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Les Coindivisaires in Bonis Et La Procedure Collective Du Debiteur 6 PDF
Les Coindivisaires in Bonis Et La Procedure Collective Du Debiteur 6 PDF
COLLECTIVE DU DEBITEUR
1GUYON (Y.), Droit des affaires, T. 2, entreprises en difficultés. Redressement judiciaire-faillite, 9e éd.,
Economica, p. 8.
3 Sur la question v. ELEVAMENOU (K. S.), Le concordat préventif, Thèse de Doctorat, Université Paris-Est,
2012, 479 p.
5Au sens de l’Art. 1-3 AUPCAP révisé, est considérée comme petite entreprise : « toute entreprise individuelle,
société ou autre personne morale de droit privé dont le nombre de travailleurs est inférieur ou égal à vingt (20) et
dont le chiffre d’affaires n’excède pas cinquante millions (50 000 000) de francs CFA, hors taxes, au cours des
12 mois précédents la saisine de la juridiction compétente ».
6Art. 859 AUDSCGIE « Sont réputés indivis entre les associés les biens acquis par emploi ou par remploi de
deniers indivis pendant la durée de la société, ainsi que ceux qui se trouvaient indivis avant d’être mis à la
disposition de la société ».
sur un même bien ou sur une même masse de biens par des personnes différentes, mais sans
qu’il y ait division matérielle de leurs parts7. Elle désigne aussi la pluralité de droits de
propriété s’exerçant sur un objet identique ; elle peut aussi designer la chose indivise elle-
même8. François Xavier TESTU l’appréhende comme une forme de propriété collective
supposant qu’une chose soit commune à plusieurs sujets de droit. On réserve spécialement le
terme d’indivision au cas où cette propriété collective ne fait pas l’objet d’une législation
particulière9. considérant les rapports personnels entre coïndivisaires unis par une
communauté d’intérêts comparable à celle qui unit les associés, on a pu rapprocher sans les
confondre les notions d’indivision et de société dont l’opposition s’atténue au fur et à mesure
que l’indivision s’organise et que l’on admet les sociétés sans personnalité morale10. Plus
spécifiquement, en présence des procédures collectives dans le cadre d’une entreprise indivise
on distinguera l’indivisaire soumis à la procédure collective dont la situation peut être
qualifiée de malus, des autres dits in bonis. "In bonis" est une expression d'allure latine,
actuellement d'une utilisation peu fréquente qui, caractérise la situation de celui ou de celle
qui jouit de l'ensemble des droits d'usage et de disposition que le droit lui confère sur son
patrimoine. A cette position s'oppose celle des personnes qui ayant été placées sous le régime
de la liquidation sont déchues du droit de disposer de leurs biens qui constituent le gage de
leurs créanciers ; In bonis est également compris comme un terme latin signifiant dans ses
biens. Aujourd’hui encore utilisé pour désigner le débiteur qui est à la tête de son patrimoine,
maître de ses biens, par opposition à celui qui est dessaisi de ses pouvoirs de gestion en raison
notamment d’une liquidation11. Cependant, la frontière entre ces deux situations est mince. Il
arrive souvent que dans le cadre d’une indivision, le coïndivisaire in bonis, bien que maître de
ses biens à la différence du coïndivisaire débiteur, personne physique soumise à une
procédure collective subisse les effets de cette dernière. Cette situation est à première vue
paradoxale en considération du sacro-saint principe de l’effet relatif des contrats. Le
coïndivisaire in bonis est normalement un tiers à l’activité du débiteur 12. Le tiers désigne ici
7GUINCHARD (S.), MONTAGNIER (G.), Lexique des termes juridiques, 14e éd., Dalloz, p.315.
13 V. GHESTIN (J.), « La distinction entre les parties et les tiers au contrat », JCP, 1992, I, p. 3628 et s.
14 Sur la stipulation pour autrui dont il est question dans l’article 1121 v. VENANDET (G.), « La stipulation
pour autrui avec obligation acceptée par le tiers bénéficiaire », JCP, 1989, I, p. 3391 et s.
15 BIBOUM BIKAY (F.), Le tiers dans le droit des voies d’exécution de l’OHADA, Thèse de Doctorat,
Université de Douala, 2009-2010, p. 5.
16 WICKER (G.), « L’entreprise indivise et les procédures collectives », Actes colloque organisé le 21 juin 2002
à l’Université Montesquieu-Bordeaux IV par l’Association Henri Capitant des Amis de la Culture Juridique
Française, p. 36.
17 L’organisation pour l’harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) a été créée par le traité du
17 octobre 1993 signé à Port Louis, révisé le 17 octobre 2008 à Québec au Canada. Les objectifs assignés à cette
organisation sont de : faciliter les échanges et les investissements ainsi que garantir la sécurité juridique des
activités économiques; Accélérer le développement économique et créer un vaste marché intégré afin d’en faire
un pôle de développement ; A ce jour, l’ OHADA regroupe 17 Etats membres ( Benin, Burkina-Faso,
Cameroun, Comores, Congo, Cote d’ivoire, Gabon, Guinée équatoriale, Mali, Niger, République centrafricaine,
Sénégal, Tchad, Togo et République Démocratique du Congo). On dénombre dix Actes Uniformes que sont
l’Acte Uniforme sur le Droit Commercial Général, l’Acte Uniforme sur le Droit des Sociétés Commerciales et
des Groupements d’Intérêt Economique, l’Acte Uniforme portant Organisation des Suretés, l’Acte Uniforme
portant Organisation des Procédures Simplifiées de Recouvrement et des Voies d’Exécutions, l’Acte Uniforme
relatif au Transport de Marchandises par Route, l’Acte Uniforme portant Organisation des Procédures
Collectives et d’Apurement du Passif, l’Acte uniforme sur les Sociétés Coopératives, l’Acte uniforme relatif au
droit de l’arbitrage, l’Acte Uniforme relatif au droit comptable et à l’information financière et l’Acte uniforme
relatif à la médiation. Plusieurs autres sont en chantier.
de faire l’objet de procédures collectives, suite à la révision de l’acte uniforme y relatif 18.
Antérieurement, il s’agissait de procédures ouvertes aux seules personnes physiques
commerçantes or, désormais la seule qualité de professionnel suffit pour s’en prévaloir ou
pour y être assujetti. La tendance « inclusive » du législateur OHADA devrait d’autant plus
être effective en considération des outils de « révélations » des acteurs du secteur informel
parmi lesquels le statut de l’entreprenant19. Il convient toutefois de préciser qu’il ne s’agira
pas de s’appesantir sur le cas des coïndivisaires associés dans une société commerciale. En
présence d’une société à responsabilité illimité et dans l’hypothèse où l’on est en présence de
conjoints, bien que ce type d’association leur soit interdit, on assistera à l’ouverture de
procédure distincte contre chacun d’eux. En présence d’une société à responsabilité limité, la
personnalité de celle-ci masque l’indivision. Ceci étant, on retient que les membres in bonis
d’une indivision peuvent être inclus dans la procédure collective de leur coïndivisaire débiteur
(I). Il leur est cependant reconnu le droit spécial de s’y soustraire mieux, de protéger leur
patrimoine car l’indivision tout comme les procédures collectives ont au moins pour point
commun d’être d’abord le droit des biens avant celui des personnes (II).
La procédure collective peut être étendue à une ou plusieurs personnes par application
de la loi sur le fondement de faits qui justifient une telle mesure 22. Elle peut être étendue à des
personnes autres que le dirigeant fautif ou les coassociés responsables solidairement et
indéfiniment23. En matière d’indivision comme en toute autre, l’extension peut être fondée
soit sur l’implication des coïndivisaires dans la gestion de l’entreprise24 (1) et sur la confusion
des patrimoines (2).
20 Le législateur n’a expressément prévu l’extension des procédures collectives qu’aux dirigeants de la personne
morale. V. art. 189-193 AUPCAP révisé.
