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Brunschwig Et Al. (Red.) - Le Savoir Grec Dictionnaire Critique
Brunschwig Et Al. (Red.) - Le Savoir Grec Dictionnaire Critique
Le savoir grec
Flammarion
I - ÉMERGENCE DE LA PHILOSOPHIE
Figures du philosophe
Images et modèles du monde
Mythe et savoir
La nature et l’être
La Connaissance
Éthique
II - LA POLITIQUE
Anaxagore
Archimède
Aristote
Démocrite
Diogène
Empédocle
Épicure
Euclide d’Alexandrie
Galien
Héraclite
Hérodote
Hippocrate
Parménide
Platon
Plotin
Plutarque
Polybe
Protagoras
Ptolémée
Pyrrhon
Socrate
Les Socratiques
Thucydide
Zénon d’Élée
Académie
Aristotélisme
Commentateurs antiques d’Aristote
Hellénisme et judaïsme
Hellénisme et christianisme
L’hellénisme romanisé : Cicéron
Milésiens
Pensée grecque, pensée arabe
Platonismes
Pythagorisme
Scepticisme
Sophistique
Stoïcisme
Chronologie
Cartes
Index des noms
Index des notions
Table des auteurs
Le savoir grec
AVANT-PROPOS
À LA NOUVELLE ÉDITION
Alpha, bêta, et les autres jusqu’à l’oméga : qui d’entre nous, pour
peu qu’il ait fait connaissance avec l’alphabet grec, ne s’est amusé à
écrire son nom avec ses caractères, à la fois si proches et si distants
des nôtres ? Leur attrait pour nous ne se compare à aucun autre. Les
inscriptions romaines sont belles et hautaines ; leurs lettres ornent
nos frontons républicains, et même les enseignes de nos boutiques. À
l’extrémité du spectre graphique, les hiéroglyphes égyptiens nous
contemplent du haut de leurs quarante siècles ; les idéogrammes
chinois nous fascinent par leur symbolisme et par l’énigme
compliquée de leur dessin. L’alphabet grec, à mi-chemin de l’étrange
et du familier, est à la bonne distance du nôtre, dont il est l’ancêtre
lointain. Il nous dépayse, assez pour que nous n’ayons pas le
sentiment d’être restés chez nous quand nous lui rendons visite. Il
nous accueille et nous fait signe, assez pour ne pas nous faire tomber
dans un abîme illisible. Mieux qu’une dissertation nouvelle sur
l’éternelle actualité de la Grèce antique, mieux qu’une mise en garde
de plus contre les mythes qui nourrissent ces dissertations, la
parenté paradoxale des alphabets est une métaphore brève, mais
éclairante, de la relation complexe qui lie notre présent à un passé
qui est aussi le nôtre, et qui ne cesse de l’habiter, visiblement ou
invisiblement.
Ce que l’on vient de dire de l’alphabet grec, on pourrait le redire,
et avec plus de raison encore, de tout ce qui a été écrit avec ses
lettres. Il nous a transmis, malgré des pertes sévères, d’innombrables
textes, poèmes, mythes, histoires, tragédies, comédies, discours
politiques ou judiciaires, discours d’apparat, dialogues, traités
philosophiques, cosmologiques, médicaux, mathématiques,
zoologiques, botaniques ; ces textes inaugurent et nourrissent, par
action directe, influence diffuse, réaction polémique, relecture et
réinterprétation, toute la tradition de la pensée occidentale. Ici
encore, l’impression de familiarité et le sentiment de la distance
nouent leur jeu complexe ; nous sommes sur notre sol en un pays
lointain ; c’est dans notre chambre, ou dans notre antichambre, que
nous voyageons, et pourtant c’est un véritable voyage que nous y
effectuons. Toute notre réflexion passe, d’une certaine manière, par
une réflexion sur les Grecs, et les implique à quelque degré.
L’originalité imprenable des Grecs eux-mêmes est peut-être là : ils
sont, par définition et par situation, les seuls qui n’aient pas les Grecs
derrière eux. Sans doute leur culture n’est-elle pas née de rien, de
même qu’ils ont emprunté aux Phéniciens le principe de leur
alphabet. C’est pourquoi il ne faut pas regretter qu’au fameux
« miracle grec », les historiens et les savants d’aujourd’hui
substituent, avec une force de conviction croissante, des « Grecs sans
miracle ». Mais ce que les Grecs peuvent devoir aux civilisations qui
les précèdent, ils l’ont très tôt transformé, marqué de leur propre
sceau, et retourné contre leurs créanciers, qui leur semblent
représenter soit une civilisation à l’envers (l’Égypte prestigieuse et
surprenante), soit même l’envers de la civilisation (la Mésopotamie
despotique et barbare). Comme tous ceux qui les suivront, ils
réfléchissent sur les Grecs ; mais ils le font comme personne, tout
simplement parce que les Grecs, c’est eux. Leur pensée, comme celle
du Dieu d’Aristote, est une pensée de la pensée.
Ils n’ont pas attendu le « Connais-toi toi-même » socratique pour
édifier une culture de la conscience de soi. Très tôt, leur mythologie,
à peine codifiée par Homère et par Hésiode, fait naître ses propres
critiques (un Xénophane, un Héraclite) et ses propres interprètes,
allégoristes ou autres. Les cosmologies milésiennes se répondent,
chacune visant à résoudre une difficulté laissée par la précédente.
L’intimidant défi parménidien, qui risquait de tordre le cou à la
physique, suscite presque aussitôt les répliques d’Empédocle,
d’Anaxagore, des Atomistes. Socrate, déçu dans les espoirs qu’il
avait mis dans la physique de ses devanciers, prend ses distances par
rapport aux choses, et se tourne vers les discours. Platon transpose
les mythes anciens ; il interprète Socrate, il construit les conditions
qui rendent Socrate possible et qui auraient rendu sa condamnation
impossible. Aristote critique Platon, comme il critique la plupart de
ses prédécesseurs, tout en cherchant à sauver ce qui, selon lui, le
mérite. Épicuriens et Stoïciens disposent, en leur site historique,
d’assez de recul pour aller chercher leurs maîtres, en deçà de Platon
et d’Aristote, du côté de Démocrite et d’Héraclite. L’héritage de
Platon se diffuse et se disperse en de multiples tendances, sur un
clavier qui s’étend du scepticisme aux métaphysiques
néoplatoniciennes. Le commentarisme, la critique des textes et
l’accumulation des gloses, dont le début est étonnamment précoce,
s’épanouissent largement au tournant de notre ère.
Mais ce n’est pas tout. Plus frappant encore que ce retour critique
que la culture grecque effectue sur ses étapes successives est le
travail que chacun de ses artisans opère individuellement sur lui-
même. Pour les savants, les historiens, les philosophes, on ne saurait
faire œuvre de savant, d’historien ou de philosophe, sans savoir, ou
au moins sans se demander, à quelles conditions (intellectuelles,
mais aussi morales et politiques) l’on peut faire de la science, de
l’histoire, de la philosophie. Il est assez clair, à en juger par leurs
œuvres, qu’il en va de même des sculpteurs, des architectes, des
musiciens, des poètes dramatiques : leur style n’est manifestement
pas le fruit d’une pratique aveugle ou d’une tradition empirique du
coup de main. Il n’est pas jusqu’à la cordonnerie qui ne s’enseigne ;
les cuisiniers eux-mêmes revendiquent un statut d’auxiliaires
conscients de la philosophie. Toute activité, toute perception, tout
rapport direct à l’objet suscite des questions apparemment simples,
mais aussi déconcertantes que celles adressées par Socrate à ses
interlocuteurs, car elles provoquent une prise de distance, elles
exigent que l’œil intellectuel modifie son accommodement par
rapport à tout ce qu’il peut voir : « De quoi s’agit-il ? » « Que
cherches-tu au fond ? » « Que veux-tu dire au juste ? » « Comment
sais-tu ce que tu viens de dire ? »
Le Savoir grec : si l’ouvrage que nous présentons sous ce titre a
une ambition centrale, elle est sans doute de faire apercevoir cette
dimension fondamentale de réflexivité qui nous paraît
caractéristique de la pensée grecque, et qui lui donne encore
maintenant sa valeur formatrice et sa puissance d’interrogation.
Nous n’avons pas dit « la science grecque ». Nous n’avons pas dit
non plus « la philosophie grecque », ni « la civilisation grecque ». Il
existe sur tous ces sujets d’excellents ouvrages, parfois d’initiation,
parfois de synthèse, que nous ne prétendons pas concurrencer. Nous
n’avons pas voulu exposer, ni résumer, la totalité de ce que les Grecs
ont su, ou cru savoir ; nous ne ferons pas le décompte de leurs
ignorances et de leurs lacunes. De même, nous n’avons souhaité ni
redoubler ni résumer les histoires de la philosophie grecque ; et l’on
ne trouvera rien ici qui concerne directement l’art grec, la littérature
grecque, la religion grecque. En choisissant notre titre, nous avons
souhaité déplacer l’accent, remonter des produits aux processus qui
les ont engendrés, des œuvres aux activités, des objets aux
méthodes. Ce qui nous intéresse au premier chef, c’est cette aptitude
typiquement hellénique à poser des questions qui sont à la fois
« secondes », parce qu’elles se situent à un degré second par rapport
à celles qui portent immédiatement sur le monde, les êtres qui le
peuplent, les événements qui s’y déroulent, les activités qui le
transforment, et « premières » ou « primordiales », parce qu’elles
doivent logiquement être posées d’abord, et résolues d’une manière
ou d’une autre une fois qu’elles ont été effectivement posées. On a
parfois désigné comme « le sophisme socratique » l’idée qu’on ne
pouvait dire si tel ou tel homme individuel était courageux ou non,
tant qu’on n’était pas capable de dire universellement ce que c’est
que le courage. Sophisme ou non, la pensée grecque trouve dans
cette quête de lucidité ce qu’elle tient pour son exercice le plus
radical. Le savoir, au sens où nous le prenons, n’est pas celui avec
lequel commencent des expressions comme « savoir que Socrate a
été condamné à mort » ou « savoir que la diagonale du carré est
incommensurable avec le côté ». Il représente plutôt celui qui est en
facteur commun dans des expressions comme « savoir ce que l’on
dit », « savoir ce que l’on fait », « savoir ce que l’on veut ».
Cette dimension du savoir grec, qui prend pour objets non
seulement les savoirs du premier degré, mais aussi la vie, le langage,
la production, l’action, nous paraît essentielle et caractéristique, et
c’est sur elle que nous voudrions attirer l’attention et la réflexion du
lecteur. Nous regarderons les Grecs se regarder eux-mêmes. Nous
évoquerons non pas l’histoire telle qu’ils l’ont faite et subie, mais les
récits qu’ils s’en sont donné ; non leur poésie, mais leur poétique ;
non leur musique, mais leur harmonique ; non leurs discours, mais
leur rhétorique. Nous dirons quelles ont été leurs théories sur
l’origine, le sens, les fonctions de la religion. Nous ne dirons rien de
leur langue, mais l’on trouvera ici quelques-unes de leurs réflexions
sur l’origine, les éléments, les formes du langage. Leurs institutions
politiques seront évidemment mentionnées, mais dans le cadre
d’une confrontation avec les idées et les théories à l’aide desquelles
ils les ont pensées et justifiées. Lorsque nous aborderons des
philosophes ou des savants individuels, des écoles philosophiques
ou scientifiques, le rappel de quelques-unes de leurs principales
doctrines nous aidera surtout à faire saisir aussi ce que signifient,
pour les uns et pour les autres, l’acte de philosopher, l’élaboration
d’une théorie, la présentation publique d’une doctrine.
Ce livre s’organise en quatre grands chapitres. Le premier,
« Émergence de la philosophie », pourrait paraître accorder, sur le
seuil du « savoir grec », une place imméritée à la philosophie, au
détriment de la science : tout le monde aujourd’hui s’accorde avec le
vocabulaire courant pour dire que ceux que nous appelons les
savants savent, alors qu’il faut sans doute être philosophe, et même
d’une certaine espèce de philosophe peut-être en voie de disparition,
pour penser que la philosophie est une forme du savoir. Mais cette
coupure entre science et philosophie ne correspond nullement aux
cadres conceptuels de l’Antiquité ; tout au plus s’indique-t-elle, avec
bien des nuances, à l’époque hellénistique, où les savoirs spécialisés
commencent à prendre quelque autonomie, non sans que la
philosophie revendique encore le droit de leur fournir des principes
et d’arbitrer leurs méthodes. Platon subordonne nettement les
mathématiques à la dialectique ; mais le vocabulaire dans lequel il
exprime cette subordination, loin de laisser aux premières leur
qualification courante de « sciences », consiste au contraire à le leur
disputer. Quant à Aristote, le mieux disposé pourtant à voir dans les
sciences particulières un modèle sur lequel élaborer les critères de la
pensée scientifique, il ne reconnaît à la physique que le statut d’une
« philosophie seconde ». L’émergence de la philosophie, telle que
nous l’avons décrite, est aussi l’émergence du savoir, et de la
réflexion en général. Plusieurs articles dans ce premier ensemble
(« Images et modèles du monde », « Mythe et savoir ») décrivent le
fond, populaire et mythique, à partir duquel se détache la « Figure
du philosophe », si différente à tant d’égards de sa figure moderne et
contemporaine. D’autres articles (« La nature et l’être », « La
connaissance », « L’éthique ») offrent un premier et large balisage des
principaux domaines dans lesquels cette émergence s’est accomplie.
Dès ce premier chapitre se dessine ainsi, toutefois, la dimension
critique de l’ouvrage entier : essayant d’éviter à la fois les pièges de
l’historicisme et ceux de la philosophia perennis, nous voulons
présenter ici une mise en perspective de notre objet, inévitablement
rapportée à un point d’observation moderne, et soucieuse de
mesurer l’héritage que le savoir grec a légué à sa postérité, l’usage
que celle-ci en a fait, les continuités et les discontinuités qu’a
engendrées ce rapport complexe entre héritage et héritiers – le
moindre paradoxe de la situation n’étant pas le fait que, dans
l’héritage même, les héritiers ont trouvé entre autres la possibilité et
la manière de devenir à leur tour de libres producteurs de savoir et
de pensée.
Le deuxième chapitre fait un sort particulier, que l’on
comprendra aisément, à la politique : 1’« invention » de la politique
n’est-elle pas, avec celle de la philosophie et des mathématiques,
l’une de celles que l’on dispute le moins à la Grèce ancienne ? Ici
encore, sans doute, l’invention n’est pas une parthénogenèse : de
même qu’il y a eu des mathématiques égyptiennes et babyloniennes,
mais que les mathématiques grecques se caractérisent par une
manière spécifique de procéder par définitions et démonstrations
articulées, de même il y a eu, ailleurs qu’en Grèce, des institutions et
des pratiques de pouvoir, des analyses politiques, des réflexions sur
l’État, sur les relations entre gouvernants et gouvernés, sur la nature
de l’ordre politique. Mais ce qui distingue la Grèce reste la formation
et l’organisation de la cité, la pratique du débat public, les
procédures de la décision en commun, l’écriture et la publicité des
lois, et, sur le plan de l’analyse politique, un style de justification et
d’argumentation qui ressemble, quelle que soit l’orientation causale
que l’on veut privilégier, à celui qui s’est dégagé dans les champs de
la philosophie et de la science. De cette invention de la politique,
nous avons moins retenu ici la naissance historique des cités et le
développement de leurs institutions que tout ce qui concerne la
réflexion sur ces événements et la justification théorique et pratique
de ces institutions, la définition des divers « rôles » entre lesquels se
partagent l’action et la pensée politiques (« Figures du politique »), la
confrontation parfois très ouvertement conflictuelle (les Grecs,
Simone Weil l’a dit, n’ont pas l’hypocrisie satisfaite des Romains),
parfois harmonieuse, entre les pratiques de la vie civique et
l’idéologie dont elles se parent (« L’homme est un animal politique »,
« Utopie et critique de la politique »), les débats qui naissent à la
frontière de la pensée et de la participation aux affaires publiques, et
qui mettent en jeu la question toujours renouvelée de
l’« engagement » ou du « désengagement » du sage par rapport à la
cité qui est la sienne (« Le sage et la politique à l’époque
hellénistique »).
