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Gestes de base en chirurgie


laparoscopique de l’adulte
X. Pouliquen

Comme en chirurgie ouverte, l’acquisition des gestes de base spécifiques à la chirurgie laparoscopique ne
peut se faire qu’au prix d’un apprentissage pratique, mais éclairé par une bonne compréhension de la
logique de ces gestes et des moindres détails de leur technique. Ces gestes sont incontournables pour
toutes les opérations laparoscopiques et concernent : l’installation de l’opéré et des dispositifs techniques,
dans un souci de sécurité pour le patient et d’ergonomie pour l’équipe opératoire ; la création du
pneumopéritoine, par ouverture ou par ponction ; l’implantation des trocarts et notamment celle du
premier trocart en cas de ponction ; les techniques de rétropneumopéritoine lombaire et pelvien ;
l’exposition et le refoulement des organes ; l’exposition rapprochée de l’espace de dissection ; le
maniement du laparoscope ; les gestes élémentaires de dissection et d’hémostase, préventive ou
curative ; la maîtrise de l’énergie électrique et de ses risques ; la pratique des nœuds intra- et
extracorporels ; celle des sutures, manuelles ou mécaniques ; la libération des adhérences pariétales et
viscérales ; l’extraction des pièces ; la péritonisation ; le drainage ; l’exsufflation du pneumopéritoine ;
l’infiltration anesthésique et la fermeture des orifices de trocart ; enfin, la conversion éventuelle en
laparotomie en fonction de son contexte hémorragique ou non.
© 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Cœlioscopie ; Laparoscopie ; Cœliochirurgie ; Pneumopéritoine ; Nœuds ; Trocarts ; Conversion

Plan ¶ Exposition interne 10


Principes 10
¶ Introduction 2 Application aux différents viscères 10
Qui écarte ? 11
¶ Installation 2
Exposition rapprochée 11
Prévention des compressions 2
Position et confort de l’opérateur et de ses aides 3 ¶ Maniement du laparoscope 12
Disposition du matériel et du mobilier opératoire 4 Précautions et réglages initiaux 12
¶ Création du pneumopéritoine 4 Tenue manuelle du laparoscope 12
Méthode ouverte 4 Supports « robotisés » 12
Ponction 5 Optique à vision oblique 12
Buée 12
¶ Introduction du premier trocart après pneumopéritoine
par ponction 6 ¶ Gestes de dissection 12
Règle prioritaire d’une bonne direction 6 ¶ Hémostase préventive 13
Gestuelle d’introduction 7 Section-coagulation électrique monopolaire conventionnelle 13
Variante 7 Section froide sur coagulation bipolaire première 13
¶ Réglage définitif des constantes d’insufflation 7 Harmonic® et LigaSure™ 13
Clips 13
¶ Introduction des autres trocarts 8
Hémostase à l’agrafeuse 13
Principes d’emplacement 8
Ligature 13
Direction d’introduction 8
Choix des calibres et du nombre de trocarts 8 ¶ Énergie électrique : situations et gestes dangereux 13
Quel type de trocart utiliser ? 8 ¶ Gestes d’hémostase, « quand ça saigne... » 14
Trocart qui glisse... 8 Saignement le long d’un trocart 14
Fuite de gaz autour d’un trocart... 8 Saignement d’un pédicule « moyen » (cystique ou colique par
Attention au roulis ! 8 exemple) 14
¶ Rétropneumopéritoine 9 Blessure d’un gros vaisseau sous-péritonéal (aorte ou ses branches,
Lombaire 9 veine cave) 14
Pelvien 9 Conversion pour hémorragie active (sans hémostase provisoire
possible sous laparoscopie) 14

Techniques chirurgicales - Appareil digestif 1


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¶ Nœuds 14 variantes et les « trucs » que d’autres, faute de les avoir publiés,
Définitions 14 auront bien voulu lui confier. Les mentions de latéralité
Nœuds intracorporels 14 concernent un opérateur droitier et doivent, bien entendu, être
Nœuds extracorporels 15 inversées pour un gaucher. Les gestes de base qui y sont
Nœuds mixtes 19 développés supposent un minimum de connaissances sur la
¶ Suture 19
technologie de la cœliochirurgie, et nous invitons les lecteurs à
Choix de l’aiguille 19
se référer à des articles et traités s’y consacrant [1, 2].
Introduction et retrait des aiguillées 19
Saisie de l’aiguille dans l’abdomen 19
Conduite générale de la suture 20 ■ Installation
Cas particulier des surjets 21
¶ Suture à la machine 21 L’installation du patient et de l’ensemble du dispositif
Machines à coudre 21 opératoire fait partie des gestes que le chirurgien, qui en est
Agrafeuses 22 responsable, doit savoir maîtriser en contrôlant l’action de son
¶ Adhésiolyse 23 équipe ou en les réalisant lui-même.
¶ Extraction des pièces d’exérèse 23
¶ Péritonisation 23 Prévention des compressions
¶ Fin de l’opération 23 Elle est particulièrement importante en raison de deux ordres
Drainage 23 de contraintes particulières, inhabituelles en chirurgie ouverte,
Vérifications d’usage 23 que la chirurgie laparoscopique peut imposer.
Retrait des instruments 23
Exsufflation 23
Angles d’inclinaison marqués de la table
Infiltration anesthésiques des orifices pariétaux 24
Fermeture des orifices pariétaux 24
d’opération
¶ Conversion en laparotomie 25 Ils ne doivent jamais dépasser 30° et nécessitent, au-delà de
Conversion « tranquille » 25 20° un système de retenue de l’opéré.
Conversion pour hémorragie active (sans hémostase provisoire En position de Trendelenburg, les cales épaulières comportent
possible sous laparoscopie) 25 un risque de compression du plexus brachial [3]. Elles ne doivent
donc être utilisées que pour une ultime et brève retenue en cas
de glissade du patient signalée par l’anesthésiste. Il faut donc
s’assurer qu’un espace vide de l’épaisseur d’une main les sépare
■ Introduction des épaules. Un procédé plus sûr est le sanglage croisé retenant
Comme en chirurgie conventionnelle, les gestes de base font le thorax aux bords de la table [4]. En cas d’opération compor-
l’essentiel incontournable de l’artisanat en chirurgie laparosco- tant un abord périnéal, l’extériorisation des fesses au-delà du
pique, et c’est quotidiennement qu’un chirurgien y est bord inférieur de la table, sur lequel s’appuie alors le sacrum et
confronté. Pour être « basiques », ces gestes n’en ont pas moins non seulement le coccyx, est un bon garant de non-glissement
d’importance, parfois vitale (exemple : l’introduction des du patient vers le haut, à condition de ne pas passer du
trocarts), toujours cruciale pour le confort et la réussite de Trendelenburg au procubitus, qui pourrait faire basculer le
l’opération. Pour être quotidiens et répétitifs, ces gestes ne bassin dans le vide.
s’apprennent pas tout seul, au risque d’acquérir de mauvaises Pour le procubitus (Fig. 1), si les membres inférieurs sont
habitudes. Leur maîtrise ne s’acquiert, certes, qu’avec l’expé- étendus, l’appui doit se faire sur les pieds, au moyen d’appuis
rience, mais au prix d’une compréhension logique initiale et plantaires ou de demi-bottes rembourrées, en proscrivant les
donc d’un enseignement théorique qui ne doit faire l’impasse sangles jambières isolées qui risquent de se resserrer sous le
d’aucun détail technique. Un tel enseignement se heurte à la poids du patient et d’entraîner un grave syndrome compressif
grande variété de ces techniques de base, difficile à unifier, mais des loges. Plus sûre est la position semi-assise où l’appui du
qu’il faut voir comme le reflet de l’ingéniosité de chacun. Cet patient se fait sur de larges appui-cuisses, utilisables en chirurgie
article essaie donc de proposer des techniques les plus commu- du reflux gastro-œsophagien, ou en chirurgie de l’obésité qui
nément admises, ou expérimentées par l’auteur, en précisant les nécessite par ailleurs une table élargie et renforcée.

Figure 1. Position en procubitus.


A. Jambière demi-botte.
B. Position demi-assise.
C. Effet garrot dangereux des sangles jambières.

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Figure 2. Le risque de compression des mains au contact des appuis des


membres inférieurs (A, B).

Dans tous les cas, le recouvrement du matelas de la table a


son importance en évitant les alèses glissantes au profit des gels
siliconés ou d’un matelas à vide, dont l’action protectrice est
aussi antidérapante.

Positions particulières des membres


Il s’agit notamment de l’association d’un alignement d’un ou
des deux membres supérieurs le long du corps et d’un écarte-
ment des membres inférieurs. Cette association, inhabituelle en
chirurgie ouverte, expose les mains de l’opéré à un conflit Figure 3. Nécessité du bras le long du corps pour les opérations « vers
mécanique au contact des supports mobiles des membres le bas ».
inférieurs, d’autant plus risqué que cette zone sensible est A. Mauvaise positon (inconfortable, bras refoulé par l’opérateur).
cachée par des champs (Fig. 2). Son contrôle visuel est donc B. Bonne position.
impératif avant la pose des champs, et sous ceux-ci, par
l’infirmière circulante lors des mobilisations de la table en cours
d’opération. Il s’ensuit que la position « les bras le long du
corps » ne doit pas être systématique, mais réservée aux cas • position de l’aide instrumentiste (éventuel) à droite de
suivants : lorsqu’une place doit être laissée à hauteur d’une l’opérateur, rarement possible en face de lui comme en
épaule pour la colonne vidéo, cas habituel des opérations sus- chirurgie ouverte car cet aide doit lui aussi pouvoir avoir un
mésocoliques quand on ne dispose pas d’un moniteur suspendu accès visuel au moniteur vidéo.
ou que l’on ne veut pas empiéter sur le territoire des anesthé- Chacun de ces trois acteurs doit être installé à sa bonne
sistes ; lorsque les opérateurs travaillent côte à côte ; ou hauteur disposant s’il le faut d’estrades et/ou de selles à leur
lorsqu’ils doivent opérer dans le bassin ou la région inguinale. mesure pour ne pas avoir à élever exagérément les coudes au
Dans cette orientation vers le bas en effet, pour travailler dans prix d’une fatigue inutile et d’une perte de liberté de
l’axe du corps sans se tordre le rachis, l’opérateur et son aide mouvement.
doivent pouvoir se tourner entièrement (pieds compris) vers le Le confort du chirurgien et de ses aides est en effet fonda-
bas, et se reculer à hauteur de la tête du patient sans avoir à mental. Confort physique, on l’a vu, en évitant toute torsion
refouler le bras de l’opéré en hyperabduction (Fig. 3). accentuée ou prolongée du rachis, en gardant les coudes
proches du corps, et en travaillant assis sur une selle. Confort
Position et confort de l’opérateur visuel, on l’a vu encore, par l’exigence d’une image stable, à
bonne distance, bien orientée, lumineuse et nette, mais en
et de ses aides insistant aussi sur le fait que l’opérateur doit quitter le moins
L’emplacement de chacun doit se déduire des principes possible l’écran des yeux. À chaque interruption de son regard,
logiques suivants : c’est un nouvel effort de concentration et d’accommodation
• priorité à l’opérateur, qui doit se trouver le plus près possible visuelle qui s’impose à lui ; nouvel effort, aussi, pour identifier
de l’axe formé par la cible opératoire et le moniteur vidéo ; ses instruments et reconnaître, en les mobilisant, leur direction
• position de l’aide-cameraman, déduite de celle de l’opérateur et leur position dans l’espace. C’est à cette permanence du
et de la zone opérée en tenant compte de l’ordre décroissant regard sur l’écran, que ne vient hacher aucune interruption
de confort et d’ergonomie que donnent les différentes intempestive, que l’on juge la qualité de l’organisation de
positions illustrée par la Figure 4 ; l’opérateur et... de celle de ses aides.

Techniques chirurgicales - Appareil digestif 3


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“ Points importants
La cœliochirurgie nécessite souvent des installations
spécifiques potentiellement dangereuses : Trendelenburg,
procubitus, ou associant l’allongement d’un membre
supérieur le long du corps à un écartement de la cuisse.
L’opérateur en est alors le principal responsable.
Il faut savoir ménager son rachis et tous ses tendons ! La
cœliochirurgie ne doit plus être une affaire d’acrobate.

