infor-
mations et ses analyses uniques et en
profondeur de la Chine. Ses descriptions
révolutionnaires du SRAS, du tremblement
de terre dans le Sichuan et des produits
avariés ont largement devancé les média
occidentaux et chinois.
Avec un certain nombre de pratiquants
de la méthode bouddhiste Falun Gong
qui travaillent pour la chaîne depuis le tout
début, NTDTV a une remarquable compré-
hension des dures réalités vécues par les
groupes persécutés en Chine. Elle propose
régulièrement des interviews téléphoniques
d’avocats des droits de l’Homme en Chine
La sévère répression des Ouighours envenime le conflit
LE CONGRÈS international des Oui-
ghours [1] a fermement condamné les
autorités chinoises pour avoir intensifié la
répression des Ouighours et forcé le peuple
ouighour à attaquer ses propres leaders eth-
niques dans la « région autonome » du Xin-
jiang ouighour au nom du « maintien de la
sécurité » durant la Journée nationale du 1er
octobre. Le Congrès international des Oui-
ghours enjoint le régime chinois de mettre
fin à la persécution et relâcher sans condi-
tion les 10.000 Ouighours qui ont été arrê-
tés de manière arbitraire durant les Jeux
Olympiques.
Le porte-parole de ce Congrès Dilshat
Rishit a déclaré que selon les informations
fournies par les Ouighours de la « région
autonome » locale les autorités visent les
« NTDTV est la seule chaîne
de télévision chinoise qui
ose dire la vérité »,
un téléspectateur chinois
et récemment, elle s’est distinguée en inter-
viewant des Tibétains, sur le terrain, lors
des affrontements de mars.
Selon un spectateur chinois qui a écrit
à NTDTV suite à la coupure imposée par
Eutelsat, « les Chinois sont sur des char-
bons ardents. NTDTV est la seule chaîne de
télévision chinoise qui ose dire la vérité ».
CENSURE
Tout ceci est terrifiant pour un régime qui
compte sur le contrôle de l’information pour
garder le pouvoir, mais qui par ailleurs ne
peut pas empêcher les citoyens d’installer
des antennes paraboliques privées.
C’est la raison pour laquelle le régime
a pour habitude de demander que l’auto-
censure soit une condition préalable pour
ceux qui souhaitent accéder au marché
des média en Chine (comme on vient de le
voir avec la société suédoise Skype après
les scandales de Google et de Yahoo!).
La News Corp de Rupert Murdoch, qui a
été largement critiquée pour avoir pris la
défense du Parti communiste en ce qui con-
cerne les abus des droits de l’Homme, n’en
est qu’un exemple. Eutelsat, à son tour, fait
face à des critiques pour s’être inclinée
devant Pékin.
À l’origine, Eutelsat semblait être le par-
tenaire idéal pour NTDTV. La compagnie
satellite a déclaré son engagement pour
le pluralisme médiatique, l’accessibilité et
la non-discrimination. Effectivement, Eutel-
sat déclare : « Pour des millions de foyers,
les satellites du groupe sont synonymes
d’ouverture et d’échange ».
LES TÉLÉSPECTATEURS EN CHINE
SE SENTENT MAINTENANT TRAHIS
« Je suis paysan et je vis en Chine », a
écrit M. Deng de la province méridionale du
Guangdong. « J’ai économisé mon argent
et j’ai vécu de façon frugale pour pouvoir
m’acheter une antenne parabolique… pour
pouvoir regarder NTDTV en secret avec les
gens du village », a-t-il écrit. « Et mainte-
nant, j’apprends cette terrible nouvelle.
quatre types majeurs de Ouighours : ceux
qui migrent souvent, ceux qui reviennent
d’autres pays, ceux qui ont été condamnés
à la « rééducation par les travaux forcés » et
ceux qui sont étiquetés comme étant « dan-
gereux pour la sécurité de l’État ».
AUGMENTATION DES PERSÉCU-
TIONS RELIGIEUSES
Prétextant d’empêcher les manifesta-
tions de grande ampleur, les autorités loca-
les ont renforcé les persécutions religieuses
et mis en place des séances de lavage de
cerveau auxquelles tous les Ouighours doi-
vent se plier. Par exemple, durant le mois du
Ramadan [2] en septembre, les Ouighours
n’avaient pas le droit de participer aux activi-
tés religieuses telles que le jeûne, les prières
« Les prétendues raisons
techniques sont pure
imagination »,
Bart Saes, député européen
S’agit-il du même monde européen qui pré-
tend avoir la liberté de parole ? »
Des membres du Parlement européen
et d’organisations indépendantes question-
nent à présent la loyauté d’Eutelsat.
« La crédibilité d’Eutelsat est en jeu
et nous demandons avec insistance aux
actionnaires d’intervenir aussi rapidement
que possible afin que NTDTV puisse à nou-
veau émettre sur ce satellite », a déclaré
RSF. « Si cela n’est pas fait, aucune des
compagnies de télévision actuellement
clientes d’Eutelsat ne pourra jamais être
sûre qu’elle ne sera pas elle aussi arbitraire-
ment déconnectée un jour à cause du con-
tenu de ses émissions ».
IMPACT INTERNATIONAL
Mais au-delà des dommages potentiels
causés aux affaires d’Eutelsat, se posent
des questions d’éthique concernant le fait
de priver le peuple chinois de son accès
à NTDTV, la seule chaîne d’information
libre en chinois, et par conséquent, de venir
en aide à une dictature en restreignant la
liberté d’information. Le régime de Pékin a
déjà trouvé des alliés dans le monde «libre»
pour l’aider à bloquer les sites Internet et à
imposer sa censure sur tous les médias en
Chine. Maintenant, en faisant pression sur
la société européenne Eutelsat elle a blo-
qué l’une des dernières sources d’informa-
tion libre s’adressant au peuple chinois.
« La couverture du SRAS en 2003 et le
silence total des médias sur la prédiction
du tremblement de terre du Sichuan en mai
2008 sont des exemples de comment l’in-
formation censurée peut transformer des
catastrophes naturelles en catastrophes
créées par l’homme, tuant des milliers de
gens innocents », a déclaré Carrie Hung, la
porte-parole de NTDTV. « Quand NTDTV
couvre des informations censurées par le
régime, la chaîne sauve littéralement la vie
des Chinois ».
Selon Hung, les informations récentes
concernant le lait avarié chinois montrent
à quel point la transparence médiatique
aux mosquées et les femmes n’avaient pas
le droit de porter le voile. Toute personne
bravant l’interdiction risquait l’arrestation.
Dilshat Rishit a également dit au reporter
que les imams [3] dans les mosquées n’ont
le droit d’enseigner que les écrits approuvés
par le Parti communiste qui font l’éloge de la
réforme économique en Chine et des Jeux
Olympiques de Pékin, et qui justifient la vio-
lente répression des Ouighours qualifiés de
terroristes.
La répression s’étant intensifiée ces deux
derniers mois, Dilshat Rishit ne pouvait pas
exclure l’éventualité que les Ouighours conti-
nuent à manifester. « Nous sommes inquiets
de cette situation. Quelle que soit l’appro-
che que nous adoptons pour défendre nos
droits, notre peuple est réprimé avec une
www.lagrandeepoque.com
en Chine est importante pour le reste du
monde. Les autorités chinoises sont accu-
sées maintenant d’avoir consciemment
dissimulé les informations sur les produits
dangereux jusqu’au lendemain des JO de
façon à améliorer l’image de Pékin – alors
que les produits avariés étaient déjà distri-
bués dans le monde entier.
« Nous vivons une époque charnière »,
a continué Carrie Hung. « Les besoins du
peuple chinois pour une information non
censurée n’ont jamais été aussi importants,
et dans le monde entier, la Chine a plus que
jamais une incidence sur nos vies ».
En avril, le supermarché Carrefour en a
fait les frais quand des milliers de jeunes
Chinois, – ignorant l’étendue de la répres-
sion au Tibet – ont manifesté et boycotté la
franchise après avoir été désinformé par la
propagande d’état qui a fait croire à un peu-
ple français qui serait non pas pour que les
Chinois puissent bénéficier eux aussi des
droits de l’Homme, mais tout simplement
anti-chinois et qui se plairait à perturber le
passage de la flamme olympique juste pour
ternir l’image du peuple chinois.
UN « CHARABIA » TECHNIQUE
Eutelsat prétend que ce sont des dys-
fonctionnements techniques qui ont causé
l’arrêt du signal. Mais des critiques assurent
que ces explications sont douteuses, voire
délibérément malhonnêtes.
Pour commencer, Eutelsat avait déjà
essayé de mettre fin à la diffusion de
NTDTV sous la pression de Pékin. D’après
un article du Wall Street Journal, « quel-
ques semaines seulement après la diffusion
de NTDTV par Eutelsat, Pékin leur avait
envoyé des avertissements sévères au cas
où ils continueraient leur programmation de
cette chaîne. Eutelsat avait alors fait connaî-
tre son désir de rompre ses engagements
avec NTDTV ».
Mais un tollé international venant du Par-
lement européen, du congrès des États-
Unis et d’ONG, ainsi que de nombreuses
lettres de téléspectateurs déçus ont fait
qu’Eutelsat est revenu sur sa décision.
Mais en juin 2008, Eutelsat a soudai-
nement prétendu qu’il leur fallait « couper
quatre des vingt-quatre transpondeurs du
satellite », dont celui de NTDTV, de façon
à conserver assez d’énergie ; plus tard, ils
ont prétendu qu’« il n’allait pas leur être pos-
sible de remettre en utilisation les quatre
intensité croissante. En fait, c’est la politique
déraisonnable du Parti Communiste chinois
(PCC) contre les religions qui a envenimé la
confrontation entre Pékin et les Ouighours »,
explique Dilshat.
Quand on lui demande ce qu’il pense des
violentes manifestations dans le Xinjiang,
Dilshat répond : « Nous ne souhaitons pas
que de telles violences se produisent, mais
nous sommes incapables d’y mettre fin.
C’est la répression violente par le régime
chinois qui oblige les Ouighours à se rebel-
ler. Nous pensons que le régime chinois doit
en être directement tenu responsable ».
WEN JING
Notes :
[1] Le Congrès international des Oui-
ghours a été établi le 16 avril 2004 à Munich
Chine 5
transpondeurs ». Mais Reporters sans fron-
tières (RSF) a révélé qu’Eutelsat avait remis
en marche l’un des transpondeurs, sans
pour autant rétablir le signal de NTDTV. En
outre, le 1er août, cinq télévisions et douze
stations radio appartenant au Broadcasting
Board of Governors (BBG) américain ont
quitté le satellite, laissant suffisamment de
place pour NTDTV.
Cependant, Eutelsat n’a pas renouvelé
le signal de NTDTV et refuse maintenant
de donner des renseignements techniques
supplémentaires pour expliquer la coupure.
Aidan White, le secrétaire général de la
Fédération Internationale des Journalistes,
a déclaré qu’Eutelsat « se cache tout sim-
plement derrière un charabia technique »,
et que très probablement, « ce sont des
pressions chinoises qui ont abouti à cette
exclusion ».
Selon RSF, Eutelsat souhaite sacri-
fier NTDTV pour obtenir des accords avec
le régime chinois. « Eutelsat et Thales, le
fabricant du satellite, ont de plus en plus
d’intérêts commerciaux en Chine ». « De
son côté, Eutelsat a signé un contrat avec
les autorités chinoises pour que la fusée
Longue Marche soit utilisée dans des lance-
ments de satellites de l’entreprise. Comme
l’écrivait le Wall Street Journal en avril
2008 : ‘Eutelsat essaie depuis des années
de trouver un chemin pour pénétrer le mar-
ché chinois, et la signature de contrats est
vue comme un moyen de réussir cet objec-
tif’ ».
APPEL TÉLÉPHONIQUE SECRET
Mais il y a une preuve encore plus acca-
blante. Le 10 juillet 2008, RSF a publié la
retranscription d’une conversation télépho-
nique enregistrée entre un interlocuteur
se présentant comme un fonctionnaire du
département de la propagande chinoise et
un représentant d’Eutelsat à Pékin.
« C’est le PDG de notre société en
France qui a pris la décision de faire ces-
ser la diffusion de NTDTV. (...) Nous pou-
vons choisir de débrancher ce transpondeur
[un transmetteur de signaux des program-
mes]. Et nous pouvions choisir de ne pas le
débrancher, bien entendu. (...) C’est parce
que nous avons reçu des plaintes et des
rappels du gouvernement chinois. (...) Il y
a deux ans, l’Administration de la radio, du
film et de la télévision n’avait qu’un mot à
la bouche : arrêter cette chaîne avant que
nous commencions à parler ».
Quand on lui a demandé comment Eutel-
sat prévoyait de rejeter les demandes répé-
tées de NTDTV pour rétablir la diffusion de
la chaîne, l’employé a répondu : « Nous
leur disons simplement que la puissance
n’est pas suffisante, et que nous ne pou-
vons donc utiliser que ces quelques trans-
pondeurs et aucun autre. C’est tout. (…) Ne
vous inquiétez pas – nos avocats y ont soi-
gneusement réfléchi ».
Maintenant, NTDTV demande que
davantage de députés européens et d’ONG
se mobilisent pour soutenir cette cause de
la liberté d’information.
« Il ne fait plus aucun doute qu’Eutelsat
est tout à fait en mesure de rétablir notre
signal et cela est crucial pour la Chine et
pour nous tous », a assuré Hung. « Eutelsat
a bougé suite à la pression par le passé – il
s’agit simplement d’une question de déter-
mination et c’est là que nous avons besoin
du soutien de tout le monde ».
RÉMI BLEIBTREU
en Allemagne après que le Congrès natio-
nal du Turkestan oriental et le Congrès mon-
dial de la Jeunesse ouighour ont fusionné en
une seule organisation. Son principal objec-
tif est de « promouvoir le droit des Ouighours
à recourir à des moyens pacifiques, non vio-
lents, et démocratiques pour déterminer
l’avenir du Turkestan oriental ». C’est une
organisation internationale qui représente
l’intérêt commun des Ouighours à la fois
dans le Turkestan oriental et à l’étranger.
www.uyghurcongress.org/En/AboutWUC.as
p?mid=1095738888
[2] Le Ramadan est le mois durant lequel
les musulmans jeûnent entre le lever et le
coucher du soleil, et prient davantage.
[3] Les imams dirigent les prières dans les
mosquées.
6 Chine www.lagrandeepoque.com 1 – 15 OCTOBRE 2008 ● La Grande Époque

