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Volants d'inertie

 Table des matières du blog www.8-e.fr (http://www.8-e.fr/)


Historique
Ils constituent une forme très ancienne et très
répandue de stockage de
l’énergie. Ils ont 
été utilisés sur les tours de potiers depuis l’antiquité, et
chaque
moteur thermique en comporte au moins un :

Ils ont pour objet de stocker l’énergie mécanique


sous forme d’énergie
cinétique en rotation quand ils accélèrent, et de restituer
cette énergie
quand ils ralentissent. Dans la plupart des applications, et
notamment
pour les moteurs thermiques, leur objet est de régulariser cette
rotation
malgré les variations périodiques ou aléatoires du couple moteur et/ou
du couple résistant. Les transferts d’énergie sont très fréquents et de
faible
amplitude : ainsi, pour un moteur 4 cylindres 4 temps, soit 2
explosions
par tour, tournant à 3 000 t/min, la période de charge /
décharge du
volant est de 10 millisecondes. Le « stockage » est donc
très bref.
Il est aussi utilisé à grande échelle dans les
jouets, pour deux
applications principales : les petites voitures appelées
à tort « à
friction », et les toupies. Ces dernières existent aussi
sous une forme
plus élaborée, dite gyroscope, aux propriétés déconcertantes,
quoique
parfaitement modélisées par la Mécanique rationnelle, parfois utiles
(guidage inertiel), parfois indésirables (couple de précession, dite
« effet gyroscope ») :
Principe de fonctionnement d’une unité de stockage
Le volant d’inertie comporte sur son axe une
machine électrique
réversible.

Pendant l’entrée
en stock, la machine fonctionne en moteur :
elle consomme l’énergie
électrique du réseau et la transforme
en énergie cinétique par accélération du
volant jusqu’à sa
vitesse maximum.

En stockage,
la machine n’exerce aucun couple. Le volant
tourne à vitesse constante, aux
dissipations près.

Pour la restitution,
la machine fonctionne en génératrice qui
ralentit le volant et transforme son
énergie cinétique en
énergie électrique restituée au réseau.

La puissance d’entrée, souvent, mais pas


nécessairement, égale à la
puissance de restitution, est celle de la machine
électrique avec son
électronique de commande à vitesse variable. Les rendements
sont très
bons.
Théorie des volants d’inertie
Cylindre creux mince (r >> Δr)
Il est facile (formules
établies par l’auteur) de modéliser un volant
d’inertie réalisé sous
forme d’un cylindre creux de rayon moyen r et de
faible épaisseur Δr,
avec les notations usuelles (unités ISO) :

Volume : v = π r Δr h

Masse : m = ρ v

Moment d’inertie : J = m r2 = ρ v r2

Vitesse périphérique : vp = r ω

Nombre de Mach en périphérie : M  = vp/c


= r ω/c

Energie cinétique : E = J ω2/2 = ρ r2 ω2


v/2  

Contrainte de traction tangentielle : σ = ρ r2 ω2

En éliminant ρ r2 ω2  entre les 2 lignes


précédentes : E / v  =
0,5 σ
On note aussi que, en éliminant (ω r),
la vitesse périphérique
peut s’écrire : vp
= (σ/ρ)1/2 

Il s’en suit que l’énergie


cinétique stockée par unité de volume est
égale à la contrainte, à
un coefficient k près appelé coefficient de
forme, ici égal à 0,5.
Ce résultat, selon lequel l’énergie volumique ne
dépend pas de la masse volumique, ni des
dimensions du cylindre,
mais seulement de la contrainte maximum, peut apparaître surprenant.
Ce paradoxe
s’explique par le fait qu’à contrainte égale, un cylindre léger
pourra tourner
plus vite, et emmagasiner finalement la même énergie.
L’intérêt des matériaux
légers n’est toutefois pas aussi élevé qu’on
pourrait le penser, car ils sont
aussi généralement moins résistants…
Il en résulte aussi que la vitesse
périphérique ne dépend que du
matériau caractérisé par sa résistance
pratique et par sa masse
volumique, et est indépendante des dimensions du
cylindre. Ceci traduit
le fait qu’un cylindre plus gros devra tourner (vitesse angulaire) plus
lentement.
On notera que dans un cylindre mince, les contraintes
sont uniquement
tangentielles, les
contraintes radiales étant pratiquement nulles.
Pour un cylindre creux épais et isotrope (métal
par exemple)
La rotation rapide d’un cylindre creux épais crée
un champ de
contraintes de symétrie axiale, donc uniquement fonction du rayon
courant r,
avec rm
≤ r ≤ rM , selon deux composantes radiales et
tangentielles σr et  σt
.
On trouvera en annexe à la fin du message, le
calcul complet d’un
cylindre dans le cas général, avec prise en compte du
coefficient de
Poisson (qui caractérise la striction sous contrainte de
traction).
Le passage d’un cylindre mince à un cylindre épais
présente :

