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HISTOIRE – La France dans la Seconde Guerre mondiale

Yann Jeantet

COURS 5 - LA FRANCE DANS LA SECONDE GUERRE


MONDIALE : HISTOIRE POLITIQUE, CULTURELLE
ET SOCIALE (1940-1945)

T ABLE DES MATIERES


1. Histoire politique de la France (1940-1945) ................................................................... - 2 -
1.1. L’armistice l’emporte ..................................................................................................... - 2 -
1.2. La fin de la République et la mise en place de l’État français ............................................... - 3 -
1.2.1. Les ruptures de Vichy.............................................................................................. - 3 -
1.2.2. Établir un ordre nouveau .........................................................................................- 4 -
1.2.3. L’application de la Révolution nationale ...................................................................- 4 -
1.3. Un régime de Vichy à la peine et qui se durcit ................................................................... - 5 -
1.3.1. La collaboration, une fuite en avant ......................................................................... - 5 -
1.3.2. Une collaboration qui se durcit au service de l’Allemagne........................................... - 5 -
1.4. La France libre et la Résistance intérieure ....................................................................... - 6 -
1.4.1. Les débuts difficiles de la Résistance ....................................................................... - 6 -
1.4.2. Vers l’unification de la Résistance ............................................................................ - 7 -
1.5. Refonder la République ................................................................................................. - 8 -
1.5.1. Le programme du CNR : la rénovation de la République ............................................ - 8 -
1.5.2. Restaurer l’État républicain .................................................................................... - 8 -
1.5.3. La Libération : le retour de la République démocratique ........................................... - 9 -
1.5.4. La reconstruction du paysage politique français ....................................................... - 9 -
2. La France de Vichy : une volonté de refonte du système social ..................................... - 10 -
2.1 La restauration des valeurs traditionnelles ..................................................................... - 10 -
2.1.1 La famille, cellule de base de la société française ........................................................ - 10 -
2.1.2 L’Église, pilier de l’ordre moral .................................................................................. - 11 -
2.1.3 Le travail de la terre ou la primauté accordée à l’agriculture ......................................... - 11 -
2.1.4 La volonté d’insuffler un état d’esprit nouveau ........................................................... - 11 -
2.2 La censure et le contrôle au service de la Révolution nationale......................................... - 12 -
2.2.1 Le contrôle des moyens d’information ....................................................................... - 12 -
2.2.2 La volonté de diffuser l’esprit de la Révolution nationale ............................................. - 12 -
2.3 Une culture qui n’en demeure pas moins florissante ........................................................ - 13 -

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1. H ISTOIRE POLITIQUE DE LA F RANCE (1940-1945)


1.1. L’armistice l’emporte
L’attaque de la Pologne le 1er septembre 1939 provoquent une réaction française et britannique,
qui déclarent la guerre à l’Allemagne. La mobilisation générale est décrétée dans le cadre d’une
guerre attendue.
L’entrée en guerre de la France contre l’Allemagne en septembre 1939 à la suite de l’invasion de la
Pologne, la « drôle de guerre », puis la défaite militaire de l’armée française et l’invasion du
territoire par l’armée nazie, ont provoqué un désarroi profond dans la classe politique de la III e
République.
Face à la débâcle militaire, le choix de l’armistice plutôt que la capitulation l’emporte. Ce choix est
défendu par le chef des armées françaises le général Weygand et par le vice-président du conseil
le maréchal Pétain. L’armistice est d’abord un acte politique et non une défaite militaire ce qui
permet une sortie du conflit et de mettre fin à la guerre. La capitulation pouvait signifier une
reprise de la guerre, position défendue par le nouveau sous-secrétaire d’Etat à la guerre, le
général de Gaulle, qui souhaite une continuité de la guerre notamment à partir de l’Afrique du
Nord et des colonies et qui l’exprime depuis Londres le 18 juin 1940 au micro de la BBC.
La solution de l’armistice l’emporte au sein du gouvernement Reynaud ce qui favorise la démission
de ce dernier. À 84 ans, le maréchal Pétain devient le nouveau président du Conseil. Les
partisans de l’armistice souhaitent profiter de celui-ci pour refonder la France et la sortir du déclin
que celle-ci a connu sous la République. L’armistice est signé symboliquement à Rethondes le
22 juin 1940 avec des conditions difficiles qui s’imposent à la France :
 Le sort des prisonniers de guerre n’est pas réglé (1,6 à 2 millions)
 La France se retrouve coupée en deux par une ligne de démarcation
 Financement de l’occupation allemande
 Collaboration avec l’occupant
Si pour le maréchal Pétain la souveraineté française est préservée, ce n’est qu’en apparence. En
outre, sans que cela ne soit prévu dans les conditions de l’armistice, le territoire national est
démembré :
 Le Nord-Pas-de-Calais est rattaché au gouvernement de Bruxelles
 L’Alsace et la Moselle sont annexés au Reich et germanisées
Dès le 24 octobre 1940, lors de la rencontre de Montoire, le maréchal Pétain rencontre Adolf
Hitler et entend mener une politique de collaboration avec l’Allemagne nazie, même si cette
rencontre ne débouche sur rien d’officiel, elle devient le symbole de la soumission de la France à
l’occupant et du projet politique porté par le Maréchal Pétain.
Les partisans de l’armistice entendent aussi refonder la France et mettre fin à la République
accusée d’avoir accéléré le déclin de la France.