Nouvelles des correspondants de la radio Son de l’Espoir (Sound of Hope Network : www.sohnetwork.com)
BIDONNAGE DE LA SORTIE SPATIALE DE
SHENZHOU VII ?
Les internautes chinois débattent de la réalité de
la sortie dans l’espace de l’astronaute chinois Zhai
Zhigang, montrée le 27 septembre à la télévision
centrale chinoise (CCTV). Raisons de leurs dou-
tes : il s’agirait d’images préenregistrées d’entraî-
nement en piscine.
D’après Apple Daily du 1er octobre, les images
de la CCTV laissent voir à de multiples reprises des
bulles s’élevant lentement devant le masque de l’as-
tronaute, ainsi que d’autres lors de l’ouverture de la
capsule.
De plus, quand l’astronaute Liu Buoming tend
à Zhai Zhigang le drapeau communiste chinois,
alors que ce dernier ne le déplace pas, le drapeau
est agité comme par du vent, et frappe même à de
multiples reprises le masque de Zhai Zhigang. Les
internautes perçoivent enfin l’image de la terre, en
arrière-plan comme « artificielle ».
Les doutes des spectateurs chinois sont possi-
blement stimulés par les fausses informations déjà
diffusées par l’agence de presse officielle chinoise
Xinhua qui a déjà annoncé que le vaisseau Shen-
zhou VII avait orbité 30 fois autour de la terre… 12
heures avant son décollage.
Le lancement avancé du Shenzhou VII, qui initia-
lement aurait dû décoller au mois d’octobre, est éga-
lement soupçonné d’avoir été motivé par la volonté
de divertir l’opinion publique de la crise du lait con-
taminé.
COLLUSION DU GOUVERNEMENT DE GUILIN
AVEC DES ENTREPRENEURS
D’après des sources locales, le 22 septembre,
les autorités de la ville de Guilin ont recouru à la
violence pour expulser des fermiers de leurs terres
dans la zone préservée du jardin Chuanshan, région
de Qixin. De nombreux fermiers s’opposant physi-
quement à la saisie ont été arrêtés.
Zhou Xiwang, un des villageois, explique : « Le
23 septembre, ils ont encore déployé environ 300
policiers pour assiéger le village et nous arrêter. »
Un autre affirme que le 28 septembre, « ils conti-
nuaient à arrêter des gens, causant la panique dans
le village ».
AUJOURD’HUI EN CHINE
Zhou Xiwang décrit une atmosphère de terreur
autour du village. « Ils ont déjà commencé à cons-
truire et personne n’ose aller regarder. Même ceux
qui osent y aller n’osent pas regarder. Ils veulent que
nous enlevions les tombes de nos ancêtres sous 20
jours, et vont payer 200 à 300 yuans pour un autre
cercueil. Après 20 jours, ils raseront tout. »
En mai 2006, le centre de gestion de la réserve
foncière de Guilin a vendu aux enchères 11 acres
de terre à l’entreprise Guilin Zhangtai, pour 1,3 mil-
lion de yuans (environ 130.000 euros).
La compensation offerte aux villageois expulsés
s’élève pour sa part, au total, à 151.000 yuans (soit
environ 15.000 euros). Cette compensation a de
plus été en partie détournée par différents départe-
ments administratifs, laissant peu en compensation
réelle aux fermiers.
200.000 VICTIMES D’UNE ESCROQUERIE
DANS LA VILLE DE JINAN FONT APPEL AUX
NATIONS UNIES
Récemment, 200.000 victimes de la levée de
fonds illégales de l’entreprise Jizhen de produits de
santé ont envoyé une lettre commune à la commis-
sion des droits de l’homme des Nations unies pour
demander une enquête. D’après les victimes, l’en-
treprise a agi en complicité avec le gouvernement
provincial du Shandong et sciemment trompé les
investisseurs pour lever des fonds.
D’après les victimes, le 21 octobre 2007, les diri-
geants de l’entreprise se sont enfuis hors de Chine
avec les fonds, annoncé la faillite de l’entreprise et
dilapidé des dizaines de milliards de yuans d’inves-
tissements du public. Les protestations des investis-
seurs trompés ont été réprimées et aucune action
légale n’a pu être entamée contre les dirigeants de
Jizhen.
Madame Mi, de la ville de Jinan, explique : « Le
gouvernement municipal et le comité provincial sont
allés sur le lieu de notre manifestation. Nous étions
nombreux et pourtant les policiers étaient encore
plus nombreux. Nous avons été réprimés alors que
nous n’avions aucune intention de créer des problè-
mes. De nombreuses personnes se sont suicidées,
mais personne n’a le droit de le savoir car il est inter-
dit de publier des articles sur Internet ».
Un étudiant appelé Pan rappelle : « Les investis-
seurs sont essentiellement des petits épargnants
des classes ouvrières. Dans ma famille, par exem-
ple, nous avons emprunté de l’argent à la ban-
que pour investir, et maintenant nous sommes en
grande difficulté. »
Le président de la Jizhen, Gong Yi-wen, ancien
gouverneur adjoint de la ville de Zaozhuang, a créé
l’entreprise il y a une dizaine d’années, et attiré des
investisseurs en promettant une rentabilité élevée.
LE RÉGIME COMMUNISTE VEUT FORCER LES
CHINOIS À BOIRE DU LAIT
Suite au scandale du lait à la mélamine et pour
éviter un effondrement de la consommation, le gou-
vernement provincial de Gansu a, dans une confé-
rence de presse récente, ordonné aux membres du
parti communiste, au niveau des comtés et zones
urbaines, de boire quotidiennement 500 ml de lait.
Les écoliers et étudiants y sont de même fortement
incités et bénéficient de réduction de prix de 50 %.
FERMETURE DE FABRICANTS DE CHAUSSU-
RES DANS LA PROVINCE DE SICHUAN
Les coûts de production en Chine ont beaucoup
augmenté récemment, en raison du coût des matiè-
res premières et de la main d’œuvre. Ceci, ajouté au
cours de la devise chinoise, freine les exportations
et provoque la fermeture de nombreuses usines.
À Chengdu par exemple, capitale des chaussures
pour femmes , des entreprises n’ont pas payé leurs
employés depuis des mois, et ceux-ci se heurtent à
l’indifférence des autorités locales.
Même un fabriquant historique tel que Reibaili qui
existe depuis plus de 20 ans, a mis la clé sous la
porte en laissant derrière lui des dizaines de millions
d’euros de dettes.
M. Liu, un ouvrier, dit qu’il y a plus de 200 fabri-
cants de chaussures dans le comté Jihua de Chen-
gdu, dont la moitié ont été créés par l’investissement
de groupes d’ouvriers et sont financièrement fragi-
les.
Au second semestre 2007, un millier de PME spé-
cialisées dans les chaussures, sur les sites de Wen-
zhou et Dongguan ont fermé.
PÉKIN GESTICULE CONTRE L’ATTRIBUTION
DU PRIX NOBEL DE LA PAIX
Le nom du dissident Hu Jia revient avec persis-
tance pour le prix Nobel de la Paix 2008, ce qui n’a
pas manqué de provoquer une réaction officielle
par le porte-parole du ministère des Affaires étran-
gères chinois, Liu Jianchao. Celui-ci espère, selon
des termes consacrés du régime communiste, que
le comité Nobel « ne heurtera pas les sentiments
des Chinois ».
Les manœuvres en privé sont, elles, plus nom-
breuses et plus directes. Hu Jia, en avril cette
année, a rencontré des journalistes étrangers et
écrit des articles appelant à plus de liberté. Il a
été condamné à trois ans et demi de prison pour
« incitation à la subversion du pouvoir d’État. » Sa
femme et son bébé ont été placés en résidence
surveillée et empêchés de communiquer avec l’ex-
térieur.
Tony Sen, président de l’Institut international de
recherche sur la paix basé à Oslo et qui avait prédit
en 2007 que le Nobel reviendrait à Al Gore, a fait
de Hu Jia son premier choix pour 2008.
AVIS DE RECHERCHE CONTRE DES MANI-
FESTANTS DE LA PROVINCE DE HUNAN
Après trois jours de manifestations violentes fin
septembre, la police a placardé des avis de recher-
che dans toute la ville de Jisou demandant aux
responsables du blocage des bureaux gouverne-
mentaux le 23 septembre de se rendre à la police.
Les manifestants, dont une quarantaine ont été
arrêtés d’après les médias officiels, ont été victi-
mes de campagnes de levée de fonds illégales
dans la ville de Jisou. Si le calme est revenu suite à
l’intervention de l’armée, la tension reste palpable.
Mi-septembre, des milliers de personnes avaient
bloqué les voies de chemin de fer de la ville. Elles
accusaient les autorités locales d’avoir autorisé
des levées de fonds par des investisseurs immobi-
liers qui n’ont jamais reversé les intérêts aux inves-
tisseurs.

43.644.952 Chinois ont démissionné du Le système communiste chinois est incapable

ÉDITORIAL Parti après avoir lu les Neuf commentaires
sur le Parti Communiste. Ce mouvement d’éliminer les produits contaminés du marché
de démissions reste pour le peuple un
moyen d’expression non violent, apolitique et sans précédent dans L’activiste démocrate péki-
la société chinoise face à la dictature et à la corruption généralisée
au sein du régime. La Grande Époque publie un extrait traduit de
nois Gao Hongming a déclaré
cette série éditoriale chinoise dans chacun de ses numéros. que les problèmes liés à l’ali-
mentation et aux médicaments
chinois proviennent tous de
NEUF COMMENTAIRES l’incompétence du gouverne-
Suite du sixième commentaire tagne et de France, quand nous regrettons ment et de la corruption des
que le travail monumental de l’Encyclopé- fonctionnaires. Gao ajoute que
« Les choses de ce monde vont et vien- die Yongle ait été détruit par un envahis- la perversion de la législation
nent, seur, comment aurions-nous pu anticiper
Anciennes, modernes, elles vont et vien- que les destructions causées par le PCC
sous le règne du Parti Commu-
nent, seraient beaucoup plus étendues, beau- niste chinois (PCC) rend très
Rivières et montagnes ont une gloire coup plus durables et profondes que cel- difficile la résolution des pro-
immuable, les de n’importe quel envahisseur ? blèmes qui sont à l’origine de
On peut toujours les voir de ce sentier… »
Si les Chinois d’aujourd’hui se sou- 4. LA DESTRUCTION DES CROYANCES
cette affaire.
venaient encore de certaines parties de SPIRITUELLES
leur histoire, ils ne ressentiraient proba- Le PCC ne s’est pas contenté de GAO maintient que ce système doit être
blement plus la même chose en lisant ce détruire les formes de la religion et de la remis en question faute de quoi aucun
poème de Meng Haoran. Les sites histo- culture, il a aussi employé toutes ses capa- changement réel n’est possible. Il
riques de la montagne et de la fameuse cités pour supprimer l’identité spirituelle ajoute que « résoudre les problèmes de
rivière ont été détruits, ils ont disparu dans des gens, formée par la foi et la culture. l’alimentation chinoise est 100 fois plus
la tourmente de la campagne « À bas les Prenons par exemple la manière dont important que les Jeux Olympiques ou
Quatre vieilleries ». Non seulement on a le PCC a traité les croyances des grou- tout autre problème politique ».
détruit le pavillon de l’Orchidée, où Wang pes ethniques. Le PCC considérait les « Personnellement je pense que ce
Xizhi a écrit le célèbre poème Prologue au traditions du groupe des musulmans Hui genre de problème doit être résolu de AFP