Le troisième chapitre, « La recherche et les savoirs », propose
d’abord quelques vues d’ensemble sur les cadres institutionnels et
conceptuels dans lesquels s’inscrit l’extraordinaire explosion d’un
désir de savoir qu’Aristote considérera comme naturellement
implanté dans le cœur de tous les hommes. En seconde partie de ce
chapitre, on trouvera une série d’articles sur les différentes branches
du savoir (y compris ce qui nous apparaît, à nous, comme des
pseudo-savoirs). Nous les avons rangés dans l’ordre alphabétique,
depuis l’« Astronomie » jusqu’aux « Théories du langage », plutôt
que d’adopter un ordre plus conforme à la classification ou aux
diverses classifications qui ont eu cours chez les penseurs grecs eux-
mêmes : assurément l’agenda des théoriciens, c’est-à-dire l’ensemble
ordonné des questions auxquelles une doctrine présentable se devait
d’offrir des réponses, depuis la formation du monde jusqu’à l’origine
de l’homme, de sa culture et de ses institutions, s’était dans ses
grandes lignes fixé très tôt, et il a manifesté pendant plusieurs siècles
une sorte de constance assez étonnante. Cependant, cet agenda s’est
enrichi, diversifié et modifié de multiples manières, et les
classifications proposées ont rarement manqué d’être discutées ;
certaines disciplines, comme la « Logique », n’ont fait leur véritable
apparition que bien après les premiers temps de la pensée grecque ;
d’autres, comme la « Médecine », ou encore 1’« Harmonique », ont
été rapidement traversées de débats qui portaient justement sur
l’intérêt qu’elles avaient à se rattacher au tronc commun des théories
philosophiques et scientifiques générales, ou au contraire à rompre
les attaches avec lui. Tout compte fait, il nous a paru préférable de
nous en tenir à la sécurité naïve de l’ordre alphabétique.
Le chapitre final est, avec le troisième, celui qui rapproche le plus
notre ouvrage d’un dictionnaire. On y trouvera une série d’articles
consacrés aux principaux philosophes et savants, ainsi qu’aux
principales écoles et courants durables de pensée. Le choix a été
nécessairement difficile, parmi tant d’individualités glorieuses et
singulières. Le nôtre est assurément plus restreint que celui de
Diogène Laërce dans ses Vies et opinions des philosophes illustres ; mais
il descend plus loin le cours du temps, et il fait place à des savants et
à des historiens aussi bien qu’à des philosophes. L’on pourra trouver,
en allant au-devant de nos propres remords, que nous avons été
injustes envers quelques-uns, comme Xénophane, les Sophistes
autres que Protagoras, Eudoxe de Cnide, Théophraste ; mais il fallait
bien faire un choix, et toute sélection reflète des jugements auxquels
il est toujours possible de faire des objections. Du reste, la plupart
des penseurs ou des savants auxquels il n’a pas été possible de
consacrer une section à part sont évoqués, eux et leurs œuvres, par
tel ou tel autre article, où l’Index général permettra de les retrouver.
Les bibliographies aideront aussi à remédier aux inconvénients
inévitables de la sélection et de la dispersion.
Un mot, enfin, sur le choix des auteurs auxquels nous avons
demandé leur contribution. Responsables de l’ensemble et de sa
mise en œuvre, les signataires de cette présentation sont heureux et
fiers que leur association puisse modestement symboliser l’alliance
entre deux des hauts lieux de la recherche moderne en histoire de la
pensée ancienne, Cambridge et Paris ; davantage encore, ils sont
heureux et fiers d’avoir travaillé toute leur vie, chacun à sa manière,
avec la conviction que la différence des traditions, des méthodes, des
instruments d’analyse et de recherche entre le monde anglo-saxon et
le monde latin n’empêchait nullement le contact, l’échange, la
discussion profitable, et finalement la production d’une œuvre
commune. Cet ouvrage devrait témoigner en ce sens. Les auteurs
auxquels nous avons fait appel, britanniques ou américains, italiens
ou français, ont tous contribué aux progrès considérables qu’ont
accomplis, depuis quelques décennies, la connaissance et la
compréhension du monde intellectuel de la Grèce ancienne. Ils ont
chacun leur personnalité, que nous ne leur avons pas demandé de
gommer ; leur liberté d’appréciation et de jugement a été
volontairement respectée. C’est aussi en ce sens, en quelque sorte
démultiplié, que cet ouvrage porte le sous-titre de « Dictionnaire
critique ». Nous l’avons dit, le regard des Modernes sur les Grecs se
regardant eux-mêmes reste évidemment, et délibérément, un regard
nôtre, qui met ses objets en perspective à partir d’un point de vue
contemporain, et qui mesure sous cet angle les distances, les
proximités, les écarts et les dettes. Mais ce regard nôtre ne peut être,
et ne sera certainement jamais, un regard entièrement unifié : les
chercheurs contemporains, en raison parfois de la différence des
champs particuliers où ils exercent leur activité, parfois aussi de la
diversité de leurs options générales, n’interprètent pas et
n’apprécient pas nécessairement tous de la même manière notre
rapport au « savoir grec ». Nul n’est en position de leur prescrire de
suivre le dernier cri, ou de se conformer à l’avant-dernière mode ;
aurions-nous eu ce pouvoir, par extraordinaire, nous nous serions
bien gardés d’en faire usage.
Nous remercions nos collaborateurs d’avoir accepté d’écrire leurs
articles dans un style qui n’est pas toujours celui auquel ils sont
habitués. Nous savons quel déchirement c’est, pour un savant et
pour un universitaire conscient de ses responsabilités scientifiques,
de renoncer aux notes de bas de page et aux références érudites.
Mais nous avons délibérément préféré nous adresser à des auteurs
pour lesquels ces renoncements seraient douloureux, plutôt qu’à
d’autres qui n’en auraient pas été autrement bousculés dans leurs
habitudes.
Jacques BRUNSCHWIG, Geoffrey E.R. LLOYD, 1996
I
ÉMERGENCE DE LA PHILOSOPHIE
Figures du philosophe
Le règne du mythe
En Grèce ancienne, jusqu’à Platon, le terme sophia peut recevoir
n’importe quel contenu dans la mesure où la sophia n’est, dans le
monde sensible, liée à aucun contenu particulier. Être sophos, c’est
dominer son activité, se dominer soi-même et dominer les autres ;
voilà pourquoi peuvent être déclarés sophoi le charpentier, le pilote
de navire, le médecin, le dirigeant politique, le devin et surtout le
poète. Or ce savoir, ceux qui en sont dotés le rapportent à une
divinité qui en aurait révélé le secret ou qui même les inspirerait.
Tout savoir vient donc d’une façon ou d’une autre de la divinité,
qu’il s’agisse du savoir commun partagé par tous les membres d’une
même communauté, ou d’un savoir particulier ressortissant à une
habileté technique donnée.
Estimant que le poète s’adonne essentiellement à l’imitation qui
lui permet de représenter dans le discours qu’il compose toutes
sortes d’activités comme s’il en était lui-même le promoteur, Platon
fait d’Homère l’« instituteur » de la Grèce, l’autorité suprême dans le
domaine de la vertu, des lois et même des techniques (La République,
X 606e-607a). Si Platon donne à Homère une telle importance, c’est
pour mieux dénoncer son influence néfaste sur le plan de
l’éducation. Il n’en reste pas moins que, pour la majorité des Grecs
de l’époque classique, Homère et tous les autres poètes étaient
considérés comme les agents de transmission d’un savoir partagé
par l’ensemble des Grecs sur ce qu’ils considéraient comme leur
passé ou sur ce qu’ils admettaient généralement comme leurs
valeurs.
Les Muses donnent aux poètes l’inspiration, en plus de leur
accorder une compétence poétique constante, elles leur apportent
une aide temporaire à l’occasion de telle ou telle représentation. La
description de Démodocos dans l’Odyssée montre que les Muses
aident sans relâche le poète : « […] et qu’on aille cherche notre aède
divin, ordonne Alcinoos, notre Démodocos que la déesse [la Muse] a
fait le chanteur sans rival, quel que soit le sujet où l’engage le cœur. »
Mais la Muse inspire aussi Démodocos à des moments précis :
« Quant on eut satisfait la soif et l’appétit, l’aède que la Muse
inspirait se leva. » Cette aide, constante ou exceptionnelle, que les
poètes appellent de leurs vœux et qu’on pourrait se représenter
comme une dépendance à l’égard d’une source autre que celle de la
conscience, s’exerce en ces deux domaines : cognitif et pragmatique.
La Muse accorde à l’aède une connaissance relative à ce dont il va
parler, et une autorité sur l’auditoire auquel il s’adresse.
Dans ses invocations aux Muses, qui sont les filles de Zeus et de
Mnémosyne (Mémoire), Homère sollicite la révélation
d’informations. Ainsi, dans l’invocation qui ouvre le catalogue des
vaisseaux (Iliade, chant II) : « Et maintenant, dites-moi, Muses,
habitantes de l’Olympe, car vous êtes, vous, des déesses, qui, partout
présentes, savez tout, tandis que nous n’entendons qu’un bruit,
nous, et ne savons rien. Dites-moi donc quels étaient les guides, les
chefs des Danaens. » L’urgence de l’invocation s’impose. Suivent en
effet deux cent soixante-six vers qui évoquent vingt-neuf flottes, que
décrit le poète en donnant l’origine géographique de chacune et le
nom de leur commandant.
Alors qu’Homère demande aux Muses de lui accorder une
connaissance relative au passé, connaissance qui s’oppose à
l’ignorance, Hésiode, dans la Théogonie, les considère comme
garantes de la vérité et de l’erreur, car elles permettent d’accéder à
une connaissance vraie et d’échapper à une connaissance fausse.
Pindare, lui aussi, proclame qu’il tient des Muses un savoir
particulier, tout comme Ibycos et Bacchylide. Et, davantage
qu’Hésiode encore, il insiste sur la véracité de ce savoir,
profondément conscient que la poésie peut elle aussi transmettre la
fausseté (Olympiques, Néméennes).
Quels que soient les rapports qu’elle entretient avec la vérité, la
connaissance dispensée aux poètes par les Muses ressortit donc à la
Mémoire (Théogonie). Voilà pourquoi Mnémosyne est si souvent
considérée comme la mère des Muses. Déjà dans l’Iliade, les Muses
sont mises en rapport avec la mémoire, ce qui prouve l’antiquité de
la croyance. Mais de quelle nature est la mémoire qui intervient en
poésie ? On a voulu l’interpréter comme un don de voyance. La
chose est vraie chez Platon, mais non chez Hésiode ou chez Homère,
où ce n’est pas l’aède qui voit les événements du passé évoqué, mais
les Muses, qui lui transmettent leur connaissance, et qui ne lui
accordent donc pas le don de voir directement ce qu’il raconte. Mais
que voient les Muses ? Dans une civilisation de l’oralité, celle que
dépeignent l’Iliade et l’Odyssée et dont restent proches les poètes
anciens, la mémoire sert surtout à immortaliser la gloire des
membres les plus éminents d’un groupe humain. Le poète a pour
tâche de transmettre ce qu’un groupe humain a décidé de conserver
en mémoire de son passé ; en d’autres termes, dans la composition
poétique, c’est la société qui se donne à voir à elle-même.
D’un point de vue technique, la mémoire est aussi l’instrument
dont se sert le poète pour composer le poème qu’il récite : dans le
cadre de l’épopée, le poète doit avoir en tête un vaste système de
formules et de groupes de mots, qu’il utilise pour mettre en forme de
grands blocs d’une œuvre. Ainsi conçue, l’inspiration n’est plus,
comme chez Platon, inconciliable avec les techniques mises en
œuvre par les poètes ; elle fournit même le matériau sur lequel
s’applique le savoir-faire du poète.
Considéré du point de vue restreint de la technique de
communication dont il exige la maîtrise parfaite, le savoir du poète
apparaît comme un savoir spécialisé à l’instar de celui dont sont
investis le devin, le législateur, l’homme politique et les démiourgoi
(les gens de métier) en général. Considérons chacune de ces
catégories d’expert.
Pour l’ensemble des Grecs, les trois Moires (personnifications de
la moira, la part de vie accordée à chaque être humain) filles de Zeus
et de Thémis [= la Justice cosmique], règlent la vie de chaque mortel
depuis sa naissance jusqu’à la mort, et les trois sœurs, Atropos,
Clotho et Lachésis se répartissent ce soin en filant, enroulant et
coupant le fil ténu d’une existence individuelle. Le dieu suprême
Zeus possède certes une prescience universelle, mais il ne peut
changer le cours du destin. Le fait que le passé, le présent et le futur
se trouvent inexorablement fixés par le destin, rend possible
l’exercice de l’art du devin, qui doit compter sur la bienveillance des
dieux.
Devins, prophètes, sibylles et oracles n’ont cessé d’intervenir
dans la vie religieuse grecque, ce qui explique que l’oracle delphique
d’Apollon ait connu une célébrité sans égale dans le monde antique.
Par ailleurs, les termes qui désignent le présage d’observation sont
nombreux et instructifs, puisqu’ils ont par la suite servi à former le
vocabulaire de divers domaines de la connaissance. Le signe
divinatoire, quel qu’il fût, pouvait être appelé semeion, c’est-à-dire
littéralement le « signe », dont l’interprétation exigeait de la part du
devin ou de ses aides, les exégètes ou les prophètes, connaissances et
techniques.
Qu’il s’agisse d’oracles apolliniens ou non, la consultation des
dieux obéissait à un certain nombre de règles qui s’élaborèrent sans
doute à une date ancienne et qui donnèrent un peu partout à la
pratique divinatoire régularité et efficacité. À l’origine, Apollon ne
rendait ses oracles à Delphes qu’une fois par an, mais, avec le temps,
ses consultations devinrent mensuelles, même si certains pensent
qu’elles s’interrompaient pendant les trois mois d’hiver, quand le
dieu quittait son peuple. Les questions pouvaient être posées par
une communauté, par une cité ou bien par un individu. Des règles
strictes de purification étaient exigées au préalable : nul ne pouvait
se présenter devant la divinité sans être lavé de ses taches. Et
souvent les réponses de la Pythie devaient être expliquées par des
interprètes.
À ce savoir divinatoire qui porte non seulement sur le futur, mais
aussi sur le présent et le passé soit d’un groupe humain soit d’un
individu, se trouvent tout naturellement reliés le savoir du
législateur et celui de l’homme politique.
L’organisation future de la vie d’une société par l’établissement
d’un code de lois, sa gestion actuelle par des prises de décision qui
engagent l’avenir sur tel ou tel point, et la connaissance du passé qui
permet d’expliquer telle ou telle catastrophe sont choses tellement
importantes et tellement délicates qu’elles ont toujours été perçues,
en Grèce ancienne, comme devant être garanties par une
intervention divine.
Pour toute une tradition mythique, l’exercice de la justice est
solidaire de la pratique de certaines formes de pratiques
divinatoires, et en particulier de la consultation incubatoire. Minos,
qui va consulter Zeus tous les neuf ans dans une caverne de l’Ida où
le dieu l’avait élevé, est le type même de ce roi ; il passe pour avoir,
le premier, civilisé les Crétois, régné sur eux avec justice et douceur
et leur avoir donné d’excellentes lois. Les affinités du pouvoir
politique avec des formes ou des procédés divinatoires sont
d’ailleurs très fréquentes : à Thèbes (Pausanias, IX, 26, 3) et à Sparte
(Hérodote, VI, 57), les maisons royales gardent soigneusement des
oracles qui ont une grande importance pour la conduite des affaires.
Même quand le personnage royal a définitivement cédé sa place
et ses pouvoirs à des fonctionnaires officiels, l’usage se maintient de
recourir parfois à des procédés divinatoires. Pour toute une
tradition, diverses formes de pouvoir politique et certaines pratiques
judiciaires se fondent essentiellement sur un savoir de nature
mantique.
