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L'Éruoe DE LAvARrarroN :
DIALECTOLOGIE ET ETHNOLINGUISTIQUE

L'étude taditionnelle des dialectes visait à démontrer que le patler


en question n'éta:tt pas moins digne que la plus influente langue ltttératte
de i'époque. Il s'agissait donc de grammaires normatives, 9û
déterminaient de quelle façon il fallait écdre le dialecte et ne décrivaient
pas la façon dont on parlut effectivement. Au contraire, la dialectologie
moderne (à partir de la seconde moitié du XIX" siècie) est, quant à elle,
descdptive.
En taison du caractère local de la dialectologie, il va de soi qu'on
étudie normalement le pader d'une seule localité : le livre sur le dialecte
d'Altamrra (1988) de Michele Loporcaro en est un bon exemple, mais
on pourait également citer d'autres travâux. Il existe également des
études qui recouvrent une région entière, comme la recherche, devenue
désotmais classique, de Heiruich Lausbetg sur les dialectes de la Lucanie
méridionale (1,939). Chacun de ces travaux illustre Ie fatt que les
problèmes posés vont en Éalité souveflt bien au-delà de l'espace étudié.
Même des études recouvrânt ia Romania entière sont réalisables, mais
dans ce cas, la recherche se limite à des phénomènes isolés, comme la
diphtongaison ou le redoublement phono-syntaxique, et ne prend pas en
considération toutes les variétés dialectales, mais une sélection de celies-
ci, selon leur importance présumée.

