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BIGOT-TESTAZ Jeanne-Chantal DE L’IMPORTANCE DES CHANSONS | DANS L’APPROPRIATION D’UNE LANGUE \ Oe UNIVERSITE LUMIERE LYON IT DEPARTEMENT D’ETUDES ALLEMANDES BT SCANDINAVES U.V. DE LINGUISTIQUE APPLIQUEE A LA DIDACTIQUE DES LANGUES VIVANTES PROFESSEURS : MONSIEUR J.C. MARGOTTON MADAME E.MORAND ( ‘Chana BICOT-TESTAZ TABLE DES MATIERES ntroduction 1 De quelques experiences, découvertes et rencontres. II Trois cadres d’activités musicales traditionnelles. { En classes primaires. 2 En classes de college. 3 A la chorale du collége. 1 Cadre, objectifs et limites. 2 Constitution d’un répertoire. % Commentaire de la cassette en annexe. Sensibilisation aux langues étrangéres par les chansons. p. 10 p. 12 pie ¢ Bilan. Envoi p. 7 Bibliographie pte Table des matieres p19 Annexes : 1 Avant-propos de Viva ¥oce. 2 Liste de mots et expressions. 8 Feuille de chants distribuée en classe de cinquieme. 4 Programme de concert de chorale. 5 Répertoires 1989 a 1991 du cours de Sensibilisation... 6 Feuille distribuée aux parents en juin 1990. 7 et 8 Chansons allemandes commentées en 2et WE 3. 9 Photographies du cours de Sensibilisation...(février (994). 10 Cassette audio (révrier 199°). Photos ot réaiisation graphique © sacau 19 aroor NTRODUCTION ntroduire... Quel souci | Il faut acerocher son lecteur en Une retrouvaille annoneant le "Qui, quoi, pourquoi, comment 7". recente avec I'un de mes anciens professeurs de hongrois, linguiste, auteur d'un manuel adapté en plusieurs langues a Vusage des étudiants étrangers venus se former a Budapest, me donne loceasion de lui laisser la parole : “J'ai appris le russe pendant huit ans, sans Vavoir souhaité, i est vrai. Je crots avoir TOUT oublié sauf les chansons que les professeurs nous enseignaient”. Les chansons, elles. sont apprises par eceur. done nous imprégner durablement et en profondeur. Encore faut-il bien les choisir, que leur rythmique, leur courbe melodique servent au mieux les mots, leur permettant done ae rester en mémoire dans les meilleures conditions. [1 est triste de son niveau baisser dans une langue cible que l'on n‘utilise ‘on sait par cour apparait d'autant seni plus et le trésor de ce que plus preécieux. Ce dossier voudrait étre un plaidoyer pour rendre au chant en général sa place a I’école. [1 peut tout aussi bien concerner notre langue maternelle que les autres tant il est vrai qu’ “apprendre par ceur, c'est conférer au texte ou a la musique une clarté et une force vitale, durables et intimes".{ Or le chant est toujours texte ET musique. Les pages qui suivent tendent a justrer un glissement personnel du desir de transmettre la musique vers celui d’aider les éléves a mieux s‘approprier une langue grace au support musical. Il s‘agira de dégager les raisons m’amenant a souhaiter que lon sépare moins dans lenseignement ce que nos a¥ eux avaient su réunir, Et Von songe aux cheurs des tragedies antiques, aux poémes épiques (auxquels je préfere le terme de “chanson de geste") diffusés par les ménéstrels... En fatsant chanter les enfants d‘un groupe. on est sars de mener une action “educative, culturelle et linguistique” telle que la souhaite Colleges, programmes et instructions de 1983. 1 STEINER (G.). Réelles présences. Paris, Gallimard. 1990. p.28 1 1 DE QUELQUES EXPERIENCES, DECOUVERTES ET RENCONTRES. L'Europe des douze en 1993... Des contacts réguliers, depuis trés longtemps avec Europe centrale que les événements récents viennent de mettre au goat du jour... 25 ans de vie en Helvétie ou la réalite du plurilinguisme s‘imposait plus qu‘ailleurs chaque jour... Ce sont quelques raisons parmi d‘autres qui ont fait grandir en moi lenvie d’apporter ma petite pierre quotidienne a Vouverture aux langues d'un maximum d’enfants. Et des souvenirs plus pré affluent, positifs ou negauts... Crest rivalité entre enfants Suisses des années cinquante pour déterminer lequel d’entre nous connaissait le plus de mots dans d’autres langues ! Nos classes étaient tres internationales & Ia fin de ta guerre, entre les travailleurs immigreés, Italiens surtout, et les réfugiés d’origines diverses, sans oublier les Tessinois ou les Suisses allemands. n lesquelles nous avons eu le temps de constater que nos @ aussi nos dix années en Allemagne pendant efforts familiaux d’ouverture a la langue du pays héte, ceux des autoritées militaires ou de Education nationale ne donnaient pas vraiment les résultats espérées. La résistance @ lallemand a urs été forte dans le milieu des F.F.A. (Forces Francaises en Allemagne), passé lenthousiasme optimiste des premiers mois apres larrivee de la famille. Et linitiation précoce, en ecoles primaires, avec échanges d’enseignants plusieurs fois par semaine, a décu nombre de parents et d’enfants de niveau de culture et de préparat n (rés divers, probablement en raison, surtout, de la préparation insuffisante des intervenants. Ceci nexelut pas des réussites ponctuelles et/ou locales. Plusieurs cours d’été de pédagogie musicale en Hongrie mont donne loceasion de m’ébahir devant des enfants chantant 2 dans chacune des langues représentées par les stagiaires. Un vontact personnalisé avec ces jeunes m‘a révélé combien leur pratique musicale contribuait a leur ouverture aux cours de langues étrangéres Gamais dispensés a plus de vingt éléves a la fois dans ce pays). nants canadiens et des productions La rencontre d’ensei du Bureau aux Langues Officielles m‘a permis d’apprécier un matériel bilingue, distribué massivement et gratuitement aux eléves de huit a douse ans, Pas de luxe, pas d’esbrouffe, pas déditions suecessives une chassant autre... On y sent le fruit dune mise en commun approfondie d'un maximum de compétences, d'une longue réflexion avant de lancer du neuf. Le personnage central, la tortue Geneviéve se veut peut-étre un symbole du tempo qu’il faut accepter d'adopter pour faire progresser Vimmersion, souvent en chansons, dans la seconde langue, des jeunes Canadiens. Il ne s'agit pas bien sar d’évaluer ces souvenirs. Une constante apparait ecependant dans mes observations positiv: c'est importance d’une édueation musicale elobale et chansons pour donner Uappétit de sortir de spécialement par te sa langue maternelle. En effet, on relit rarement un texte de nombreuses fois et un maitre évite de faire revoir souvent Vappris par ceur. Un enfant dans son bain ou dans ta voiture ne récite qu’exceptionnellement des poémes. revanehe, il chante et reehante des chansons connues si on a pu les lui enseigner de mantére répétitive mais variée?, L'imprégnation nen permet plus loubli, méme aprés bien des années. Imprimer de fagon indélébile un grand nombre de selon un ordre savamment étudié, induisant une education musicale en profendeur, est une earactéristique essentielle de la pédagogie musicale hongroise, connue sous le nom de “Méthode Kodaly". Dans le monde entier, des professeurs de musique adeptes de ce cheminement enseignent a leurs éléeves leur “langue maternelle musicale", au travers du patrimoine local Partout ou je Vai vu pratiquer, j'ai été séduite par ta * Dans la varieté de présentation des chants, beaucoup d'exercices reposent sur [audition intérieure dont on connait [importance dans Fenseignement des langues 3 réutilisation quasi-infinie de tout le fonds de chansons apprises. Jamais n’apparait cette regrettable précaution de lenseignant frangais “Quelles nouvelles chansons inconnues chotsir cette e ?" Chez nous, on veut assurer du neuf pour sacrifier a la mode, quitte a sacrifier la valeur en méme temps. Cela peut a la rigueur se justifier avee des adolescents mais certainement pas avec les plus jeunes. En ce qui concerne la langue maternelle, on nal de chansot se prend a réver d'un vrai trone commun m bien apprises pendant le cycle primaire par tous les enfants de France. On imiterait ainsi une pratique qui apparait dans maint pays, moyen privilégié pour sauvegarder et transmettre te patrimoine des chansons traditionnelles. Les professeurs de collége pourraient alors s’appuyer sur ce programme commun minimal pour continuer une progression solfégique. On préfere hélas trop souvent donner le change avec un enseignement trumental (flate a bec, instrumentarium ORFF) pour collectif in lequel un préalable absolu est le petit nombre. Notons, avant de revenir a notre probléme des langues étrangéres que les enfants formés selon Vesprit kodalyen possédent tous au bout de trois ou quatre ans plus de cinquante chansons. Essayez de verifier combien en