■ Création du pneumopéritoine
En préambule, nous ne faisons que citer deux procédés qui
sont rarement utilisés :
• la laparoscopie sans insufflation, dite gasless, par suspension
pariétale, dont les avantages hémodynamiques et respiratoires
liés à la faible pression abdominale sont contrebalancés par
l’inconvénient d’un espace opératoire beaucoup plus
réduit [2] ;
• l’introduction directe « à l’aveugle » du premier trocart (sans
insufflation préalable) qui, bien qu’elle puisse être bien
maîtrisée par des opérateurs experts et chevronnés, et malgré
l’absence prouvée d’un taux de complications supérieur à
celui d’autres méthodes [6, 7], effraie à juste titre la majorité
des chirurgiens en raison de ce caractère aveugle. Nous ne
saurions donc la recommander.
Reste, schématiquement, le choix entre deux méthodes : la
méthode ouverte dite open, et la ponction à l’aiguille à ressort
de Veres, dont la littérature a déformé à tort le nom en
Veress [6]. Ce choix reste, depuis le début de la cœliochirurgie,
et malgré plusieurs études comparatives contrôlées ou non,
l’objet d’un débat qu’aucune directive opposable n’est encore
venue trancher [7, 8].

Méthode ouverte
Son avantage majeur, par rapport à la méthode par ponction
qui suit, est son risque quasiment nul de blessure vasculaire
grave, risque potentiellement mortel pour le patient et légale-
ment grave pour le chirurgien. Ce seul avantage suffit à
Figure 4. Différentes dispositions de l’opérateur, de l’aide et de l’écran
considérer cette méthode comme la plus sûre jusqu’à preuve du
et leur degré de confort ou d’inconfort. a et d. Très confortables. b.
contraire, et à la préconiser comme méthode préférentielle au
Confortable. c. Peu confortable. e. Inconfortable (et illogique : main de
nom de l’« assurance qualité » [7]. Ses autres avantages sont un
l’aide inutilisable et proche du dos de l’opérateur). f. Très inconfortable.
moindre coût et un risque atténué (mais non nul) de blessure
intestinale [9]. Ce dernier risque tient à la difficulté d’un réel
contrôle visuel de l’ouverture péritonéale par une « minilaparo-
Disposition du matériel et du mobilier tomie », notamment au fond d’une paroi épaisse. Pour minimi-
opératoire ser ce risque, nous insistons sur les mesures suivantes :
Elle se déduit de la position de l’équipe opératoire, mais aussi • ne jamais inciser en regard ou à proximité d’une ancienne
des contraintes liées à l’encombrement du mobilier technique et cicatrice (et donc sur une médiane déjà utilisée), mais
à l’espace disponible dans chaque salle d’opération. Les paramè- toujours là où on a le moins de risques de tomber sur des
tres de l’insufflateur doivent être visuellement contrôlables par adhérences ;
l’opérateur et ses aides. Il n’est pas indispensable que le • adapter la longueur de l’incision cutanée à l’épaisseur
moniteur vidéo soit encastré dans la colonne technique car il pariétale, ce qui peut conduire en toute rigueur chez l’obèse
peut trouver une meilleure place sur un support autonome [2]. à une véritable petite et non plus seulement « mini » laparo-
Les câbles stériles doivent être fixés au drapage, si possible par tomie, posant alors un difficile problème d’étanchéité. C’est
un seul point d’attache pour diminuer leur risque d’emmêle- indiscutablement la limite principale de cette méthode ;
ment, en réservant à chacun sa longueur optimale déterminée • respecter les principes techniques de toute minilaparotomie
logiquement par des repères précis (distance pubis-menton par (comme celle de McBurney) en palliant la brièveté et la
exemple, plus courte pour le tuyau à gaz). Les instruments qui profondeur de l’incision par une suspension successive des
leurs sont reliés ne doivent jamais être posés sur le thorax, mais différents plans à traverser :
dans des sacs latéraux ou sur une petite table à instruments C l’aponévrose ; dans les cas simples (patient peu adipeux,
prévue à cet effet tout près du champ opératoire. La jouissance ligne médiane), l’incision aponévrotique peut être de la
d’un deuxième moniteur vidéo est appréciable pour le confort taille du diamètre d’un trocart optique de 10 mm. Si elle
des aides. Toute l’installation doit être pensée en matière de doit être agrandie, un point de fil résorbable est placé dans
confort et d’ergonomie, non seulement pour l’équipe opératoire ses berges en attente pour la rétrécir en cas de fuite de gaz,
mais aussi pour le personnel circulant. Ce dernier doit disposer et pour la refermer en fin d’opération (Fig. 5). La technique
d’un espace d’évolution dégagé de tout obstacle matériel ou est encore plus simple au niveau de l’ombilic, où la peau,
visuel pouvant l’exposer à des heurts ou des chutes, d’autant l’aponévrose et le péritoine sont en étroite proximité,
plus grand que l’éclairage ambiant est souvent atténué [5]. permettant donc une pénétration abdominale rapide,

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Figure 7. Open cœlio sur paroi épaisse ou musculeuse. Bourse sur


l’aponévrose et tirette de serrage.
Figure 5. Open cœlio sur la ligne médiane.
A. Ouverture et suspension de l’aponévrose.
B. Suspension et ouverture du péritoine. et alors seulement, être introduit sous contrôle de la vue
dans l’orifice péritonéal en utilisant un mandrin à bout
mousse. Tout doute concernant ces trois critères doit être
levé en élargissant la voie d’abord plan par plan et en
renforçant la suspension.
Le trocart en place, l’insufflation peut être commencée avec
ses paramètres définitifs de pression (cf. infra).

Ponction
Elle a l’avantage d’une plus grande rapidité et simplicité. Mais
elle expose, rappelons-le, à un risque plus grand de blessure
d’organes et surtout de gros vaisseaux, notamment lors de
l’introduction du premier trocart. En raison de ce double risque,
dont le deuxième est vital, on ne saurait donc trop insister sur
le respect rigoureux des critères suivants d’indication et de
technique, même s’ils relèvent davantage de la logique et du
bon sens que de preuves méthodologiquement étayées [11].
• Patient ni très maigre ni de très petite taille. On rejoint ici sa
contre-indication chez l’enfant.
• Absence de risque adhérentiel connu, et donc de laparotomie
antérieure. Une simple cicatrice d’incision de McBurney est
Figure 6. Open cœlio simplifiée à l’ombilic. Incision cutanée verticale pour nous l’indication d’un abord ouvert.
(trait plein) et aponévrotique transversale (trait pointillé). Suspension de la • Absence de distension digestive, notamment en cas d’occlu-
berge aponévrotique supérieure ou inférieure (selon la direction d’intro- sion authentifiée mais aussi de simple iléus, présent dans la
duction du trocart) par une pince de Kocher. Ouverture du péritoine par plupart des urgences abdominales.
l’arrondi de la lame d’un petit bistouri. • Respect des deux zones classiques de ponction : l’ombilic,
siège le plus « éloignable » des gros vaisseaux par suspension
pariétale ; et l’hypocondre gauche, où le risque se réduit à
comme l’indique la Figure 6. Dans les cas moins favorables une ponction de l’épiploon ou du côlon transverse (après
(patient adipeux, région paramédiane ou pararectale), il est avoir vérifié cliniquement l’absence de distension gastrique
utile, avant d’inciser l’aponévrose, de soulever un cône de ou de splénomégalie !).
celle-ci par deux pinces de Kocher, de l’exposer largement • Une technique rigoureuse de ponction, impliquant les gestes
aux ciseaux ou/et à la compresse, et d’y placer une large suivants : vérification du bon jeu du mandrin mousse rétrac-
bourse de fil lentement résorbable (Fig. 7). L’aponévrose est table si l’aiguille n’est pas à usage unique ; incision cutanée,
incisée au milieu de cette bourse, et les deux brins du fil généralement de la taille du trocart optique, plutôt latéro-
sont reliés à un système de tirette permettant leur serrage ombilicale qu’immédiatement sus- ou sous-ombilicale pour
étanche autour du trocart ainsi que la fermeture aponévro- éviter le ligament rond et l’ouraque ; suspension de la paroi
tique à l’ablation de ce dernier. Il est prudent d’attacher le au zénith par une ou deux pinces à griffe type Kocher
trocart à la paroi car son trajet n’est pas toujours facile à saisissant l’aponévrose, ou suspension manuelle en empoi-
retrouver en cas d’expulsion ; gnant la paroi à distance du point de ponction, et non au
C le plan musculaire (si l’on est hors médiane) est dissocié, niveau même de cette ponction, ce qui augmente le risque de
fausse route intrapariétale de l’aiguille (Fig. 8) ; fragilisation de
et son aponévrose postérieure, si elle existe, est également
l’aponévrose par une moucheture de la pointe d’un bistouri
soulevée par deux pinces avant d’être incisée ou effondrée ;
étroit ; tenue du corps de l’aiguille « comme un stylo », le
C le péritoine ; il ne doit pas être perforé à l’aveugle comme
pouce et l’index faisant office de garde (Fig. 9) ; enfoncement
dans la technique originale de Hasson [10], mais soulevé à de l’aiguille sur quelques centimètres à partir du plan aponé-
son tour par deux pinces sans griffes exposant un pli. Trois vrotique, perpendiculaire à la paroi soulevée c’est-à-dire
critères doivent alors être recherchés : il faut vérifier la légèrement oblique par rapport à l’horizontale, et en s’écar-
minceur de ce pli avant de l’ouvrir (Fig. 5B), l’idéal étant tant ainsi de tout gros trajet vasculaire (cf. infra). Normale-
de pouvoir le pincer entre le pouce et l’index en vérifiant ment, on doit percevoir un déclic correspondant à la détente
que l’on sent les deux feuillets glisser l’un sur l’autre ; du ressort quand l’aiguille franchit le plan péritonéo-
l’orifice péritonéal doit apparaître noir et béant ; il doit aponévrotique rétro-ombilical. Lors de la ponction de l’hypo-
admettre sans aucune résistance sur plusieurs centimètres condre gauche, deux déclics sont perçus car la paroi comporte
l’extrémité d’un instrument mousse. Le trocart peut alors, deux plans aponévrotiques.

Techniques chirurgicales - Appareil digestif 5


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égale à celle imposée avec annulation du débit d’insufflation et


quand, parallèlement, on constate un météorisme diffus et
fermement tendu.
Pendant tout ce temps d’insufflation à l’aiguille, comme
pendant celui de l’introduction du premier trocart qui va suivre,
il est fondamental que le patient soit parfaitement curarisé, ce
dont peut s’assurer le chirurgien lui-même en sachant qu’un
critère quasi infaillible de curarisation imparfaite est un chiffre
de pression abdominale supérieur à celui de la pression imposée.

“ Points importants
Open cœlio ou pneumopéritoine à l’aiguille ?
En l’absence actuelle de recommandation opposable,
retenir que :
• la méthode ouverte évite le risque mortel d’une blessure
d’un gros vaisseau. Elle ne diminue le risque d’une
blessure digestive que si on contrôle visuellement
Figure 8. Ponction péritonéale : ne pas pincer la paroi à l’endroit même l’ouverture du péritoine, ce qui est difficile chez l’obèse ;
où on la ponctionne. • la ponction doit impérativement respecter des contre-
indications et une technique « de sécurité ».

• Critères de bonne position de l’aiguille. Ils peuvent être


simples et rapides. C’est d’abord l’injection facile d’air sans
possibilité de récupération de celui-ci par aspiration ; puis la
■ Introduction du premier trocart
vidange spontanée d’une petite seringue de 5 ou 10 cm3 après pneumopéritoine
dépourvue de son piston et remplie de sérum. Le critère peut-
être le plus important s’apprécie après avoir branché sur par ponction
l’aiguille la tubulure purgée de son air, et commencé l’insuf- Elle reste un geste aveugle qui doit être dominé par la hantise
flation : tant que 1 litre de gaz n’a pas été insufflé, la pression d’une blessure des gros vaisseaux abdominaux, en gardant à
abdominale doit rester très basse et s’abaisser encore, voire l’esprit que la paroi médiane sus-ombilicale se projette sur
s’annuler, quand on soulève la paroi. Dernier critère et non l’aorte et la veine cave (l’ombilic sur leur bifurcation), que les
le moindre : la constatation d’un tympanisme généralisé axes vasculaires iliaques sont soulevés sur le détroit supérieur
quand on percute l’abdomen à distance du point de ponc- comme sur un billot, et que toute dépression imprimée à la
tion. Si une seule de ces manœuvres laisse un doute sur la paroi amène celle-ci tout près de ces vaisseaux.
bonne position de l’aiguille, il faut recommencer la ponction.
Nous avons exclu de cette liste de tests celui qui consiste à Règle prioritaire d’une bonne direction
utiliser l’aiguille comme un palpateur en la faisant osciller
(Fig. 10)
latéralement [12]. En effet, ce geste est très controversé en
raison du risque d’agrandir une perforation viscérale ou C’est une règle simple et intangible : quelle que soit la cible
vasculaire déjà provoquée par la ponction [11]. opératoire et l’intention logique de s’axer sur elle, il ne faut
Une fois l’aiguille considérée en bonne position, la pression jamais diriger le trocart vers un axe vasculaire, aortique vers le
d’insufflation imposée peut être élevée provisoirement à haut, iliaque vers le bas. Ceci implique, quand le trocart est
15-20 mmHg pour réduire l’enfoncement de la paroi sous la implanté dans la région ombilicale :
pression du premier trocart [13]. On considère le pneumopéri- • en cas d’opération sus-ombilicale, d’orienter le trocart vers un
toine comme achevé quand le manomètre indique une pression hypocondre (Fig. 10A) ;

Figure 9. Ponction péritonéale.