a. Méthodologie

Ce qui catactértse Ia dialectologie n'est donc pas l'étude d'un seul


dialecte, mais la méthodologie employée. ceile-ci est basée sur la récolte
directe des données par le chercheur, sur le terrain. Bien siu, la
connaissance préaIabIe de toute la bibliographie antédeure sur le sujet est
nécessaire. Les données à récolter sont généralement des traits du parler
et non de la langue écritq ou de ra httêratute dialectale. Le chercheur,
après avoir choisi rarocahté ou la région à étudier, élabore des enquêtes
personnelles, puis transcdt le dialecte local (de nos jours, il enregistte
d'abotd sur bande ou sur disque) à travers
ies réponses à ses questions récoltées et locarisées. voici un autre
spontanée, enfin, érudie et systérnatise passage de ra même étude de
::^y?: ll_.,.:""."1sation
donnees amsi récoltées.
les coromines. Après ia définition < (ar)ràcar.
,pe.T"t"m";;,;;;, rocher isoré
certains choix peuvent être très déricats. Ir et indépendant des âutïes'>, re cherch.r*
arrive que la rocarité p^ré.ir" q,r. drï, Ies villages.de
choisie ne révèle rien de nouveau ou Beg6s et vierha,. r'on d.it nika
que res rocuteurs soient mal .Grr,:', rc'esi-à-ao. àdno1 ; il etuntt ensuite
sélectionnés cat non représentatifs ou la différence entre arràca et calbau 'pi.rt., .ui]lorr] (a't^ différence de
étrangers à ra rocaltté; ra l'arràca,Ie calhaa peut se porter rr,".
transcription peut se rév éIet approximativ"
l,rrrïlyr" irraeqrr"t". ù" main), u.r"rtiiqJà n.dro, arràca
Pat 7e passé, on cherchait à étudier "t peut être synonyme di pedra, et donc indiqrr",
le diarecte dans sa forme q.r'.lqrr" chose de
supposée pufe ou archarque. on choisissait beaucoup plus perit qu,un rocher, er
à cette fin des sujets aussi que le mot i.", p;;;;s référer à des
âgés et incultes grandeurs intermédiaires en,,e la piede.et-r.-to.i.,
3"." possibre, qui ne possédaient pas d,autres t i"n", rr ternine par
connaissances linguistiques. On Éahsa un commentaire sur la gtande étendue
plus àrd qrr. l.-di"I.cte (pur) de la forme no_.'
était une illusion et quT n'existait nule part cette constatation sur re parler d.'une petite "n
de parfaite nomoger.Jfei uulrée'pyrénéenne nous
peffnet d'exemplifier les éhrrles à grande
ptésent, Ie dialectologue vise donc à recueillir
toutes les modalités d.,un éÀe[e. tI ,"rr'iàe de vérifier
parler local, selon l'étude des vadations dirtopiq,r., que dans de larges zones de ra Ro"rna
r.da re r- rmtial;;;;r""onciation
drastratique et renforcée, qui donne souvent lieu à
diaphasique' La diarectorogie est ainsi d..r"n,i.'d"
sociolinguisttque (cf. infrQ. Alors que la seconde
pio, en plus France, on ne trouve cette prononciation
une
fol-e d" -W";;_.ffi, ffi;
étaitnéede l,étude de la qrr,éi grr.orr, dialecte
variété des parlers urbains et que la première sud-occidental (ailleurs, moirri à l,éoo.,,.,"-r.^:";^ ï^-:
,,o..'p*-à. p.tit. vilages, ", #;:J#ï1i"H3,':::I"Y;W^Ï:;
ui,'urùe0,,"-,,à.,JJ,,ffi
leurs méthodologies ont comm"'é à converger,
à pat bien srir les toute la péninsule ibérique, en sarde
différences dues à la diversité des deux situations. ainsi que d;r ;;. p-tie de l,Itarie
du. Sud, particulièrement en Sicile,
Le schéma de présentation des tésurtats est toujours
resté, depuis
en carabte méridionare et dans le
un siècle et demi, celui des grammaires historiques Salento. Mais ce trait se manifllt_e
égalernent dans tout re Midi de l,Italie,
, i" ,^ppor, avec Ie jusqu'au sud de la Toscane, r'omËde
système latin pour la phonétique et ra phonologie, et les Marches, avec des mots
t", gr;â.s catégodes comme arrigordare, a*obbare; on ajoutera
molphologiques (ro-,. rr:rb,., etc.j; les encore que des formes comïne
.
syntaxiques; le lexique. Ainsi, lrirr.ipr,r* phénornènes robba, an'ipo'ttl' atramu) a/,'wa, nrrisponnere
sont fort répandues et que d.ans
dans l'étude deJoan câ;;-i,,lr, (1991) sur
le dialecte du va-l dâran, dans les pyrénées les régions extrêmes, chufre'r- i^oaest
(dlalecte a. typ" g"rcon dans renforcé. À r,isso. d,un examen
plus large, le phénomèrr" àr, val dâran
poJitiquement espagnoie), on rrouve un pangr^phe se révèle donc de large diffusion.
1rn" lé9..1 dans L'expJication reste incertaine.: dans la
lequel on lit (nous traduisons àn-fr^nç'^ir re péninsule ibérique et en gascon, il
catarana" æit.;T existe une contigurié avec l'ancienne'
langue brrq":;-q* présente re
même phénomène, dès rors considéré
Tout L en finale de syllabe devient u: sau I comme issu du substrat. Mais res
SAL, ceu { n'ont iamais été présents en Sardaigne
CAELU, hauda < FILDA. Après une voyelle postérieure ,ïnm Jr"r'f, péninsule
fc'est-à-dire o et u], le résultat du r se fond avec Ia
""
voyelle : CULUS > cu Dans tous les cas, i'étude d'un réseau
lqut se prononc e kJ], IULTCEM > de dialectes mène à ra
constatation de
différences et de ressernbrances. Si
pude fc'est-à-dire pltde], vurvn , uop,.t..- ;;."
1p. 39; cela
revient à dfue que si le u résiltant de 7 se trouJe géogtaphique une ufl. sépare, par exempre, res""locarités,"rconservant
une carte
dsÂèr" , l*
Ie r- intnal rotr t"rrior.é
ou a, iI disparaît absorbé patlavoyelle contiguë). r" renforcent, on Jstrngue deux
zones opposées. La Jigne "t.Ë["r'q"i
de séparaùon entïe ces airss est une
(cf. figure 11). L'étude d'un résàu isoglosse
Les études dialegtorogiques ne délaissent jamus de dialectes p";;l;;i"r.r' grand
1e 1exique, même si nombre dtsoglosses, qui se supe{posent
leur objectifn'est pas l'éhbtration d'un dictionnaire. âssez rarement : en générar, ra
Mais le but êtantla carte montue un enchevêtrement
mise en évidence de rz vanatton, res variantes dlsoglosses allant dans tous les sens.
lexicares sont eles aussi problème des limites dialectales ," pori Le
dorr..