22 Lamy droit commercial, (fonds de commerce, baux commerciaux, marques, brevets, dessins et modèles,
redressement et liquidation judiciaires, n°3431, 1995, p.1134 ; GUIRAMAND (F.), HERAUD (A.), op. cit.
p.175.
23 Art. 189-193 ; l’AUPCAP révisé prévoit toute une section pour les dirigeants fautifs. Dans le cadre des
sociétés en participation, faute de personnalité morale, il est ouvert une procédure collective à l’égard de chacun
des associes indéfiniment et solidairement responsables.
25 NGUEBOU TOUKAM (J.), « Les sociétés crées de fait entre époux en droit Camerounais », Rev.
trimestrielle de l’école supérieure des sciences économiques et commerciales, 1989, n°8, p. 66 et s. ;
« L’entreprise familiale étude de droit camerounais », Juridis info, 1995, n°21, p.59 et s. ; « L’entreprise
familiale, étude de droit camerounais (suite et fin) », Juridis info, 1995, n°22, p.91 et s.
d’affaires (a) qui est matérialisée par l’apparence du moment que les tiers avaient de bonnes
raisons de croire aux qualités du gérant d’affaire (b).
La gestion d’affaires est définie comme un acte d’immixtion dans les affaires d’autrui
accompli par une personne en dehors de tout pouvoir légal judiciaire ou conventionnel, dans
l’intérêt ou à l’insu ou au moins sans opposition du maître de l’affaire qui, oblige celui-ci
lorsque l’initiative était utile, à remplir les engagements pris par le gérant et à lui rembourser
ses dépenses26. La gestion d’affaires requiert donc l’accomplissement d’un acte de caractère
utile pour autrui. Dans le cadre d’une indivision successorale, il arrive parfois qu’à la suite du
décès d’un commerçant, les héritiers continuent d’exploiter le fonds en indivision. Cette
initiative est souvent commandée par l’urgence car le décès d’un entrepreneur est souvent
accompagné de la disparition de son entreprise. Dans ce cas de figure, la famille s’expose
dangereusement. Lorsque l’entreprise du de cujus connait des difficultés ou qu’elle
connaissait déjà des difficultés, le tribunal est emmené à connaitre les rôles de chacun. Ils
deviennent alors commerçants de fait et sont tous susceptibles de faire l’objet d’un
redressement judiciaire en cas de cessation des paiements27.
Dans une espèce, une Cour a constaté que deux frères avaient exploité en commun le
fonds de commerce familial et en avaient assumé l’un et l’autre la direction effective en se
substituant à leur mère âgée dans l’exercice d’une profession commerciale. A part ces seuls
motifs qui font apparaitre qu’ils étaient commerçants pour avoir de manière indépendante
effectué des actes de commerce à titre de profession habituelle, la Cour a justifié légalement
sa décision en prononçant leur propre redressement judiciaire à la suite de l’ouverture du
redressement judiciaire de leur mère28. Cette hypothèse renvoie à la gérance de fait 29 à
condition que les actes du gérant soient posés de manière indépendante et effective. Il se
posera encore le problème de la preuve de ces agissements. La pratique est dans ce cas
unanime pour prendre en compte l’apparence.
27 GUYON (Y.), Droit des affaires, t. 2, entreprises en difficulté, redressement judiciaire et faillite, 8e éd, p.
119.
29 V. COZIAN (M.), VIANDER (A.), DEBOISSY (F.L.), Droit des sociétés, 12e éd.,; TRICOT (D.), « Les
critères de la gestion de fait », Dr. et patr., janvier 1996, p.24.
b- La prise en compte de l’apparence pour l’extension de la procédure collective aux
coïndivisaires gérants d’affaires
«L’apparence se définit communément comme ce qui apparait aux yeux et par la suite
l’aspect extérieure et par la suite l’aspect extérieur et visible d’une institution juridique »30,
l’apparence implique la réunion des éléments ou signes extérieurs par lesquels se manifeste un
état au profit du demandeur qui, ignorant la réalité juridique a pu être conduit à commettre
une erreur d’appréciation31. La prise en compte de la théorie de l’apparence pour l’extension
des procédures collectives est importante dans la mesure où, le fait que les tiers étaient dans
l’impossibilité de savoir que la personne qui s’est immiscée dans la gérance de l’exploitation
n’avait pas la qualité, encore moins les compétences requises ne l’exonère pas pour autant.
Comme celle de l’enrichissement sans cause32, la théorie de l’apparence est une création
jurisprudentielle, destinée à tempérer la rigueur aveugle des principes. Le rôle de la théorie de
l’apparence est de transformer en droit véritable ce qui n’était qu’une apparence trompeuse,
pourvu que cette apparence ait revêtu une force suffisante pour égarer les tiers. Ce tiers sera
donc regardé comme ayant bien acquis la chose ou le droit en cause, et cette acquisition sera
opposable au véritable titulaire. Dès lors si l’on est dans le cadre d’une exploitation
commerciale, celui qui a fait croire en une apparence trompeuse ne pourra pas se prévaloir de
la qualité de commerçant mais il pèsera sur lui la responsabilité liée à ce statut. Par ailleurs, le
cas du conjoint qui collabore avec l’autre dans une exploitation familiale est très édifiant. Le
statut de conjoint collaborateur s'adresse au conjoint du chef d’entreprise, non associé,
exerçant une activité professionnelle régulière dans l'entreprise commerciale, artisanale ou
libérale, sans percevoir de rémunération. Ce statut a une importance capitale car les actes
effectués par l’époux dans le cadre de l’entreprise sont passés pour le compte du chef
d’entreprise. Il est ainsi réputé avoir reçu mandat de ce dernier. Ce mandat ne le protège
cependant pas lorsque par sa faute il a fait subir un dommage à l’entreprise 33. Concrètement,
l’immixtion de l’épouse même séparée de biens dans la gestion de l’entreprise de son conjoint
30 VACRATE (S.), La société créée de fait, essai de thésaurisation, LGDJ, 2003, p. 5, no 713, cité par
VIERLING KOVAR (E.), Le contrat de la société en participation, Thèse de doctorat, Université de Strasbourg,
2013, p. 292.
La confusion des patrimoines38 est une notion bien connue du droit des procédures
collectives. Initialement forgée par la jurisprudence française, elle a été reprise par le
législateur OHADA39. Cette création prétorienne est une notion incontournable du droit des
33 Il sera soumis au régime applicable au dirigeant fautif. L’acte uniforme utilise le terme générique dirigeant
sans préciser s’il s’agit du dirigeant de fait ou du dirigeant de droit. Par analogie, il en ressort que le conjoint
collaborateur rentre valablement dans ce cadre. Il peut par ailleurs faire l’objet d’une action individuelle et d’une
action sociale.
34 MAUBRU (B.), « Les sociétés crées de fait entre époux », Mélanges DERRUPPE, LITEC, 1991, p. 275.
35 BUSSSIERE (V.), Dirigeant, comment se prémunir contre une mise en cause de votre responsabilité ? Evitez
les fautes de gestion, Fiche conseil, www.trigone.fr, p. 1, consulté le 17 avril 2019.
37 Il existe une panoplie de mesures de prévention des difficultés de l’entreprise notamment les mesures
bancaires, sociales et même structurelles.
38 V. TOE (S.), « Aperçu pratique des finalités de la procédure collective dans l’espace OHADA », Rev dr. unif,
juin 2010, p. 45 ; REILLE (F.), La notion de confusion des patrimoines cause d’extension des procédures
collectives, 1ère éd., 2015, p. 1. ; JADAUD (B.), Droit commercial, Montchrestien, 3e éd., 1997, p. 67 et s.
39 Art. 189 à 195 AUPCAP révisé. Le législateur OHADA ne consacre l’extension de la procédure collective
que pour le dirigeant des personnes morales. L’inclusion des autres est l’œuvre de la jurisprudence française.
procédures collectives dont il convient de cerner les contours (a) pour mieux l’appréhender
comme cause d’extension de la procédure collective (b).