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1.2. La fin de la République et la mise en place de l’État français


1.2.1. Les ruptures de Vichy
Ces ruptures sont précipitées par le nouveau gouvernement du maréchal Pétain dans lequel Pierre
Laval et son entourage jouent un rôle clé. Le choix est fait de remplacer la République par un
nouveau régime et d’une révolution conservatrice tout en collaborant avec l’Allemagne nazie.
Le nouveau régime se place dans l’héritage de la droite anti-républicaine des années 1930.
Le maréchal Pétain appelle à la création d’un ordre nouveau (discours du 25 juin) afin de régénérer
la France ; la liquidation de la République est entamée rapidement. Début juillet, le gouvernement
et les parlementaires s’installent dans la station thermale de Vichy, c’est dans ce contexte que la
IIIe République disparaît :
 Le 9 juillet et le 10 juillet, députés et sénateurs votent une loi de révision afin de donner
les pleins pouvoirs au gouvernement du maréchal Pétain pour élaborer et mettre en
application une nouvelle constitution. 85% des parlementaires votent celle-ci.
 Le 11 juillet, création de l’État français par une série d’actes constitutionnels qui
concentrent les pouvoirs dans les mains du chef de l’État français, synonyme de
dictature personnelle.
Cette dictature est soutenue par une importante propagande (secrétariat général à l’information
contrôlé par Laval) en vue de construire un culte de la personnalité. Cette propagande était
relayée par la légion française des combattants, organisation unique fondée par Vichy, afin de
réunir les anciens combattants avant de s’ouvrir aux non combattants en novembre 1941. La radio
devient un média de choix afin de relayer les discours du Maréchal, les supports de propagande
se multiplient à l’infini : affiches, chansons, pièce de monnaie, timbre-poste, presse enfantine…Les
fêtes en l’honneur du Maréchal remplacent fêtes nationales et républicaines. Si la cérémonie du 11
novembre est conservée, elle est d’abord une cérémonie en souvenir des morts dans laquelle la
figure du maréchal est exaltée et non une cérémonie patriotique. La fête de Jeanne D’Arc devient
une date essentielle du calendrier, le 1er mai devient le jour de la fête du Travail et de la concorde
nationale, …
La liquidation de la République se porte ensuite sur les élus républicains à toutes les échelles
qui se trouvent révoqués voir condamnés.
Les opposants politiques ou autres jugés comme tels sont arrêtés : arrestation de communistes,
interdiction de la franc-maçonnerie, privation de citoyenneté pour les étrangers naturalisés. Dès
septembre 1940, des camps d’internement sont ouverts pour accueillir les « minorités jugées
dangereuses ». Le 3 octobre 1940, une loi sur le statut des juifs français est promulguée afin de
les mettre à l’écart de la société française.
Les deux piliers, que sont les partis politiques et les élections, qui permettaient le fonctionnement
de la vie politique sous la République disparaissent. Le terme de République est remplacé par
celui de « l’État français ».

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1.2.2. Établir un ordre nouveau


