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PSYCHO SU Psychologie de la santé Marilou Bruchon-Schweitzer Emilie Boujut DUNOD P Conseiller éditorial Alain Lieury Illustration de couverture Franco Novati le picagramme qui figure corte dis wart wre soe i = ae isi i ori Slew o reprint pout ereirda ect, hm edn oe er der or culiteener dor: Fone roves ede [sae dite cor TTecton echnaue striae | DANGER | cme odes newota Iie, le deepen! mai News rapaelens dove eve loule proton reproducton, pares ov fine, le Code de fs propié intelle de Ie présente publiion est halle dy 17 lke 1992 inoralt |igswmGPUE | erie sone eurevaton ae enelet expressémenths protocer TUELELNRE) loview, de son daileur ov dv ‘uiage elles ans avere Cor frongit #exobotion dv feien des ovens dot Cr, cote praique drei de eosie (CFC, 70, ru des sol gévéede dans kes @oldvererts — GrandirAuputns, 9006 Pars © Dunod, 2014 5 rue Laromiguitre, Paris 5° ISBN 978-2-10-070324-1 © Code de be proprigié intellcvelle nveviorisont, aux termes de Forte L. 122.5, 2° at 3° ol, d'vne part, que bs « copies ov reprodvclions siclement résorvéer & Furoge privé du copitte et non detinée: @ une utlisarion collecive » fl, d’aule por, aue les analyses of Fes courles citations dans un bul d'exemple J Ustration, « louie représeniehon eu repreduciion inlégrole ov pavielle faite sons Ie conseniement de Fouteur ov de ses oyan's droit ou eyanis cause ost Tice » for L 1224. Cotte représeniation ov reproduction, par quelque pracédé que ce soi!, constilue rail donc. une conirefagen seacionnée par les article: L 3252 ef svivanis dy ‘Code de la proprité inelecioll. Table des matiéres PREFACE. INTRODUCTION Cuaprime 1 BoNHeun, sATISEACTION DELA VIE, BIEN-ETRE, (SANTE ET QUALITE DE VIE 1. Les origines 2. L’évolution des notions et les disciplines concernées 2.1 Le point de vue philosophique 2.2. Le point de vue médical 2.3. Les points de vue économique et politique 24 Le point de vue des sciences sociales 3. Les différents concepts 3.1 Lebonheur 3.2. La satisfaction de la vie 3.3. Lebien-étre subjectif 34 Lasanté 3.5 Conclusion : bien-étre subjectif, santé, qualité de vie 4. Laqualité de vie 4.1. Les conceptions et définitions de la qualité de vie 4.2. Conceptions objectives de la qualité de vie 4.3. Conceptions subjectives de la qualité de vie 4.4. Conceptions intégratives 4.5 Les domaines.et composantes de la qualité de vie 4.6 Les mesures de la qualité de vie 5. Santé, bien-tre et qualité de vie : synthése et discussion Cuaprrer 2 Lis ractruns ExVIRONNEMENTAUX ET SOCIAUX DE LA SANTE 1. Les déterminants sociaux de la santé 2. Les effets de l'environnement sur la santé XV wu aH 11 12 12 18 17 24 37 39 39 42 46 65 89 | vi | Psychologie de la santé 3. La santé des populations : mortalité, morbidité, espérance de vie, santé auto-évaluée 3.1 Quelques indices et mesures 3.2. Mortalité infantile 3.3 Vespérance de vie a la naissance (EV) 3.4. Les causes de décés chez les adultes et les enfants 3.5 Lespérance de vie en bonne santé 3.6 La santé auto-évaluée Les déterminants sociaux généraux de la santé 4.1 Le pays : inégalités de santé inter-pays ct intra-pays 4.2. Le contexte économique et politique 4.3. Intégrer la santé dans la politique des états 4.4 Les systémes de santé et les soins primaires dans chaque pays 4.5 Inégalités d’acc’s aux soins : quelques chiffres 4.6 Lesactions internationales La position socio-conomique 5.1 Le statut socio-6conomique 5.2 Statut socio-économique et santé 5.3. Inégalités socio-économiques et santé 5.4 Comment les inégalités socio-conomiques se transforment en inégalités de santé Les déterminants sociaux intermédiaires 6.1 Lethnie 6.2 Lacommunauté Déterminants sociaux proximaux 7.1. Le milieu professionnel 7.2. Le groupe de pairs 7.3 Lemilieu familial 7.4 Le couple et la dyade Les déterminants sociaux de Ia santé, synthése et discussion 8.1 Les déterminants structurels généraux 8.2 Les déterminants sociaux intermédiaires. 92 92 93 95 97 100 101 101 104 ‘104 106 109 112 114 118 117 125 129 132 133 138 144 144 153 155 166 170 170 170 © Dunod —Totte reprosiction non autorsde est un dt Table des matiéres 8.3 Les déterminants sociaux intermédiaires et proximaux 8.4 Les déterminants sociaux de la santé : voies et modéles Cuaprree 3 La rersONNALITE COMME FACTEUR DE VULNERABILITE, 1. Type A, type Bet risque cardio-vasculaire 1.1 Les conceptions et les mesures 1.2. Relations entre mesures du type A et risque coronarien. 1.3 Faiblesses et inconsistances 2. Le type D et la propension a la détresse 2.1 Letype D, facteur de vulnérabilité 2.2 Chemins par lesquels le type D affecte la santé 2.3 Validité et utilité du type D 3. Type de personnalité et oncogenése 3.1. Letype C d’aprés Greer, Morris et Watson 3.2. Letype I de Grossarth-Maticek et Eysenck 3.3. Lestyle Cd’ajustement chez Temoshok 3.4 Personnalité et cancers, quels résultats ? 3.5. Des facteurs psychologiques aux cancers : les modéles explicatifs 4. Lhostilité, la colére, Vagressivité et le risque cardio-vasculaire 4.1 Hostilité, colére et agressivité comme facteurs de vulnérabilité 4.2 Les notions et définitions 4.3 Lévaluation de I’hostilité, de la colére et de l’agressivité 4.4 Hostilité, colére, agressivité et pathologies cardio-vasculaires : un bilan 4.5. Effets de l’hostilité sur la santé cardio-vasculaire, hypotheses explicatives 4.6. Interventions et prises en charge psychosociales 5. Lalexithymie et les maladies psychosomatiques 5.1 Définitions 5.2 Echelles d’évaluation de l’alexithymie, le TAS-20 172 173 195 199 199 202 203 204 206 207 210 211 212 218 218 2138 219 219 225 226 227 10, Psychologie de la santé 5.3. Alexithymie, troubles somatiques, psychiatriques et addictions 5.4 Voies par lesquelles l'alexithymie affecte la santé 5.5 La prise en charge des patients alexithymiques Le névrosisme 6.1 Définitions et mesures du névrosisme 6.2. Névrosisme et santé mentale 6.3. Névrosisme et santé somatique Lanxiété 7.1 Lanxiété : définitions et conceptions 7.2 Lévaluation de lanxiété 7.3 Anxiété et problémes de santé 7A Madéles explicatifs et interventions La dépression. 8.1 Définitions de la dépression 8.2. Approches théoriques 8.3 Evaluations de la dépression 8.4 Dépression, maladies somatiques et comorbidités 8. Ladépression facteur de risque et de pronostic cardio-vasculaire 8.6. La dépression et les cancers 8.7 Dépression et maladies somatiques, discussion 8.8. Dépression et maladies somatiques : modéles explicatifs et interventions Laffectivité négative 9.1 Définition et mesures 9.2 Affectivité négative et dimensions classiques de la personnalité 9.3. Affectivité négative et santé émotionnelle 94 Affectivité négative et santé physique 9S Laffectivité négative, des effets indirects 9.6 Utilité de Vaffectivité négative Aspects nocifs de la personnalité, conclusion 231 232 233 235 236 239 241 241 242 242 243 245 246 248 249 249 251 251 253 256 257 258 259 © Dunod —Totte reprosiction non autorsde est un dt Table des matiéres Lx | Cuaprrne 4 Las aspects morectours DE LA peRsoNNALITE 1. Loptimisme 1.1 Loptimisme dispositionnel de Scheier et Carver 1.2. Del’impuissance apprise au style explicatif optimiste/pessimiste 1.3 Loptimisme irréaliste (ou défensif) 2. Lecontréle 2.1 Lecontréle comme caractéristique des situations 2.2 Lecontréle comme caractéristique des individus 2.3. Le lieu de contréle (locus of control) de Rotter 2.4 Laconception tridimensionnelle du controle de Levenson, 2.5 Les effets salutogénes du contréle 3. Lendurance (hardiness) 3.1 Définition de endurance 3.2. Endurance et santé 3.3 Les mesures de l'endurance 3.4: Intérét de l’endurance ? 4, Le sens de la cohérence (SOC) d’Antonovsky 4.1 Le SOC et la salutogenése 4.2, Lamesure du SOC 4.3 SOC et qualité de vie 4.4 SOC, santé physique et mortalité 4.5 Les effets du SOC 4.6 Quelques problémes relatifs au SOC 5. La résilience de Rutter 5.1 Les origines 4.2 Définitions 4.3, Les mesures 3.4 Les interventions 3.5 Llavenirde la notion de résilience 6. Lauto-efficacité de Bandura 6.1 La notion d‘auto-efficacité et les modéles socio-cognitifs 277 279 279 284 287 290 290 292 292 295 297 303 303 304 304 305 306 306 307 309 310 3 311 313 313 314 31s 316 317, 317, 317 | x | Psychologie de la santé 6.2 Les mesures d’auto-efficacité 6.3. Auto-efficacité, comportements sains et compétences pour se soigner 64 AE et santé 6.5 Auto-efficacité et performances: 6.6 Auto-efficacité et bien-étre 6.7 Discussion : statut et réle de l’auto-efficacité 6.8. Des notions salutogénes convergentes ? Laffectivité positive 7.1 Laffectivité positive, définition et mesures 7.2 Relations entre affectivité positive, personnalité et bien-étre 7.3 Affectivité positive et santé auto-évaluée 7.4 Affectivité positive et morbidité 7.5 Affectivité positive, mortalité et survie 7.6 Les chemins de l’affectivité positive a la santé, discussion Le modéle en cing facteurs (FFM) 8.1 Les modéles factoriels de la personnalité 8.2 Le facteur C: étre consciencieux. 8.3. Le facteur A: étre agréable 8.4 Le facteur E: extraversion 8.8 Le facteur O : Ouverture 8.6 Modéle FFM et santé, discussion Le réle bénéfique de la personnalité, discussion 9.1 Personnalité, bien étre, qualité de vie et santé auto-évaluée 9.2 Personnalité, morbidité et mortalité 9.3 Voies psychobiologiques et déterminants constitutionnels 9.4 Voies comportementales 9.5 Des facteurs en interaction 9.6 Personnalité, cognitions et processus transactionnels 319 320 321 321 322 323 324 326 327 328 329 329 330 331 334 334 336 338 339 341 341 343 344 345 M6 M7 347 348 Table des matiéres | x1 | Craprree § Des CROvANCES AUX COMPORTEMENTS: CONCEPTIONS ET MODELES 373 1. Les conceptions de la santé et de la maladie selon ’époque et la culture 375 1.1 L’histoire des conceptions de la santé 375 1.2 Laconception de la santé dans différentes cultures 380 2. Les représentations (contemporaines et occidentales) relatives a la santé et a la maladie 383 2.1 Les croyances « naives » en matiére de santé etde maladie 384 2.2 L’évaluation des croyances des patients 389 2.3 Le modéle d’auto-régulation de la maladie 396 3. Les comportements de santé (et de maladie) 399 3.1. Promotion de la santé : comportements sains, comportements a risque 399 3.2. Les types de comportements de santé 400 3.3. Limportance des comportements de santé 401 4. Des croyances aux comportements : les approches socio-cognitives 404 4.1 Les modéles en continuum 404 4.2 Les modéles en stades de changement 413 4.3, Les modéles socio-cognitifs, discussion 417 4.4 Croyances et comportementsde santé, synthése et conclusion: 420 Cuaprrne 6 Lars pocessus TRANSACTIONNELS : STRESS, CONTROLE, SOUTIEN SOCIAL, ET COPING 433 = 1. Lemodéle transactionnel 435 é 1.1 La phase d’évaluation 436 i 1.2. La phase d’ajustement ou « coping » 437 E 2. Lestress percu 437 i 2.1. Définition 437 5 2.2. Les déterminants du stress percu 438 i 2.3 Les catégories de stresseurs 439 2 2.4 La mesure du stress percu 440 é 2.5 Les effets du stress percu sur la santé 444 |x| Psychologie de la santé 6. 2.6 Les mécanismes expliquant les effets du stress sur la santé 2.7 Conclusion Le contréle percu 3.1 Définition 3.2. Le contréle percu comme transaction spécifique 3.3 La mesure du contréle percu 3.4. Limpact du contréle pergu sur la santé 3.5. Les mécanismes explicatifs Le soutien social 4.1 Principales notions 4.2 La mesure du soutien social 4.3 Les effets du soutien social sur la santé 44 Les mécanismes explicatifs Les stratégies d’ajustement ou coping 5.1. Historique de la notion de coping 5.2 Lapproche transactionnelle du stress et du coping 5.3 Les stratégies de coping générales 5.4 Les stratégies de coping spécifiques 5.5. Les déterminants du coping 5.6 Lévaluation du coping général 5.7 Quelques échelles de coping spécifiques 5.8. Llefficacité des stratégies de coping 5.9 Les stratégies de coping : nouvelles perspectives juelques instruments 5.10 Les mécanismes d'action du coping Des processus transactionnels revisités (CHaprrre 7 Les MODELES EN PSYCHOLOGIE. DE LA SANTE : UN ETAT DES LIEUX: 1. 