Un inconvénient
en ceci que le rapport J/m (Moment d’inertie
/ Masse) est un peu moins favorable, car la matière
située
loin de la périphérie a une vitesse linéaire plus faible et stocke
donc
moins d’énergie cinétique.

Un avantage
dans le champ de contrainte : les contraintes
radiales aboutissent à
réduire les contraintes tangentielles de
la périphérie en augmentant celles des
plus petits rayons,
avec une répartition plus favorable du champ de contraintes
qui autorise ainsi une vitesse angulaire
légèrement
supérieure. Ceci compense en partie l’inconvénient
précédent.
Les graphiques ci-dessous donnent les contraintes radiales et
tangentielles
dans un cylindre en acier de un mètre de diamètre. En gris,
les
contraintes tangentielles s’il n’y avait pas de contrainte radiale, par
exemple
en raison d’une structure anisotrope telles qu’un enroulement
d’une fibre
synthétique unidirectionnelle très peu élastique enrobée de
résine beaucoup
plus élastique. On constate sans étonnement que
quand rm se rapproche de
rM,
les contraintes radiales se réduisent,
pendant que les contraintes tangentielles
deviennent prépondérantes et
tendent vers la valeur limite de l’anneau mince.
Les graphiques
correspondent respectivement à rm = 0,20 et rM
= 0,50
Ces éléments aboutissent à un coefficient
de forme k inférieur à 0,5 et
à une vitesse
angulaire légèrement augmentée quand le ratio rm /rM
diminue, selon le graphique suivant :

Il existe un modèle de volant d'inertie en


forme de disque épais au
centre et s’amincissant en fonction de la croissance
du rayon, dit
« disque iso-contrainte », dont le coefficient de forme
est de 1. Mais son
intérêt est surtout théorique, car il a quelques  défauts :

Le cylindre épais se différentie du modèle du


cylindre mince par :

 Choix du matériau du volant


Le tableau ci-dessous donne six matériaux typiques,
dont trois
métalliques et trois composites, classés par masse volumique
décroissante. En raison de leurs coûts, ceux
mentionnés en rouge sont
a priori peu envisageables dans des applications de
stockage de
masse.
La littérature donne souvent, selon les sources,
des valeurs très
dispersés des contraintes maximum de travail effectif par
matériau. Les
valeurs ci-dessous sont plutôt prudentes. Celles des composites
viennent du fabricant Hexcel
(http://www.hexcel.com/Resources/DataSheets/Brochure-Data-
Sheets/Prepreg_Technology.pdf)
et sont relatives à des pré-imprégnés
unidirectionnels. Les énergies volumique
et massique sont basées sur
un coefficient de forme k = 0,5.

Masse Contrainte Energie Energie Vitesse


Matériaux volumique maxi réelle volumique massique périphérique

Kg/m3 MP Kwh/m3 Kwh/tonne Nbr de Mach

Acier
dur 7 800 700 97 12 0,9

Alliage
alumin. HR 2 800 400 56 20 1,1

Titane 4 400 600 83 19 1,1

Verre
Epoxy UD 2 000 400 56 28 1,3

Carbone
HR UD 1 500 800 111 74 2,1

Aramide
Epoxy UD 1 400 400 56 40 1,6

Une batterie de 10 à 20 volants de 1 m3


chacun est donc capable de
stocker 1 Mwh, ce qui reste modeste à l’échelle d’un
réseau, mais
envisageable. Ce stockage est peu volumineux. Pour la même
capacité,
une STEP de 1 000 mètres de dénivellation (ce qui est déjà
beaucoup)
doit stocker 360 m3, soit 18 à 36 fois plus. Mais la STEP
stocke de l’eau
gratuite dans un lac en partie naturel, sans mécanique
sophistiquée…
Comme disent les américains : « Devil is in
the details »
Les principes simples des volants d’inertie s’accompagnent
de
nombreuses contraintes de conception :