Le régime de Vichy entend reconstruire la France sur des bases traditionnelles et conservatrices,
la révolution nationale. Il s’agit d’une vision organique de la France composée de communautés,
« travail, famille patrie », auxquelles l’individu appartient et sans lesquelles il n’est rien. Cette
vision naturaliste conduit à écarter toute autre vision : lutte des classes, pluralisme politique,
étrangers, …
Mais cette vision conservatrice n’empêche pas les tendances fascistes du régime de Vichy et
l’adoption de pratiques modernes notamment dans l’encadrement des masses. Ainsi le sport et
son exaltation participent de cet effort de régénération de la France voulue par le régime de Vichy.
Mais cet ordre nouveau voulu par l’État français a gardé certains héritages républicains : « la
Marseillaise » reste l’hymne officielle même si elle est suivie par la chanson officielle, « Maréchal
nous voilà ! ». Le drapeau tricolore est aussi conservé.
1.2.3. L’application de la Révolution nationale
Dès octobre 1940, une charte du travail est élaborée afin de régir les relations entre employeurs
et salariés qui assimile la profession à une famille, de créer des syndicats uniques pour faire valoir
les droits des salariés et d’affirmer le rôle des pouvoirs publics. Cependant, les salaires restent
bloqués sur demande de l’occupant.
Le régime de Vichy entend aussi intervenir dans la sphère privée des familles : exaltation de la
maternité, de la fête des mères, hausse des allocations pour les familles nombreuses, interdiction
du divorce pendant les trois premières années du mariage, l’homosexualité et l’avortement sont
criminalisés.
La prise en charge de la jeunesse : l’objectif est d’abord de mettre au pas le personnel de
l’éducation jugé trop républicain, d’autoriser le retour des emblèmes religieux et de subventionner
l’enseignement catholique mais les principes de l’école républicaine ne sont pas remis en question.
Pour le régime de Vichy, l’encadrement de la jeunesse passe en dehors de l’école avec la création
des Chantiers de jeunesse et de l’organisation « les Compagnons de France » afin de former
une jeunesse aux principes de la Révolution nationale tout en fournissant des occupations à une
jeunesse privée de service national mais la jeunesse se méfie et adhère peu à ceux-ci.
Le régime de Vichy établit un serment de fidélité au maréchal Pétain que devaient prêtés les
membres du gouvernement, les hauts fonctionnaires, l’armée et les nouveaux membres de la
police nationale nouvellement créée.
La Révolution nationale repose aussi sur une logique d’exclusion. Dès le 3 octobre 1940, une loi
sur le statut des Juifs français est promulguée qui se retrouvent exclus de la fonction publique,
de la magistrature et de l’armée mais aussi de l’ensemble des métiers liés aux médias.
L’antisémitisme intègre le droit français. Cette loi est complétée le 4 octobre 1940, par une loi «
sur les ressortissants étrangers de race juive », qui autorise les préfets à les interner dans des
camps spéciaux, et le 7 octobre par l’abrogation du décret Crémieux de 1871 – abrogation qui
permet de retirer la nationalité française aux juifs d’Algérie.

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1.3. Un régime de Vichy à la peine et qui se durcit


1.3.1. La collaboration, une fuite en avant
En dépit de la volonté du Maréchal Pétain de présenter la politique de collaboration comme une
volonté commune de la France et de l’Allemagne, il faut bien avouer que du côté allemand, cette
collaboration est surtout synonyme de la domination du vainqueur sur le vaincu.
Le gouvernement de Vichy renforce alors sa politique de collaboration afin, théoriquement, de
jouer un rôle dans la nouvelle Europe que dirigerait l’Allemagne nazie. Cela passe par une
collaboration militaire et une radicalisation de la répression intérieure. Ainsi, le régime de Vichy
autorise les Allemands à utiliser les bases militaires française en Syrie et en Tunisie à l’été 1941.
La politique antisémite du régime de Vichy s’accélère. A partir de mars 1941, le régime de
Vichy crée le Commissariat Général aux Questions Juives, la France se dote alors selon
l’expression de l’historien Laurent Joly d’un « ministère de l’antisémitisme ». Cette création est
soutenue par les Allemands qui entendent que le gouvernement de Vichy s’empare de la question
juive. Ce Commissariat est surtout chargée de l’identification et de la spoliation des biens juifs (« loi
d’aryanisation »). Les forces de l’ordre françaises (police et gendarmerie) sont mises à la
disposition des autorités allemandes pour opérer les premières rafles de juifs étrangers en
zone occupée (13 mai 1941, « la rafle du billet vert ») et administrer les camps de Pithiviers et
Beaune-la-Rolande où furent internés les milliers de juifs étrangers. Suivant l’exemple allemand
en zone occupée, le régime de Vichy modifie sa loi sur le statut des Juifs (« 2ième statut des Juifs) le
2 juin 1941, les Juifs sont désignés comme une catégorie à part de la population française. Les
critères de « judéité » sont élargis, les interdictions professionnelles sont élargies (restriction dans
les professions libérales, commerciales, industrielles,) et possibilité d’internement dans des camps
spéciaux y compris des Juifs français.
Avec l’opération Barbarossa, la situation de la France n’est désormais plus une priorité pour
l’Allemagne, Hitler entend que celle-ci fasse profils bas et se mette au service des exigences
allemandes notamment économiques et financières afin de financer et alimenter la guerre à l’Est.
L’entrée en guerre des États-Unis le 7 décembre 1941 ne laisse plus de marges de manœuvre au
gouvernement de Vichy qui doit entièrement se soumettre aux exigences allemandes. La France
ne représente plus aucun intérêt géostratégique alors que l’Allemagne doit désormais faire
face au Royaume Uni, à l’URSS et aux États-Unis.
Cette collaboration est de plus en plus mal ressentie par l’opinion publique française en raison des
conditions de vie dégradées des Français occupés. En outre, certains souhaitent intensifier la
collaboration qui se concrétisent par la formation de groupes politique comme le Rassemblement
national populaire ou par la création de la légion des volontaires français en vue de soutenir
l’effort de guerre allemand mais aussi par la création d’une presse collaborationniste.
1.3.2. Une collaboration qui se durcit au service de l’Allemagne
En 1942, un temps écarté du pouvoir, Laval est rappelé par Pétain afin d’intensifier la collaboration
et reçoit de nombreux pouvoirs. Pour lui, le sort de la France de Vichy est lié à celui de
l’Allemagne, il abandonne ainsi la neutralité française.