connait un écolier francais de neuf ans. Or, la preuve de lenrichissement de ta faire. Depuis deux ans, je suis trois classes paralléles d‘une trentaine d’enfants langue maternelle, grace aux chansons n'est plus en éducation musicale. Ils sont actuellement en troisieme année du cycle primaire. Je reste frappée par leur déception de ne chanter a chaque fois Vensemble du pouvoir faute de temps, répertoire et par leur joie lorsque je leur propose “Si nous chantions toutes nos chansons dans les semaines qui viennent ¢” €e sont pourtant les adultes qui m’ont stimulée a utiliser les chansons pour ce que j'ai appelé une “ premiere escapade hors de la langue maternelle". En effet, cing ans de direction dune chorale franco-allemande fondée a Baden-Baden en 1974 nvont valu encouragement de bien des choristes qui suivaient un rours de langue par ailleurs : "C’est a la chorale que nous avons le plus Uimpression de progresser. Tu nous donnes les indications successivement dans les deux langues et nous essayons d/apprendre par cow s des chants de ta langue qui nest pas la nétre", Depuis cette époque, j'ai commence a faire 4 les parol chanter mes ¢léves de musique en langue étrangére. Pourtant, ce nest que depuis trois ans environ que je prends du reeul en réefléchissant au décalage entre mon professionnalisme musical et mon niveau en langues étrangéres. [1 était urgent de le faire monter dou ma présence sur les banes de la faculté d‘Allemand de Lyon 11, Quai-je modifié depuis ce recentrage sur le probleme “langue, materneile ou étrangére, servie par la musique” ¢ Comment me situer entre les collégues professeurs de musique. chefs de prestigieuses chorales d’enfants qui mhésitent pas a “produire” des quantités de couplets en langue étrangere en mutilisant que la faculté “perroquet” de leurs éléves et les professeurs de langue qui, faute d'un minimum de préparation, utilisent mal les nombreuses possibilités du support musical ¢ Non ! Je ne proposeral pas au Ministre de I'Education la constitution d‘un nouveau corps de prefesseurs de “Langues et Chant choral”. Dautant qu'un beau texte, bien servi par la musique. devrait intéresser tout autant les maitres d’école primaire ou ceux de frangais en colléze en vue de Vappropriation de la langue maternelie. Des contacts et expériences relates et-dessus, vient ‘importance acerue donnée au texte dans mon uravail quotidien de professeur de musique depuis quelques années, L’extension a des textes etrangers, d’abord dans des activités existantes puis dans celle. novatrice, décrite plus longuement au chapitre I sera l'objet des pages qui viennent. 11 TROLS CADRES D'ACTIVITES MUSICALES TRADITIONNELLES 411 est aiffietle de donner une description éerite d'un travail essentiellement oral, et qui plus est. musical. Essayons cependant de passer en revue les trots Meux de travail deducation musicale ot musique et texte devratent étre indissolublement Liés. LEn classes primaires J’enseigne depuis deux ans dans trois classes primaires dune école libre ; Les enfants sont aujourd’hui en €.E. 2 (ils ont done de 6 4 9 ans). J’avais posé d’emblée le principe d'u ensel ement essentiellement vocal. Ceci n’empéche nuliement ta participation de tout le corps ; au contraire, ma formation a la rythmique dalerogienne me faisait espéerér un lien beaucoup plus etroit avee le veeu corporel. La salle spacteuse mise a ma disposition a été remplacée dés la deuxiéme année par des lucaux tristement exigus. Cette ouverture a done = été court cireuitée et Vintérét des textes des chants s’est aceru dautant dans ces séances hebdomadaires. Les enfants s‘exercent aussi a l'écoute intérieure, a la lecture simple. Les chants sont presque tous repris plusieurs fois dans l'année sous des aspects tres diversifies et la liste de mots et d’expresstons non courants, donnée en annexe 2, peut étre considérée comme assimilee par tous. Les éléves se sont réjouis de quelques escapades en anglais et en allemand qui ne leur posent aucun probleme. Ils en redemandent ! Lage primaire est idéal pour planter la bonne graine et iy at consaeré Vessentiel de mon temps en Allemagne puis au Conservatoire National de Région d’Amiens. 