2. 3. Les modéles sociocognitifs Les modéles biopsychosociaux Le modéle transactionnel classique et ses évolutions £85 449 449 449 454 455 457 525 $27 528 $29 Table des matiéres Un modéle transactionnel, intégratif et multifactoriel (modéle TIM) 4.1 Lemodéle TIM 4.2. Les issues a prédire 4.3. Antécédents sociaux 4.4. Les antécédents dispositionnels 4.5. Les processus médiateurs ‘Le modile TIM et ses applications 5.1 Application du modéle a des interventions 5.2. Applications du modéle TIM a la recherche 5.3. Critiques et perspectives }EX DES NOTIONS 531 $32 534 534 535, 536 537 537 538 539 543 Préface Il n’est sans doute pas commun que T’éléve soit un jour sollicité par son maitre pour préfacer l’un de ses ouvrages. C’est done avec beau- coup de plaisir que j’ai accepté honneur qui m’était fait. Il appartient maintenant a l’ééve que je suis de resituer le contexte dans lequel parait aujourd'hui la nouvelle édition de l'ouvrage de Marilou Bruchon- Schweitzer et d’Emilie Boujut, « Psychologie de la Santé », initialement publié par Marilou Bruchon-Schweitzer seule en 2002. Nouvelle édition, dis-je bien, et non pas réédition de la premiére version. Que le lecteur qui connait le livre de 2002 ne s'y trompe pas : le présent ouvrage n’est pas une simple actualisation de surface de celui-ci mais une refonte totale, une réécriture intégrale a quatre mains, et s'en distingue radi- calement sur la forme (organisation des chapitres) et sur le fond (mise a jour compléte des concepts, des modéles, des outils et des avancées dans Ia recherche et les applications en psychologie de la santé). Le lec- teur trouvera donc matiére a (re)découvrir la richesse et la diversité qui fondent la psychologie de la santé a l’orée de ce xxi siécle, et a appro- fondir ses connaissances sur la question. Nombreux sontaujourd’hui les professionnels et/ou universitaires qui travaillent dans le champ de la psychologie de la santé. Foisonnantes sont les publications dans ce domaine, qui ont littéralement explosé ces derniéres années. Et il semble bien loin le temps oii cette discipline était considérée en France comme marginale, voire inexistante. Pourtant, moins de 30 ans seulement nous séparent de ces années 1985-1995 au cours desquelles la psychologic de la santé a progressivement émergé dans notre pays. Rappelons-en les étapes clefs. Si la psychologie de la santé a été officialisée en 1979 par l’'American Psychological Association (section 38 de l'APA) et a rapidement mar- qué son ancrage en Europe en 1986 avec la premiére Conférence de la European Health Psychology Society (EHPS) dont le professeur Stan Maes fut le président fondateur, c’est sensiblement a la méme époque, mais plus lentement, que ce courant va émerger et se développer en France. Lhistoire de la psychologie dela santé en France commence notam- ment dans les Universités de Metz, Rennes, Toulouse et Bordeaux. Que le lecteur ne s’offense pas si je cible plus spécifiquement celle que je connais le mieux : la contribution de Bordeaux qui débute avec la nomi- nation du Professeur Marilou Bruchon-Schweitzer dans cette université. Psychologie de la santé Déja grande spécialiste de la problématique du corps', celle-ci souhaite explorer plus largement les questions relatives a la santé et a la maladie physique. C’est donc avec beaucoup d’humilité, que le jeune psycho- logue que j’étais alors a accepté en 1986 sa proposition de participer a la création d'un groupe de recherche en « psychologie médicale » qui deviendra, quelques années plus tard, une €quipe de recherche en psy- chologie de la santé. De 1986 & 1994, ce groupe de recherche s’est progressivement étoffé et de nombreux travaux ont été impulsés, portant sur |'exploration des déterminants psychosociaux de I'ajustement de sujets confrontés a divers stresseurs (médico-hospitaliers, professionnels, etc.), ainsi que sur la validation de divers outils d’évaluation du stress ou de dimen- sions associées (soutien social, coping, etc.). Au cours de cette période, les toutes premiéres théses francaises en psychologie de la santé seront soutenues. Parallélement, la participation réguliére a de nombreux congrés inter- nationaux de psychologie de la santé permet a cette équipe d’intégrer de nouvelles conceptions, jusqu’alors peu connues en France et donc non enseignées, portant notamment sur le modéle transactionnel du stress développé par Lazarus et Folkman (1984). C’est ainsi que parut en 1994 le premier ouvrage francais, coordonné par Marilou Bruchon- Schweitzer et Robert Dantzer, présentant cette nouvelle discipline et ses principaux concepts : « Introduction a la Psychologie de la Santé »?. C'est sans doute une des raisons pour lesquelles la European Health Psychology Society accepta la méme année (Conférence d’Alicante, 1994) la candidature de l'Université de Bordeaux 2 pour l'organisation de sa 11* conférence annuelle qui s’est tenue les 3-5 septembre 1997 sur le théme « Personality, Coping and Health ». Cette manifestation scientifique, que Marilou Bruchon-Schweitzer et moi-méme avons co- présidée, a ainsi accueilli plus de 500 participants issus de tous les conti- nents et a constitué un temps fort dans la vie de cette jeune équipe bor- delaise de psychologie de la santé. En 1992, s‘ouvre a Bordeaux un premier parcours « Psychologie de la santé » en maitrise de psychologic, qui permet alors d’orienter cer- tains étudiants vers cette nouvelle spécialisation de la psychologie, en pleine expansion dans de nombreux pays d’Europe mais quasiment encore inexistante en France. Tout était a créer pour asscoir cette nou- 1. Voirson ouvrage de 1990, Une psychologte du corps, Pars, PUE, coll. Psychologie dAujourd hui, 2. BruchonSchweitzer, M. et Dantzer, R. [éds.] (1994). Introduction @ la psychologte dle la santé. Paris, PUE, coll. Psychologie dAujourd’hui. © Danod Toute reproduction non autorsée est un dt velle filire. La tache n’était pas facile mais ’enjeu passionnant : conte- nus d’enseignements, recherche de lieux de stages, rencontres avec les médecins du CHU de Bordeaux et de diverses autres structures de soins de la région Aquitaine, afin d’impulser des recherches, etc. Ainsi, de 1992 a 2000, cette spécialité a été progressivement investie par des étu- diants toujours plus nombreux, désireux d’accomplir un DEA (Master 2 Recherche) dans ce champ, puis de s'orienter vers une thése. Ce n'est qu’en 2000 qu'une habilitation ministérielle a autorisé Vouverture a Bordeaux du premier DESS de psychologie de la santé, mention « Psychopathologie de l’adaptation au stress ». II s'agissait 1a d'une étape importante, tant pour la visibilité de cette spécialité en France que pour la possibilité de former professionnellement des psy- chologues de la santé, pouvant faire montre d'un savoir et d’un savoir- faire spécifiques et complémentaires de ceux des autres spécialités dela psychologie (de la psychopathologie, notamment). Soucieux d’impulser plus encore en France cette spécialité, nousavons, avec certains collégues de Metz (E. Spitz), de Toulouse (M.-T. Munoz Sastre, notamment), de Lille (D. Hermand), de Rennes (A. Cerclé) et d’Aix-Marseille (M. Morin, notamment), créé I’Association Francaise (devenue depuis Francophone) de Psychologie de la Santé (AFPSa), dont Marilou Bruchon-Schweitzer fut la premiére présidente. Le premier congrés de cette Association, organisé a Bordeaux les 5-6 octobre 2001, a accucilli prés de 300 congressistes : un réseau francais de psychologic de la santé commengait ainsi a se constituer. Depuis, le nombre de par- ticipants a ces congrés biennaux n’a cessé de croitre. Finalement, au cours de cette méme année 2001, sera édité le 2° ouvrage francais de psychologie de la santé que j’ai eu le plaisir de coordonner avec Marilou Bruchon-Schweitzer : « Personnalité et Mala- dies. Stress, coping et ajustement »!, qui propose une application des concepts et modéles en psychologic de la santé, sous la forme d’une revue de question exhaustive relative aux déterminants psychosociaux de la genése et de l’évolution de divers problémes de santé (maladies chroniques, comportements & risque). A Vheure of parait cette nouvelle édition de Youvrage de Marilou Bruchon-Schweitzer et d’Emilie Boujut, la France a rejoint les grands pays universitaires européens et internationaux qui explorent la psy- chologie de la santé, 'enseignent et s'y référent dans la pratique. 1. Bruchan-Schweitzer, M. et Quintard, B. (Eds) (2001). Personnaifté et maladies. Stress, coping et ajustement, Patis, Dunod. Psychologie de la santé En témoigne le nombre croissant d’ouvrages francais publiés dans ce domaine, d’enseignants-chercheurs de cette spécialité recrutés au cours des 15 dernigres années, de théses soutenues, de créations de forma- tions professionnelles spécifiques en psychologie de la santé (Masters professionnels'), de psychologues de la santé recrutés dans les centres de prévention et de soins, ainsi que le foisonnement vivifiant des recherches frangaises conduites dans ce champ et diffusées dans des supports internationaux. En témoigne également la belle reconnais- sance dont la France a fait l'objet par l/EHPS, puisque l’Université Bor- deaux Segalen a récemment accueilli la 27* Conférence de cette Société du 15 au 19 juillet 2013, sur le theme « Well-being, Quality of Life and Caregiving », qui a réuni pas moins de 900 congressistes du monde entier. C'est dire la grande vitalité dont fait preuve aujourd'hui cette spécialité de la psychologie ! ‘Au regard de cet historique de la psychologie de la santé en France, on comprend & quel point Marilou Bruchon-Schweitzer a joué, depuis plus de trente ans maintenant, un rdle essentiel, majeur et incontour- nable dans le développement et la promotion de cette discipline. Que cette grande dame de la psychologie de la santé en soit remerciée aujourd'hui. Si Marilou Bruchon-Schweitzer a sollicité son tout premier « thésard » pour rédiger cette préface, c'est bien sa derniére étudiante en thése, Emilie Boujut, maitre de conférences a l'ESPE de Versailles, quia eu le privilége de participer activement a |’écriture de cette nouvelle édition. Quielle soit également remerciée de la précieuse contribution qu'elle a apportée a cet ouvrage. Celui-ci est organisé autour de 7 chapitres. Dans le premier chapitre « Bonheur, satisfaction de la vie, bien-étre, santé et qualité de vie » sont présentées les diverses issues de santé (critéres) que les études menées dans les sciences de la santé tentent de prédire : santé psychologique (bien-étre, bonheur, qualité de vie, satisfaction, ete.) et physique (bon état fonctionnel, longévité, etc.), mais aussi issues défavorables, qu’elles soient psychosociales (détresse, dépression, anxiété, burnout, conduites addictives, etc.) ou fonctionnelles (initiation et évolution d'une patho- logie chronique ou aigué, rémission, récidive, mortalité). Le deuxiéme chapitre décrit les différents « Facteurs environnemen- taux et sociaux de la santé » : antécédents distaux (politiques de santé, 1. Ace jour, Assoctation Francophone de Psychologie de la Santé (AFPSa) a recensé 6 univer. sités proposant un parcours professionnel complet en psychologic de la santé : Aix-Marseille, Bordeaux, Chambéry, Lille, Metz et Paris-Deseartes. © Dunod —Totte reprosiction non autorsde est un dt contexte économique, etc.), intermédiaires (statut socio-€conomique, etc.) et proches (communauté, famille, couple, etc.), ainsi que leurs effets sur la santé physique, mentale et/ou sociale. Les deux chapitres suivants sont consacrés aux antécédents de person- nalité, certains ayant un effet pathogéne (chapitre 3 « La personnalité comme facteur de vulnérabilité » : type A, type D, type C, alexithymie, anxiété, dépression, etc.), d’autres des effets salutogénes (chapitre 4 « Les aspects protecteurs de la personnalité » : conscience, optimisme, contréle, endurance, sens de la cohérence, résilience, auto-efficacité, affectivité