A, B. À l’ombilic.
C. Dans l’hypocondre gauche.

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Figure 10. Introduction du premier trocart après pneumopéritoine par ponction.


A. Vers le haut.
B. Vers le bas.

Figure 11. Gestuelle d’introduction d’un trocart.

• en cas d’opération sous-ombilicale, d’orienter le trocart selon


un angle de 45° en arrière et en bas en restant surtout dans Figure 12. Trocart à contrôle optique EndoTIP®.
un plan strictement sagittal et médian et visant mentalement
le cul-de-sac de Douglas. Un opérateur droitier ne peut
correctement respecter cet impératif que s’il se place à gauche Variante
du patient, ne serait-ce que pour ce geste dont l’importance Une variante intéressante : les trocarts à contrôle optique. Il
est vitale (Fig. 10B). peut s’agir de trocart à usage unique à embout transparent
conique, ou muni d’une lame coupante actionnable par
Gestuelle d’introduction gâchette (Visiport™, OptiView®), ou d’un trocart à vis restérili-
sable (EndoTIP™) [14], dans lesquels l’optique est introduite et
La gestuelle d’introduction de ce premier trocart a aussi son qui traversent ainsi, progressivement et sous contrôle de la vue,
importance (Fig. 11). Son robinet doit être ouvert. Le trocart les plans pariétaux jusqu’au péritoine (Fig. 12). Ils peuvent être
doit être empaumé fermement de la main droite après avoir introduits avec ou sans insufflation préalable. Ces trocarts
déverrouillé son éventuel système de protection automatique. Si diminuent donc le caractère aveugle de la pénétration, mais la
le trocart est muni d’un mandrin à extrémité conique, le prudence reste de ne pas les utiliser au voisinage d’une cicatrice.
mouvement doit osciller circulairement. La main gauche fait
office de garde. L’incision cutanée doit être agrandie si elle
semble un tant soit peu suivre le trocart dans son mouvement ■ Réglage définitif des constantes
d’enfoncement. Chez les patients épais, pour ne pas glisser sur d’insufflation
l’aponévrose, la pointe du trocart doit d’abord accrocher celle-ci
perpendiculairement avant de prendre sa direction définitive Ce réglage est établi en choisissant :
précisée ci-dessus. Une fois le trocart enfoncé, l’optique y est • la pression imposée la plus faible possible, au-delà de laquelle
immédiatement introduite pour vérifier sa bonne position le volume abdominal n’augmente plus, variant généralement
intrapéritonéale, avant même d’y connecter le tuyau de 8 à 12 mmHg selon la corpulence et la flaccidité pariétale
d’insufflation. du patient ;

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• un débit d’insufflation imposé supérieur à 10 l/min, en Direction d’introduction


sachant que ce débit est forcément limité par le calibre de
l’aiguille puis par celui de l’embout du trocart. Il appartient Dans la mesure où l’introduction se fait ici sous contrôle
donc au chirurgien de connaître les limites propres à son optique, il faut la faire en direction de la cible opératoire pour
matériel. minimiser l’élargissement de la traversée pariétale et les résis-
tances mécaniques lors du mouvement des instruments.

■ Introduction des autres trocarts Choix des calibres et du nombre


Principes d’emplacement de trocarts
Au principe classique mais ambigu de « triangulation », nous Le souci de non-invasivité et la miniaturisation des instru-
préférons celui de l’arc de cercle centré sur la cible opératoire, ments poussent de plus en plus à diminuer, voire à supprimer
en préservant si possible un espace minimal de 7 cm entre l’utilisation de trocarts de calibre supérieur à 5 mm, y compris
chaque trocart (chez un adulte de taille moyenne) (Fig. 13). pour l’optique, et a réduire au maximum le nombre des trocarts.
Selon les opérations, cet arc de cercle doit souvent être ouvert Mais si ce principe contredit ceux de la sécurité et de la
(notamment si on travaille sur deux régions différentes de simplicité opératoire, c’est à ces derniers qu’il faut donner la
l’abdomen, comme dans une colectomie gauche) ou refermé priorité en bannissant toute acrobatie, à l’instar des bonnes
(par exemple pour les opérations dans la région épigastrique où règles de la chirurgie conventionnelle où l’on ne craint pas
l’on est bridé latéralement par les rebords costaux). Les trocarts d’utiliser les quatre mains de l’opérateur et de son aide, ni
d’exposition, dédiés à l’écartement ou à l’irrigation-aspiration, d’agrandir sa voie d’abord en cas de difficulté d’exposition. En
sont situés aux extrémités de l’arc de cercle. Ils peuvent aussi chirurgie laparoscopique, cet agrandissement correspond à la
être implantés à l’opposé de cet arc, de l’autre côté de la cible. pose d’un trocart supplémentaire, et le remplacement d’un
Mais il faut savoir alors qu’ils ne peuvent être utilisés que pour trocart de 5 mm par un trocart de calibre supérieur ne doit pas
ces gestes simples d’exposition, car dès que l’angle entre l’axe se discuter s’il permet l’introduction d’un instrument utile au
d’un instrument et celui du regard de l’opérateur dépasse 90°, bon déroulement de l’intervention.
il est quasiment impossible de travailler « en miroir ». Dans
cette disposition des trocarts, il faut aussi tenir compte de
certains sites favorables ou défavorables en eux-mêmes :
• l’ombilic est le site le plus souvent utilisé pour le trocart
optique. Mais il faut savoir ne pas être trop « nombriliste »,
“ Point important
notamment si l’ombilic est anormalement bas situé, anomalie
pouvant encore être accentuée par l’insufflation ; À la moindre difficulté d’exposition, il faut savoir utiliser ses
• la ligne médiane, ainsi que les bords externes des grands deux mains et les deux mains de l’aide, soit quatre trocarts
droits dans leurs deux tiers supérieurs sont trois lignes au moins.
privilégiées par leur moindre risque d’une blessure vasculaire
pariétale ;
• les fosses iliaques, dans leur définition anatomique stricte (en
dessous des crêtes iliaques et en dehors des grands droits), Quel type de trocart utiliser ?
sont en revanche à éviter en raison de leur traversée par le
Le trocart idéal n’existe pas [15] . En matière de trocart
trajet des vaisseaux épigastriques, à moins de pouvoir les
réutilisable, nous apprécions les trocarts à clapet magnétique
repérer par transillumination sur un patient pas trop gros ;
pour leur base peu encombrante, la douceur de leur glisse
• les flancs sont également peu propices à la chirurgie laparos-
instrumentale, enfin la simplicité de leur mécanisme et de leur
copique (transpéritonéale) en décubitus dorsal, car ils expo-
entretien allant de pair avec leur robustesse.
sent à la chute latérale des instruments et à une rencontre
inopportune avec l’intestin.
Si l’on désire faire sur la peau un marquage des emplace- Trocart qui glisse...
ments de trocarts, il faut le faire après l’insufflation, car celle-ci Une fois implanté, le plus important pour un trocart est de
a pour effet de décaler notablement tous les repères cutanés ne pas glisser dans la paroi sous l’effet de traction ou de pulsion
préalables. des instruments. Les trocarts à visser dans la paroi sont à cet
égard les plus fiables. Il existe également des trocarts à usage
unique munis de ballonnets ou de butoirs, internes ou externes.
Pour les autres, la résistance au retrait peut être assurée par un
simple point de fixation à la peau (Fig. 14A), et celle à l’enfon-
cement par un collier externe (simple cravate d’adhésif ou
segment de tube en plastique fendu) (Fig. 14B, C).

Fuite de gaz autour d’un trocart...


Elle est facilement contrôlée par un point rétrécissant l’orifice
cutané autour du trocart.

Attention au roulis !
Lors de l’introduction des instruments dans les trocarts, il
faut faire attention au roulis.
En effet, en cas d’inclinaison latérale, le grêle s’accumule dans
la partie latérale déclive de l’abdomen, et se trouve exposé à la
rencontre d’un instrument introduit par un trocart placé de ce
côté. D’autre part cet instrument doit franchir un « espace
mort » avant d’arriver sous le contrôle de l’optique. Il est donc
capital de ne pas diriger directement l’instrument vers la cible
opératoire, mais de lui imprimer un trajet d’abord ascendant
Figure 13. Implantation des trocarts. Principe de l’arc de cercle. Opt :
vers la paroi antérieure avant de l’orienter vers cette cible
optique ; MG : main gauche ; MD : main droite ; A : aide.
(Fig. 15).

8 Techniques chirurgicales - Appareil digestif


Gestes de base en chirurgie laparoscopique de l’adulte ¶ 40-050

Figure 14. Retenue d’un trocart.


A. Par un fil.
B. Par un tube fendu.
C. Par une cravate adhésive.
Figure 15. Introduction des instruments. Le risque pour le grêle en
inclinaison latérale.
■ Rétropneumopéritoine
contrôle optique est généralement préférée. Si l’on veut éviter
Lombaire l’introduction aveugle du premier trocart, en l’absence de cavité
Il est surtout utilisé pour les interventions portant sur le rein, réellement gonflable par ponction préalable, il faut utiliser le
la surrénale ou les voies urinaires supérieures. Il est générale- principe d’un glissement contrôlé de l’optique sur la gaine
ment commencé par une petite incision au bord inférieur de la postérieure d’un muscle droit jusqu’à l’espace de Retzius [16, 17].
douzième côte. À partir de celle-ci, le rétropneumopéritoine Une courte incision horizontale de 12 à 15 mm est réalisée en
peut être commencé à travers un premier trocart par une dessous et latéralement à l’ombilic, du côté opéré, ouvrant la
pneumodissection assistée de mouvements de l’optique et gaine antérieure du muscle qui est dissocié ou refoulé pour
complétée instrumentalement après introduction d’un exposer la gaine postérieure (Fig. 16A). Un trocart à pointe
deuxième trocart. Elle peut aussi être amorcée par le doigt ou mousse est alors introduit contre cette gaine et poussé à fond
un ballon introduits au travers de cette incision. vers le bas, en direction de la face postérieure du pubis, en se
laissant guider par elle. Le mandrin est remplacé par le laparos-
cope qui, aidé par l’insufflation et quelques mouvements doux
Pelvien de va-et-vient progresse jusqu’au contact du pubis en créant un
Il est surtout utilisé pour la cure extrapéritonéale des hernies tunnel dans la graisse rétropariétale (Fig. 16B). Dans ce tunnel
inguinocrurales et pour les prostatectomies radicales. Là encore est implanté un premier trocart hypogastrique médian ou
il est possible d’utiliser une courte incision médiohypogastrique paramédian (Fig. 16C). À travers ce trocart, la dissection du
pour amorcer la dissection au doigt et la compléter par un tunnel se poursuit à une main : jusqu’au contact du pubis ; puis
ballon gonflable poussé sur un ou deux côtés, mais le coût de derrière lui ; puis derrière le ligament de Cooper en prenant
ce ballon n’en justifie l’emploi que pour une intervention garde de ne pas le racler pour ne pas blesser l’arcade vasculaire
lourde comme une prostatectomie radicale. Pour des interven- qui le contourne (Fig. 17A). Les ciseaux doivent ensuite reculer
tions plus légères et fréquentes comme les cures extrapéritonéa- pour ne pas s’engager en avant des vaisseaux épigastriques qui
les de hernies, une dissection entièrement instrumentale sous doivent rester plaqués sur la paroi. Ils reprennent contact avec

Figure 16. Rétropneumopéritoine pelvien.


A. Introduction du premier trocart dans la gaine du muscle droit.
B. Jusqu’à l’espace de Retzius.
C. Introduction du deuxième trocart.

Techniques chirurgicales - Appareil digestif 9


40-050 ¶ Gestes de base en chirurgie laparoscopique de l’adulte

Figure 17. Rétropneumopéritoine pelvien. Étapes de la dissection (A à C). a : pubis ; b : ligament de Cooper ; c : paroi antéroexterne ; d : paroi latérale ; e :
trocart au-dessus de l’épine iliaque antérosupérieure.

