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Programme
« Ce thème a un double objectif : aider les élèves à saisir les enjeux de l’information (liberté,
manipulation, contrôle), et les amener à réfléchir sur leur propre manière de s’informer, dans
la continuité de l’éducation aux médias et à l’information. Leurs pratiques de l’information
seront décisives dans les études supérieures, et supposent pour être maîtrisées une culture
relative aux médias. Les deux axes visent :
– à faire saisir aux élèves comment les progrès techniques ont renforcé depuis le XIXe siècle
la place de l’information dans notre quotidien ;
– à leur montrer le rôle décisif d’une information libre pour éclairer l’opinion et leur faire prendre
conscience de l’ensemble des enjeux autour de l’information (liberté, contrôle, manipulation). »
Présentation du thème
À l’époque de l’information mondialisée, l’analyse des sources et modes de communication est un
enjeu essentiel. Ce thème peut être mis en relation avec les questions vues au collège dans le cadre
de l’éducation aux médias et à l’information : connaître et utiliser différents systèmes d’information,
trouver et sélectionner les informations, utiliser les moteurs de recherche, les sites et réseaux de
ressources documentaires, s’assurer de la pertinence d’une source, exercer son esprit critique sur
les données numériques.
L’introduction s’intéresse aux différentes manières de s’informer dans le monde contemporain. Les
médias et supports de communication n’ont jamais été aussi nombreux et jamais la consommation
de médias n’a été aussi importante. La multiplication des supports de communication a assuré une
individualisation des pratiques d’information, lesquelles varient selon les groupes sociaux et les
territoires. Les médias traditionnels n’ont pas pour autant disparu, mais ils ont dû adapter leur offre.
L’usage public des médias sociaux par les acteurs politiques modifie aussi l’accès à l’information.
Au XXIe siècle, un débat majeur se noue autour de la diffusion de l’information. De nombreux pays
tentent de contrôler l’accès à Internet. C’est le cas de la Chine qui impose une censure drastique et
bloque les réseaux Facebook et Twitter.
L’axe 1 permet de montrer le rôle des innovations techniques dans le renforcement de l’information
dans le quotidien.
Au XIXe siècle, l’entrée dans l’information de masse est favorisée par l’industrialisation. La diffusion
des progrès techniques assure l’essor d’une presse à grand tirage et à prix modique. Le développe-
ment de la liberté de la presse et les progrès de l’alphabétisation participent également d’un élar-
gissement du lectorat. Au XXe siècle, la radio puis la télévision font entrer l’information dans tous les
foyers. On s’informe, en famille, en écoutant le « poste » ou en assistant en direct aux actualités dif-
fusés en Mondovision. Dans les années 1960, la naissance du réseau Internet marque une nouvelle
révolution. Le réseau s’étend peu à peu dans la sphère civile et commerciale et fait entrer le monde
dans l’ère de l’information mondialisée.
Dans un contexte de développement des médias de masse, le contrôle de l’information et la liberté
de la presse constituent un enjeu politique fondamental. C’est la problématique centrale de l’axe 2.
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À la fin du XIXe siècle, la révélation par la presse de la condamnation du capitaine Dreyfus va donner
lieu à une affaire d’État. L’affaire Dreyfus montre ainsi l'importance de la presse dans une démo-
cratie pour éclairer le débat public. Les agences de presse internationales jouent un rôle essentiel
dans la diffusion d’une information neutre, vérifiée et mise à jour. La première est créée à Paris
en 1835 par Charles-Louis Havas. Des concurrentes apparaissent en Europe puis aux États-Unis.
Aujourd’hui, quatre agences se partagent le marché de l’information mondiale. Les médias jouent
également un rôle central en temps de guerre face à la propagande gouvernementale. C’est ce que
montre l’exemple de la guerre du Vietnam, premier conflit télévisé de l’histoire. Les images choc qui
se déversent quotidiennement dans les foyers américains révèlent les horreurs du conflit et parti-
cipent au basculement de l’opinion américaine en faveur d’un retrait du Vietnam. Le droit d’informer
et le droit d’être informé fondent ensemble la liberté de la presse. L’organisation de l’espace média-
tique a été un enjeu majeur du XXe siècle.
L’objet de travail conclusif propose de s’intéresser au paysage médiatique bouleversé par l’irrup-
tion d’Internet. Le réseau Internet, créé à l’origine pour répondre à des besoins militaires, et sa
diffusion dans les domaines civil et commercial constituent une nouvelle révolution en élargissant
considérablement l’accès à l’information aux quatre coins de la planète. Les médias sociaux (blogs,
forums, réseaux sociaux) transforment le rapport à l’information et assurent une place plus grande
à la parole des citoyens et des lanceurs d’alerte. L’information, plus fragmentée, devient aussi plus
horizontale. Parallèlement, Internet permet aussi la diffusion de nouvelles non contrôlées faites de
rumeurs, de complots et de fake news. Les bulles de filtres enferment les internautes dans des com-
munautés. L’existence d’Internet questionne également la circulation internationale de l’information
et confronte deux visions : liberté ou contrôle.
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Le thème de l’information mérite d’être traité dès le début de l’année car il pose la question de la
fabrique de l’information et de sa diffusion par des canaux de communication qui, bien que nés avant
Internet, doivent y être tous présents. Les médias et les supports de communication ont connu une
multiplication et une diversification sans précédent ces dernières décennies, modifiant l’accès mais
aussi la circulation de l’information. Désormais, celle-ci ne circule plus uniquement par des canaux
« verticaux » – un organe de presse, une radio, une chaîne de télévision – mais selon une logique de
partage entre usagers d’Internet (focus 1). Ce phénomène entraîne une différenciation accrue des
pratiques d’information selon l’âge, le groupe social ou encore le lieu où l’on vit (focus 2).
BIBLIOGRAPHIE/filmographie/sitographie
◗◗ Livres et revues
-- F. Balle, Médias et sociétés, 18e édition, © LGDJ, 2019.
-- F. Balle, Les Médias, © PUF, 2017.
-- D. Cardon, Culture numérique, © Presses de Sciences Po, 2019.
-- G. Guibert, F. Rebillard, F. Rochelandet, Médias, culture et numérique,
approches socio-économiques, © Armand Colin, 2016.
-- P. Albert, N. Sonnac, La Presse française au défi du numérique, 8e édition,
© La Documentation française, 2014.
-- « L’économie à l’heure du numérique », © Cahiers français, n° 392, mai-juin 2016.
-- « L’information à l’heure du numérique », © Cahiers français, n° 406, sept.-oct. 2018.
-- « Les discours médiatiques », © Textes et documents pour la classe, n° 1104, juin 2016.
◗◗ Film et documentaires
-- Y. Jeuland, Les Gens du Monde, 2014, 1h22.
-- L. Gervereau, Cyril Stern, L’Info est-elle comestible ?, 2011, 1h42.
-- N. Philibert, La Maison de la Radio, 2012, 1h43.
-- D. Fincher, The Social Network, 2010, 2h.