positive, etc.). Les antécédents sociaux et dispositionnels peuvent exercer leurs effets directementssur la santé. Mais ils peuvent également agir indirectement, en transitant par des processus médiateurs, socio-cognitifs (représenta- tions, notamment) et transactionnels. C’est ce que nous proposent de considérer les deux chapitres suivants. Le chapitre 5 « Des croyances aux comportements : conceptions et modéles » s'intéresse aux diverses conceptions de la santé et de la mala- die selon les époques (Gréce antique, époque gallo-romaine, etc.) et les cultures (Asie, Inde, Afrique, etc.), aux représentations (croyances naives, savantes, regards respectifs et croisés de la dyade patient/ médecin) et comportements associés (sains ou risque), ainsi qu’aux approches sociocognitives de la santé et de la maladie (HBM, théorie du comportement planifié, modéle de l’auto-régulation, etc.). Le chapitre 6 « Les processus transactionnels : stress, contréle, sou- tien social et coping » insiste sur le réle majeur de ces variables média- trices dans la compréhension de la santé et de la maladie et présente des perspectives théoriques originales (approches systémique, dévelop- pementale, psychoneuroimmunologique, etc.) et des notions nouvelles (coping dyadique, proactif, centré sur la recherche de sens, etc.). Enfin, le chapitre 7 « Les modéles en psychologie de la santé : un état des lieux » est une synthése précieuse des notions et modéles pré- sentés au fil des chapitres. II propose un modéle heuristique, A la fois Transactionnel, Intégratif et Multifactoriel (modéle TIM), fondé sur les acquis des recherches et comprenant I’essentiel des notions et processus présentés dans l'ouvrage. Ce modéle a été remanié et complété (par rap- port @ celui qui figure dans la précédente édition de cet ouvrage), afin d’intégrer les résultats des recherches récentes dont cet ouvrage rend compte. Ce qui est nouveau est qu'il intégre comme médiateurs, non seulement ceux issus du modéle transactionnel classique (stress, coping, soutien, etc.), mais aussi ceux issus des modéles socio-cognitifs, c’est-a- & Psychologie de la santé dire diverses représentations et comportements de santé, considérés ici comme des médiateurs entre antécédents et issues de santé. Ce modéle TIM devrait permettre, sous réserve d’étre spécifié pour chaque étude particuliére (en choisissant seulement les variables pertinentes pour une étude et une population données), de mettre a l'épreuve diverses hypo- theses concernant les effets directs et indirects des divers antécédents sociaux et dispositionnels sur la santé psychosociale et physique. ‘Au final, cette nouvelle édition francaise de louvrage « Psychologie de la Santé » proposée par Marilou Bruchon-Schweitzer et Emilie Boujut rend compte, a ce jour, de l’approche la plus complete et la plus actua- lisée des modéles, concepts et méthodes qu’offre la psychologie de la santé contemporaine, ainsi que des enjeux et défis importants qui s'ouvrent aux chercheurs et aux praticiens d’aujourd’hui. Il constitue a ce titre un outil particuligrement précieux et utile pour tous ceux qui s’intéressent aux questions relatives a la santé et a la maladie : étudiants en sciences sociales et psychologiques ou du secteur médico-social, enseignants-chercheurs en psychologic et professionnels du champ sanitaire et psychosocial. Nous pouvons d’ores et déja lui prédire une issue favorable (en nombre de lecteurs) et une espérance de vie au moins égale a la premiére parution (soit 12 ans, environ), avant avoir le plaisir de lire vers 2026 la prochaine édition de cet ouvrage ! Bruno Quintard Professeur de psychologie de la santé, Université de Bordeaux Responsable du master professionnel de psychologie de la santé Président de la Société Francaise de Psychologie Membre fondateur de I’Association Francophone de Psychologie de Ia Santé (AFPSa) Membre du comité exécutif de la Division 8 « Health Psychology » de International Association of Applied Psychology (IAAP) Introduction Nous passerons en revue dans cet ouvrage les divers déterminants de la santé : des antécédents, des processus médiateurs et des issues. Nous présenterons dans le premier chapitre les diverses issues que les études menées dans les sciences de la santé tentent de prédire : santé psycholo- gique (bien-étre, bonheur, qualité de vie, satisfaction, etc.) et physique (bon état fonctionnel, longévité, etc.), mais aussi issues de santé défa- vorables, tant psychosociales (détresse, dépression, anxiété, burnout, conduites addictives, etc.) que fonctionnelles (initiation et évolution d'une pathologie chronique ou aigué, rémission, récidive, mortalité), ainsi que les mesures de ces divers critéres de santé. Dans le chapitre 2, les déterminants environnementaux et sociaux de la santé, distaux, intermédiaires et proches seront décrits, ainsi que leurs effets sur la santé physique, mentale, sociale, etc. Les deux cha- pitres suivants sont consacrés aux antécédents de personnalité, certains ayant des effets pathogénes (chapitre 3), d'autres des effets protecteurs (chapitre 4). Les effets de ces divers antécédents sur la santé peuvent étre fragi- lisants ou protecteurs, directs ou indirects. Lorsqu’ils sont indirects, les effets des différents antécédents sur la santé peuvent transiter des représentations et attitudes pouvant induire des comportements sains ou a risques (chapitre 5). L'impact des antécédents peut aussi transiter par des processus transactionnels (stress peru, contréle percu, soutien social percu, stratégies de coping). Liapproche de ces processus par le modéle transactionnel classique ainsi que des perspectives théoriques et notions nouvelles seront présentées dans le chapitre 6. Le chapitre 7 sera la synthése des notions et modéles présentés au fill des chapitres. Il proposera un modéle a la fois transactionnel, intégratif et multifactoriel (modéle TIM) fondé sur les acquis des recherches et comprenant l’essentiel des notions et processus présentés dans cet ouvrage. Il permettra, a condition d’étre spécifié pour chaque étude par- ticuliére, de mettre a l’épreuve diverses hypothéses concernant les effets directs et indirects des divers antécédents sociaux et dispositionnels sur la santé (physique, mentale, sociale, etc.). BONHEUR, SATISFACTION DE LA VIE, BIEN-ETRE, SANTE ET QUALITE DE VIE © Dunod —Totte reprosiction non autorsde est un dt Bonheur, satisfaction de la vie, bien-étre, santé et qualité de vie is | Pour Matarazzo (1984), pionnier de la discipline, la psychologie de la santé est l'application des savoirs fondamentaux de la psychologic a la compréhension de la santé et de la maladie. La psychologie de la santé a beaucoup évolué ces derniéres années ; elle n’est plus seulement l'étude des facteurs psychosociaux pouvant affecter l'initiation et |’évolution des maladies (Bruchon-Schweitzer, 1994) ; elle intégre également ceux ayant un effet sur des issues de santé positives (qualité de vie, satisfaction de la vie, bien-étre, bonheur, santé physique et mentale). Située a Vinterface de la psychologie et des sciences de la santé, elle a développé des concepts et des modéles théo- riques originaux et réfutables. Elle essaie, en collaboration avec les disci- plines voisines, de comprendre les voies biopsychosociales menant aux diverses issues de santé. Les études sont menées sur des patients et leurs aidants, ainsi qu’en population générale sur les individus et leur entou- rage, placés dans des contextes variés (école, milieu de travail, etc.), Elle a aussi des objectifs appliqués : contribuer a la prévention (promotion des comportements de santé et réduction de comportements a risques), 4 optimisation de la prise en charge des patients, a la formation des personnels soignants et a 'amélioration des systémes de soin. 1. Les origines Liintérét pour des concepts commesanté, bien étre, bonheur, satisfaction et qualité de la vie s'est considérablement accru depuis les années 1960- 1970. La notion de qualité de vie apparait pour la premiére fois dans quelques textes a la fin des années 1950 et plus officiellement dans Les Annales de médecine interne en 1966. La qualité de vie est devenue un concept si populaire que de nombreux ouvrages (Rapley, 2003 ; Fayers et Machin, 2007) et plusieurs revues lui sont spécifiquement consacrés (Applied Research in Quality of Life, Health and Quality of Life Outcomes, Quality of Life Research, Journal for Quality of Life Measurement). Le nombre total d’articles utilisant comme premier mot-clé quality of life a beaucoup augmenté depuis les années 1960, passant de zéro € plusieurs milliers (Kaplan et Ries, 2007). Quant aux outils mesurant diverses issues de santé évaluées par les patients (dont le bien-étre, le bonheur, la satisfaction, la qualité de vie), leur développement est, lui aussi, considérable et il y en aurait environ cing cents (Emery, Perrier et Acquadro, 2005). Nous allons examiner les origines et l’évolution de ces différentes notions, puis nous décrirons ensuite plus précisément la GO Psychologie de la santé qualité de vie, la plus intégrative d’entre elles, ses composantes (points de vue et domaines) et les principaux outils permettant de l’évaluer (génériques, spécifiques). Nous conclurons ce chapitre en évoquant les problémes théoriques que soulévent encore ces concepts, notamment celui de qualité de vie. Il est important de replacer I'émergence de ces notions dans leur contexte (historique et économique). Bognar (2005, p. 361-566) rap- pelle que le mouvement des indicateurs sociaux (datant du milieu des années 1960) prénait l'utilisation de certains index (produit intérieur brut, niveau d’éducation, espérance de vie, etc.) pour évaluer les condi- tions de vie des populations. Pour I'histoire de ce mouvement et ses tendances récentes, on consultera la revue Social Indicators Research (fon- dée en 1974), Les indicateurs sociaux peuvent étre utilisés pour orien- ter les politiques des divers pays en matiére de santé publique. Depuis les années 1960, sont publiés réguligrement des rapports (courbes, sta- tistiques) fondés sur ce type de mesure. Ainsi, le niveau de vie et la santé des populations ont fait l'objet de nombreuses enquétes natio- nales (INSEE, INED, Observatoire des inégalités, etc.) et internationales (Union européenne, OMS, OCDE, ONU, Banque mondiale, etc.). De tels indicateurs ont été critiqués, notamment a partir des années 1980. Ils furent jugés trop généraux (des moyennes ne nous disent rien des caractétistiques particulires d’une société, de ses inégalit exemple) et réducteurs (le bien-étre des individus ne se borne pas a leurs ressources matérielles). On considére que, au-dela de la légitime satis- faction des besoins fondamentaux des individus (ce qui suppose des res- sources objectivement suffisantes), ce sont les aspects qualitatifs de leur bien-étre (bonheur, satisfaction. ..) qui correspondent a un veritable pro- grés social. Nous allons voir que les conceptions, définitions et mesures de la qualité de vie sont encore largement sujettes a discussion. 2. L’évolution des notions et les disciplines concernées La qualité de vie (qualité de vie) est un concept a la mode depuis les années 1980-1990 qui a réussi a supplanter, tout en les intégrant, des notions voisines (bonheur, satisfaction de la vie, bien-étre, santé). Elle concerne de nombreuses disciplines (médecine, épidémiologie, santé publique, sociologie, économie, psychologie de la santé, etc.) et fait Vobjet de trés nombreuses études. La notion parait évidente et banale, © Danod Toute reproduction non autorsée est un dt Bonheur, satisfaction de la vie, bien-Stre, santé et qualité de vie H elle est en réalité complexe et difficile 4 définir. Les conceptions de la qualité de vie sont fort différentes selon que I’on en privilégie : lesaspects objectifs (conditions et niveau de vie, état de santé...) ou subjectifs (satis- faction, bonheur, bien-étre subjectif...