Figure 18. L’écartement doit se faire tangentiellement (A) et non en


butée (B).
Figure 19. Suspension transpariétale. a : du canal cystique ; b : du
ligament rond.
celle-ci en haut et en dehors des vaisseaux (Fig. 17B). Ils
cheminent ensuite sur la face profonde du muscle transverse
exposant ainsi l’espace de Bogros jusqu’au voisinage de l’épine Application aux différents viscères
iliaque antérosupérieure (Fig. 17C). À ce niveau, il devient
souvent nécessaire de repérer, de séparer du péritoine et de Foie et voies biliaires
désinsérer de la paroi le feuillet blanc nacré du fascia transver- Des écarteurs de tout type peuvent être utilisés. L’exposition
salis, pour gagner les quelques centimètres nécessaires à de la face inférieure du foie et du pédicule hépatique peut
l’implantation d’un deuxième trocart opérateur au-dessus de également être améliorée par une suspension du ligament rond
l’épine. Entre l’espace de Retzius et celui de Bogros sont alors à l’aide d’un fil transfixiant la paroi de part et d’autre de ce
exposés la région inguino-cruro-obturatrice et l’axe vasculaire ligament. L’exposition et la mise en tension du pédicule
iliaque externe. La dissection peut être, bien entendue étendue hépatique peuvent aussi être assurées par une suspension
à l’espace sous-péritonéal opposé. transpariétale de la vésicule et du moignon cystique (Fig. 19).

Estomac
■ Exposition interne Une fois libérées ses attaches épiploïques, l’estomac se prête
bien à un refoulement par des écarteurs ou à une suspension
par des fils transpariétaux.
Principes
Épiploon et côlon transverse
Comme en chirurgie ouverte, la création d’un large espace
opératoire sans obstacle visuel ou matériel est la clé principale Leur bascule vers le haut, en avant du foie et de l’estomac
d’une opération aisée et sûre. Mais en cœliochirurgie, le (aplati s’il le faut par sondage gastrique), est le premier temps
refoulement manuel des viscères mobiles n’est pas possible, sauf du refoulement du grêle abordé ci-dessous.
à utiliser une petite laparotomie associée pour y introduire la
main de façon étanche (méthode hand assisted). Mais son usage Intestin grêle
reste réservé à certaines opérations lourdes. En situation Il faut considérer que le grêle occupe grosso modo la moitié
générale, pour refouler les viscères, force est donc d’utiliser du volume de l’abdomen. Au chirurgien, commandant l’incli-
d’autres moyens que sont : naison de la table, de lui laisser la moitié opposée à celle qu’il
• avant tout la pesanteur en jouant sur l’inclinaison axiale et désire dégager (Fig. 20). Si le grêle n’obéit pas à ce déplacement
latérale de la table ; déclive, c’est qu’il reste retenu par des adhérences propres,
• mais aussi des écarteurs dont la variété est grande, le plus notamment par une fixation pelvienne de la dernière anse ou
simple pouvant être tout instrument à extrémité mousse du cæcum, ou par des adhérences fixant l’épiploon, et par son
(pince fenêtrée, canule d’aspirateur, etc.), à condition de ne intermédiaire le côlon transverse, à la paroi antérieure et aux
l’employer qu’en appui latéral, tangentiel au viscère refoulé gouttières paracoliques. Il est alors inutile et dangereux de
(Fig. 18). vouloir déplacer le grêle à l’instrument tant que l’on n’a pas

10 Techniques chirurgicales - Appareil digestif


Gestes de base en chirurgie laparoscopique de l’adulte ¶ 40-050

Figure 20. Il faut laisser au grêle la moitié du volume abdominal.

Figure 22. Suspension transpariétale de l’utérus par un fil et du côlon


sigmoïde par une pince (prenant une frange graisseuse).

Figure 21. Grêle maintenu par une pince mordant le péritoine pariétal.

libéré toutes ces retenues qui l’empêchent de basculer dans


l’hémiabdomen qu’on lui destine. Ce n’est qu’après avoir rendu
possible cette bascule que l’on peut la compléter en déplaçant
les anses encore rebelles à la pince fenêtrée ou en les immobi- Figure 23. Fixation à la cuisse gauche, par un élastique, d’une pince
lisant par un écarteur. Mais attention : les écarteurs métalliques exposant le cystique et la voie biliaire principale.
se déployant en éventail ou en losange doivent être bannis sur
le grêle dont la paroi risque de se coincer dans leurs articula-
tions. La meilleure retenue de ces anses reste une pince fenêtrée, Vagin
barrant transversalement l’abdomen comme une barrière et
Son ascension et la présentation de ses faces ou de ses culs-
pouvant être fixée à la paroi ou à un méso controlatéral (mais
de-sac peuvent être assurées par un hystérophore en cas de geste
pas à une paroi digestive) (Fig. 21).
utérin, par une lame malléable coudée ou par une suspension
pariétale.
Côlon sigmoïde
Il peut être provisoirement récliné par un écarteur ou par la Qui écarte ?
prise d’une pince atraumatique. S’il doit être refoulé de façon
stable et durable, il peut être gardé attiré par l’intermédiaire L’aide écarte, l’opérateur opère... Sauf exception, l’opérateur
d’une de ses franges, soit au moyen d’une pince fenêtrée, ne doit jamais sacrifier sa main gauche à l’écartement perma-
maintenue par un support statique (ou au drapage par un nent d’un viscère. Il doit réserver cette main à l’exposition
élastique), soit au moyen d’un fil transfixiant la frange (Fig. 22). rapprochée (cf. infra), et pouvoir l’utiliser à tout moment pour
coaguler ou clamper un vaisseau. L’écartement permanent
Uterus et annexes appartient à l’aide ou à un système autostatique qui le rem-
place. Ce système peut être un bras articulé ou flexible solidaire
L’exploration est au mieux réalisée par une pince sus- de la table. Ce peut être aussi un simple élastique que nous
pubienne fermée refoulant en avant l’angle tubo-ovarien et utilisons notamment pour l’exposition du canal cystique et de
mettant en tension la trompe, en exposant du même coup la voie biliaire principale : l’élastique relie la pince qui tient le
l’ovaire. Pour une exposition plus durable du cul-de-sac de collet vésiculaire (ou le mignon cystique) au champ de recou-
Douglas, l’utérus peut être suspendu par un monofilament à la vrement de la cuisse gauche (Fig. 23).
paroi de l’hypogastre, à mi-distance entre le pubis et l’ombilic
(Fig. 22). Il peut aussi être présenté de façon plus mobile par un
instrument à extrémité large et mousse (comme une curette)
Exposition rapprochée (Fig. 24)
associé à deux pinces de Pozzi ou de Museux sur le col, ou par C’est l’étalement de la zone immédiate de travail par la main
un manipulateur utérin plus sophistiqué (hystérophore). gauche de l’opérateur et s’il le faut par la main droite de l’aide,

Techniques chirurgicales - Appareil digestif 11


40-050 ¶ Gestes de base en chirurgie laparoscopique de l’adulte

l’image et celui de son champ, se fait sous l’injonction du


premier intéressé, l’opérateur. Mais l’aide doit savoir anticiper
les situations où il faut avancer l’optique (dissection, section ou
hémostase précises) et celles où il faut la reculer (perte de vue
d’un instrument, ou de sa partie non gainée en cas de section-
coagulation électrique, saignement en jet, exploration ou
contrôle de l’ensemble d’une région...).
Le recentrage permanent de l’image sur l’extrémité des
instruments opérateurs.
Enfin, le maintien de la stabilité permanente de l’image et
donc de l’optique, exigence que ne peut physiologiquement pas
respecter un aide déconcentré et/ou fatigué.

Supports « robotisés »
À commande vocale ou digitale, ils permettent au mieux de
respecter tous ces impératifs, et d’économiser une main de
l’aide, si on en accepte le coût, l’encombrement relatif et le
Figure 24. L’exposition rapprochée. Ajustement de la tension des tissus nécessaire effort d’apprentissage. Ces systèmes peuvent être
par la main gauche de l’opérateur et la main droite de l’aide. imités avec profit, mais non égalés, par un simple support
articulé ou flexible solidaire de la table, dont l’orientation est
facile à modifier d’un petit geste de la main (c’est le « robot du
pauvre »).
assurant la légère tension tissulaire indispensable à la précision
de l’instrument opérateur. En cas de suintement liquidien,
sanglant ou autre, l’aide remplace sa pince par l’aspirateur. Une Optique à vision oblique
compresse placée à proximité immédiate (unique et comptée !)
peut également être utile à cet assèchement tout en protégeant Elle apporte un grand confort de vue « dans les coins »,
les tissus de l’appui des instruments qui écartent. comparable à la liberté de mouvement cervical que retrouverait
un opérateur conventionnel débarrassé d’une minerve (dont
l’optique à vision directe reproduit la contrainte). Cet avantage
est tel qu’il est bien difficile de s’en passer après l’avoir goûté...

“ Point important
Mais il a une contrepartie : celle d’exiger une main supplémen-
taire pour régler la rotation de l’optique, qu’elle soit une main
de l’opérateur, ou une main de l’aide privé alors de toute action
La main gauche doit toujours rester disponible pour instrumentale.
clamper un vaisseau.
Buée
Plus que la souillure de l’optique par des éclaboussures
■ Maniement du laparoscope diverses, la buée est le « poison » de la laparoscopie. Condensa-
tion due au réchauffement trop rapide de la surface de l’optique
Une vision claire, stable, bien orientée et bien centrée, est la dans l’enceinte abdominale, elle « empoisonne » d’autant plus
première de toutes les exigences en chirurgie laparoscopique. que l’on refroidit plus souvent l’optique en la sortant pour la
nettoyer. De nombreux « trucs » peuvent être tentés pour
Précautions et réglages initiaux désamorcer ce cercle vicieux : nettoyage interne de l’optique en
la frottant sur un organe non souillé ni trop gras (foie, péritoine
Une compresse introduite dans la gaine stérile peut être utile pariétal), ou en l’aspergeant de sérum ; nettoyage externe [18]
pour assécher la buée pouvant se produire pendant l’opération avec un produit antibuée, un antiseptique à pouvoir mouillant
entre la caméra et l’oculaire du laparoscope.
(comme la Bétadine Scrub®), ou du sérum chaud (mais non
Avant le montage de l’ensemble caméra-câble-optique, on
brûlant !) gardé dans un « thermos » stérile et sans chercher à
contrôle à l’œil nu la bonne qualité apparente de ces trois
sécher l’extrémité de l’optique avant de la réintroduire, etc.
éléments, et notamment l’absence de dépôts sur leurs surfaces
optiques. Cela permet de remplacer d’emblée ou de connaître le Mais aucun de ces procédés ne marche à coup sûr, et rien ne
premier élément à remplacer en cas de mauvaise vision vaut la prévention de cette buée en évitant tous les mouve-
ultérieure. ments et sorties inutiles du laparoscope, selon les bonnes règles
Après ce montage, on fait un réglage de la balance des blancs de maintien précisées ci-dessus.
et une mise au point « à l’infini » de l’optique.

Tenue manuelle du laparoscope ■ Gestes de dissection


Elle doit respecter les impératifs suivants. Comme en chirurgie ouverte, le préalable à toute bonne
Le plus important : le respect de la verticalité-horizontabilité dissection est une bonne exposition rapprochée.
de l’anatomie auquel l’opérateur est naturellement plus sensible
Pour un droitier, la main gauche étale et expose en disposant
que son aide cameraman. À ce dernier de corriger en perma-
soit d’une pince fenêtrée soit d’une pince bipolaire, cette
nence la tendance qu’a l’optique à tourner sur son axe ne
serait-ce que sous le poids du câble optique. Il peut s’aider en dernière ayant sur la première l’inconvénient d’une prise moins
cela par des repères anatomiques sur l’écran, mais aussi par la sûre des tissus mais l’avantage d’une possibilité de coagulation
direction du câble électrique de la caméra qui doit toujours être immédiate et « pas à pas ». La main droite dissèque :
gardé dans un plan strictement vertical. • soit en dissociant les tissus, aux ciseaux, au crochet ou au
Le respect d’une distance optimale vis-à-vis de la cible dissecteur ;
opératoire, compromis entre le choix d’un agrandissement de • soit en les coupant avec ou sans coagulation première.