◗◗ Sites internet
-- www.wptdatabase.org/ pour des données chiffrées sur l’évolution de la presse écrite.
-- wearesocial.com pour suivre le déploiement des usages d’Internet, du mobile et des réseaux
sociaux.
-- www.philomedia.be/category/medias/ : un site tenu par Julien Lecomte, professeur en sociologie
des médias.
-- www.meta-media.fr/, le blog collectif de France Télévisions.
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web (avec des articles gratuits ou payants), puis Facebook, YouTube, WhatsApp, Messenger,
que les internautes recherchent des informa- Wechat. Twitter ne se classe qu’à la 18e place
tions fiables même s’ils ont auparavant retrans- mais il se distingue par la limite qu’il impose
mis une nouvelle non vérifiée. Le Monde, France en termes de nombre de signes par message,
Télévisions et L’Express sont alors considérés et oblige donc l’utilisateur à être concis ou per-
comme les médias les plus fiables (www.digi- cutant. C’est toute la force de Donald Trump
talnewsreport.org/survey/2018/france-2018/, de communiquer dans un langage simple, par-
en anglais). Ces données cachent le fait que fois outrancier, qui reflète ses humeurs. On a
la majorité des internautes passent par les pu parler de lui comme du premier « tweet-
réseaux sociaux pour accéder à l’information. président ». Le réseau social a été au cœur de
Ils sont même la première source d’information sa campagne, et aujourd’hui le compte offi-
pour les plus jeunes. ciel « @POTUS » est suivi par près de vingt-six
millions d’abonnés. Ce mode de communication
Document 2 est devenu une arme politique avec laquelle le
président des États-Unis souffle le chaud et le
Le document illustre la présence d’une presse
froid au rythme des événements nationaux ou
écrite dans tous les pays du monde. C’est le
internationaux. Pour une analyse plus détaillée
média le plus ancien et le Japon se caracté-
de cette caricature, voir p. 161 le corrigé de
rise par l’existence de journaux à grand tirage
l’entraînement de la Méthode bac proposé
à côté de cinq réseaux nationaux de télévision.
p. 237 du manuel. Voir également le document 2
Malgré tout, l’audience de la presse écrite va en
p. 244 du manuel, « Twitter pour éviter les
diminuant. Selon l’enquête menée par Reuters
médias traditionnels ».
Institute en 2018, seuls 37 % des Japonais se
tournent vers la presse chaque semaine quand
Document 5
ils étaient 63 % en 2013.
Le texte proposé montre comment la chaîne de
Document 3 l’information s’est transformée progressivement
Premier support d’information auprès de la à la télévision : naissance de chaînes d’informa-
population jeune, le smartphone permet d’accé- tion en continu effaçant en partie le rendez-vous
der en temps réel aux différentes sources d’infor- quotidien du journal du soir, mise en scène de
mation d’abord par les flux des réseaux sociaux, la nouvelle en direct, annonce sur le web via
leurs alertes et notifications. Ce qui compte pour les sites de presse ou apparentés alimentant les
les utilisateurs, c’est de pouvoir accéder à des notifications sur les réseaux sociaux. Cette inter-
contenus à tout moment et où qu’ils soient. Le pénétration entre télévision et Internet et cette
smartphone sert aussi à visionner des informa- dilatation du temps se retrouvent à la radio : pos-
tions en différé. Au final, il est en France le pre- sibilité de visionner les émissions en direct ou de
mier support de lecture numérique juste devant les écouter en différé. Les réseaux sociaux per-
l’ordinateur et loin devant la tablette. De nom- mettent aussi une plus grande réactivité avec les
breux sites de presse aussi divers que Le Figaro, auditeurs ou les téléspectateurs qui commentent
Télé Loisirs ou Closer en profitent pour élargir en direct les émissions qu’ils suivent. Autant de
leur audience, et donc leur contenu manière pour le média original et le réseau social
utilisé d’accroître leur audience.
Document 4
Corrigé des questions
Cette caricature met en scène le président Trump
et son usage intempestif de Twitter (représenté 1. Pour être informés, les Français déclarent
par sa mascotte, l’oiseau bleu), son premier sup- se tourner d’abord vers les chaînes de télévi-
port de communication. Twitter n’est pourtant sion, ensuite vers la presse quotidienne et les
pas l’un des premiers réseaux sociaux à l’échelle radios. Les quotidiens sont les médias les moins
mondiale. Aux cinq premières places, on trouve consultés. Pourtant, ces derniers sont parmi
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Vers le bac
6. Les résultats complets de l’enquête sont
accessibles sur le site du ministère de la Culture.
On peut s’en inspirer pour établir un question-
naire à l’échelle de son établissement.
www.culture.gouv.fr/Presse/Communiques-
de-presse/Les-jeunes-et-l-information-une-
etude-du-ministere-de-la-Culture-vient-eclai-
rer-les-comportements-des-jeunes-en-ma-
tiere-d-acces-a-l-information
Pour la présentation des résultats à l’oral, les
élèves peuvent se reporter à la page 223 (« Les
tutos du Grand Oral ») pour s’entraîner à parler
devant la classe.
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Cet axe vise à amener les élèves à comprendre comment les progrès techniques ont renforcé, depuis
le XIXe siècle, la place de l’information dans le quotidien. Il présente les grandes révolutions tech-
niques de l’information à travers trois jalons : l’information imprimée (jalon 1), l’information par le
son (jalon 2) et l’image, l’information mondialisée et individualisée (jalon 3).
Les documents proposés dans le cadre de chaque jalon permettent de montrer la diffusion progres-
sive des médias modernes et leur impact sur l’accès à l’information. Le XXe siècle voit l’éclosion de
l’information de masse, rendue possible par la diffusion de la radio puis de la télévision. Le dévelop-
pement du réseau Internet entre la fin du XXe siècle et le début du XXIe siècle marque un nouvel âge
de l’information, désormais mondialisée, diffusée et mise à jour en temps réel.
BIBLIOGRAPHIE/filmographie/sitographie
◗◗ Livres et revues
-- F. d’Almeida, C. Deleporte, Histoire des médias en France de la Grande Guerre à nos jours,
© Flammarion, 2010.
-- F. Barbier, C. Bertho Lavenir, Histoire des médias : de Diderot à Internet, © Armand Colin, 2003.
-- J.-N. Jeanneney, Une histoire des médias des origines à nos jours, © Seuil, 2000.
-- J.-N. Jeanneney, L’écho du siècle. Dictionnaire historique de la radio et de la télévision en France,
© Hachette Littératures, 2001.
-- J.-J. Ledos, Petite contribution à l’histoire de la télévision, © L’Harmattan, 2012.
-- F. Jost (dir.), « La télévision et après : vers le transmédia », © Télévision, n° 5, 2014.
◗◗ Films et documentaires
-- O. Welles, Citizen Kane, 1941, 1h59.
-- A. Pakula, Les Hommes du président, 1976, 2h18.
-- D. Fincher, The Social Network, 2010, 2h.
-- A. Rossi, À la une du New York Times, 2011, 1h28.