} ; la fotalité ou des composantes : physique (état fonctionnel, santé organique), mentale (santé psychique) ou sociale (réseau relationnel, ressources sociales). Nous allons examiner les apports ayant enrichi cette notion, ses définitions, ses domaines et composantes, ses méthodes d’évaluation générales et spécifiques, pour conclure sur les questions restant posées. 2.1 Le point de vue philosophique Lebien-étreserait l'objectif ultime de l’existence, que cherchent a atteindre les étres humains (souhaiter étre heureux est, pour Aristote, le dési supréme). La tradition philosophique occidentale oppose les optimistes, pour qui le bonheur, état de satisfaction totale, est possible (Spinoza, Montaigne, Diderot), voire facile (Epicure) et les pessimistes, pour qui i est difficile (Rousseau), impossible (Pascal, Schopenhauer, Freud). Les épicuriens, les hédonistes et certains empiristes comme John Stuart Mill prénent la recherche du plaisir qui aboutit a un sentiment de plénitude, proche du bonheur (mais le premier est momentané, alors que le second est durable). D’autres, comme Kant, opposent la recherche du bonheur et la morale. Les stoiciens reconnaissent que le bonheur est une aspiration humaine fondamentale, mais cette quéte étant source de frustrations, ils conseillent d’éviter la recherche du plaisir et de renon- cer a la poursuite du bonheur, Plusieurs auteurs pensent que des posi- tions philosophiques explicites ou implicites sous-tendent encore les conceptions et les mesures actuelles de la qualité de vie (Bognar, 2005, p. 565-578 ; Cummins, 2005, p. 699 ; Rapley, 2003, p. 22). 2.2 Le point de vue médical Ce sont essentiellement les médecins et les chercheurs en santé publique, en épidémiologie et en psychiatrie qui vont assurer le succés de la notion de qualité de vie, qui finira par intégrer les notions voisines (bien étre, santé, bonheur, satisfaction....), jusqu’a devenir extrémement éendue et complexe. Si l'on mesurait au départ des « critéres » simples de santé/maladie (morbidité, mortalité, longévité), cohérents avec le modéle biomédical longtemps dominant, divers bouleversements vont faire évoluer les « issues » considérées dans les recherches (pour une analyse plus détaillée, voir Leplége, 1999, 2008). | 8 | Psychologie de la santé Les progrés médicaux — traitement des maladies infectieuses notam- ment — se sont traduits a la fois par l'accroissement de la longévité des populations et par celui de diverses maladies chroniques aux consé- quences nouvelles et multiples (physiques, mentales, sociales), affectant le bien étre des patients. Il est alors devenu fondamental de restaurer ou de préserver la qualité de vie des sujets agés et de construire des outils évaluant l'impact physique, mental et social des diverses pathologies, ainsi que des soins et traitements associés. Il s’agit ici, plutdt que de qualité de vie générale, de qualité de vie lige & ler santé (qualité de vie lige ala santé ou en anglais, HRQoL : Health Related Quality of Life), qui cor- respond aux répercussions de l’état de santé sur les autres aspects de la vie. La qualité de vie liée a la santé a été évaluée de facon tantét géné- rale (avec les mémes items pour tous), tantét spécifique (items « sur mesure » pour des pathologies ou des patients particuliers). On value de plus en plus l'impact des divers types de traitements des maladies chroniques en termes qualitatifs (bien-€tre des patients) plutét que quantitatifs (nombre d’années de vie gagnées). Pour certaines maladies évolutives (comme les cancers), nécessitant des traitements relativement « agressifs » (chimiothérapie, chirurgie, radiothérapie, immunothérapie), se pose le probléme de la qualité, plus que de la quan- tité de (sur) vie qu’ils permettent. Certains soins palliatifs sont souvent préférés a des traitements invasifs et douloureux chez des patients en phase terminale. C’est le bénéfice pour les patients plut6t que la sophis- tication technique a tout prix qui est de plus en plus souvent prise en compte dans les choix thérapeutiques. Nous sommes tellement persua- dés que la santé est I'absence de déficit organique ou fonctionnel et que la maladie est un fardeau que nous sommes trés surpris quand des patients considérés par leur entourage comme gravement malades ou handicapés se déclarent pourtant satisfaits de leur vie. Ace propos, Koch (2000) rapporte des résultats complétement contre- intuitifs. Si, par exemple, 18 % seulement des professionnels de la santé prenant en charge des traumatisés médullaires estiment que ceux-ci auront une qualité de vie acceptable, une évaluation positive de la vie apparait chez 92 % de ces mémes patients (dont on sait pour la grande majorité qu’ils ne marcheront plus). On a parlé du « droit 4 ’euthana- sie » pour certains patients atteints de maladies évolutives (myopathies, sclérose en plaques) aboutissant 4 un état de dépendance extréme (par exemple vis-a-vis d’un « respirateur »). Lauteur ne dénie pas le carac- tére insupportable de ces maladies, mais rapporte des cas of elles ont été vécues comme une « aventure exceptionnelle +, une « quéte spiri- tuelle » ou une « expérience de vie positive ». © Dunod —Totte reprosiction non autorsde est un dt Bonheur, satisfaction de la vie, bien-étre, santé et qualité de vie lo | Du cété des soignants comme du cété des patients, s’est développée la remise en question d’une qualité de vie qui serait définie de facon standard. Le modéle médical suppose que chacun d’entre nous référe sa QdV a un niveau optimal de fonctionnement. Or ce n'est pas parce que des patients agés et/ou handicapés ont une moindre autonomie fonc- tionnelle que leur qualité de vie est moins bonne que celle des jeunes et/ou personnes valides. Le fait de le croire est un stéréotype qui ne fait que renforcer les discriminations (Leplége, 2008). Les croyances des médecins et des malades sont parfois bien diffé- rentes (en ce qui concerne I’efficacité des traitements par exemple)'. Nous évoquerons plus loin (voir infra, chap. 5) les doutes du public quant a V'infaillibilité de la médecine. Des mesures hétéro et auto-évaluées de la QaV avant et aprés une intervention seraient souhaitables ; elles per- mettraient d’obtenir et de comparer les différentes évaluations relatives aux effets des traitements, ce qui faciliterait la communication entre médecins et patients. Les instances chargées de réguler les coiits de la santé — comme la sécurité sociale et les mutuelles en France —tentent de faire des compro- mis entre les exigences de qualité des services rendus aux usagers et des contraintes économiques. On parle a ce propos d’analyse d’utilité, theme qui est au cceur de vives polémiques. Le probléme délicat de la ise des budgets de santé sans sacrifier la qualité des soins rendra nécessaire, a court terme, l'utilisation systématique de mesures de la qualité de vie (QaV), notamment de ses aspects liés a la santé physique et mentale (qualité de vie associée a la santé). Depuis plusieurs dizaines d’années, les cliniciens et chercheurs en santé publique sont convaincus que la QdV inclut non seulement l'état fonc- tionmel « objectif » des patients, mais aussi leur bien-étre subjectif qui sont des composantes distinctes de la QdV. En effet, les corrélations abservées entre ces deux aspects sont modestes chez les patients comme dans la popu- lation générale (Cummins et al, 2004b ; Kaplan et Ries, 2007 ; Okulicz- Kozarin, 2012 ; Rapley, 2003). En effet, la perception des symptémes, la décision de consulter et l'adhésion thérapeutique dépendent davantage des perceptions des patients que de leur état fonctionnel effectif. La définition de la santé adoptée par I'OMS (1946) traduit cet inflé- chissement (la santé est définie comme un état de bien étre complet et pas simplement par l’absence de maladie). Pour évaluer la QdV associ€e 1. Diverses étudles concernant l'efficacité des traitements ont montré que Vopinion des méde- ins et celle des patients divergent en moyenne dans la moitié des cas (Leplege, 1999, p. 7). BB Psychologie de la santé a la santé chez les patients, on utilise le plus souvent aujourd’hui des outils intégrant ces diverses dimensions. On évalue ainsi les effets de divers traitements ou prises en charge non seulement sur Pétat fonc- tionnel des patients mais aussi sur leur bien-étre subjectif 2.3. Les points de vue économique et politique” La notion de qualité de vie, telle qu'elle était concue par les économistes et politiciens, se référait surtout aux conditions matérielles permettant un niveau de vie optimal auquel tout individu devrait pouvoir accéder. Flanagan (1982), chargé d’évaluer la qualité de vie des Américains, pro- posera de prendre en compte, non seulement des indicateurs classiques (niveau d’éducation, niveau socio-économique...}, mais aussi certains aspects du bien-étre subjectif (santé percue, aspirations, sentiment de liberté...). Dans les pays développés, il y a longtemps que les respon- sables politiques affirment que les droits des citoyens ne se réduisent pas a la satisfaction de leurs besoins matériels*. Selon Rapley (2003, p. 2-10) et Bognar (2005, p. 561-366), les gou- vernements et institutions de santé des pays développés admettent de plus en plus que les indicateurs économiques de développement sont insuffisants et qu'il faut y ajouter des indicateurs psychosociaux. Les recherches, centrées tout d’abord sur le bien-€tre matériel (economic welfare) intégrérent de plus en plus d’indicateurs environnementaux et sociétaux (épidémies, niveau de pollution, nombre de médecins, taux de criminalité...), puis des indicateurs individualisés et « subjectifs » (satisfaction, bonheur...). Ainsi, les informations sur les conditions de vie objectives des individus seront complétées par la fagon dont ceux-ci évaluent globalement leur vie. La CMEPSPA (Commission on the Measurement of Economic Per- formance and Social Progress) comprenant des spécialistes de diverses disciplines (économie, médecine, santé publique, sciences humaines et 1, Lepte( Leploge (1992, p12) ¢voque les uutsations potentieles des mesures de Qu, res nombreuses : surveillance de état de santé de patients ou groupes de patients, prévention d'inci- conséq Ih santé et du bien étre des patients ; identification des besoins des usagers, etc. 2. Nous n'aborderons pas dans cet ouvrage 'histoire des représentations et pratiques de santé, effleurées dans le chapitre 5. On pourra Se reporter aux ouvrages de G. Vigarello (Histoire des (Pratiques de santé}. 3. Ainsi par exemple, Thomas Jefferson, président des Etats-Unis (1801-1809) proposait déja qfinclure dans la constitution le « droit au bonheur » de chaque américain. Ceci annonce deja Ia dualité future des tions de len Gre ct le qualité de ve ‘comprenant des aspects objectits (quantitatifs) et des evaluations subjectives (qualitatives), © Danod Toute reproduction non autorsée est un dt Bonheur, satisfaction de la vie, bien-Stre, santé et qualité de vie sociales) a été créée en 2008 par OCDE. Elle devait identifier les limites du PIB comme indicateur de progrés social et rechercher des indicateurs plus pertinents. Une premiére vague de concertations et d’enquétes a &é effectuée en France et dans divers pays de YOCDE en 2008-2009 et un rapport de 292 pages en fut issu (Rapport de la CMEPSP de Stiglitz, Sen et Fitoussi, 2009). Ce rapport explique pourquoi le PIB ne constitue pas une estimation pertinente du bien-€tre des populations, particuliérement dans ses dimensions environnementales, sociales, et méme économiques. Désormais, I'INSEE, avec le soutien d’Eurostat, exercera un réle majeur dans la mise en ceuvre européenne du rapport Stiglitz. Les tra- vaux qui seront menés en Europe sur la santé des populations seront ainsi cohérents entre eux ; ils concerneront «le PIB et au-dela » ; la consommation et revenu des ménages ; les inégalités ; la construction indicateurs sur l’état de l'environnement. Cette commission s’adresse a quatre types d’interlocuteurs : les gouvernements et leaders politiques (en particulier ceux qui sont responsables des politiques en matiére de santé et d’environnement), la communauté scientifique et ses statisti- ciens ; les journalistes et médias ; la société civile et les usagers. 