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cettaines régions d'Amérique telle que l'Argentine, I'ancien aos a templacé
b. De l'étude des formes à l'étude des usages
tti, ce q,a a génêré le système suivant (on parle de uoseo) '.

L'étude des dialectes s'intéresse non seulement âux formes, mais


aussi à leurs usages. Considérons le cas des pronoms petsonnels dans les
dialectes italiens, dont 1es formes 5qn1 rlitectement issues des formes forme ordinaire forme de politesse
tJsnd
latines et ne ptésentent pas de nombreuses patticulzntês. I'examen de sg. u0s

leuts usage, r-r'"t est pas moins intétessant, comme ceux des profloms pl. Llstedes

aliocutifs par exemple. Jusqu'au III' siècle apr.. J.-c., en latin, on


employait Î" ptotto- tu et lz 2" petsonne du singuliet des vefbes, quel c. Ét.tde du lexique et ethnolinguistique
q". ftti l'interlocuteur. Plus tard, la fotme tu a êté réservée aux pairs alors
qu. ,0, était utilisé pour s'adresser à des supérieurs. Ces situations se sont L'étude du lexique dialectal Peut également connaître urr
partiell.ment -rirrt"tt,res dans ceftains dialectes du secteur apennin développement ethnolinguistique. En effet, il suffit fafement de ttaduire
l,étendant de la province de Cosenza à l'Ombrie et aux Marches le mot dialectal pâf un mot de la langue standard; des spécifications
méddionales, avec un fort enracinement dans les montagnes de la Sabine supplémentaires se révèlent bien souvent nécessaires. Voici un exemple
et des Abruzzes, où lu est utilisé Pal et pouï tous. Pout montret de la des dialectes de type lombard de la Suisse italienne : à côté de bràca 'broc',
considétation à l'intedocuteuf, on utilise une forme allocutive de respect, iIexiste une forme bràca'têcrpient de bois à douves'. Le premier teme
mais toujouts âvec la deuxième pefsonne du singulier : Vassignuria, duue nécessite ufle explicâtion, car le fait qu'il indique 'un broc de potede qui
uai ? 'M'onsteult, où vas-tu ?' ou encore, dans le dialecte de Bari était utilisé pouï se laver dans la chambre lotsqu'il n'y avait Pâs encofe
(Pouilles) : Segneri, sà c@a Tosla!'Monsieut, tu es bien têtu'. Le u2i'Yoas', d'eau coutante et de bains' n'est pas évident. Le second, quant à lui, a
deuxième pefsonne du pluriel, est lâ fofme de politesse non seulement à besoin d'une explication encofe plus détaillée, car il peut s'agir soit d'un
Naples mai, aursi en calabre méridionale, dans le nord des Pouilles et 'seau en bois à douves pouf le lait (utiJisé dans la ftaite)', soit d'une 'cuve
égui"-"rrt en Corse et dans le Canton du Tessin. Ailleuts dans le nord, basse en bois à douves où on tamise la fatne ou le beure' ; en outte, i]
,ii ."t indistinct, comme le uous du français' Jusqu'il y â peu (quelques fecouvfe parfois le sens de 'baquet pout consewer le beure ou le
décennies), la forme uoi resta:tt dans de nombreuses tégions une forme de saindoux fondus'. Dans le dictionnaire des dialectes de la Suisse italienne
respect pour les personnes âgées, les parents et même entre époux' (il Vocabolario dei diaktti della Suiqpra italiana), ces définitions sont
Aojo.trd;hoi, tr,/ s'est gênêrahsê entre collègues et sultout entre jeunes, au âccompagnées de dessins. De cette façon, on peut voir que le seau a une
détriment de la forme de politesse Iti, dont le pluriel, du reste, est aoi et hauteur deux fois supérieure à son diamètre, Ia cuve une hauteur bien
forme tessentie comme trop fotmelle. inférieure au sien, et que le ptemier â une poignée alots que la seconde
'pas /oro,
L'espagnol médiévaL fatsattla distinctiorr entïe Tù et uos. Pat Ia suite en a deuxtt (fig 9).
app,,îùt une nouvelle forme de politesse, Usted < VaesTra merced. Ce tlpe d'études se développa au début du XX'siècle au sein d'une
L;espagnol moderne présente le système suivant : méthode appelée Wtiner und Sachen 'mots et choses' et fut ensuite étendu
des temes désignant des obiets à des tefmes abstraits illustrant
forme otdinaire fotme de politesse I'idéologie et les valeurs d'une culture. Ainsi s'est développée une
sg. fîi UsTed dialectologie qui reconstuisait non seulement les formes d'exptession
pl. uosotros (Jstedes mais également les contenus de la culture d'une communauté paysanne
et artisane, assez diff.êtente des cultures urbaines et bourgeoises. Il s'agit
Cependant, en Andalousie et en Amérique, on emploie toujours Usfedes
quel que soit le fâppo1t avec I'intetlocuteut. En outre, dans
17 On pourrait croire que les dertx broca sont un même mot recouvrant deux
"o'pl*i.l, significations ; toutefois, broca'réctpient de bois' est le féminin de bninh, bronh'Éciptert
de boi.s à douves', dont l'origine est obscure.