La vie des individus et celle d’un groupe humain sont scandées
par des crises qui remettent en cause l’ordre habituel des choses. Il
faut alors faire appel à des « spécialistes » qui permettent sinon de
sortir de ces crises, du moins de mieux les cerner, de mieux les
comprendre.
Dans le domaine religieux, le rôle de l’initiative privée est
manifestement lié à l’état de la société, qui s’était développée aux
environs du VIe-Ve siècle avant J.-C. Les mystères furent des rites
d’initiation d’un caractère volontaire, personnel et secret qui visaient
à un changement d’esprit, par une expérience du sacré.
Les mystères sont une forme de religion personnelle, qui dépend
d’une décision individuelle et qui vise un salut obtenu par l’intimité
avec le divin. Cette recherche plus profonde de l’au-delà ne doit pas
occulter ce qui est le plus proche et le plus évident. Une autre forme
de religion personnelle, élémentaire, largement répandue et terre à
terre, a dû constituer l’arrière-plan de la pratique des mystères : la
pratique des vœux. Ceux qui sont malades, en danger ou dans le
besoin et à l’inverse ceux qui atteignent à quelque opulence, font des
promesses aux dieux et les honorent, en offrant des dons d’une
valeur plus ou moins grande. Ce phénomène est si commun qu’on
en débat rarement en profondeur. Mais la pratique des vœux peut
être considérée comme une stratégie majeure des hommes pour
affronter un avenir incertain ou hostile.
Il semble qu’il y ait eu au moins trois formes majeures
d’organisation dans la pratique des mystères : un clergé attaché à des
sanctuaires (Éleusis, Samothrace), une association d’initiés
appartenant à une sorte de communauté, et des individus itinérants,
praticiens ou personnages charismatiques. Surtout étudiée dans le
cadre de l’Antiquité tardive, sous les traits d’Apollonios de Tyane ou
d’Alexandre d’Abonouteichos, faisant son chemin dans le mythe
grec avec Mélampous, Calchas et Mopsos, cette figure apparaît dans
l’Antiquité classique sous les traits d’Empédocle.
On rappellera enfin que, en Grèce ancienne, même les savoirs
artisanaux sont considérés comme des dons divins et sont toujours,
de cette façon à tout le moins, reliés à la divinité. Ce rapport, qui
n’est pas de nature didactique, joue sur plusieurs registres. Il s’agit
d’abord de faire remonter à une divinité qui devient ainsi un
« prototype » l’origine de telle ou telle technique, considérée de
façon générale : métallurgie, poterie, etc. Il s’agit encore de faire de
cette divinité le gardien des secrets d’un groupe de spécialistes qui
veulent conserver l’exclusivité des procédés qu’ils mettent en œuvre,
comme ces métallurgistes qui à Rhodes vouent un culte aux
Telchines et à Lemnos, aux Cabires. Il s’agit enfin de s’assurer que les
techniques seront efficaces. Au moment de la cuisson, le potier
adresse une prière à Athéna. Il lui demande d’« étendre sa main sur
le four ». La déesse lui indiquera le moment opportun, celui où les
récipients seront cuits à point, où le vernis sera bien brillant. Elle
intervient en écartant du four une troupe de démons aux noms
évocateurs : le Briseur, le Fêleur, l’Inextinguible, l’Éclateur.
Héphaïstos et Athéna restent les deux divinités les plus typiques
en ce domaine. Dans l’Iliade, Héphaïstos apparaît d’abord comme un
échanson des dieux, comme un maître des métaux et des talismans,
et surtout comme un maître du feu, éléments auquel il s’identifie
presque.
Certes, Héphaïstos est maître du feu, mais pas de n’importe quel
feu. Le feu technique essentiellement, qui sert à accomplir les tâches
artisanales, et non point le feu du foyer qui relève d’Hestia, ni le feu
du ciel, c’est-à-dire la foudre de Zeus. Héphaïstos est le maître d’une
seule espèce de feu technique, celui qui sert au travail des métaux.
En effet, le feu qui cuit la terre est, avant tout, réservé à Prométhée,
en raison très probablement du fait que ce dernier est un « Titan »,
nom qui dérive de titanos, la « chaux vive », formée de terre et de feu
(Aristote, Météorologiques, 4, 11, 389a28). Par ailleurs, Héphaïstos ne
travaille que les métaux nobles : or, argent, bronze, airain, etc. Le
travail du fer qui sert à fabriquer les instruments de la vie
quotidienne est le propre des Dactyles (les Doigts), qui ont aussi
pour noms propres Akmon (l’Enclume), Damnameneus (le
Dompteur, c’est-à-dire le Marteau) et Celmis (peut-être la Fonte). On
attribue même aux Dactyles de l’Ida en Phrygie, où le travail du fer
remonte à des temps très anciens, l’invention de la métallurgie. Or,
chez les Dactyles, comme chez Héphaïstos d’ailleurs, la métallurgie
s’avère indissociable de la magie. Héphaïstos est aussi associé à
d’autres figures qui conjuguent en elles métallurgie et magie : les
Telchines, démons de Rhodes associés aux phoques, et les Cabires,
originaires de Lemnos, associés aux crabes.
De ce fait, Héphaïstos apparaît comme le dieu lieur par
excellence. En tant que métallurgiste, il peut à la fois faire et défaire
des liens matériels. Mais son action est surtout magique, et c’est dans
des liens immatériels qu’il enchaîne habituellement ses victimes :
notamment Héra, qu’il immobilise sur un trône (Platon, La
République, II, 378d) et surtout Arès et Aphrodite que, après avoir
surpris en flagrant délit d’adultère, il prend au piège d’un filet aux
mailles invisibles (Odyssée, VIII). S’il a le pouvoir de lier, Héphaïstos
a aussi le pouvoir de délier. Il délivre lui-même sa mère, geste qui lui
permet de revenir dans l’Olympe. Mais Héphaïstos est surtout
célèbre pour mettre en mouvement et donc, d’une certaine façon,
pour déchaîner des êtres en principe immobiles. Il a en effet à sa
disposition deux servantes en or, qui s’affairent dans son atelier
comme des êtres vivants : les soufflets de sa forge se meuvent sans
qu’il ait besoin de les manier ; et ce sont des trépieds-automates qu’il
fabrique (Iliade, XVIII).
Associée à Héphaïstos ou seule, Athéna occupe comme lui une
place fondamentale parmi les divinités techniciennes. À travers la
multiplicité de ses aspects – déesse guerrière armée de la lance et de
l’égide, protectrice des charpentiers, maîtresse des attelages et pilote
du navire, patronne des tisserands et des potiers, inventeur de
l’araire – Athéna met en œuvre, quel que soit le domaine où elle
intervient, les mêmes qualités d’habileté manuelle et d’intelligence
pratique, cette intelligence qu’elle tient directement de sa mère
Mètis, l’épouse engloutie par Zeus qui voulait s’en assimiler la
substance. L’Athéna qui protège et instruit les artisans apparaît
généralement sous les traits d’une divinité sereine et familière,
même si elle ne tolère pas d’être surpassée par une rivale. Ainsi
l’imprudente Arachné voit son ouvrage trop parfait déchiré par la
déesse, et elle-même est transformée en araignée (Ovide,
Métamorphoses, VI).
À côté des deux grandes divinités techniciennes de son
panthéon, la mythologie grecque connaît une série de héros
remarquables par leur dextérité, comme Ulysse, et parfois munis du
titre de « premier inventeur », tels Épeios, Palamède, Dédale. Tous
ces mortels s’illustrent au moins autant par leurs qualités
intellectuelles que par leur habileté pratique. C’est le cas de Dédale,
prototype de l’artiste et de l’artisan.
Le retour au mythe
Dans le premier livre du traité des Parties des animaux, après avoir
affirmé que les Présocratiques n’étaient pas parvenus à une
explication correcte des phénomènes naturels parce qu’ils n’avaient
pas une conception de la substance qui permît une approche
finaliste, Aristote ajoute : « Du temps de Socrate, il y eut un progrès
sur ce point, mais ceux qui philosophaient négligèrent les recherches
physiques et se tournèrent vers la vertu utile, c’est-à-dire politique. »
Quand les Athéniens l’accusèrent, entre autres choses, de s’occuper
de ce qui se passe dans les cieux et sous terre – c’est-à-dire, en clair,
de se consacrer à l’ « enquête sur la nature » – Socrate répondit qu’il
n’était nullement intéressé par ces matières auxquelles « il
n’entendait rien ». Peut-être l’accusation des Athéniens était-elle
simplement anachronique, puisque, dans son autobiographie du
Phédon, on voit Socrate se pencher sur la spéculation des anciens
physiciens avant de se déclarer déçu et de s’en détourner. À partir de
ce moment – selon une chronologie réelle ou reconstruite après coup,
peu nous importe ici –, Socrate ne se préoccupera que de rendre ses
concitoyens meilleurs, au sens éthique du terme. Ce qu’il reprochait
aux physiciens antérieurs, c’était de ne proposer que des explications
selon ce que la tradition aristotélicienne appellera les causalités
matérielle et motrice. Ainsi, d’après l’exemple fameux du Phédon
(98c), la cause pour laquelle Socrate est assis à ce moment dans sa
prison serait, pour les anciens physiciens, que son corps est composé
d’os et de tendons articulés d’une certaine manière. Pour Socrate, la
véritable cause de sa présence ici, c’est que, en vertu d’une certaine
idée du devoir et de la justice, il a préféré accepter la sentence des
juges athéniens plutôt que de s’y soustraire. À cette première critique
adressée par Socrate aux auteurs d’ouvrages physiques, s’en ajoute
une seconde, qui transparaît dans l’Apologie de Socrate de Platon –
notamment dans le passage ironique où Socrate déclare qu’il
n’entend point décrier celui, plus savant et habile que lui, qui
posséderait un savoir certain sur la nature –, mais qui nous est
surtout rapportée par Xénophon. Socrate y déclare plusieurs fois que
la science de la nature excède les forces de l’esprit humain, ou que
c’est à dessein que la divinité nous a laissés dans l’obscurité sur ce
sujet.
Ce dernier point mérite d’être mentionné, parce que cette
position de Socrate est à l’origine d’un courant important et de
longue durée dans la pensée antique, et aussi moderne. La thèse en
question, selon laquelle la nature est totalement ou largement
inconnaissable, avait sans doute été énoncée avant Socrate. On cite
une sentence d’Héraclite, « la nature aime à se cacher », dont Pierre
Hadot examine, dans son livre sur l’histoire de l’idée de Nature, tous
les sens et tous les prolongements historiques, et qui est l’une des
sources du mouvement sceptique. Les deux grands courants du
scepticisme antique, celui de la Nouvelle Académie et la tradition
issue de Pyrrhon, sont souvent considérés comme fort voisins par les
commentateurs modernes, le second étant plus radical que le
premier. Mais du point de vue des questions de la nature et de l’être,
leur différence est significative. Car il ne revient pas au même de
soutenir, un peu à la manière de Kant quand il oppose le phénomène
au noumène, que le réel est hors d’atteinte, comme le font les Néo-
académiciens, et de dire que nous ne pouvons décider si quelque
référent réel existe « derrière » nos impressions, comme le font les
Sceptiques néopyrrhoniens.
Il est difficile de savoir qui Aristote vise exactement en parlant
des penseurs « du temps de Socrate ». Sans doute veut-il désigner à
la fois des philosophes qui se sont reconnus, d’une manière ou d’une
autre, disciples de Socrate, c’est-à-dire les « Socratiques », et des gens
comme les Sophistes, qui avaient avec Socrate des liens plus lâches
mais finalement plus complexes. La place des Sophistes à la fois
dans l’histoire de la physique grecque et dans celle de la formulation
de la question de l’être méritait assurément d’être réévaluée. Car s’il
est incontestable que ce sont les conditions de l’exercice du pouvoir
dans les cités, et notamment dans les régimes démocratiques comme
celui d’Athènes, qui ont principalement favorisé, sinon directement
suscité, l’apparition du mouvement sophistique, il semble bien que
les schèmes fondamentaux, mais aussi les apories, de la spéculation
des physiciens pré et postparménidiens ont influencé de manière
décisive tant le contenu que la méthode de l’enseignement des
Sophistes. On peut dire que les Sophistes complètent l’entreprise de
déconstruction de la notion de nature entreprise par les Éléates. Mais
Gorgias, dans son Traité du non-être, étend cette déconstruction à
l’ontologie parménidienne elle-même en montrant qu’elle conduit
immanquablement à affirmer l’être du non-être, puisque dire que
« le non-être est non-être », c’est dire qu’il possède une certaine
manière d’être, problème que tentera de résoudre le Sophiste de
Platon.
Même quand le rapport entre les thèses parménidiennes et
sophistiques n’est pas obvie, les Sophistes, en insistant sur le
caractère aléatoire et mal fondé des connaissances humaines
contribuent à creuser la différence entre la physique et ce qui
s’appellera plus tard la philosophie pratique. Ainsi le compte-rendu
relativiste des thèses de Protagoras que nous font Platon et Aristote –
le monde serait tel que je le saisis ici et maintenant, mais différent
pour quelqu’un d’autre, à un autre moment, en d’autres
circonstances – semble montrer que les Sophistes ont été considérés
comme étant sensibles aux divergences des philosophes antérieurs.
Dans la fameuse distinction sophistique entre ce qui est par nature et
ce qui est par convention, c’est dans le domaine du conventionnel
que l’on voit à l’œuvre cette causalité intelligente qu’est la libre
volonté humaine. Ici les Sophistes et Socrate pourraient facilement
trouver un terrain d’entente. De ce point de vue, Aristote a raison :
les Socratiques – Cyniques, Cyrénaïques et, dans une moindre
mesure, Mégariques – se sont plutôt détournés de la physique pour
s’intéresser à la philosophie pratique et, faut-il ajouter, à la logique.
Cette seconde critique du projet de l’ancienne physique est peut-être
aussi dévastatrice que celle des Éléates. L’ancienne physis est, en
effet, démembrée : les hommes, s’ils en sont membres par certains
côtés – ils sont des êtres vivants soumis aux contraintes de tous les
organismes vivants –, prétendent d’une part s’affranchir des
schèmes explicatifs qui s’appliquaient à toutes choses, d’autre part
dicter leurs propres lois à leur environnement. Alors peut naître une
conception de la nature proche de la nôtre, dont les hommes
entendent se proclamer « maîtres et possesseurs ».
Qu’en est-il de Platon ? La position du plus célèbre des disciples
de Socrate face à cette mise à l’écart de la philosophie naturelle,
devenue de peu d’intérêt dans le monde des hommes et inaccessible
à la pensée humaine, n’est pas facile à cerner. Sur ce point aussi,
Gérard Naddaf propose une thèse qui n’est pas sans séduction.
Platon reprendrait à son compte un projet du même type que celui
des auteurs d’une « enquête sur la nature », mais dans un but
principalement éthique et sur des bases nouvelles. Dès le Phédon, la
critique par Platon des spéculations des anciens physiciens présente
une connotation éthique. Dire, en effet, que Socrate est assis ici parce
qu’il a des muscles et des tendons, c’est négliger les raisons éthiques
qui lui ont fait préférer la mort à la fuite. Dans les Lois, les choses
sont beaucoup plus nettes, puisque les écrits d’ « enquête sur la
nature », parce qu’ils donnent des explications mécanistes de la
formation de l’univers, sont accusés de corrompre les jeunes gens en
les détournant de la croyance aux dieux. Pour Platon, une moralité
solide, et de ce fait efficace, doit être fondée sur le Vrai, d’où le
détour, dans La République, par le monde immuable des Formes
dominé par la Forme du Bien. Ce que viserait Platon, au moins à
partir du Timée, qui est postérieur à La République, serait de montrer
que la véritable moralité est en accord avec l’ordre de l’univers. De
sorte que la connaissance de cet univers devient indispensable au
philosophe qui veut installer dans la cité cette moralité nouvelle.