La confusion des patrimoines est une « mesure sanction » du droit des procédures
collectives qui permettait à l’origine d’étendre la procédure au dirigeant fautif. En présence de
l’indivision, cette situation peut ne pas se limiter à sa seule personne mais aussi aux tiers :
conjoint marié sous un régime séparatiste, concubin, héritier, légataire sans que la liste puisse
être exhaustive. Il peut être ouvert une procédure collective contre le conjoint in bonis lorsque
la confusion des patrimoines est avérée. Cette extension permet l’ouverture d’une procédure
unique contre les époux. L’extension de la procédure peut résulter de l’initiative personnelle
du juge commissaire, ou à la demande des créanciers et ce, sous la condition de prouver
41 Ibidem.
l’existence d’une imbrication des patrimoines et de flux financiers anormaux 42. L’époux in
bonis peut être tenté de demander l’extension de la procédure afin de bénéficier de l’effet de
purge mais aussi et surtout dans le but d’être à l’abri des poursuites de ses créanciers. L’époux
in bonis n’est cependant pas maître de l’extension de la procédure : s’il la demande, il est rare
que les juges l’acceptent. S’il ne la demande pas, elle peut lui être imposée à la demande d’un
tiers ou d’un créancier43. De manière générale, lorsque deux personnes physiques exploitent
en commun une même entreprise commerciale, et accomplissent toutes deux de manière
indépendante des actes professionnels habituels dans cette exploitation commune, une
procédure collective peut être ouverte contre l’un ou l’autre, si elles sont l’une et l’autre en
état de cessation des paiements et sans que le tribunal ait à rechercher entre elles une société
créée de fait. Les deux procédures sont distinctes, mais les tribunaux organisent parfois une
procédure commune en relevant la confusion des patrimoines sans avoir à rechercher si les
deux époux par exemple se trouvent en cessation des paiements44.
Sous un tout autre aspect, les personnes physiques ou morales ayant entretenu des
relations financières anormales avec une société dans laquelle ils avaient ou non des intérêts
pourront voir rechercher leur propre solvabilité pour compenser les pertes subies par la
première société, notamment lorsque celle qui est placée en liquidation a consenti
d’importants sacrifices ou qu’elle a réalisé d’importantes concessions, anormales au regard de
l’opération en cause. Ces procédures doivent néanmoins être étendues selon des modalités
particulières.
Le droit des procédures collectives est un droit qui normalement organise les relations
entre débiteur et créanciers principalement. Comme évoquées supra, les coïndivisaires qui se
seraient mêlés de trop près du fonctionnement de la société ou contre qui aurait été établis des
faits de confusion de patrimoines pourront voir leur sort scellé avec celui du débiteur. Les
modalités d’extension des procédures collectives telles que prévues par le législateur ne
42 LUCAS (F.-X.), « La protection du conjoint d’un débiteur en difficulté », Petites Aff., 12 juillet 2002, n°139,
p. 4 ; « L’attraction du conjoint in bonis dans la procédure collective », Petites Aff., 24 avril 2003, n°82.
43 L'extension de procédure à la demande du débiteur a été instaurée en France par l'ordonnance du 12 mars
2014. V. FIRLEY (L.), « L'extension de procédure à la demande du débiteur instaurée par l'ordonnance du
12 mars 2014 : une réforme à la portée limitée », Revue des procédures collectives - Mai 2014 - n° 3.
44 Cass. Com., 26 mars 1985, Bull. civ., IV, n°108; 16 juin 1986, Bull. Civ., IV, n°147.
concerne que le dirigeant fautif. Ce manquement ne suffit pas à stopper le droit des
procédures collectives dans l’accomplissement de l’un de ses objectifs majeurs qui consiste en
le désintéressement des créanciers. C’est la raison pour laquelle il est coutume de se référer au
régime juridique applicable aux sociétés en nom collectif (1) même si lorsqu’il s’agit des
sanctions proprement dites, celles applicables sont celles prévues pour le dirigeant (2).
La société en nom collectif est une des sociétés de personnes contenue dans la
nomenclature des formes de sociétés de l’acte uniforme OHADA sur le droit des sociétés
commerciales et des groupements d’intérêt économique. Peu ou pas employée par les
opérateurs économiques, la société en nom collectif et surtout son régime juridique est
souvent appelé au secours pour pallier aux manquements du législateur. Son utilisation la
plus commune concerne la règlementation des sociétés dépourvues de personnalité morale 45.
Il serait judicieux de cerner ses principes de fonctionnement (a) avant de voir dans quelle
mesure ils règlent l’ouverture de la procédure collective contre les coïndivisaires in bonis (b).
La société en nom collectif est celle qui unit deux ou plusieurs personnes ayant ou
prenant la qualité de commerçant en vue d’une exploitation commerciale. Chacun des
associés est tenu personnellement et tous sont solidaires entre eux. Ce sont des commerçants
associés qui selon POTHIER et SAVARY font le commerce sous leur nom collectif 46. La
société en nom collectif est une personne morale avec un patrimoine séparé de celui de ses
associés. Elle fait le commerce et peut faire l’objet d’une procédure collective comme toutes
les autres sociétés47. Dans ce cas, les créanciers sociaux sont payés sur les biens faisant partie
du patrimoine social par préférence aux créanciers personnels des coassociés. Mais la
personnalité morale n’est pas complètement dégagée de la personnalité de chacun des
coassociés. La responsabilité indéfinie et solidaire qui pèse sur eux emmène à deux
Lorsque la société cesse ses paiements, tous les associés en nom sont déclarés
personnellement en redressement ou en liquidation des biens en même temps qu’elle. Le
régime juridique de la société en nom collectif est un régime inclusif. Il permet de mêler
facilement les coassociés au processus de restructuration ou de liquidation de ladite société,
encore qu’il puisse être voté un concordat de redressement pour la société mais un ou
plusieurs associés peuvent être mis en liquidation. Leurs sorts sont liés à l’origine mais l’issue
réservée à chacun d’eux est indépendante. La responsabilité solidaire qui prévaut ici suppose
que les créanciers peuvent poursuivre un des associés pour la totalité de sa créance. C’est
l’obligation aux dettes qui doit être distinguée de la contribution aux pertes 48. Lorsqu’un
indivisaire se serait donc immiscé dans le fonctionnement de l’entreprise indivise ou en
dehors du cadre lui étant réservé, il sera embarqué dans les difficultés de l’entreprise comme
un associé commun en nom et supportera personnellement la procédure.
En pratique, l’héritier qui n’aura pas attendu le prononcé du jugement déclaratif de la
succession pourra être assimilé à un coassocié en nom du de cujus. Il faut néanmoins préciser
que l’extension ne sera décidée que par la juridiction compétente à la demande du
représentant des créanciers ou d’un créancier à charge pour celle-ci d’apprécier les faits qui
lui seront présentés. Lorsque l’extension de la procédure est ordonnée par la juridiction
47 Toutes les structures sous forme sociétaire peuvent faire l’objet d’une procédure collective. Le débat se posait
au niveau des entreprises publiques. Il est admis qu’elles peuvent faire l’objet de la procédure sauf à préciser que
des règlementations spéciales sont applicables aux sociétés au statut particulier. Au Cameroun par exemple, il
s’agit pour les établissements de crédit du Règlement N°02/14/CEMAC/UMAC/COBC/CM du 24/04/2014
relatif au traitement des établissements de crédit en difficulté, et de l’ordonnance n°96/02 du 24 juin 1996
relative à la restructuration des établissements de crédit ; pour les entreprises publiques de la loi n°99/016 du 22
décembre 1999 portant statut général des établissements publics administratifs et des entreprises du secteur
public et parapublic, modifiée par la loi n°2017/010 du 12 juillet 2017 portant statut général des établissements
publics et la loi n°2017/011 du 12 juillet 2017 portant statut général des entreprises publiques.
48V. CHARTIER, « L’évolution de l’engagement des associés », Rev. soc., 1980, p. 1; GIBRILA,
« L’obligation aux dettes sociales dans les sociétés civiles », Defrenois, 1998, p. 625.
compétente, le coïndivisaire concerné peut également être soumis au régime de sanction prévu
pour le dirigeant fautif.