12 Techniques chirurgicales - Appareil digestif


Gestes de base en chirurgie laparoscopique de l’adulte ¶ 40-050

Dans les deux cas, il ne faut pas négliger l’aide qu’apporte à


la dissection le gaz carbonique pénétrant et distendant les
■ Énergie électrique : situations
espaces sous-péritonéaux. Cette « carbodissection » est facilitée et gestes dangereux
par le soulèvement accentué des berges de l’incision péritonéale
Les accidents dus à l’utilisation du courant électrique doivent
au fur et à mesure de leur section.
être une hantise pour le chirurgien laparoscopiste qui, pour bien
les prévenir, doit parfaitement en connaître les deux principaux
mécanismes :
■ Hémostase préventive • la brûlure de proche en proche par propagation directe de la
chaleur, dépassant toujours les limites du visuel ;
Selon ses habitudes et son budget, l’opérateur a aujourd’hui • l’arc électrique, de loin le plus dangereux car générateur
un choix varié de procédés d’hémostase préventive et de section d’une forte énergie ponctuelle, source possible de perforation
coagulante. d’un organe creux, immédiate ou secondaire par chute
d’escarre. L’arc électrique est d’autant plus dangereux qu’il
Section-coagulation électrique monopolaire peut survenir à distance du champ visuel, entre un instru-
ment conducteur mal isolé et un viscère tout proche assurant
conventionnelle le « retour » du courant vers la masse. Ce défaut d’isolation
Au crochet ou aux ciseaux, cela reste le procédé le plus peut se situer sur la gaine de l’instrument, soulignant
simple. Mais elle nécessite plus de précautions et de vigilance l’importance de la vérification systématique de celle-ci par
qu’en chirurgie ouverte vis-à-vis des accidents qu’elle peut l’aide instrumentiste. Mais il peut aussi s’agir de l’articulation
entraîner. Le crochet en particulier, bien qu’excellent instrument ou de la base (non gainés) des mors de l’instrument, échap-
de dissection et de section de proche en proche, peut être pant latéralement à l’optique quand on travaille au plus près
dangereux par son talon si on ne prend pas garde d’éloigner d’un organe. Le risque est accru quand cet organe, par
celui-ci de tout contact d’organe avant d’actionner la exemple un appendice ou une trompe en fin d’exérèse, ne
coagulation-section. Il faut donc éviter de l’utiliser dans la tient plus que par une fine attache, insuffisante au retour du
dissection rapprochée des gros vaisseaux, du cholédoque ou des courant qui passe alors par l’instrument (Fig. 25). Dans ces
uretères, ainsi que dans celle de la voûte du diaphragme qui situations il faut donc redoubler de prudence et ne terminer
peut se contracter violemment et même se perforer à son l’exérèse qu’en contrôlant visuellement la totalité des parties
contact. non gainées des instruments.
À puissance égale en watts, dépendant du voltage et de
l’intensité et qu’il faut toujours régler au départ au minimum,
Section froide sur coagulation bipolaire le risque d’arc électrique est proportionnel au voltage. Il mérite
première donc que l’on réfléchisse avec son fournisseur ou son ingénieur
d’établissement sur le meilleur réglage pour travailler avec un
C’est une méthode plus sûre à condition de ne pas chercher minimum de voltage [2].
à coaguler en masse et d’un seul coup les gros pédicules, mais
de coaguler puis de couper pas à pas. À chaque pas, une fois un
début de noircissement apparu, il est inutile de carboniser
davantage, mais il faut recoaguler si à la coupe le tissu apparaît
légèrement rosé [2]. Bien entendu, il faut rester conscient du
“ Point important
risque d’échauffement d’un organe noble de voisinage, comme
l’uretère ou la voie biliaire. L’arc électrique nécrose et perfore.
En action monopolaire, penser toujours « retour du
courant ».
Harmonic® et LigaSure™ Travailler avec le plus bas voltage possible.
Les procédés de section-coagulation ultrasoniques de type
Harmonic ® , ou de soudure électronique de type LigaSure ™
apportent une sécurité et un confort de travail justifiant leur Nul n’est à l’abri, non plus, du geste malencontreux d’un
coût dans les interventions longues et potentiellement difficiles. pied qui appuie par mégarde sur la pédale du bistouri, et peut
Leur apprentissage est rapide mais indispensable. Il faut résister déclencher une lésion intra-abdominale. Si le cas se produit,
à la tentation qu’ils donnent de se passer d’un contour préalable signalé par l’alerte sonore du bistouri, il ne reste plus qu’à
des pédicules vasculaires avant de les couper. vérifier soigneusement la région exposée et... à être plus vigilant
par la suite. On peut rapprocher de ce gag ceux, électriques ou
Clips mécaniques, qui peuvent survenir sur des instruments « aban-
donnés à tort » dans leur trocart sans être tenus et donc
Toutes sortes de clips, en métal, en plastique ou résorbables, contrôlés par une main et un regard.
peuvent être également employés sur des pédicules vasculaires
à condition de les avoir isolés et contournés au préalable, en
sachant que les clips métalliques, non « encliquables », peuvent
se comporter comme des petits clamps vasculaires, et glisser à
la moindre contrainte mécanique au cours de l’opération.

Hémostase à l’agrafeuse
L’usage d’une agrafeuse « vasculaire » reste un procédé ultime,
coûteux et le plus souvent inutile, mais qu’on ne peut condam-
ner dans des conditions particulières où le chirurgien, notam-
ment peu expérimenté, l’estime plus sûr pour le patient.

Ligature
La ligature manuelle reste probablement, comme en chirurgie
Figure 25. À la fin d’une exérèse, risque de retour du courant par un arc
conventionnelle, le procédé le plus sûr à partir d’un certain
électrique en dehors du champ de vision.
calibre de pédicules (6-7 mm ?).

Techniques chirurgicales - Appareil digestif 13


40-050 ¶ Gestes de base en chirurgie laparoscopique de l’adulte

■ Gestes d’hémostase, de compétence vasculaire est bien entendu souhaitable s’il en


est un à proximité, mais il ne doit en aucun cas retarder la
« quand ça saigne... » décision de la conversion ni son exécution. En revanche, il est
important d’avoir établi à froid avec ce dernier un protocole
d’abord, de clampage et de réparation vasculaire applicable par
Saignement le long d’un trocart tout chirurgien viscéral aux prises avec une telle situation.
Non menaçant en termes de perte sanguine, cet écoulement
peut être très gênant par la pollution qu’il entraîne au niveau Conversion pour hémorragie active
du champ opératoire et surtout sur l’optique. Si le point de
saignement est endoscopiquement visible, l’hémostase peut être (sans hémostase provisoire possible
assurée par voie interne. Sinon, il suffit de resserrer provisoire- sous laparoscopie)
ment l’orifice autour du trocart par un point total extracutané
(décrit plus loin). Ce n’est qu’au niveau des vaisseaux épigastri- Contrairement au cas précédent, il faut faire vite, et d’autant
ques qu’un saignement abondant peut se produire et nécessiter plus que le saignement est important : grande laparotomie avec
alors une hémostase soit par ligature directe par exploration les instruments que l’on a sous la main (un bistouri suffit pour
externe de l’incision, soit par un point total extracutané en X, commencer) ; hémostase provisoire par compression manuelle
comme décrit au chapitre « Fermeture des orifices pariétaux » ou par clampage en masse non agressif. On peut alors, et alors
(cf. Fig. 50). Une hémostase provisoire peut aussi être assurée seulement, prendre le temps de s’installer, de s’exposer et de
par une sonde à ballonnet de type Foley fixée à la peau sous s’équiper pour réaliser l’hémostase définitive de la paroi et celle
traction, ou par un trocart muni d’un ballonnet. du vaisseau en cause.

Saignement d’un pédicule « moyen » ■ Nœuds


(cystique ou colique par exemple)
Avec la suture, ils représentent de loin la partie la plus longue
Hormis certains détails, comme celui de commencer par et la plus laborieuse de l’apprentissage manuel du chirurgien.
reculer l’optique pour lui éviter d’être atteinte par un jet artériel, Apprentissage qui repose sur deux piliers :
et celui d’éviter une aspiration trop intense et immédiate • la compréhension logique de la nature, de la technique, de la
(mieux vaut laver à forte pression), la marche à suivre en cas tenue et de la non-tenue des nœuds. C’est le but de cet
d’accident hémorragique n’a rien de spécifique à la cœliochirur- article ;
gie, et passe par les étapes suivantes :
• l’entraînement, non pas in vivo sur le patient (et à ses
• assurer une hémostase provisoire. Faute de doigt qui appuie, dépens) mais sur un support home-trainer ou une simple boîte
la pince fenêtrée est l’instrument le moins traumatisant et le en carton, en commençant par utiliser des gros fils pour
plus immédiatement disponible pour clamper en masse ce mieux analyser les nœuds réalisés et leurs éventuels défauts.
qui saigne, ou à défaut le comprimer si possible par l’inter-
médiaire d’une compresse ou d’une « boulette » de textile. Si
l’hémostase est assurée, on passe à l’étape suivante. Sinon, il Définitions (Fig. 26)
faut convertir rapidement en laparotomie (cf. infra) ; Comme en chirurgie conventionnelle, il faut opposer le
• prendre le temps de nettoyer son optique, de ranger sa table nœud plat et la clé, et leurs malfaçons : le nœud de vache et le
à instruments, de brancher un irrigateur-aspirateur manquant, nœud coulant.
d’assécher l’ensemble de la zone opératoire, ou de placer un
nouveau trocart, équivalent laparoscopique de l’agrandisse-
Préalable sur le sens des enroulements
ment d’une voie d’abord classique ;
• préparer l’hémostase définitive en réfléchissant à son mode, Comme en chirurgie ouverte, et quel que soit le nœud réalisé,
et donc au matériel spécifique à demander : aiguillée, clips, il faut retenir :
bipolaire, etc. ; • qu’il y a toujours deux sens possibles dans l’enroulement
• l’hémostase définitive, parce que bien préparée, peut alors primitif d’un demi-nœud ;
être entreprise avec un maximum de chances de succès, la • que ce sens d’enroulement ne conditionne pas le blocage
plus élective et contrôlée possible. La conversion s’impose d’un nœud ni sa nature de nœud plat ou de clé, mais
bien sûr en cas d’échec. seulement la présence ou non de torsions exposant le fil à se
casser et le nœud à se desserrer ;
• qu’il faut toujours en pratique alterner le sens d’enroulement.
Blessure d’un gros vaisseau sous-péritonéal
(aorte ou ses branches, veine cave) Nœuds intracorporels
Elle représente l’accident le plus grave, d’autant plus qu’il
risque d’être méconnu. En effet, son saignement peut être Préparation du nœud (Fig. 27)
modeste dans l’immédiat du fait de la contre-pression de C’est elle avant tout qui conditionne la facilité et la réussite
l’insufflation en cas de plaie veineuse ou d’un effet de « plaie du nœud. La main droite (pour un droitier) manie le porte-
sèche » en cas de plaie artérielle, ou peu apparent en raison aiguille. La main gauche peut se contenter d’une pince fenêtrée
d’une diffusion essentiellement rétropéritonéale. La pointe d’un mais, en début d’expérience ou dans des situations difficiles,
trocart mal dirigé reste le principal, mais non exclusif, pour- l’utilisation d’une pince fine ou mieux d’un deuxième porte-
voyeur de cet accident. Le risque est alors de mal interpréter, ou aiguille apportent un confort appréciable, confort encore accru
de ne pas interpréter, la présence inexpliquée de sang dans si l’on utilise des instruments à extrémité courbe. L’écart
l’abdomen, celle d’un hématome au niveau d’un épiploon, d’un angulaire idéal entre les deux instruments est de 90°. L’aiguillée
méso ou d’une zone rétropéritonéale, ou le signalement par doit mesurer au moins 10 cm, davantage si l’on prévoit plu-
l’anesthésiste d’une chute de la pression artérielle. La règle est sieurs nœuds.
au contraire de penser systématiquement à ce type de plaie
vasculaire et de la rechercher, fut-ce pour l’éliminer, en exposant Enroulement du fil autour du porte-aiguille
largement le vaisseau potentiellement suspect. Une fois recon-
(Fig. 28)
nue, ou restant seulement suspectée, la blessure d’un gros
vaisseau appelle sans tergiverser une conversion laparotomique S’il a été bien préparé, l’enroulement peut et doit se faire avec
systématique et immédiate. En cas de chute tensionnelle, cette un déplacement minimal des deux instruments. Ce déplace-
conversion doit se faire de la façon la plus rapide possible ment, néanmoins subtil, plus latéral et axial que rotatif, peut se
comme décrite à la fin de cet article. Le recours à un chirurgien comparer à celui d’aiguilles à tricoter. Cet enroulement doit

14 Techniques chirurgicales - Appareil digestif


Gestes de base en chirurgie laparoscopique de l’adulte ¶ 40-050

Figure 26.
A. Nœud plat simple : au moins deux demi-noeuds plats serrés symétriquement.
B. « Nœud de chirurgien » le premier demi-nœud est doublé.
C. nœud de vache (à éviter).
D. Clé (nœud de Toupet) : au moins trois demi-clés serrées asymétriquement, dont deux coulissent autour d’un brin tendu et une troisième de blocage, après
inversion du brin tendu.
E. Nœud coulant (à éviter).