Platon aurait, pour ce faire, projeté d’écrire lui-même une « enquête
sur la nature », dans une trilogie de dialogues : le Timée décrivant la
formation de l’univers et des vivants, dont l’homme, le Critias
retraçant l’histoire de la civilisation jusqu’à l’engloutissement de
l’Atlantide et de l’armée athénienne – il ne nous reste plus que le
début de ce dialogue, sans que l’on sache si Platon a écrit le reste, qui
serait alors perdu –, l’Hermocrate, qui ne fut jamais écrit,
entreprenant de raconter le recommencement de la civilisation qui
est la nôtre après ce cataclysme. Cette dernière entreprise aurait
finalement été menée à bien dans le livre III des Lois. Ce faisant,
Platon respecterait les règles du genre de l’ « enquête sur la nature »,
qui tendait à traiter d’abord de la cosmogonie, ensuite de la
zoogonie et de l’anthropogonie, de la politogonie enfin.
Mais cette entreprise est conçue de manière totalement nouvelle.
Toujours selon G. Naddaf, Platon est le premier philosophe à
proposer une « enquête sur la nature » créationniste et non plus
évolutionniste. L’une des meilleures preuves de la nouveauté radicale
de cette démarche, c’est que certains des successeurs immédiats de
Platon ont essayé de la réduire à l’aune commune. Ainsi Xénocrate
aurait déclaré que l’exposé créationniste du Timée n’était qu’une
fiction pédagogique. Ici aussi ce créationnisme, que déjà le finalisme
du Phédon laissait entrevoir en soutenant que la véritable explication
des choses réside dans l’intention de celui qui les a faites, a une forte
connotation éthique, puisque la moralité sera plus solide si elle est
fondée sur un ordre de l’univers qui a été expressément garanti par
le dieu. Il semble d’ailleurs que cette idée selon laquelle l’ordre du
monde a été agencé de la meilleure manière possible par une
intelligence divine ait été soutenue avant Platon, notamment par
Diogène d’Apollonie, qui fut un disciple d’Anaxagore. On peut
s’étonner que le Socrate du Phédon n’y fasse aucune allusion ; peut-
être aurait-il été contraint de réviser sa condamnation globale de
l’ « enquête sur la nature », et peut-être est-ce précisément ce qu’il
voulait éviter… Mais entre soutenir que l’ordre du monde relève
d’un principe intelligent et dire que cet ordre a été établi par un être
divin également occupé du destin moral des humains, il y a un pas
que, semble-t-il, Platon a été le premier à franchir. C’est pourquoi la
preuve physico-téléologique que Platon apportera de l’existence de
la divinité dans le livre X des Lois peut être considérée comme le
point culminant à la fois de son « enquête sur la nature » et de sa
refondation de l’éthique.
On peut, certes, se demander pourquoi Platon finit par éprouver
le besoin de trouver à son éthique un fondement à la fois
cosmologique et théologique, alors que La République se contentait de
la Forme du Bien pour asseoir la morale et construire la Constitution
idéale. On se souvient qu’au début du Timée, l’entretien qui
l’introduit est explicitement donné comme la suite d’un « entretien
de la veille » dont le résumé montre qu’il s’agit de l’organisation de
la cité parfaite dans La République. Cette succession a paru si bizarre,
tant les perspectives de La République et du Timée sont différentes,
que certains commentateurs modernes ont supposé, sans grande
vraisemblance, l’existence d’une seconde version de La République
aujourd’hui perdue. Pour justifier la trilogie qui commence, Socrate,
au début du Timée, prétend que le propos antérieur ressemble un
peu à une peinture, dont il aimerait voir s’animer les sujets qui y
sont représentés ; il voudrait notamment voir comment la cité idéale
se comporte dans la guerre. « Si le Timée commence par un résumé
de la Constitution idéale décrite dans La République, […] et si par la
suite s’y trouve évoquée l’histoire de la guerre victorieuse que
soutint l’Athènes ancienne contre l’Atlantide, c’est que Platon
cherche à y fonder “en nature” la Constitution idéale décrite dans La
République », explique Luc Brisson dans l’introduction à sa
traduction du Timée. Sans doute faut-il voir dans cette fondation
l’une des péripéties de la « conversion réaliste » que les interprètes
s’accordent à repérer dans les dernières années de Platon.
Platon parachève donc l’entreprise socratique, mais en la figeant
dans une doctrine formidable. À la recherche d’un fondement sûr et
immuable pour les notions de « bien », de « juste », etc., ce qui
constituait l’enjeu de l’enquête menée par Socrate, Platon en vint à
construire la première ontologie développée, explicite et cohérente
qui nous soit parvenue et qui a continué jusqu’à aujourd’hui à jouer
le rôle d’une sorte de paradigme philosophique. Il ne saurait être
question d’en donner ici un exposé, même succinct, d’autant plus
qu’un article est consacré à Platon dans ce volume. Mais on peut en
énumérer les réquisits fondamentaux. Radicalement parménidien,
mais voulant sauver la possibilité de la science, y compris de la
physique, Platon distingue des degrés d’être. On peut
immédiatement en nommer trois : l’être véritable est celui des
Formes (Idées) qui sont à la fois absolument réelles, absolument
intelligibles et causes de l’être et de l’intelligibilité des choses qui
participent d’elles. Ces choses, qui sont les objets de notre expérience
sensible, ne sont plus renvoyées dans le néant et/ou
l’inconnaissable, mais du fait de cette participation à l’être et à
l’intelligibilité de leurs Formes, elles sont objets d’opinion (doxa) et
non de science (epistèmè). Enfin le non-être acquiert chez Platon, sous
la forme de l’altérité, une place dans l’ontologie, faisant ainsi droit à
la critique de Parménide par Gorgias. Mais Platon dépasse son
ontologie au moment même où il l’établit. Dans un passage fameux
de La République, Platon place la Forme du Bien « au-delà de l’être »
et lui accorde une causalité universelle sur toutes choses. Le
domaine des Formes se trouve donc lui-même divisé et hiérarchisé
en ce que la Forme du Bien est supérieure aux autres Formes.
Platon accomplit un pas supplémentaire dans ses dialogues
postérieurs à La République. Ce qu’il pose quand il tente de penser le
fondement de toute réalité et de l’être lui-même, c’est qu’un tel
principe est intelligent, ou plutôt est intelligence. Ainsi, dans le
Sophiste, l’Étranger s’indigne que l’on puisse penser que « ce qui est
complètement être » soit privé de « mouvement, vie, âme et
intelligence ». De même, dans le Philèbe, dialogue sans doute
postérieur au Sophiste, la génération de toute réalité se fait par une
combinaison de deux principes, la limite et l’illimité. Cette
conception prend une forme plus précise dans ce que l’on appelle les
« doctrines non écrites » de Platon, une construction théorique qui
lui est attribuée par des sources antiques, et notamment par Aristote,
dont on ne trouve pas de trace explicite dans les dialogues
platoniciens, mais dont on peut repérer la résurgence chez les
successeurs de Platon et notamment chez celui qui lui a succédé à la
tête de l’Académie, son neveu Speusippe. Selon cette doctrine, toute
la hiérarchie des êtres devrait être ramenée à l’interaction de deux
principes ultimes qui sont l’Un et la Dyade indéfinie, laquelle joue le
rôle de réceptacle et de matière. Mais le Philèbe ajoute que le mélange
de la limite et de l’illimité ne peut être que le fait d’une intelligence.
Aristote reprendra cette exigence selon laquelle le principe premier
de tout être est un vivant intelligent dans sa notion de Premier
Moteur immobile. Cette conception par Platon d’un principe unique
qui à la fois est au-dessus de l’être, lequel devient alors quelque
chose qui dépend du principe, et qui est intelligence, va dominer
toute l’histoire du platonisme. Sous la forme en quelque sorte
définitive qu’elle prend dans le néoplatonisme de Plotin, l’Un est le
principe suprême dont l’Être procède, mais dont l’Intellect procède
aussi. Cette absorption de l’ontologie dans une Hénologie (de hen,
« un ») est ainsi le dernier mot de la métaphysique antique. L’article
« Plotin » de ce volume expose bien les difficultés que rencontre
l’interprète, mais aussi celles qui sont inhérentes au système
plotinien lui-même.
Cette réhabilitation de l’ « enquête sur la nature » par Platon sous
la forme d’une cosmogonie et d’une anthropogonie créationnistes
n’est pourtant pas dépourvue d’ambiguïtés. La principale
transparaît dans les dix passages, maintes fois commentés, du Timée
où Timée déprécie son propre discours, en disant qu’il ne saurait
prétendre à la vérité du discours portant sur ce qui est « stable et
translucide pour l’intellect » (29b), mais qu’il n’est qu’un « discours
vraisemblable » ou un « mythe vraisemblable ». Le discours
physique, parce qu’il porte sur la réalité sensible qui est mouvante et
obscure, ne saurait acquérir la rigueur du discours scientifique. Ces
propos ont dû encourager Xénocrate dans sa lecture, signalée plus
haut, du Timée. Cela, en tout cas, conforte l’hypothèse selon laquelle
l’« enquête sur la nature » de Platon n’a pas sa fin en elle-même,
mais vise un but en dernière instance éthique. L’étude effective de la
nature ne suffit pas, chez Platon, à lever la condamnation
parménidienne d’une science de la nature. À strictement parler,
donc, Aristote a raison : Platon peut être mis au nombre des
philosophes qui, « du temps de Socrate », se détournèrent des
recherches physiques, Aristote dit de la theoria physikè. Cela
deviendra encore plus vrai des Néoplatoniciens. C’est à Aristote que
devait revenir la tentative la plus complète de restauration de la
physique.
Physique et métaphysique
aristotéliciennes
La philosophie naturelle d’Aristote marque sans doute l’apogée
de la pensée physique des Anciens, à tel point que c’est la physique
aristotélicienne que les penseurs médiévaux se sont efforcés de
comprendre et de développer, et que c’est aussi une physique
aristotélicienne que les physiciens du XVIIe siècle ont attaquée. On
peut aussi dire qu’avec Aristote, la question de l’être arrive à une
pleine maturité, ce qui fait que la métaphysique aristotélicienne est
restée jusqu’à nos jours le parangon de ce genre de spéculation
philosophique.
Dans le domaine de la physique, comme ailleurs mais peut-être
plus qu’ailleurs, Aristote, quand il récapitule les doctrines
antérieures, entend montrer que, à de rares exceptions près, chacune,
pour peu qu’on sache la mettre dans une perspective correcte, recèle
sa part de vérité. Aristote n’est pourtant pas un éclectique ; il
procède à une réappropriation théorique des doctrines antérieures
qui est même le contraire de l’éclectisme. Un traité spécial, fascinant
et trop longtemps méconnu, a été largement consacré par Aristote à
la « mise en perspective » des grands problèmes de la philosophie
naturelle présocratique, le traité De la génération et de la corruption. Ni
science totale, ni science impossible, la physique est pour Aristote la
science d’une région de l’être. Sont dits « naturels » (physiques) les
êtres qui possèdent en eux-mêmes le principe de leur mouvement, ce
dernier terme étant entendu dans son sens aristotélicien total de
changement selon toutes les catégories affectées par un mouvement.
Une plante vivante a en elle-même le principe de sa croissance,
l’élément Feu a en lui-même une tendance à aller vers la périphérie
de l’univers. Une table, en revanche, n’a pas en elle-même le
principe de son devenir-table, mais en autre chose qu’elle-même, à
savoir dans l’artisan maniant ses outils. D’un certain point de vue, tous
les êtres de ce monde sont naturels, y compris la table, puisqu’elle
est faite de bois qui est, ou a été, une réalité naturelle. Mais ce point
de vue n’est pas essentiel : être de bois n’est pas le caractère essentiel
de la table. Ce qui définit une table, c’est qu’on puisse s’y attabler, et
cela est dû davantage au menuisier qu’à l’arbre dont elle est faite.
L’étude de la physique se limite donc à certaines réalités qu’Aristote
énumère dans les premières lignes de son traité appelé Les
Météorologiques : les êtres en mouvement et leurs éléments, c’est-à-
dire les corps célestes, les composantes ultimes de l’univers matériel
que sont la Terre, l’Eau, l’Air et le Feu, les êtres vivants – animaux et
plantes –, les phénomènes « météorologiques » qui désignent d’une
part des réalités que nous-mêmes appelons de ce nom – pluie, grêle,
arc-en-ciel… – mais aussi les marées, la mer et les cours d’eau, les
tremblements de terre, ainsi que des phénomènes comme les
comètes, les étoiles filantes, la Voie lactée qu’Aristote situait dans
l’atmosphère.
Cette science théorique des êtres ayant un principe interne de
mouvement tient compte de la critique parménidienne. Tout d’abord
le système des êtres physiques – c’est-à-dire le cosmos – est un
ensemble fini, clos et éternel, qui n’est jamais venu à l’être et qui ne
disparaîtra jamais. Aristote refuse, certes, de faire de toutes les
transformations qui y adviennent, de simples altérations d’une
substance, ou de substances, toujours les mêmes, comme, selon lui,
l’avaient fait les philosophes qui posaient que l’univers était
constitué d’une seule réalité fondamentale. Aristote pense ici aux
Milésiens, non sans les faire passer sous les fourches caudines de
l’aristotélisme. Ainsi, contrairement à ce que prétend le Stagirite,
l’infini d’Anaximandre ne peut pas être réduit à une matière au sens
aristotélicien du terme puisque, loin d’être une réalité passive,
l’infini est générateur de toutes choses. Il y a bien, dans la physique
aristotélicienne elle aussi, génération et disparition des êtres
naturels, mais cela dans une chaîne ininterrompue de
transformations qui repose sur la transmutation continue des
éléments les uns dans les autres. Le cosmos aristotélicien est donc
fondamentalement cyclique, puisque les corps célestes, quant à eux,
parcourent, pour l’éternité, les mêmes orbites. Il y a là une mutation
fondamentale dans la physique antique. Avec Aristote, pour la
première fois, le discours physique, et notamment l’étude du cosmos, perd
la structure narrative qui le rendait si proche du récit hésiodique. Il n’y a
pas eu de mise en ordre initiale des choses qui pourrait être décrite
(racontée), le problème de l’origine absolue de toutes choses
disparaît et la cosmologie ne s’appuie plus sur aucune cosmogonie.
Le monde humain est, en revanche, plongé dans l’histoire. Ainsi
Aristote répète-t-il dans Les Politiques que le temps des monarchies
est dépassé. Mais cette linéarité, dont la physique ne s’occupe pas –
car l’histoire de la civilisation ne relève pas de l’enquête physique –,
s’inscrit dans une circularité plus fondamentale, puisque,
périodiquement, des cataclysmes viennent décimer la race humaine,
obligeant les survivants à réinventer la civilisation. Les premiers
physiciens, au contraire, en s’intéressant à la genèse de toutes choses,
avaient inclus l’étude du développement de la civilisation humaine
dans leur « enquête sur la nature ».