recueil de poèmes composés au Pavillon
de l’orchidée, mais la tombe même de
Wang Xizhi a été profanée. L’ancienne
habitation de Wu Chen’en dans la pro-
vince de Jiangsu a été détruite, l’ancienne
résidence de Wu Jingzi dans la province
d’Anhui a aussi été rasée, la tablette de
pierre où l’on pouvait lire Le pavillon du
vieil homme ivre écrit par Su Dongpo a été
renversée par les jeunes révolutionnaires
et les caractères gravés dans la pierre ont
été rayés.
L’essence de la culture chinoise a été
transmise et s’est accumulée pendant
des milliers d’années. Une fois détruite
on ne peut pas la ressusciter. Pourtant le
PCC a pris plaisir à l’anéantir au nom de
la révolution. Quand nous nous lamen-
tons devant le Vieux palais d’été, connu
sous le nom de palais des palais , qui a été
brûlé par les forces alliées de Grande-Bre-
comme faisant partie des « Quatre vieille-
ries » – vieilles pensée, culture, tradition,
coutumes. Il a donc forcé le groupe des
Hui a manger du porc. Les fermiers musul-
mans et les mosquées devaient élever des
porcs et chaque foyer devait donner deux
porcs par an à la nation. Lors d’un incident
extrêmement cruel, les Gardes rouges ont
forcé le deuxième bouddha tibétain vivant
de la hiérarchie, le Panchen Lama, à man-
ger des excréments humains, et trois moi-
nes du temple bouddhiste de Harbin, dans
la province de Heilongjiang ont été obli-
gés de tenir un panneau où on lisait « Au
diable les Soutras – ce n’est qu’un tas de
merde ».
Pour en savoir plus :
www.lagrandeepoque.com/jiuping
Version audio disponible sur le site radio
Son de l’Espoir : www.sondelespoir.org
la manière suivante : informer le public
sur les méthodes de régulation du gou-
vernement afin que les gens puissent
surveiller par eux-mêmes. Un autre
moyen serait de rendre le système plus
transparent afin que les fonctionnaires
puissent être étroitement encadrés et
sévèrement punis dès qu’un problème
survient », dit M. Gao.
« Sous le système actuel du PCC
il est impossible de résoudre les pro-
blèmes d’intoxications alimentaire et
médicamenteuse, pourtant le gouver-
nement dira qu’il peut le faire, mais
en expliquant qu’il est difficile de le
faire actuellement. Nous sommes dans
un système où la formation et la sur-
veillance ne sont pas ouvertes au public.
Elles sont faites en secret la plupart du
temps. Dans un tel environnement, les
fonctionnaires passent naturellement
Des policiers surveillent des piles de paquets de lait en poudre
soupçonnés d’être frelatés et qui ont été rappelés. L’entreprise
chinoise Sanlu Group à l’origine de la contamination du lait maternisé
a provoqué une crise sanitaire dans laquelle au moins 53.000 enfants
sont tombés malades. Depuis des mois, cette entreprise cache les
plaintes qu’elle a reçues sur les produits qu’elle commercialise.
des accords secrets avec les hommes le PCC. Arrêté le 29 juin 1999, il a été
d’affaires avec qui ils travaillent pour
accusé de subversion du pouvoir d’État
s’enrichir illégalement. Au lieu d’es-et condamné à huit ans de prison. Il a
sayer de résoudre les problèmes d’ali-été persécuté en prison de manière
ments ou de médicaments contaminés, particulièrement barbare car il refusait
ces fonctionnaires préfèrent établir des
de plaider coupable pour ces accusa-
contacts et créer des alliances avec des
tions. M. Gao a été arrêté de nouveau
dirigeants d’entreprise, ignorant le pro-
en 2008, parce qu’il a publié des articles
blème réel », explique M. Gao. sur Internet défendant le Falun Gong
et condamnant le PCC, en proposant
QUI EST GAO HONGMING ? que ce dernier présente ses excuses et
Gao Hongming vit à Pékin. Il a mis dédommage les victimes de la persécu-
en place le Parti démocrate chinois tion du Falun Gong.
après avoir coupé tous ses liens avec FU MING & YU YIN
La Grande Époque ● 1 – 15 OCTOBRE 2008
Lait contaminé chinois : culture du secret et étrangers « naïfs »
Le scandale du lait chinois con-
taminé délibérément avec le pro-
duit toxique mélamine a pris des
proportions internationales. De
nombreux pays réévaluent ou ont
interdit à cette heure l’importation
de produits chinois, particulière-
ment ceux contenant des substan-
ces laitières.
MÊME si la sortie dans l’espace d’un équi-
page chinois est venue déloger la crise du
sommet des nouvelles « Chine » de cer-
tains médias occidentaux, il est peu proba-
ble que le programme spatial du pays en
quête de puissance mondiale vienne rassu-
rer la population aux prises avec de sérieux
problèmes plus terre à terre.
Le lait « enrichi » de mélamine, un produit
utilisé pour fabriquer le plastique, a officielle-
ment causé la mort de quatre enfants et en
aurait fait tomber malades environ 50.000
autres. Cette substance, ajoutée au lait pour
lui donner une apparence plus riche en pro-
téines, cause des troubles rénaux pouvant
entraîner la mort.
De nombreuses compagnies chinoises
ont été mises en cause, dont les plus impor-
tantes sont Sanlu, Mengniu et Yili. Cette
dernière était commanditaire et fournisseur
officiel des Jeux olympiques de Pékin.
Selon le quotidien Telegraph, Sanlu avait
reçu des plaintes de parents depuis le mois
de mars dernier. La nouvelle aurait été gar-
dée secrète afin de préserver la « stabilité
préolympique ». La présidente de Sanlu,
maintenant limogée, était également une
haute responsable du Parti communiste chi-
nois (PCC).
Ce n’est pas la première fois que le man-
que de transparence du régime chinois et
son musellement des médias provoquent
une crise internationale. En 2003, sa volonté
de garder secrète l’épidémie du SRAS avait
eu des répercussions à travers le monde
entier. On aurait pu espérer que cela serve
de leçon aux autorités, pour qu’à l’avenir
elles puissent agir de façon responsable.
Du côté des produits « Made in China »,
les problèmes actuels sont-ils surprenants ?
Jouets couverts de peinture au plomb, den-
tifrices au diéthylène glycol, aliments mortels
pour animaux, etc. Ces avertissements con-
cernant la sécurité des produits fabriqués en
Chine sont très récents. Néanmoins, compa-
gnies et investisseurs étrangers poursuivent
leur quête de l’Eldorado chinois.
Cela aura eu des conséquences désas-
treuses pour l’entreprise laitière néo-
zélandaise Fonterra qui possède des parts
de Sanlu à hauteur de 43 %. Pendant huit
mois, ses partenaires chinois lui auraient
De la crise financière vers une dépression ou une mutation
vers une économie future ?
L’ampleur de la crise financière
actuelle aggrave la situation éco-
nomique mondiale dont les der-
niers indicateurs convergent vers
une récession. Certains com-
mencent à évoquer le spectre
de la dépression comparable à
celle qui a suivi le krach boursier
de 1929 avec pour corollaire un
effondrement de la production,
de l’investissement, des prix et
des revenus.
À L’ORIGINE de la crise financière d’oc-
tobre 1929, on trouve l’emballement du
boom spéculatif de 1926, dont les moteurs
ont été la possibilité d’acheter des actions
à crédit et la perspective de gains rapi-
des. Une bulle financière virtuelle s’est
ainsi rapidement créée à Wall Street,
où plus de 6 % de la population améri-
caine s’est transformée en spéculateurs
et où 80 % des actions ont été achetées
à crédit. Parallèlement, comme la valeur
des entreprises croissait de façon beau-
coup plus modeste, les gains réels n’ont
pas été au rendez-vous, ce qui a provo-
qué un effondrement des cours, la faillite
personnelle de nombreux emprunteurs,
puis celle de leurs créanciers. Malgré une
Un bébé souffrant de calculs rénaux, après avoir consommé du lait contaminé à la mélamine, subit des
traitements dans un hôpital de Chengdu en Chine.
caché le problème du lait, et maintenant elle
doit essuyer une perte de 139 millions de
dollars. La plus grande entreprise de la Nou-
velle-Zélande ne savait pas ce qui se passait
dans son propre carré de sable.
Qui est à blâmer ? Certains font remar-
quer la ligne de conduite que les consultants
recommandent fortement aux investisseurs
intéressés par le marché chinois : « Si vous
voulez percer, assurez-vous de ne pas faire
‘perdre la face’ à vos interlocuteurs ». Une
approche également privilégiée dans cer-
tains cercles politiques. En d’autres mots,
pour faire de gros profits, il vaut mieux se
taire au sujet des pratiques malhonnêtes et
peu éthiques largement répandues, afin de
ne pas embêter les partenaires et le gouver-
nement chinois.
D’autres soulignent la naïveté des Occi-
dentaux par rapport à la Chine, et surtout
envers les dirigeants chinois. « Ils voient
seulement l’immense marché de 1,3 mil-
liard de personnes, sans reconnaître le dan-
ger des marchés chinois », souligne Jia Jia,
un ex-responsable communiste de l’Asso-
ciation provinciale de Science et de Techno-
logie de la province de Shanxi, maintenant
exilé en Nouvelle-Zélande. Selon lui, la con-
troverse du lait en poudre Sanlu/Fonterra a
un lien avec le PCC.
« La Nouvelle-Zélande est un pays démo-
cratique et la Chine un pays communiste
La Chambre des représentants américains approuve le plan de
sauvetage du système financier américain. Nancy Pelosi, présidente
démocrate de la Chambre, soumet le plan pour signature le 3 octobre
2008 au Capitole à Washington DC.
spectaculaire chute des taux d’intérêt, on
a assisté à une brusque crise du crédit,
mais les autorités monétaires n’ont pas
injecté d’argent et ont laissé s’approfon-
dir la dépression jusqu’en 1932.
La crise financière de septembre 2008
trouve son origine dans celle des « sub-
totalitaire. Toutes les entreprises en Chine
sont sous le leadership du Parti et sont en
fait contrôlées par le Parti... En Chine, tout
est sous le contrôle du Parti », explique Jia
Jia. Il avertit les entreprises de se renseigner
sur les conditions véritables en Chine avant
d’y faire des affaires.
Michael Barnett, directeur exécutif de la
Chambre de commerce d’Auckland, affirme
que la leçon tirée du lait empoisonné est que
les entreprises chinoises méprisent le genre
d’idéaux défendus par la plupart des firmes
néo-zélandaises. « Et c’est un avertissement
pour que les autres deviennent prudents... il
faut être capable d’évaluer le risque d’être en
relation [d’affaires] avec quiconque...», men-
tionne-t-il.
Selon M. Barnett, les firmes voulant faire
des affaires en Chine doivent bien choi-
sir leur partenaire et maintenir un contrôle
absolu sur leur marque de commerce. Mais
Jia Jia estime que cela est impossible sous
le régime actuel. « Fonterra aurait dû savoir
que les aliments empoisonnés, les produits
contrefaits... ce sont des problèmes politi-
ques causés par le système de gouverne-
ment chinois », ajoute-t-il. « Je crois que
c’est un avertissement à tous les grou-
pes financiers qui investissent en Chine...
après ce scandale, ils devraient avoir une
meilleure compréhension du Parti commu-
niste chinois. »
Mark Wilson/Getty Images
primes », qui a démarré pendant l’été
2007. Elle se caractérise notamment
par une période de faibles taux d’inté-
rêts et l’émergence de nouveaux instru-
ments financiers sophistiqués (titrisation
des dettes), dont les énormes perspec-
tives de gains masquaient des risques
www.lagrandeepoque.com
China Photos/Getty Images
Les propos de Chen Weijian, un militant
des droits de l’Homme et rédacteur en chef
du New Times Weekly, font écho à ceux de
Jia Jia : « Si une entreprise va en Chine pour
faire du commerce, elle doit être au cou-
rant de la corruption et du côté obscur du
monde des affaires sous la dictature du Parti
communiste chinois. » « Si cette société
ne peut garantir la valeur de l’honnêteté à
ses clients, et se soumet plutôt à la culture
malsaine des affaires créée sous le Parti
communiste, alors elle rencontrera des pro-
blèmes, comme Fonterra », poursuit-il.
LA MÉLAMINE PEUT ÊTRE CONSOM-
MÉE, SELON LE PCC
Le Parti communiste chinois a publié des
informations mensongères sur les dangers
de la mélamine. Une enquête de La Grande
Époque sur des sites Internet du PCC a per-
mis de révéler des déclarations du PCC
selon lesquelles le lait « enrichi » de méla-
mine pouvait être consommé sans danger.
Un rapport intitulé Result of Special Exa-
mination on Melamine Content of Natio-
nal Liquid Milk Products (Résultat d’une
enquête spéciale sur le contenu en méla-
mine des produits laitiers nationaux) a été
publié sur le site People.com.cn, soit le por-
tail équivalent du Quotidien du peuple en
ligne, un journal du PCC. Le rapport indique
que la U.S. Food and Drug Administration
d’autant plus élevés qu’ils étaient devenus
indétectables et revendus sur toutes les
places financières. Ces facteurs ont favo-
risé l’endettement excessif des ménages
américains, dont un grand nombre se sont
retrouvés à la rue dès que les taux d’in-
térêt sont remontés. Les emprunteurs ne
pouvant plus rembourser leurs dettes, on
a alors assisté à un effondrement du mar-
ché immobilier américain, puis à la faillite
de nombreux créanciers et à la chute de
géants de la finance tels que Lehman Bro-
thers. À la différence de 1929, cependant,
les banques centrales américaine et euro-
péenne ont réagi immédiatement en injec-
tant massivement des liquidités sur les
marchés.
La crainte de voir se reproduire une
dépression équivalente à celle du début
des années 30 est telle que George W.
Bush vient de faire approuver par le Sénat
puis le Congrès américain un plan de sau-
vetage « historique » de 700 milliards de
dollars, et que l’Europe commence à évo-
quer un plan similaire. Comme en 1933,
l’État, c’est-à-dire les contribuables, vient
au secours des spéculateurs et des ban-
quiers, ce qui permet à certains de rappe-
ler que rien ne change, puisqu’on continue
à « privatiser les gains et à nationaliser les
pertes ». Mais, à la différence de la crise
de 1929, où il a fallu attendre 4 ans, et un
taux de chômage de 25 % avant que le
Économie 7
(FDA) et l’Autorité européenne de sécurité
des aliments (EFSA), de concert avec les
autorités chinoises, ont mené des évalua-
tions scientifiques sur la marge de sécurité
de la mélamine.
« Selon les standards d’évaluation les
plus stricts, il est sécuritaire pour un adulte
d’un poids moyen de 60 kg de boire moins
de deux litres de lait avec cette quantité de
mélamine quotidienne. À ce jour, il n’y a eu
aucun cas diagnostiqué de calculs dans le
système urinaire causé par la consomma-
tion de ces produits laitiers », indique le
texte.
Un journaliste de La Grande Époque a
contacté la FDA pour clarifier ce fait. Une
porte-parole de l’organisation a indiqué qu’ils
n’avaient jamais publié d’information quant à
la marge de sécurité de la mélamine. L’in-
formation publiée par la FDA met au con-
traire les consommateurs en garde de ne
pas acheter du lait en poudre provenant
de Chine.
Dans un autre reportage publié par
Science Times en Chine, un professeur
impliqué dans la recherche sur la sécurité
alimentaire, Chen Junshi, affirme qu’il n’y
a pas de quoi paniquer quant à la sécurité
des aliments. Selon lui, il n’y a pas de ris-
que pour la santé des gens qui consomment
de petites quantités de lait contenant de la
mélamine, et que le lait frelaté pour enfants
avec des niveaux peu élevés du poison est
sécuritaire.
La ministre chinoise de la Santé, Chen
Zhu, a été citée par Xinhua.net le 17 sep-
tembre dernier, affirmant que la « mélamine
est un [produit] chimique industriel peu toxi-
que. Les tests sur des animaux démontrent
que le métabolisme chez les animaux est
rapide, alors [la mélamine] ne demeure pas
dans le corps. Cela affecte seulement le sys-
tème urinaire, et il n’y a pas de preuve que
cela peut causer des tumeurs dans le corps
humain ».
Les experts en Chine ne sont pas tous
d’accord. Dr Gao Dawei, ex-doyen du Light
Industry and Food College à la South China
University of Technology, estime que cette
information a été publiée de façon très irres-
ponsable.
« La mélamine est un type de monomère
qui forme un polymère hautement organi-
que », explique-t-il. « Cela affecte plusieurs
organes une fois dans le corps humain. Par-
ticulièrement si consommée en grande quan-
tité avec de la nourriture. La mélamine peut
aussi demeurer dans les organes autres que
les reins. Cela pourrait aussi affecter le foie
et la vésicule biliaire. Le mal causé au corps
humain est en fait très grave. »
NOÉ CHARTIER,
CHARLOTTE CUTHBERTSON
ET BARRY MILLS
président Roosevelt ne mette en place
son plan de relance économique, la crise
actuelle a vu les autorités politiques et
monétaires réagir de façon rapide et mas-
sive afin d’endiguer la récession qui s’an-
nonce. Rien ne dit cependant que les
injections de capitaux seront suffisantes
pour éviter réellement une dépression
dans les pays occidentaux. Marc Faber,
un gourou de la finance depuis qu’il a
prévu le krach d’octobre 1987, évoque
des besoins cinq fois supérieurs au plan
annoncé, selon Bloomberg.
Des appels à instaurer rapidement de
nouveaux modes de régulation finan-
cière à l’échelle européenne et internatio-
nale se font écho de la part des hommes
politiques. À la différence des années
30 cependant, l’équilibre de notre pla-
nète avec des ressources limitées et le
réchauffement climatique, qui ne se posait
pas il y a 80 ans, paraît maintenant bien
fragile. Pour maintenir leur économie, les
hommes seront donc rapidement con-
traints d’en changer le moteur principal : la
cupidité. La sphère financière devra inté-
grer les intérêts de toutes les parties pre-
nantes des entreprises, raisonner à long
terme, et ne plus se limiter au seul intérêt
du profit à court terme. Une telle transition,
qui s’apparente à une mutation, ne se fera
pas sans heurts ni sans nouvelles crises.
PATRICK C. CALLEWAERT
8 Droits humains www.lagrandeepoque.com 1 – 15 OCTOBRE 2008 ● La Grande Époque

La fonte des glaces menace

STEPHANE DE SAKUTIN/AFP
A Paris, l’actrice française Marie-Christine Barrault (G) prononce
un discours à côté de la photo d’Anna Politkovskaya, journaliste
russe, le 7 octobre 2007 lors d’un rassemblement consacré
à la journaliste d’investigation russe dont c’était le premier
anniversaire de la mort.
les moyens de subsistance
BISHKEK – Le nombre de glaciers a baissé de 15 % au Kir-
ghizistan au cours des 30 dernières années, selon les experts
kirghizes de l’environnement, et ce, en raison du changement cli-
matique.
« Le phénomène de la fonte des glaces est un problème très
grave pour le Kirghizistan, car les principales ressources en eau
proviennent avant tout des glaciers », a expliqué à IRIN Anna
Kirilenko, de l’organisation non gouvernementale (ONG) BIOM
de défense de l’environnement, à Bichkek, la capitale.
Selon Mme Kirilenko, la fonte des glaces menace les réser-
ves d’eau. « Il s’avère qu’aujourd’hui, nous avons beaucoup
d’eau mais, demain, nous en aurons peu. Il y aura certains désé-
quilibres ; le comportement des cours d’eau va changer. Tous
les écosystèmes situés près des chaînes de montagnes seront
sujets à certains changements », a-t-elle prévenu.
Selon l’International Fund for saving the Aral Sea, une organi-
sation intergouvernementale créée par les pays d’Asie centrale Irin News

pour sauver la mer d’Aral, 4,2 % du territoire kirghize, soit environ La fonte des glaces menace la survie de
8.400 kilomètres carrés, est recouvert de glaciers. nombreuses familles rurales.
« L’affaire n’est pas élucidée. Tobias Bolch, de l’Institut de cartographie de l’université tech-
nique de Dresde, a mené une étude sur le recul des glaciers et a-t-il expliqué.

