Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Textes Littérature Francophone Belge
Textes Littérature Francophone Belge
Clément Pansaers
« La guerre n’a donc pas assez massacré, puisque l’après-guerre organise
méthodiquement le commerce du massacre. L’industrie de l’idée est systématisée. Le
commerce de la parole en est le succédané. Les utilitaires égoïsmes intéressés innovent
de nouvelles sinécures. Existent les commis voyageurs de la confraternité comme les
communistes de carrière, qui exploitent la masse imbécile. [...] Le chaos n’est pas né de
la guerre. Du chaos de l’avant-guerre naquit la muflerie de la spécialisation, qui
enfanta, en séries, les abstractions telles que : jésuitisme, industrialisme,
intellectualisme et mille autres idéologismes corrupteurs. [...] Fallait-il que cette
succession d’idéologies, avec leurs multiples subdivisions de logique, critique,
psychologique, artistique et autres morales scientifiques pour déterminer la place du
ventre dans ce monde. [...] Toute révolte avorte dans l’abondance. »
« Ourangoutangisme » (in Les Humbles, n°9-10, janvier-février 1920)
1
LES SURRÉALISTES : PAUL NOUGÉ
À nos intrépides lecteurs, à nos abonnés,
point n’est besoin d’attirer à nouveau sur attention sur l’étonnante
virilité (stabilité) de notre organe. Ses démarches ferventes et précises, son passé, son
avenir rigoureusement défini en la perfection même d’un mécanisme purement
moderne, tiennent lieu de toute démonstration nouvelle. Mais
à ceux qui dans l’ombre
s’apprêtent à venir « engrosser » notre phalange, qu’il nous soit permis de lancer avec
notre brièveté coutumière cet IMPORTANT AVERTISSEMENT
2
Positionnement du surréalisme belge face au Surréalisme
Tant va la croyance à la vie, à ce que la vie a de plus précaire, la vie réelle s’entend,
qu’à la fin cette dernière croyance se perd.
André Breton, Manifeste du surréalisme (phrase d’ouverture)
Le surréalisme, tel que je l’envisage, déclare assez notre non-conformisme absolu
pour qu’il ne puisse être question de le traduire, au procès du monde réel, comme
témoin à décharge. Il ne saurait, au contraire, justifier que de l’état complet de
distraction auquel nous espérons bien parvenir ici-bas.
André Breton, Manifeste du surréalisme (dernier paragraphe)
Il n’est que temps d’opposer aux redoutables inventions matérielles les inventions
terribles de l’esprit. Nous sommes l’esprit de révolte qui se refuse, qui éternellement se
refusera aux conditions qui lui sont faites mais qui ne se fonde pas sur la négation
simple de ces conditions pour pousser en avant sa révolte.
Nous nous refusons de lier notre aventure à l’avenir de la révolution sociale. Que
d’autres le fassent, il nous serait difficile de croire à des démarches vaines, mais qu’ils
conforment leur action à leur désir, qu’ils participent à l’action des organisations
prolétariennes qui seules sont capables de pousser la révolution. Qu’ils cessent de
vouloir se distinguer d’elles, de poursuivre la chimère d’une activité parallèle. Qu’ils
contribuent à exhausser et à sauvegarder de tant de compromissions qui la menacent, la
pureté de cette action.
Pour nous, l’esprit de la révolte nous incline à d’autres tâches.
3
court, sont aussi, si nous refusons de nous incliner devant eux, les plus sûrs garants
des seules victoires qui nous tentent encore.
Ainsi, MM., qu’il s’agisse de musique ou de quelque autre événement humain,
l’esprit est à notre merci et nous en sommes réellement responsables.
C’est de cette responsabilité qui pèse sur chacun d’entre nous, que je souhaite vous
avoir convaincu aujourd’hui.
5
Ils passent volontiers, ils déploient leur souci de s’exprimer jusqu’à une préoccupation
qui dépasse leurs fins personnelles, qui suppose une vertu générale : la connaissance,
l’état de connaissance.
La connaissance à son état limite est d’ordre contemplatif et suppose un état de repos.
Le monde et nous-mêmes, la connaissance accomplie se confondent, se résolvent en
fin de compte dans l’unité contemplative immobile.
Mais on peut supposer des esprits qui placent l’essentiel dans l’activité, qui
n’imaginent comme fondement, comme ressort de leurs démarches que cette
possibilité de l’action, ce désir de l’action, cette volonté de l’action.
Pour eux l’action est la condition essentielle de la « vie ».
Il s’agit de vivre – donc d’agir.
J’agis – donc je suis.
[…]
Qu’espérons-nous de l’action ? Dans quel sens allons-nous orienter nos actes ?
Et d’abord il faut reconnaître que l’on n’agit pas autrement que sous le coup de la
menace. Un monde menacé, celui que nous avons atteint, celui que nous imaginons,
voilà ce qui vaut la peine d’agir.
La menace, la menace perpétuelle, l’atroce et bienheureuse menace, nous en avons le
sentiment avec une constance qui n’est pas à négliger.
L’on en vient à déployer contre elle toutes les ressources de l’esprit, à ne négliger
aucune de ces ressources.
Elle prend des traits précis, des formes concrètes. Elle est dans nos habitudes, dans
cette cristallisation qui atteint, il faut bien le constater, les meilleurs d’entre nous.
Elle est dans notre paresse et dans notre renoncement.
Elle est dans le monde qui nous enveloppe, qu’il nous faut une bonne fois tenir pour
extérieur sous peine de le voir l’emporter dans cette lutte bienfaisante qu’il engage
contre nous.
Le monde extérieur est notre condition.
C’est pourquoi le péril essentiel est peut-être dans ce que nous dénoncions comme
une certaine prétention à la solitude.
« Qui de nous deux inventa l’autre. »