Figure 27. Nœud intracorporel. Préparation du noeud. Le passage du Figure 28. Nœud intracorporel. Premier enroulement. Le porte-aiguille
fil dans les tissus ne doit pas laisser un brin libre de plus de 2-3 cm. se place d’abord entre les deux brins, et croise ensuite le fil par au-dessus.
L’aiguille est placée hors du champ visuel. La pince gauche doit saisir le Entouré alors de ce fil, il saisit l’extrémité du brin libre et l’attire à travers
brin long de façon strictement perpendiculaire, en laissant entre cette l’enroulement.
prise et le point de sortie tissulaire une provision de fil suffisamment
longue (5 cm). Cette provision est attirée par la main droite vers l’optique
tandis que la pince gauche se rapproche aussi de ce brin, amorçant une
boucle sur le fil. Le nœud doit ensuite se dérouler à proximité immédiate
Achèvement de la clé (Fig. 31)
du brin libre sur lequel doivent se centrer l’optique et le regard de Une quatrième demi-clé, sur le même brin porteur que la
l’opérateur. précédente (le brin libre), n’est pas de trop si l’on n’est pas
certain de la rigueur de son nœud.

En cas de blocage intempestif


rester très lâche autour du porte-aiguille pour ne pas s’y bloquer,
grâce à la provision suffisante de fil précisée plus haut. Il ne Au cours de la réalisation du nœud, il est le plus souvent
doit pas pour autant s’échapper du porte-aiguille lors d’un possible de le débloquer en le transformant en clé coulissante
voyage hasardeux de ce dernier qui doit donc, répétons-le, (Fig. 32). Cette transformation en clé peut également être
travailler en regard immédiat du brin libre en attente. utilisée au cours de la réalisation d’un nœud plat si l’on
s’aperçoit que le premier demi-nœud tend à se desserrer.
Choix de la clé ou du nœud plat
Quand on manque de fil
Comme l’indique la Figure 29, c’est le sens du serrage de ce
Un artifice permet de réaliser encore un ou plusieurs demi-
premier enroulement, encore indifférencié, qui conditionne sa
nœuds : il consiste à saisir l’aiguille à la place du brin long
différenciation en demi-nœud plat ou en demi-clé.
comme l’indique la Figure 33.
Achèvement du nœud plat (Fig. 30)
Pour éviter le desserrage du premier demi-nœud plat, on peut
Nœuds extracorporels
doubler le premier enroulement, commençant ainsi un « nœud Moins utilisés que les précédents, ils restent précieux pour les
de chirurgien » (Fig. 26B). Deux demi-nœuds plats bien faits et ligatures dont le serrage doit être vigoureux, comme celle d’un
bien serrés suffisent en principe, mais il est prudent d’en faire appendice, d’un canal cystique large, d’une trompe, d’un gros
un troisième, voire un quatrième, en continuant d’alterner le vaisseau ou d’un faufilage de péritonisation. Il faut en distinguer
sens de l’enroulement et celui du serrage. deux types.

Techniques chirurgicales - Appareil digestif 15


40-050 ¶ Gestes de base en chirurgie laparoscopique de l’adulte

Figure 29. Selon le sens du serrage, l’enroulement indifférencié (A) se différencie soit : en demi-nœud plat, si les deux brins sont serrés de façon parfaitement
symétrique et rectiligne dans la direction opposée à leur position de départ (B). Ceci amène à croiser les instruments à moins d’avoir pensé au départ à
interchanger le rôle des instruments en basculant au préalable l’aiguille du côté du brin libre ; soit en demi-clé autour du brin long (C) si celui-ci est mis en
tension avant le brin libre et ce dernier serré en le remettant dans sa position initiale, à droite dans notre exemple.

Figure 30. Les quatre temps d’un nœud plat.


A. L’aiguille est basculée du côté du brin libre. La pince droite saisit le brin long à angle droit et le déplace près du brin libre. Une anse de fil est attirée vers
l’optique. La pince gauche est placée entre les deux brins. Après l’enroulement, elle va saisir le brin libre.
B. Serrage par traction symétrique sur les deux brins qui changent tous deux de direction.
C. Répétition symétrique de A et B. L’aiguille est à nouveau basculée du côté du brin libre. C’est la pince gauche qui saisit le brin long, et la pince droite qui
se place entre les deux brins pour l’enroulement et la saisie du brin libre.
D. Le sens du serrage est opposé à celui de C.
NB : Entre B et C, la nécessaire alternance du sens de l’enroulement (pour éviter un nœud de vache) et de celui du serrage (pour éviter une clé) forcent à
intervertir les mains (pour éviter de les croiser).

Nœuds descendus en bloc Leur confection hors du ventre peut se faire selon des
Quelles qu’en soient les techniques, il s’agit toujours de techniques variées ayant en commun :
nœuds coulissants dont le blocage s’impose si le nœud n’est pas • la nécessité d’une longueur de fil d’au moins 90 cm, supé-
descendu à frottement dur. rieure à celle des aiguillées habituelles ;

16 Techniques chirurgicales - Appareil digestif


Gestes de base en chirurgie laparoscopique de l’adulte ¶ 40-050

Figure 31. La clé.


A. Serrage des deux premières demi-clés autour du brin long tendu en premier.
B. Blocage par une (ou deux) demi-clé autour du brin libre tendu.
NB : important, toutes les demi-clés sont serrées en tirant sur le brin libre dans la même direction, celle qu’il avait au départ (vers la droite dans notre exemple).

Figure 32. Déblocage d’un nœud : les deux instruments tirent de part et d’autre du nœud, pour y réaligner les demi-noeuds déjà réalisés sous forme de
demi-clés coulissantes, avant de les descendre en utilisant le porte-aiguille entrouvert comme un pousse-nœud.

ment sur cet orifice, stoppant la fuite de gaz et séparant les


deux brins : le brin attenant à l’aiguille ou à la bobine en
avant, que nous appelons brin porteur maintenu tendu par la
main gauche ; le brin libre en arrière, tenu par la main
droite ;
• l’exécution manuelle d’une série plus ou moins complexe
d’enroulements aboutissant à un nœud coulissant, en ne
retenant ici que deux techniques parmi d’autres ;
C le nœud de Weston, diffusé en France par Berthou
(Fig. 34) ;
C le nœud de Roeder (Fig. 35), qui a l’avantage d’utiliser
moins de fil que le précédent, mais l’inconvénient de
nécessiter l’usage d’une pince ;
• le serrage du nœud (Fig. 36) ;
• la descente du nœud doit se faire à l’aide d’un pousse-nœud
ne pouvant laisser échapper le fil, de type Drouard et donc
capable de l’éloigner des anses grêles lors du trajet aveugle
déjà signalé entre le trocart d’introduction et le champ de
Figure 33. Utilisation de l’aiguille pour faire un nœud avec un fil très l’optique (Fig. 15). En effet, si l’on ne prend garde de dévier
court. L’aiguille est saisie par sa pointe, servant de prolongement latéral à ainsi le trajet du nœud, celui-ci risque de se coincer sur la
la pince et facilitant ainsi l’enroulement. paroi d’une anse grêle (Fig. 37). Le nœud de Weston-Berthou
peut aussi être descendu par simple traction sur le brin libre
avec une pince ordinaire ou un porte-aiguille ;
• l’utilisation d’un trocart prolongeant la direction de l’avant- • le blocage du nœud. Il s’impose s’il n’a pas été descendu à
bras (coude au corps) de l’opérateur ; frottement dur (Fig. 38).
• l’obturation de l’orifice du trocart, pendant la réalisation L’Endoloop® est une ligature toute préparée sous la forme
extérieure du nœud, par un doigt de l’aide posé transversale- d’un lasso de fil lentement résorbable comportant un nœud de

Techniques chirurgicales - Appareil digestif 17


40-050 ¶ Gestes de base en chirurgie laparoscopique de l’adulte

Figure 34. Nœud de Weston-Berthou (A à F).

Figure 35. Nœud de Roeder (simplifié) (A à D).

Roeder et un pousse-nœud intégré. Une gaine permet de clés, mais ce sont en fait des clés qui sont le plus facilement et
protéger l’intestin ou l’épiploon d’un coinçage par le nœud le plus souvent réalisées. Leur principe est, en gardant les deux
dans sa traversée de l’« espace mort ». Il est évidemment plus brins longs dans la main gauche et en choisissant d’en tendre
coûteux qu’un nœud identique fait à la main. Il est donc un plus que l’autre, de descendre sur ce brin porteur deux demi-
surtout utile pour les chirurgiens n’ayant pas la maîtrise ou une clés une par une, d’inverser ensuite le brin porteur pour y
pratique fréquente des nœuds extracorporels. descendre une ou plusieurs demi-clés de blocage, reproduisant
un nœud de Toupet.
Nœuds décomposés, descendus demi-nœud Deux nœuds principaux répondent à ces objectifs, le nœud
par demi-nœud « de Clermont-Ferrand » (Fig. 39) et le nœud de Leroy (Fig. 40).
Les demi-nœuds sont faits à la main comme en chirurgie Ces nœuds décomposés ont l’avantage d’éviter la confection
conventionnelle. Ils peuvent être finalisés en nœuds plats ou en extracorporelle d’un nœud relativement complexe, et aussi

18 Techniques chirurgicales - Appareil digestif


Gestes de base en chirurgie laparoscopique de l’adulte ¶ 40-050

Figure 38. Comment bloquer les nœuds extracorporels. Il ne faut pas


compter sur le soi-disant blocage automatique de ces nœuds lors de leur
écrasement sous la pression du pousse-nœud. La solution la plus sûre
consiste, une fois le nœud descendu, à mettre en tension le brin libre
(coupé assez long à cet effet), à y placer le pousse-nœud, et à serrer une
dernière fois le nœud, ce qui a pour effet de basculer le dernier enroule-
Figure 36. Serrage d’un nœud extracorporel, toujours à deux mains. a : ment à la façon d’une demi-clé de blocage.
serrage du brin libre pour obtenir un coulissement à frottement dur ; b :
remise en tension du brin long (porteur) pour corriger un éventuel
blocage dû à la manœuvre précédente. Le doigt de l’aide obture le trocart dont certains chirurgiens apprécient la facilité d’introduction et
en écartant les deux brins. de maniement, mais qui n’obéissent pas à la même rigueur de
traversée tissulaire que les aiguilles régulièrement courbes.

Introduction et retrait des aiguillées


Il ne faut pas tenter de passer une aiguillée par un trocart
dont on n’est pas sûr qu’il la laissera entrer et sortir sans risque
de blocage ou de rupture ou, pire, de perte de l’aiguille dans
l’abdomen. C’est le plus souvent le cas des trocarts de 5 mm si
l’on dispose d’un porte-aiguille de 5 mm, à moins d’utiliser une
aiguille de très petite taille ou de faible courbure. L’ablation
provisoire du trocart pour pousser directement l’aiguille dans
l’abdomen, ou l’en sortir, est également source d’incidents. Il ne
faut pas non plus tenter ce passage par un trocart de 10 mm
réutilisable à clapet à moins de le munir d’un réducteur
cylindrique de 10-8 mm, en entrant alors l’aiguille à reculons
dans ce réducteur pour ne pas endommager son opercule. Dans
tous les cas, il est préférable de ne pas saisir l’aiguille directe-
ment, mais par l’intermédiaire du fil, saisi à 1 ou 2 cm de
Figure 37. Un gag du nœud extracorporel : le coincement sur une anse l’aiguille (Fig. 41), en vérifiant avant l’introduction que l’aiguille
grêle à la descente. Évitable par un trajet « en deux temps » du pousse- ainsi suspendue se présente dans une direction propice à sa
nœud (Fig. 15). Ne pas chercher à défaire le nœud, couper les brins en le saisie dans l’abdomen.
laissant en place.
Saisie de l’aiguille dans l’abdomen
Prenons le cas d’une aiguille courbe et appelons P le point où
d’éviter l’« effet scie » que la descente d’un nœud en bloc peut le porte-aiguille doit saisir l’aiguille, à l’union des deux tiers
théoriquement imprimer à un vaisseau en coulissant derrière antérieurs et du tiers postérieur. L’aiguille peut se présenter dans
lui. Ils ont en revanche l’inconvénient de multiplier les passages les positions les plus diverses.
du pousse-nœud dans l’abdomen et donc aussi celui d’attraper
au vol une anse grêle. Cas favorables
Dans les cas favorables, elle se présente dans un plan grossiè-
Nœuds mixtes rement perpendiculaire à l’axe du porte-aiguille, la pointe
Ils associent un nœud extracorporel coulissant simplifié, fait orientée du bon côté pour le coup droit ou le revers choisi. Le
de deux demi-clés, bloqué en intracorporel par un nœud plat ou porte-aiguille n’a plus alors qu’à la saisir au point P, quitte à
des demi-clés autour du brin libre devenu brin porteur. desserrer brièvement ses mors pour faire deux corrections
éventuelles :
• l’avancement ou le recul de la pointe de l’aiguille, par un
■ Suture léger contre-appui de celle-ci sur un viscère ou un autre
instrument ;
• le redressement vertical d’une aiguille un peu trop « cou-
Choix de l’aiguille chée », en déprimant légèrement la surface du viscère avec
Comme en chirurgie ouverte, ce choix dépend avant tout de l’extrémité du porte-aiguille (Fig. 42).
l’épaisseur des tissus à traverser (qui détermine la longueur de
l’aiguille), de leur résistance à la pénétration (qui détermine le
Autres cas
caractère rond ou triangulaire de la pointe), de leur finesse (qui Dans les autres cas, moins favorables, la pince gauche doit
détermine celle de l’aiguille) et de leur profondeur (qui détermine intervenir mais il ne faut pas en attendre la même dextérité que
la courbure). La cœliochirurgie n’exige donc pas la gestion d’un celle qu’auraient directement les doigts pour présenter correcte-
stock d’aiguillées spécifiques à l’exception d’aiguilles « en ski » ment l’aiguille. La pince gauche doit se contenter de saisir le fil

Techniques chirurgicales - Appareil digestif 19


40-050 ¶ Gestes de base en chirurgie laparoscopique de l’adulte

Figure 39. Nœud décomposé « de Clermont-Ferrand » (A à D). Il nécessite un pousse-noeud spécial échancré en U, permettant de descendre les demi-clés
une par une, au prix d’un certain apprentissage pour ne pas laisser s’échapper le pousse-noeud. Ce dernier doit s’écarter du brin porteur pour descendre plus
facilement les demi-clés, en les tirant plutôt qu’en les poussant. C’est donc plutôt un tire-nœud qu’un pousse-nœud.