◗◗ Sites internet
-- La presse à la Une, exposition virtuelle BnF : http://expositions.bnf.fr/presse/arret/01.htm
-- Le site de la Société pour l’histoire des médias : www.histoiredesmedias.com
-- L’histoire du réseau Internet sur le site de la documentation française :
www.ladocumentationfrancaise.fr/dossiers/internet-monde/historique.shtml
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Document 1
DOUBLE-PAGE D’OUVERTURE p. 210-211
La chronologie rappelle les principales innova-
Les documents de cette double-page per- tions dans le domaine de l’imprimerie, depuis sa
mettent d’illustrer les problématiques de l’axe 1 mise au point par Gutenberg en 1450 jusqu’à la
et de montrer les modalités de l’entrée dans publication assistée par ordinateur (PAO) dans
l’âge de l’information de masse, avec la presse les années 1980. Les innovations techniques
à gros tirage, bientôt concurrencée par la radio s’accompagnent de nouvelles pratiques com-
puis la télévision, et l’irruption d’Internet à la fin merciales et d’une baisse importante du prix des
du XXe siècle. La photographie p. 210 a été prise quotidiens dont le nombre se multiplie.
dans une imprimerie de Crawfordsville dans
l’Indiana (États-Unis) en 1956. Elle montre, au Document 2
premier plan, plusieurs centaines d’exemplaires
du Time, en piles sur des palettes, prêts à être L’essor de la presse à grand tirage entraîne
expédiés, tandis qu’à l’arrière-plan l’immense un agrandissement considérable des rédac-
rotative est en marche, pour répondre aux gros tions et un besoin accru d’ouvriers spécialisés,
tirages du journal. L’affiche publicitaire (p. 211) typographes, photograveurs, etc. Les services
a été réalisée en 1965 pour la marque alle- techniques s’étoffent comme le montre cette
mande Blaupunkt. La publicité vante les mérites photographie prise dans la salle de presse d’un
de trois appareils, un téléviseur, une radio et journal de Washington à la fin du XIXe siècle.
un autoradio, que désigne du doigt une jeune
femme représentée à gauche de l’image. Dans Document 3
les années 1960, l’immense majorité des foyers
La presse française a vu ses tirages augmenter
est équipée de postes de radio ; les autoradios
dès la fin du XIXe siècle. En 1914, elle occupe la
sont apparus dans les années 1930 et se démo-
première place en Europe. Quotidiens nationaux
cratisent en même temps que les voitures, mais
et régionaux voient leur tirage culminer en 1946
la télévision commence seulement à se diffuser
en France (plutôt en retard sur ses voisins). Le avec quinze millions d’exemplaires.
dernier document montre un mur d’écrans sur
Document 4
lesquels apparaissent des images qui semblent
issues d’autant de programmes télévisés en Ce graphique permet d’illustrer les consé-
ligne. Le document illustre l’élargissement de quences de la crise de la presse papier du fait de
l’offre d’information à l’heure d’Internet. la révolution du numérique à partir des années
2000. En 2016, la demande de papier, qui avait
JALON 1 – De la diffusion de l’imprimerie continuellement augmenté de 1976 à 2006,
à la presse à grand tirage p. 212-213 retrouve son niveau de 1976.
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Entraînement R
éalisez une revue de presse sur le thème :
« Peut-on faire confiance aux médias d’information ? »
La confiance des lecteurs dans les médias d’information est au plus bas
- La confiance générale des Français dans les médias s’effondre, comme le révèle une enquête
réalisée par Kantar pour le quotidien La Croix en janvier 2019. www.la-croix.com/Economie/Medias/
Barometre-medias-journalistes-sommes-remettre-question-2019-01-24-1200997667?from_
univers=lacroix
- Le niveau de confiance à l’égard de la télévision tombe à 38 %, à 44 % pour la presse écrite et à 50 %
pour la radio, comme le rapporte l’hebdomadaire L’Express au même moment. www.lexpress.fr/
actualite/medias/la-confiance-dans-les-medias-au-plus-bas-depuis-32-ans_2058929.html
Les médias d’information sont accusés de mauvaises pratiques qui les discréditent
- Le 24 janvier, l’hebdomadaire le Journal du dimanche (JDD) explique que les journalistes sont
accusés de ne pas être indépendants des partis politiques et du pouvoir, d’être perméable aux
pressions pécuniaires, et de dramatiser les événements. www.lejdd.fr/Medias/la-confiance-dans-
les-medias-chute-fortement-9-choses-a-retenir-du-barometre-annuel-de-la-croix-3844082
- Le même jour, le quotidien Le Monde révèle que les médias d’information ne sont pas plébiscités
par les jeunes, qui s’informent majoritairement sur les réseaux sociaux comme Facebook, qui
se place désormais devant les titres de la presse quotidienne et sites d’information sur internet.
www.lemonde.fr/economie/article/2019/01/24/la-confiance-dans-les-medias-est-au-plus-
bas_5413777_3234.html
Quelques pistes semblent envisageables pour rétablir la confiance entre lectorat et médias
d’information
- Comme le souligne le médiateur de la Maison de la radio sur son site internet le 25 janvier, l’intérêt
des Français pour l’actualité remonte après trois années de baisse en dépit de la crise de confiance
envers les médias d’information. http://mediateur.radiofrance.fr/infos/confiance-envers-medias-
barometre-croix/
- Le quotidien Le Figaro affirme que des pistes pour rétablir la confiance envers les médias d’infor-
mation sont envisagées, comme l’expliquait le ministre de la Culture Franck Riester sur France
Info le 24 janvier, notamment celles d’une meilleure différentiation de la presse et des réseaux
sociaux, d’une certification des rédactions ou d’un renforcement des pouvoirs du CSA. www.lefi-
garo.fr/flash-actu/2019/01/24/97001-20190124FILWWW00090-les-pistes-de-franck-riester-pour-
retablir-la-confiance-dans-les-medias.php
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Cet axe doit permettre aux élèves de saisir les enjeux de l’information, entre liberté, manipulation
et contrôle. La vie démocratique est indissociable d’une information libre, nécessaire pour éclairer
l’opinion. L’axe présente les enjeux de la question à travers trois jalons : l’information dépendante de
l’opinion ? L’affaire Dreyfus et la presse (jalon 1) ; l’information entre le marché et l’État : histoire de
l’Agence Havas et de l’AFP (jalon 2) ; information et propagande en temps de guerre : les médias et la
guerre du Vietnam (jalon 3).
Les documents présentés dans le cadre de chaque jalon permettent de montrer les liens qui s’éta-
blissent entre presse et opinion, les conditions d’une information libre entre marché et contrôle de
l’État, et les risques de manipulation et de censure de l’information en situation de guerre.
BIBLIOGRAPHIE/filmographie/sitographie
◗◗ Livres et revues
-- Abécédaire de l’AFP : Comment l’agence informe sur le monde,© Victoires éd., 2010.
-- X. Baron, Le Monde en direct, de Charles-Louis Havas à l’AFP, deux siècles d’histoire,
© La Découverte, 2014.
