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L’Union européenne à 25 :

Les avancées de la future Constitution européenne

I. LES ACQUIS

1 Uniformisation juridique : un texte unique

Le texte supprime la structure en piliers héritée du Traité de Maastricht. Le texte actuel se compose désormais de quatre parties :

- La Partie I - Architecture constitutionnelle (préambule, les définitions et objectifs de l’Union, les droits fondamentaux, les
compétences de l’Union, les finances, l’action extérieure, la Politique extérieure, de sécurité et de défense commune, la justice et affaires
intérieures et la clause de sortie) ;

- La Partie II - Charte des droits fondamentaux

- La Partie III - Politiques et mises en œuvre des actions de l’Union – reprend en les réorganisant et en les modifiant parfois, des
dispositions déjà existantes dans les traités en vigueur et qui régissent les politiques de l’Union ;

- Les Dispositions générales et finales qui assurent la continuité juridique avec les traités actuels, notamment ceux de Maastricht,
d’Amsterdam et de Nice.

2. La personnalité juridique de l’Union :

La future Constitution dote l’Union européenne d’une personnalité juridique qui lui permettra notamment de signer des traités
bilatéraux ou multilatéraux et de devenir membre d’organisations internationales comme les Nations Unies ou le Fonds monétaire
international.

3. Clarification de la répartition des compétences

Le texte clarifie la répartition des compétences entre l’Union et les Etats membres. Le titre III de la Partie I définit dans le détail les
compétences exclusives de l’Union (politique commerciale et monétaire pour la zone euro, union douanière, conservation des ressources
biologiques de la mer), les domaines de compétences partagées (marché intérieur, espace de liberté et de justice, agriculture et pêche,
transports, énergie, cohésion économique et sociale, environnement, protection des consommateurs, « enjeux communs de sécurité en
matière de santé publique ») et les domaines d’action d’appui (industrie, santé, éducation, culture, protection civile).

4. Simplification des instruments juridiques

La future Constitution réduit le nombre d’instruments juridiques existant et en change la dénomination pour adopter une terminologie plus
proche des traditions juridiques des Etats membres:

- Les Lois européennes se substituent aux Règlements ;

- Les Lois-cadres européennes remplacent les Directives ;

- Les Règlements européens, sont des actes non-législatifs de portée générale pour la mise en œuvre des actes législatifs. Ces textes
d’application des Lois ou des Lois-cadres peuvent être obligatoires dans tous leurs éléments ou laisser aux Etats membres la compétence du
choix et de la forme ;

- Les Décisions européennes sont également des textes de mise en œuvre d’actes législatifs mais qui revêtent un caractère d’obligation
dans tous leurs éléments pour l’ensemble des pays destinataires ;

- Les Recommandations et Avis sont adoptés par les Institutions communautaires (Parlement, Commission et Cour de justice) mais
n’ont aucun effet contraignant.
De manière générale, les lois et lois-cadres européennes relèvent de la procédure législative de co-décision et sont adoptées conjointement
par le Conseil et le Parlement européen sur proposition de la Commission européenne qui dispose de son droit exclusif d’initiative. Dans le
cadre des coopérations renforcées, les lois et lois-cadres peuvent cependant être adoptées à l’initiative d’un groupe d’Etats membres.

Parmi les ultimes amendements pris en compte par les Conventionnels le 13 juin, l’innovation la plus notable est l’introduction d’un « droit
d’initiative populaire » : s’ils réunissent un million de signatures en provenance de différents pays, les citoyens de l’Union auront le droit de
demander à la Commission de rédiger une proposition de loi européenne.

5. Extension de la procédure de co-décision et de la majorité qualifiée

La future Constitution prévoit l’utilisation de la procédure de co-décision comme règle générale d’adoption des textes législatifs avec
recours à la majorité qualifiée, tout en maintenant des procédures différenciées dans certains domaines, la PESC, la défense, de la
coopération policière et la justice pénale.

Le compromis adopté le 13 juin prévoit qu’à partir de novembre 2009, la majorité qualifiée sera obtenue lorsqu’une majorité simple des Etats
représentant 60% de la population européenne se prononcera en faveur de l’adoption d’une décision ou d’un texte.

6. Intégration de la Charte des droit fondamentaux

La future Constitution dispose que « l’Union reconnaît les droits, les libertés et les principes énoncés dans la Charte des droits
fondamentaux qui constitue la deuxième partie de la présente Constitution ». La Royaume-Uni a cependant obtenu le 13 juin l’insertion
d’une clause d’interprétation qui en limite la portée juridique. En l’état actuel des choses, l’intégration de la Charte n’institue cependant
aucune nouvelle compétence et ne créée pas de droit positif en la matière.