49 BUSSSIERE (V.), Dirigeant, comment se prémunir contre une mise en cause de votre responsabilité ? Evitez
les fautes de gestion, Fiche conseil, www.trigone.fr, p. 1, consulté le 08 avril 2020.
Il a été vu que la responsabilité civile du dirigeant pouvait être mise en œuvre sans
préjudice de sa responsabilité pénale. L’un ou l’autre de ces régimes de responsabilité n’est
pas exclusif de l’autre. Le fondement de cette responsabilité est également la commission
d’une faute qui renvoie aux comportements préjudiciables qui sont de manière spécifique les
actes d’omission ou de commission 55. En matière d’indivision successorale, l’un des
copartageants prend souvent la tête de l’entreprise avant même le décès du débiteur principal
exploitant d’une entreprise individuelle. Conformément à l’article 189 de l’acte uniforme
suscité, « En cas de redressement judiciaire ou de liquidation des biens d’une personne
morale, peut être déclaré personnellement en redressement judiciaire ou en liquidation des
biens, tout dirigeant ». Le législateur communautaire a le mérite d’avoir élargi le champ
relatif au dirigeant social en cause. Le choix de la formule « tout dirigeant » est sécurisant
pour les créanciers qui voient leurs chances de désintéressement être accrues. Quand bien
même la procédure aura été clôturée pour insuffisance d’actifs comme c’est souvent le cas,
une autre option s’offre à eux à travers la personne des dirigeants réguliers et occasionnels.
Ces derniers pourront augmenter la bourse des créanciers à travers les sanctions pécuniaires,
notamment les amendes qui font partie de l’arsenal répressif du droit pénal. Au-delà de cette
perspicacité, il demeure un manquement qui a de tout temps été reproché à l’OHADA : le fait
de laisser la latitude d’élaborer le régime de sanctions aux législateurs internes, d’où la
survenance de paradis pénaux56. Le Cameroun pour sa part a adopté la loi n° 2003-008 du 10
juillet 2003 portant répression des infractions contenues dans certains actes uniformes
OHADA. Aux termes des articles 28, 29 et 30 de cette loi, il est prévu en plus des affres de
l’ouverture d’une procédure collective personnalisée contre le dirigeant fautif, des peines
d’emprisonnement pouvant aller de 1 à 5 ans et des amendes pouvant atteindre 20 000 000 de
FCFA57. Eu égard de ce qui précède l’on pourrait penser que le droit des procédures
55 NGOUE (W. J.), « La mise en œuvre de la responsabilité des dirigeants des sociétés anonymes en droit
OHADA », www.ohada.com, Ohadata D-05-52, p. 4.
56Sur la question v. ANOUKAHA (F.) et autres, OHADA sociétés commerciales et GIE, Bruylant, Bruxelles,
2002, p. 237 ; TCHANTCHOU (H.), La supranationalité judiciaire dans le cadre de l’ OHADA : étude à la
lumière du système des communautés européennes, Thèse pour le doctorat, avril 2008, Université de Poitiers,
Faculté de droit et des Sciences Sociales, p. 212 ; FOKO (A.), « Analyse critique de quelques aspects du droit
pénal OHADA », Penant n°859 p.193 et s.; YAWAGA (S.), « Politique criminelle de l’OHADA », in
Encyclopédie du droit OHADA, (Dir) POUGOUE (P.-G), Lamy, 2011, pp. 1382-1401.
57 Art. 7-9 de la loi camerounaise n°2003-008 du 10 juillet 2003 portant répression des infractions prévues dans
certains actes uniformes OHADA.
collectives est un droit complètement dérogatoire au droit de l’indivision mais il n’en est rien.
Il existe des hypothèses où le droit des procédures collectives se plie à celui de l’indivision
qui s’impose à lui. Ainsi, les coïndivisaires disposent d’une marge de manœuvre pour se
soustraire de la procédure collective du débiteur.
58 Actualité des procédures collectives, « Exercice des droits des indivisaires en cas de procédure collective de
l’un d’eux », Actualités des procédures collectives civiles et commerciales, n°16, 19 octobre 2012.
62 Art. 10 du traité OHADA modifié par le traité de Québec du 17 octobre 2008, « Les actes uniformes sont
directement applicables et obligatoires dans les Etats parties ».
63V. HOUIN (S.-A.), « préface » in, MONSERIE (M.-H.), Les contrats dans le redressement judiciaire et la
liquidation des entreprises, Litec, Paris, 1994, 700 p.
64 POUGOUE (P.-G.), KALIEU (Y. R.), L’organisation des procédures d’apurement du passif OHADA, PUA,
1999, p. 36.
que ce semi-repos connaisse des perturbations. C’est ainsi que l’existence d’une situation
d’indivision peut déteindre sur les principaux effets des procédures collectives que sont la
suspension des poursuites individuelles et le dessaisissement imposé au débiteur par la
liquidation des biens. Dans cet ordre d’idées il est possible que l’indivision dont est membre
le débiteur puisse être partagée (A) et qu’une partie du patrimoine soumis à la procédure
collective soit revendiquée (B).
La décision qui prononce l'ouverture d'une procédure collective quelle qu'elle soit,
emporte de nombreux effets. Vis-à-vis des créanciers notamment, elle instaure une discipline
collective65 en constituant les créanciers en une masse66 représentée par le syndic qui, seul agit
en son nom et dans l'intérêt collectif, arrête le cours des inscriptions de toutes sûretés
mobilières ou immobilières, mais surtout, et cette solution est la même qu'il s'agisse du
règlement préventif, du redressement judiciaire ou de la liquidation des biens, elle arrête ou
interdit toutes les poursuites individuelles 67. La volonté du législateur est de laisser à
l’entreprise le répit nécessaire à l’établissement d’un bilan et à l’élaboration d’un concordat de
redressement68. La suspension automatique69 des poursuites individuelles donne tout son sens
au droit des procédures collectives. C'est en ce sens que sont interdites toutes les actions en
65 Art. 73, 75,77 et 78 AUPCAP révisé; V. Echange franco-russe ‘‘la discipline collective en droit des
entreprises en difficultés’’, organisé par le centre des études en droit des procédures CERDP, organisé à la
faculté de droit et de science politique de Nice le vendredi, 23 mai 2014.
66 La masse est composée des créanciers de la procédure collective. Il convient cependant de distinguer les
créanciers dans la masse dont la créance est née avant l’ouverture de la procédure collective créanciers de la
masse, dont la créance est née après l’ouverture de la procédure. Ces derniers ne sont pas assujettis à la
suspension des poursuites individuelles.
67 V. Art. 9 et 75 al. 1 et 75-1 de l'AUPCAP révisé; TGI du Wouri, jugement civil n°159 du 1 er décembre 2005,
Aff : la société anonyme les transports BLAT et Cie : note KALIEU ELONGO (Y. R.), Ohadata J-12-59. ; TGI
du Wouri, jugement civil n° 030 du 06 octobre 2005, Aff : la société automobile Camerounaise (SACAM
SARL), obs. KALIEU ELONGO (Y. R.), Ohadata J-12-58. ; Cour d’appel d’Abidjan, 5ème chambre civile et
commerciale B, Arrêt n°255 du 26 mai 2011 : Aff: SGBCI c/ rue des pêcheurs. JurisOhada, n°4, octobre-
décembre 2011, p. 50, Ohadata J-13-18. ; Tribunal de commerce de Pointe-Noire Ordonnance de référé n° 432
du 12 octobre 2010, Aff : Dame Philomène MPIKA, Ohadata J-13-98.
68 RIPERT (G.) et ROBLOT (R.) par DELEBECQUE (Ph.), GERMAIN (M.), Traité de droit commercial, t. 2,
LGDJ, 17e éd., p. 954.