-- P. Boussel, L’Affaire Dreyfus et la presse, © Armand Colin, 1960.
-- J. Cazemajou, J.-M. Lacroix (dir.), La Guerre du Vietnam et l’opinion publique américaine
(1961-1973), © Presse Sorbonne nouvelle, 1991.
-- P. Chauvel, Ceux du Nord : 140 photos inédites des photoreporters du Nord-Vietnam
entre 1966 et 1975, © Les Arènes, 2014.
-- M. Mathien, C. Conso, Les Agences de presse internationales, © PUF, 1997.
-- M. Palmer, Des petits journaux aux grandes agences, © Aubier, 1983.
-- J. Ponty, « La Presse quotidienne et l’affaire Dreyfus en 1898-1899. Essai de typologie »,
© Revue d’histoire moderne et contemporaine, vol. 21, n° 2, 1974.
◗◗ Film documentaire
-- P. Barberis, Vietnam, la trahison des médias, 2008, 1h30.
◗◗ Sites internet
-- L’affaire Dreyfus à travers une sélection de documents, BnF :
https://gallica.bnf.fr/conseils/content/laffaire-dreyfus
-- L’affaire Dreyfus, exposition virtuelle BnF : http://expositions.bnf.fr/zola/
-- Agence France-Presse, exposition virtuelle BnF : http://expositions.bnf.fr/afp/
-- L’AFP en dates : www.afp.com/fr/lagence/lafp-en-dates#
-- Dossier de presse de l’exposition consacrée à l’AFP au Centre Pompidou (1983) :
www.centrepompidou.fr/media/document/04/5a/045a63726b8d145881af945cc3cabf3c/normal.pdf
-- Site de la BBC consacré aux photographies de la guerre du Vietnam :
http://news.bbc.co.uk/2/shared/spl/hi/picture_gallery/05/in_pictures_the_vietnam_war_/html/1.stm
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Document 1
DOUBLE-PAGE D’OUVERTURE p. 224-225
Les repères chronologiques permettent à la fois
Les documents de cette double-page per- de rappeler les principales étapes de l’affaire
mettent d’illustrer les problématiques de l’axe 2 Dreyfus mais aussi de montrer le rôle pris par
et de montrer les enjeux d’une information libre. la presse dans le dévoilement des dessous de
La une du Petit Journal (p. 224) du 10 juillet 1898 l’affaire.
illustre sur un mode humoristique les passions
suscitées par l’affaire Dreyfus dans la vie poli- Document 2
tique. La scène figure une salle de classe sens
dessus dessous : des « élèves » – journalistes et Condamné pour haute trahison à la déportation
hommes politiques – s’affrontent à coups d’en- à perpétuité au bagne de Cayenne, à la suite d’un
crier, de feuilles, de livres et de journaux pendant procès tenu à huis-clos, le capitaine Dreyfus doit
que la maîtresse, Marianne, martinet à la main subir le déshonneur d’une dégradation publique
tente de rétablir le calme en menaçant d’expulser le 5 janvier 1895. Pour les grands quotidiens
tout le monde. Le Petit Journal, plutôt antidreyfu- nationaux, comme Le Petit Journal, la culpabilité
sard, tire quotidiennement à un million d’exem- de Dreyfus ne fait aucun doute. La défaite de 1870
plaires et ne veut pas risquer de perdre son a soudé la nation autour de l’armée, instrument
lectorat. Il adopte donc une position prudente sur indispensable de la « Revanche ». La une du Petit
la question comme on peut le voir sur ce dessin. Journal du 13 janvier 1895 légende ainsi la scène
La photographie prise dans un bureau de l’AFP en de dégradation par le titre : « Le traître ».
mars 1965 (p. 225) permet d’illustrer le fonction-
Document 3
nement d’une agence d’information mondiale. Au
premier plan, des journalistes retranscrivent des La lettre ouverte de Zola au président de la Répu-
informations transmises via les Télex, systèmes blique est publiée à la une du quotidien d’Ernest
de communication permettant l’envoi des infor- Vaughan, L’Aurore. C’est Georges Clemenceau,
mations et la mise en relation entre les télescrip- éditorialiste du journal gagné au camp dreyfusard,
teurs, par leurs bureaux à l’étranger. Au second qui a convaincu Zola de se lancer et qui propose
plan, d’autres journalistes installés devant des le titre (« Zola vous l’indique lui-même, le titre. Il
machines à écrire, travaillent à la rédaction de ne peut y en avoir qu’un : J’accuse ! »). Trois cent
leur dépêche. Le rôle des médias dans la guerre mille exemplaires du numéro sont imprimés, un
du Vietnam est illustré par la photographie du bas tirage six fois supérieur à la moyenne du quoti-
de la p. 225 montrant un reporter américain fil- dien (vingt-cinq mille exemplaires). L’article vaut à
mant l’arrestation d’un jeune Vietcong blessé à la Zola une condamnation pour diffamation (prévue
tête. Le photographe a capté le regard du com- par la loi sur la presse de 1882). Cela ne décou-
battant, bras levés, qui fixe la caméra. Plus que le rage pas les dreyfusards : Clemenceau consacra
conflit lui-même, le photographe interroge ici les six cent soixante-cinq articles à l’affaire, dans
enjeux d’une guerre largement médiatisée. L’Aurore et La Dépêche de Toulouse. Au moment
de la publication de ce texte, Charles Péguy est
un jeune normalien de 25 ans. Révolté par l’anti-
JALON 1 – L’Affaire Dreyfus et la presse sémitisme, il s’engage auprès des dreyfusards.
p. 226-227
Dans ce texte paru dans la revue qu’il a fondée en
L’affaire Dreyfus est l’occasion de prendre 1900, Les Cahiers de la Quinzaine, il revient sur le
conscience du rôle nouveau de la presse dans choc de la parution du « J’accuse ! ».
la société et la politique de la Troisième Répu-
Document 4
blique. Les journaux montrent pour la première
fois leur capacité à mobiliser l’opinion. Le camp Ce tableau issu des travaux de Janine Ponty sur
dreyfusard réussit finalement à renverser un la presse durant l’affaire Dreyfus montre l’évo-
rapport de forces initialement défavorable. lution du positionnement des quotidiens à par-
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Document 1 Document 4
À l’issue de la guerre d’Indochine, deux États La guerre du Vietnam n’est pas censurée. Les
sont fondés : l’un, communiste, au nord et l’autre, autorités américaines ne cherchent pas à
soutenu par les Américains, au sud. En 1960, le contrôler le travail des journalistes et l’armée
Front national de libération (FNL) est créé ; il est même invitée à faciliter leur travail. Les pre-
lutte contre le dictateur en place au Sud-Vietnam, miers reportages se concentrent sur le quotidien
Ngô Dinh Diem, et contre l’influence américaine. des soldats. On voit sur cette photographie prise
En 1963, après la chute de Diem, le gouverne- en 1967 des GI’s juchés sur un char stoppé sur
ment américain prend en charge la lutte contre une route. Ils sont interviewés par un journaliste
le FNL, et son engagement militaire est massif à accompagné d’un cadreur et d’un preneur de
partir de 1964. Mais le Nord-Vietnam, soutenu par son pour la chaîne de télévision CBS.