4 Lyon, les circonstances mont imposé le retour en college. C'est pourquoi, pour garder le contact avee cet age, j'ai south Lé enseigner a titre béneévole, quelques heures, en école primaire. Je n’ai pu urer qu'un an les deux séances hebdomadaires qui seraient souhattables. 4 défaut, il faudrait au moins des mai tresses asses formées et surtout assex motivées pour reprendre une ou deux chansons tous les jours avec leurs éléves®. Cependant. 9A Lyon et bient6t partout en France. la formule des intervenants musicaux en milieu primaire se généralise et c'est tant micux. Je regrette cependant que cette solution ait été choisie de préférence a la formation des instituteurs eux-mémes. En Australie. par exemple. dans le cycle primaire le plan de réforme de l'éducation musicale n'a été mis en application qwune fois les instituteurs assez formés pour lassurer sux mémes. Des intervenants extérieurs ne peuvent avoir le méme contact avec de jeunes enfants que leur instituteur. Ils forment une sorte de corporation de travailleurs engagés directement par les municipalités, Cela peut favoriser ume saine émulation, I y a risque, en revanche, que le spectacle de fin année devienne plus important que le travail d'éducation musicale en profondeur. souvent peu spectaculaire, qui. seul, doit primer jusque vers 89 ans Hongrie, il n’existe quasiment pas de chorales Wrentants de moins de 9 ans 6 plusieurs parents signalent que ces enfants chantent beaucoup plus que leurs fréres et seurs et un bon nombre s'est inserit dans une école de musique ou une chanterie. 2 classes Depuis | mon retour au collége, Vapprentissage de chants simples en anglais et en allemand. Lobjectir langues étrangéres n'est pas brioritaire mais j'échange réguliérement a ce propos, avec les ai systematise douverture aux professeurs concernés ; je pense contribuer a la fixation de certaines expressions et ne jamais contrarier leur travail. UL S'agit pour moi d les chansons pour transmettre des notions solfégiques en tiliser la démarche kodalyenne s‘appuyant sur compensant ainsi Vabsence d’u francais, regret que j‘ai dé@ja exprimé dans ta premiere partie. répertoire commun de chants Je recours aussi, bien sar a Malborough, Sur le pont d’Avignon, ou A d'autres chansons de notre Trois jeunes tambours. répert ‘e national, Elles sont souvent peu sues ou ineonnues. Les mettre en place prendrait un temps disproportionné avee Vheure ze des eléves. Je le fais pour Uune ou autre chanson francaise mais besoin de me referer a beaucoup de chants différents pow de musique allouée chaque semaine. compte tenu de 1 i 1 duire une veritable progression soifégique qui s‘appuie sur ce oh: ng notes que je nomme “tes nts-outils", Une comptine sur ei basse mal en francais mais aucun éléve de S€M€ qhésite a reprendre en deux cheurs alternés Tommy Thumb : Py | I} | ts FP] lo Farrel td est Voceasion de fixer accord parfait majeur, Valternance d’une phrase suspensive et dune phrase conclusive et Je peux encore y faire référence, avee les ainés, si néeessaire. Méme lorsque certains ont déja chanté les adaptations de Vive le vent ou Vent frais, vent du matin, ils trouvent un charme Yous les neuf & ces mélodies rendues a leur texte origina trouverez en annexe 3, sous les titres Jingle Bells et Hei Ho Nobody home. Les éléves de cingiéme ont tous recu cette feuille; Als ont fait analyse formelle de Jingle Bells et recherehé dans la deuxiéme phrase du refrain la difference mélodique (sur la syllabe “pen") entre leur partition et la version répandue en France et que j'ai choisi de conserver. Le texte du canon Hei Ho Vobody home avait été consigné dans les ecahiers au moment de Vapprentissage. Us ont du le noter eux-mémes sur ta partition recue, en devoir a la maiso: Ce travail sur des chants étrangers est complété par ta découverte de belles chansons contemporaines ; récemment, Lily de Pierre Perret et Elaeudania Teitia de Ser eme et en zeme, L'analyse de leur texte prend autant de (emps Gainsbourg en 5 que la mise en place musicale. Elle se compléte quand c’est possible par la comparaison de plusieurs interprétations. 