On peut ici repérer une opposition forte et globale entre deux
façons de penser à la fois la nature et l’être, qui traverse toute
l’Antiquité et dont les représentants les plus remarquables sont
Aristote et Démocrite. Il est d’ailleurs vraisemblable que c’est bien
Démocrite qu’Aristote considérait comme son adversaire
philosophique principal. Nous avons vu que l’atomisme
démocritéen proposait une ontologie cohérente et une philosophie
naturelle dont la force théorique avait frappé les Anciens, et
notamment Aristote, bien que ses performances en matière
d’explication des phénomènes vitaux fussent assez faibles, comme
c’est le cas pour presque tous les systèmes mécanistes. S’opposent
deux systèmes de pensée qui rassemblent plusieurs caractéristiques
qui vont ensemble, sans être pourtant nécessairement liées, de sorte
que l’une ou l’autre peut manquer dans une doctrine moins « pure »
que celles de Démocrite et d’Aristote. Opposition d’un monde infini,
composé d’un nombre infini de mondes dérivant dans un espace
infini, et d’un cosmos à l’extérieur duquel, dit Aristote, il n’y a « ni
lieu, ni espace, ni vide » ; mais aussi opposition d’un monde
discontinu et corpusculaire et d’un cosmos plein et continu. Il s’agit
là d’une des thèses les plus hardies et les plus novatrices d’Aristote,
qu’il a notamment développée dans le livre VI de sa Physique. Selon
l’hypothèse discontinuiste, combattue par Aristote, toute grandeur
spatiale, tout temps et tout mouvement est composé d’unités
indivisibles. Position difficile, car soit l’indivisible est une véritable
grandeur du même type que ce dont il est une partie, et on ne voit
pas pourquoi il ne pourrait pas être divisé à son tour, soit ce n’est pas
une vraie grandeur, et on ne voit pas comment une addition de non-
grandeurs pourrait constituer une grandeur. Mais la position
continuiste d’Aristote se heurte aux objections de Zénon d’Élée, pour
qui l’infinie divisibilité du continu empêche le mouvement, ou
Achille de rattraper la tortue. Quand, en effet, un mouvement
pourra-t-il commencer si, entre son origine et n’importe quel
moment de son déroulement, il y a une infinité de moments ? La
réponse d’Aristote, c’est que l’on ne peut pas déterminer le moment
où un mouvement commence, puisqu’il y a toujours un moment
antérieur à tout moment choisi comme commencement, mais que, en
revanche, on peut dire à quel moment un mouvement s’arrête, à
savoir le moment auquel on l’interrompt. Or dans le monde
d’Aristote le mouvement n’a pas de commencement absolu, mais
tout mouvement est la suite d’un mouvement antérieur, ce
qu’Aristote exprime par la thèse selon laquelle tout moteur est mû.
L’infini existe donc bel et bien dans le cosmos d’Aristote, mais sous
la forme de l’infinité de la divisibilité du continu, c’est-à-dire que
l’infini existe en puissance mais pas en acte.
Mais ce cosmos clos d’Aristote ne se suffit pas à lui-même : il y a
là ce que nous pouvons considérer comme la seconde prise en
compte de la critique parménidienne. Tout ce qui est mû l’est par un
moteur, à son tour mû par un autre moteur. Le dernier des moteurs
mus, au mouvement duquel sont suspendus, directement ou
médiatement, tous les autres mouvements, c’est le « premier ciel »,
l’ensemble des étoiles fixes, qu’Aristote pensait fixées sur une
sphère, la dernière de son univers géocentrique et fini. Mais le
premier ciel lui-même reçoit son mouvement d’un moteur immobile,
qui pour Aristote est le dieu. Ce concept limite qu’est le moteur
immobile, ou Premier Moteur, montre bien le statut qu’Aristote
accorde à la physique. Étant immatériel et n’ayant d’autre activité
possible, c’est-à-dire compatible avec son éminente dignité d’acte
pur, que celle consistant à se penser lui-même, le Premier Moteur ne
peut rien mouvoir de manière physique. Le premier ciel est donc mû
par le désir qu’il porte au Premier Moteur, parce que la perfection de
celui-ci le rend aussi suprêmement désirable. Le monde physique
tient donc son impulsion, et même sa possibilité, d’un au-delà de lui-
même, d’une réalité « méta-physique », au sens étymologique du
terme. Ainsi la région éminente de l’être échappe-t-elle à la
physique. Finalement, il n’y a donc, chez Aristote, ni réalité physique
complètement automotrice – puisque même la sphère des fixes a
besoin de quelque chose d’autre pour se mouvoir –, ni action causale
de l’immatériel sur le physique.
Enfin, autre position parménidienne, Aristote considère que les
objets de la connaissance par excellence, celle qu’il appelle la science
(epistèmè), doivent être nécessaires, éternels et donc toujours vrais.
Cela se traduit notamment dans cette thèse de l’épistémologie
aristotélicienne selon laquelle les propositions scientifiques sont par
soi et universelles. Comment appliquer un tel schéma à des réalités
individuelles mouvantes comme le sont les êtres physiques, c’est
l’un des problèmes principaux de la théorie aristotélicienne de la
connaissance, qui n’a pas à être traité ici. Mentionnons simplement
la coexistence chez Aristote de deux positions qui ne sont
contradictoires qu’en apparence : d’un côté, les objets concrets ne
peuvent devenir objets de sciences qu’en tant qu’ils sont subsumés
sous des relations universelles, mais, d’un autre côté, la connaissance
sensible du concret est une véritable connaissance, à la fois fiable et
riche, ce qui éloigne radicalement Aristote de Platon.
L’unité englobante de la physis antique n’est donc pas restaurée.
Dans le cosmos lui-même, certaines régions de l’être échappent à la
physique. Ainsi en est-il, d’abord, de tout ce qui relève de la
technique humaine, et peut-être de certaines techniques animales. Il
en va de même du domaine de ce qu’Aristote a le premier appelé les
« sciences pratiques », c’est-à-dire celles qui considèrent les actions
produites par la liberté humaine, objets de l’éthique et de la
politique. Peut-être est-il juste de parler, ici aussi, de nostalgie,
puisque contre certains Sophistes, Aristote maintient le fondement
naturel de la politique et de certains liens sociaux : c’est par nature
que les humains s’assemblent en sociétés qui aboutissent à la cité
(polis) ; les rapports familiaux, mais aussi l’esclavage sont naturels,
certains hommes étant naturellement destinés à servir. Mais cette
naturalité ne suffit pas à faire des rapports sociaux et politiques des
objets de la physique, ni à faire de la cité une substance naturelle
comme l’est, par exemple, un être vivant ; étant fondés sur la liberté
humaine, ils sont justiciables d’un discours scientifique d’un autre
type. Les phénomènes, enfin, qui adviennent fortuitement et non pas
toujours ou la plupart du temps, bien qu’ils ne puissent pas être
dans tous les cas déclarés non naturels, n’en sont pas moins
étrangers à la science physique.
Quant au caractère téléologique qu’Aristote prête aux
phénomènes naturels – « la nature ne fait rien en vain », « elle réalise
toujours le meilleur », répète-t-il sans cesse dans ses traités de
philosophie naturelle –, c’est sans doute le point essentiel de sa
divergence avec les Présocratiques et notamment avec les Atomistes,
en même temps que l’aspect de sa physique qui lui a valu le plus de
critiques. Pour comprendre cette position aristotélicienne, peut-être
faut-il la relier à ce que nous venons de dire du cosmos d’Aristote. Si
le cosmos est globalement éternel et inchangeable, il lui manque la
possibilité de construire, dans le temps, la perfection – globale mais
non totale – que nous lui voyons. Étant incréé, le cosmos ne peut pas
non plus tenir cette perfection de l’intention intelligente d’un
démiurge. Il reste donc qu’il est en lui-même et par lui-même bon,
cette bonté étant l’imitation imparfaite de l’excellence absolue du
Premier Moteur.
Ce rejet par Aristote de la nature totale qui était celle des
Milésiens aussi bien que la prise en compte de la critique
parménidienne, tout cela dans des termes différents de ceux du
platonisme, confèrent un statut original aux êtres naturels et posent
la question de l’être d’une manière nouvelle. L’architecture de la
théorie aristotélicienne de la connaissance semble, à première vue,
disqualifier les questions comme celles qui demandent ce que c’est
que d’être, ou ce qui fait que les êtres sont. Le savoir selon Aristote,
en effet, est irrémédiablement morcelé en ce que chaque science
(epistèmè) correspond à un genre (genos) d’êtres. Il y a donc des êtres
naturels, des êtres mathématiques, etc., et il ne faut pas appliquer les
concepts et les méthodes concernant un genre d’êtres à un autre. Une
interrogation sur le sens de l’être en général risque donc fort, dans
cette perspective, d’apparaître comme un discours « verbal et vide »
comme le dit Aristote des spéculations platoniciennes sur les
Formes. C’est pourtant à Aristote que nous devons la formulation la
plus complète et la plus cohérente de la question de l’être. Avec
Aristote, l’ontologie – terme qui n’existe pas en grec ancien –
parvient à une sorte de conscience de soi, qui fait que toutes les
spéculations ultérieures sur l’être, jusqu’à aujourd’hui, se réfèrent à
l’aristotélisme comme à leur fondement.
Platon avait bien posé la question de savoir ce que signifie
« être » pour un étant. Ainsi, par exemple, dans le Sophiste 243e, où
l’Étranger demande, à propos de couples comme celui du chaud et
du froid : « Qu’énoncez-vous sur les deux, lorsque vous dites que les
deux et chacun sont ? Que devons-nous présumer au sujet de l’être ?
Est-il une troisième chose, à côté des deux autres ? » Mais Aristote
est le premier à poser explicitement la question de « l’être (étant) en
tant qu’être (étant) ». En effet, « il y a une science de l’être en tant
qu’être et de ce qui lui appartient par soi », écrit Aristote au début
du livre G de la Métaphysique. Mais cette science n’est guère
conforme au modèle aristotélicien des sciences, puisque l’être n’est
pas un genre. De sorte qu’à peine nommé, l’objet de cette « science »,
l’« être en tant qu’être », est démembré selon plusieurs articulations.
« L’être proprement dit se dit de plusieurs façons, dont l’être par
accident, et, autre sens, l’être comme vrai et le non-être comme faux,
il y a aussi les formes de la prédication, par exemple le quelque
chose, le quel, le combien, le où, le quand et tout autre terme qui
signifie de cette manière, et encore, outre ces sens, il y a l’être en
puissance et l’être en acte » (Métaphysique E, 2, 1026a33).
Examinons brièvement cette nouvelle carte de l’être proposée par
Aristote. « Être X par accident », cela veut dire que l’attribution de X
à un sujet S n’a lieu de manière ni essentielle ni régulière. Un sujet S
se voit attribuer « en puissance » un prédicat X quand ce prédicat,
sans lui appartenir effectivement (actuellement) à l’instant t, pourra
lui appartenir à la suite d’un processus de changement. Ce n’est pas
tout X qui peut être dit en puissance de S, car une surface blanche
peut, dans certaines conditions, être dite « noire » en puissance, mais
elle ne sera jamais « savante » en puissance. Il est à remarquer que,
malgré les restrictions qui s’attachent à ces deux modalités d’être –
l’être par accident est expulsé de la science, puisque celle-ci ne
produit que des propositions nécessaires, l’être en puissance paraît
tout de même affecté d’une sorte de déficience ontologique –, l’être
accidentel et l’être en puissance sont des manières réelles d’être. Si
nous laissons de côté la fonction copulative du verbe « être » qui ne
nous intéresse pas ici, nous voyons que la distinction principale est
celle qui a lieu selon les « formes de la prédication », qui sont ce que
l’on appelle traditionnellement les catégories. L’une des positions les
plus antiplatoniciennes prises par Aristote stipule d’une part que
l’être n’est pas un genre universel dont les différents êtres seraient
des espèces, d’autre part que l’être n’est pas univoque. Parmi les
différents sens en lesquels un être peut se dire, l’un est fondamental,
c’est la substance (ousia), parce que les autres catégories – qualité,
quantité, lieu, temps, etc. – se disent de la substance : noir se dit du
chien et non chien du noir. Aristote utilise toutes ces distinctions
pour résoudre les problèmes hérités de la tradition philosophique.
Les doctrines de l’accident et de la puissance, par exemple, servent à
répondre à l’affirmation éléatique de l’impossibilité du mouvement :
un sujet peut bien passer d’un état X à un état non-X, si la
permanence de son substrat est assurée et qu’il est en puissance ce
qu’il va devenir. De même, pour que Socrate de pâle devienne
bronzé, il n’est nul besoin de supprimer Socrate pour faire advenir
un nouvel être, comme le prétendait un paradoxe sophistique.
À ces distinctions à l’intérieur même de l’être, s’ajoutent deux
opérations qui parachèvent l’ontologie aristotélicienne. La première,
comme nous l’avons déjà vu, c’est de faire dépendre l’ensemble des
êtres naturels du Premier Moteur immobile. Nous avons également
vu que cette démarche s’inscrivait dans la perspective platonicienne
qui faisait du principe cause de l’être des divers êtres une
intelligence. Le Premier Moteur aristotélicien est un vivant – car, dit
Aristote, vivre est mieux que de ne pas vivre – et une intelligence qui
se pense elle-même, mais il est aussi acte pur – et c’est pourquoi il est
immatériel, puisque la matière est puissance de contraires –,
consacrant au niveau global la doctrine de l’antériorité de l’acte sur
la puissance. Cette thèse fondamentale d’Aristote, qui se retrouve à
tous les niveaux de l’univers – dans la génération des vivants, par
exemple, le rejeton est bien en puissance dans la semence de son
père, mais il faut l’existence en acte d’un générateur antérieurement
à la réalisation de cette puissance –, est, elle aussi, une réponse à
Parménide, car le passage de la puissance à l’acte sans présence
d’une actualité antérieure violerait le principe d’entropie. En ce sens,
il n’est donc pas faux de caractériser la métaphysique
aristotélicienne comme une ontologie de l’acte ou, comme le diraient
les Heideggeriens, de la présence.
La seconde opération, menée notamment dans les livres centraux
de la Métaphysique, dépend étroitement de la doctrine
aristotélicienne de la pluralité des significations de l’être. Il s’agit de
la réduction de la question « qu’est-ce que l’être ? » – ou « qu’est-ce
qui est être ? », le grec pouvant se comprendre de ces deux manières,
qui sont plus complémentaires que différentes – à la question
« qu’est-ce que la substance ? » ou « qu’est-ce qui est substance ? ».
La substance se trouve ainsi au centre de la recherche ontologique
d’Aristote dans deux directions, dont la complémentarité fait
justement le propre de l’aristotélisme. En un sens, l’ousia c’est la
structure intelligible de l’être, et l’on peut parfois traduire ousia par
« essence ». En ce sens « substance », « forme », « logos », « âme »
sont synonymes, ces termes ne différant que par les situations qu’ils
décrivent. Mais en un autre sens seule existe la substance
individuelle composée de matière et de forme, alors qu’il faut refuser
l’existence à des entités générales et abstraites comme les Formes
platoniciennes ou les genres et les espèces. L’ontologie
aristotélicienne conjugue ainsi une adhésion, qu’elle partage avec le
platonisme, aux exigences fondamentales de l’éléatisme – en rejetant
toute procession de l’être et du non-être l’un à partir de l’autre, en
n’accordant l’intelligibilité qu’à ce qui est éternel et immuable – et
une métaphysique du concret qui la situe aux antipodes du
platonisme.
C’est peut-être le mode d’articulation qu’Aristote établit entre la
science de la nature et la science de l’être en tant qu’être qui le
distingue le plus fortement des autres philosophes antiques. Aristote
n’emploie pas le terme « métaphysique ». Il n’apparaîtra que plus
tard, soit sous la forme meta ta physica, « après les livres de
physique », ou metaphysica, « livres de métaphysique », par exemple
dans les catalogues d’œuvres d’Aristote et chez ses commentateurs
anciens. Il y a une querelle récurrente pour savoir si
« métaphysique » désigne simplement les cours qui viennent après la
physique dans l’ordre pédagogique, ou si le mot contient une
référence à l’objet de la métaphysique qui est supra-physique. Or,
chez Aristote, la métaphysique est une sorte de physique continuée
par d’autres moyens. Matériellement d’abord, ce que les éditeurs ont
appelé « Métaphysique » est massivement constitué de textes qui se
rapportent entièrement ou principalement à la physique.
Réciproquement, des ouvrages catalogués comme « physiques »
s’intéressent à des objets « métaphysiques », comme le Premier
Moteur dont l’existence est prouvée dans le dernier livre de la
Physique. Mais c’est surtout théoriquement que l’interpénétration
entre physique et métaphysique est évidente. Aristote, en effet, est
assurément le philosophe qui a définitivement dégagé l’espace
théorique de la métaphysique, mais en la construisant en relation
avec la physique. Il faut d’abord noter que la séparation entre
physique et métaphysique ne réduit pas celle-là à un fantôme
ontologique. L’ensemble des êtres naturels garde non seulement sa
réalité propre, mais aussi sa cohérence comme système d’objets de
connaissance. Mais il faut surtout remarquer que la métaphysique
est pensée comme limite de la physique. On peut le montrer dans
plusieurs directions. La spéculation sur le sens de l’être, en
organisant l’ontologie autour de la substance, part d’une analyse de
l’étant physique concret, le composé de matière et de forme, qui reste
le modèle de la substantialité. L’existence du Premier Moteur est
établie pour donner une cohérence à l’univers physique : c’est parce
que la régression à l’infini est impossible dans un univers fini
comme celui d’Aristote, qu’il est nécessaire de poser un moteur
immobile, qui est acte pur, à l’origine de tous les mouvements, sans
lien avec le monde physique, alors que celui-ci établit une relation
avec lui.