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donc d'une linguistique ethnographique, proche de celle qui set à décrire
les langues et cultures extTa-européennes.

12.
L'Étuoe DE L.avARIATIoN :

LES ATI-AS LINGUISTIQUES

Vets la fin du XIX' siècle, en Allemâgrre' on considéra que la


question de l'existence des frontières dialectales pouvait être résolue par
des enquêtes systématiques qui déterminerafent la distribution dans
l'espace de phénomènes linguistiques donnés. La technique de
confection des atlas linguistiques (élaborée plus tatd, surtout grâce àJules
Gilliéton, en France, et à ses élèves l{ad Jaberg et Jakob Jud, en Suisse)
fepose suf ce PfinclPe.
A$ Un atlas linguistique est un recueil de cartes au fond permanent : il
Fig. 9 - Btàca dans les dialectes de la Suisse italienne. Le sens général s'agit de la reproduction schématique et muette (sans noms de localités,
est 5récipient de bois à anses', mais celui quton utilise pour la traite du de fleuves, de montagnes, etc.) de la tégion étudiée, avec la seule
lait ala forme A), celui que I'on utilise pour tamiser la crème ou le beure indication (en général paï un chiffre) des lieux dans lesquels fenquête a
a la forme B).
été conduite. Les câïtes sont onomasiologiques, c'est-à-dire qu'elles sont
basées sur des concepts. Chaque concept corespond à une question
posée de la même façon dans toutes les zones étudiées, sur la base d'un
questionnaire prédéterminé. Chaque carte reporte les variantes
linguistiques qui expdment le même concept dans les diffétents lieux
étudiés. Une carte peut donc repfésentef tantôt les différentes formes
d'un même mot - si ce mot est la seule exptession exprimant le concept
en question - tantôt les différentes formes de plusieurs mots. Les
concepts sont choisis de façon à ce que les mots obtenus documentent
les variations phonétique, motphologique, lexicale et patfois syntaxique.

