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Découverte d’un artiste Antoni Gaudí

Antoni Gaudí (1852-1926), architecte et créateur de génie, a marqué l’Espagne au tournant du XXe siècle
et continue de fasciner de nos jours. Pour la première fois depuis cinquante ans en France, une exposition
de grande envergure est consacrée à ce maître de l’Art nouveau. Elle montrera l’extraordinaire créativité
de cet artiste singulier, porteuse des bouleversements à l’œuvre dans la Catalogne de la fin du XIXe
siècle, et qui s’exprime autant dans les détails de son mobilier qu’à l’échelle d’un projet architectural hors
du commun : la Sagrada Familia à Barcelone.
https://www.youtube.com/watch?v=rCIF6xAxhEE&t=2s

La Casa Batllò https://www.casabatllo.es/fr/tour-virtual/

La façade en céramique, mosaïque et fer forgé de la Casa Batllò ne passe


pas inaperçue à Barcelone. Inspirée des fonds marins, la rénovation de
cette maison dévoile aujourd'hui des balconnets en forme de masques et
des murs habillés de vert et de bleu.
Elue Meilleur Monument du Monde en 2021, la Casa Batllò est aussi
inscrite au patrimoine mondial de l'UNESCO depuis 2005.

Gaudí bâtit, en à peine un an et demi, une de ses créations les plus


importantes, à laquelle il sera identifié à jamais. Bien qu’à première vue
elle puisse le sembler, la Maison Batlló ne fut pas un immeuble construit à
partir de zéro, mais bien la rénovation d’un édifice préexistant. La
transformation si radicale et en même temps si géniale dans l’utilisation
des couleurs et des formes, jamais vues sur une façade, en fit rapidement
une icône de la nouvelle Barcelone.
Connu populairement sous le nom de « maison des os », « maison des
masques », « maison des bâillements » ou « maison du dragon », cet
ouvrage symbolise parfaitement l’étape de maturité créative de
l’architecte. La Maison Batlló représente la combinaison idéale entre art et
fonctionnalité, entre architecture et design, et c’est un bâtiment clé pour
comprendre ce que fut le modernisme catalan.

LA « POMME » DE LA DISCORDE

Emili Sala Cortés fut celui qui construit la maison en 1877, au numéro 43
du Passeig de Gràcia. Au tournant du siècle, ce pâté de maisons (le mot «
pâté de maison » se dit « pomme » en catalan) concentra plusieurs
chantiers d’architectes reconnus comme Josep Puig i Cadafalch (Maison
Amatller) et Lluís Domènech i Montaner (Maison Lleó-Morera). Alors que
ces nouvelles constructions constituaient une force d’attraction et un signe
de prestige en faveur de leurs clients, le pâté de maisons était critiqué par
la presse satirique. L’appellation populaire de « pomme de la discorde »
définit précisément la rivalité entre les architectes et, plus
particulièrement, entre leurs façades.
Gaudí fut le dernier à se lancer dans le chantier et dut réaliser la
commande en sachant déjà ce qu’avaient fait le reste de ses illustres «
voisins ». L’immeuble érigé par Sala fut acheté par l’industriel du textile
Josep Batlló i Casanovas en 1903. Un an plus tard, ce dernier engagea
Gaudí avec l’objectif de rénover complètement l’immeuble. Et le moins
qu’on puisse dire, c’est qu’il tint parole...