2.4 Le point de vue des sciences sociales Les sociologues ont été les premiers a aborder des notions qui devien- dront la qualité de vie. Ils ont défriché ce champ d’étude en différen- ciant peu a peu les notions de bonheur (happiness), de bien-étre subjectif (well-being), de bien-€tre matériel (welfiare) et de satisfaction de la vie (satisfaction of life). Pour eux, deux types de facteurs peuvent affecter le bien-€tre: des facteurs « externes » (variables sociodémographiques, socio- économiques, événements de vie, intégration sociale...) et des facteurs «interes » (estime de soi, efficacité percue, €quilibre émotionnel...). Le terme de qualité de vie apparaitra dans les années 1970 avec les travaux de Bradburn (1969). On s’éloignera de plus en plus de la notion de bonheur et on s‘intéressera de plus en plus au bien-etre et a la qualité de vie. Lethnologie de la santé étudie les représentations et pratiques associées ala maladie et aux traitements, comme celle des guérisseurs dans divers pays et a diverses époques. L’anthropologie de la santé en est une sous- discipline, née aux Etats-Unis dans les années 1960 (eedical anthropology). Elle ne se limite plus a l'étude des représentations culturelles et pratiques 1. Des sociologues comme Campbell et al. (1976) contribueront au succes d'indicateurs sociaux du bien-étre (revenus, niveau d’éducation, emploi, etc.), encore parfois dénommeés bien-ttre objectif (welfare). Ceux-ci seront critiqués par ceux qui considérent comme plus important le point de vue des individus, ou bien-ttre « subjectif - (subjective well-being). B Psychologie de la santé de santé. Grace & des études de terrain (impliquant une collaboration entre anthropologues et soignants), les interactions soignants/soignés, les pratiques des personnels de santé et des usagers sont devenues des objets de recherches pour l'anthropologie de la santé (Olivier de Sardan, 2006). Le sida, par exemple, a suscité des études anthropologiques sur les perceptions de la maladie, les comportements sexuels des populations, le recours 4 des thérapies paralléles et l’attitude des soignants. La notion de qualité de vie et les notions proches vont s‘individualiser peu a peu dans les années 1990-1995 grace a l’apport des psychologues (Urata et Caqueo-Urizar, 2012). Ceux-ci approfondiront les domaines que recouvre le concept trés large de qualité de vie et tenteront de définir et mesurer satisfaction, bonheur, bien-¢tre, ainsi que les diverses facettes de la santé : physique, mentale (émotionnelle, cognitive, spirituelle...) et sociale, Nous résumerons ci-dessous (voir infia, § 3) les apports de la psy- chologie a la définition et al’évaluation de ces notions, puis reviendrons en fin de chapitre sur les conceptions, domaines et mesures de la QdV. 3. Les différents concepts Nous allons a présent présenter les définitions et les mesures de notions comme le bonheur, la satisfaction de la vie, le bien-tre et la santé et nous les situerons les unes par rapport aux autres. La qualité de vie sera abordée dans le paragraphe suivant (voir infra, § 4). 3.1. Lebonheur Le « bonheur » est une notion d'origine philosophique et définie tout d'abord de faon assez floue. Au cours des demniéres décennies, le bon- heur est devenu un théme commun a divers champs disciplinaires : sociologie, psychologie, médecine, économie et politique. Quelques chercheurs en sciences sociales I'ont réhabilité 4 partir des années 1990 (Argyle et al., 1989 ; Buss, 2000 ; Diener et al., 2003a ; Diener et Seligman, 2004 ; Veenhoven, 1997). Peu a peu, la notion émergea dans les recherches médicales et les items explorant le bonheur devinrent courants dans les questionnaires de QaV (par exemple dans le SF-36). Son indexation comme mot-clé dans Psychological Abstracts fut assez tardive (1973). En psychologie, le bonheur fut considéré comme un indicateur d’une bonne santé mentale ; des items relatifs au bonheur firent partie des enquétes épidémiologiques classiques dans les années © Danod Toute reproduction non autorsée est un dt Bonheur, satisfaction de la vie, bien-Stre, santé et qualité de vie Hi 1960-1970 (Veenhoven, 2007). Il en fut de méme en gérontologie oft le bonheur devint un indice de vieillissement réussi (Bouffard, 2012). On note lintérét tardif des économistes pour le bonheur ; l'écono- mie du bonheur est a présent un théme émergent, suscitant un véri- table engouement (Gaucher, 2009). Les économistes, psychologues et sociologues I'étudient ensemble (par exemple, dans le Journal of Happiness Studies). On redécouvre un théme de recherche longtemps délaissé (c’était un théme de recherche rare en psychologic avant les années 1970-1980). L’économie du bonheur trouve sa source théo- rique dans 'utilitarisme, philosophic économique du xvu*siécle (for mulée par exemple par Jeremy Bentham)’. L's utilité » (contrairement & son sens dans le langage commun) ne se réduit pas aux biens que l'on consomme, elle comprend le plaisir et le bonheur qu’ils procurent. On trouvera dans le chapitre suivant un bilan des recherches menées sur les effets du niveau socio-économique sur le bonheur et le bien-étre. La psychologie positive est en pleine expansion (pour une présen- tation des concepts et échelles, voir entre autres Shankland et Martin- Krumm, 2012). Une vie heureuse implique que celle-ci soit source de plaisir, qu’elle ait du sens et que |’individu se sente engagé. Le plaisir vient d’expériences induisant des émotions et cognitions positives. Le sens correspond au fait d’agir en vue de réaliser des objectifs individuels et collectifs. L'engagement est un état de concentration optimale pour réaliser une action. Pour plusieurs auteurs, le bonheur est une disposition stable de la per- sonnalité (trait plutot qu’état) consistant a éprouver généralement des états émotionnels agréables (joie, plaisir, gaieté...), 4 etre globalement satisfait de sa vie et a éprouver rarement des affects négatifs (détresse, anxiété, dépression, hostilité...). Certaines échelles de bonheur ont été construites d’aprés cette conception tridimensionnelle. La plus connue est OHI a vingt-neuf items (Oxford Happiness Inventory) d’Argyle et al. (1989). L'OHQ (Oxford Happiness Questionnaire) est issu de VOHI dont constitue une amélioration (Hills et Argyle, 2002) : mémes items (dans un ordre différent), formulés dans un sens tantot désirable (dix-sept items) tantdt indésirable (douze items), réponses sur une échelle de Likert a six degrés (au lieu de quatre pour l’OHI) (voir tableau 1.1). (On désigne par utilité la présence de bénéfices, avantages, profits, bien-ttre, joie, biens ou bonheur et I'absence de souffrance, échecs, pertes ou malheur. Le bonheur pour les utilita- ste, Ces Ia fois la présence de paints) et Vabsence de déplaisins). Les welfare, eu aes ee ees ae tse Sear deat eo Fda gaychaogt We ong (ou pycholog postive ex ase eect ‘Voir Well-Being : The ogy (Kahneman, Diener et Schwarz, 2003), Psychologie de la santé ‘Tableau 1.1 - L’OHQ (Oxford Happiness Questionnaire) de Hills et Argyle (2002), dérivé de OHI de Argyle et al. (1989) et sa version courte 8 items (*) 1.* Je ne suis pas vraiment content de ce que je suis. 2. Je m’intéresse soumément a BU dewaiei 3.” Je pense que la vie apporte beaucoup de satisfactions. 4. ct Ceavcoup de symputhie pour la plupart des gons 5. Jo me réveille rarement fais (fraiche) et disposla}. 6. Je ne suis pas vraiment optimiste quant & mon avenir. 7. Jo trouve que la plupart des choses sont amusantas. 8. Je me sens toujours impliqué(e) et conceré|e). 9. La vie ast belle, 10. Je ne pense pas qu‘on soit vraiment bien sur cette terre. 12.* Je suis tras satisfait{e) de tout ce qui fait ma vie. 13.* Je ne pense pas atre séduisanife). 14. Ilya un fossé entre ce que je voulais faire et ce que j'ai fait. 15. Je suis trés heureux. 16.* Il y ade la beauté dans certaines choses. 17. Ma présence rend les autres joyeux. 18.*Je trouve le temps de faire tout ce que je désire. 19. Je n'ai pas l'impression de vraiment maitrisor le cours de ma vio. 20. Je mo sens capable de faire face & tout (ce qui arrive). 21.* Je me sens mentalement vif et alerte. 22. Je suis souvent dans un état d’exaltation joyeuse. 23. J'ai du mal prendre des décisions. 3a Ja ne Dense pos que ma vie ot woiment un sens at un but. Je pense que j'ai beau d’énergic. 36 Jai Thebes une influence fondle sur le cours des événements. 27. Je ne m'amuse pas tellement avec les autras. 28. Je ne me sens pas vraiment en bonne santé. 29.* Je nai pas de souvenirs particuliérement heureux du passé. Les items de l'OHG sont identiques & ceux de I'OHI, mais ont été améliorés : lour ratio items positifs/nagatifs ; réponses de | (pas du tout d’accord) a 6 [tout @ fait d'accord). Le score total varie de 29 @ 174. L'échelle est unidimensionnelle - a). Des AF avec rotations obliques donnent 3 factaurs de 1* ordre et un tour de 2° ordre. La corrélation entre scores totaux (OHI et OHG) est de + .80 (172 étudiants} ; les corrélations entre items de I'OHI et de 'OH@ sont satisfaisantes (r: moyenne = +.50) ; la corrélation entre scores tolaux de I'HG-29 et de ‘CHAS. est de +.90. La validité do critéro diverganto do OHO est bonne : avec Extravarsion, +.61 ; avec le Névrosisme, ..59 (EFI). Lo validité de critére convergente : avec l’Estime de soi (Rosenberg) : +.31 ; avec I'Optimisme (LOT) : +.79 ; avec la satisfaction de la vie = +. | DH (Depression Happiness Scale de Joseph et Lewis) : +.90 [coefficients tous $ a p<.001). Les 8 items de la version courte sont signals ci-dessus par une * © Dunod —Totte reprosiction non autorsde est un dt Bonheur, satisfaction de la vie, bien-étre, santé et qualité de vie Ls | LOHQ a de bonnes qualités psychométriques (consistance interne, fidélité test-retest). Son score total est positivement associé aux mémes dimensions de la personnalité que OHI: stabilité émotionnelle, extraversion (EPQ, Eysenck et Barrett, 1985), estime de soi (RSES de Rosenberg, 1989), optimisme (LOT de Scheier et Carver, 1985) et satis- faction de la vie (Life Regard Index de Battista et Almond, 1973). Les analyses factorielles effectuées sur plusieurs échantillons ont permis identifier un facteur de bonheur commun. aux vingt-neuf items. I] en existe une version courte 4 huit items, dont les qualités sont un peu moins bonnes que celles de la version longue (Cruise, Lewis et McGukin, 2006). Le concept de bonheur connait done un regain d'intérét. Plusieurs outils ont été construits pour l'évaluer (OTH, OHI, OHQ, ainsi que le Happy Life Expectancy Index de Veenhoven, 1996), les définitions du bonheur différant sensiblement d’un outil a l'autre. Si dans tous appa- raissent les motions positives (Etre joyeux, heureux...), ne figurent que dans certains d’entre eux la satisfaction de la vie (HLEI, OHI et OHQ), le sens donné & la vie et l'engagement (OHT) et I'absence d’émotions négatives (OHI, OHQ). Les modéles sous-jacents a ces outils continuent a étre mis a l’épreuve et un corpus important de connaissances est en train dese constituer. Ce domaine s'est doté de revues comme le Journal of Happiness Studies et de banques de données comme le World Database of Happiness (Veenhoven, 2007). Quant aux recherches ayant trait au bonheur (transversales et longitudinales), elles croissent de fagon expo- nentielle. Avec Diener et al. (2003a), beaucoup d’auteurs reconnaissent que le bonheur (disposition stable a éprouver des émotions positives) est une condition nécessaire a la qualité de vie et au bien-tre. Ce qui manque souvent dans les publications, c’est un schéma d’ensemble situant les notions (plus ou moins générales ou spécifiques) les unes par rapport aux autres et précisant leurs interrelations. Si les définitions du bonheur tendent aujourd’hui a se rejoindre, il n'y a pas-d’accord sur la spécificité relative de cette notion ni sur son interchangeabilité avec des notions voisines (satisfaction, bien-étre, qualité de vie), notions que nous allons aborder tour a tour ci-aprés. 