a. Les étapes de la confection d'un atlas

La confection d'un atlas iinguistique implique le choix d'un cettain


nombre de questions, qui constitueront le questionnaire. Le nombte de
questions dépend du temps à disposition (a dutée d'une enquête est
conditionnée pàt la disponibilité du sujet interviewé ainsi que par la
disponibilité de temps et d'argent de celui qui la mène). Les concepts à
explorer doivent correspondte à la culture de l'endroit choisi (il est

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Itnguistzque romafte / 2. L'étade de la uariaTion : les aTlas linguistiques

inutile d'enquêter sur la rriticulture dans un endroit où l,on ne cultive pas spécialement paùante: de nombreuses formes se répètent d'un point à
ia vigne ou sur les noms de poissons en haute montagne) et éclairei le I'autre sans grandes différences. Mais il faut savoir lire ces cartes, lès
maximum de phénomènes linguistiques. déchiffret. ci-dessous, nous donnons un exemple corrcret de catte
une fois que le questionnaire est préparé, on choisit les zones de linguistique, tiré de I'Adas linguistique italo-suisse (AIS), dont le titre
i'enquête. En théorie, elles devraient êLe- nombreuses mais, de cette original est Spracb- and Sachatlas ltaliens wnd der Siidschweiq$tg. 1,0).
manière, la recherche deviendtait, en pratique, infinie. L,enquête'r doit
donc choisir de façon réaliste un nombre limité de localités. A' débot, b. L'interprétation des cartes
on privilégiait les localités isolées et lointaines, câï on recherchait surtout
les formes linguistiques archarques. plus tard, on se rendit compte
que les Gilliéron tnteryrétatt les cartes selon des métaphores géologiques.
grands centres et les voies de communication étatent tout aussi Les innovations successives s'y présentent donc cornme dans le domaine
importants. on pensait également que ies points choisis devaient être de la géologie, où les stïâtes supelposées et les fractures successives sont
équidistants, àva'nt de prendre conscience au rait que la distance entre facilement repérables, car elles séparent (rendent non continues) des
deux localités ne se mesure pas uniquement en kilomètres : des localités strates alrparav^nt continues. Envisageons par exemple 1a distdbution
ptoches peuvent être isolées et des localités éloignées peuvent entretenir
des résultats de F- initial dans la péninsule ibédque. Le portugais et le
de nombreux contacts. La construction du reseau^ des localités est catalan ont conservé cette consonne initiale latine (nunxg ) port.
entreprise déltcate et dépend également des possibilités réelles de forno,
cat.forn); en espâgnol, par contre, elle a dispara (horno). La strate la plus
l'enquêteur (certains lieux sont difficilement accessibles, n,offrent pas de anci.enne correspond naturellement à Ia conserv-ation, alors que
possibilités de logement, erc.). l'innovation F > h> A a rompu avecla continuité de cette strate, enh
Il faut ensuite choisir les sujets. plus un atlas est conséquent et le divisant en deux espaces distincts. En effet, 1es documents nous
questionnaire riche, plus il est difficile d'uiliser deux sujets, oL plus. Le apprennent qu'au Moyen Age, les dialectes romans de I'Espagne
sujet doit être enclin à se laisser prendte au
)eu, il doit maîtriser son musulmane conservaient ce F- initial. Seul le castillan a lentement
dialecte, ne pas (oo peu) être influencé px d'autres vadétés (à généralisé l'aspiration, puis la perte du F, évolution opérée à patir d'un
commencer patra iangue standard). Il faut donc qu'il ait très peu voyagé petit espace au nord.
et qu'il soit peu instruit. Il doit également ,rrr. prononciation Depuis les premiers atlas, on observe que les isoglosses qui
représentative de la cofrrmunauté à laquelle il".ràit
appartient-. Il n,est pas séparent l'espace dans lequel un phénomène se réalise de l'espace où ce
toujours simple de trouver un tel sujàt dans le-s temps impartis même phénomène ne se réalise pas (ou se réalise différemment) se
ien
génêrzl, quelques jours, ou, parfois, un seul jou). supelposent rarement. Il peut même ardver et le cas est assez fréquent
une fois que le sujet a été choisi, le questionnaire doit lui être -
soumis de façon appropriée. Les questions sont inditsç1ss, pour ne pas
- qu'au sein d'une même localité, un phénomène donné (par ex., le
passage C+" > ttjl >
que, dans sa réponse, le sujet se limite à répétet la question. 11 importe
concernés; dans ce cas, il faut donc tracer une isoglosse pour chaque
aussi de déterminer au pÉaIable si ie sujet et/ou l'enquêteur ont le droit
mot. De façon gênétale, cela confirme i'hypothèse de l'inexistence de
ou non d'apporter des corrections (Gilliéron, par exemple, ne le ftontières dialectales nettes et de I'existence, pâr contïe, de conTinua
permettait pas). Les réponses sont transcdtes en aiphabet phonétique, de
^porr, dialectaux. on entrevoit également que le changement linguistique se
façon à restituer le patrer de manière adéqaate. lLsp..t diffuse non seulement dans l'espace (d'un endroit à I'autre), mais aussi,
ethnographique de l'enquête, il se peut que des objets ou des coutufires
au même endroit, d'un mot à l'autre, paï ( contagion > (ou plus
locales soient documentés via des dessins ou des photographies.
exactement diffusion lexicale), jusqu'à se généraliser lorsque tous les
Lorsque tout le matétiau a été Écolté, on confectionne les cartes :
mots potentiellement concernés sont touchés.
sur chacune d'entre elles, un seul éIément tiré de chacune des enquêtes
menées. À première \,'ue, une carte d,atlas linguistique n,est pas