Je demande aux journalistes

de ne pas oublier ma mère »,
déclare le fils d’Anna
Politkovskaïa
LE 3 OCTOBRE 2008, Jean-François
Julliard, secrétaire général de Reporters
sans frontières, Ilya Politkovskiy, fils de
la journaliste Anna Politkovskaïa assas-
sinée à Moscou le 7 octobre 2006, et
Roza Malsagova, rédactrice en chef du
site d’informations ingushetiya.ru, ont
donné une conférence de presse dans
les locaux de Reporters sans frontières
à Paris. Les développements dans l’en-
quête sur le meurtre de la journaliste, les
récents événements dans le Caucase
russe ont éclairé la situation de la liberté
de la presse en Russie.
« L’arrivée au pouvoir de Dmitri Med-
vedev n’a apporté aucune amélioration à
la situation de la liberté de la presse en
Russie. La presse audiovisuelle est sous
contrôle du Kremlin et les violences con-
tre les journalistes n’ont pas diminué », a
déclaré Jean-François Julliard en ouver-
ture de la conférence.
À quelques jours du second anniver-
saire de l’assassinat d’Anna Politkovs-
kaïa, le 7 octobre 2006, son fils Ilya a
annoncé que, le 2 octobre 2008, l’affaire a
été renvoyée devant un tribunal militaire,
car l’un des accusés est un ancien mem-
bre du FSB (ex KGB). « Notre crainte est
désormais que le procès ne se déroule à
huis clos », a déclaré Ilya Politkovskiy.
Le fils de la journaliste a par ailleurs
précisé qu’on ne pouvait « pas consi-
dérer l’enquête close car, sur les bancs
des accusés, ne se trouveront ni le tireur
ni les commanditaires de l’assassinat
de ma mère ». Il a demandé aux jour-
nalistes de « ne pas oublier [sa] mère »
et craint qu’après le procès, on ne dise
que l’affaire est close, et que les véri-
tables coupables ne soient pas inquié-
tés. « Il est important que l’attention des
médias ne fléchisse pas. » Il a ajouté que
la famille avait porté plainte auprès de la
Cour européenne des droits de l’Homme
pour « violation du droit à la vie » (article
2 de la Convention). Roza Malsagova,
rédactrice en chef du portail d’informa-
tions ingushetiya.ru, est revenue quant
à elle sur l’assassinat, le 31 août der-
nier, du propriétaire du site, Magomed
Yevloev. Ce dernier avait été arrêté à la
descente de l’avion qui le ramenait de
France et avait été retrouvé mort quel-
ques heures plus tard. L’enquête a conclu
à une « mort par imprudence ». « Mago-
med était le propriétaire du seul site par-
lant des enlèvements et des meurtres de
jeunes hommes perpétrés par les ser-
vices spéciaux et la police ingouches.
Je prends la responsabilité d’affirmer
que la mort de Magomed est une ven-
geance de hauts responsables russes et
ingouches », a déclaré Roza Malsagova
devant la presse.
Reporters sans frontières
l’évolution du climat dans le Tien Shan Nord, une chaîne de mon-
tagnes située le long des frontières du Kazakhstan et du Kirghi-
zistan. Selon cette étude, la fonte des glaces dans cette zone est
étroitement liée aux changements de température.
« Si, entre 1960 et 1975, un petit rétrécissement des glaciers
a été observé, la fonte a considérablement augmenté depuis les
années 1970. La zone glaciaire a diminué de 35 à 40 % », pou-
vait-on lire dans ce rapport, datant de 2005.
D’après un autre rapport publié conjointement par le Pro-
gramme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) et
le World Glacier Monitoring Service (WGMS) le 1er septembre
2008 et intitulé Global Glacier Changes : facts and figures (Évo-
lution mondiale des glaciers : faits et chiffres), au cours du XXe
siècle, la zone glaciaire du Tien Shan aurait rétréci d’environ 25
à 35 %.
LES CONSÉQUENCES SUR L’AGRICULTURE ET LA
SÉCURITÉ ALIMENTAIRE
Selon certains spécialistes, la fonte des glaces aura de lourdes
conséquences sur le secteur agraire et la sécurité alimentaire.
« Évidemment, la fonte des glaces se répercutera sur la vie éco-
nomique et sociale du pays », a confirmé Mme Kirilenko.
Certains fermiers en ressentent déjà l’impact. « Je cultive des
tomates, des concombres et des choux chaque année. Habituel-
lement, la récolte est bonne et je gagne bien ma vie, mais cette
année, il est arrivé que la rivière qui descend des montagnes ne
donne pas d’eau. La récolte de cette année a été entièrement
gâchée parce qu’en août, pendant près de deux semaines, il n’y a
pas eu d’eau et toutes les plantes sont mortes », a déploré Asan
Torobaev, un petit fermier de la ville d’Osh, dans le sud.
Selon Ryskul Usubaliev du Central-Asian Institute for Applied
Geosciences (CAIAG), la répartition géographique inégale des
glaciers compte parmi les facteurs qui influent sur la sécurité ali-
mentaire. « Les régions du pays qui comptent moins de glaciers
et la population la plus importante se trouveront confrontées à
des pénuries d’eau pendant la période estivale d’irrigation. Cer-
taines régions, en particulier la région ouest de la vallée de Chuy,
souffrent déjà de ces pénuries », a indiqué M. Usubaliev.
Cela s’explique par le rétrécissement des glaciers dans les
régions montagneuses, a-t-il précisé.
Des scénarios semblables peuvent être observés sur le ver-
sant sud de la chaîne de montagnes de Kungey Alatoo, où l’on
constate une grave détérioration des glaciers. Dans cette zone,
la fonte est bien plus rapide que dans d’autres régions du Kirghi-
zistan, car les glaciers sont situés sur le versant sud de l’arête,
En Asie centrale (Kirghizistan compris), selon le rapport du
PNUE et du WGMS, la détérioration des glaciers s’accompagne
d’une couverture de débris de plus en plus vaste au front d’un
grand nombre de glaciers et de la formation de lacs glaciaires.
Ces poches d’eau, parfois aussi endiguées par le déplacement
rapide des glaciers, risquent de se rompre, provoquant ainsi des
crues soudaines dans les zones situées en aval.
Les chaînes de montagnes d’Asie centrale servent de château
d’eau à des millions de personnes, selon le rapport. Les effluents
glaciaires sont donc une ressource importante en eau douce
dans les régions arides.
BESOIN DE SYSTÈMES D’IRRIGATION EFFICACES
Pourtant, selon Murat Koshoev, coordinateur national du
programme LIFE et du Programme de micro-financement des
Nations Unies, c’est la vétusté des systèmes d’irrigation et l’ex-
ploitation inefficace des ressources actuelles en eau qui auront le
plus de répercussions sur la sécurité alimentaire.
« Ces [facteurs] sont plus importants pour la sécurité alimen-
taire que la fonte des glaces », a-t-il indiqué à IRIN. « Nous
devons faire en sorte que les systèmes d’irrigation soient plus
efficaces car une grande partie des produits agricoles du Kirghi-
zistan, surtout les céréales, sont cultivés sur des terres irriguées.
Plus vite nous aurons mis en place des systèmes d’irrigation
permettant une économie et une consommation réduite d’eau,
mieux nous pourrons assurer notre sécurité alimentaire », a
estimé M. Koshoev.
Selon les prévisions du CAIAG, si les tendances actuelles se
maintiennent dans le domaine du changement climatique, envi-
ron 50 à 70 % de la couverture glaciaire du Kirghizistan disparaî-
tra. Cela se répercutera sur le niveau des cours d’eau et, par là
même, sur les réserves d’eau.
Selon M. Usubaliev, les glaciers des arêtes sud de la vallée de
Fergana connaîtront un sort semblable car, aujourd’hui, presque
tous les glaciers qui se trouvent sur ces arêtes sont sur le point
de disparaître.
« La fonte des glaces dépend du réchauffement climatique
et, pour enrayer ce processus, il faut prendre un certain nom-
bre de mesures économiques. Des restrictions doivent notam-
ment être imposées sur l’émission d’agents contaminants dans
l’atmosphère. »
« Le Protocole de Kyoto des Nations unies a été adopté dans
ce but mais, malheureusement, tous les pays ne l’ont pas signé
et tous ne le soutiennent pas », a rappelé M. Usubaliev.
Irin News

Brèves d’espoir Avec l’agence d’informations Reporters d’Espoirs

DES MICRO-DISPENSAIRES FRANCHISÉS AU
CHEVET DES KENYANS
Le réseau de dispensaires CFW shops (The
child and family wellness shops network) a été
mis en place au Kenya en 1999 à l’initiative de
la Health Store Foundation (HSF). Son but : per-
mettre aux populations des zones rurales et péri-
urbaines d’accéder près de chez eux à des soins
et médicaments de qualité et à bas prix. Chaque
mois, 40.000 patients sont pris en charge par le
réseau. La Health Store Foundation dispense
également aux franchisés conseils, formations et
enfin des contrôles réguliers de la qualité du ser-
vice et du respect des standards imposés dans le
cadre de la franchise. Le lancement de 14 nou-
veaux réseaux en Afrique subsaharienne, soit 225
dispensaires, est prévu d’ici fin 2012. Le réseau
HealthStore a été intégré dans la stratégie natio-
nale de lutte contre la malaria initiée par le minis-
tère de la Santé du Kenya.
En savoir plus :
www.healthstore.org ; www.cfwshops.org
LE HANDIMANAGEMENT, NOUVELLE DISCI-
PLINE UNIVERSITAIRE
Avec l’intégration croissante des personnes
handicapées dans les entreprises, l’organisme
de formation Companieros a lancé en 2006 un
programme éducatif pour former les étudiants
des universités et des grandes écoles françai-
ses au « handimanagement ». Avec 30 écoles et
16 entreprises partenaires, le programme a tou- HANDIDENT : UN RÉSEAU DE DENTISTES
ché 550 étudiants en deux ans. Nouveauté 2008 :
les labels « Handimanagers » qui ont été octroyés
aux étudiants. Les étudiants des universités ou des
écoles de commerce et d’ingénieurs sont ainsi pré-
parés au management de personnes handicapées.
Le financement de Handimanagement est entière-
ment assuré par les entreprises partenaires.
En savoir plus : www.companieros.com
LE COSTA RICA SUR LA VOIE DE L’ÉCO-
CONDUITE
Le projet costaricain Ecoeficiencia convertit
les automobilistes particuliers et professionnels à
l’éco-conduite grâce à des ateliers de sensibilisa-
tion et de formation. Résultats : des économies de
carburant supérieurs à 10 %, moins d’émissions
de CO2 et moins d’accidents de la route. Ecoefi-
ciencia dispense des cours assurés par des ingé-
nieurs (spécialisés en électrique, en mécanique,
en production industrielle) mais aussi des psycho-
logues et des éducateurs, l’aspect humain allant
de pair avec l’aspect technique. Quatre modules
sont proposés : techniques de conduite sûre ; ser-
vice au client pour les transporteurs ; adaptation au
changement ; technique d’économie de carburant.
Les conseils pour adopter une éco-conduite ? Pas-
ser les vitesses rapidement, rouler entre 2.000 et
2.500 tours par minute pour un véhicule essence et
entre 1.500 et 2.000 pour un diesel, etc.
En savoir plus : www.ecoeficienciacr.org
ACCESSIBLE À TOUS
La visite chez le dentiste n’est jamais une
partie de plaisir, mais quand on souffre d’un
handicap, elle devient le parcours du combattant.
L’accès aux soins bucco-dentaires est pourtant un
droit, le même pour tous. C’est pour le garantir aux
personnes handicapées qu’a été créé en 2005 le
réseau Handident, à l’initiative de l’APF (Associa-
tion des paralysés de France) et du CRCO 59-62
(Comité régional de coordination de l’ordre des chi-
rurgiens dentistes du Nord et du Pas-de-Calais).
L’objectif de cette initiative est double : sensibili-
ser et former les praticiens et le personnel para-
médical et médico-social à la santé bucco-dentaire
chez les personnes handicapées et faciliter l’accès
de ces dernières à des soins de qualité, adaptés à
leurs besoins.
En savoir plus : www.handident.com
ÉCOSSE : UNE ÎLE ÉCLAIRÉE PAR SES
VENTS, SES EAUX ET UN SOLEIL RARE
Au large des côtes écossaises, depuis le 1er
février 2008, les 88 habitants de l’île d’Eigg ont
95 % de leur électricité fournie par un générateur
unique alimenté par quatre éoliennes, trois instal-
lations hydro-électriques et un panneau solaire
photovoltaïque. Cela a remplacé les micro-géné-
rateurs individuels fonctionnant au diesel et permis
à cette île jusque là dépourvue de système électri-
que de s’octroyer une indépendance énergétique
vis-à-vis du continent. L’objectif de « l’Isle of Eigg
heritage trust » et d’Eigg Electric est de créer un
système de fourniture électrique commun à tous
les habitants grâce aux énergies renouvelables
uniquement.
En savoir plus : www.isleofeigg.org
L’ÉCOLE DU COLIBRI : L’AGRO-ÉCOLOGIE
AU SERVICE DE L’ÉDUCATION
Une pédagogie au plus près de la terre et de
l’humain : c’est ce qu’offre depuis 2006 l’école des
Amanins, dans la Drôme (France). Ce centre de
séjour en agro-écologie a été co-fondé par l’agro-
écologue Pierre Rabhi. Les élèves y sont initiés
à l’agriculture écologique, sensibilisés aux ques-
tions environnementales et apprennent à travailler
dans un esprit de coopération. Isabelle Peloux,
ancienne enseignante et formatrice spécialisée en
psychologie, a voulu créer un lieu de vie ouvert où
l’apprentissage va de pair avec la mise en situa-
tion. Pourquoi l’école du « Colibri » ? Ce minuscule
oiseau est le personnage d’une fable amérindienne
qu’aime raconter Pierre Rabhi. Dans une forêt en
proie à un incendie, le colibri s’échine à jeter des
gouttes d’eau sur les flammes, entraînant avec lui
le reste des animaux. Une façon de symboliser
l’importance des menus actes individuels pour pré-
server la planète.
En savoir plus : www.lesamanins.com