3 Ala chorale du college + Son existence est souvent menacée pour moult raisons hors de notre propos. Si depuis Ia rentrée (990, un éleve sur quatre fréquente un des deux groupes de ta chorale, c’est en partie grace a Wattrait exereé par le répertoire proposé en langue étrangére (ef. annexe 4). II s'agit d’éléves asses motives pour fournir un effort supplémentaire pendant la pause de midi. Chanter dans la langue abordée en 6¢™*, ou dans l'une de celles & commencer bientét, constitue un avantage 4 leurs yeux. La perspective d’accueillir une classe de Szeged en j mulant suffisant pour faire Leffort d’apprendre méme quelques est un chants en hongrois. Je prends le temps, avee eux, de travailler Ia diction. Les exereices de mise en voix se font volontiers sur des expressions 8 aifficiles a prononcer. La chorale permet de s‘exprimer a voix haute sans étre “seul en piste". Le choriste prend done confiance en soi et participera mieux a l’oral en classe. La yérification de milation des paroles Ge “par ceur") est occasion d'une étape intermédiaire entre le “solo” et le collectif. Pour ce faire, Je pratique souvent le chant-relai par groupes de deux ou trois Vas éléves : la chanson ne s’interrompt pas. Les groupes sont sollicités suecessivement pour chanter a voix haute. Ceux dont ce nest pas fe tour prononcent les paroles en muet faisant ainsi un tres bon exercice simultané d’audition intérieure. La musique (qui n’en perd pas ses droits pour autant 1) contribue ainsi a la mai trise des textes. HIT SENSIBILISATION AUX LANGUES ETRANGERES PAR LES CHANSONS 1 Lifs et Une association de parents d’éléves des écoles primaires dapplication de I'Ecole Normale de ta Croix-Rousse met en place des activités pendant la longue pause de midi, Pour ta deuxiéme année scolaire consécutive, deux groupes d’une douzaine d‘éléves de C.E.1 - €.E.2 G7 a 9 ans) peuvent adherer a la proposition ci-dessous + SENSIBILISATION AUX LANGUES ETRANGERES PAR LES CHANSONS Moyen mnémotechnique connu, le “parler-chanter" évoque Vapprentissage par coeur des tables de multiplication ou des déclinaisons latines. C'est dans cet esprit qu'a été congue cette ouverture précoce aux langues étrangéres. L’acquisition et la pratique renouvelée de comptines, de jeux parlés-rythmés et de chants traditionnels en différentes langues parait un moyen privilégié pour une premiére escapade des enfants hors de leur langue maternelle. Pour graver durablement dans la mémoire des associations de mots, (souvent des formules idiomatiques), la pratique orale se révéle un moyen efficace dans la mesure ou les textes sont entendus puis prononcés un trés grand nombre de fois, dans un cadre rythmique invariable, avec le souci de la meilleure prononciation possible. Le soutien du texte par une mélodie, son accompagement par des gestes, des pas, des percussions corporelles éviteront l'ennui du répétitif. Cheatal Bigot- Testaz, responsable de ce projet, a terminé une formation d'animetrice socio-culturelle et de professeur d'éducation musicale. Elle @ longtemps dirigé des chorales d’enfants et d’adultes succeasivement en Suisae, en Allemagne et en France. Enseignant actuellement en collége et en école primaire, elle epprofondit plus spécialement les démarches pédagogiques de Jaques-Dalcroze et de Zoltan Kodaly. 10 “activité est payante mais une marge de solidartie permet l'ouverture a tous les enfants sans restriction financiére. Les parents avec lesquels j‘ai é¢laboré ce projet avaient eu connaissance dune version un peu différente, non réalisée. Je MMAL, école de musique du Vavais proposée il y a cing ans a i’ centre ville ou j’ai enseigné pendant deux ans. Le premier chapitre de ce dossier devrait avoir expliqué fe cheminement personnei aboutissant a ce projet. Avec tes organisateurs, nous n’avons pas voulu le proposer a la premiére année primaire, déja riche de découvertes. Nous avons misé sur Vintérét ‘que présentait cette “premiére escapade hors de la langue maternelle” pour les cours ¢lémentaires, avant larrivee en cours moyen of lenseignement précoce de allemand et de Vanelais était offert. Est-il possible de jouer un réle vraiment edueaut aupres de si jeunes enfants en intervenant de l'extérieur, une seule foi par semaine ? Ou faut-il admettre que je ne propose qu’une garderie améliorée ? A Toceasion de diverses visites et d cours public, des éducateurs expérimentés m’ont encourage A poursuivre. Pas de spécialistes des langues parmi eux qui auraient