l’URSS et la Chine, oppose une forte résistance. Aucun autre conflit n’a été aussi librement pho-
Cette guerre, dans laquelle s’engagent cinq cent tographié et filmé. Christian Simonpietri, qui
mille hommes de troupe américains, largement fut reporter au Vietnam pour l’agence Gamma,
couverte par la télévision qui montre les horreurs explique ainsi : « Après le Vietnam, tout a changé.
vécues par les soldats et la population vietna- Les Américains se sont rendu compte de l’im-
mienne, devient impopulaire aux États-Unis. En pact des images. Et lors des guerres suivantes,
mars 1973, les accords de Paris aboutissent à par exemple l’invasion de la Grenade (1983),
l’évacuation par les Américains du Sud-Vietnam. l’accès de la presse a été totalement contrôlé »
La chute de Saigon a lieu en 1975 : la capitale du (cité dans « Guerre du Vietnam : des images, des
Sud-Vietnam devient Hô Chi Minh-Ville. amis et des morts », Le Monde, 23 février 2011).
Document 2 Document 5
Robert S. McNamara occupe le poste de secrétaire à Le 29 avril 1970, devant la menace d’une inva-
la Défense durant sept ans. De l’envoi de conseillers sion communiste du Cambodge, Nixon prend
militaires (1961) à l’offensive du Têt (1968), il a la décision avec son allié sud-vietnamien de
supervisé l’engagement des États-Unis au Vietnam lancer plusieurs opérations militaires. C’est le
où il a mené trois stratégies successives : la contre- début de la plus grande campagne de bombar-
insurrection (1961-1963), l’escalade (1964-1965), dements lancée sur un pays. Les forces améri-
les alternatives (1966-1968). caines quittent le pays après trente jours. Nixon
vient justifier l’intervention à la télévision, afin
Document 3 de convaincre une opinion désormais largement
hostile à l’escalade militaire.
En sept ans, la présence militaire américaine
est passée de quelques centaines de conseil- Corrigé des questions
lers militaires à un contingent de cinq cent mille
hommes. Fin janvier 1968, période de trêve et de 1. La guerre du Vietnam est un conflit de la
fête du nouvel an lunaire (le Têt), les forces nord- guerre froide, visant pour les États-Unis à
vietnamiennes déclenchent une guérilla urbaine empêcher la réunification du pays sous la tutelle
de grande échelle dans le sud du pays. L’état- du Nord communiste. Plus globalement, il s’agit
major américain croit alors tenir l’affrontement d’endiguer la diffusion du communisme dans
tant attendu. Jusqu’alors, les bombardements le monde. L’intervention débute par l’envoi
massifs du Nord avaient exténué l’ennemi sans d’un premier contingent de soldats en 1964 et
le vaincre. Les combats dans Saigon donnent aux des bombardements massifs à partir de 1965.
nombreux journalistes américains présents sur Sur place, l’armée américaine est confrontée
place l’occasion d’abreuver l’Amérique d’images à une guérilla menée par le Vietcong et soute-
de soldats en action, lesquelles produiront l’effet nue par l’URSS et la Chine, comme l’atteste la
inverse de celui escompté. photographie du ministre de la Défense, Robert
157
McNamara, arborant un fusil chinois pris sur un de bataille du Vietnam » (Montreal Gazette, 16 mai
combattant vietcong, lors d’une conférence de 1975). Le spectacle de la guerre, déversé tous les
presse le 26 avril 1965 à Washington. jours sur les écrans, a renforcé une interprétation
plus émotionnelle qu’analytique des événements.
2. Les informations sur le conflit émanent du
Ainsi, la médiatisation de la guerre a favorisé un
gouvernement américain : conférences de
presse, interventions télévisées comme celle de courant d’opinion pacifiste.
R. Nixon, le 30 avril 1970, expliquant en direct
Document 1
à la télévision aux Américains les raisons de
l’entrée de l’armée américaine au Cambodge. Walter Cronkite est le présentateur vedette du
Parallèlement, les journalistes sont autorisés journal télévisé de la chaîne CBS News entre 1962
à couvrir le conflit et l’armée est même tenue et 1981, surnommé « l’homme en qui l’Amérique
de faciliter leur travail sur place (transport). Les a confiance ». Au début du conflit et jusqu’en
premiers reportages sont surtout centrés sur la 1967, il adhère aux explications de l’armée et de la
vie des GI’s. La guerre est alors assez abstraite. Maison-Blanche. Il se rend sur place début 1968,
3. L’offensive vietcong du Têt constitue un tour- après l’offensive du Têt et prédit l’enlisement. Le
nant car elle survient en direct à la télévision président Lyndon Johnson aurait alors déclaré :
américaine. Il s’agit de l’attaque simultanée d’une « Si j’ai perdu Cronkite, j’ai perdu l’Amérique ».
centaine de villes, dont Saïgon où stationnent de
Document 2
nombreux journalistes occidentaux. Les caméras
captent en direct le vacillement de la puissance La réalité de la guerre fait irruption lors de l’of-
américaine surprise par l’offensive mais finale- fensive du Têt que l’armée appelait de ses vœux
ment victorieuse. Les journalistes retransmettent mais qu’elle ne sut pas anticiper. Un moment
les images sans avoir eu le temps de rédiger des dépassée, elle subit de lourdes pertes. Aux
commentaires ; c’est donc la guerre à l’état brut États-Unis, les blessures et les souffrances
qui surgit dans les foyers : « l’image a submergé des GI’s s’étalent dans les magazines et dans
la parole ». Pour le Vietcong, la défaite militaire les journaux télévisés. La photographie de John
n’efface pas la victoire médiatique. Olson, prise le 15 février 1968, paraît dans Life.
Elle montre des soldats blessés hissés sur un
Vers le bac char. L’un d'eux allongé les yeux clos reçoit une
perfusion tandis qu’un autre est assis les yeux
4. Durant la guerre du Vietnam, les journalistes
bandés. On distingue la jambe sanglante d’un
et l’opinion disposent de deux sources d’infor-
troisième blessé dont on ne voit pas le visage.
mation sur le conflit : les informations officielles
L’impact de ces images sur l’opinion publique
diffusées par l’armée et les autorités, les repor-
américaine a été déterminant.
tages filmés sur place par des reporters envoyés
par leur média (presse, radio, télévision). Document 3
Pendant le conflit vietnamien, les téléspectateurs
JALON 3/2 – Les médias et la guerre
assistent à des reportages sur les bombarde-
du Vietnam p. 232-233 ments, les patrouilles, les combats rapprochés.
