Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Vikings
Vikings
L'ÉVÊQUE GAUZLIN
En 885, l'évêque de la ville se prénomme Gauzlin. Né aux alentours
de 834, il est le fils de Rorgon 1", comte du Maine.
Moine, il est ordonné prêtre à Poitiers en 815, alors qu'il est nommé
également abbé de Saint-Maur-de-Glanfeuil
II entre comme notaire au service du roi Charles II le Chauve, puis
devrait chancelier. Par ailleurs, il accumule les charges abbatiales :
Saint-Maur- de-Glanfeuil, Jumiêges, Saint Amand, Saint-Germain-des-
Pres et Saint-Denis. En 858, il est fait prisonnier avec son demi-frère,
Louis abbé de Saint-Denis, par une bande de Vikings qui ne les
libèrent qu'en échange du versement d'une forte rançon Gauzlin
devient évêque de Paris en 884. Cette charge le rend responsable de la
défense de la ville. Dès l'entrée de la flotte viking dans l'estuaire de la
Seine, il a veillé à la restauration des remparts de la cité. Comme
d'autres évêques de son temps, c'est un aristocrate qui n'hésite pas, si
nécessaire, à combattre. Aux côtés de l'évêque, se trouve son neveu,
Ebles, abbé de Saint-Germain-des-Prés depuis 881. Son père, le comte
de Poitou Ramnulf Ier, est mort à Brissarthe aux côtés de Robert le
Fort. C'est un farouche homme de guerre ; cependant, aux dires du
moine Abbon, il est quelque peu cupide et libertin.
LE COMTE EUDES
Eudes, comte de Paris, est le fils aîné de Robert le Fort, mort en 866 à
Brissarthe en affrontant les Danois menés par Hâsteinn, qui sont venus
ravager la vallée de la Loire et la ville du Mans. A ses côtés, se trouve
Robert son jeune frère.
Eudes est né aux alentours de 860. Il a épousé Théodrate, sans doute
une fille du comte de Troyes.
Les origines de Robert le Fort sont restées longtemps obs¬cures :
Richer, moine de Saint-Rémi de Reims, écrivant à la fin du Xe siècle,
le donne comme le fils d'un chef saxon nommé Witichin, rebelle à
Charlemagne et déporté avec d'autres com¬patriotes en territoire
franc. Le chroniqueur Aimoin de Fleury, moine de Saint-Benoit sur
Loire, semble également abonder en ce sens. Cependant, Robert le
Fort est le fils d'un noble franc, le comte Robert III de Hesbaye, comte
de Worms, appartenant à une grande famille du Rhin moyen, liée aux
Carolingiens et dont les plus lointains ancêtres gravitaient déjà dans
l'entou¬rage des maires de palais mérovingiens. Cette famille compte
en son sein, Cancor, le fondateur de l'abbaye de Lorsch. En 852,
Robert le Fort est abbé de Marmoutier. En 853, devenu comte de
Tours, il est également missus dominicus pour le Maine, l'Anjou, la
Touraine.
En 861, Charles le Chauve lui confie un vaste comman¬dement contre
les Bretons auquel s'ajoutent les titres de comte d'Anjou et de Blois,
puis d'abbé de Saint-Martin-de-Tours. De 861 à 866, Robert le Fort
combat tant les Bretons que les Vikings, jusqu'à tomber en 866, à
Brissarthe. Les circonstances de cette mort sont bien connues grâce au
récit que Réginon de Prüm en fait dans ses chroniques.
Paris a déjà été attaquée quatre fois par les Vikings : en 845, 856, 861
et 865, les faubourgs des rives droite et gauche ont été mis à sac.
LE SIÈGE
Le 24 novembre 885, une flotte de Danois, forte de sept cents navires
aux dires du moine Abbon, menée par le Viking Sigfrid, paraît donc
sous les murs de Paris. Cette troupe prend ses quartiers au niveau de
l'église Saint-Germain l'Auxerrois. A l'aube, Sigfrid est reçu en
audience par l'évêque Gauzlin et le comte Eudes, dans le palais
épiscopal. Le Danois demande le libre passage des ponts ainsi que le
passage vers la Bourgogne où ses hommes et lui souhaitent hiverner,
menaçant sinon de réduire la ville en cendre, dès le lever du jour.
Comte et évêque refusent ; le Danois se retire.
Dès que l'aube point, ses hommes se portent sur la ville, plus
particulièrement sur la tour qui, sur la rive droite, garde l'entrée du
Grand Pont Fortifié. Le combat dure tout le jour et éprouve fortement
les hommes ainsi que les fortifications couvertes d'une pluie de flèches
De chaque côté, les hommes sont armés d'une épée, d'une lance, d'un
arc et de flèches ; ils portent pour se protéger un casque, une broigne:l>
et un bouclier rond fait de bols et de métal. Les Vikings brandissent
leur redoutable hache, maniable à une seule main, à tranchant double
et terminée par une poignée isolée de la lame par deux gardes
parallèles La nuit venue, les combats cessent enfin. L'évêque Gauzlin
profite de l'obscurité pour faire rehausser la tour en y ajoutant des
ouvrages de bois.