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 Mise en place du système de « la Relève » : un prisonnier libéré pour trois travailleurs


français envoyés en Allemagne
 Mise en place du service du travail obligatoire en 1943 (à partir de 1944, il est élargi aux
femmes sans enfants et à l’ensemble des hommes de 16 à 60 ans)
 Dans le domaine policier et dans la traque des Juifs : Les autorités françaises se mettent au
service de l’Allemagne que ce soit dans la rafle des Juifs (rafle du Vel d’hiv le 16-17 juillet
1942), dans la répression contre les réseaux de résistance et contre toute forme
d’opposition de dissidence notamment communiste. À partir de l’été 1942, les forces de
l’ordre française prennent part à la rafle de milliers de Juifs dans la zone Sud et les
transfèrent vers la zone occupée en vue de leur déportation, la distinction entre Juifs
étrangers et français s’estompe peu à peu lors de ces rafles.
À la suite de l’opération Torch en Afrique du Nord, la zone Sud est envahie par les Allemands le
11 novembre 1942 laissant une fiction de souveraineté française aux mains du régime de Vichy.
Les déportations s’intensifient à partir de 1943 contre ceux soupçonnés d’être proches des
résistants ou d‘avoir des sympathies pour l’ennemi. La création par le gouvernement de Vichy
de la Milice marque aussi un tournant, cette force paramilitaire collaborationniste et force de
police parallèle dont Joseph Darnand, ancien militant du mouvement d’extrême-droite l’Action
française et ancien membre de la Cagoule, prend la tête. La milice prend des aspects fascisants et
pratique torture et assassinat. Elle participe auprès des Allemands à la lutte contre les Résistants
et devient l’un des acteurs de la Shoah en France.
La réalité du pouvoir glisse alors de Pétain à Laval et à un gouvernement composé de
collaborationnistes et de miliciens.

1.4. La France libre et la Résistance intérieure


1.4.1. Les débuts difficiles de la Résistance
La Résistance française est aujourd’hui encore un objet de débats entre historiens et même plus
généralement au sein de la société. Il est difficile de prendre du recul à l’égard d’une partie encore
très passionnelle de l’histoire de France. Elle a en effet construit en grande partie les valeurs
politiques et les bases d’un accord politique et social sur lequel la France d’après-guerre est
reconstruite. Pour réunifier une France très divisée par le conflit, la Résistance a été mythifiée,
notamment par l’héritage gaulliste, inventant la légende d’une France entièrement
résistante.
La France libre : Refusant l’armistice, l’occupation et la collaboration, une minorité de Français
dès 1940 souhaite continuer le combat. C’est autour de la figure du général de Gaulle que
certaines Françaises et Français envisagent de se regrouper. Dès août 1940, Churchill considère
l’organisation la « France libre » comme représentante des Français en guerre. Il s’agit alors pour
ces résistants de la première heure de donner une légitimité politique à cette France libre et de
considérer le gouvernement de Vichy comme illégitime. Cependant, les débuts sont difficiles :
l’appel du 18 juin est peu entendu, les ralliements sont minoritaires, la majorité de l’empire
colonial reste fidèle à Vichy même si certains territoires apportent leur soutien au général de
Gaulle à l’image de l’AEF, les États-Unis refusent de reconnaître l’autorité de ce général rebelle et