probablement soulevé un probléme que je continue de me poser ; est-il bon de transmettre en plusieurs langues ? J‘ai pris ce risque pour me démarquer d'un cours de langue. Une autre différence apparait de plus en plus nettement ; chaque moment de séance se rattache a l'une des deux activités suivantes. Ou bien je raconte Vhistoire d’un nouveau chant, e1 diseute avee les enfants, prévois des jeux autour des mots a fixer, reprends en détail le sens d’une phrase, ou bien nous faisons le grand saut dans lexéecution du chant ou de la comptine. Le chanteur est complétement ailleurs lorsqu‘tl sexprime dans une langue differente ; le support immuable du rythme et de la mélodie évite toute équivoque de traduction pendant les toujours nombreuses exéeutions. Avec la conversation en francais 4 propos de..., ou des jeux de diction sur un mot ou une expression-clé, nous restons en-deca de lexécution. Celle-ci, bien distincte. garde une certaine solennité, une quasi-mise en seéne dont les formes se renouvellent selon les circonstances. Laudition de la cassette devrait l'illustrer, 1 2 Constitution d‘un repertoire Recourant a des accessoires variés, selon un cheminement pédagogique tenace, je ne perds pas de vue l'objectif de mise en place de chants en langue étrangére. Pendant la premiére année, jen ai commence une vingtaine pour en garder une douzaine figurant sur la feuille en annexe 5. Pour lappropriation d’un chant, jessaye de ne pas perdre de vue les trois temps de Madame Montessori. Hs sont, depuis trente ans, ma référence de base pour rythmer toute acquisition. En voici lune des formulations tirée du "manuel Montessor “1€F temps : nommer la qualité de l'objet (mince ou épais). 2eme temps : le reconnai tre (donne moi lépais). 3€M€ temps : prononecer correctement."* Maurice Martenot, a ce propos, parle de : “Présentation (imitation voeale), Reconnaissance (exercices d’audition), Trouver le son (solfier)"> On définit aussi parfois ces trois temps comme “Vivre, Decouvrir, Mai triser. Je préfére cette expression, utilisée par Thérese Potvin dans son guide péedagogique® ; elle peut s’appliquer a divers domaines. Vivre G&f temps) un chant nouveau nécessite souvent plusieurs séances et je me garde de J'imitation pure. Prenons Vexemple de Backe. backe Kuchen + il suffit de dessiner un gateau au tableau pour que les enfants lentonnent. Assez longtemps et jusqu’a ce qu’ils s‘y mélent spontanément, je chante seu le "Der Baker hat gerufen. Wer will gute Kuchen backen, der Trés vite, ils me rejoignent a "Sieben Sachen", et muss haben montrent sept doigts. On s’arrache les objets de mon sac a Orem (R.C.). Manuel Montessori, p 125 5 Martenot (M) Principes fondamentaux... p 92 © Potvin (1), Education musicale 4 /’élémentaire. p. \6 12 surprises : emballages vides deufs, de margarine, de sucre ete... Et veux dont habit comporte du jaune le montrent au bon moment. Les régles concernant l'emploi des objets varient. Nous sommes assis par terre en rond. Un enfant sur deux en tien et le frappe a terre au moment ou iI est cité, avant de le passer @ son voisin pour Vexéecution suivante. Une autre fois, on brani Vobjet en Vair en se levant lorsqu’on entend son nom. Je sauve mon autorité en décidant du mode d'action pour une fois donnée mais je suis aussi 4 I’écoute de toutes leurs propositions. Et il y enat Dans la partie de Vouvrage issu du colloque Didactique des langues étrangéres, réservée aux interactions du visuel et du verbal dans lenseignement de allemand, j‘ai aimé ce qui est dit de la diversité. Elle est capitale pour moi, d’une part pour éviter Vennui de lenseignant, et d’autre part pour que les apprenants puissent. avoir occasion de trouver, entre les différentes propositions d'une méme acquisition, celle qui leur convient le mieux (c'est ainsi qu’en solfége, je diversifie les graphismes). La phase du Découvrir ou Reconnaitre (deuxiéme temps Montessori) peut étre associée a la reproduction rythmique seulement ou au rythme et a la mélodie sur une flite. d’essaye de les aider a fredonner la mélodie de mémoire, a se souvenir de fa langue utilisée, 4 raconter le theme du chant évoquéou a retrouver certains mots. Suivant le degré d’assimilation, on le rechante simplement en regardant se suecéder une serie d/images cartonnées illustrant chaque phrase du texte. Pour Vetape du Prononcer correctement ou Mai triser Vaequis (troisiéme temps), je donneral trois exemples parmi moult autres possibilités qu’il ne faut cesser de réinventer : W les cartons, un par enfant, sont mélangés et disposés face eachée. Chacun en tire un et cherche qui détient les autres justrations de sa chanson, Des groupes se forment et révisent avee mon aide, avant de produire leur chant, soit ensemble, soit en relai (variante de Vexercice de vérifieation des paroles a ta chorale). Au passage de "sa" phrase, l'enfant montre son image. 