De cette version télévisée de la guerre, Lyndon
La double-page interroge l’influence du traite-
Johnson dira en 1968 qu’elle a installé le défai-
ment médiatique de la guerre du Vietnam sur
tisme chez les Américains.
son issue en montrant notamment l’impact
de l’offensive du Têt. Comme l’écrit Marshall Document 4
McLuhan, « La télévision a apporté la brutalité de
la guerre dans le confort de la salle de séjour. La Au cours des neuf années du conflit, une même
guerre du Vietnam a été perdue dans les salles question est posée au public américain à inter-
de séjour de l’Amérique mais pas sur les champs valles réguliers par l’institut de sondages Gallup :
158
l’engagement militaire de leur pays au Vietnam qu’en septembre), Walter Cronkite, présenta-
est-il ou non une erreur ? (« In view of the deve- teur vedette de la chaîne CBS, s’interroge sur
lopments since we entered the fighting in Vietnam, les perspectives d’une victoire militaire. Sans
do you think that the United States made a mistake remettre en cause la légitimité du combat – la
sending troops to fight in Vietnam? »). défense de la démocratie – le journaliste évoque
les risques d’enlisement et la nécessité pour les
Documents 5 et 6 États-Unis d’entrer dans une phase de négocia-
tion avec « l’ennemi ». Les combats de la cam-
Cette photographie d’Eddie Adams, parue à
pagne du Têt s’étendent sur plusieurs mois et
la une du New York Times le 2 février 1968 lui
sont suivis en direct dans tous les foyers améri-
a valu plusieurs prix et une renommée mon- cains qui assistent au vacillement de la première
diale. Elle montre le chef de la police nationale armée du monde. C’est de cette époque que
du Sud-Vietnam, le général Nguyen Ngoc Loan, date le retournement de l’opinion américaine en
exécutant de sang-froid un capitaine du Front de faveur d’un retrait du Vietnam. Jusqu’à l’offen-
libération du Sud-Vietnam, Nguyen Van Lem, qui sive du Têt, l’opinion s’était montrée favorable à
venait de tuer un de ses amis avec mère, femme l’escalade (avec un pic à plus de 50 % en 1967).
et enfants. Le cliché stupéfie et scandalise. Il fait
du général Loan un monstre que sa réputation 2. Les deux photographies, largement diffusées
de droiture ne suffira jamais à réhabiliter. C’est dès leur parution, montrent l’usage de la propa-
l’auteur de la photo lui-même qui devient le gande par l’image en temps de guerre. Le cli-
meilleur avocat de l’homme qu’il a, sans le vou- ché d’Eddie Adams, pris le 1er février 1968, trois
loir, contribué à clouer au pilori. jours après le début de l’offensive du Têt dans
une rue de Saïgon, capte l’exécution sommaire
Document 7 d’un prisonnier en civil, les mains liées dans le
dos, par un officier sud-vietnamien. La brutalité
Ce document permet d’illustrer l’usage qui est de la scène choque l’opinion. Le photographe est
fait de la photographie du coté du Nord-Viet- récompensé par le World Press en 1968 et reçoit
nam. Ce cliché a été réalisé par le reporter Phan le prix Pulitzer l’année suivante. Cette image est
Thoan pour le compte de l’Agence vietnamienne largement utilisée par les pacifistes américains
d’information créée en 1945 au lendemain de pour dénoncer les crimes de guerre au Vietnam
la partition du Vietnam. L’agence et ses journa- et participe au retournement de l’opinion.
listes servent la cause révolutionnaire. Ce cliché
en témoigne. Il met en scène une jeune et frêle Au Nord-Vietnam, de nombreux photographes
accompagnent l’armée populaire. La photogra-
combattante vietcong armée, menant un prison-
phie est utilisée dans un but de propagande : il
nier américain, tête baissée. Il s’agit de montrer
s’agit de galvaniser la population, de célébrer
que le Nord-Vietnam, si faible en apparence,
l’héroïsme des combattants qui parviennent
va vaincre le géant américain (Le « Goliath »
à terrasser le géant américain. C’est ce que
américain vaincu par le « David » vietnamien).
symbolise la photographie (doc. 7) prise le 10
Les femmes tiennent une large place dans les
septembre 1965 : une combattante vietcong de
photographies de propagande du Nord Vietnam,
17 ans, Nguyen Thi Kim, transfère un soldat
comme pour souligner l’engagement total du
américain, Lai William A. Robinson, qui vient
peuple en faveur du combat communiste.
d’être fait prisonnier. La force de l’image est
telle qu’elle est choisie, en juin 1967, pour illus-
Corrigé des questions
trer un timbre commémorant la destruction du
1. La campagne du Têt fait plusieurs milliers de 2 000e avion américain par l’armée populaire du
morts et plus de dix mille blessés côté améri- Vietnam.
cain. Les photographies à la une des magazines 3. Eddie Adams interroge l’usage qui a été fait de
montrent le corps meurtri des GI’s. Un mois son cliché. Il rappelle en effet, dans une interview
après le début de l’offensive (qui ne prend fin parue en 2001, les circonstances de la scène qui,
159
Vers le bac
4. La guerre du Vietnam est le premier conflit
télévisé de l’histoire, vécu en direct et quoti-
diennement dans tous les foyers américains.
Jusqu’en 1968, aucun grand média ne met en
doute la légitimité du combat. L’opinion ne remet
pas en cause l’escalade militaire. L’offensive du
Têt, bien que repoussée, est un tournant car elle
montre les limites de la puissance américaine
et fait vaciller les commentateurs les plus opti-
mistes. La presse comme la télévision se font
l’écho des souffrances des GI’s. En avril 1970,
quand Nixon tente de justifier l’intervention au
Cambodge, l’opinion a déjà largement basculé
en faveur d’un retrait.
160
Entraînement A
nalysez la caricature « L’animal de compagnie du président », de Nate Beeler,
document 4 p. 205.
1. www.caglecartoons.com/viewimage.asp?ID={D2BEAA43-F1D8-4969-A284-A1C28DF1AA18}
161
Cet objet de travail conclusif présente les évolutions des moyens de s’informer et leurs consé-
quences positives et négatives. L’objectif est de conduire avec les élèves une réflexion sur leurs
propres habitudes et attitudes vis-à-vis de l’information. Ainsi, le premier enjeu développe un pano-
rama des évolutions, moyens et pratiques d’information en insistant sur la pluralité des sources et
sur l’horizontalité de l’information, sur la possibilité de chacun d’être un potentiel d’information. Il
incite à en découvrir l’utilité sociétale par l’exemple des lanceurs d’alerte. Cependant, l’information
large, horizontale est porteuse de dérives présentées dans le second enjeu. Il met en exergue les
méfaits possibles d’une information non vérifiée, non contrôlée, qui favorise donc les fausses infor-
mations, les théories du complot. Ce qui interroge en conclusion sur la nécessité et les moyens de
contrôle de l’information véhiculée par Internet.
Le jalon 1 illustre les évolutions des moyens d’information ; il insiste sur la nécessaire vérifica-
tion des sources, sur l’immédiateté de l’information horizontale et fragmentée, sur les influences
plus pernicieuses qui enferment l’usager du net dans une bulle qui lui fournit l’information qu’il
souhaite, sous un jour qui le flatte dans ses opinions. Il montre cependant qu’il est possible de
trouver des points de vue différents pour cultiver une pensée plurielle. Le jalon 2 présente les
utilisations pro-actives des moyens d’informations à travers les lanceurs d’alerte, le rôle joué par
les blogues en situation politiquement tendue ou encore les campagnes de groupes de pression.