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maintiennent leurs relations diplomatiques avec le régime de Vichy, l’influence de la France libre
sur la résistance intérieure reste très limitée.
En France, jusqu’en 1942, la Résistance est très diverse et très désorganisée ; elle rassemble
plusieurs courants politiques hétérogènes : d’abord, bien sûr, une gauche antifasciste et non-
communiste, mais aussi une droite nationaliste hostile à l’occupant. Il faut, en outre, distinguer
une zone Sud non occupée, où les actes armés ont été moins courants, et une zone Nord où ces
derniers ont été plus intenses, même si globalement les deux zones ont suivi une même évolution
politique : jusqu’au début de l’année 1942, l’action politique et la propagande y ont été privilégiées
par rapport à la lutte armée.
Si la première Résistance accomplit surtout des actes de sabotage ralentissant ou contraignant
l’occupation du territoire, elle se militarise peu à peu. Ce virage militaire est d’autant plus difficile
à mettre en place que certains s’y montrent réticents comme le général de Gaulle, considérant
qu’une telle action relèverait plutôt du rôle de l’armée. Les répressions sanglantes de l’occupant
qui, pour chaque soldat allemand tué, prend de 50 à 100 otages dans la population civile,
contribuent également à terroriser la population. Mais peu à peu ces mouvements armés se
multiplient et des francs-tireurs sont organisés à partir de 1942. La même année, les « maquis » se
forment en grand nombre dans les zones montagneuses ou forestières comme le massif du
Vercors, la Lozère, les Cévennes, le Limousin et le Morvan.
1.4.2. Vers l’unification de la Résistance
À partir de 1942, le nombre de résistants augmente de manière importante pour trois raisons :
 L’offensive Barbarossa de l’Allemagne contre l’URSS qui amène les communistes français
à entrer en résistance (certains l’étaient déjà).
 L’occupation de l’intégralité du territoire par l’armée allemande
 La création en 1942 de la « Relève » qui donne lieu ensuite à la création du STO en février
1943
Cette Résistance s’organise et s’unifie autour du général de Gaulle. Son principal concurrent, le
général Giraud, d’abord soutenu par les Américains, s’efface en novembre 1943. De Gaulle, établi
à Londres et soutenu par les Britanniques, devient ainsi l’incarnation de la Résistance
française.
Le 27 mai 1943, la Résistance s’unifie grâce à un organe chargé de la coordonner : le Conseil
national de la Résistance dirigé à ses débuts par Jean Moulin. Cet ancien préfet engagé dans le
Front populaire avait refusé de prêter serment au maréchal Pétain en 1940. Il rejoint Londres où il
rencontre de Gaulle. Le choix de Jean Moulin, qui bénéficie de son statut de haut fonctionnaire au
service de l’État, apparaît moins périlleux que celui du général de Gaulle, peu apprécié des
Américains et dont certains résistants craignent qu’il ne soit pas un démocrate sincère. Jean
Moulin arrive à unifier la Résistance, d’abord en œuvrant à un compromis entre les différentes
tendances politiques représentées chez les résistants, puis en unifiant ceux-ci dans le cadre des
deux zones, zone Sud et zone Nord, ce qui aboutit à la création du Conseil national de la Résistance
(CNR). L’arrestation puis la mort de Jean Moulin n’arrête pas cependant ce mouvement
d’unification de la Résistance dans le cadre du CNR.

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1.5. Refonder la République


1.5.1. Le programme du CNR : la rénovation de la République
Pour les résistants, il est indispensable de penser une nouvelle société bâtie sur une paix
durable et une justice sociale qui passent nécessairement par la restauration de la République
et de son idéal.
Le général De Gaulle se rallie à ce projet de république renouvelée. Pourtant le positionnement
politique de celui-ci dans les premières années de la guerre ne montre pas une adhésion
enthousiaste à la République. Son hostilité au parlementarisme et à la IIIe République n’en fait pas
un partisan affiché de la restauration républicaine. Pour autant, à partir de 1942, il s’engage à
rendre la parole au peuple et à restaurer la République sur de nouvelles bases. Ces promesses de
réformes dans un cadre républicain facilitent les ralliements autour de sa personne.
La création du Gouvernement provisoire de la République française (GPRF) à Alger, le 3 juin
1944, trois jours seulement avant le débarquement en Normandie, symbolise ce projet de
renouvellement républicain partagé à la fois par la France libre et par la résistance intérieure qui
est parvenu à établir un programme commun le 15 mars 1944.
Le programme du CNR renouvèle l’idéal républicain. Celui-ci est diffusé dans la clandestinité par
les journaux des mouvements de résistance sous l’intitulé « Les Jours heureux, par le CNR ». Le
texte du programme comprend différentes parties, d’abord un appel au développement de l’action
armée et ensuite un programme politique, dans l’héritage de la Révolution française, qui appelle
au rétablissement de la démocratie, du suffrage universel et de la liberté de la presse. En outre,
le programme fait la part belle aux réformes économiques et sociales. Elles vont dans le sens d’un
État plus social et plus protecteur des salariés.
Ce projet de rénovation républicaine présente des limites :
 Ne disant rien de l’organisation de la future Constitution, il cautionne l’éventuel
rétablissement de la IIIe République.
 L’absence de l’inscription du vote des femmes dans le programme du CNR.
 Le droit à l’indépendance des peuples colonisés n’est pas évoqué alors que lors de la
conférence de Brazzaville, le 30 janvier 1944, le général de Gaulle avait émis l’idée qu’un
jour prochain, les Africains seront « capables de participer chez eux à la gestion de leurs
propres affaires. ».
1.5.2. Restaurer l’État républicain
La France libre se pose en instance afin de restaurer l’État républicain capable d’imposer son
autorité et empêcher l’occupation de la France comme l’envisageaient les Américains.
À partir de juin 1943, il s’incarne à Alger dans le CFLN (Comité français de libération nationale) puis
dans le GPRF dirigé par le général de Gaulle. Il s’accompagne de la formation d’une Assemblée
consultative provisoire (ACP), embryon de Parlement où siègent des représentants des partis
politiques et des principales composantes de la Résistance. Depuis Alger, sont créés des «
commissaires régionaux de la République » appelés à diriger les 18 régions instaurées sous Vichy
et dans chaque département est prévu un comité départemental de libération (CDL).