NOUVEAU REGARD
WWW.LAGRANDEEPOQUE.COM
►Chronique d’un critique du 7e
D’Entre les murs à Paul Newman
LA SOUFFRANCE se trouve chez les jeu-
nes incompris, souvent déscolarisés ou
bien perdus, à cause d’une orientation trop
légère et surtout d’une insouciance et d’un
manque de considération chronique des
institutions qui n’ont souvent rien d’autre
à faire qu’acquiescer au système. Les pro-
fesseurs choisissent souvent ce métier,
même aujourd’hui, aussi étrange que cela
soit, par vocation. Face à des élèves rebel-
les venus souvent d’autres contrées où la
nourriture manquait et où le langage mal
maîtrisé posait problème, le professeur doit
trouver l’expression qui parlera le mieux à
ces êtres désireux de prendre la vie à bras
le corps. Entre les murs de Laurent Can-
tet exprime tout le désespoir de l’enfant en
passe de devenir adulte. Ces élèves igno-
rent les chemins qui les mèneront vers la
connaissance.
François Bégaudeau, professeur de
français au collège Mozart dans le XIXe
arrondissement avait publié un roman
chez Verticales Entre les murs qui avait
eu du succès : plus de 200.000 exemplai-
res s’étaient vendus. Laurent Cantet, pas-
sionné par le sujet, met en chantier un film
lumineux et pertinent avec des moyens limi-
tés et sans stars, avec un budget de 2,5 mil-
lions d’euros alors que le film de Baratier
Faubourg 36 en a coûté 28.
Cantet n’est pas étranger au sujet de
société. Pour Arte, il avait déjà tourné deux
excellents films Ressources humaines et
l’Emploi du temps.
L’adaptation du roman s’est opéré à
trois, Laurent Cantet, le réalisateur, Fran-
çois Bégaudeau, l’écrivain du roman et
acteur principal du film, Robin Capillo, scé-
nariste.
Des ateliers ont été organisés tout au
long de l’année. Sur 50 enfants, 24 ont
été sélectionnés parmi les plus assidus.
Le tournage s’est déroulé l’été 2007 pen-
dant sept semaines. Quatre caméras
haute définition ont été nécessaires pour
capter les différentes scènes et situations.
Au total 140 heures de rush ont été tour-
Instant terrestre www.instanterrestre.com
Instant tendresse
Elles auraient pu danser, comme il est de coutume en quelque occasion chez les Emberas, une des sept
communautés indigènes de la région de Darien au Panama. Mais ces deux soeurs offrent à l’oeil étran-
ger un instant tendresse. Son corps en protection, ce regard qui invite à garder sa distance pour la grande.
Cette timidité empreinte de détermination, ces bras en forteresse pour la petite. Deux soeurs, une même
âme, un soutien réciproque, un lien unique, viscéral, une évidence. C’est quelque part sur une terre défa-
vorisée, minée par la colonisation, et c’est un grand moment d’humanité.
La Grande Époque
UN REGARD NOUVEAU SUR UN MONDE EN ÉVOLUTION
nées, nécessitant six mois de montage
pour ordonner et choisir les options sensi-
bles du film. C’était un casse-tête, nous fait
comprendre Cantet dans le film.
Les textes ont été écrits et joués, ce n’est
pas de l’improvisation, et c’est là la perfor-
mance que l’on peut noter dans le film. Les
enfants ont dû se plier à la discipline de l’art
dramatique en jouant souvent des person-
nages opposés à eux-mêmes. Entre les
murs n’est donc pas un documentaire et
cependant il rapporte des situations actuel-
les dans une classe de 4e avec une touche
de fiction nécessaire pour que le cinéma
perce dans une réalité.
Certes, ce n’est pas une comédie musi-
cale et pourtant la gestuelle des protagonis-
tes, leur diction souvent savoureuse pour
sa simplicité et sa sincérité pourraient faire
penser à un spectacle sérieux où le meneur
de jeu, le professeur, tente de trouver un
fond commun avec tous les Français.
La France décide de faire des écono-
mies sur son ministère de l’Éducation, alors
qu’on le voit aujourd’hui, la formation durera
désormais toute notre vie.
Entre les murs de Laurent Cantet donne
un coup de pied dans la fourmilière de l’en-
dormissement que fabrique aujourd’hui
pour des raisons politiques notre société.
Sans doute trop original, le film n’a
pas fait l’unanimité à la sélection à Can-
nes. Thierry Frémont, directeur du Festi-
val de Cannes, avait ajouté des conditions
de participation étranges dans la sélection
officielle : les films devaient pouvoir aller
ensemble avec les films déjà sélectionnés,
Le conte de Noël d’Arnaud Desplechin et
La frontière de l’aube de Philippe Garrel.
Entre les murs a obtenu la Palme d’Or
au festival de Cannes. Il n’y avait aucun
photographe lors de sa présentation. Il
y a quelque chose de honteux que des
sujets en compétition de cette profondeur
là n’éveillent aucun intérêt de la part des
journalistes sur place dont le métier est de
secouer la curiosité d’autrui.
Sean Penn, président du jury du festi-
Texte de Anouk Corge et photo de Stéphane Cabaret
EpochTimes.com
val, acteur et réalisateur américain au talent
incontestable fuyant les studios hollywoo-
diens, a déclaré lors de la remise des prix :
« Je veux que mes enfants voient ce film
et pas seulement les miens ». La France
n’avait pas eu la Palme d’Or depuis 1987,
date à laquelle Pialat l’avait obtenue avec
Sous le soleil de Satan.
Valse avec Bashir est sorti il y a quelques
semaines et pourtant je crois nécessaire de
revenir dessus. Soulignons d’abord l’intelli-
gence du cinéma israélien, peu soucieux de
la censure, pratiquement absente. Le sujet
touche pourtant un sujet brûlant qui n’a pas
fini de faire couler l’encre, les prémices qui
ont permis Sabra et Chatila. Rappelons
que cette tragédie réprouvée par l’ensem-
ble des Israéliens fait descendre plus de
30.000 Israéliens dans la rue.
Le gouvernement israélien a été débordé
par la milice chrétienne libanaise, qui est
entrée dans les villages palestiniens mas-
sacrant par vengeance, hommes, femmes
et enfants. Un carnage, dit le narrateur du
film qui aurait pu être arrêté en haut lieu si
le haut commandement avait fait attention à
ses recommandations et ses craintes.
Le film est un dessin animé étonnant
pour sa précision et sa dramaturgie très
efficace. Un petit bijou dans le genre.
Christophe Baratier aime le cinéma qui
met en scène d’autres époques que la
sienne. Il aime la musique, le spectacle en
général. Avec Les Choristes, il s’était ins-
piré d’un film des années 40 en noir et blanc
– La cage aux rossignols de Jean Dréville –
l’avait adapté avec Noël-Noël puis moder-
nisé. C’était devenu un succès mondial.
On retient plus la voix du gamin charmant
du film qui depuis a grandi. À ce propos, à
part le talent exceptionnel du gamin et de
la chorale, aucune invention notable n’était
à retenir. Gérard Jugnot, le personnage de
l’instituteur, était très convaincant. Il faut
répéter qu’avec un gros budget (28 millions
d’euros) tout était possible, sauf peut-être
d’imiter les films consacrés sur la période
du Front Populaire comme Le crime de
Monsieur Lange où la comédie prenait
l’atmosphère d’une époque dans laquelle
soufflait la passion de l’indépendance et du
goût d’entreprendre avec les autres.
Les numéros musicaux sont sympathi-
Paul Newman vient de nous quitter
PAUL Newman vient de nous quitter le
26 septembre dernier, il a succombé à
un cancer des poumons. Il est demeuré
actif jusqu’à ses dernières minutes de vie.
Je l’aimais beaucoup, c’était mon acteur
préféré. Je contemplais ses grands yeux
bleus qui occupaient tout son visage dans
les films qu’il interprétait. J’avais l’impres-
sion que l’océan de nos rêves nous invitait
à flotter loin des rives du conformisme.
Cet homme n’était pas un simple
acteur, il répandait la lumière tout autour
de lui par sa modestie et sa conscience
d’être. Il disait souvent : « J’ai réussi
grâce à un beau profil et au talent des
costumières ». Il estimait avoir eu beau-
coup de chance durant son existence et
qu’il fallait bien partager un peu avec les
autres.
Né le 26 janvier à Cleveland (Ohio) d’un
père juif allemand propriétaire d’un maga-
sin de sport et d’une mère chrétienne
hongroise au foyer passionnée de théâ-
tre, il vit une enfance sans histoire. Il est
blessé à la guerre du Pacifique à laquelle
il participe de 1941 à 1945. Il passe trois
ans dans la marine comme radio. En
1949, il épouse la comédienne Jackie
Witte avec laquelle il aura trois enfants.
Son père meurt l’année suivante.
Il suit des cours en 1951, sous la direc-
tion d’Elia Kazan, Lee Strasberg et Martin
Ritt à l’Actors Studio de New-York. Cette
école va le consacrer au métier de comé-
dien dont il avait toujours rêvé.
En 1953, il monte sur scène et joue
Picnic et en 1955, Desesperate Hours qui
lui apportent la célébrité. La voix royale
pour Hollywood lui est ouverte.
Le cheminement de sa carrière est long
et parfois escarpé mais l’acteur s’accro-
che. Il épouse en 1958 en seconde noce
Joanne Woodward qui restera sa femme
jusqu’à la fin de sa vie. Elle lui amènera
équilibre, amour et conseil. Formidable
comédienne, Joanne conseillera son mari
lorsque dans certaines impasses « tragi-
ques », il devra faire des choix.
En 1954, Victor Saville lui propose
dans Le calice d’argent (The Silver Cha-
lice) son premier rôle au cinéma.
En 1958, Arthur Penn l’engage pour
incarner Billy the Kid dans Le Gaucher, un
très beau film qui fera éclater le talent dra-
matique de l’acteur, sa présence et son
célèbre regard bleu dominant l’image.
L’acteur désire casser son image pour
échapper à la figure du héros qui domine
le cinéma américain. Il veut échapper aux
clichés qui se répètent dans tous les scé-
narios qu’on lui propose. Il veut faire son
métier et créer de nouveaux personnages
dont le 7e art a besoin pour continuer à
vivre et justifier son existence. La même
année Newman tourne deux autres films
ÉDITION 141
1 – 15 OCTOBRE 2008 • BIMENSUEL
ques, Gérard Jugnot, formidable acteur,
tient presque tout le film à bout de bras, un
petit ballet genre Busby Berkeley pas trop
mal, cela sent tout de même la copie, qu’im-
porte c’est la mode. Gus van san n’avait-
il pas imité Hitchcock avec son psychose
dont on ne peut garder que le générique,
un clone parfait de l’original, pour le reste
il repassera… La jeune femme adorable,
Nora Arnezeder tient sur scène sans pro-
blème. Puis, c’est un concert bataille entre le
méchant Bernard-Pierre Donnadieu (on se
souvient de Tirs Groupés de Jean-Claude
Messiaen où il jouait un voyou épouvanta-
ble qui agressait une jeune femme dans un
train de banlieue) et le héros masculin Clo-
vis Cornillac « gabinnisé » par Christophe
Baratier. Un film bien fait où la mémoire ne
s’encombre plus une fois « la denrée » con-
sommée. Dans une société où priment la
rentabilité et la consommation, il est normal
que les réalisateurs soient contaminés sans
même le savoir.
ALAIN PENSO
complètement différents. Dont l’un avec
Elisabeth Taylor, La chatte sur un toit
brûlant, la première pièce de Tennessee
Williams. Il interprétera le rôle de Brick, un
homme pas sûr de lui-même, perdu entre
la recherche soi, l’amour pour sa femme,
et une crise familiale dans laquelle son
père va lui déclarer son amour. La même
année donc, l’acteur incarne Harry Ban-
nerman dans La brune brûlante de Léo
McCarey, une étourdissante comédie.
Exodus d’Otto Preminger (1960) fera
éclater son talent certes, mais surtout ses
convictions vis-à-vis d’Israël qu’il soutien-
dra sa vie durant. L’Arnaqueur de Robert
Rossen (1961) et Doux oiseaux de jeu-
nesse (1962) seront des rôles exception-
nels que Newman jouera toujours avec
finesse et sensibilité. Ces deux rôles le
consacreront définitivement comme un
acteur hors pair.
Passons sur plusieurs films intéres-
sants mais mineurs qui nous entraîne-
raient vers des méandres fastidieux pour
le lecteur. Attachons-nous à mettre en
valeur les films de Newman incontour-
nables comme son rôle d’agent secret
dans Le rideau déchiré d’Alfred Hitch-
cock (1966) et de provocateur dans Luke
la main froide (1967). On ne peut évidem-
ment pas passer sous silence le chef
d’œuvre de Roy Hill, Butch Cassidy et le
Kid avec Katharine Ross (1969) et plus
tard avec le même réalisateur L’Arna-
que (1973). Le Verdict de Sidney Lumet
(1982) est un film que l’on ne peut pas
éviter. Newman comme s’il parlait de lui-
même, se retourne sur son passé d’avo-
cat pour tenter de réparer ses erreurs
en une seule affaire. Joël Coen avec Le
Grand Saut (1994) permettra à l’acteur
d’amorcer sa mutation vers d’autres rôles
en douceur. Celui-là, plein d’humour, lui
conviendra parfaitement.
A. P.
10 Environnement www.lagrandeepoque.com 1 – 15 OCTOBRE 2008 ● La Grande Époque

Max Hurdebourcq/ Getty images

Les forêts anciennes sont d’excellents puits

de carbone à l’échelle mondiale.