Le jalon 3 conduit à s’interroger sur le fonctionnement et la propagation des fausses nouvelles et
des théories du complot.
BIBLIOGRAPHIE/filmographie/sitographie
◗◗ Livres et revues
-- P. A. Taguiev, Pensée conspirationniste et « théories du complot », © Le livre de poche, 2016.
-- F. Hartmann, Lanceurs d’alerte, Les mauvaises consciences de nos démocraties, © Don Quichotte, 2014.
-- J. Giry (dir.), « Les théories du complot à l’heure du numérique », © Quaderni, n° 160, 2017.
-- G. Kristanadjaja, J. Falzon, « Les paranos du complot », © Topo, n° 3, 2017, p. 6-31 (reportage BD).
-- A. el Aswany, J’ai couru vers le Nil, © Acte Sud, 2018.
-- G. Greenwald, Nulle part où se cacher, © J.C. Lattès, 2014.
-- « L’information à l’heure du numérique », © Cahiers français, n° 406, sept.-oct. 2018.
-- « Le cancer des Fake News. Comment il attaque la démocratie », © L’Obs, n° 2827, 10 janvier 2019.
-- « Complots. Théories… et pratiques », © Manière de voir, n° 158, avril-mai 2018.
◗◗ Films et documentaires
-- E. Bercot, La Fille de Brest, 2016, 2h28.
-- W. Karel, Opération lune, 2002, 52 min.
-- J. Goetz, « L’intox, c’est nous. Un voyage au cœur de la désinformation », avril 2019 (série
documentaire en six épisodes de 7 à 12 minutes : www.france.tv/slash/l-intox-c-est-nous/).
◗◗ Sites internet
-- Orienter les recherches vers des sources fiables : Décodex : www.lemonde.fr/verification/
-- Conspiracy Watch, L’observatoire du conspirationisme : www.conspiracywatch.info/
162
163
164
L’enseignant interrogera à la fois sur les objec- propose une pluralité d’analyses d’informations
tifs et les méthodes de diffusion d’informations et de points de vue. La classe peut, en allant sur
directes et immédiates, mais aussi sur la mani- le site, trouver une pluralité de sujets et d’opi-
pulation possible ou la simple mauvaise lecture nions exploitables en petits groupes.
des événements présentés.
Éléments pour traiter la consigne
Document 5
« L’horizontalisation » de l’information présente
Le document montre comment nous sommes de nombreux avantages : elle permet notamment
influencés par des algorithmes qui propagent en à tous les citoyens de s’informer et de participer
priorité sur nos écrans les informations et opi- directement aux débats de société en diffusant
nions qui nous plaisent. Il questionne donc sur leurs opinions. L’information horizontale
la pluralité de l’information et l’aptitude à aller apparaît pourtant comme dangereuse, car elle
chercher un son de cloche différent de celui qui permet la diffusion de fausses informations
flatte. Est-on conscient des orientations systé- (fake news) présentées comme équivalentes aux
matiques proposées pour nous plaire et nous autres, le système donnant également naissance
renforcer dans nos convictions ? Peut-on avoir à des théories extrémistes (théories du complot)
une opinion nuancée et plurielle en utilisant des contre lesquelles il est difficile de lutter. C’est
moyens dont la programmation est conditionnée bien la démocratie et la liberté d’expression qui
par nos goûts ? sont les principales problématiques dans ce
nouveau système d’informations.
Document 6
À partir d’une réflexion collective en classe, les
Ce document donne un exemple de site d’in- élèves peuvent être amenés à construire un
formation dont la logique est de présenter sur tableau présentant les avantages et les inconvé-
chaque sujet des avis contraires. Le Drenche nients d’une information fragmentée.
Avantages Inconvénients
- Accès rapide à l’information, 7/7 et 24/24 - Augmentation des contenus non fiables
- Possibilité de faire circuler l’information - Confusion entre les vraies informations
rapidement (copier-coller) et les fake news
- Possibilité de participer à l’information - Développement des théories du complot
et de donner son opinion
165
(NSA). Son « alerte » l’a conduit à être considéré caché car rebutant dénoncé par l’association
comme un traître par les autorités de son pays. comme cruel et indigne envers la vie animale.
Snowden est-il un homme droit qui dénonce une
Les associations ne peuvent bénéficier du sta-
atteinte aux libertés ou est-il coupable de trahi-
tut de lanceur d’alerte. Seuls le peuvent des
son envers son pays ? Les écoutes pour la sécu-
employés dénonçant des pratiques selon un pro-
rité nationale doivent-elles avoir des limites, et
tocole très précis.
si oui lesquelles ? Il convient de poser le débat
pour en montrer la complexité et expliquer à Document 4
quoi s’expose le lanceur d’alerte.
Ce document est composé d’extraits de la loi du
Document 2 16 avril 2013 relative à l’indépendance de l’ex-
pertise en matière de santé et d’environnement
La campagne présentée ici a été réalisée par
et à la protection des lanceurs d’alerte. Ce texte
le parti écologiste Europe Écologie les Verts.
de loi définit ce qu’est un lanceur d’alerte en
Comment protéger les lanceurs d’alerte ? La
rappelant le devoir de chacun de dénoncer des
question se pose avec acuité, particulièrement
malversations ou situation dangereuses pour le
dans le domaine de l’environnement où les
public (Art.1) ; mais aussi qui permet de préciser
scandales écologiques et sanitaires se multi-
les droits d’une personne qui est attaquée pour
plient (sang contaminé, Mediator, Dépakine,
avoir tenté de témoigner contre son employeur
Lévothyrox, bébés nés sans bras, amiante…).
ou un pouvoir dont ses intérêts professionnels
La question ne concerne pas que les partis poli-
sont essentiellement dépendants (Art. 11).
tiques mais également la société civile organi-
sée (SCO). Lors de la rédaction de la loi sur les De nombreux pays ont mis en place une loi de
lanceurs d’alerte en 2016 (loi Sapin II), les ONG protection des lanceurs d’alerte (Canada, États-
sont intervenues auprès du gouvernement pour Unis, Suisse, Belgique…), mais les niveaux de
élargir la définition et ainsi permettre la créa- protection restent très disparates selon les
tion d’un statut protecteur plus global qui inclut pays. Plus récemment, en 2019, le Parlement
la dimension environnementale. européen a adopté de nouvelles dispositions
pour encourager le signalement d’infractions à
Les signalements des lanceurs d’alerte doivent
la législation européenne et protéger les lan-
cependant se faire dans un cadre législatif très
ceurs d’alerte. Cette nouvelle législation doit
strict, sous peine de s’exposer à des poursuites
cependant faire l’objet d’une transposition dans
judiciaires. Voir la page dédiée sur le site de
le droit de chaque État membre dans un délai de
Transparency International (et notamment le
deux ans1.
schéma sur les trois étapes à respecter pour
lancer une alerte : https://transparency-france. Document 5
org/aider-victimes-de-corruption/lanceurs-
dalerte/). Le document montre comment, au-delà de la
censure, Internet peut-être un moyen d’infor-
Document 3 mation fiable et sérieux.