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Le rétablissement du suffrage universel est affirmé et désormais étendu aux femmes.


Dès le 9 août 1944 la légalité républicaine est rétablie par le GPRF, par ordonnance : l’article 1er
stipule que « la forme du gouvernement de la France est et demeure la République. En droit celle-ci
n’a pas cessé d’exister ». Toutes les lois et règlements du régime de Vichy sont supprimés. Les
membres du gouvernement de Vichy doivent être tous traduits devant la haute Cour de Justice.
Le GPRF s’installe dans la capitale et permet le rétablissement de la légalité républicaine.
1.5.3. La Libération : le retour de la République démocratique
En septembre 1944, de Gaulle forme un nouveau gouvernement « d’unanimité nationale » qui
réunit des résistants et les dirigeants des principales forces politiques. Au sein de ce
gouvernement, deux logiques se rejoignent : celle du général de Gaulle, d’une part, qui
souhaite rétablir l’autorité de l’État au plus vite, et celle des résistants, d’autre part, qui
appellent de leurs vœux une expérience politique nouvelle. Ce gouvernement fait sien le
programme du CNR afin d’établir une véritable démocratie économique et sociale.
Les comités de libération présents dans les communes et territoires dont la majorité sont
communistes décident de se rallier au général de Gaulle. La Libération s’accompagne aussi d’une
vague d’épuration. L’épuration « sauvage » a ainsi pris la forme de plusieurs milliers d’exécutions
sommaires. Cependant, le GPRF cherche rapidement à prendre en mains le processus pour éviter
les dérapages, en instaurant une procédure d’exception destinée à juger les personnes
soupçonnées à des degrés divers d’avoir collaboré. Les grands procès de l’automne 1945
aboutissent à la condamnation à mort de Pétain (peine commuée en détention à perpétuité), de
Pierre Laval, ou encore de Joseph Darnand.
Dans le même temps Le retour à une vie démocratique s’amorce et connaît un élargissement.
 Le droit de vote est accordé aux femmes dès le 5 octobre 1944 qui votent pour la
première fois le 29 avril 1945 lors des élections municipales alors que la guerre est à peine
officiellement terminée.
 Les ordonnances d’octobre 1945 mettent en place la Sécurité sociale. L’État planificateur
nationalise en outre certaines entreprises : houillères du Nord et du Pas-de-Calais, Renault,
des banques…
 La liberté de la presse et des médias est restaurée.
1.5.4. La reconstruction du paysage politique français
La vie politique en France reprend en vue de préparer le référendum du 21 octobre 1945,
promis par le général de Gaulle, sur les futures institutions françaises. C’est au sein des partis et
sous leur impulsion que se reconstruit cette vie politique. Trois grands partis politiques dominent :
 Le MRP (Mouvement républicain populaire), créé en 1945 et issu de la Résistance, regroupe
essentiellement des démocrates-chrétiens du centre-droit et du centre-gauche.
 La SFIO (Section française de l’Internationale ouvrière), officiellement marxiste mais rejetant
le modèle soviétique, elle défend un socialisme réformiste.
 Le PCF (Parti communiste français) s’inscrit dans une fidélité presque absolue envers l’URSS.

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Les forces traditionnelles de droite sont pour leur part encore désorganisées et en partie
décrédibilisées après l’épisode du régime de Vichy, tandis que le parti radical, qui a dominé la fin
de la IIIe République, ne forme plus qu’une force politiquement marginale.
Avec le référendum du 21 octobre 1945, le général de Gaulle, président du GPRF, propose
directement au peuple français de trancher sur le sens que doit prendre cette nouvelle république
à travers deux questions.
96% des Français et des Françaises se prononcent pour une nouvelle Constitution et rejettent
ainsi la Troisième République. Le 13 novembre 1945, la nouvelle Assemblée constituante, à
majorité communiste (26% des sièges au PCF) et socialiste (23% des sièges à la SFIO), élit à
l’unanimité le général de Gaulle comme chef du gouvernement.
Si le retour au modèle républicain est acquis pour le général de Gaulle, président du GPRF,
celui-ci rejette le retour au modèle de la IIIe République parlementaire. La question centrale des
institutions devient vite un sujet de débats entre le général de Gaulle et la nouvelle assemblée
constituante qui entend bien faire de l’assemblée le cœur des nouvelles institutions.
Refusant le retour d’un régime d’assemblée, le général de Gaulle démissionne le 20 janvier 1946
sans provoquer de réactions dans l’opinion publique française. Les raisons officielles en sont sa
volonté de mettre en place un exécutif fort, contredite par les forces de gauche, et son rejet du
poids excessif que prennent les partis dans le fonctionnement du GPRF. Alors qu’il espérait
probablement, grâce à sa démission, créer un électrochoc et être rappelé au pouvoir, le général de
Gaulle se marginalise ainsi.