69 KANTE (A.), « Réflexion sur le principe de l'égalité entre les créanciers dans le droit des procédures
collectives d'apurement du passif OHADA », E.D.J.A, n° 56, www.ohada.com/ohadata D-06-47.
justice exercées par les créanciers tendant à la reconnaissance des droits et des créances à
l'issue de la décision d'ouverture des procédures collectives 70. En présence de l’indivision, la
donne peut être faussée en raison des droits des acteurs principaux de l’indivision que sont les
coïndivisaires in bonis. Il s’agit principalement du droit de demander le partage (1) qui
lorsqu’il est mis en œuvre suit un canevas bien défini (2).
70 Dans le règlement préventif, il s'agit des créances désignées par le débiteur dans la requête au moment de
l'introduction de l'instance. Art. 9 de l'AU PCAP. Tandis que dans le redressement et la liquidation, il s’agit des
créances nées avant le jugement d’ouverture.
71 V. Art. 17 DUDH.
72 PLANTIN (G.), THESMAR (D.), TIROLE (J.), « Les enjeux économiques du droit de la faillite, les notes du
conseil économique », n°7, juin 2013, p. 12. ; En France, cette évolution se manifeste à travers la régularité des
modifications que connait le droit des procédures collectives depuis les années 1980 ; On parle d’ailleurs
aujourd’hui de loi de sauvegarde avec la loi n°2005- du 25 juillet 2005 ;
73 SAWADOGO (F.M.), OHADA Droit des entreprises en difficulté, collection droit uniforme africain,
Bruylant, Bruxelles, 2002, p. 4.
74 Sur la question v. AZIBER (S. A.), « L’attractivité contractuelle du droit des procédures collectives de
l’espace OHADA », Droit et expertise, octobre 2012, pp. 8-9 ; KANE EBANGA (P.), « La nature juridique du
concordat du redressement judiciaire dans le droit des affaires de l’OHADA », Juridis, n° 50, 2002, p. 109 et s. ;
LEVRATTO (N.), « Quels indicateurs d’efficacité économique du droit des faillites ? Du classement de Doing
Business à une analyse des procédures effectives », Economix, 2009, p. 1 et s.; SOINNE (B.), Traité des
procédures collectives, LITEC, 2e éd, 1995, n°26.
76 HENRY (L.-C.), « Primauté de l’indivision après dissolution du mariage sur la procédure collective »,
www.infogreffe.fr, extrait n°84 mars 2015.
79Art. 815 al. 2 CC « La convention qui suspend le partage ne peut être obligatoire au-delà de 05 ans mais elle
peut être renouvelée » ; quant au sursis judiciaire, la décision peut être motivée par le souci de préserver la
valeur du bien ou lorsque en matière successorale, l’un des héritiers est mineur.
80 SAWADOGO (F.M.), « Le règlement préventif est une mesure de prévention des difficultés de l’entreprise
qui nécessite l’intervention du juge. », op. cit. p. 56 et s.
cependant pas de patrimoine propre. L’entreprise individuelle n’a pas de personnalité
juridique elle se confond avec la personne de l’entrepreneur. Cette structure est la plus
fréquente dans l’espace OHADA. L’entrepreneur personne physique, répond seul des
obligations nées de l’exercice de l’activité de l’entreprise 82. Ainsi, le débiteur peut entrainer
dans ses malheurs tous les autres coïndivisaires en portant atteinte à leur faculté d’abusus 83
reconnue à tout propriétaire lorsque le bien était utilisé dans le cadre de son activité. La
situation peut se produire dans le cadre de toutes les institutions sources d’indivision
notamment les régimes matrimoniaux, les successions et l’achat de biens en copropriété.
Dans le cadre des régimes matrimoniaux, le conjoint peut faire entrer le bien indivis
dans les procédures aussi bien pendant l’existence de la communauté qu’à sa dissolution.
Pendant l’existence du lien matrimonial, l’acquisition de biens indivis par des conjoints est
valable lorsque ceux-ci se sont mariés sous le régime de la séparation des biens. A la vérité, la
question ne concerne guère les époux communs en biens car les acquêts ont vocation en pareil
cas à tomber dans la masse commune ce qui désamorce l’intérêt d’une qualification indivise 84.
La doctrine a décrit la patiente articulation des règles matrimoniales et des règles de
l’indivision85. Dès lors, la communauté chasse l’indivision au nom du bon sens, c'est-à-dire
par crainte du double emploi et par esprit de simplicité 86. Ces précisions ainsi relevées, les
biens acquis en indivision par un couple marié sous le régime de la séparation des biens
peuvent constituer le gage des créanciers des conjoints et par ricochet celui des créanciers de
la procédure collective de l’un d’eux, en raison de la présomption mucienne 87 devenue action
en réintégration puis action en rapport88.
81 Il s’agit d’une reprise de l’art 2092 du Code civil aux termes duquel « les biens du débiteur constituent le
gage commun de ses créanciers ».
82NEMEDEU (R.), « Société unipersonnelle du droit OHADA »,in Encyclopédie du droit OHADA, (Dir)
POUGOUE (P.-G), éd. Lamy 2011, p. 2050. ; NYAMA (J. M.), Droit bancaire en zone CEMAC, 2e éd.,
PUCAC, Yaoundé Cameroun, février 2015, p. 197.
84 BOLZE (V.A.), « Les rapports patrimoniaux des couples en dehors de la communauté légale », Dr. Fam,
chron. 5, n°13 ; art. 1408 CC.
85 V. CATALA (P.), « L’indivision entre époux », in Mélanges HEBRAUD (P.), Toulouse, Université des
sciences sociales, 1981, p. 185 et s.; SIMLER (Ph.), « L’indivision entre époux séparés de biens, une quasi
-communauté ? », in Mélanges COLOMER (A.), Litec, 1993, p. 461 et s.
86 VAREILLE (B.), « Le couple et l’indivision », Actes du colloque organisé le 21 juin 2002 à l’Université
Montesquieu Bordeaux IV par l’association Henri Capitant des amis de la culture juridique française, Dalloz,
2005, p. 5.
Le conjoint qui se sent menacé peut toujours demander à faire individualiser 89 sa part
devant la juridiction compétente90 en apportant la preuve de sa propriété 91. Le plus souvent,
les époux seront tentés de demander le divorce avec liquidation de la communauté des
meubles et des acquêts sauf à préciser que ces initiatives seront vaines si le conjoint in bonis a
eu la mauvaise idée de se porter caution pour le débiteur comme c’est souvent le cas92. La
demande de divorce peut toujours être introduite aussi bien par le débiteur que son conjoint
sauf que le jugement définitif n’est pas opposable au syndic si la procédure collective a eu
lieu avant le prononcé du jugement 93. Par ailleurs la liquidation de la communauté survenue
avant l’ouverture de la procédure est opposable aux tiers mais peut être contestée si des actes
ont été passés pendant la période suspecte.
87 La présomption mucienne a pendant longtemps caractérisée le sort de la femme dans les procédures
collectives. Quel que soit le régime matrimonial, il était admis que les biens acquis par la femme du failli
appartiennent au mari, ont été payés de ses deniers et doivent être réunis à la masse de son actif. L’une des
reformes importantes de la loi de 1967 sur la faillite en France largement reprise en droit OHADA a été de
supprimer la présomption mucienne. Si le représentant des créanciers veut faire entrer les biens acquis par le
conjoint du débiteur dans l’actif soumis à la procédure collective, il lui appartient de prouver que ces biens ont
été achetés avec des valeurs fournies par le débiteur. La preuve de l’origine de ces biens peut être établie par tous
moyens. Elle est suffisamment établie dès lors qu’il est démontré que le conjoint n’avait à l’époque de
l’acquisition ni fortune, ni activités personnelles lui permettant de payer le prix. ; V. SIMLER, « Le conflit des
présomptions en régime de communauté », R.T.D civ, 1970, 478 cité par DELEBECQUE (Ph.) et GERMAIN
(M.), op. cit., p. 1125; SAWADOGO (F. M.), « Les effets de l’ouverture d’une procédure collective à l’égard des
créanciers », in Encyclopédie du droit OHADA, 2011, p. 741. ; OBELLIANNE (S.), « La discrète résurrection
de la présomption mucienne au sujet de l'arrêt de la Cour de Cassation du 16 janvier 2007 », Revue des
procédures collectives - Janvier 2008 - n° 1.