Faire tourner à grande vitesse un volant d’inertie


soumis à des
contraintes élevées, avec une marge de sécurité réduite,
impose de
prendre en compte le risque d’éclatement
du
volant.  Pour cantonner ce risque à
des dégâts matériels
limités à cette seule unité, il y a lieu de placer le
volant dans
une enceinte de haute
résilience (comme en nucléaire !)
capable d’absorber l’énergie cinétique
du volant, et de
l’enterrer. Ci-dessous : crash d’un volant.
Selon son matériau, la vitesse périphérique du
volant peut
atteindre ou dépasser largement la vitesse du son dans l’air,
ce qui engendre des turbulences
importantes, c’est à dire une
dissipation d’énergie sous forme aérodynamique,
et
finalement thermique, qui entraîne un ralentissement du
volant. Pour éviter totalement
cette dissipation, la seule
solution est de faire un vide assez poussé dans l’enceinte
de
sécurité.

Ces paliers
doivent supporter une charge lourde en rotation
très rapide, et ce, avec une
longue durée de vie. On pourrait
penser à un axe vertical, avec une butée
inférieure plate
hydrodynamique, centrée par des roulements à billes ou à
rouleaux.
Mais ces solutions sont à éliminer, car elles
nécessitent une lubrification
incompatible avec le vide requis.
Il faut recourir à des paliers magnétiques
actifs, complexes,
coûteux et consommateurs d’énergie…

La machine
électrique conditionne les puissances d’entrée et
de sortie de l’unité,
ainsi que son rendement, ce qui est
classique. Mais son rotor est placé dans le
vide. Il s’en suit
qu’il ne pourra dissiper ses pertes thermiques que par
rayonnement, la convection étant nulle dans le vide, et la
conduction
impossible en l’absence de contacts. Il y aura
donc lieu d’utiliser une machine
de type synchrone, dans
laquelle les champs magnétiques vus du rotor sont fixes
(pas
de pertes fer), et à aimants permanents, ou avec un flux
d’excitation issu
de l’extérieur via un entrefer supplémentaire
(pas de pertes cuivre).
Citons un problème qui aurait pu se poser, mais qui
est en fait
à peine perceptible : l’effet
gyroscope résultant de la rotation
terrestre. En effet :

Mais dans d’autres applications, telles les véhicules


(http://fr.wikipedia.org/wiki/Gyrobus) susceptibles de
rotations rapides selon chacun des 3 axes (tangage, roulis,
lacet), ce problème
serait bien réel !

  Conclusion
Les volants d’inertie constituent un moyen de stocker
l’énergie
électrique avec des avantages certains:

Pas de contrainte géographique, contrairement aux STEPs


(http://www.8-e.fr/2013/11/step-station-de-transfert-
denergie-par.html).

Ils ont aussi quelques inconvénients :

Pratiquement, on trouve actuellement ce type de


stockage dans deux
types d’applications :

Des groupes
électrogènes de secours instantanés, plus
performants que des batteries
d’accumulateurs électriques,
capables de se substituer instantanément à un
réseau
défaillant pour des utilisations sensibles. Ci-dessous, une baie
Socomec
de 200 Kw, mais seulement 1 Kwh, soit une
autonomie de 18 secondes, en
transition vers des batteries ou
un groupe électrogène thermique.