Figure 40. Nœud de Leroy (Strasbourg). Il se pratique à l’aide d’aiguillées spéciales (Endo Suture System®), préenfilées sur un embout de pousse-nœud,
permettant aussi la confection du nœud demi-nœud par demi-noeud sans risque d’échappée du pousse-nœud. Le prix de revient du nœud est plus important,
mais sa réalisation est très aisée et sûre.

à proximité de l’aiguille et de soulever celle-ci tandis que le Conduite générale de la suture


porte-aiguille la prend « au mieux » au point P (Fig. 43).
L’action combinée des deux instruments suffit le plus souvent
à une saisie correcte. Si la prise obtenue n’est pas parfaite mais L’axe de suture idéal, dont il faut se rapprocher autant que
orientée du bon côté pour le coup droit ou revers choisi, le possible, est parallèle à l’axe du porte-aiguille et donc de son
porte-aiguille achève seul de la corriger. Si la pointe de l’aiguille trocart. La difficulté maximale est rencontrée quand l’axe de ce
se trouve orientée du mauvais côté, et du même coup la trocart est perpendiculaire au plan de la suture, forçant alors à
convexité mal orientée vers le haut ou vers le bas, il est possible changer de trocart ou à modifier de l’autre main la présentation
d’inverser cette position en saisissant l’aiguille à deux mains et des berges. Comme en chirurgie ouverte, la suture est menée
en imprimant à chacun des instruments un mouvement de d’avant en arrière ou de droite à gauche (pour un droitier). Le
pronation comme l’indique la Figure 44. choix du porte-aiguille a son importance, en sachant que la plus

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Gestes de base en chirurgie laparoscopique de l’adulte ¶ 40-050

Figure 41. Saisie de l’aiguillée à l’extérieur du ventre.

Figure 43. Redressement d’une aiguille en la soulevant par le fil.

Figure 44. Inversion de l’orientation de l’aiguille par le « coup du


décérébré » de Mosnier.

Figure 42. Redressement d’une aiguille couchée en reculant le mors


inférieur du porte-aiguille.

grande liberté de mouvement rotatif est donnée par les poignées


palmaires, la plus mauvaise par les poignées « revolver ».

Cas particulier des surjets


À la fin de chaque sortie tissulaire, la main gauche doit saisir
l’aiguille près de sa pointe, et la présenter au porte-aiguille en
conservant sa bonne orientation. Le nœud terminant le surjet
se fait en utilisant comme brin libre la dernière anse de passage
du fil. Des clips de blocage peuvent remplacer les nœuds de Figure 45. Démarrage d’un surjet par un nœud coulissant préparé à
départ et de fin du surjet, à condition qu’ils ne glissent pas sur l’extérieur.
le fil. Le nœud intracorporel de départ peut également être
remplacé par un nœud coulissant préparé hors du ventre
(Fig. 45) et que traverse l’aiguille après son premier passage Machines à coudre
tissulaire. Le surjet peut enfin être terminé par un nœud de
pêcheur dit « d’Aberdeen » (Fig. 46). Tous ces procédés peuvent Leur grande variété témoigne de l’ingéniosité des fabricants
faire gagner du temps dans des surjets de péritonisation, mais mais peut-être aussi du fait qu’aucune n’est totalement satisfai-
la sécurité reste le nœud intracorporel classique dans les surjets sante. La plus connue en France est l’Endo StitchTM qui peut
délicats sur un organe creux ou sur un vaisseau. réaliser des points séparés, des surjets, des nœuds plats ou des
clés à l’aide de courtes aiguilles droites spéciales passant
successivement d’un mors à l’autre (Fig. 47). Cette machine
■ Suture à la machine astucieuse ne peut cependant travailler que sur des tissus dont
les berges se laissent facilement prendre entre ses mors. Elle ne
Deux types de machines peuvent être utilisées. convient donc pas à des sutures fines biliaires, urinaires ou

Techniques chirurgicales - Appareil digestif 21


40-050 ¶ Gestes de base en chirurgie laparoscopique de l’adulte

Figure 46. Arrêt d’un surjet par un nœud de pêcheur dit « d’Aberdeen » (A à D). A et B doivent être exécutés deux fois.

Figure 47. Machine à coudre Endo StitchTM (A, B).

vasculaires par exemple, ni à des tissus dont la mobilité des • la contrainte du point fixe de la traversée pariétale ne permet
berges est peu complaisante, ni à une suture dont le plan se pas de manipuler l’instrument aussi facilement qu’en chirur-
présente tangentiellement à celui de l’instrument. Elle est à gie ouverte et notamment d’orienter l’instrument dans une
éviter sur les ligaments de Cooper [19]. Enfin, comme à toutes direction idéale par rapport à l’organe à suturer, même en
ses concurrentes (et à l’Endoloop® pour les nœuds), on peut lui disposant de pinces agrafeuses articulées. Il appartient donc à
reprocher, outre son coût, de maintenir le chirurgien dans une l’opérateur de bien réfléchir au meilleur emplacement pour le
dépendance dont seules peuvent le libérer la maîtrise et la trocart à utiliser, et de mobiliser suffisamment l’organe pour
pratique courante des nœuds manuels. le présenter correctement à l’agrafeuse ;
• la facilité et le gain de temps qu’apportent ces agrafeuses ne
Agrafeuses doivent pas conduire à en généraliser l’usage pour des temps
Qu’elles soient linéaires, coupantes (de type GIA®) ou non (de opératoires pouvant être réalisés à la main presque aussi
type TA ® ), ou circulaires (de type EEA ® ), leur description facilement et rapidement, et à un moindre coût, comme la
générale n’est plus à faire. Leurs indications, leur technique et section de mésos ou d’épiploons peu vascularisés et l’hémos-
les précautions d’emploi n’ont rien de spécifique à la cœliochi- tase de petits pédicules. En revanche, pour les anastomoses
rurgie [20, 21] à l’exception de deux points qui méritent d’être digestives, ces avantages, auxquels il faut ajouter la moindre
soulignés : pollution du champ opératoire, conduisent à juste titre la

22 Techniques chirurgicales - Appareil digestif


Gestes de base en chirurgie laparoscopique de l’adulte ¶ 40-050

plupart des chirurgiens à préférer la suture mécanique, même cœliochirurgie micro-invasive. En attendant, en cas d’hystérec-
dans les indications où elle n’a pas fait la preuve de sa tomie totale, il reste la voie la plus simple d’extraction de la
supériorité en matière de morbidité ou de mortalité. Il faut pièce opératoire, quitte à morceler un utérus fibromateux trop
pourtant savoir se méfier du « tout métal », notamment là où gros pour être extrait d’un seul tenant [2].
quelques points à la main font aussi bien, aussi vite, et peut-
être mieux que la machine, comme pour la fermeture des
orifices d’introduction des mors des pinces GIA®. ■ Péritonisation
L’indication et la technique de péritonisation n’ont rien de
spécifique à l’approche laparoscopique, en dehors de quelques


particularités concernant :
Point important • la fermeture des brèches mésentériques ou mésocoliques ; s’il
s’agit d’une exérèse digestive cœlioassistée, l’essentiel de la
brèche doit être fermée sous laparoscopie car elle est malaisée
La maîtrise des sutures et des nœuds (intra- et en profondeur par la petite laparotomie d’extraction ;
extracorporels) permet de n’utiliser qu’à bon escient un • la péritonisation inguinale après cure de hernie par voie
matériel à usage unique coûteux. intrapéritonéale (TAPP) ; les agrafes ou tacks peuvent être
utilisés, mais sont beaucoup moins fiables que la suture,
même si on prend le soin de ne pas fixer les berges bord à
bord mais de les apposer l’une sur l’autre. De plus, ces
agrafages exposent au risque de lésion d’un nerf sensitif
■ Adhésiolyse pariétal. La suture est donc préférable, par points séparés, par
un surjet classique, ou par un faufilage à l’aide d’un monofi-
Les patients sans cicatrice abdominale sont de plus en plus lament résorbable résistant, fermement serré par un nœud
rares. Chez tous les autres, il faut commencer par un temps extracorporel. Ce faufilage peut se faire en deux parties si
d’adhésiolyse qui doit être conçu comme une opération à part l’incision est longue. Une fois serré, il a l’avantage de réduire
entière, y compris en ce qui concerne l’installation, la position considérablement la cicatrice de péritonisation ;
des opérateurs et celle des trocarts. • la péritonisation pelvienne après les promontofixations, avec
La création du pneumopéritoine se fait impérativement de ou sans douglassectomie. Son temps latéral exige une atten-
façon ouverte, à distance de toute cicatrice. Une fois l’optique tion particulière à l’uretère droit, tout proche du bord droit
introduite il faut choisir soigneusement l’emplacement du de l’incision péritonéale pararectale. Ce bord droit doit donc
premier trocart opérateur par lequel commence l’adhésiolyse, à être décollé avant d’être suturé au flanc droit du rectosig-
une seule main, avec pour premier objectif de libérer l’espace moïde et de son méso. La péritonisation antérieure, inter-
pour un deuxième trocart opérateur. L’adhésiolyse peut alors se vagino-vésicale, compte tenu de la laxité péritonéale à ce
poursuivre à deux mains en commençant par libérer les adhé- niveau, peut être réalisée par un ou deux faufilages comme le
rences avec la paroi antérieure de façon à pouvoir compléter décrit le paragraphe précédent.
l’implantation « régulière » des autres trocarts en fonction de
l’opération projetée. Pendant toute cette adhésiolyse, il faut
éviter d’utiliser le crochet en raison de sa tendance à glisser le ■ Fin de l’opération
long de l’adhérence vers l’intestin.
Drainage
Si un drainage est nécessaire, le drain peut être introduit :
■ Extraction des pièces d’exérèse • par un trocart déjà en place s’il s’agit d’un drain tubulaire
Elle doit se faire de façon protégée : relié à un système d’aspiration passive (siphonage) ou active
• soit à travers un trocart (de calibre adapté) pour les petites (Redon). Le point de fixation à la peau assure du même coup
pièces comme un ganglion ou un appendice fin ; l’étanchéité nécessaire de la traversée pariétale ;
• soit à travers une petite laparotomie protégée par une jupe en • par un nouveau trocart (de 10 où de 12) ou une incision, en
plastique pour les pièces volumineuses. L’incision de Pfan- position déclive sur un flanc, s’il s’agit d’un drainage ouvert
nenstiel se prête particulièrement à cet usage ; devant débiter directement par gravité dans une poche collée
• soit, pour les pièces de volume intermédiaire, par l’intermé- (lame ondulée ou multitubulaire, ou tube). L’incision est alors
diaire d’un sac, dont il existe deux types : le « sac épuisette » réalisée de dehors en dedans à l’exception du péritoine,
avec un manche et une commande extérieure d’ouverture- effondré de dedans en dehors par une pince qui attire le
fermeture, très facile à manier mais monopolisant un trocart drain à l’intérieur de l’abdomen.
de 10 mm ; les sacs largables, moins faciles à manier mais
pouvant être laissés en attente dans l’abdomen et y servir de Vérifications d’usage
poubelle. À un moindre coût, un simple gant ou doigt de
Comme toujours en chirurgie, il est de règle de vérifier
gant sans poudre peuvent en faire office.
l’hémostase et l’absence de matériel oublié (compresse, calcul,
L’extraction de tous ces sacs ne doit pas se faire en force mais clamp largable, pièce anatomique). Le grêle et l’épiploon sont
en agrandissant à la demande l’incision cutanée et aponévroti- remis en place.
que de l’orifice de sortie. Quand la forme allongée de l’organe
enlevé s’y prête (appendice, vésicule, trompe), son extrémité
doit affleurer le collet du sac pour pouvoir être saisie avec lui Retrait des instruments
par la pince d’extraction évitant ainsi un effet pelote élargissant Ils sont retirés un par un sous contrôle visuel de leur extré-
le fond du sac. L’extraction peut alors se faire par traction sur mité, en se méfiant d’un viscère coincé dans un écarteur, retenu
la pièce elle-même plus que par traction sur le sac. Le volume dans une pince fermée, ou ventousé par l’aspirateur. Les trocarts
du sac peut aussi être réduit par l’aspiration d’un éventuel sont aussi retirés un par un sous contrôle visuel en vérifiant
contenu liquide ainsi que par l’extraction ou la fragmentation l’absence de saignement sur leur orifice.
d’éventuels calculs. Enfin, il est prudent de contrôler endosco-
piquement la sortie du sac afin d’en dépister un début de
rupture et d’en éviter la fâcheuse et brutale vidange dans
Exsufflation
l’abdomen. Elle est assurée par une large ouverture du dernier trocart et
Le vagin sera peut-être un jour la routine en tant que voie une compression bimanuelle de l’abdomen. Celle-ci ne doit pas
unique d’introduction et d’extraction dans le cadre d’une se faire d’avant en arrière ni au niveau des flancs, ce qui a pour