88 DELMOTE (P.), « L'action en rapport contre le conjoint ne concerne pas les biens propres », Recueil Dalloz
2003, p. 2167.
90 Lorsque le conjoint débiteur a été placé en procédure collective, le juge compétent pour toute demande
incidente est celui qui est en charge de la procédure, a l’exception des questions qui relèvent de la compétence
des juridictions administratives, pénales et sociales. V. art. 3 AUPCAP révisé.
91 V. TIGER (Ph.), « Droit de la preuve dans l’espace OHADA : introduction générale », Rev.de dr. Unif., n°1,
p.10.
92 Au regard des dispositions de l’ancien article 5 de l’acte Uniforme, il était dit que seul le débiteur principal
pouvait solliciter de la juridiction compétente, l’ouverture à son profit d’un règlement préventif. Il en découlait
que la suspension des poursuites ordonnée, ne bénéficiait qu’au débiteur principal, la caution ne pouvant
nullement s’en prévaloir. Par conséquent, rien n’empêchait que la caution soit immédiatement poursuivie pour
l’ensemble de la créance, nonobstant la suspension des poursuites individuelles. Il en allait de même lorsqu’il
s’agissait d’un redressement ou d’une liquidation des biens; v. AGBENOTO MAWUNYO (K.), Le
cautionnement à l’épreuve de la procédure collective, Thèse de Doctorat, Université de Lomé, 2008, p. 16 ;
DECKON KUASSI (F.), « le conjoint du débiteur soumis à la procédure collective en droit uniforme de
l’OHADA », (première partie), Petites Aff, 14 janv. 2008, p. 6 et s. Désormais, la caution au même titre que le
débiteur bénéficie de la suspension des poursuites individuelles. V. Art. 9-5 AUPCAP révisé.
93 HENRY (L.-C.), Primauté de l'indivision, Bulletin d'Actualité des Greffiers, extrait du N°84, mars 2015.
Dans le cadre des successions, lorsque le partage effectué n’était qu’un partage
provisionnel et que le coïndivisaire a utilisé une portion des biens pour son exploitation
personnelle et s’est retrouvé en difficulté, il peut être procédé à un partage définitif de sorte
que la procédure n’affecte que sa part du bien indivis. Il peut également arriver que le débiteur
ait donné le bien en hypothèque, celle-ci reste valable pour le montant de sa part. Les autres
pourront introduire une action en revendication adressée au juge commissaire de manière à
extraire le bien de la procédure. Le partage de l’indivision peut toujours être mis en œuvre et
la multiplicité des situations est entérinée par la complexité et la subtilité des solutions y
applicables. Cette complexité est encore plus accentuée lorsque des biens indivis sont soumis
à une procédure collective.
Les biens indivis peuvent être soumis à la procédure collective dans le cadre d’une
entreprise indivise. On parle d’entreprise indivise lorsque des biens indivis sont affectés à
l’exercice d’une activité économique. Autrement dit, c’est l’usage particulier assigné aux
biens qui sont indivis entre les indivisaires qui détermine l’existence d’une entreprise
indivise94. Une nouvelle forme de société semble surgir ce que la jurisprudence française a
appelé « société d’indivision ». Cette jurisprudence avait déjà anticipé sur les constructions
législatives en rapprochant la société de l’indivision et en reconnaissant l’existence de
sociétés d’indivision qui ont été consacrées en France par la loi du 04 février 1976 reformant
les dispositions du Code civil sur la société 95. De manière spécifique, il s’agit d’une indivision
conventionnelle où les indivisaires décident de mettre leurs biens en indivision dans le cadre
d’une entreprise commune car il faut une pluralité de personnes. Le choix sera souvent de
créer une société en participation avec la constitution de parts en indivision 96. L’on pourrait
également faire le parallèle avec certaines parts sociales qui peuvent être mises en indivision
dans le cadre des sociétés commerciales97 mais, ces parts ne confèrent pas le caractère indivis
à ladite entreprise car la société est dotée de la personnalité morale ce qui n’est pas le cas de
94 WICKER (G.), « L’entreprise indivise et les procédures collectives », Actes du colloque organisé le 21 juin
2002 à l’Université Montesquieu bordeaux IV par l’association Henri Capitant des amis de la culture juridique
française, Dalloz, 2005, p. 31.
95RIPERT (G.) et ROBLOT (R.) par GERMAIN (M.), Traité de droit commercial les sociétés commerciales, t.
1, vol 2, 18e éd., LGDJ, 2002, p. 9.
97Ibidem.
l’indivision98. L’entité sociétale ici masque l’indivision. Il faut donc exclure de la notion
l’entreprise exploitée sur la forme d’une société, personne morale dont les titres sociaux sont
en indivision99. En réalité, on observe une multiplicité d’hypothèses pouvant donner lieu à une
entreprise indivise.
Elle peut trouver sa source dans la succession lorsque le de cujus entrepreneur
individuel, est décédé en état de cessation de paiements et que les héritiers ont continué
d’exploiter le fonds en indivision100. Très souvent même si le de cujus a laissé une entreprise
in bonis, l’inaptitude et la mésentente entre les héritiers peut entrainer des difficultés encore
que ces dernières constituent une cause de dissolution de la société101. Nombreuses sont
également les entreprises indivises entre les époux séparés de biens mais, aussi entre les
concubins, l’extension du lien conjugal se reflétant aussi dans la vie des affaires. Il n’est
cependant pas envisageable de demander le partage d’une entreprise indivise en difficulté
dans la mesure où l’ouverture de la procédure vaut hypothèque des biens affectés à l’activité
de l’entreprise. Ils sont frappés d’indisponibilité. Cette indisponibilité est transposée aux biens
personnels des membres de l’entreprise indivise en raison de l’absence de personnalité morale
de celle-ci.
En présence des autres situations, les indivisaires in bonis pourront toujours
demander leur part qui ne sera pas aisée à obtenir mais ils pourront user de « moyens
astucieux ». Les indivisaires pourront s’entendre de manière à faire peser la procédure sur l’un
d’eux ou sur certains d’entre eux. Cette stratégie sera aisée à mettre en place lorsque
l’entreprise est occulte. Si elle est ostensible, les choses seront moins évidentes. Dès lors la
procédure sera ouverte contre chacun sous condition de leur responsabilité indéfinie et
solidaire lorsque l’entreprise exerce une activité commerciale et conjointe lorsque l’activité
exercée est civile.
Il faut par ailleurs noter que plusieurs indivisions peuvent se superposer. Derrière
l’entreprise indivise peut se cacher l’indivision post communautaire des participants qui
pourra toujours prendre fin en dépit de la procédure ouverte contre eux. La solution retenue
dans ces cas ne permet cependant pas de redresser l’entreprise dans la mesure où la procédure
99 LUCET (F.), « L’entreprise indivise à la merci des créanciers personnels de chaque indivisaire », in Mélanges
DERRUPE (J.), éd. GLN-JOLY, 1991, p. 315 et s., n°2, cité par WICKER (G.), op. cit., p. 32.
101 L’acte uniforme OHADA consacre la mésintelligence entre associés comme une cause de dissolution de la
société. Cette disposition s’applique aux héritiers d’un entrepreneur individuel. V. art 200 al. 5 AUDSCGIE.
est lourde mais aussi elle ne garantit pas la solvabilité des coïndivisaires. Sous un tout autre
plan, si la procédure de règlement préventif est plus tard convertie en redressement judiciaire
ou en liquidation des biens, les actes ainsi passés peuvent tomber sous le coup des
inopposabilités de la période suspecte. Du jour de la cessation des paiements 102 effective, à
celui du jugement d’ouverture, les actes accomplis par le débiteur sont suspects de fraude
avec le créancier concerné. C’est pourquoi le Code de commerce de 1807, de façon radicale,
déclarait tous les actes accomplis pendant cette période nuls sans distinction. Or, l’acte
uniforme ne parle pas de nullités mais d’inopposabilités et, elle a une approche duale en
distinguant les inopposabilités de droit des inopposabilités de fait 103. La période suspecte
s’étend du jour de la cessation des paiements ou dans certains cas des six mois qui l’ont
précédé au jour de la décision d’ouverture de la procédure 104. Une autre astuce avec le
concours du juge commissaire et du syndic serait de procéder à une cession d’actifs car ce
dernier peut sous autorisation compromettre et transiger sur toutes les contestations qui
intéressent la masse même sur celles qui sont relatives à des droits ou actions immobiliers 105.