3-2 La satisfaction de la vie En psychologie, les premiers écrits concernant cette notion apparaissent Ala fin des années 1960 (Bradburn, 1969, par exemple), en relation avec Vémergence de la psychologie positive et un intérét croissant pour |’épa- PPA Psychologie de la santé nouissement personnel’. La satisfaction de la vie(SWL : Satisfaction With Life) est le plus souvent considérée comme la composante cognitive- évaluative du bien-tre (Diener, 1984 ; 1994 ; Schimmack et al., 2002). Elle résulte de la comparaison par une personne entre sa vie actuelle et la vie qu'elle souhaiterait avoir, selon ses normes, valeurs et idéaux. La satisfaction de la vie est évaluée le plus souvent globalement ; elle peut aussi concerner des domaines de la vie plus spécifiques (travail, famille, loisirs, santé, finances...), domaines particuliers explorés par diverses études (dont la satisfaction au travail, par exemple). Plusieurs échelles de satisfaction de la vie ont été élaborées. Le Personal ‘Well-Being Index de Cummins (2008) est un outil destiné a compléter (par huit items) l'item unique utilisé au départ (étes-vous satisfait de votre vie considérée globalement 2), peu fidéle. Construit de fagon extrémement soigneuse pour des sujets australiens, il a ensuite été adapté et validé dans plusieurs langues. Ses qualités psychométriques sont bien éta- blies. Des formes paralléles et des versions pour adolescents et enfants existent, toutes téléchargeables. Malgré son label, cet outil vise la satis faction de la vie (générale et spécifique) plutét que le bien-€tre. Parmi les échelles de satisfaction de la vie, la plus utilisée est cer- tainement la SWLS (Satisfaction With Life Scale) de Diener, Emmons, Larsen et Griffin (1985), qui mesure la satisfaction générale envers la vie (voir tableau 1.2). C’est une échelle courte (cing items), dont il existe une version francaise validée (Blais, Vallerand, Pelletier et Brigre, 1989). Ses propriétés psychométriques, établies en 1985, ont été confir- mées sur divers échantillons américains (Pavot et Diener, 1993). Plus récemment, Pavot et Diener (2008) ont rapporté les résultats de trente et une études menées sur divers échantillons dans différents pays ; ils confirment la bonne consistance interne de la SWLS (de 0.79 20,89 en 1993 ; de 0.80 4 0.87 en 2008) et sa fidélité test-retest (intervalle de 1 a4 semaines : 0.80 environ). Les réponses ne sont pas affectées par la désirabilité sociale. La solution initiale (un facteur général expliquant environ 60 % de la variance) est généralement retrouvée, méme par des techniques d’analyse différentes’. 1. La psychologie Soret pcg Ca ca Lun de ses pion fies est Seligman ui exea Je Pustve Center dont le congrés s'est tent 4 ‘Washington en 2006. Les déterminans aeratent ls Emotions er expénerces st jectives positives, Tes als de personnalteet comportements associés, les valeurs personnelles. associées. Le premier congris s’est tenu a Washington en 2006. 2. Litem 5 : « Si je pouvais recommencer ma vie, je n'y changerais presque rien » ades satura- ‘tions un peu plus faibles que les autres sur le facteur général. Il est le seul a se référer au plutdt qu’au présent. Comme il est fortement coméle aux autres, les auteurs conseillent de le conserver (sauf si l'on veut obtenir une évaluation de la satisfaction de la vie actuelle). © Dunod —Totte reprosiction non autorsde est un dt Bonheur, satisfaction de la vie, bien-étre, santé et qualité de vie Hi Tableau 1.2 - L’échelle de Satisfaction de la Vie (SWLS) de Diener, Emmons, Larsen et Griffin (1985), validation frangaise de Blais et al. (1989) Consignes = Les sujets doivent indiquer leur degré d‘accord avec chaque item (de 1 : pas du tout d'accord ; 4 7 : tout & fait d’accord}. Le score total, somme des réponses aux items, vorie da 5 & 35. 1. En général, ma vie correspond de pris & mas idéaux. 2. Mes conditions de vie sont excellentes. 3. Je suis satisfait(e) de ma vie. 4. Jusqu'a maintenant, j‘ai obtenu les choses importantes que je voulais de la vie. 5. Si je pourais recommencer ma vie, je n'y changerais presque rien. Diener et al. (1985) ont administré la SWLS & 457 étudiants canadiens (229 hommes, 228 femmes ; ge moyen : 18,93 ans ; S.D : 2,64 ans). Une analyse en axes principaux a donne un facteur général de satisfaction (60 % de voriance expliquée). Consistance interne, a de Cronbach ~ + 0,80. La structure unidimonsionnolle (ot 'homogénéitd} de l'échello ont été confirmées par 5 études différentes (Pavot et Diener, 1993), puis par 31 études mendes dans différents pays [Pavot et Diener, 2008). Sa fidélité test-retest est bonne (.80 & .87, intervalle de 1 4 4 semaines} ; la dasirabilité sociale n’affecte pas les réponses. D’aprés la synthése de 2008, les scores moyans observas sont : étudiants (23.0 4 25.2 ; S.D. = 5.86.4) ; adultes (23,6 & 27,9 ; $.D. = 5.3 66.9) ; pationts (16,1 6 24,9 ; 5.D.~ 6.2 & 8.4) Les premiéres études montraient la relation positive de la satisfaction avec le bien-étre, les émotions positives et estime de soi, négative avec le névrosisme. Les études rapportées en 2008 confirment la relation négative du score total de bien-étre avec la dépression (score total au BDI), avec l’affectivité négative (PANAS de Watson, Clark et Tellegen, 1988a) et avec tous les sub-scores de la SCL-90 de Derogatis (1994). Dans le champ de la psychologic de la santé, cette échelle a été utili- sée pour évaluer la satisfaction de la vie dans de nombreux groupes de patients (Shankland et Martin-Krumm, 2012). La satisfaction de la vie apparait donc bien comme I'une des compo- santes du bien-étre (évaluative, cognitive), celui-ci étant un construit plus général, qui comprend en outre la présence d’émotions positives et V'absence d’émotions négatives. Ainsi, pour étre complete, |’évaluation du bien-étre doit comprendre des items de satisfaction de la vie, mais aussi des items sur les émotions et affects positifs et négatifs, comme nous allons le voir ci-aprés. 3.3. Le bien-étre subjectif Le bien-étre psychologique ou bien-étre subjectif (BES) est une notion qui connait un regain de popularité depuis les années 2000. La réflexion Bi Psychologie de la santé théorique est restée longtemps en friche et malgré le nombre important de travaux et publications, il existe encore des confusions entre notions voisines (bien-étre, satisfaction de la vie, bonheur, santé, qualité de vie) longtemps considérées comme interchangeables. Bien que les défini- tions et échelles d’évaluation du bien-étre subjectif aient longtemps été assez hétérogénes, cette situation évolue depuis une dizaine d’années (Moore, Bates et al., 2012)', 3.3.1 Des mesures partielles du bien-étre subjectif (BES) Il existait une vingtaine d’échelles évaluant le bien-étre subjectif dans les années 1980 (Diener, 1984) ; Voyer et Boyer (2001) en dénombraient quatre-vingt-cing. Dans des enquétes trés vastes (World Values Survey, Gallup World Poll, Eurobarometer, European Quality of Life Survey, European Societal Survey), on utilise un seul item pour évaluer la satisfaction de la vie, le bonheur ou le bien-étre (en général : « étes-vous satisfait(e) de votre vie considérée globalement » ?). L’évaluation du bien-étre subjec- tif par un seul item est certes économique et pratique, mais les réponses un seul item sont instables en général, car probablement influencées par des facteurs contextuels. La fidélité test-retest des scores de bien-étre subjectif varie de .40 4.66 pour les échelles 4 un item et de .50 4.84 pour les mesures a plusieurs items (Krueger et Schkade, 2008), dont la validité de critére est en général excellente (Mc Dowell, 2010, p. 73). Le GPWB (General Psychological Well-Being) de Dupuy (1984), index de bien-étre trés souvent cité dans les années 1980-1990, comprend 18 items censés mesurer six dimensions : anxiété, dépression, bien étre subjectif, contrdle, vitalité et santé globale. Selon Mc Dowell (2006, p. 240-247), ses qualités psychomeétriques sont satisfaisantes. Les ana- lyses factorielles menées sur les réponses de divers échantillons donnent trois facteurs expliquant $1 % de la variance (détresse, satisfaction de la vie, santé), trés corrélés entre eux, ce qui permet le calcul d’un score total. La fidélité test-retest est médiocre (beaucoup d’items concernent Vhumeur, qui est instable). Si cet outil contient quelques composantes du bien-étre tel que défini aujourd'hui (voir ci-aprés), sa validité théo- rique ne nous semble pas trés claire. LE WBQ (Well-Being Questionnaire) élaboré par Bradley (1994), a été trés utilisé dans les années 1990 a 2000. L'OMS avait encouragé sa tra 1. Moore et Bates (2012) citent huit domaines du bien-étre : psychologique, social, compor- temental, spirituel, physique, médical, nutritionnel, environnemental. Ne sera décrit ici que Te bien-dtze psycholoique. © Dunod —Totte reprosiction non autorsde est un dt Bonheur, satisfaction de la vie, bien-étre, santé et qualité de vie HB duction dans différentes langues et son usage international. Au départ, il incluait vingt-deux items et permettait d’évaluer quatre dimensions : anxiété, dépression, bien-étre positif et énergie. La structure factorielle de cette version s’est avérée instable. Une version courte a douze items a donné une structure a trois facteurs (affects positifs, affects néga- tifs, énergie), identifiée par des AFC menées sur plusieurs échantillons (Pouwer, Snoek et Van der Ploeg, 2000). Le WBQ-12 a été adapté et validé en vingt langues (dont le francais) et est encore appliqué a des groupes de patients dans divers pays". Le Personal Wellbeing Index-Adult (PWI-A) a été développé en Australie par I'International Wellbeing Group, animé par Cummins (2008). Il comprend huit items et ses propriétés psychométriques sont tres bien établies. Il permet de mesurer la satisfaction relative plusieurs : niveau de vie, santé, vie réussie, sécurité, relations sociales, Il existe une version adulte, ainsi que des versions pour enfants et adolescents, une version pour des sujets déficients cognitifs, toutes téléchargeables et souvent validées dans plusieurs langues. La seule réserve est que les outils créés par ce groupe explorent en fait la satisfaction vis-a-vis de divers domaines, ce qui n’est qu'une partie (évaluative) du bien-étre au sens actuel. Une échelle courte de bien-étre, le WHO-S, a été utilisée par 'OMS dans divers pays auprés de patients (diabétiques notamment). Cet outil ne comprend que cing items (ce qui permet des comparaisons aisées), plus un item de satisfaction globale (voir tableau 1.3). Ses qualités psy- chométriques sont satisfaisantes (Bech, Olsen et Kjeller, 2003). Notons sa bonne validité prédictive vis-a-vis de la santé auto-évaluée six a qunize ans aprés (Bech, 2012). On peut regretter que le WHO-S, ins- trument @ la fois valide et trés court, n’explore pas tous les aspects du bien-étre (il y manque les émotions négatives). Tableau 1.3 - Echelle WHO-S de Bech et al. (2003) et de Bech (2012) Cette échelle fut construite pour évaluer rapidement le bienéire, comprenant : bonne humeur, calme, énergie et vitalité, intérét pour les choses de la vie. La passation dure 243 minutes. Consignas : lisez une par une chacune de ces affirmations. Ecrivez dans la case & droite de chaque item lo chiffre décrivant lo mioux la fréquence de co quo vous avez ressenti ces deux demidras samaines : 0 {jamais}, 1 {rarement), 2 (de temps en temps}, 3 (assez souvent, un pau plus do la moitié du temps}, 4 {souvent}, 5 [out le tomps). 1. Les diverses versions du WBQ et leurs manuels peuvent étre demandés 4 Clare Bradley cbradley@ritul.ac.uk, B Psychologie de la santé T. Je me suis senti gai(e) et de bonne humeur. 2. Je me suis senti calme et 3. Je me suis senti actif et vigoureux. 