Techniques chirurgicales - Appareil digestif 23


40-050 ¶ Gestes de base en chirurgie laparoscopique de l’adulte

Figure 48. Exsufflation par pression latérale bimanuelle sur les dernières
côtes.

effet de refouler le gaz vers les coupoles, mais latéralement au


niveau des dernières côtes (Fig. 48). En cas d’intervention pour
cancer, il est logique et prudent d’exsuffler l’abdomen de façon
active, à l’aspirateur, pour diminuer le risque de greffes cellulai-
res projetées par l’exsufflation passive sur les orifices de trocart.
Le dernier trocart est retiré après y avoir introduit un instru-
ment à bout mousse ou l’optique pour l’empêcher d’entraîner
(par ventousage) de l’intestin ou de l’épiploon.

Infiltration anesthésiques des orifices


pariétaux
Contrairement à la simple instillation d’anesthésiques locaux
dans la cavité péritonéale, controversée, cette infiltration a fait
la preuve de son efficacité et devrait donc être systématique [22].
Il ne s’agit pas tant d’infiltrer la graisse sous-cutanée que le
derme et les plans immédiatement sus- et sous-aponévrotiques.
Figure 49. Soulèvement-exposition des berges aponévrotiques.
Fermeture des orifices pariétaux A. Par un écarteur de Farabeuf fin.
B. Par une sonde de Foley (Desmaizières).
Chez l’adulte, la fermeture aponévrotique n’est recommandée
que pour les orifices de calibre égal ou supérieur à 10 mm, en
tenant compte des taux faibles mais variables d’éventration que
donne la littérature (autour de 1 % [23]) et en sachant que ce
taux passe de 0,23 % pour un trocart de 10 mm à 3,1 % pour
un trocart de 12 mm [24]. Pour cette fermeture, on peut envisa-
ger trois situations :
• la paroi est mince : il est possible et simple de rapprocher les
berges aponévrotiques à l’aide d’une aiguillée de fil lentement
résorbable à aiguille petite et robuste d’une courbure de
4/8 ou 5/8 de cercle ;
• la paroi est épaisse : la technique précédente devient acroba-
tique et risque de se solder par une hypocrite suture « graisso-
graisseuse ». Elle peut être facilitée par un soulèvement de la
paroi tandis qu’un écarteur refoule la peau et la graisse d’un
côté puis de l’autre en présentant ainsi chaque berge aponé-
vrotique à l’aiguille ou/et à une pince à griffe. Ce soulève-
ment pariétal peut être assuré de plusieurs manières :
C l’engagement d’un écarteur de type Farabeuf très fin
(5 mm) sous une extrémité de l’incision qu’il attire ferme-
ment au zénith (Fig. 49A) ;
C le procédé de Desmaizières (Paray le Monial), qui pousse à
travers l’orifice une sonde de Foley dont le ballon, une fois
gonflé, assure le même soulèvement d’un angle de l’inci-
sion (Fig. 49B) ;
• la paroi est très épaisse (patient obèse) : à moins d’agrandir Figure 50. Point total extracorporel pour orifice difficile à fermer.
l’incision cutanée, le contrôle direct de l’aponévrose devient
très difficile. La solution est alors le point total extracutané,
passé en X de part et d’autre du trocart, sous contrôle
cœlioscopique, à l’aide d’une aiguille de Reverdin « droite » etc.) aucun n’a fait la preuve de sa supériorité ou de son
ou d’un passe-fil dérivé de type Endoclose® (Fig. 50). infériorité en matière de résultat à long terme. Au chirurgien de
Pour la fermeture des incisions cutanées, rappelons qu’au sein choisir la technique qu’il trouve la plus simple, la plus rapide,
des nombreux procédés possibles (suture classique ou intrader- la plus flatteuse à court terme ou (ce qui nous paraît le plus
mique, agrafes classiques ou « esthétiques », adhésifs ou collage, important) la plus économique.

24 Techniques chirurgicales - Appareil digestif


Gestes de base en chirurgie laparoscopique de l’adulte ¶ 40-050

■ Conversion en laparotomie [5] Brogmus G, Leone W, Butler L, Hernandez E. Best practices in or suite
layout and equipment choices to reduce slips, trips, and falls. AORN J
Elle doit toujours être prévue, en ayant une boîte à laparoto- 2007;86:384-94.
mie complète à proximité immédiate. Elle doit être conçue [6] Sandor J, Ballagi F, Nagy A, Rákóczi I. A needle-puncture that helped
to change the world of surgery. Homage to János Veres. Surg Endosc
comme une voie d’abord complémentaire et non comme un
2000;14:201-2.
échec. On y a recours dans deux types d’indication, de contexte
[7] Millat B. Pneumopéritoine en « ouvert » au nom de l’assurance qualité.
bien différent. J Chir (Paris) 2005;142:344-7.
[8] Msika S. Assurance qualité... ou comment s’assurer d’un
Conversion « tranquille » pneumopéritoine de qualité? J Chir (Paris) 2005;142:341-2.
[9] Champault G, Cazacu F, Taffinder N. Serious trocar accidents in
Elle peut être indiquée dans les circonstances suivantes : laparoscopic surgery: a French survey of 103, 852 operations. Surg
mauvaise tolérance hémodynamique ou respiratoire du patient, Laparosc Endosc 1996;6:367-70.
incident ou accident non hémorragique ne pouvant être réglé [10] Hasson HM. A modified instrument and method for laparoscopy. Am
sous laparoscopie, ou simplement non-progression de l’opéra- J Obstet Gynecol 1971;110:886-7.
tion après un délai « raisonnable » qu’il appartient à chaque [11] Vilos GA, Ternamian A, Dempster J, Laberge PY. The Society of
chirurgien de se fixer à l’avance. La conversion doit alors se Obstetricians and Gynaecologists of Canada. Laparoscopic entry: a
faire en prenant le temps de se mettre dans les conditions review of techniques, technologies, and complications. J Obstet
Gynaecol Can 2007;29:433-65.
idéales d’une laparotomie (installation, drapage, instrumen-
[12] Mouret P. Création du pneumopéritoine et introduction du premier
tation).
trocart sur ventre vierge. J Cœliochir 2006(n°57):7-12.
[13] Reich H, Ribeiro SC, Rasmussen C, Rosenberg J, Vidali A. High-
Conversion pour hémorragie active pressure trocar insertion technique. JSLS 1999;3:45-8.
[14] Mosnier H, Duval H. Le pneumopéritoine en laparoscopie: 3. Mise en
(sans hémostase provisoire possible place d’un premier trocart sans mandrin. J Chir (Paris) 2003;140:
sous laparoscopie) 167-8.
[15] Mosnier H, Cortese E. Les complications dues aux trocarts en
Contrairement au cas précédent, et comme on l’a vu à propos laparoscopie. J Chir (Paris) 1998;135:217-8.
de la blessure d’un gros vaisseau, il faut faire vite, et d’autant [16] Begin GF. Traitement des hernies inguinales par laparoscopie par voie
plus que le saignement est important : grande laparotomie avec totalement extrapéritonéale. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Tech-
les instruments que l’on a sous la main (un bistouri suffit pour niques chirurgicales - Appareil digestif, 40-137-A, 2007.
commencer) ; hémostase provisoire par compression manuelle [17] Pouliquen X. Laparoscopie pelvienne pré-péritonéale. J Chir (Paris)
ou par clampage en masse non agressif. On peut alors, et alors 2003;140:339-42.
seulement, prendre le temps de s’installer, de s’exposer et de [18] Delteil C, Lory D. Voir ou ne pas voir en cœliochirurgie. Quelle
s’équiper pour réaliser l’hémostase définitive de la paroi et celle antibuée pour le cœlioscope ? J Cœliochir 1995(n°15):69-71.
du vaisseau en cause. [19] Jones RA. Broken needle tip with the EndostitchTM. Gynaecol Endosc
1999;8:59.
[20] Pouliquen X. La suture digestive mécanique. Première partie : Les
Remerciements de l’auteur, pour leurs précieux avis d’experts, aux Dr G.-F. sutures linéaires. J Chir (Paris) 2001;138:358-61.
Begin†, J.C. Berthou, P. Breil, F. Desmaizières, B. Gayet, J. Leroy, H. Levard, [21] Pouliquen X. La suture digestive mécanique. Deuxième partie : Les
H. Mosnier et A. Wattiez. anastomoses circulaires. J Chir (Paris) 2001;139:33-6.
.
[22] Borie F, Millat B. Cholécystectomie et exploration de la voie biliaire
principale par cœlioscopie. Traitement cœlioscopique de la lithiase de
■ Références la voie biliaire principale. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Tech-
niques chirurgicales - Appareil digestif, 40-950, 2004 : 25p.
[1] Tomasini C. Maîtriser l’endoscopie et la vidéo au bloc opératoire et en [23] Loriau J, Manaouil D, Verhaeghe P. Cœlioscopie : les éventrations sur
service d’endoscopie. Paris: Lamarre; 1994. orifices de trocarts. Ann Chir 2002;127:252-6.
[2] Botchorishvili R, Velemir L, Wattiez A, Tran X, Bolandard F, [24] Kadar N, Reich H, Liu CY, Manko GF, Gimpelson R. Incisional hernias
Rabischong B, et al. Cœlioscopie et cœliochirurgie : principes géné- after major laparoscopic gynecologic procedures. Am J Obstet Gynecol
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[3] Krettek C, Aschemann D. Positioning techniques in surgical Pour en savoir plus
applications: thorax and heart surgery, vascular surgery, visceral and
transplantation surgery, urology, surgery to the spinal cord and Milson JW, Böhm B, Nakajima K. Laparoscopic colorectal surgery. New
extremities, arthroscopy, paediatric surgery, navigation ISO-C 3D. York: Springer; 2006.
Heidelberg: Springer; 2006. Neudecker J, Sauerland S, Neugebauer E, Bergamaschi R, Bonjer J,
[4] De Calan L, Gayet B, Bourlier P, Perniceni T. Cancer du rectum : ana- Cuschieri A, et al. The European Association for Endoscopic Surgery
tomie chirurgicale, préparation à l’intervention, installation du patient. clinical practice guideline on the pneupoperitoneum for laparoscopic
EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Techniques chirurgicales - Appa- surgery. Surg Endosc 2002;16:1121-43.
reil digestif, 40-606, 2004 : 12p. www.cice.fr.

X. Pouliquen, Praticien hospitalier (xavier.pouliquen@free.fr).


Service de chirurgie viscérale, Hôpital Simone-Veil, 28, rue du Dr-Roux, 95600 Eaubonne, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Pouliquen X. Gestes de base en chirurgie laparoscopique de l’adulte. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris),
Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-050, 2009.

Disponibles sur www.em-consulte.com


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