Dans la nuit du 6 février 886, le Petit Pont reliant l'île à la rive gauche
s'effondre, emporté par la Seine en crue. La tour, qui
le défend sur la rive, ainsi que les douze braves qui v montent la garde
se trouvent subitement isolés. Leurs noms sont gravés sur la plaque de
marbre posée à l'entrée de la crypte archéologique, sur le parvis de
Notre Dame de Paris : Ermenfroi, Hervé, Herland, Ouacre, Hervi,
Arnoud, Seuil, Jobert, Gui, Hardre, Aimard et Gossouin.
De nouveau, une partie des Vikings part piller les régions alentour,
situées entre la Seine et la Loire. Le 16 février, ils attaquent Chartres,
mais le comte de la ville les repousse, tuant nombre d'entre eux. Ils
échouent également devant Le Mans, mais parviennent à prendre et
piller Evreux.
Henri de Saxe et ses troupes paraissent devant les murs de Paris début
mars. Il amène du ravitaillement pour la ville, sans doute aussi des
renforts. Le comte demeure jusqu'à début avril, sans mener d'actions
d'éclat, si ce n'est l'attaque, une nuit, du camp des Danois, où les
prenant par surprise, il parvient à en tuer un grand nombre et à voler
bœufs et chevaux. Henri parti, Sigfrid fait traverser la Seine à ses
hommes. Abandonnant leur camp de Saint-Germain l'Auxerrois, ils
vont occuper le terrain de l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés. Des
négociations s'ouvrent alors entre les Francs et les assiégeants. Après
d'âpres discussions, Eudes et Gauzlin versent finalement la somme de
soixante livres d'argent à Sigfrid en échange de son départ. Cependant,
cet accord ne remporte pas l'adhésion des guerriers du chef danois.
Une partie d'entre eux se ruent alors sur la ville pour l'attaquer, mais
une vigoureuse sortie des Francs les repousse dans la Seine et
plusieurs des ennemis se noient. Sigfrid s'éloigne alors, entraînant
donc avec lui une part seulement de ses hommes. Il fait voile vers
Bayeux qu'il assiège.
Malgré ce départ la position de la ville ne s'améliore pas. Les Danois,
qui demeurent encore en grand nombre, attaquent quotidiennement et
chaque escarmouche amène sa poignée de tués. De surcroît, le 16 avril
886, l'évêque Gauzlin, malade, décède. Le 12 mai, c'est Hugues l'abbé
qui meurt à Orléans. Eudes se retrouve soudain bien isolé. L'empereur
est toujours en Italie. Le comte décide alors de quitter clandestinement
la ville afin d'aller lui-même mander du secours, auprès des seigneurs
de Francie Occidentale, sans doute les comtes et vicomtes des
territoires autrefois sous l'autorité de son père et la parentèle de sa
femme. 11 laisse la garde de la cité à l'abbé Èbles.
Enfin, fin juin, Eudes, accompagné d'un corps de troupe menés par le
comte de Troyes Aleaume, paraît sur les hauteurs de Montmartre.
L'aube point lorsqu'il paraît ; casques et boucliers des renforts
étincellent dans le soleil levant. Aussitôt, les Danois traversent la
Seine et se portent dans la plaine pour barrer le passage au comte et
interdire l'entrée de la ville. Les Francs chargent et forcent le passage
; les troupes danoises plient devant la redoutable cavalerie tandis
qu'Aleaume poursuit les ennemis sur plus de deux lieues, nous dit
Abbon, jusqu'à les forcer à repasser le fleuve. Eudes est rentré dans la
ville et les habitants l'accueillent avec joie et ferveur. Revenant
d'Italie, l'empereur entend enfin la nécessité de porter ses troupes sur
Paris. Sans doute, le comte Henri et d'autres seigneurs de Francie
occidentale ont-ils plaidé la cause d'Eudes. Un conseil est tenu au mois
de juillet mais c'est seulement fin août, alors qu'il atteint Quierzy, qu'il
dépêche Henri de Saxe en avant-garde.
Les Vikings, avant eu connaissance de l'approche de l'armée de
l'empereur, creusent, sur la rive droite, de larges fossés qu'ils
dissimulent sous la paille et les branchages. Lorsqu'Henri approche, il
chevauche sans méfiance pour repérer les positions de l'ennemi.
Soudain, le sol cède sous les jambes de son cheval ! Les Danois,
dissimulés alentour, se précipitent dans le fossé où le guerrier est
tombé et le tue. L'escorte du comte a fui ! Heureusement, une sortie
d'une troupe franque permet non sans difficulté de chasser l'ennemi et
de récupérer le corps qu'il s'apprêtait à dépouiller de ses armes et
bijoux. Henri est inhumé à Soissons, dans la basilique Saint-Médard.
Enfin l'empereur arrive sous les murs de Paris, mi-septembre 886. Une
grande armée l'accompagne, forte de six cents hommes. Il établit son
campement sur la rive gauche, face au camp des Vikings.
Impressionnés par l'importance de ces troupes franques, les Danois
restent tranquilles et engagent des négociations qu'ils font traîner en
longueur. Durant ce temps, Charles le Gros confirme Eudes dans les
honneurs de son père et lui confie le commandement contre les
Vikings à la place d'Hugues l'Abbé. Ansery, frère du comte de Meaux,
est désigné pour succéder à Gauzlin comme évêque.
Deux fois encore, les Vikings reviennent aux alentours de Paris, mais
Eudes, devenu roi de Francie Occidentale, les maintient éloignés de la
ville, la première fois en ayant recours aux armes, la seconde fois en
versant le « danegeld ».