4. Jo me suis senti frais at dispos au réveil. 5. Je me suis senti intéressé par mes activités quotidiennes. Le score total varie de © 4 25. On le multiplie souvent par 4 pour obtenir des notes de 0 & 100 (comme pour le SF-36, par exemple). Plus tats de bien-&tre ont été fréquonts. Un score inférieur ov égal & 50 si présence d’affects négatifs (dépression légare éventuellement} ‘gal 4 28 nécessite un diagnostic plus approfondi, il peut in plus sévare. Le fait que ce score varie d'une passation a l'autre (10 % ou plus) peut indiquer des problames émotionnels. Dans beaucoup d'essais clei. le but du traitement est d’amdliorar les moyennes des scores So groupe traité (en population lo, c@ score ast d'anviron 70 & 75}. L'échollo a été traduito dans plusiours Free hamarehes org) On ajoute parfois av WHO-5 un item global (de satisfaction de la vie) : Vous sentez- vous globalement satisfait de votre vie ? 3.32 Lemodéle tridimensionnel du BES de Diener (2000) Bradbun (1969), créateur de la Balance Affective Scale, fut un des premiers souligner le fait que les affects positifs et négatifs sont des dimensions distinctes (et non les péles opposés d’une méme dimension). La PANAS (Positive And Negative Affects Scale) de Watson et al. (1988a ; 1988b) illustre également ceci. Diener (2000, p. 34) définissait le bien-étre subjectif comme un ensemble de dimensions émotionnelles (présence d'émotions positives ; motions négatives comme la dépression ou I'anxiété faibles ‘ou absentes) et évaluatives (satisfaction globale et relative aux domaines de la vie). Selon Huppert et So (2011), cette école de pensée, issue d’une conception hédoniste du bien-étre, s'est appuyée sur des résultats empi- riques convaincants (nombreuses analyses factorielles d’items). Aucun questionnaire ne permettant d’évaluer toutes ces compo- santes, on utilisa plusieurs échelles simultanément pour évaluer le bien-étre subjectif. Dans l'étude d’Arthaud-Day, Rede, Mooney et Near (2005), par exemple, on a administré (a 1 628 étudiants et 1 799 adultes) Véchelle de satisfaction de la vie a cing items de Diener et al. (1985), la version a vingt items de la PANAS de Watson et al. (1988a), l'Affective Balance Scale de Bradburn (1969) a dix items, un item de bonheur et un item de satisfaction globale de la vie. Les r¢ponses, soumises a des ana- lyses en équations structurales, se regroupent en trois facteurs distincts, mais corrélés entre eux : satisfaction de la vie, affects positifs, affects négatifs, ce qui est tout a fait compatible avec une conception tridimen- sionnelle du bien-étre subjectif. © Dunod —Totte reprosiction non autorsde est un dt Bonheur, satisfaction de la vie, bien-étre, santé et qualité de vie El Le bien-étre est une notion composite. Il inclut selon Diener (2000) la satisfaction de la vie (générale et par domaines), l'affectivité positive et Vaffectivité négative. Ces trois composantes ont été retrouvées par des analyses factorielles exploratoires et confirmatoires (Albuquerque et al., 2012b). Elles apparaissent comme des dimensions distinctes, mais inter- corrélées. Le modéle de Diener est en outre hiérarchique, chacune des trois dimensions principales se subdivisant son tour en aspects plus spécifiques : la satisfaction globale en satisfaction spécifique vis-a-vis de différents domaines (profession, famille, santé, finances...), l'affectivité négative en anxiété, dépression, et l'affectivité positive en joie, fierté, amour, plaisir, etc. 3.33 _Unmodéle du BES enrichi des concepts issus de la psychologie positive Plus récemment, certains auteurs ont tenté de conjuguer deux approches théoriques du bien-étre subjectif: l'approche hédonique qui valorise les évaluations et émotions positives (satisfaction, plaisir, joie...) et Vapproche eudémonique (Seligman, 2002), qui s'intéresse a ce que font les individus, 4 leur fonctionnement (engagement, signification). Des auteurs comme Lyubomirsky, Sheldon et Schkade (2005) proposeront de défi- nir le bien-tre comme ensemble d’évaluations et d’émotions positives, incluant aussi ce que la personne fait (implication, sens donné a la vie, utilisation du potentiel, réalisation de soi). Seligman (2011) décrit par un acronyme PERMA (positive emotions, engagement, relationships, meaning, accomplishment) la combinaison des conduites définissant le bien-€tre. Les échelles de bien-étre (RPWB) de Ryff et Keyes (1995) s'inspirent d'une conception eudémonique du bien-étre subjectif, congu comme un fonctionnement optimal : acceptation de soi, relations sociales posi- tives, autonomie, maitrise de l'environnement, objectifs de vie, déve- loppement personnel. La version de 1995 du RPWB contient dix-huit items (trois pour chacune des six dimensions). La stabilité temporelle des échelles est satisfaisante (de .81 4.88), mais leur consistance interne est faible (.33 a .S6). Les analyses menées par I'auteur indiquaient une structure a six facteurs, ce que contredisent les analyses rapportées par Springer et Hauser (2006). On peut espérer qu’un raffinement prochain du RPWB-18 (homogénéité, chevauchement des sous-échelles, reformu- lation d’items) améliorera ses performances. Les échelles de bien-étre subjectif ont souvent une bonne consistance interne, mais une fidélité test-retest médiocre ; en effet, elles visent B Psychologie de la santé non des traits, mais plutdt des états, affectés en général par des varia- tions temporelles et contextuelles. Cummins et Nistico (2002) s‘inté- ressent aux biais cognitifs positifs (liés 4 ’optimisme, a l’estime de soi) qui affectent les évaluations de soi. Ceux-ci permettent un maintien « homéostatique » du bien-étre a l'intérieur d'une marge de variation ‘optimale, I serait donc intéressant de comparer différentes évaluations du bien-étre (auto et hétéro-évaluations par exemple). Diener et al. (2010b) ont ajouté récemment aux mesures du bien-étre subjectif une échelle d’épanouissement a huit items (flourishing), permet- tant d’évaluer le fonctionnement optimal (objectifs, relations sociales, sens de la vie, engagement, optimisme, estime de soi...) ainsi qu’une échelle d’affects positiis et négatiis a douze items (SPANE, Scale of Positive and Negative Experience). Elles ont été administrées a six cent quatre-vingt- neuf étudiants, ainsi que d'autres échelles mesurant des notions proches (SWLS, LOT, PANAS). L’échelle d’épanouissement est homogéne (87), stable (.71, pour un mois) et corrélée aux autres mesures de bien-étre sub- jectif (.43 4.73). Les échelles d’affectivité positive et d’affectivité négative sont homogénes (81 4.89), ont une bonne validité convergente, mais leur fidélité test-retest est trés modeste (.62 et .63). Dans I'ESS (European Social Survey), enquéte menée depuis 2002 (tous les deux ans) par la Commission européenne pour étudier le bien-etre subjectif en Europe. Le bien-étre subjectif est concu comme le « péle ‘opposé des troubles mentaux » (DSM-IV ; ICD-10). Une échelle d’épa- nouissement a dix items a été construite, illustrant les points de vue hédonique et eudémonique (voir tableau 1.4). Au total, cinquante-cing items (€panouissement, bien-€tre subjectif, satisfaction de la vie, etc.) ont été administrés 4 quarante-trois mille individus de vingt-deux pays européens (Huppert et al., 2009 ; WHO, 2013). Les dix items d’épanouis- sement se regroupent en deux facteurs (caractéristiques positives ; fone- tionnement positif). Quant au pourcentage d’individus « épanouis » en 2007, les pays nordiques étaient en téte, I’ Europe occidentale au milieu, VEurope de ’Est et le Portugal en dernier (Huppert et So, 2011). Tableau 1.4 - items d‘Epanouissement (Flourishing) de l'European Social Survey (Huppert et So, 2011, table 1) 1. Compétences : La plupart du temps, j’ai le sentiment de réussir co que je fais. 2. Implication, engagement : J’aime bien approndra des choses nouvelles. 3. Sen: pense que ce que je fais dans ma vie a de la valeur. 4, Optimisme : Je suis généralement optimists quant & mon avenir. 5. Relations positives : Il y a des gens qui se préoccupent de mai. © Dunod —Totte reprosiction non autorsde est un dt Bonheur, satisfaction de la vie, bien-étre, santé et qualité de vie 6. Résilience (cotation inversée) : Quand les choses. vont mal, il me faut du temps pour retrouver un état normal. 7. Estime de Soi : En général, j’ai une bonne opinion de moi-méme. 8. Emotions positives : Globalement, diriezvous que vous ates heureux ? 9. Stabilité émotionnelle : La semaine passée, je me suis sentile) calme, tranquille. 10. Vitalité : La semaine derniare, j'ai ev beaucoup d’énergie. épanouissement est défini ici comme l’opposé des troubles mentaux (et pas seulement leur absence). Une commission d‘experts a identifié dix composantes de l'épanouissement et illustré chacune par un item. Les réponses a l’item « émotions positives » vont de O, rés malheureux, & 10, extrémement heureux. Les réponses an items de stabilité émotionnelle et de vitalité se font sur une échelle en & Points 1, jamais ou presque jamais, & 4, toujours ov presque toujours). On répond aux autres items selon une échelle en 5 degrés (de 1, pas du tout d’accord, a 5, tout a fait d'accord) et la cotation de l'item de résilience est inversée. L'AFE des 10 items donne deux facteurs (43 % de V.E.) : caractéristiques positives (vitalité, résilience, stabilité émotionnelle, optimisme, bonheur, estime de soi) at foncionnement posi iif {implication, sens, relations positives, compétences). Des AFC établissent qua ce modale on 2 faciours ast compatible avec les résultats des analyses monéas sur los données de 22 pays d'Europe. Le modéle tridimensionne! du bien-étre subjectif (satisfaction vie, affects positifs, affects négatifs) de Diener (2000) a été trés populaire et a été validé par de nombreuses études empiriques (Albuquerque et al. 2012b). Nous avons vu ci-dessus que certains auteurs y ont ajouté récemment des échelles d’épanouissement (Flourishing), dont les qua- lités psychométriques et les relations a d'autres mesures du bien- étre subjectif sont satisfaisantes, méme si des questions se posent’. Lorsque I’on ajoute de nouvelles composantes, i] faut 4 nouveau éta- blir le statut relatif de l'ensemble et la validité théorique des différents modéles du bien-étre subjectif (Mc Dowell, 2010). Nous pensons, avec Gosselin (2005), qu’il est nécessaire de poursuivre le travail en met- tant a l’épreuve des modéles concurrents, afin d’aboutir enfin a un lexique commun?. Le bien-étre subjectif est généralement considéré comme une issue, car de nombreux traitements et prises en charge visent son amélioration (Mc Dowell, 2010). Des facteurs de divers types l'affecteraient, facteurs 1. Les facettes de Vépanouissement (compeétences, engagement, signification...) étant auto- évaludes, il s'agit ‘de loncuonnement pen Garains Dos affectan les autoevaluauons (est rabilité sociale, insincérité, biais d’optimisme, etc.), les relations observées par Diener et al. (2010b) entre flourishing et satisfaction de la’ vie (4+ .62) et entre flourishing et optimisme (59) sont sans doute en partie attribuables a cette source de variance commune. 2. Clark et Senik (2011) se demandent quelle est la validité théorique de cet ensemble (satis- faction de la vie et spécifique + Epanouissement + motions positives et négatives) Diener et al. (2010b) discutent de ces divers points. Bi Psychologie de la santé dispositionnels, environnementaux, culturels et génétiques (Diener, Oishi et Lucas, 2003 ; Ozer et Benet-Martinez, 2006 ; Steel, Schmidt et Shultz, 2008). Albuquerque et al. (2012a) montrent que certains anté- cédents de personnalité N (Névrosisme), E (Extraversion) et C (Etre Consciencieux) sont fortement associés au bien-étre subjectif. Celui-ci est aussi parfois considéré comme un antécédent (effets du bien-étre subjectif sur la longévité, la santé, etc.). Certains auteurs proposent d’élaborer des modéles théoriques explicites et réfutables (composantes du bien-étre subjectif, hiérarchie, antécédents, effets) et de les mettre a épreuve des faits empiriques (Cummins et Lau, 2004b ; Cummins, 2005). 