Les forêts anciennes

ont le vent en poupe
Une révision des données de Kyoto
CONTRAIREMENT aux idées reçues, selon lesquelles
les forêts anciennes n’étaient plus rentables en puits
de carbone, une étude internationale révèle le con-
traire. En effet, cette étude faite par des chercheurs Juan Mabromata/Getty images

du Laboratoire des Sciences du Climat et de l’Envi- Des cormorans vivant sur une petite île près de Ushuaïa, à 3.040 km de Buenos Aires.
ronnement (LSCE), montre que les forêts anciennes
absorbent le carbone de l’atmosphère et ceci depuis
des siècles. Les oiseaux de mer victimes de la pêche industrielle
LE SCIENTIFIQUE AMERICAIN EUGÈNE ODUM LES OISEAUX de mer sont victimes DES MANCHONS CONIQUES DE PRO- dis qu’aujourd’hui aucune perte n’a les suivants : l’Afrique du Sud, l’Aus-
Lors du protocole de Kyoto, ce principe n’a pas été du matériel de pêche industrielle. TECTION été recensée. Dans les eaux austra- tralie, le Chili, le Canada, le Brésil, le
retenu, les forêts n’ont pas été comptabilisées dans la Leur destruction est occasionnée par Une forme efficace de protection liennes également la chute a été ver- Japon, l’Uruguay, les États-Unis, l’Ar-
résolution des problèmes environnementaux. En effet, certaines techniques de pêche nota- est désormais utilisée sur les palan- tigineuse en passant de 2.000 à 200, gentine et la Namibie. Ce projet, en
des spécialistes pensaient que seules les forêts jeunes ment la pêche à la palangre. Cette griers chiliens. C’est un système où sur cette même période. Face à ces cours d’élaboration, est à un stade
et en développement ingéraient plus de CO2 qu’elles pêche consiste à immerger dans les hameçons sont fixés en grappes résultats, les experts demandent des très avancé.
n’en rejetaient. Ces conclusions ont été publiées dans les fonds marins des lignes mises et enveloppés dans des manchons dispositions similaires, aux autres for- Dans les pratiques conseillées figu-
la revue Nature du 11 septembre 2008. C’est en 1960 bout à bout. Les oiseaux attirés par coniques, ce qui empêche les oiseaux mes de pêche industrielles qui met- rent l’extension prioritaire des pêches
que le scientifique américain Eugène Odum a émis les appâts plongent dans les eaux d’attraper l’appât. Cette technique a tent en péril la vie des oiseaux. à la palangre protégée. En effet, la
l’idée de l’inefficacité des forêts anciennes en disant et s’entravent dans les hameçons, réduit très fortement la mortalité des pêche au chalut et au filet maillant
« les forêts âgées de plus de 150 ans émettent autant puis se noient. L’Organisation des oiseaux. Il existe aussi d’autres mesu- ASSURER LA PROTECTION DES ALBA- sont nuisibles pour les oiseaux de
de CO2 qu’elles n’en absorbent ». Nations Unies pour l’alimentation et res de protection qui consistent à faire TROS ET DES PÉTRELS mer. Ils s’empêtrent dans les filets
l’agriculture (FAO) déplore les dom- peur aux oiseaux en créant des lignes Dix nouveaux pays mettent en et filins et ne parviennent plus à se
LES FORÊTS ANCIENNES SÉQUESTRENT D’ÉNORMES mages causés sur les oiseaux par aériennes. œuvre ce plan d’action international, libérer. En l’absence de mesures de
QUANTITÉS DE CARBONE cette forme de pêche. C’est ainsi Selon la FAO, ces mesures protec- élaboré par la FAO, et approuvé en sécurité, l’impact de la pêche sur les
Il est reconnu dans le cycle du carbone que les que des mesures de protection ont trices ont permis de réduire les pertes 1999 par ses États-membres. Ces populations d’oiseaux de mer en voie
forêts absorbent le CO2 et participent ainsi à l’épu- été mises en place dans de nom- de volatiles. Ainsi, chez les palan- dispositifs visent à la diminution des d’extinction peuvent être alarmants.
ration atmosphérique. Cependant, les scientifiques breux pays permettant ainsi d’as- griers chiliens, les pertes d’oiseaux captures accidentelles d’oiseaux de Les albatros, dont 18 espèces sur 22
mettent en garde contre d’éventuelles perturbations surer la sauvegarde de ces oiseaux sont passées de 1.600 en 2002 à mer par les palangriers. Ainsi, il s’agit sont menacées de disparition, sont
forestières : « Étant donné que les anciennes forêts de mer. zéro en 2006. Dans l’océan austral en d’assurer la protection des albatros et particulièrement visés.
ont absorbé du carbone durant de nombreux siè- 1996, on comptait 6.500 victimes, tan- des pétrels. Les pays incriminés sont HÉLOÏSE ROC
cles, elles constituent des réservoirs énormes. Si ces
forêts sont perturbées, d’importantes quantités de car-
bone risquent donc de se libérer dans l’atmosphère. »
L’abattage des arbres et les perturbations accidentel-
Amazonie, des fourmis de plus de 120 millions d’années
les peuvent libérer du carbone (feux, insectes, mala- DÉCOUVERTE en Amazonie, cette devait ressembler à une sorte de
dies, tempêtes, sécheresses extrêmes…). Ainsi, le espèce de fourmi était jusque-là guêpe, qui s’apparente à la fourmi
suivi et l’entretien des forêts sont essentiels. inconnue. C’est l’étude faite par un primitive Sphecomyrma, espèce dis-
Bien entretenues, ces forêts âgées sont toujours groupe de chercheurs de l’univer- parue et retrouvée dans l’ambre fos-
actives et absorbent chaque année des quantités de sité du Texas à Austin, étude dirigée silisé venant du cétacé soit de 145,5
CO2 conséquentes allant de 0,8 à 1,8 milliard de ton- par le biologiste Christian Rabeling, à 65,5 millions d’années.
nes de carbone par an. Philippe Ciais, directeur adjoint qui l’a découverte. Selon ce biolo-
du LSCE explique : « Les forêts anciennes peuvent giste, l’insecte serait le plus ancien IMPORTANCE EN TERME ÉCOLOGIQUE
continuer à accumuler du carbone. Plus de 30 % de spécimen et son existence remon- La Sphecomyrma pourrait être un
la surface totale des forêts est constituée de forêts pri- terait à plus de 120 millions d’an- lien entre les guêpes et les fourmis,
maires non gérées par l’homme, la moitié étant dans nées. Les chercheurs considèrent précise le chercheur. Cette décou-
des régions tempérées de l’hémisphère Nord. Et 15 % cette trouvaille comme majeure en verte devrait permettre de mieux
de la surface forestière totale jusqu’alors ignorée dans termes de développement, d’autant comprendre la vie sur terre, l’évolu-
les bilans du carbone est responsable d’au moins 10 % que d’autres espèces vivent igno- tion des fourmis et leur importance en
Mauricio Lima/Getty Images
de la séquestration totale du carbone ». Effectivement rées du monde dans les sous-sols de terme écologique. Christian Rabeling
les forêts de l’hémisphère nord (Canada, Russie et la forêt vierge. Arbre centenaire connu sous le nom de Sumauma, dans la forêt avait trouvé un spécimen de la fourmi
Alaska) absorbent chaque année 1,3 gigatonnes du amazonienne, au Brésil. La fourmi appelée Martialis heureka qui veut dire Martialis heureka en 2003, dans
carbone rejeté dans l’atmosphère. SPHECOMYRMA VENANT DU CÉTACÉ fourmi de Mars a été découverte dans cette région. un récepteur de feuilles mortes, à
Il est donc actuellement indispensable de modifier Cette fourmi minuscule ne mesure Manaus, ville du Brésil près des rives
les données informatiques de l’évolution du climat et que 2 à 3 millimètres et les spé- larités uniques qui lui permettent de mâchoire allongée. Cette morpholo- du Rio Negro. Selon les scientifiques
de tenir compte du rôle des vieilles forêts dans le cycle cialistes l’ont surnommée Martialis vivre dans les sous-sols de la forêt. gie l’a prédisposé à une vie souter- cette espèce appartient à son propre
mondial du carbone. heureka ce qui veut dire fourmi de Cet insecte aveugle n’a aucune pig- raine et secrète. Christian Rabeling sous-groupe de famille, un parmi 21.
H. R. Mars. Ce nom vient de ces particu- mentation et sa tête est dotée d’une suppose que l’ancêtre de cette fourmi H. R.

6 8 9
4 6 9 3
3 7
5 9 2 4
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Solution
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La Grande Époque ● 1 – 15 OCTOBRE 2008 www.lagrandeepoque.com Santé et Bien-être 11

Rhumes et allergies dans la médecine chinoise

LA MÉDECINE chinoise traditionnelle est un art qui
existe depuis des milliers d’années. Les premiè-
res références figurent dans le classique médical,
Shennong Bencao Jing.
Autre référence, Le classique de la médecine
interne de l’Empereur Jaune, Huangdi Neijing qui
est une étude consciencieuse de méthodes de dia-
gnostic et thérapie incluant l’acuponcture.
La médecine chinoise diffère considérablement
de la médecine occidentale fondée sur la science
moderne. Le célèbre médecin taïwanais Hu Naiwen
commente la philosophie fondamentale de la méde-
cine chinoise dans une interview accordée à La
Grande Époque.
Hu Naiwen entreprend ses études en médecine
occidentale puis travaille plus de dix ans dans la
recherche. Il y a vingt ans, il a décidé de se consa-
crer à l’étude de la médecine chinoise. L’étude de
Huangdi Neijing lui enseigne des méthodes qui ont
été utilisées depuis lors pour le traitement des infec-
tions par le virus SRAS. Il attribue le succès de son
traitement médical à sa connaissance profonde de
la médecine chinoise traditionnelle.
LGE : Vous avez pratiqué auparavant la recher-
che médicale basée sur la science allopathique, et
ensuite vous avez pratiqué la médecine chinoise.
Qu’est-ce qui marque le plus la différence ?
Hu : Chaque système a pour but d’améliorer la
santé. En fait, il y a des différences considérables
entre les deux. Un exemple est le diagnostic. Selon
la médecine chinoise traditionnelle, les causes
des maladies sont attribuées à différents facteurs
comme la chaleur intérieure, le froid, l’humidité, la
sécheresse, la peur, la colère, le choc, ou le souci.
La médecine occidentale diagnostique les causes
La Grande Époque
Statue de bronze datant de la dynastie
Qing présentant les points d’acuponcture.
de maladies en recherchant des bactéries, des virus
et le manque de nutrition convenable.
LGE : Qu’est-ce qui vous a motivé dans l’étude
de la médecine chinoise ?
Hu : Pendant mes recherches j’ai constaté un
lien entre l’acupuncture et la neurologie. J’ai voulu
approfondir ma compréhension. J’ai trouvé finale-
quand le printemps arrive on attrape un rhume.
Selon la médecine chinoise, c’est le manque d’ac-
climatation à la nouvelle saison.
Le printemps est le temps où toutes les cho-
ses commencent à germer et fleurir. L’été est le
temps de la croissance. L’automne nous présente
les récoltes et l’hiver est le temps du repos. L’hiver
est une période de l’année où il est préférable d’évi-
ter le travail dur et le stress autant que possible. Il
convient de se protéger du froid et de dormir autant
que nécessaire. En modelant sa vie quotidienne
selon les saisons, on protège le système immuni-
taire et on peut affronter les changements de sai-
La Grande Époque son en bonne santé.
Le célèbre médecin taïwanais Hu Naiwen.
LGE : Dans la médecine chinoise, comment con-
ment une documentation qui indiquait comment sidère-t-on les problèmes dermatologiques ?
guérir beaucoup de maladies par l’acuponcture. Hu : De nos jours, de plus en plus de personnes
Ces études ont suscité chez moi un vif enthou- se plaignent des irritations de peau et des allergies.
siasme. Certaines peuvent être attribuées aux aliments que
le corps est incapable de tolérer. De tels aliments
LGE : Certains disent que la médecine occi- provoquent des démangeaisons, des rougeurs, des
dentale guérit les effets de la maladie alors que la marques.
médecine chinoise élimine les causes de la mala- Même les gens qui ne sont pas allergiques se
die. plaignent de démangeaisons. La médecine chi-
Hu : La médecine chinoise est progressive et noise voit ces symptômes comme un échec d’har-
traite doublement les maladies en abolissant les monie avec les saisons. Les logements surchauffés
symptômes et en éliminant les causes. ou climatisés augmentent un tel manque d’adapta-
tion saisonnière. L’organisme humain ne peut pas
LGE : Pouvez-vous nous donner une explication tolérer des changements si soudains. Le chauffage
concrète, par exemple pourquoi attrape-t-on fré- et la climatisation fournissent une certaine qualité
quemment un rhume à la suite d’un changement de confort, mais l’utilisation ou le mauvais usage de
de saison ? ces technologies peuvent provoquer les manifesta-
Hu : C’est vrai. Beaucoup de personnes attra- tions physiologiques citées plus haut.
pent un rhume à cette occasion. On peut traverser LA GRANDE ÉPOQUE
un hiver froid sans subir un refroidissement, mais ALLEMAGNE