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En France, l'espace dialectal est fortement influencé par le ptestige
(et donc pat la capacité de diffusion) de la iangue des grandr ..trtt"., à"
telle sorte que la diffusion des innovations ne passe pâs touiours d'une
localité aux localités environnantes, mais plutôt d'une localité de grand
prestige à des localités de prestige moyen (même si elles ne sont pâs
contiguës) et finalement à la pénphéde. Jules Gilliéron, et surtout l(arl
Jaberg, ont constaté que Ie panorama dialectal français était déterminé
par l'influence de Paris et, à moindre échelle, par celle de villes cofnme
Marseille, Lyon ou Bordeaux. L'espace qui en résulte n,est pas composé
d'espaces compacts isolés, mais d'une aire de fond homogène, patsemée
d'aires mineutes d'innovations.

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Hî"" , [:l;i,, , [:l1:. ffij; * [::. b*,
Fig. 11- L'isoglosse La spezia-Rimini tracée sur la carte de fond de I'AIS.
En téalité, six isoglosses distinctes sont tracées (voir la légende en bas de
la carte), qui coihcident pour la plupart. on peut p"r apercevoir
Fig. 10 - une partie de carte de I'Atlas linguistique italo-suisse : r,Italie deux isoglosses qui passent du nord au sud et opposent "ontr.les dialectes
du notd-est et du centre sur la carte Iv, 820 'le marchét (on peut observer gallo-italiques (à I'ouest) des autres parlers (à I'est).
le passage des formes septentrionales avec lénition aux formes centrales,
sans lénition).