FÊTE ET LÉGENDE SUR LA FAÇADE

La façade de la Maison Batlló est connue dans le monde entier pour sa


composition unique, pleine de fantaisie et de couleur. Ce chromatisme,
ainsi que les ondulations verticales, ont poussé certains observateurs à la
comparer d’un point de vue pictural à la série de toiles Les nénufars de
Claude Monet. D’autres l’ont liée aux éléments du carnaval : le
couronnement de la façade ressemble
au chapeau d’un arlequin, le revêtement
en trencadís (pique-assiette) rappelle les
confettis, et les balustrades renvoient à
la forme des masques. Cependant,
l’allusion la plus claire fait référence à la
légende de Saint-Georges, avec le toit
en forme d’échine de dragon, la croix qui
surmonte la lance du chevalier, le balcon
de la princesse en forme de fleur ouverte
ou les os des victimes dévorées par le
dragon au premier étage.
En marge des interprétations, cette
façade principale est un condensé des trouvailles, en matière de structures et de formes, qui se répètent dans le
reste de l’immeuble, tel que les cheminées fantaisistes du toit, qui rappellent des champignons, ou la façade
arrière, avec un pique-assiette de céramique aux formes naturelles et géométriques, ou encore dans la splendide
cour intérieure, dans laquelle Gaudí ajusta la taille des fenêtres et la couleur du revêtement céramique dans une
combinaison progressive qui favorise l’illumination de l’ensemble de l’intérieur.
VIVRE À L’INTERIEUR D’UN DRAGON
Au premier étage se trouve l’étage noble, ancienne demeure de la famille
Batlló, où on remarque le salon principal, un espace plein de lumière et de
formes sinueuses donnant sur le Passeig de Gràcia. Gaudí y prêta une
attention particulière avec une disposition intéressante des plafonds et une
décoration très élaborée, jouant avec les lumières et les ombres dans les
différents espaces et conférant une ondulation à toutes les cloisons. La
façade est ici en pierre, avec une galerie où les fenêtres ont, à nouveau,
des formes sinueuses et entièrement différentes tandis que les piliers
prennent la forme d’os avec des articulations.
Au-dessus de l’étage noble, l’immeuble destinait quatre étages à la location
et un cinquième où l’on projeta des combles en tant que zone pour le
service et les greniers. Un espace très suggestif, évocateur et d’une pureté
maximale constitué par une succession d’arcs caténaires qui transportent
le visiteur vers le ventre du dragon. Avec la rénovation complète de l’ancien
immeuble d’Emili Sala, Gaudí élargit l’espace central où se trouvent
l’escalier et l’ascenseur formant une cour intérieure revêtue de carrelages
aux tons bleuâtres qui offrent plus d’intensité à la partie supérieure et plus
de clarté à la partie inférieure. De la sorte, on obtient une distribution
uniforme de la lumière qui donne la sensation très nette d’être à la mer.
Pour certains, cette partie de l’immeuble évoque l’œuvre de Jules Verne
Vingt mille lieues sous les mers.

FORÊT DE CHEMINÉES SUR LE TOIT

Deux escaliers en colimaçon permettent l’accès des combles


vers le toit où d’imposantes et surprenantes cheminées
regroupées furent parfaitement décorées avec du trencadís
(pique-assiette) en verre coloré. Le toit de la Maison Batlló est
une des créations les plus spectaculaires de l’esthétique de
Gaudí. Construit au-dessus des arcs paraboliques des combles,
c’est un espace rectangulaire divisé en son milieu par les
lucarnes des cours intérieures. Dans la partie avant se trouve
une grande salle où étaient installés les réservoirs d’eau, qui
correspond à la partie la plus élevée de la façade. Grâce à cette
solution, Gaudí réussit à donner un sens esthétique – le dos
ondulé et en écaille du dragon – à un besoin fonctionnel de
l’époque au cours de laquelle l’eau courante ne disposait pas
d’une pression suffisante pour satisfaire les conditions de
confort exigées. Si la vue extérieure du couronnement simulait
les écailles d’un dragon, le côté intérieur qui fait office de
balustrade du toit rappelle la carapace d’un crabe, avec un
dégradé de couleurs allant de l’orange au blanc.
Les quatre groupes de cheminées du toit mesurent 6,10 mètres
de hauteur et sont recouverts de fragments de verre et de
pique-assiette polychrome avec des motifs floraux. L’ensemble
se situe à mi-chemin entre la forêt de cheminées que l’on peut
voir au Palais Güell (1888) et celui de la Maison Milà (1910). La
conception particulière des cheminées évite les retours d’air.

RECONNAISSANCE TARDIVE

La reconnaissance unanime de l’ingéniosité et de la beauté de


l’immeuble tarda à venir. Le concours annuel d’immeubles
artistiques de la Mairie lui refusa deux fois le prix, qui fut remis,
en 1906 et 1907 respectivement, à la Maison Lleó-Morera de
Domènech i Montaner et au Collège comtal, signé par
Bonaventura Bassegoda i Amigó. Justice sera faite en 1962,
quand la Maison Batlló fut incorporée au Catalogue patrimonial
de la Mairie de Barcelone. En 1969, elle fut déclarée Monument
historique artistique – un titre attribué par l’État espagnol
actuellement nommé « Bien d’intérêt culturel » – et en 2005
l’immeuble fut inclus dans le catalogue du Patrimoine de
l’Humanité par l’UNESCO. En 2006, il reçut le prix The Best in
Heritage attribué par Europa Nostra Awards, appréciant sa
récupération intégrale et du patrimoine réalisée grâce à un effort
économique provenant entièrement du secteur privé.

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