La circoncision masculine comme prévention Les otites chez les enfants

des maladies sexuellement transmissibles IL EXISTE différentes formes d’otite, dont flammation à travers la trompe d’Eustache
l’otite externe qui est la plus fréquente. vers le pharynx (la gorge). En sortant la
EN 1986, des chercheurs ont étudié la pos-
sibilité que la circoncision masculine puisse
limiter la contamination par le virus du VIH.
En 2005, la démonstration scientifique est
apportée par une étude (ANRS 1265) ran-
domisée menée auprès de 3.274 hommes
vivant en Afrique du Sud. L’étude, confir-
mée par une autre étude américaine parue
en 2006, révèle que la circoncision mascu-
line réduit le risque de transmission du VIH
d’environ 60 % chez l’homme. Une autre
étude révèle que 21 mois après la circonci-
sion, les hommes circoncis présentaient un
taux d’infection au virus HPV, responsable
des papillomes, inférieur à 40 % par rapport
à un groupe d’hommes non circoncis.
Selon le professeur Jean-François Del-
fraissy, directeur de l’Agence Nationale de
Recherches sur le Sida et les hépatites vira-
les, « les travaux sur la circoncision mascu-
line ont ouvert une nouvelle ère dans la lutte
contre le sida : nous disposons dorénavant
d’un nouvel outil potentiel de prévention.
C’est un vrai défi pour les chercheurs que de
valider l’efficacité de cet outil à l’échelle d’une
population ».
La circoncision masculine est facilement
acceptée parmi la population africaine. Une
Photos.com
90 % des femmes de l’Afrique
subsaharienne sont favorables à
la circoncision masculine.
étude menée par l’équipe du professeur Ber-
tran Auvert en Afrique du Sud confirme que
72 % des hommes informés sur les avanta-
ges de la circoncision acceptent de passer à
l’acte. Et 90 % des femmes se disent favo-
rables à cette démarche. La raison princi-
pale est leur propre santé. 90 % d’entre eux
savent qu’il faut quand même se protéger
avec des préservatifs.
Des stands d’information sont capitaux
pour faire avancer ce projet. En effet, l’étude
dévoile « que lorsqu’on leur demande s’ils
sont circoncis, 28 % des hommes répondent
qu’ils le sont. Or, un examen clinique révèle
que seulement 55 % de ceux qui disent être
circoncis le sont réellement. Quand on exa-
mine leur statut sérologique par rapport au
VIH, les hommes qui s’avèrent cliniquement
circoncis sont deux fois moins infectés que
les hommes qui ne le sont pas. » Un autre
problème est que les hommes circoncis
ayant pris connaissance du fait que la circon-
cision diminue les risques de transmissions
des MST, pourraient avoir un sentiment de
« fausse sécurité » qui entraînerait des rap-
ports sans protection. La circoncision mas-
culine trouve donc une place de choix dans
un programme de prévention des MST.
Le professeur Bertran Auvert et des col-
lègues de l’université de San Francisco, de
l’université de Rotterdam et de l’OMS ont
élaboré des calculs qui démontrent que « la
circoncision masculine pourrait éviter 2 à 8
millions d’infections sur 20 ans en Afrique
subsaharienne. Cette diminution du nom-
bre de personnes infectées entraînerait une
baisse des budgets que les pays consacrent
aux traitements. Un calcul sur 20 ans sug-
gère que 2 milliards de dollars pourraient
ainsi être économisés dans les 14 pays de
l’étude ».
C. K.
Source Inserm et ANRS
Une otite est une inflammation dans le
conduit auditif externe ou dans la cavité de
l’oreille moyenne derrière le tympan.
Cette inflammation peut être de cau-
ses multiples. Par exemple, elle est sou-
vent reliée à un conflit émotionnel vécu
par l’enfant qui entend des propos qui le
dérangent ou qui désire recevoir des com-
pliments qui ne viennent pas. Elle peut
également être reliée à une infection suite
à un rhume ou suite à la baignade, ou elle
peut être causée par une poussée de
dents chez l’enfant. Habituellement, elle
se résorbe d’elle-même. Dans le cas d’une
otite moyenne qui persiste, un petit exer-
cice fort simple peut vous aider à amélio-
rer votre condition.
Couchez-vous sur le dos et tirez dou-
cement le lobe de vos oreilles vers le bas
et l’extérieur (vers les épaules). Lorsque
vous sentez une légère tension, conser-
vez-la et sortez ensuite la langue le plus
loin possible. Toujours dans la même
position, tentez maintenant d’avaler votre
salive. Répétez cet exercice plusieurs fois
par jour.
Ceci a pour but de favoriser la ventilation
dans la trompe d’Eustache en drainant l’in-
langue, vous sollicitez les muscles (péris-
taphylins) qui s’attachent sur la trompe
d’Eustache et vous favorisez son ouver-
ture. Puis en avalant, vous drainez l’inflam-
mation de l’oreille moyenne dans la trompe
d’Eustache vers la gorge. Il est intéressant
de constater que le simple fait de tirer dou-
cement les oreilles, tel que décrit plus haut
en sortant la langue au maximum, peut
grandement améliorer plusieurs problè-
mes d’oreilles tels que cillement, inconfort
et douleurs. Pour visualiser les images de
cette technique, référez-vous au livre Vain-
cre la douleur et la maladie.
Pour les bébés et les jeunes enfants
atteints d’otites à répétition, vous n’avez
tout simplement qu’à tirer très doucement
leurs oreilles de la même façon en leur
donnant une sucette pour qu’ils la tètent.
Ce problème d’otite est fréquent à cet âge,
car la trompe d’Eustache est orientée plus
horizontalement et draine moins bien les
sécrétions lors d’inflammation. Par con-
séquent, essayez de ne pas nourrir votre
bébé lorsqu’il est couché sur le dos. Don-
nez-lui plutôt à boire quand il est dans une
position verticale.
Alternative Santé

La Grande Époque EpochTimes.com

À New York en 2000, de jeunes doctorants d’origine chinoise

achètent un journal local du New Jersey dans l’ambition de trai-
ter le plus objectivement possible l’actualité chinoise. Le journal
Da Ji Yuan (La Grande Époque) est né.
Sept ans plus tard, La Grande Époque est diffusée en 18
langues dans plus de 30 pays. Elle est distribuée dans des
villes telles que Toronto, Taipei, San Francisco, New York,
Buenos Aires, Lima, Sydney, Hong Kong, Tokyo, Berlin,
Londres…
Paris a vu naître en janvier 2005 sa version en langue
française également disponible à Genève, Bruxelles et
Montréal.
La Grande Époque offre un « regard nouveau sur un
monde en évolution ». Créée avec la volonté de promouvoir
la diversité des points de vue et l’indépendance d’informa-
tion, La Grande Époque est aujourd’hui l’une des premières
sources d’information indépendante sur la Chine.
Avec des journalistes présents dans une trentaine de
pays, La Grande Époque propose également à ses lecteurs
un contenu éditorial riche et varié. Actualité internationale,
protection des droits humains, de l’environnement et de la
diversité culturelle, art de vivre et bien-être sont autant de
thèmes qui font la spécificité de cette publication.
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14 Culture du monde www.lagrandeepoque.com 1 – 15 OCTOBRE 2008 ● La Grande Époque

Les mystères des caractères chinois (1ère partie)

« CANG Jie inventa les caractères chinois,
de ce fait des grains de millet tombèrent du
Ciel et les mauvais esprits pleurèrent dans
la nuit. »
C’est ainsi que les Chinois ont trans-
mis la légendaire histoire de l’invention
des caractères chinois par le fonction-
naire de l’antiquité, Cang Jie, il y a 4.000
ans de cela.
Écrivain et peintre, Zhang Yanyuan a
expliqué sous la dynastie des Tang (618-
907) qu’il fallait comprendre cette histoire
ainsi : « Le Ciel ne pouvait protéger ses
secrets des êtres humains plus longtemps.
Les hommes pourraient, en apprenant
l’écriture, identifier les secrets célestes, ce
qui est semblable à un acte heureux de la
providence qui ferait tomber des grains de
millet du Ciel. »
Les mauvais esprits ne peuvent plus
se cacher davantage parce que les êtres
humains sont maintenant capables, grâce
aux caractères chinois, de discerner les
principes et les choses fondamentales du
monde. Par conséquent, il n’est plus pos-
sible pour ces esprits de tromper les gens
et de leur mentir. La seule consolation qui
reste maintenant à ces esprits est de pleu-
rer secrètement dans la nuit.
JOYAUX DE LA CULTURE CHINOISE
Les caractères chinois sont le joyau de
la culture chinoise. Les Chinois parlent de
l’unité du Ciel et des hommes. Une unité
qui se reflète aussi dans les caractères chi-
nois. En effet les sinogrammes contiennent
les enseignements du Yi Qing, des cinq
éléments et du Taïji taoïste. Ils véhiculent
de nombreuses informations concernant le
Ciel, la Terre, les Hommes, les faits et les
choses, et leurs connexions sont toutes
illustrées par la combinaison de caractè-
res. C’est aussi la façon dont sont apparus,
sur la base de ces caractères, les arts divi-
natoires de la Chine antique.
Xu Shen, un chercheur de la dynas-
tie des Han orientaux (25-220), a ana-
lysé la structure des caractères chinois
sur la base des enseignements du Yi Qing
et des cinq éléments. Il a publié ses étu-
des dans un livre sur le chinois qui reste le
plus important de l’histoire : Explication des
caractères simples et analyse des caractè-
res composés (茢肫豻螳 shuôwén jiezì).
Dans son dictionnaire, Xu Shen a divisé
les caractères en six catégories :
 ⽎ᒻ Xiàngxíng, les pictogrammes
« décrivant directement » : ces pictogram-
mes donnent la signification directement
en représentant l’aspect extérieur de la
chose (par exemple : ጊ pour montagne,
ੱ pour homme, etc.);
 ᜰ੐ Zheshì, les idéogrammes
« désignant les faits » : ce sont comme des
pictogrammes conceptuels, en ce qu’ils
représentent une idée abstraite au moyen
d’une image. (par exemple : ৻, ੑ, et ਃ
pour « un », « deux » et « trois » ; et ਄
pour « dessus », ਅ pour « dessous ».)
ᦩᗧ Huìyì, les idéogrammes com-
posés « combinaison de significations » :
des caractères composés de deux carac-
tères, ou plus, avec différentes significa-
tions et dont les contenus sont combinés
pour créer de nouveaux caractères (par
exemple : ቟ « paix » est une combinai-
son de « toit » ቗ et de « femme » ᅚ,
signifiant « tout est paisible (avec) quand
la femme est à la maison »).
 ᒻ⡪ Xíngsheng, les composés
phono-sémantiques « formes - sons » :
des caractères ayant un composant pho-
nétique et un composant pour le sens (par
exemple dans ᇻ mâ signifiant « mère »,
le composant de droite 㚍 signifie « che-
val » et est prononcé « ma » — ce qui
indique l’élément phonétique — alors
que le composant de gauche qui est ᅚ
(« nu », signifie « femme »), donne le sens.
Le composant donnant la signification est
souvent un « radical » (un des 200 élé-
ments de construction environ des idéo-
grammes qui constituent la langue écrite
chinoise). Environ 90 % de tous les carac-
tères chinois entrent dans la catégorie des
Xíngsheng.
 இ୫ Jiejiè, les emprunts phonéti-
ques « transférés » : le raisonnement der-
rière ces caractères est légèrement plus
complexe et est lié aux développement
historique de l’écriture chinoise. Dans la
Chine antique, un idéogramme pouvait
souvent être utilisé pour plus d’une signi-
fication. Mais comme le caractère circulait,
l’usage le plus commun finissait par recou-
vrir le plus ancien. Par exemple, ૼ était
le pictogramme pour « blé », mais il était
également utilisé pour le verbe « venir ».
Finalement le plus commun « venir »
l’a emporté sur la signification de l’idéo-
gramme ૼ, moins employé, et un nouvel
idéogramme pour « blé », 㤇, a été créé.
 ヱᵈ Zhuanzhù, à signification
échangée « retourner et verser » : ceci
est une catégorisation purement historique
et fait référence aux caractères qui ont la
même racine étymologique mais qui ont
une prononciation et une signification dif-
férentes. ⠧lao « vieux » et ⠨kao « test »
est un exemple commun.
L’HOMME ET LA FEMME
↵ veut dire ‘homme’. C’est encore un
idéogramme composé de plus de deux
caractères. Le caractère du haut, ↰
signifie ‘champ’, la partie inférieure, ജ,
signifie ‘force’. Les hommes sont suppo-
sés être forts et travailler dans les champs.
C’est ainsi que le décrit le classique Expli-
cation des caractères simples et ana-
lyse des caractères composés. Dans la
Chine antique, il est dit que : « Les hom-
mes avaient en charge les choses de l’ex-
térieur, par conséquent le travail agricole,
la guerre, le combat, la charge de fonc-
tionnaire et le monde des affaires, toutes
ces choses étaient du ressort des hom-
mes. Un homme est d’abord le fils de ses
parents, puis quand il se marie, il devient
le mari de sa femme, et quand le couple a
des enfants il devient alors le père de ses
enfants ».
ᅚ veut dire ‘femme’. Tous les idéo-
grammes comportant ᅚ ont quelque
chose à voir avec la femme, comme ᆄ
(épouse), 䩻 (maîtresse de maison) et
ᇻ (mère). La partie supérieure de ᆄ
(épouse) est un balai et la partie inférieure
ᅚ, désigne « féminin » ou « femme ».
Les femmes en Chine avaient en charge
les affaires domestiques, telles que la cui-
sine, le nettoyage et la couture.
⟵ (Yi)—Justice, honnêteté, loyauté.
Le symbole ⟵ a un contenu très large,
qui inclut des valeurs telles que la justice,
l’honnêteté, la loyauté et la fiabilité. Il est
composé de ⟠ (mouton) en haut et de
ᚒ (Je, moi-même) en bas. Le mouton est
obéissant et doux, sa viande a bon goût et
est nutritive.
Par ces caractéristiques, le mou-
ton était considéré comme étant un
symbole de chance et de prospérité.
«ᚒ» (Je, moi-même) fut originellement
développé à partir de l’écriture trouvée
sur l’os divinatoire où il désigne un instru-
ment de combat avec une pointe acérée.
ᚒ et ⟠ mis ensemble pour faire ⟵ peut
être interprété littéralement par : « Je suis
un mouton. »
Cela signifie qu’il est possible de faire
des sacrifices au nom de la justice, tout
comme on sacrifie un mouton en l’honneur
des dieux. Le caractère chinois ⟵ rappelle
aux gens comment ils doivent mener leurs
vies, c’est-à-dire de façon altruiste. ⟵
appartient à une catégorie spéciale parmi
les idéogrammes, appelée ‘les caractè-
res huiyi’ (de multiples significations sont
réunies) ; ils sont composés d’idéogram-
mes ayant différentes significations et leur
contenu est la fusion de plusieurs signifi-
cations.
À suivre !
MARIA ZHENG