Après Aristote
Le destin de la physique d’Aristote, notamment de sa cosmologie
et de sa dynamique, est paradoxal. En rupture avec ce qui l’avait
précédé, et repris par aucun de ses épigones, puisque même le fidèle
Théophraste, successeur d’Aristote à la tête du Lycée, critique la
téléologie de son maître, ce système est sans doute la construction
physique qui a eu la postérité la plus longue. Cette longévité a été
largement due à la « christianisation » d’Aristote par certains
penseurs médiévaux. Les physiciens ultérieurs abandonnèrent le
cosmos éternel et globalement immuable d’Aristote pour revenir à
une conception plus cosmogonique de la science de la nature. Même si
leurs images de l’univers s’opposent radicalement sur plusieurs
points importants, les Stoïciens et les Épicuriens ont en commun de
penser que le monde, ou les mondes, se constituent, se développent
et finissent par disparaître. La téléologie stoïcienne peut alors
prendre une forme providentialiste qui n’était pas de mise dans le
cosmos aristotélicien, alors que l’épicurisme reprend, non sans
modifications, l’atomisme démocritéen fondé sur le hasard. Mais,
évidemment, l’aristotélisme a laissé des traces. Sur le point
fondamental, par exemple, de la structure du discours physique,
Friedrich Solmsen remarque que Lucrèce, reprenant peut-être ainsi
l’ordre d’exposition du traité Sur la nature d’Épicure, au lieu de
commencer son poème par la genèse de l’univers, pour passer
ensuite à celle des différents êtres qui le composent et le peuplent,
expose d’abord la pertinence de l’explication atomiste, en déduit les
différentes propriétés des êtres, puis passe à une « application » des
résultats acquis en examinant chaque catégorie d’êtres.
La physique est désormais une partie de la philosophie. Les
premiers Stoïciens ont maintenu, avec un acharnement qui montrait
qu’elle avait cessé d’être partagée par tous, l’idée que l’étude de la
physique était nécessaire à qui prétendait devenir philosophe. Mais,
dès la fin de l’époque hellénistique, la philosophie en vint à
privilégier sa partie éthique. Dans ses Questions naturelles, long traité
de science naturelle examinant des sujets qui, quelques siècles
auparavant, auraient relevé de l’ « enquête sur la nature », Sénèque,
s’adressant à Lucilius à qui le livre est dédié, justifie son entreprise
par un but apologétique : « Tu me dis : quel profit tireras-tu de ces
études ? Celui-ci à défaut d’un autre : je saurai que tout est petit
quand j’aurai pris la mesure de Dieu. » Il s’agit surtout, dans une
polémique avec les Épicuriens, dont le fond porte clairement sur
l’ « art de vivre », de faire triompher le providentialisme stoïcien
contre l’atomisme épicurien qui recourt au hasard.
Mais c’est le nouveau type de relation entre physique et
métaphysique qui est peut-être le plus caractéristique de la manière
que la philosophie postaristotélicienne a de poser la question de
l’être. On peut le voir dans les deux grands courants philosophiques
qui ont dominé les périodes hellénistique et romaine, le mouvement
stoïcien et les différentes écoles platoniciennes.
Nous sommes encore victimes d’une approche sommaire de la
philosophie postaristotélicienne, dans laquelle nous ne voyons bien
souvent qu’une décadence théorique. Ainsi pour le stoïcisme, que
l’on a longtemps considéré comme une version à la fois scolaire et
naïve de l’aristotélisme, la rigueur morale en plus. Les Stoïciens n’en
sont-ils pas revenus au matérialisme des « Fils de la Terre » moqués
par Platon dans le Sophiste, en soutenant que n’existe que ce qui est
corps et que non seulement l’âme, mais aussi la vertu, la honte, la
vérité et les autres choses de ce genre, si genre il y a, sont des corps ?
Dans un article éblouissant, publié en 1964, Éric Weil réintègre
l’ontologie stoïcienne dans le mouvement qui va de l’aristotélisme
au néoplatonisme. C’est que pour les Stoïciens le corps n’est pas ce
que nous entendons par ce terme – ce qui est rigide et solide –, mais
ils le définissent par l’action. Est corps ce qui agit. De ce point de
vue, la pudeur ou la vérité agissent et nous voyons les effets de leur
action, pour la première, par exemple, dans le fait qu’elle fait rougir.
Et Éric Weil compare la doctrine stoïcienne du corps à la théorie
moderne des champs : « L’analogie est frappante : ce qui n’existe
pas, au sens courant, c’est là la vraie “réalité”, réalité qui n’est
qu’action. » Nous ne sommes donc finalement pas très loin de la
métaphysique aristotélicienne de l’actualité. Mais cette théorie, que
l’on peut dire « corporaliste », n’épuise pas l’approche stoïcienne de
l’être. Dans l’article « stoïcisme » de ce volume, Jacques Brunschwig
montre bien la liaison que les Stoïciens établissent entre leur
ontologie et leur physique, et notamment leur cosmologie et leur
théologie qui sont toutes deux des parties de la physique. Dans un
univers qui est décrit par les Stoïciens comme un vivant dont les
parties sont toutes solidaires entre elles – cette solidarité étant
incarnée par le Feu divin qui compénètre l’ensemble du monde –,
qui est fini mais se situe dans un vide infini et qui naît, se développe
et meurt dans une conflagration un nombre infini de fois, être ce
n’est pas tomber sous la vue ou le toucher, mais les étants sont en
vertu d’un véritable « acte d’être ». Il n’en reste pas moins que,
comme on le voit en lisant J. Brunschwig, les Stoïciens ne savent en
quelque sorte pas trop où mettre leur ontologie. Ayant abandonné
l’articulation aristotélicienne entre physique et métaphysique, la
direction première de leur approche de l’être est de faire que « l’objet
de la science de l’être [soit] l’objet de la physique », mais ils doivent
reconnaître que ce qu’ils appellent les « incorporels » ne sont pas
rien.
C’est à l’inverse de ce mouvement de « physicalisation » de
l’ontologie que se situent les écoles platoniciennes de la fin de
l’Antiquité. Tant le médioplatonisme que le néoplatonisme
établissent entre le physique et le méta-physique une relation de
type émanationniste ou créationniste, qui fait que celui-là tient
largement son existence et son intelligibilité « d’en haut ». De ce
point de vue, les Néoplatoniciens sont vraiment des Platoniciens en
ce qu’ils entendent ramener tous les étages de la réalité ontologique
sous la dépendance d’un principe unique, ce qu’Aristote ne faisait, si
l’on peut dire, qu’ « à la marge » avec ses approches de la
métaphysique comme théologie ou science de l’être en tant qu’être.
Même l’intellect divin ne peut pas être cet Un absolument pur que
les Néoplatoniciens recherchent comme principe, puisque, quand
bien même il se contenterait de se penser lui-même comme le fait le
Premier Moteur aristotélicien, cela introduit une sorte de scission
entre sujet pensant et objet pensé. Dès lors, comme on l’a vu,
l’Intellect, fût-il divin, ne peut pas être le principe suprême. Cette
construction néoplatonicienne, qui fut développée et parfois
rigidifiée par les grands noms de l’école qui furent aussi souvent des
commentateurs d’Aristote et de Platon, peut être considérée comme
la dernière réponse grecque aux questions « qu’est-ce que l’être ? » et
« qu’est-ce qui est ? ». Le Dieu chrétien se glissera assez aisément
dans les habits de ce principe néoplatonicien de toutes choses, ce
Dieu qui, non content de maintenir par son activité continue
l’univers dans l’être, aura aussi à cœur de s’occuper de chaque
cheveu de chacune de ses créatures humaines.
Pierre PELLEGRIN
ORIENTATION BIBLIOGRAPHIQUE
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VERNANT, Jean-Pierre, Les Origines de la pensée grecque, Paris, PUF,
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L’Aventure de l’esprit. Mélanges Alexandre Koyré, Paris, Hermann, 1964,
t. II, p. 556-572.
La Connaissance
Préliminaires
Savoir et voir
Savoir et toucher
Savoir et connaître
Ouvrons ici un débat, que le modèle visuel, aussi bien que le
modèle tactile, permet d’introduire. La langue française, enviée par
d’autres sur ce point, distingue syntaxiquement « savoir » et
« connaître ». On dit « connaître quelqu’un », ou « quelque chose » ;
on ne dit pas « connaître que » quelque chose est ceci ou cela. On ne
dit pas « savoir quelqu’un », ni, sauf exception, « savoir quelque
chose » ; on dit « savoir que » quelque chose est ceci ou cela. Les
expressions courantes distinguent ainsi une connaissance de type
objectal et un savoir de type propositionnel. Les verbes cognitifs, en
grec, ne sont pas spécialisés ainsi : la plupart admettent une
construction objectale et une construction propositionnelle. Certaines
possibilités syntaxiques communes en grec brouillent encore
davantage la distinction : le participe peut se substituer à la
construction propositionnelle (au lieu de dire : « Je sais que tu dis la
vérité », on dira par exemple, littéralement : « Je connais toi disant la
vérité ») ; et le sujet de la proposition complétive peut apparaître par
anticipation comme objet du verbe principal (au lieu de dire : « Je
sais que Socrate est mort », on dira par exemple, littéralement : « Je
connais Socrate qu’il est mort »).
Cette absence d’étanchéité entre la connaissance d’une chose et
celle d’un état de choses a sans doute favorisé l’idée que savoir
qu’une chose est ceci ou cela, c’est connaître cette chose elle-même,
assez et de la manière qu’il faut pour savoir qu’elle est ceci ou cela ;
autrement dit, c’est trouver dans la nature même de la chose, objet
ultime de la connaissance objectale, les raisons pour lesquelles elle
est ceci ou cela. De là des restrictions importantes sur la légitimité de
l’emploi du verbe « savoir » en contexte propositionnel : si telle
chose est ceci ou cela, mais sans que ce soit en vertu de sa nature
(par exemple si elle ne l’est qu’accidentellement, par rencontre
temporaire, ou encore relativement, sous un certain rapport, alors
que sous quelque autre rapport elle ne l’est pas), on refusera de dire
que l’on sait (ou que l’on sait vraiment) qu’elle l’est. À parler
strictement, on ne peut pas savoir que Socrate est assis, puisqu’il se
lèvera sans cesser d’être Socrate, ni qu’il est petit, puisqu’il l’est en
comparaison d’un homme plus grand, mais non en comparaison
d’un autre plus petit.
Savoir et ouï-dire
Savoir et inférer
Savoir et comprendre
Savoir et croire
Savoir et intuition
Textes
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II
LA POLITIQUE
L’homme est un animal politique
Aristote, dans le chapitre des Politiques qui a été cité plus haut
(VII,7), déclare qu’avec les bonnes dispositions naturelles qu’il vient
d’attribuer aux Grecs, ceux-ci devraient être destinés à gouverner le
monde « pour peu qu’ils arrivent à une organisation politique
unique ». Et il y a toujours eu en Grèce, au moins depuis le début de
la période classique, un courant « panhellénique », au nom duquel
des cités s’alliaient parfois pour mener des entreprises communes.
La manifestation la plus éclatante de cette conscience d’une
communauté de destin de tous les Grecs fut évidemment représentée
par les guerres médiques, même si certains Grecs, et notamment
Athènes, ne manquèrent pas de mettre en avant leur rôle
prépondérant dans la victoire commune sur les barbares. Il est non
moins certain que l’agression de cités ou de peuples grecs par des
barbares provoquaient une sorte de réaction de solidarité ethnique et
c’est à un sentiment de ce genre que Démosthène tenta de faire appel
quand la Macédoine menaça l’indépendance des cités, bien que la
situation ne fût point la même qu’à l’époque des guerres médiques
et que les Macédoniens ne fussent point mis sur le même plan que
les Perses. Après tout, le père d’Aristote était un familier du roi de
Macédoine… L’un des aspects les plus caractéristiques de la
perception que les anciens Grecs ont eue d’eux-mêmes consiste dans
la combinaison, dans des proportions sans doute variables selon les
lieux et les périodes, de cette certitude d’une unité de nature et de
destin de tous les Grecs et de la conscience d’une appartenance
prioritaire à sa cité. Il semble bien que, du moins avant que la cité ne
fût vidée de son caractère politique, la diversité poliade ait été le
pôle principal de cette contradiction. Il est d’ailleurs remarquable
que, hors des périodes exceptionnelles de péril barbare, les cités ne
se soient pas privées, dans leurs luttes entre elles, de faire alliance
avec des royaumes orientaux.
Si l’on poursuit cette réflexion sur l’unité et la diversité, on arrive
à un aspect fondamental, tant de la réalité politique de la Grèce
antique, que de la manière que les Grecs avaient de vivre cette
réalité. Cette définition de soi par l’appartenance à une cité se fait
dans plusieurs directions. Ainsi, comme c’est le cas chez certains
patriotes des États modernes, des citoyens pouvaient être sensibles
au fait de partager une histoire commune, voire des divinités
identiques. Mais il ne fait guère de doute que le citoyen grec se
définissait avant tout par la nature de sa cité, c’est-à-dire par sa
constitution. Il y a là une définition applicable à tous : un Grec est
« un homme vivant sous une constitution ». Mais cette unité
disparaît aussitôt qu’apparue, parce qu’il y a entre les constitutions
de grandes différences. L’une des voies d’accès à la conscience,
heureuse ou souvent malheureuse, que les Grecs avaient du
caractère radical, et indépassable, du morcellement de l’aire
culturelle grecque se trouve précisément dans le fait de la diversité
des constitutions. Aristote pose, au début du livre III des Politiques,
le problème fort intéressant de savoir dans quelle mesure les
gouvernants d’une cité sont tenus par les engagements pris par leurs
devanciers, problème hautement récurrent dans la vie politique
jusqu’aujourd’hui, quand, par exemple, on se demande si la
République française est comptable des effets de la législation du
régime de Vichy. La réponse d’Aristote est que, quand la constitution
a changé, qu’on est passé par exemple d’une oligarchie à une
démocratie, ces engagements n’ont pas à être tenus parce que la cité
n’est plus la même. La diversité constitutionnelle était prise en
compte dans le sentiment d’attachement à la cité, puisque nous
savons, au moins dans le cas d’Athènes et de Sparte, que leurs
citoyens étaient fiers de la constitution qui constituait la base de leur
identité politique et éthique. Cette diversité des constitutions a été
très tôt objet de réflexion chez les historiens et philosophes, mais
c’est encore Aristote – le penseur du politique par excellence – qui le
premier, et peut-être le seul, en a tenté une véritable approche
théorique. Plusieurs points, parmi les principaux, doivent être
envisagés.