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IJrugzivique romane

c. Atlas nationaux et âtlas régionaux

À I'h"rrr" actue[e, il existe des atlas Jinguistiques nationaux


pour
7'Ita.te, Ia France,la Roumanie, l,Espagne,
h CËiombie, Ie Mexique. Mais
on peut très vite s,apercevoir q,r,.r, atfas naùonil. à_porr" 13.
d'importantes ,
limites ; re nombre d'enquêtes est forcémenf
peu élevé en
L'Étuop DE r-a vARrATroN :
regard.de la superl:i" et les questions ne peuvenr pas toujours I.A SOCIOLINGUISTIQUE
1".p1ys,
ète adaptées à la diversité dés .ort.*.s'locales. pour tenter d,y remédier,
les efforts ont été dirigés vers les atlas régionaux
: il en existe pour
pfesque toutes les régions françaises, poù d"
nombreuses régions
d'Espagne et quelques régions itariennes.^I1 a. L'impulsion des recherches anglo-saxonnes
est vrai qu,un atJas régonar
permet une plus grande densité des recherches et
une spécificité des
questionnaires. par contre, il réduit ra companblité Les linguistes ont vite compris qu'il ét,ot assez difficile de
des r?surtats entre
régions, même lorsque res atlas sont réarisés^ ,elon
un schéma cornmun, représenter la variation diastratique, et errcoïe plus la variation
comme c'est le cas err Ftance. diaphasique, sur une carte bidimensionnelle. cependant, à leur origine,
^1"
les atlas - nous l'avons r,'u étaient basés ,,r,
d. Comment représenter lavatiation non diatopique
- pdncipe
^de d,une Jeule
enqu^e1e pour chaque endroit et l'envergure même teiles entreprises
?
empêchait de multipJier les enquêtes. Iir tt" disposaient donc ni du
matériau, ni de la méthodologie nécessaires pour rtr" étod. de ce
genre.
diatopique. Quand on décida d'inclure lei grands La solurion à ce problème ne fut pas découverte parralingiistique
centres ubains dans les
atlas (après GilJiéron), on constatu qrrè ceux-ci ne romane, mats pat des recherches anglo-saxofrnes. c'est dans ce cadle
pouvaient ê*e
représentés de façon adéquate par une seule que, depuis 1950, s'est développée la sociolinguistique, orientée vers
enqoet..;,ia etJaberg en
fuent parfois réaliser deux pour chaque grand, centre l'étude de ra variaaon dans les grands centres urbains .t*"
itarien, mais cela New york.
reste quand même insuffisant. Ensuite, on se rendit Les, premières enquêtes sociolJnguistiques adoptèrent les méthodes
compte que le de la
problème de la vaÀaaon interne se ptésentait également sociologie (démarche impensabie dans re dàmaine de la linguistique
dans les petits
centres. Dès lors, comment recueilfir ces donn?es européenne) et la distinction entte mâcro-enquêtes (à grande écheile,
pouï constituer un
atlas, et cofirment les représenter suï une câïte basées sur un grand nombre de sujets des .àtairr.r'ori des
tentative la plus réussie jusqu'à présent est cene
bidimensionnene ? La - milliers
observés à travers des questionnaires très simples) et micro-enquêtes -
de |atlas du Mexique, qui (à
les pourcentages des roLrtior* concuffentes
au sein de la même plus petite échelle, avec peu de sujets observés au moyen de méthodes
.fourrut
localité. Dans ce dornaine, les potentialités tridimensionnelles beaucoup plus précises).
de
l'ordinateur sont encoïe à exploiter. Elles sont en train
d,être explotées Dans le premier cas, l'échantinon étudié doit représenter
dans le cadre de la réarisation d'un atras tégionar adéquatement I'univers coffespondant: les sujets examinés doivent
de la Sicile. Mais re
problème est méthodologique, comme norrs lJverrons
plus loin.
respecter, proportionnellement, les caractéristiques (sexe, àg",
instruction, etc.) de la population dans son ensemble. Les recherches
exemplaires de \ùZilliam Labov sur New york city ont associé un certain
nombre de variantes linguistiques (telles que la prononciation ou non
du
r devant consonne, corome dans york) aix carictéristiques sociologiques
de 1'échantillon, montaant que le phénomène de chute àu r étattlié
à des
ttanches d'àgeparttculières ainsi qu'au niveau d,instruction d.es locuteurs.

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