– Remarquer que le blog collectif indépendant
Un exemple de campagne de témoignage et de
est un site d’information qui est alimenté par
sensibilisation. L214 est une association qui
des journalistes professionnels.
dénonce la maltraitance animale et multiplie
– Signaler le fait qu’il y a par une remise de prix
les révélations sur les mauvaises pratiques de
une forme d’adoubement du site par un orga-
l’élevage industriel à travers de nombreux coups
nisme international de journalistes.
d’éclats médiatiques. Certains de ses militants
ont été condamnés par la justice. Le but de la 1. Document complémentaire à étudier : C. Schoen,
campagne présentée ici est de mettre un terme « L’UE offre un statut plus protecteur aux lanceurs
d’alerte », © La Croix, 12 mars 2019 (www.la-croix.com/
au broyage des poussins mâles dans les éle- Economie/Monde/LUE-offre-statut-protecteur-lanceurs-
vages de poules pondeuses. Un exemple de fait dalerte-2019-03-12-1201008221).
166
– Réfléchir à ce que peut être la censure dans puissances occultes (les « forces de l’argent »,
le cadre d’un État et à quoi s’exposent les les Juifs, les francs-maçons, les Illuminatis, les
blogueurs qui continuent à informer. bolcheviks, les démocrates, les capitalistes, les
mondialistes, les services de renseignements,
Éléments pour traiter la consigne etc.). Pourquoi rencontrent-elles autant de suc-
cès ? Par besoin d’explications qui satisfont celui
L’ensemble des documents présente donc Inter- qui les reçoit dans un monde complexe et anxio-
net comme un outil de démocratie qui peut gène. La part psychologique du phénomène est
permettre d’informer par-delà les pressions, importante. Le complotisme permet d’expliquer
la censure et les systèmes de surveillance. Il autrement ce qui déplaît et de conjurer les peurs.
ouvre donc un espace de démocratie qui n’est
pas sans danger pour ceux qui témoignent et Document 2
alertent. Cependant, dans une logique démocra-
tique et compte tenu des exigences croissantes Ce document montre que chacun d’entre nous a
de transparence et de droit à l’information, des entendu et a été plus ou moins influencé par des
éléments de protection juridique sont peu à peu théories complotistes.
instaurés. – Remarquer que de nombreuses théories figu-
rant dans le tableau sont connues des élèves
L’opération « Collateral Freedom », initiée par et de l’enseignant.
Reporters sans frontières (RSF), est à ce sujet – Étudier les taux d’adhésion.
un bon exemple. Elle a permis de débloquer de – Montrer que, sur de nombreux sujets, le com-
nombreux sites censurés par les gouvernements plotisme imprègne nos sociétés.
de pays dans lesquels la liberté d’expression
est limitée et les libertés de la presse réduites Document 3
(Chine, Arabie saoudite, Iran, Pakistan…). En
Chine par exemple, le China Digital Times, inter- Plusieurs formes de complotismes sont illus-
dit par le pouvoir central de Pékin, a été remis trées sur le dessin : les symboles francs-
en ligne grâce à « Collateral Freedom » et au maçons, les reptiliens, les « forces de l’argent/
soutien d’un des laboratoires de recherche de de la finance » ou les « capitalistes », les sio-
l’Université Berkeley en Californie. Voir https:// nistes, les satanistes...
rsf.org/fr/actualites/collateralfreedom-rsf- Ces forces obscures sont toutes appuyées sur
debloque-22-medias-en-ligne-censures-dans- une carte du monde, évoquant l’idée qu’elles
leur-pays. dirigent le monde en sous-main. L’esprit du des-
sin est celui d’un monde dangereux de conspi-
rationnistes manipulant le monde, comme dans
JALON 3 – Les théories du complot
une caricature de film (Austin Power).
p. 248-249
167
est gros, plus il attire l’attention. Il faut insister travail par groupe, les élèves classent dans un
aussi sur le mécanisme de répétition qui installe tableau les principaux points communs pour
l’idée fausse comme une petite musique qui à la chacun de ces trois éléments d’analyse.
longue rend sensible à l’argument. Par la répé-
L’enseignant pourra s’appuyer sur l’analyse des
tition, par son audience large, Internet favorise
les fausses nouvelles et le complotisme. théories du complot présentée sur le lien sui-
vant : https://theoriesducomplot.be/Theories-
Éléments pour traiter la consigne ducomplot_Livret_Pedagogique.pdf.
Un autre travail peut consister à rechercher les
Les élèves peuvent travailler sur plusieurs
moyens de lutter contre les théories du com-
exemples de complotismes : les attentats du
plot. France 4 propose à ce sujet des vidéos
11 septembre 2001, le premier homme sur la
pour savoir comment « démasquer les intox »
lune, la mort de la princesse Diana, les traînées
et pour accompagner l’esprit critique vis-à-vis
de produits chimiques (« chemtrails »), les
hommes « reptiliens » qui dirigent le monde, les des informations que l’on reçoit (www.france.tv/
attentats de Charlie Hebdo en 2015 ou encore slash/l-intox-c-est-nous/). On peut également
plus récemment l’incendie de la cathédrale utiliser le « décodeur » du Monde qui permet
Notre-Dame de Paris en 2019. Le travail peut de vérifier la nature des informations (www.
par exemple consister à identifier l’origine des lemonde.fr/les-decodeurs/article/2015/11/14/
différentes théories, les techniques de diffusion attaques-a-paris-les-rumeurs-et-les-intox-qui-
et les modes d’argumentation. À partir d’un circulent_4809992_4355770.html).
168
Depuis 1881, la liberté de la presse est reconnue par la loi. Néanmoins, la liberté de l’information n’a
pas toujours été garantie. Elle s’est même trouvée contrôlée par l’État à des moments bien précis.
La récente convocation par la DGSI, fin mai 2019, de journalistes ayant enquêté sur la vente d’armes
organisée par la France en faveur de l’Arabie saoudite dans le conflit avec le Yémen interroge sur
les limites de la liberté de l’information et le contrôle de cette dernière au nom du secret défense.
On peut alors se demander dans quelle mesure la liberté de l’information peut être soumise à un
contrôle ? (ou dans quelle mesure a-t-on le droit de tout dire/révéler ?) Il convient alors dans une
première partie de s’interroger sur le droit à l’information ; avant de démontrer qu’il s’agit d’une
liberté souvent encadrée.
169
La liberté de l’information, le droit d’informer et d’être informé sont garantis et nécessaires au sein d’une
démocratie. Ces libertés et principes fondamentaux sont pourtant de plus en plus malmenés, ce qui inter-
roge sur les limites de la diffusion de l’information.
170
Sujet 2 A
nalysez l’article de presse « Sur Internet, l’invisible propagande des algorithmes »,
document 5 p. 245.
171
172