2. L A F RANCE DE V ICHY : UNE VOLONTE DE REFONTE DU


SYSTEME SOCIAL
La devise du régime de Vichy « Travail, Famille, Patrie », n’est pas une simple formule moralisante :
elle sous-entend une refonte totale du système social. Cette réforme profonde, qui constitue la
« Révolution nationale », aboutit à la remise en cause des droits individuels garantis par les
principes de la Révolution française. La censure et le contrôle sont au cœur du fonctionnement du
régime. Cette période est paradoxalement marquée par l’épanouissement d’une culture
florissante.

2.1 La restauration des valeurs traditionnelles


Le Maréchal attribue la défaite au déclin moral. Pour cette raison, le régime tente d’œuvrer à la
restauration des valeurs traditionnelles et religieuses tout en encourageant la pratique du sport.
2.1.1 La famille, cellule de base de la société française
La famille est considérée comme la cellule de base de la société française, facteur essentiel du
maintien de la cohésion sociale et de la hiérarchie. Le père est le seul dépositaire de l’autorité sur
la femme et les enfants. Le divorce est rendu plus difficile, l’avortement est sévèrement réprimé.
La famille doit permettre le redressement du faible taux de natalité : une loi d’octobre 1940 tente
d’inciter les femmes à rester au foyer en instituant l’allocation de salaire unique.

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En réalité, en tenant compte fiscalement des charges de famille, le régime ne fait que poursuivre
les efforts entrepris par les gouvernements de la IIIe République, auteurs en 1939 du « Code de la
famille ».
2.1.2 L’Église, pilier de l’ordre moral
Le régime considère l’Église comme le pilier de l’ordre moral qu’il veut promouvoir. Des
subventions sont accordées aux écoles privées. Des catholiques sont présents dans les instances
du nouveau pouvoir.
Cependant, l’entente initiale ne dure guère : le régime, dirigé par des hommes de la IIIe République,
comme Laval, ou par des technocrates, qui entourent Darlan, rejettent tout cléricalisme. La
majorité des catholiques s'en détourne en 1942, tout en gardant leur estime, voire leur confiance
au Maréchal, au fur et à mesure que la collaboration s’intensifie.
2.1.3 Le travail de la terre ou la primauté accordée à l’agriculture
Le projet social de Vichy vise à réorganiser la société dans un sens traditionnaliste : la primauté
officielle est donnée à l’agriculture, à cette « terre, qui, elle, ne ment pas » selon les mots
prononcés par le maréchal Pétain le 25 juin 1940. Le folklore devient une culture dominante ; elle
est une réalité au sein de laquelle peut s’enraciner le mythe de la terre.
La loi du 2 décembre 1940 crée la Corporation paysanne, qui regroupe tous ceux qui vivent de la
terre et fixe les rapports professionnels. Ce système, qui devait donner une large autonomie aux
agriculteurs par rapport à l’État, ne produit pas le résultat escompté à cause de la nécessité du
ravitaillement. La Corporation devient, ainsi, un instrument du pouvoir.
2.1.4 La volonté d’insuffler un état d’esprit nouveau
La politique éducative du régime se donne pour objectif premier de combattre l’influence néfaste
des instituteurs réputés socialistes et pacifistes. Les Écoles normales départementales sont
supprimées. Vichy fait porter ses efforts sur les aspects extrascolaires de l’éducation. Le rôle
principal est dévolu aux chantiers de jeunesse qui, à partir de 1941, remplacent le service militaire
pour les jeunes hommes de 20 ans, astreints, pour une durée de 9 mois, à des travaux d’intérêt
collectif dans un esprit proche de celui du scoutisme.
Le souci de formation des cadres entraine la création de l’école de formation des cadres, implantée
à Uriage : il y règne l’état d’esprit des non-conformistes des années 1930, soucieux de former des
« chefs » animés d’un esprit communautaire et spiritualiste, porté davantage vers le service que
vers le pouvoir. L’école est finalement dissoute en 1942.
La régénération de la population suppose le développement et l’encouragement de la pratique du
sport. Le 13 juillet 1940, Jean Borotra est nommé commissaire au Commissariat général à
l’Éducation générale et aux Sports. Maréchaliste convaincu, il veut régénérer la Nation supposée
décadente par une rénovation physique en rupture avec les politiques menées en faveur des loisirs
et des sports du Front populaire. Aussi, pour lui, le sport et l’éducation physique, les activités de
plein air doivent être un moyen de réunir tous les Français et un facteur de redressement moral. Il
compte également créer un continuum de l’École à l’État au travers des associations sportives et
de leurs fédérations pour faciliter la poursuite des mêmes objectifs.