2) Chacun prépare deux titres de chant “dans sa téte" et 13 a Tappel de son nom, en entonne un, si possible pas encore cité. A defaut d’oser se lancer, on peut aussi raconter la chanson ou dire un mot l’évoquant et c’est alors le groupe qui Vinterprete. 3) Je donne un titre en sollicitant une alternance entre chant A haute voix et chant “dans sa téte". La succession des Phases de chant érieur ou non peut tre obtenue collectivement de différentes maniéres. Le plus apprécié de mes eleves reste (un des outils d’éducation musicale concu par Therese POTYIN : une sorte de palette de chef de gare dont voici les deux faces, 3 Comm. ire ja_cassette en anne Lienregistrement ci-joint est le seul réalisé avec ces enfants. Je ne ressentais guére te besoin de fixer ce qui reste ore experimental, Pourtant, en février, j'ai pris la décision que ma laborieuse e de réal ser ce reflet, plus expres: deseription. La cassette a été faite en une seule séance et méme avee le premier groupe seulement, pour cause d’ennui technique. Pour maintenir Vunité, et vu le cadre de ce dossier, j'ai choisi de ne conserver que les chants en allemand. Les coupures vous privent méme de la description faite par quelques uns de la féte de la Saint Martin en Allemagne, avec ses corteges au cours desquels se echantent les numéros { et 2. Le groupe entendu comporte dix enfants, ce jour la ; trois “anciens" et sept nouveaux". L’ouverture limitée aux éléves de C.E. et ©E2 a exelu cette deuxiéme année la majorité du groupe de premiére année montée en Cours Moyen. Ich gehe mit meiner Laterne Je le trouvais difficile pour un dé ut d’année mais 14 tont adopte d’emblee, en ne reprenant avee moi au début que les Rabimmel, rabammel, rabum. Us se prétent a toutes sortes de jeux vocaux, Exceptionnellement, sur quelques mots, avee dessin et méme éeriture a l'appui, nous avons fait quelques observations abstraites. be Bs LICHT - LICHTLEIN GLOCKE - GLOCKCHEN Nous avons constaté ensemble que comme pour les mots francais, on parle de diminutifs mais qu'il s‘agit en fait “d’allongatifs”. Jai écrit au tableau : NACHT. MGHT NUIT Nous avons comparé ces trois mots et trouvé tout ce qu'ils ont en commun Ce recours a Vecrit reste exceptionnel. Pourtant, je me réjouis du plaisir pris par quelques-uns a ce genre de découverte intetlectuelle qui semble ne pas troubler les autres. Petit petit, un vrai rituel s’est instaure dans Vinterprétation de ce chant. Chacun porte un carton @ la main, le sort ayant décidé de lattribution d'une image de lanterne allumée ou éteinte. 1 s’ensuit un remonnayage du droit de montrer sa lanterne allumée au deuxiéme couplet en cachant ta flamme avee la main, Il semblerait que cela soit injuste par rapport aux défavorisés dotées d'une image de lanterne éveinte | Je vous laisse juge. Laterne Ce chant figurait déja au répertoire de la premiere année. Il contenait les mots “Sonne, Mond und Sterne" qui ont faeiite acquisition de Himmel und Erde du ehant {, Je meftorce dexploiter au maximum tout ce qui établit des 15 passerelles entre tes chants, Il faut aussi développer l’ecoute mutuelle : le mode de division en anciens et nouveaux recueille la faveur du groupe mais il y en a d‘autres. © Weh, mein Fuss Vous pouvez remarquer qu’‘ils ne se lassent pas de ce chant qui a duré encore plus longtemps que l’extrait garde sur fa cassette. J'ai renoncé a corriger davantage ce jour-la, la prononciation deéfectueuse apparue chez l'un d’entre eux. Cette pratique collective comporte un risque de déviations qu’il faut détecter puis redresser individuellement mais ce n'est pas Vexelusivité de ces séances de sensibilisation aux langues