Le législateur (nomothetès), qui, comme son nom ne l’indique pas
– puisque le terme désigne, étymologiquement, quelqu’un qui fait
des lois –, est celui qui donne une constitution à une cité, constitue
l’une des grandes figures peuplant l’imaginaire collectif des Grecs,
peut-être plus prégnante encore que celle du tyrannicide. À tel point
que les plus importants d’entre eux ont été érigés au rang de
« sages », parfois divinisés, incorporés en tout cas à un panthéon
commun à tous les Hellènes. Ainsi Solon à Athènes, Lycurgue à
Sparte, Charondas en Sicile. On voit ici pointer une contradiction des
plus intéressantes. Toutes les cités grecques, ou presque, se sont
efforcées d’associer des dieux à leur fondation, c’est-à-dire à
l’établissement de leur constitution, ce qui a fourni le fondement de
la religion civique de chacune, à laquelle tous les citoyens étaient
tenus de participer par des cérémonies dûment codifiées. Il faut
aussi ajouter que le culte des héros fondateurs, qu’ils soient divins
ou non, a permis à chaque cité de se donner une histoire mythique
qui contribuait à son identité. Ce n’est pas tant l’apparent
anachronisme d’une telle référence – elle semble renouer avec la
pratique prépolitique de justification du pouvoir par une caution
divine – qui étonne, que sa profonde contradiction avec la pratique
historique effective des cités grecques. Malgré cet appel au divin, en
effet, et en dépit des différents moyens destinés à présenter les lois,
et donc les constitutions, comme immuables – à Athènes les lois
étaient, au sens propre, « gravées dans le marbre » –, l’histoire nous
montre des cités sans cesse en train de changer de constitution. Le
parti des riches prend-il l’avantage ? la démocratie est remplacée par
une oligarchie ; une expédition extérieure tourne-t-elle au désastre ?
une aristocratie militaire s’impose, etc. Non seulement cette
variabilité des constitutions n’est ni marginale ni accidentelle, mais il
faut sans doute y voir un aspect absolument fondamental de la
réalité politique et donc mentale des Grecs. La cité est une entité
autonome et toute atteinte à cette autonomie – l’autonomiac’est,
comme l’indique son étymologie, la faculté de se donner à soi-même
ses propres lois – est ressentie comme une atteinte à la liberté, c’est-
à-dire à l’essence même de la cité. Or la double liberté qu’elle
possède de se donner sa propre constitution et de la réformer comme
elle l’entend est sans doute l’affirmation la plus radicale de la liberté
de la cité ainsi que le fondement de son autonomie.
Cette diversité des constitutions a donc été objet de réflexion
pour des historiens, des ethnologues, des philosophes. L’un des
exemples les plus développés et les plus anciens de cet intérêt est le
fameux « débat perse », dans lequel Hérodote (Histoires III, 80-82)
rapporte, dans un récit qui n’a aucune vraisemblance historique, la
discussion de trois Perses défendant chacun un régime politique,
démocratie, aristocratie puis monarchie, ce dernier l’emportant, ce
qui n’est guère étonnant puisqu’il était défendu par Darius. Il était,
dès lors, difficile d’éviter que la notion de valeur relative des régimes
ne s’introduisît dans le débat. La plupart des cités, en effet, étaient
persuadées d’avoir la meilleure constitution possible, ou du moins
une constitution meilleure que celle des autres, d’où ce patriotisme
constitutionnel dont on a parlé. Que l’on se souvienne du discours
de Périclès prononcé à l’occasion des funérailles de soldats athéniens
tombés au combat tel que le rapporte, et peut-être l’invente au moins
en partie, Thucydide (II, 34 sqq.), dans lequel, sans modestie
excessive, Périclès déclare qu’Athènes « est pour la Grèce une
vivante leçon », et notamment du fait de sa constitution
démocratique. Le sommet de ce genre d’analyse axiologique est
atteint avec la classification des constitutions proposée dans La
République de Platon : il y a six sortes de constitutions, la royauté,
l’aristocratie, la timocratie, l’oligarchie, la démocratie et la tyrannie,
cette liste suivant un ordre de valeur décroissante.
Sur ce point aussi, les Grecs semblent devoir s’accommoder
d’une contradiction, puisque la liberté de choisir sa propre
constitution s’oppose à l’idée, universellement répandue, que
certaines constitutions sont meilleures que d’autres. Qui, en effet,
choisira en connaissance de cause ce qui est défectueux ? Débat
récurrent chez les philosophes au moins depuis Socrate. C’est encore
Aristote qui dépasse cette contradiction en la théorisant. Pour lui,
l’excellence d’une constitution dépend de l’état matériel, historique
et psychologique du corps de ses citoyens. La même loi peut donc
être juste pour un peuple dans un état donné, et injuste dans un
autre contexte, parce que, par exemple, le vol n’a pas la même
signification dans une société fondée sur le profit et dans une société
fondée sur l’honneur. Cela illustre le grand principe de la politique
aristotélicienne, selon lequel ce sont les lois qui dépendent de la
constitution et non la constitution des lois. Il n’y a donc pas une
forme constitutionnelle qui doive être imposée à toutes les cités. Il y
a un passage de l’Éthique à Nicomaque qui a longtemps été mal
compris par les interprètes. Aristote y dit qu’il y a « partout une
seule constitution qui est excellente » et l’on s’est demandé quel était
ce régime qui pouvait partout prétendre à être la bonne constitution.
En fait, le « partout » a un sens distributif et signifie qu’à un endroit
donné, et il faut ajouter à un moment donné, une forme
constitutionnelle et une seule peut être considérée comme excellente
pour une cité donnée.
Si, encore une fois, Aristote élabore théoriquement un sentiment
général parmi ses contemporains, cela accentue encore la conscience
que les Grecs avaient de leur diversité. Malgré l’intensité et
l’efficacité de la propagande athénienne – dont nous subissons
encore les effets aujourd’hui –, les Grecs ne se mirent jamais d’accord
sur la supériorité de la démocratie. Un indice que la diversité
constitutionnelle, fait historique, fut aussi un fait mental se lit aussi
dans la réticence avérée des cités à se laisser imposer une
constitution autre que la leur, chose qui suivait normalement la
soumission d’une cité par une autre. Ainsi Athènes, dans ses
entreprises impérialistes, impose une constitution démocratique aux
cités qu’elle domine, tout comme Sparte impose une constitution
oligarchique à ses cités clientes. Ce qui n’empêche évidemment pas
Aristote de faire une nette distinction entre des constitutions qui sont
bonnes – celles qui ont en vue l’ « avantage commun » et permettent
à leurs citoyens de devenir éthiquement et affectivement meilleurs –
et des constitutions qui sont « déviées » en ce qu’elles servent des
intérêts particuliers.
Mais la contradiction la plus importante que les Grecs ont eu à
affronter, du moins jusqu’à l’orée de l’époque hellénistique, entre
leurs catégories mentales et la réalité historique est sans doute celle
qui n’a cessé d’exister entre la certitude qu’ils avaient que la vie en
cité leur était non seulement naturelle, mais avait même pour
fonction de parfaire leur nature, et le caractère massivement
défectueux des cités existantes. À l’époque classique et jusqu’à la
période de la prépondérance macédonienne, il n’existait que deux
sortes de cités dans le monde grec, les oligarchies et les démocraties,
ce qui était des noms « nobles » pour désigner ce qui était en fait des
ploutocraties et des démagogies. Comment peut-on penser qu’on
réalise sa nature dans des instanciations historiques viciées, c’est-à-
dire contre nature, et cela quand on accepte le postulat fondamental
de la pensée grecque selon lequel la nature est fondamentalement
bonne ? Suffit-il, pour expliquer cette difficulté – et c’est un
euphémisme – des cités à réaliser leur vraie nature, de faire appel,
comme Aristote, à la « méchanceté » humaine ?
Les Grecs ont, certes, conscience de « mener une vie libre sous les
meilleures institutions politiques » quand ils se comparent aux
barbares, mais, à travers les analyses des philosophes, les discours
des orateurs ou les pièces de théâtre, on repère, surtout à partir de la
seconde moitié du IVe siècle avant J.-C., la présence, assez large
semble-t-il, d’une attitude critique à l’égard de la vie politique elle-
même, qui va bien au-delà de la désaffection des élites envers la
démocratie que les historiens ont notée. Cette désaffection est sans
doute le symptôme d’un certain désenchantement face à ce que
beaucoup considèrent comme une déviation de l’idéal civique. Il est
remarquable, de ce point de vue, que la démocratie qu’Athènes
offrait en modèle à la Grèce entière fut considérée comme un régime
menacé, notamment en ce qu’elle eut toujours à faire face au
soupçon d’ouvrir la voie à un état d’anarchie populiste. Aristote ne
compte pas la dèmokratia parmi les constitutions droites, mais la tient
pour ce que nous appellerions une démagogie dans laquelle les
gouvernants, pour rester au pouvoir, flattent les désirs changeants
de la masse des citoyens pauvres. Mais il y a chez lui l’idée, au
moins sous-jacente, que les régimes populaires sont l’aboutissement
normal du fonctionnement des cités. La royauté, en effet, convient à
la cité à l’époque de sa formation, quand les hommes capables de
gouverner sont peu nombreux ; c’est, dit Aristote, la forme
constitutionnelle la plus proche de la famille patriarcale. Ensuite, par
une sorte de nécessité interne, le nombre des hommes aptes à
participer au gouvernement de la cité s’accroît, et l’on aboutit à des
régimes de type aristocratique ou oligarchique. Mais les régimes
minoritaires, qu’ils soient censitaires ou non, ont de la peine à
résister à la pression de la masse des citoyens qui veulent participer
au pouvoir quelles que soient leur fortune et leur qualification. Or,
aux yeux de la plupart des Grecs, la défaite d’Athènes dans la guerre
qui l’opposa à Sparte pendant plus de vingt-cinq ans – la guerre du
Péloponnèse – fut la défaite de la démocratie elle-même. Face à cette
démocratie devenue la mère de tous les maux, certaines élites se
tournèrent donc vers le régime autoritaire de Sparte, un peu, toutes
proportions gardées, à la manière dont certains intellectuels français
du temps de la Seconde Guerre mondiale attribuèrent la défaite aux
prétendus excès du Front populaire et se mirent à admirer les
régimes fascistes. Socrate et Platon n’ont, en tout cas, pas vivement
combattu les Trente Tyrans installés au pouvoir par Sparte à
Athènes. Après deux siècles d’un fonctionnement, parfois chaotique
certes, mais qui a garanti une liberté sans équivalent dans l’histoire
du monde, tout se passe comme si beaucoup de Grecs, en se posant
comme des déçus de la politique, s’étaient préparés aux tyrannies à
venir.
La Grèce postpolitique
Comme nous l’avons vu, l’existence effective du système
politique en Grèce fut de courte durée. D’où la seconde dissonance
entre l’histoire politique réelle et le politique imaginaire des Grecs.
C’est encore avec Aristote qu’il faut faire un pas de plus. Sa position
historique est, en effet, remarquable. Il est le témoin et même, en tant
qu’il fut précepteur d’Alexandre, une sorte d’acteur de la fin des
cités, alors même qu’il prétend que la cité est l’horizon indépassable
de l’existence humaine, puisque, pour lui, ce n’est que dans une cité
à la constitution droite qu’un individu peut atteindre le bonheur. Il
n’y a donc pas de correspondance chronologique entre la conscience
partagée des Grecs et leur réel historique, et cela dans les deux sens.
Sans trop de surprise, les poèmes homériques, qui ont dû être écrits
vers le VIIIe avant J.-C. et réécrits un peu plus tard, parlent parfois de
l’organisation sociopolitique de ce qui est censé être des royaumes
de l’époque héroïque en termes au moins protopolitiques, comme
nous l’avons vu à propos du passage sur le bouclier d’Achille. Mais
c’est vers l’aval que les choses se révèlent les plus intéressantes.
Nous voyons, en effet, les Grecs tenter, durant plusieurs siècles, de
lire, et d’écrire, en termes politiques, une histoire dans laquelle la cité
n’existe plus pleinement depuis longtemps.
Le monde grec ancien a disparu de la scène de l’histoire
universelle en perdant peu à peu ses caractères propres. Cela s’est
passé par vagues successives et sur une longue période de temps,
mais toujours, formellement, de la même façon : un agent extérieur a
obligé les Hellènes à renoncer à l’essence rhapsodique de leur mode
d’être. La véritable fin du monde grec, et antique, viendra quand le
christianisme parviendra à imposer une pensée unique en lieu et
place de la concurrence, vive mais libre, des différentes écoles de
pensée. Mais la première de ces pertes est politique, quand un
pouvoir centralisé et passablement despotique s’est imposé à toutes
les cités. Ce furent successivement Philippe II de Macédoine,
Alexandre, les rois hellénistiques, puis Rome. En perdant leur
identité politique, les cités ont aussi perdu leur indépendance
économique, leurs forces militaires, etc. Cette perte, contrairement à
celle infligée par le triomphe du christianisme, n’a pas été mortelle,
et la pensée politique grecque s’est adaptée à ces conditions
nouvelles. Il ne s’agit pas ici de brosser le tableau des
transformations politiques et sociales qu’a subies la Grèce à partir
des époques hellénistique et romaine, mais de saisir de quelle
manière et sous quelles formes un mode d’être et une pensée
essentiellement politiques ont survécu à la fin du politique et à la
transformation radicale du pouvoir.
Nous avons vu, suivant en cela Jean-Pierre Vernant, que la mise
en forme de la plupart des productions intellectuelles grecques avait
été marquée par un type de rationalité directement issu de la
pratique du discours politique. Ainsi en fut-il des deux disciplines
les plus remarquables du paysage théorique grec que furent les
mathématiques et la philosophie. Rien n’a pu empêcher ces
disciplines, même quand elles ont été séparées du contexte politique
qui a marqué leurs origines, de continuer de prospérer. Jusqu’à une
période assez récente, les historiens de la philosophie et de la pensée,
et sans doute les historiens tout court, ont considéré que la
« grande » période de l’hellénisme, c’était l’époque « classique »,
c’est-à-dire le Ve et les deux premiers tiers du IVe siècle avant J.-C., et
que les époques suivantes avaient été des temps de décadence. Que
n’a-t-on entendu, par exemple, sur l’art hellénistique qui, par un
réalisme de mauvais aloi, aurait trahi la pureté classique autant que
la force de l’art archaïque… Or le fait est que la pensée et le savoir
grecs ont connu, après Aristote, des développements remarquables.
C’est le cas en philosophie, par exemple, bien que notre approche
soit quelque peu biaisée par la perte des textes. Par ailleurs, le
mouvement d’émancipation des différentes sciences par rapport à la
philosophie, qui commence à prendre de la vigueur au IIIe avant J.-C.
– siècle d’or de la mathématique grecque avec Aristarque de Samos,
Archimède et Apollonius de Perge – ne fera que s’accélérer. Aux IIe-
e
III siècles après J.-C., on assiste à un nouveau développement des
sciences – c’est l’époque de Ptolémée, de Galien et de Diophante,
entre autres savants –, mais aussi à une sorte de codification de tous
les savoirs : c’est, de nouveau, comme cela avait déjà été le cas à
l’époque classique, un temps de recueils et de manuels consignant
les principaux savoirs – en grammaire, par exemple, avec Apollonios
Dyscole – et les doctrines des anciens philosophes. Ainsi en est-il de
Diogène Laërce et du recueil des doctrines sceptiques par Sextus
Empiricus.
Un mot d’abord sur les transformations historiques après
Alexandre. Il y eut des tentatives pour renverser la monarchie et
revenir à un État proprement politique. Ainsi, à l’annonce de la mort
d’Alexandre, Athènes se souleva contre sa garnison macédonienne,
ce qui provoqua la fuite d’Aristote, quelques mois avant sa propre
mort. Mais toutes ces révoltes firent long feu. La ligne choisie par les
monarchies hellénistiques puis par Rome fut de préserver le cadre
municipal et de laisser les cités s’administrer elles-mêmes pour ce
qui concernait leurs affaires propres. Il est même remarquable que
Rome ait entrepris, non sans succès, d’organiser sur le mode
municipal les peuples barbares qu’elle avait soumis, eux qui
n’avaient jamais connu la vie en cité. La hiérarchie entre citoyens,
étrangers libres et esclaves persista et l’on vit les gens importants de
chaque cité en briguer les magistratures.