3-4 Lasanté Nous évoquerons dans le chapitre 5. les diverses croyances et concep- tions relatives a la santé et a la maladie (voir infra, chap. 5). Nous aborde- rons ici cette notion du point de vue des sciences de la santé (médecine, santé publique, épidémiologie, psychologie de la santé, etc.). Selon Me Dowell (2006, p. 10), la santé est une notion abstraite et complexe, que Von peut définir de facon plus ou moins large ou étroite. On évalue sou- vent la santé partiellement et indirectement, ce qui pose le probléme de la sélection des indicateurs : quels domaines (santé physique et fonc- tionnelle, mentale, sociale, spirituelle, etc.), quel point de vue (mesures objectives, hétéro-valuations, auto-évaluations), quel degré de spéci- ficité (mesures plus ou moins globales ou spécifiques) ? 3.4.1 L’évolution des définitions de la santé et la maladie Les conceptions furent d'abord unidimensionnelles et inspirées par la médecine et la psychiatrie : étre en bonne santé, c’était ne pas souffrir de maladie ou de handicap. Comme nous I'avons évoqué plus haut, la santé et la maladie ont été longtemps considérées comme les deux extrémités d’un continuum allant dela maladie a la santé (Antonovsky, 1987) (voir figure 1.1). Cette unidimensionnalité s'appliquait aussi a la santé mentale, s'étendant depuis les troubles mentaux et affects négatifs extrémes (peur, désespoir, rage...), jusqu’a 'intégrité et aux affects positifs les plus intenses (joie, bonheur...). Cette conception, selon laquelle la santé est simplement I’inverse de la maladie, a suscité de nombreuses critiques (Derogatis, Fleming, Sudler et Della Pietra, 1996). © Dunod —Totte reprosiction non autorsde est un dt Bonheur, satisfaction de la vie, bien-étre, santé et qualité de vie B Une conception bidimensionnelle de la santé apparait aprés la Seconde Guerre mondiale : « La santé est un état complet de bien étre, physique, mental et social, et pas simplement l’absence de maladie ou de handicap » (OMS, 1946). La santé des individus pourrait donc étre située sur deux dimensions distinctes, l'une correspondant a différents degrés de pathologie (de I’absence jusqu’a un niveau extréme), l'autre a différents degrés de bien-étre (idem). Les chercheurs en sciences de la santé ont done élargi leur champ d’investigation des maladies et états affectifs négatifs au bien-étre et états affectifs positifs. Vinté- rét pour la « salutogenése » (comment se construit une bonne santé physique, mentale, sociale...) est beaucoup plus récent que celui que Von porte au développement des pathologies somatiques, mentales et sociales. a pasde bone —exoalienie maladie —sympiOmes signes egnes ni de ne a symptimes Figure 1.1 - Continuum allant de la maladie la plus sévere 4 un excellent état de santé (d’apres Antonovsky, 1987) Breslow (2006) décrit trois révolutions dans le domaine de la santé. La premiére a consisté a combattre de mieux en mieux les maladies trans- missibles (premiére cause de mortalité dans beaucoup de pays encore). La seconde (xx* siécle) a consisté a lutter de plus en plus efficacement contre les maladies chroniques, causes majeures de mortalité dans les pays développés (maladies cardio-vasculaires et cancers notamment). Ce combat est loin d’étre achevé, mais les progrés thérapeutiques et la longévité croissante des populations (voir infra, chap. 2) annoncent une troisiéme ére, ot un objectif s‘ajoutera aux précédents: mener la meilleure vie possible. Depuis 1984, "OMS définit la santé comme «ensemble des ressources sociales, personnelles et physiques permet- tant a V'individu de réaliser ses aspirations et de satisfaire ses besoins » (OMS, 1984a). La santé inclut désormais aussi les ressources contribuant A un fonctionnement optimal. II ne s’agit plus seulement de prévenir Bi Psychologie de la santé et traiter les maladies, il s'agit aussi d’aider les individus a profiter plus longtemps d’une vie de qualité’. Le fait que la santé comprenne plusieurs domaines (physique, men- tal, social...) et soit bidimensionnelle (présencefabsence de maladie ; présence/absence d’états positifs) commence a étre largement admis. ‘On intégre de plus en plus dans les définitions de la santé les ressources percues (autonomie, contrdle...), ce qui traduit la méme évolution que pour le bien-étre®. Nordenfelt (1995) affirmait par exemple que « la santé est la capacité (physique, psychique, etc.) a atteindre ses objectifs par soi-méme ». Ainsi, des personnes atteintes de graves déficiences (ou handicaps) peuvent trés bien étre objectivement diminuées et estimer pourtant que leur état (mental, physique...) leur permet tout a fait de réaliser leurs aspirations’, 3.4.2. Les mesures de santé et de maladie Depuis longtemps, la santé des populations est évaluée a partir de dif- férents indicateurs (longévité, mortalité infantile, morbidité...). Elle est souvent évaluée indirectement et chaque mesure n’en donne qu'une ‘vue partielle. On utilise en médecine, en santé publique ou en épidé- miologie un trés grand nombre d’indicateurs de santé (physique, men- tale), le plus souvent considérés comme des variables dépendantes (ou crit@res a prédire). Les mesures sont: plus ou moins simples ou complexes ; collectives (santé d’une population) ou individualisées ; objectives (par exemple, résultats d’analyses de laboratoire) ou subjec- tives et globales (santé auto-évaluée). Nous examinerons surtout ici des indicateurs individuels de la santé. 1. Certaines de la santé le bien-ttre matériel, ce qui est objet de 1G concepuions de comprennent rel, ce qui est objet 2. Santé et bien-étre sont des notions proches ; mais le bien-tre est évalué de facon subjective (auto ou hétéro-évaluation) et la santé de facon plurielle (auto et hétéro-evaluations, tests, enregistrements, etc.). 3. Ceftains patients, pourtant en bonne santé objective, sont inguiets a propos de leur santé, ‘multipliant les consultations et absorbant beaucoup de médicaments (est le « comporte- ment de maladie »). 4 contrarta, il a été observe que des patients atteints de traumatismes médullaires, de myopathies évolutives, de sclérose en plaques, malgré de sévéres limitations physiques objectives, se déclarent plutdt satisfaits de leur vie (Musschenga, 1997). Lesquels Soft les plus malades ? © Danod Toute reproduction non autorsée est un dt Bonheur, satisfaction de la vie, bien-Stre, santé et qualité de vie | 27 | ™ La santé des populations : mortalité et morbidité Le taux de mortalité est le nombre de décés sur mille individus dans une population donnée, pendant un an. C'est une mesure simple, aisément disponible, qui permet des comparaisons, a condition de préciser certains paramétres (Age, genre, tranche d’age, pays, cthnie...). La morbidité est le nombre (ou la proportion) de personnes atteintes d’une maladie donnée dans une population donnée, ce qui est plus difficile 4 obtenit. En €pidémiologie, on se demande parfois quels sont les facteurs de risque accroissant la probabilité de développer une pathologie. On constitue un échantillon de sujets sains au départ (chez lesquels on évalue divers antécédents) et l'on suit cette < cohorte » plusieurs mois ou années a I'issue desquels on évaluera I'issue. La mortalité est le taux de décés dans la cohorte pendant le suivi. La morbidité est le taux de personnes ayant développé une pathologie pendant le suivi', On uti- lise les registres d’état civil, les dossiers médicaux (hépitaux, dispen- saires...), les examens et tests médicaux subis. Le nombre de congés de maladie ou de consultations médicales pendant une durée déterminée donne également des informations sur la morbidité au niveau collectif ou individuel. Lévaluation de |’état de santé des populations s’appuie donc classi- quement sur ces données (mortalité, morbidité) lorsqu’elles sont dispo- nibles. On utilise depuis 1993 (World Bank) une famille de nouveaux index, les HALY (Health-Adjusted Life Years). Ils permettent de décrire la morbidité et la mortalité des populations avec un seul chiffre, ce qui permet de les comparer aisément®. DALY (Disability Adjusted Life Year) est le nombre d’années de vie en bonne santé qui sont perdues (mort prématurée, invalidité) a cause d'une maladie ou d’un handi- cap. Ces indicateurs ont été vivement critiqués (Mont, 2007) et il existe des indices jugés plus pertinents combinant qualité et quantité de vie comme QALY (Quality-Adjusted Life Year), nombre d’années de vie en bonne santé gagnées grace 4 un traitement ou une intervention. L/uti- lisation pratique de ces index (politiques de santé, prises de décision médicales) pose des problémes méthodologiques et éthiques (Gold, Stevenson et Fryback, 2002). Vincidence est le taux de nouveaux cas apparaissant pendant une période déterminge (1.an par exemple). La prevalence est le nombre de personnes d'une population présentant une pathologie donnée a un moment donné. 2. Le sida, par exemple, induit un certain nombre d'années en bonne santé perdues. Si un sujet y survit dix ans avec un taux d'invalidité de 40 9%, puis décéde vingt ans avant rage espéré, DALY = 24 ans (4.ans invalidité + 20 ans décés prématuré). Cet indicateur ne prend pas ef compte l'invalidité percue dont nous avons souligné Fimportance. Psychologie de la santé La santé des individus, mesures abjectives On utilise depuis longtemps des mesures et enregistrements pour éva~ luer |’état de santé des individus (rythme cardiaque, pression artérielle, électro-encéphalogramme, radiographie...). Des paramétres. biochi- miques (taux de certaines substances dans le sang, I'urine, la salive) apportent des informations additionnelles sur le fonctionnement de divers systémes ; certaines mesures de l’activité du systéme immuni- re permettent en outre de connaitre ’évolution de certaines maladies et ’état des défenses du patient (cancers, malades respiratoires, infec tion par le VIH, maladies auto-immunes, etc.). Ces techniques ont été complétées par la scintigraphie, le scanner, V’échographie, la TEP (tomographie par émission de positons) et IRM (imagerie par résonance magnétique). On peut ainsi « voir » de fagon de plus en plus fine ce qui se passe a I'intérieur des organes. Ces tech- niques permettent d’affiner le diagnostic et parfois de tester effet des traitement, ceci pour diverses pathologies (cancers, sclérose en plaques, maladie d’Alzheimer, rétrécissement des artéres coronaires...). La scinti- graphie permet méme de détecter des métastases, de visualiser le niveau d'activité de cellules tumorales, d’évaluer le débit sanguin au niveau du cceur ou encore I’évolution d'une fracture osseuse. La santé physique par hétéro-évaluation ‘On peuts’intéresser au « fonctionnement » des individus, et dans quelle mesure ils peuvent se lever, s‘habiller, se laver, se faire a manger, menter des escaliers, etc. Généralement, ce sont des soignants ou des proches qui remplissent les échelles d’activités de la vie quotidienne (Activity of Daily Living), évaluant le fonctionnement de sujets Agés, handicapés ‘ou malades. Mc Dowell (2006) cite dix-sept index de ce type et donne pour chacun ses caractéristiques et ses qualités psychométriques. Les meilleurs selon lui sont le Barthel Index a dix items (version de Fortinsky, Granger et Seltzer en 1981) et le HAQ (Health Assessment Questionnaire) a vingt items (Fries, 1983)'. En cas d’auto-évaluation, Mc Dowell (2006) suggére de bien distinguer ce que le sujet ne peut pas faire (limitations fonctionnelles réelles) de ce qu’il n’a pas envie de faire (rdles sociaux, motivations). 1. Le HAQ, qui évaluait a Vorigine les problemes des arthritiques (activités quotidiennes) a été appliquéa d'autres groupes de patients. Les auteurs proposent la forme PROMIS-HAQ, dispo- anible en plusieurs langues ; PROtnformation@mapt-tnust.org

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