étrangéres par les chansons. Tropt, Tropf, Tropf, Schaut wie es regnet Ce chant avait été commencé deux semaines auparavant par le deuxiéme couplet, plus facile. Il a fallu les grosses pluies récentes pour que je me lance dans le premier couplet. La promenade sous un parapluie, un enfant a chaque bras. n'a pas ficile "Seder, der uns heute begegnet...” encore fait pas le L au c@ur parlé qui reste exceptionnel mais apporte un element de variece, mise en route récente de ce chan explique le recours Tandis que nous cherchions ensemble comment mimer la premiére strophe, les enfants se sont mis a faire de grands sauts ich in die dans une mare imaginaire. Or lexpression “stei: Wasserpfutse" me génait pour lassociation possible de “steigen" a des sauts. C'est en constatant leur ampleur que j'ai decide de trahir Vauteur en substituant springen a steigen. Quil me pardonne! Teh und da C'est une comptine traditionnelle qui se préte bien a Vexéeution en relai, mais c’est aussi notre maniére de ploufer pour de vrai 16 + Bilan A partir de séances hebdomadaires de 35 4 £0 minutes chacune, partagées avec deux dougaines d’enfants pendant 18 mois, il serait bien prétentieux de tirer des conclusions. Quelques remarques les remplaceront. La fidélité de la majorité des participants, surtout ceux d‘origine etrangere, ainsi que leur dynamisme et leur curiosité m’ont touchée. Comment savoir si deux ou trois autres, ayant participé de maniére trés réduite, ont cependant profité de cette proposition d’ouverture et dexpression ? La stabilité des effectifs et Ia manifestation du plaisir des enfants sont plutét encourageants. Pour avoir véeu de prés les dégats ecausés par des expériences pédagogiques hasardeuses, j’espére de tout cour qu’aucun éleve de ce cours n’en patira de quelque maniére que ce soit, Je souhaite surtout avoir contribué a leur donner lenvie de pratiquer d’autres langues et de continuer a chanter. ENVOL Professeurs de musique, rendez la part qui lui est due au chant ! Faites chanter vos éléves dés les premiéres semaines et mieux, dés le premier jour, Les chansons, mieux que quelle autre partie de votre enseignement, permettent “que la musique soit a tous" selon le veu exprimé par Zoltan Kodaly. importe Noubliex pas le bénéfice d’enrichissement et de renouvellement neére, que peut constituer un répertoire en langue étr: Professeurs de langues, croyez au pouvoir de l'appris par ceur. Pour les plus jeunes au moins, mieux que les poémes, grace @ leur multiples variantes d’emploi, les chansons sont la garantie de Vimprégnation en profondeur d’un texte. 17 BIBLIOGRAPHIE 1 + STEINER (G), Réelles présences, Paris, Gallimard, 1991 Met en évidence importance du par cour et de la rencontre directe avec le texte. II Concernent la pédagogie générale et la didactique des langues + Colloque a Lyon II, Didactique des langues étrangeres, franeats, allemand. Lyon, Presses Universitaires de Lyon, 1982 + OREM (R.C.), Le manuel Montessori, Paris, Denoél, 1975 + STANDING (8.M.), Maria Montessori, Poitiers, Desclée de Brouwer, 1974 ILL Concernent les chansons francaises et allemandes : + DAVENS: GD, Le livre des chansons, Neuchatel, La Baconniére, 1944 + HETZNER (RD, Mein Bulldog, Munchen, Don Bosco, | + LOSCH (G). Kindersptele. Minchen, Voggenreiter, 1982 + NOACK (EB), Musik in der Vorschulerziehung, Witten, Luther. 1973 TY Concernent la pédagogie musicale + + MARTENOT (MD. Principes fondamentaux d’édueation musi- eale et leur application, Paris, Magnard, 1970 + POTVIN (TM), Léducation musteale a Vélémentatre, Guide pédagogique, Edmonton, Alberta Education, 1987 + swOnvI CE). Quelques aspects de la méthode de Zoltan Kodaly - Application de ses principes a I’’éducation musicale. Budapest. Corvina, 1976 En particulier le chapitre IIT ; le réle du chant et de la mélodie populaire. + Vensemble des ouvrages publiés ces derniéres années a la demande du Département de I'Instruction Publique et des Cultes du Canton de Vaud (Suisse). Par exemple : le guide méthodologique Viva Yoce, LEP, 1988 réalisé par un groupe de mai tres. Son avant-propos (annexe rend hommage a quelques uns de ceux qu'il faudrait aussi clter dans cette bibliographie trés sommaire. 18

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