II. Les réformes institutionnelles applicables dès l’entrée en vigueur du texte :

1. Un président permanent du Conseil

La future Constitution met fin à la présidence tournante et instaure un Président du Conseil stable, aux pouvoirs strictement délimités, élu
par le Conseil européen à la majorité qualifiée pour un mandat de deux ans et demi renouvelable une fois. Ce « Chairman » ne pourra pas
conserver de mandat national, il sera chargé de préparer les travaux du Conseil européen, d’en présider et animer les travaux. Il assurera
également à son niveau la représentation extérieure de l’Union sur les décisions de politique étrangère, sans préjudice des compétences du
Président de la Commission et du ministre des Affaires étrangères

2. Un ministre européen des Affaires étrangères

La future Constitution crée un poste de ministre des Affaires étrangères : vice-président de la Commission, il sera désigné par le Conseil
européen statuant à la majorité qualifiée, en accord avec le Président de la Commission. Il cumulera les fonctions du haut représentant actuel
du Conseil pour la politique étrangère et de sécurité commune et celles du commissaire chargé des relations extérieures et conduira la
politique étrangère et de sécurité commune de l’Union.

3. Une politique étrangère et de défense un peu renforcée

La future Constitution maintient la règle de l’unanimité dans ce domaine sauf pour les décisions prises sur mandat du Conseil européen qui
seront soumis au vote à la majorité qualifiée. Le Conseil peut cependant décider à l’unanimité d’élargir le champ de la majorité qualifiée. Les
Etats membres doivent appuyer « activement et sans réserve la politique étrangère et de sécurité commune de l’Union ».

En matière de défense, le texte prévoit également « la définition progressive d’une politique de défense commune qui peut conduire à une
défense commune ». Il élargit la possibilité de coopérations renforcées au domaine de la défense (proscrit par le Traité de Nice) et décide la
création d’une Agence de l’armement et des capacités, afin de définir une politique européenne de l’armement.

III. REFORMES REPORTEES A 2009


1 Parlement européen : statu quo provisoire

Le Parlement européen ne sera réformé que lorsque l’Union comptera 28 membres. D’ici là, sa composition reste inchangée : 736 membres
suivant la répartition des sièges prévue par le Traité de Nice amendée par Copenhague. Ce n’est qu’à partir de l’arrivée d’un 28ème pays que
s’appliquera le principe de représentation dégressivement proportionnelle à la population des pays.

2 Une Commission européenne resserrée

Jusqu’au 1er novembre 2009, la Commission (qui entrera en fonction en 2004) aura 25 membres, soit un commissaire par pays – les cinq
grands pays renonçant à leur second commissaire comme le prévoit le Traité de Nice.
A partir du 1er novembre 2009, et de façon automatique, la Commission se composera de 15 membres, la rotation des commissaires se
faisant sur une base égalitaire garantissant aux petits pays la même représentation qu’aux grands. Les pays qui n’auront pas de commissaire
pourront envoyer un commissaire délégué sans droit de vote ;
A partir du 1er novembre 2009, le président de la Commission sera élu par le Parlement européen à la majorité simple sur proposition du
Conseil (à la lumière des résultats des élections européennes) .

3. Conseil

A partir de 2009, la majorité qualifiée sera obtenue au Conseil des ministres si elle représente la majorité simple des Etats, pour autant qu’ils
représentent 60 % de la population de l’Union (voir plus loin). Cette disposition remplacera le calcul très compliqué adopté par le Traité de
Nice en matière de pondération des voix. Certains pays, notamment l’Espagne et la Pologne pour lesquels les dispositions de Nice étaient
particulièrement favorables, craignent cette modification de l’équilibre des pouvoirs et entendent réouvrir ce débat à la Conférence
intergouvernementale.

4. Majorité qualifiée et pondération des voix

Le compromis sur les modalités de calcul de la majorité qualifiée et du recours à ce vote prévoit un processus en plusieurs temps :

- Maintien des dispositions de Nice sur la pondération des voix jusqu’en 2009 (72,27% des voix et 62% de la population)

- Passage le 1er novembre 2009 à la double majorité des Etats membres (50%) et de la population (60%) sauf si le Conseil européen
en décide autrement à la majorité qualifiée (sur la base de la pondération des voix décidée à Nice) et prolonge de trois ans, au maximum, les
dispositions de Nice

- Dans ce dernier cas, abandon le 1er novembre 2012 au plus tard de la pondération des voix, la double majorité devenant alors
la règle.

Parallèlement, le texte devrait prévoir dans la Partie III sur les politiques le recours à une majorité super-qualifiée, rassemblant les 2/3 des
Etats membres et 80% de la population pour certains sujets où l’on veut sortir de l’unanimité mais où le fait de passer de l’unanimité à 60%,
aurait représenté une transition trop brusque. Cette majorité super qualifiée existe déjà dans les traités actuels pour les actes du Conseil ne
résultant pas d’une proposition de la Commission. Elle garantit en même temps qu’un pays seul ne puisse bloquer la législation car aucun ne
rassemble ce seuil.

Le projet d’articles comporte également une clause évolutive qui permettre au Conseil européen de décider, à l’unanimité, de transférer les
matières actuellement adoptées selon la règle de l’unanimité, dans le champ des procédures normales de l’Union (cette disposition existe
dans les traités actuels pour certains domaines comme celui de l’asile et de l’immigration). Ce cas est notamment prévu pour la politique
étrangère (sauf pour quelques domaines précis) où le traité pourrait prévoir la possibilité de passer de l’unanimité à la majorité super-qualifié
puis à la majorité qualifiée.

Anne Castagnos-Sen

Le 16 juin 2003

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