Cette possibilité pose encore le problème de la responsabilité du syndic avec acuité mais, il
est de bon ton de reconnaitre qu’il dispose d’une certaine marge de manœuvre non seulement
dans le cadre de ses missions mais également en dehors. Le droit de préemption 106 qui est la
faculté conférée par la loi ou par la convention à une personne d’acquérir de préférence à tout
autre un bien que son propriétaire se propose de céder en, se portant acquéreur de ce bien dans
102 Le législateur OHADA en son article 25 de l’AUPCAP révisé dispose que « le débiteur qui est dans
l’impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible, à l’exclusion des situations où des
réserves de crédit ou les délais de paiement dont le débiteur bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent
de faire face à son passif exigible » est en état de cessation des paiements. Sur la question v. MEUKE (Y. B.),
« Quelques précisions sur la notion de cessation des paiements en OHADA, Ohadata D-08-13, 2009 ; DIALLO
(B.), La cessation des paiements du débiteur en OHADA, Note sous cour d’appel de Ouagadougou, Arrêt n° 52
du 16 avril 2004, chambre civile et commerciale, Ohadata D-10-64 ; c’est donc une notion de droit et il revient à
la juridiction compétente d’exercer un contrôle sur le fait de savoir si les faits souverainement constatés par le
juge du fond sont révélateurs de la cessation des paiements. Voir également jugement n° 32/Civ/TGI du Nyong
et Kelle à Eseka, du 21 nov. 2011, Aff : Caisse de crédit et d’épargne pour le développement CADED C/Etat du
Cameroun ; CCJA arrêt n° 022/2011 du 19 janvier 2007 : Aff : compagnie cotonnière ivoirienne C/TIEMOKO
KOFFI et GUILLEMAIN (A.)/. Cour d’Appel du littoral, Arrêt n° 040 du 16 mars 2012, Aff : Ets BUT
C/MOULINS D’AFRIQUE ; Dans cette dernière espèce, la cour déclare que « toute entreprise dont l’actif est
insuffisant pour faire face à son passif est en état de cessation des paiements et doit proposer un concordat de
redressement… », Ohadata J-13-150, cité par NLEP BILLONG (Y.), Les difficultés des entreprises en droit
OHADA, Mémoire de DEA, Université de Douala, 2014, p. 1.
104 Art. 67 AUPCAP révisé; SAWADOGO (F.M.), OHADA Droit des entreprises en difficultés, coll. Bruylant
Bruxelles, 2002, pp. 221-223.
L’indivision est une institution du Code civil qui fonctionne de manière quasi
autonome. Elle a son propre régime juridique qui détermine les droits de tous ses acteurs
pendant son fonctionnement mais elle organise aussi la fin de l’indivision. La survenance ou
la rencontre avec une procédure collective est sans influence sur les voies normales de partage
de l’indivision que sont le partage amiable (a) et le partage judiciaire (b).
107 L’article 1387-1 du Code civil applicable en France, introduit par une loi du 5 août 2005, révèle que le
législateur a souhaité venir en aide non pas à l’époux professionnel en difficulté qui divorce mais à son conjoint.
Ce texte prévoit ainsi que lorsque le divorce est prononcé, « si des dettes ou suretés ont été consenties par les
époux, solidairement ou séparément, dans le cadre de la gestion d’une entreprise, le tribunal de grande instance
peut décider d’en faire supporter la charge exclusive au conjoint qui conserve le patrimoine professionnel ou, à
défaut, la qualification professionnelle ayant servi de fondement à l’entreprise ».
109 Lors du décès de l’entrepreneur individuel, l’indivision est créée vis-à-vis du conjoint survivant mais aussi
entre ce dernier et les héritiers.
112Art. 832 CC ; VOIRIN (P.), « La technique du phénix » ; D. 1962, chron. p. 143 ; MORIN (G.),
« L’attribution préférentielle de droit des exploitants agricoles », Defrenois, 1970, art 29673 et 29727 bis cité par
GATSI (J.), « Les créanciers du coïndivisaire », La semaine juridique, JCP, n°46, 1999, p.1654.
113 La soulte représente la somme d’argent que doit verser un copartageant ou un échangiste aux autres parties
lorsque les lots ou les biens échangés sont inégaux en valeur , Lexique des termes juridiques, Dalloz, 14e éd.,
2003, p.543.
114 A l’origine, l’attribution préférentielle ne concernait que les biens relatifs à une exploitation agricole. Elle
s’est étendue à tous les autres exploitants.
115 Sur le processus de publication v.le décret n° 76/165 du 27 avril 1976 fixant les conditions d'obtention du
titre foncier au Cameroun et le décret n° 2005/481 du 16 décembre 2005 modifiant et complétant certaines
dispositions du décret n° 76/165 du 27 avril 1976 fixant les conditions d'obtention du titre foncier.
pourront faire l’objet de réintégration 117 à la suite d’une action en inopposabilité 118 exercée par
le syndic ou d’une action paulienne 119 intentée par un créancier dans le cadre de l’action ut
singuli. Celle-ci est une formule latine signifiant littéralement « en tant que chacun en
particulier »120 ; Elle est une action individuelle d’un créancier fondée sur une fraction
d’intérêt collectif, les sommes recouvrées sont versées dans le patrimoine du débiteur 121.
L’acte uniforme ne se prononce pas mais paraitrait justifier cette action individuelle d’intérêt
collectif à travers plusieurs dispositions de ce texte qui laissent penser que les sommes
recouvrées à la suite d’une telle action entreraient dans le patrimoine du débiteur (parce que
existence de la masse des créanciers, articles 42 alinéa 1 er, 72 alinéa 1er, 75 alinéa 1er, 75 alinéa
4, 88 alinéa 1er, 78 à 80, 141 etc.)122. A défaut de procéder au partage amiable ou lorsque des
contestations s’élèvent la voie judiciaire est indiquée.
Le partage judiciaire est comme son nom l’indique fait devant le juge et correspond
au caractère juridictionnel de la procédure collective. Dans ce cas de figure, il est obligatoire.
Dès le prononcé du jugement d’ouverture, le tribunal a la main mise sur toutes les opérations
116 VAUVILLE (F.), « Divorce et procédure collective », www.vivaldi-chronos.com, 09 août 2015; Art. 68
AUPCAP.
117 L’idée générale en matière de réintégration est de faire rentrer le bien ou une partie du bien dans le
patrimoine du débiteur.
119 Art. 1167 CC ; V. LE CORRE (P.M.), « Pratique du droit des procédures collectives », éd. Dalloz référence
2001, préc. n°376, p.289 cité par SENECHAL (M.), « Qui peut exercer l’action paulienne au cours d’une
procédure collective ? Un prochain revirement de jurisprudence ? » Note sous cass. Com, 13 novembre 2001,
Mariani ès-qual. c/sté ACM Entreprises et sociétés Flarys Arrêt n°1855 FS-P ; Pourvoi n°98-18.292 ; ; Par un
arrêt de chambre mixte du 6 décembre 1985, rendu sous l’empire de la loi de 1967, la cour a estimé que le syndic
pouvait agir en inopposabilité à la masse à l’encontre de l’état liquidatif compris dans une convention de divorce
sur demande conjointe (D.1986, page 185, note DERIDDA (F.); Adde notre étude « Divorce et liquidation
judiciaire : astuces et pièges », RJPF 2001-1/11). L’action paulienne et l’action en inopposabilité présentent des
similitudes car toutes deux semblent réprimer une fraude commise par le débiteur. Il convient toutefois de
préciser que l’action paulienne concerne les fautes prouvées tandis que l’action en inopposabilité peut concerner
les fraudes présumées ou supposées. Il se peut qu’il n’y ait pas de fraude en tant que telle parce que cette
dernière action vise également le rétablissement de l’égalité entre les créanciers. V. SAWADOGO (F. M.), op.
cit., p. 222.