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Cependant, la lecture et l’analyse des discours politiques montrent une certaine continuité entre
les discours et pratiques de Léo Lagrange et Jean Borotra. Ils s’attachent tous deux à privilégier le
sport de masse (amateurisme) au détriment du sport spectacle. Les finalités hygiéniques (santé)
et eugéniques (sauvegarde de la race, régénérescence de la race) du sport sont valorisées par les
deux gouvernements. En outre, si Léo Lagrange conçoit sa politique dans un esprit démocratique
et de liberté, en refusant tout amalgame avec le modèle totalitaire allemand, Jean Borotra refuse
également d’user de ses méthodes. Enfin, la construction de nouvelles installations sportives, la
formation des cadres, l’instauration de brevet (Brevet sportif populaire, puis Brevet sportif
national) et du contrôle médical sont des objectifs communs.

2.2 La censure et le contrôle au service de la Révolution nationale


2.2.1 Le contrôle des moyens d’information
Il demeure difficile d’appréhender l’état de l’opinion en 1940-41. Même si le régime peut compter
sur le vichysme des partisans de la Révolution nationale, une bonne fraction des notables et des
anciens combattants, la majorité de la population est affectée par un sentiment plus fragile, le
« maréchalisme », simple attachement à la personne du Maréchal, sans doute puissant en 1940
mais qui décline dès 1941.
Aussi, dès le départ, le régime assure sa mainmise sur l’information. Un secrétariat général à
l’Information et un service de censure surveillent étroitement la presse, qui ne se fait guère plus
l’écho de l’opinion. Les partis politiques ne sont pas dissous mais progressivement étouffés. Ils sont
placés en liberté surveillée, les réunions privées étant tolérées jusqu’en août 1941. À partir de cette
date, leurs activités sont suspendues. Un réseau de propagande enserre la population française
par le biais des affiches, des médias, de la presse, de la radio et du cinéma. Un véritable culte du
maréchal se met en place.
Les moyens d’information sont directement pris en main. Le Figaro, L’Action française, la Croix sont
repliés en zone sud, la presse restée à Paris demeure entièrement dépendante de l’occupant. La
Propaganda Abteilung, qui relève du ministère de l’Information du Reich, contrôle la presse écrite,
la radio, le cinéma et dresse la liste des ouvrages interdits.
Otto Abetz, ambassadeur du IIIe Reich à Paris, comprend rapidement le rôle que peuvent jouer les
collaborationnistes. Ces hommes se démarquent du vichysme en ce qu’ils se proclament
« révolutionnaires », c’est-à-dire partisans de l’Europe sous domination allemande. Ils sont hostiles
au Vichy ruralisant, corporatiste, traditionaliste. Aussi, il favorise l’essor d’une presse favorable
totalement au Reich représentée soit par des gros tirages comme Paris Soir ou Le Petit Parisien,
soit par des organes qui militent clairement pour la collaboration comme L’œuvre de Marcel Déat.
Il finance Les Nouveaux Temps de Jean Luchaire, la Gerbe d’Alphonse de Châteaubriant ou encore
Je suis partout qui reparait en 1941 et qui compte parmi ses collaborateurs Robert Brasillach.
2.2.2 La volonté de diffuser l’esprit de la Révolution nationale
La légion française des combattants, créée par une loi d’août 1940, reçoit la mission de diffuser
l’esprit de la Révolution nationale par sa presse et l’organisation de cérémonies ainsi qu’une
mission d’ordre public : elle doit éclairer les autorités sur ce qui se passe « conformément aux

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instructions du maréchal Pétain sur les plans civique, social et moral ». En somme, elle surveille,
voire dénonce.

2.3 Une culture qui n’en demeure pas moins florissante


En réalité, en matière culturelle, un double constat s’impose. Tout d’abord, les années de guerre
totale, de pénurie n’ont pas arrêté, comme on pourrait le penser, la production culturelle. Au
contraire, l’impression de ces années de guerre est celle d’une vitalité réelle, malgré les difficultés
matérielles. Il paraît plus d'ouvrages en 1943 qu'en 1941, et ce, en dépit des restrictions de papier.
Les Français n’ont jamais autant fréquenté les bibliothèques, les théâtres et surtout les salles de
cinéma.
Il faut dire que l’occupant, tout comme le régime de Vichy, y ont tout intérêt dans un but de
pacification des esprits. C’est une manière de démontrer que la situation est tout à fait normale.
Ainsi, Sacha Guitry estime que la France doit rester une terre d'expression artistique et continue
donc de travailler dans ce sens durant l'Occupation. Il fait rouvrir les théâtres, profite de
l'admiration que lui témoignent les Allemands pour faire libérer des prisonniers de guerre ainsi que
plusieurs personnalités dont son ami écrivain Tristan Bernard, en partance pour un camp de
concentration. Sacha Guitry est incarcéré à la Libération, puis mis en examen avant de bénéficier
d'un non-lieu.
Jean-Paul Sartre résume parfaitement la situation à propos de l'occupation lorsqu’il écrit « qu'elle
était intolérable et que nous nous en accommodions fort bien ».

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