Des batteries de volants liées au réseau pour compenser les


fluctuations rapides de la
consommation afin d’améliorer la
qualité de ce réseau en tension et en
fréquence, avec un objet
similaire à celui du volant d’inertie d’un moteur
thermique. Ci-
dessous batterie de 200 volants de 100 kw, soit 20 Mw
installée
près de New-York par Beacon Power. La capacité
n’est pas donnée, probablement assez
courte pour ce type
d’application.
Prospective
Au vu de ce qui précède, et dans l’hypothèse où,
dans un futur lointain,
un stockage, même à prix élevé, était rendu
indispensable par un
développement important des énergies renouvelables fatales
au
détriment du thermique et du nucléaire, il y aurait peut-être une solution
à
un stockage de masse en faisant appel aux techniques suivantes :

Volants d’inertie en acier dur, lourds, d’inertie très


élevée,
montés sur des butées et
roulements à rouleaux (poids) et à
billes (centrage axial) conventionnels,

Enceinte en légère surpression par rapport à l'atmosphère,


remplie d’hydrogène
ou de l’hélium, gaz légers réduisant les
pertes aérodynamiques qui sont proportionnelles à la masse
volumique. Les
étanchéités sont ainsi simplifiées, les pertes
sont réduites, la machine électrique
peut être dans ou en
dehors de l’enceinte. L'hydrogène (H2=2) présente la meilleure
diffusivité thermique, donc le meilleur refroidissement de la
machine électrique si elle est dans l'enceinte. Il est
couramment utilisée dans les gros alternateurs de
réseaux. L'hélium (He=4) est monoatomique, d'où l'avantage
d'un "gamma"(=Cp/Cv) plus élevé, d'où un célérité du son plus
élevée de 9%. Le choix reste à faire...

Effet
d’échelle : la capacité énergétique est proportionnelle au
volume,
alors que les pertes aérodynamiques (à vitesse
linéaire constante, ce qui est
le cas), ne sont proportionnelles
qu’à la surface, c’est-à-dire à la puissance
2/3 du volume : un
doublement des dimensions réduit le taux de pertes de 20%.

 Mais seule une étude beaucoup plus poussée que le


présent message
permettrait de valider ces idées de l’auteur et de conclure.
Annexe : Calcul d’un volant d’inertie en forme de
cylindre creux épais
(cas général) :
Les formules des contraintes radiales et tangentielles en fonction du
rayon sont tirées d’un cours de résistance des matériaux
(http://mms2.ensmp.fr/mmc_paris/annales/corrige2006.pdf) de
l’ensmp. http://mms2.ensmp.fr/mmc_paris/annales/corrige2006.pdf
(http://mms2.ensmp.fr/mmc_paris/annales/corrige2006.pdf)

P è S b l /F l U ié Di i
Paramètre Symbole
/ Formule Unité Dimension

Géométrie Rayon maximum rM m L

Rayons courants r9

r8

r7

r6

r5

r4

r3

r2

r1

Rayon minimum rm m L

Hauteur h m L

Volume v =
π (rM²- rm²) h m3 L3

Masse volumique ρ kg/m3 M


L-3

Matériau Résistance pratique σM Mp M


L-1 T-2

Coefficient de Poisson ν Nombre 1

Masse m
= ρ v kg M 

Moment d'inertie J
= ρ v (rM2
+ rm2)/2 kg
m2 M
L2

Vitesse angulaire ω rad/sec T-1


Dynamique
t/min

Energie cinétique E
= J ω2/2 =  ρ v (rM2 + rm2)/4 Mj M L2
T-2

Kwh

Contraintes σr
= - ρω2(3+ν)(r2-rM2) (r2-
Contrainte radiale maxi Mp M
L-1 T-2
rm2)
/(8 r2)

Contrainte tangentielle σt
= ρr2ω2[(3+ν)[rM2 rm2/r4
+
Mp M
L-1 T-2
maxi (rM2 + rm2)/r2]-
(1+3ν)]/8
( M m ) ] ( )]

Contrainte résultante
σM
= (σr2 + σt2)1/2 Mp M
L-1 T-3
maxi

Coefficient de forme k = E / v σM Nombre 1

Vitesse périphérique vp
= rM ω m/sec L
T-1

Aérodyn. Célérité du son à 20°C c m/sec LT-1

Nombre de Mach M  Nombre 1

Vitesse de précession Ωp rad/sec T-1


Gyro.
Couple sur le gyroscope τ
= J Ωp ^ ω N^m M
L2 T-2

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