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La Grande Époque ● 1 – 15 OCTOBRE 2008
Couleur d’automne : petite histoire de la courge
AU MOYEN ÂGE, on trouvait dans les pota-
gers une courge appelée calebasse, gourde
ou cougourde. Son nom latin est Lagenaria.
Elle vient soit d’Afrique soit d’Asie. On con-
naissait également le concombre, le melon
et la pastèque qui viennent d’Asie. Les cour-
ges, citrouilles et autres cucurbitacées feront
leur apparition sur le sol européen en même
temps que les tomates, haricots et pommes
de terre au retour de Christophe Colomb.
On retrouve des traces de culture de la
courge dans ses lieux d’origine que sont
l’Amérique centrale et l’Amérique du Sud,
datant de 5.000 à 15.000 ans suivant les
variétés. L’Amérique du nord se l’est appro-
priée. La courge est devenue un symbole
d’Halloween. Elle représente un marché en
croissance régulière. Au Canada, elle est cul-
tivée principalement au Québec et en Onta-
rio.
PRODUCTION MONDIALE
Le plus grand producteur de courges est
la Chine. On y cultive un quart de la pro-
duction mondiale. Les graines de courges
sont commercialisées. Un scandale à ce
sujet a éclaté ces dernières années sur les
conditions d’hygiène dans lesquelles elles
sont préparées : un bouddhiste emprisonné
par le régime chinois pour sa croyance en
Vérité-Bienveillance-Tolérance, le principe
du Falun Gong, raconte qu’on force les déte-
nus à décortiquer des graines de courge
dans un camp de travaux forcés : ils ont « les
mains ensanglantées et cassent l’écorce de
la graine avec leurs dents ».
DES MULTIPLES USAGES DE LA COURGE
Les courges ont de multiples usages sui-
vant les variétés. On les mange sous forme
de soupe, de gratin, de ragoût, de tarte sucrée
ou salée. Les fleurs et les jeunes pousses
sont aussi consommées en beignets. Les
calebasses sont utilisées comme récipient et
instrument de musique. Les coloquintes sont
décoratives. Le loofah donne une matière
spongieuse que les femmes africaines utili-
sent pour se laver.
Certains attribuent aux courges des ver-
www.lagrandeepoque.com Art de vivre 15
Les courgettes, appelées aussi courges
plus, sa chair est riche en bêta-carotène que
d’été ou courges zucchini se cultivent comme
le corps transforme en vitamine A. Comme la
les courges. Comme elles ne sont pas « cou-
plupart des légumes, les courges ont des pro-
reuses » il n’est pas nécessaire de les pincer.
priétés antioxydantes, protègent des mala-
Leurs fruits se récoltent jeunes et se consom-
dies dégénératives et renforcent les défenses
ment rapidement. Attention à ne pas laisser
immunitaires. Elles sont riches en fer, manga-
nèse, cuivre et vitamines B, C et K. grossir trop le fruit, ses graines deviennent
immangeables et cela affaiblit la plante qui en
CULTURE produira moins.
La courge est une plante qui ne supporte CATHERINE KELLER
pas le gel. Elle se multiplie par semi dans un LA GRANDE ÉPOQUE
trou de 3 cm de profondeur en période hors GENÈVE
gel, soit pour la France après le 15 mai. On
peut les semer jusqu’à la fin mai suivant les Source : Wilkipedia, ministère de l’Agriculture
années. S’il fait trop froid, la plante aura ten- de l’Ontario (Canada)
dance à ne faire que des fleurs mâles. Mais http://www.omafra.gov.on.ca/french/crops/
s’il fait chaud et sec, elle avortera de ses fruits. facts/00-032.htm
Les fleurs ont une courte durée de fécon- http://www.passeportsante.net/fr/
dation puisqu’elles s’ouvrent vers 10h et se Nutrition/EncyclopedieAliments/
referment vers 15h. Durant ce temps, les Fiche.aspx?doc=courge_nu
abeilles et autres insectes doivent polliniser
cinq fois la fleur pour qu’elle donne un fruit RECETTE DE LA SEMAINE
bien formé. On compte 1 à 2 fruits pour les MENU DE COURGES
grosses variétés, plus pour les petites.
Nos amies cucurbitacées ont besoin d’es- EN ENTRÉE, SOUPE DE COURGES
pace, au moins 1 m² par plant pour pouvoir Plucher, laver et couper en gros cubes une
faire des racines aux nœuds des tiges et courge musquée, verser les cubes dans une
développer de beaux fruits. Pour conserver casserole, recouvrir d’eau et saler et épicer
l’humidité et garder les fruits au propre, il est avec du curry. Cuire environ un quart d’heure,
recommandé de pailler le terrain. Les cucur- mixer, ajouter de la crème, parsemer avec du
bitacées ont besoin d’une terre riche et bien persil haché et quelques graines de courge.
drainée mais ne supportent pas la séche-
resse. Certains les plantent sur un tas de PLAT PRINCIPAL
compost, ce qui fonctionne assez bien. En Couper une courge spaghetti en tronçons
général, il est préférable de fumer la terre en de 2 cm, les cuire à la vapeur 20 minutes.
automne pour éviter la prolifération d’insec- Défaire l’intérieur délicatement avec une four-
tes nuisibles. Pour favoriser la croissance des chette. Mettre du roquefort ou un autre fro-
fruits et limiter l’expansion de la plante on la mage sur chaque rondelle et enfourner à
pince à trois reprises. La première fois à deux 240° 10 minutes, jusqu’à ce que le fromage
feuilles, puis à cinq feuilles et finalement à ait fondu et commence à dorer.
quelques feuilles après le fruit.
La récolte se fait environ quatre mois DESSERT
après le début de la culture. Les courges Cuire à la vapeur une courge potimarron
Photos.com sont ramassées avec leur tige et entrepo- (elle a un goût de châtaigne), l’écraser au
Courges à manger, courges à admirer, ce fruit d’automne apporte des sées dans un endroit tempéré (soit environ mixeur, ajouter du lait concentré sucré.
couleurs et des vitamines à la saison des récoltes. 10°) et aéré, en laissant un espace entre cha- Abaisser de la pate feuilletée, la mettre
cune d’elle. Les manipulations se font en dou- dans un moule, y verser la préparation,
tus thérapeutiques. Par exemple, les grai- et conseillée pour les problèmes de prostate. ceur pour éviter des blessures susceptibles cuire au four environ une demi-heure et
nes sont vermifuges. La chair est diurétique La pulpe autour de la graine est purgative. De de dégénérer en pourriture. laisser refroidir avant de manger.

Dure, la vie d’un animal d’élevage

La vie de la grande majorité des animaux de
ferme est bien loin de ce que lisent nos enfants
dans les livres. Et, la loi n’interdit pas d’élever
des animaux dans des conditions qui ne corres-
pondent pas à leurs besoins.
C’EST le cas notamment des poulets élevés en batterie. De
15 à 24 poulets évoluent par m² sous éclairage artificiel. Les
poulets sont abattus à environ 40 jours, soit deux fois plus
vite que les poulets Label Rouge ou bio. Ils ne sortent jamais
et leur litière est très vite souillée. Dans ce cas, il est préféra-
ble de n’acheter que des volailles Label rouge ou biologiques
car ces catégories offrent une meilleure qualité de vie aux ani-
maux. Les qualités nutritives de la viande justifient souvent
un prix plus élevé. Malheureusement, elles ne représentent
encore qu’un petit pourcentage des élevages.
Ces animaux sont transportés pendant de nombreuses heu-
res parfois plus de deux jours, entassés, sans eau ni nourri- Photos.com

ture et ils sont nombreux à mourir avant d’arriver aux abattoirs.
Une fois sur place, les conditions de mise à mort sont tota-
lement barbares. L’animal sent la mort arriver dans la souf-
france. Il est stressé et souffre inutilement . De plus, le stress
au moment de l’abattage charge l’organisme de la bête d’un
certain nombre de toxines qui entraînent une baisse de qua-
lité de la viande.
Le 18 septembre, la commission européenne a lancé un
projet de loi visant à protéger les animaux d’abattoirs. « Cha-
que établissement d'abattage devra nommer un responsable
‘protection animale’, chargé de vérifier que les prescriptions
techniques visant à éviter toute souffrance aux animaux
seront bien respectées et mises en oeuvre. »
Revenons à nos paysans, la grande majorité de ceux-
ci aiment leur métier et leurs animaux. Mais ceux-ci restent
néanmoins une valeur marchande et l’appât du gain conduit
parfois à des dérives. C’est pourquoi la Protection Mondiale
des Animaux de Ferme lance cet automne le plan Vigiferme.
Il permet à toute personne qui voit des animaux qui semblent
être maltraités de savoir si c’est bien le cas et de pouvoir inter-
venir.
Comment déterminer si un animal est maltraité ? Ce n’est
pas évident. La PMAF donne l’exemple d’un animal maigre. Il
se peut qu’il soit dans cet état parce qu’il est mal nourri, mais
Heureuses les vaches qui vivent dans les alpages.
cela peut aussi être le cas s’il sort de maladie ou s’il est vieux
ou si une femelle a allaité. De même, les chevaux de trait sup-
portent sans problème d’être dehors par temps froid, ce qui
n’est pas le cas des chevaux de course.
Le 15 novembre 2008, le plan Vigiferme sera présenté au
grand public. Des stands d’information, des conférences et
des films renseigneront sur la réglementation qui protège les
animaux d’élevage. Des enquêtes sont menées sur le terrain
et la PMAF travaille avec les agriculteurs désireux d’améliorer
la qualité de vie des animaux en adhérant au Label Rouge ou
agriculture biologique. Elle collabore avec les pouvoirs publics
et la gendarmerie nationale qui reconnaissent sa légitimité.
C. K.
Pour en savoir plus :
PMAF www.pmaf.org est la branche française de Compas-
sion In World Farming www.ciwf.org.uk/
Au Canada Humanefood collabore avec PMAF
www.humanefood.ca/francais/aboutus.html
Le bien-être des animaux et les labels : www.pmaf.org/labels/
index.php

La Grande Époque
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75013 Paris Tél : 01 45 86 41 95
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La Grande Époque ● 1 – 15 OCTOBRE 2008 www.lagrandeepoque.com Culture 16
La Divine Performing Arts triomphe à Toronto
Alors que la Divine Performing Arts présentera son Spectacle
des Arts Divins au Palais des Congrès de Paris fin février 2009,
elle vient de rencontrer un vif succès à Toronto à l’occasion de
la fête de la Mi-Automne, deuxième fête la plus importante pour
les Chinois après le Nouvel An.

ILS VENAIENT DE TOUS HORIZONS, célébrités, politique, artistes, chefs d’en-

treprises ou simple quidam mais l’enthousiasme se lisait sur tous les visages au
sortir du Spectacle de la Mi-automne, un spectacle culturel chinois joué pendant
cinq jours au Théâtre John Bassett de Toronto.
La force derrière ce Spectacle est la compagnie Divine Performing Arts de New
York, un groupe d’artistes remarquables qui fait revivre la culture traditionnelle
chinoise et tous ses arts de la scène.
Le champion olympique de patinage Elvis Stojko, qui a vu la représentation de
samedi soir, était impressionné. « J’étais envahi d’un immense sentiment de joie
et de paix après avoir vu le spectacle, » a déclaré Stojko.
« C’est une bouffée d’air pur et il y a beaucoup de lyrisme et un grand sens de…
comment dire, il y a une telle délicatesse dans les danses. » Vanessa Harwood,
ancienne danseuse du ballet national du Canada, également chorégraphe, direc-
trice artistique, professeur et actrice, a vu le spectacle pour la deuxième fois.
« J’ai à nouveau beaucoup aimé. Comme vous le savez, c’est la deuxième fois
que je vois le spectacle et je suis à nouveau impressionnée par mes danseurs
mongols. C’est encore eux mes préférés, même si tout le spectacle est particu-
lièrement réjouissant. Et les deux présentateurs étaient aussi formidables… très
drôles. » Madame Harwood précise que c’était Victor Chen/The Epoch Times

« très agréable » de voir Michelle Ren, une des

principales danseuses du spectacle. « Elle est
belle. Elle est merveilleuse, et si vive ! »
La chorégraphe est allée au spectacle avec
une amie, Nadia Potts, directrice du Ryer-
son’s Dance Program qui est elle aussi une
ancienne danseuse du ballet national. « J’ai
vraiment beaucoup aimé », a dit Mme Potts.
« J’ai été impressionnée par l’ardeur et la pas-
sion des danseurs et à quel point ils sont pré-
parés. Ils ont tous l’air de vraiment aimer ce
qu’ils font. »
Elles ont aussi partagé leurs observations
sur certaines caractéristiques de la danse
classique chinoise. « Les pieds sont très dif-
férents, et les mains et tout parce que tout est
très spécifique – là où vont les mains, la façon
de porter les bras, le port de la tête et ainsi
de suite. Et ils sont très authentiques en le fai-
sant… C’était très beau », a dit Mme Harwood.
« Tout a du sens », ajoute Mme Potts. « Par-
fois, c’est ce qui manque dans les artistes de
nos jours. »
Le consul général d’Allemagne à Toronto,
Holger Raasch, a déclaré : « J’ai adoré la
musique, j’ai adoré les costumes, j’ai adoré les
légendes… elles étaient impressionnantes. Il
y avait des histoires d’amour, des histoires de
guerres aussi, et elles étaient très belles… On
pouvait les comprendre tout de suite sans avoir
entendu parler de ces histoires auparavant. »
Monsieur Raasch a également été impres-
sionné par les qualités uniques de l’orches-
tre de la Divine Performing Arts qui marie les
mélodies et la personnalité des instruments
chinois avec les sonorités pleines d’un orches-
tre symphonique occidental. « J’ai pris un réel
plaisir à l’écouter. »
Madame Morrison, maire de Caledon, a
expliqué qu’elle « aimait la façon dont on est
emporté par la danse, la musique et certaines
des chansons et des histoires… c’est tout sim-
plement magnifique. A la façon de se mouvoir
des danseurs, on peut comprendre de quoi ils
parlent, leur tristesse et leur joie, ce qui pour
moi était incroyable parce que d’ordinaire,
on croit devoir parler. » Pour Madame Morri-
son, le spectacle souligne les vertus chinoi-
ses traditionnelles, comme la compassion et
la patience. En sa qualité de fonctionnaire,
Madame Morrison souligne l’importance du
courage moral exprimé plus particulièrement
chez les jeunes.
« En Amérique du Nord, nous avons perdu
certaines de ces valeurs et nous ne vivons plus
selon ces principes. Quand vous perdez ces
valeurs, vous finissez par être happé par une
spirale qui vous tire vers le bas et je pense que
c’est vers le bas que nous allons. J’aimerais
tant trouver un moyen d’arrêter cela. » C’est
dans cette optique que la maire a manifesté
le souhait d’encourager davantage de monde
dans sa communauté à aller voir le spectacle.
Alison Martin, directrice de la Jamaica Natio-
nal Building Society, était enthousiaste, s’ex-
clamant que le spectacle était « excellent, si
riche dans sa précision, sa délicatesse, sa pro-
fondeur, ses sensations de paix, de tranquillité
et de calme. »
Elle a précisé que le spectacle lui avait laissé
un sentiment « de paix ».
La Divine Performing Arts reviendra à
Toronto en janvier pour y donner six représen-
tations dans le cadre de sa tournée mondiale
de 2009. Les représentations seront également
données au Théâtre John Bassett, un des lieux
les plus chaleureux de Toronto.
JASON LOFTUS