122 TCHOUAMBIA TOMTOM (L. J. B.), La transparence dans les procédures collectives d’apurement du
passif de l’OHADA, Thèse de Doctorat, Université de Dschang, 2013, p. 144.
y compris celles sur lesquelles la procédure a une influence juridique conformément à l’article
3 alinéa 2 de l’acte uniforme sur le droit des procédures collectives.
La demande peut être directe c'est-à-dire concerner le partage proprement dit ou
indirecte c'est-à-dire résulter de la dissolution d’une situation préexistante. L’action en partage
judiciaire est introduite par assignation d’un des coïndivisaires aux autres y compris celui
soumis à la procédure collective ou par requête collective de tout ou partie des
coïndivisaires123. Le tribunal de grande instance commet un notaire et désigne un juge
commissaire124. Il est procédé à l’estimation des biens, si le partage en nature est impossible, il
est procédé à une vente aux enchères publiques ou licitation 125. Toutefois, le juge commissaire
dans le cadre de la procédure collective peut lorsque le bien indivis fait partie du concordat de
redressement judiciaire demander un sursis au partage126. Le partage produit un effet
déclaratif127. L’effet déclaratif a pour but d’assurer l’égalité entre les anciens coïndivisaires et
de mettre chacun d’eux à l’abri de l’insolvabilité des autres 128. Ainsi, les coïndivisaires in
bonis pourront toujours demander la liquidation de l’indivision à condition de tout mettre en
œuvre pour faire échapper leur séparation aux inopposabilités de la période suspecte car,
s’agissant de l’indivision post communautaire, il est clair qu’on ne peut mener à bien la
procédure de divorce qui intéresse un entrepreneur en difficulté si l’on ne connait pas un tant
soit peu le droit des procédures collectives129. La faculté de demander le partage peut donc
porter un sérieux coup au déroulement de la procédure, dans la mesure où les griefs sur
lesquels doivent plancher les organes de la procédure sont nombreux d’une part et l’actif du
débiteur ou des débiteurs en cas de pluralité peut être réduit. L’exercice des droits des
créanciers de l’indivision n’est pas en reste.
123 Lorsqu’il a été assigné à un partage, le débiteur doit en informer le syndic surtout lorsqu’il est soumis à la
liquidation des biens.
127 Art. 883 CC « chaque héritier est censé avoir succédé seul et immédiatement à tous les effets compris dans
son lot, ou à lui échus sur licitation et n’avoir jamais eu la propriété des autres effets de la succession. »
129 VAUVILLE (F.), « Divorce et procédure collective », www.vivaldi-chronos.com, consulté le 09 août 2015.
B- L’ACTION EN REVENDICATION : MODALITE DE PROTECTION DU
DROIT DE PROPRIETE DES COÏNDIVISAIRES IN BONIS
Lorsque la procédure collective de l’un des indivisaires a appréhendé les biens indivis,
parce que confondus dans le patrimoine du débiteur, les coïndivisaires in bonis peuvent
procéder à leur réclamation à travers de l’action en revendication. L'action en revendication
est celle qui permet au propriétaire d'une chose détenue par un tiers, ici le débiteur, de
reprendre cette chose en établissant son droit de propriété 130. Elle est une mesure de faveur
exceptionnelle qui permet au propriétaire d’extraire son bien ou la partie du bien qui lui
revient. Ce droit permet au coïndivisaires d’échapper à l’inflexibilité des procédures de
concours131. Cette action doit être mise en œuvre suivant une procédure bien spécifique (1).
Lorsque l’issue est positive, elle produit certains effets (2).
130 DRUFFIN-BRICCA (S.), L’essentiel du droit des biens, Gualino lextenso, 4e éd., Paris, 2008, p. 73.
131 KALIEU (Y. R.), « Réflexion sur les attributs du droit de propriété : à propos de la propriété utilisée aux fins
de garanties de crédits » : Annales de la Faculté des Sciences Juridiques et Politiques de l’Université de
Dschang, t.1, vol. 1, pp. 193 et s. cité par NANDJIP MONEYANG (S.), « Réflexion sur l’égalité des créanciers
dans les procédures collectives OHADA », Rev. proc. coll., juillet- août 2010, pp. 24-31.
132 MODI KOKO BEYBEY (H.D.), L’action en revendication dans les procédures collectives du droit Français
et de l’OHADA (études de droit comparé), R.T.D.J.A, n° 002, 2009, p. 27 et s.
135 MONSERIE-BON (M.-H.), « Demande en revendication », Rev. proc. coll., septembre 2013, n°5.
138 POUGOUE (P.-G), KALIEU (Y. R.), L’organisation des procédures collectives d’apurement du passif
OHADA, coll. Droit uniforme, PUA, 1999, p. 56. Cité par MODI KOKO BEYBEY (H. D.), op.cit. p.33.
2- Les effets de l’action en revendication
139 GRIMALDI (V. M.), « L’acte uniforme portant organisation des sûretés », in Petites Aff., du 13 octobre,
2004, p. 30 et s.
140 KALIEU (Y. R.), « Réflexion sur les nouveaux attributs du droit de propriété : à propos de la garantie
utilisée aux fins de garanties de crédits », in Annales de la faculté des sciences juridiques et politiques de
l’Université de Dschang, t. 1, Vol. 1, p. 193 et s.; DELEBECQUE (Ph.), « La propriété en tant que sûreté dans
les procédures collectives », in R.T.D com, 1995, p. 385 et s. ; MOULY (S.), « Assainir le régime des sûretés »,
in études dédiées à ROBLOT (R.), LGDJ, 1984, p. 529 et s. cité par GATSI (J.), L’effectivité du droit OHADA,
PUA, 2005, p. 152.
142 V. GATSI (J.), « Les créanciers du coïndivisaire », JCP, n°46, 1999, p. 1650 et s.; sur la possibilité pour les
coïndivisaires non soumis à une procédure collective d’arrêter le cours de l’action en partage : GATSI (J.), « La
sauvegarde des intérêts des coïndivisaires du débiteur », p. 1498 et s ., cité par WICKER (G.), « L’entreprise
indivise et les procédures collectives », Actes colloque organisé le 21 juin 2002 à l’Université Montesquieu-
Bordeaux IV par l’Association Henri Capitant des Amis de la Culture Juridique Française, p. 47 ; KUATE
TAMEGHE (S. S.), « Les mystères des articles 50 al 1 et 51 de l’acte uniforme portant organisation des
procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution », www.afrilex.u-4bordeaux4.fr. , p. 182 et s. :
Eu égard à ce qui précède, il apparait que le droit des procédures collectives et celui de
l’indivision sont des droits spécifiques, difficilement conciliables. L’indivision au même titre
que les procédures collectives subit des effets perturbateurs. En effet, la proximité qui existe
entre les coïndivisaires peut influencer sur leurs destins en les faisant tous supporter la
procédure collective initialement ouverte contre l’un d’eux. Sous un tout autre plan, les
coïndivisaires in bonis en tant que tiers à la procédure collective ouverte contre l’un d’eux
continuent d’exercer leurs droits ; et à supposer que le bien indivis soit compris dans l’actif de
la procédure collective, ils peuvent toujours le revendiquer. L'inaliénabilité « totale » des
biens qui est la règle en matière d’ouverture des procédures collectives ne peut concerner que
ceux qui sont la propriété exclusive du débiteur. Il appert au demeurant que le droit de
l’indivision et celui des procédures collectives subissent des réciproquement des interférences
ce qui ne facilite pas leur mise en œuvre concomitante. Il est donc important de mener une
réflexion sur les modalités d’application harmonieuse de ces deux droits.