Qu’en est-il de la pensée politique et surtout, dans la mesure où
nous pouvons les appréhender, des nouvelles structures mentales
que cette pensée reflète ? Des témoignages concordants nous
montrent que l’adaptation idéologique des Grecs aux nouvelles
formes de pouvoir s’est faite dans la douleur. La prétention
d’Alexandre à exhiber les attributs de son pouvoir dans un apparat
oriental – avec notamment l’obligation de se prosterner devant le
roi –, sa décision de se faire proclamer pharaon quand il eut vaincu
l’Égypte, ses mariages contractés à la mode perse et, enfin, son désir
de faire l’objet d’un culte ont heurté les sentiments de ses soldats
macédoniens habitués aux mœurs grecques. Il y eut des révoltes et
Alexandre n’hésita pas à faire exécuter certains de ses compagnons
comme Parménion, l’un de ses meilleurs généraux, et le fils de celui-
ci, Philotas. Callisthène, le neveu d’Aristote, qui refusa de se
prosterner devant le roi, fut mis à mort. Il est très symptomatique
que les soldats en question aient trouvé les prétentions d’Alexandre
révoltantes, mais aussi ridicules. Ainsi quand ils lui conseillèrent,
pour se lancer dans de nouvelles conquêtes où ils ne voulaient point
le suivre, d’y aller « avec son père Amon », raillant ainsi sa soi-disant
ascendance divine…
Les philosophes ne semblent pas avoir immédiatement saisi
l’importance de la mutation à laquelle ils assistaient. Avec le même
aveuglement que leur maître Aristote, Théophraste et ses
successeurs au Lycée continuent imperturbablement de traiter de
problèmes constitutionnels. Le cas de Polybe est sans doute l’un des
plus intéressants en ce qu’il combine l’ancien et le nouveau. Il est
d’abord général dans la Ligue achéenne, une fédération de cités
grecques constituée vers 280 avant J.-C. pour tenter de renverser la
domination macédonienne. D’une certaine manière, la Ligue
achéenne est l’ultime réponse politique de la Grèce, ou de l’une de ses
parties, à la subversion de la cité par les grandes monarchies
hellénistiques. Elle est aussi la preuve de la nostalgie que les Grecs
éprouvent vis-à-vis de leur splendeur politique passée. Dans la
Ligue, toutes les cités sont égales et elles s’engagent à ne pas mener
de politique étrangère indépendante, mais à se concerter dans le
cadre d’une sorte d’État fédéral qui semble seul pouvoir faire le
poids face aux Macédoniens. Ce fut, on devrait dire évidemment, un
échec, mais surtout du fait de l’intervention d’un tiers, de poids il est
vrai, à savoir Rome. Le présent macédonien ne fut donc pas vaincu
par le passé politique, mais par le futur romain. Après avoir tenté de
maintenir la neutralité de la Ligue entre les Macédoniens et les
Romains, Polybe est pris comme otage et envoyé à Rome. Il devient
alors partisan inconditionnel de Rome et conseiller de Scipion
Émilien. Le dernier acte est désastreux pour les Grecs : la Ligue
achéenne se révolte contre Rome, elle est vaincue et Corinthe est
rasée. Polybe joue alors de ses relations romaines pour essayer
d’atténuer la rigueur du sort des Grecs.
Convaincu que l’avenir du monde méditerranéen sera romain,
Polybe attribue à la constitution romaine une part importante dans
la responsabilité de cette prééminence. Or il tente de penser cette
constitution dans les termes de la philosophie politique grecque
classique, en distinguant les formes habituelles de constitutions et
plus précisément en reprenant la distinction aristotélicienne de trois
constitutions droites et de trois constitutions déviées, même s’il y a
entre Aristote et Polybe quelques petites variations de vocabulaire et
de doctrine. Ce qui fait l’excellence de la constitution romaine sous
sa forme achevée, c’est-à-dire, selon Polybe, la forme qu’elle a prise
« à l’époque de la guerre d’Hannibal », c’est qu’elle combine royauté,
aristocratie et démocratie. Mais Polybe ne considère pas cette
caractéristique comme étant propre aux Romains, puisqu’il la repère
dans les constitutions établies par certains législateurs anciens,
comme Lycurgue à Sparte. Tout compte fait, dans les catégories
politiques grecques classiques, Rome est plus assimilable à une cité
que ne l’étaient l’empire d’Alexandre et les royaumes hellénistiques
postalexandrins. Ce point est, à la fois historiquement et
mentalement, très important. La question de savoir dans quelle
mesure les Romains avaient l’impression de réaliser dans les
institutions de la République certains des idéaux politiques des
Grecs est trop éloignée de notre sujet, et d’ailleurs trop difficile, pour
être ici traitée. Il est, en tout cas, certain que la République romaine,
avec sa constitution fondée sur un partage du pouvoir entre les
classes aisées et les classes populaires offrait une apparence politique.
Cela se voit, a contrario, dans le soin qu’ont pris les autocrates qui ont
gouverné Rome à partir de l’époque de Jules César de camoufler leur
despotisme sous des oripeaux républicains. Auguste conserva les
magistratures – Sénat, consuls, édiles, préteurs, etc. –, ne s’attribuant
que le titre de princeps senatus, titre de fait républicain. Si, par
ailleurs, on se souvient du caractère agressivement impérialiste de
l’Athènes classique, il n’est pas déraisonnable de penser que, pour
des gens comme Polybe, Rome était une sorte d’Athènes qui avait
réussi.
Mais l’impérialisme romain n’en reste pas moins fort différent de
l’impérialisme athénien de l’époque classique, et l’adaptation à la
nouvelle réalité a requis des Grecs une révolution mentale dont la
profondeur nous échappe sans doute largement. Alexandre déjà
avait suscité l’hostilité des Grecs et même de ses compagnons
macédoniens par son projet de fusion, à la fois politique et
biologique, entre l’aire culturelle grecque et les royaumes et peuples
orientaux. Il avait ainsi contraint dix mille de ses officiers à épouser
des femmes perses le jour même où il épousa la fille de Darius. Or,
comme on le voit par exemple à travers les analyses citées plus haut
des Politiques d’Aristote, la séparation absolue et définitive entre
Grecs et barbares est une condition même de l’existence de l’entité
grecque classique. Aux Grecs la vie en cités, aux barbares la
servitude dans des peuples à jamais prépolitiques ou des monarchies
despotiques, avec, entre autres, cette conséquence cruciale que les
pays barbares sont un réservoir de main-d’œuvre servile, parce que
l’esclavage des barbares est naturel et juste. Les impérialismes
macédonien puis romain, en revanche, affichent leur projet
d’intégrer tous les peuples connus dans un même système de
pouvoir, qu’il soit une monarchie à la mode hellénistique, la
République romaine ou l’Empire romain. Les Grecs de l’époque
classique, au contraire, ne combinaient pas leur sentiment de
supériorité avec la conscience d’une mission civilisatrice : autant
c’est le devoir sacré de tous les Grecs de repousser les barbares
quand ils prétendaient les soumettre à leur despotisme, autant il
n’était ni souhaitable ni même possible d’helléniser les barbares. De
ce point de vue, les différences entre le projet, pour le moins
révolutionnaire, d’Alexandre et la conception romaine sont
remarquables. Alexandre entend parvenir à une fusion entre Grecs et
barbares. Peut-être considérait-il que les Macédoniens, qui venaient
de faire la preuve de leur supériorité, notamment militaire, à la fois
sur les Grecs et sur les Perses, offraient une sorte de préfiguration de
cette fusion. Rome entend, en revanche, intégrer en les romanisant les
peuples vaincus, ce qui est bien signifié par l’octroi de la citoyenneté
romaine. Quand, en 212, Caracalla accorda, contre espèces sonnantes
et trébuchantes, la citoyenneté romaine à tous les habitants libres de
l’Empire, il le fit sans doute pour des raisons d’abord budgétaires,
mais cela ne parut guère monstrueux.
La servitude universelle
La seconde grande transformation mentale subie par le monde
grec du fait des bouleversements dont il a été question a souvent été
décrite, et par Hegel mieux que par beaucoup d’autres, quand il la
caractérise comme le passage d’un monde de citoyens égaux dans la
liberté à une situation dans laquelle tous sont égaux dans la
servitude. Certes, Hegel, dans un raccourci remarquable, met sur le
même plan tous les régimes qui ont suivi la période classique en les
caractérisant comme le despotisme d’un seul et il assigne au
stoïcisme la fonction de représenter ce moment historique, ce qui
n’est d’ailleurs peut-être pas inexact. De toute façon, la liberté
change de figure. La cité classique, aussi longtemps qu’elle ne passe
pas sous la domination d’une autre cité, garantissait la liberté des
citoyens par un ensemble de droits consignés dans un code législatif.
Désormais, la seule liberté des sujets humains, tous statuts
confondus, est la liberté intérieure que le pouvoir du despote peut,
certes, mettre à rude épreuve par la violence, mais qu’il n’a pas la
possibilité de détruire. La représentation la plus sublime de cet
homme nouveau est certainement la figure du sage stoïcien, maître
de lui et hors d’atteinte des aléas de l’existence.
L’un des symptômes de cette fuite dans l’intériorité du sujet se
repère dans la réorganisation de la philosophie elle-même. Aristote
est le premier philosophe qui a explicitement distingué des
domaines différents dans la philosophie, et notamment la
philosophie théorétique de la philosophie pratique, laquelle s’occupe
des « affaires humaines ». Or, pour lui, la politique est si fortement
dominante – il emploie le terme « architectonique » – dans la
philosophie pratique, que le terme même de « politique » s’applique
à tout ce qui concerne l’action humaine. En ce sens, l’éthique est une
partie de la politique. À partir de l’époque hellénistique, la politique
disparaît comme domaine philosophique distinct ou est absorbée
par l’éthique. Parmi les Stoïciens, seul Cléanthe, le second chef de
l’école qui a succédé à Zénon de Kition, a fait de la politique une
partie distincte de la philosophie. De ce fait, toute la philosophie est
réorganisée autour de l’éthique, et cela pour au moins deux raisons.
La première, qui ne nous intéresse pas vraiment ici, c’est que le
mouvement, signalé plus haut, d’autonomisation des sciences par
rapport à la philosophie a tendance à délester cette dernière de ses
parties théoriques, alors que celles-ci constituaient l’essentiel de la
recherche d’un philosophe comme Aristote. La seconde tient
directement à la réorganisation de l’univers intellectuel des Grecs à
la suite de la dépolitisation du monde. Tous les grands concepts qui
structuraient la réflexion de ce qu’Aristote appelait la philosophie
pratique, et qui étaient des concepts soit directement, soit en
dernière instance politiques, sont redéfinis en termes éthiques. Ainsi
pour la liberté, notion centrale de toute réflexion éthique. Nous
avons vu que la liberté, dont l’aspect fondamental était déterminé
par son statut politique – être libre, c’est avant toute chose, et avant
toute impression de liberté individuelle, le fait d’être le citoyen libre
d’une cité libre –, s’était muée en liberté intérieure. Remarquable
transformation d’une liberté qui s’exprimait comme le fait pour les
humains d’être chez eux dans le monde en une situation qui fait que
l’individu se déclare libre contre le monde. La tradition hégélienne y
a vu une aliénation. Il en va de même pour l’esclavage, notion qui
continue d’être pensée en opposition à celle de liberté, mais, alors
que l’esclavage était, chez Aristote, traité comme un concept
hautement politique – à travers notamment le débat sur sa légitimité,
qui a conduit Aristote à construire sa notion d’ « esclave par
nature » –, dans la situation postpolitique les philosophes stoïciens
considèrent que le véritable esclave est celui qui est dominé par ses
passions. D’où il appert que l’esclave Épictète est plus libre que son
maître…
Il vaut la peine de s’arrêter un peu sur cette question de
l’esclavage, tant elle est cruciale dans le monde antique. Parlant de la
doctrine stoïcienne, Diogène Laërce, dans un passage d’ailleurs
difficile à comprendre (VII, 121-122), écrit : « Le sage seul est libre,
ceux qui sont moralement mauvais sont esclaves. Car la liberté est la
possibilité d’une action autonome alors que l’esclavage est la
privation de l’action autonome. Il y a un autre esclavage qui consiste
en la subordination, et un troisième qui consiste à la fois en
possession et subordination, auquel s’oppose la maîtrise qui est elle
aussi mauvaise. » La première forme d’esclavage, qui met en face de
la liberté du sage la servitude morale du méchant, lequel est l’esclave
de ses passions, de ses habitudes, etc., est l’un des grands lieux
communs de la spéculation morale antique, et notamment de la
prédication des Stoïciens ultérieurs, et il sera repris par les chrétiens.
Le sage seul atteint l’indépendance en suivant la nature : il est plus
facile d’enfoncer une outre remplie d’air dans l’eau que de
contraindre le sage à faire ce qu’il ne veut pas faire, disait Zénon. Le
méchant, en revanche, agit souvent contre sa nature ; son critère
d’action n’est pas le bien moral mais des choses que les Stoïciens
appellent « indifférentes » comme la richesse, la santé, l’amour,
l’honneur, etc. Dans la troisième forme, il n’est pas difficile de
reconnaître l’esclavage institutionnel tel qu’il était pratiqué du temps
de Zénon. Nous n’avons aucune déclaration formelle des anciens
Stoïciens disant que l’esclavage est contre nature, mais il est clair que
c’était là leur position. Il ne semble pas, en effet, que les Stoïciens
aient pensé que des différences psychologiques innées réduisent
certains humains à un statut éthique inférieur ; or c’est la vertu
éthique qui fait le sage. Nul n’étant naturellement destiné à être
insensé, nul n’est naturellement destiné à être esclave.
Andrew Erskine donne d’autres arguments, dont l’un des plus
intéressants est que l’esclave est défini comme propriété, alors que la
propriété est contraire à la nature en ce qu’elle fait partie des choses
indifférentes (elle n’apparaît pas dans La République de Zénon).
Sénèque rapporte d’ailleurs que Zénon n’avait pas d’esclaves.
Cicéron, parlant au nom de Chrysippe, dit que les hommes peuvent
user des animaux, ce qui suggère qu’il est injuste d’user d’un autre
homme (De finibus, III,67). Or c’est cela qui fait le despotès, le maître.
C’est d’ailleurs l’attitude des Stoïciens à l’égard de la maîtrise qui est
la plus frappante pour notre propos. Sur ce point, le texte de
Diogène Laërce est ambigu, parce qu’il est, grammaticalement,
difficile de savoir si la maîtrise s’oppose seulement à la troisième
forme d’esclavage ou à la deuxième et à la troisième. Ce qui est sûr,
c’est que la maîtrise y est qualifiée de « mauvaise » ; c’est d’autant
plus remarquable que dans les lignes qui suivent le passage cité,
Diogène Laërce rappelle que pour Chrysippe « les sages sont non
seulement des hommes libres, mais des rois », qu’eux seuls le sont,
comme eux seuls sont « magistrats, juges, orateurs ». Par ailleurs, la
tradition stoïcienne exalte la maîtrise de soi du sage, laquelle se
traduit principalement dans ce que Diogène Laërce appelle – en
rapportant vraisemblablement un terme stoïcien – « action
autonome ». C’est donc cette domination spécifique du maître sur
l’esclave qui est mauvaise, non seulement pour l’esclave à qui
l’humanité est déniée, mais pour le maître qu’elle infecte aussi.
Platon et Aristote avaient cru que les maîtres pouvaient se garder de
cette infection. Il faut aller encore plus loin : pour les Stoïciens, c’est
l’égalité qui est naturelle alors que la hiérarchie est le symptôme de
l’imperfection du monde dans lequel nous vivons. On voit donc que
ce que Hegel avait décrit comme un état d’esclavage universel
n’avait point privé la philosophie de sa dimension et de sa vocation
critiques. Il faut pourtant reconnaître que les Stoïciens ultérieurs, et
notamment les membres de l’école à l’époque impériale, se sont
éloignés du message révolutionnaire de leurs grands ancêtres. D’une
part, ils insistent, comme Épictète, qui était lui-même esclave, sur le
fait que l’esclavage est une chose indifférente, et non plus une
mauvaise chose. D’autre part, l’état d’esclavage sera présenté par des
gens comme Épictète ou Sénèque comme un lot distribué par la
fortune dont il faut se satisfaire au mieux. On peut donc être un bon
esclave. On peut aussi, et cela est plus remarquable encore, être un
bon maître : celui qui dans ses relations avec ses esclaves est juste et
maître de lui-même peut prétendre à la sagesse. Le stoïcisme est
devenu une philosophie de la paix sociale et de la collaboration de
classes, et Sénèque put mener, jusqu’à sa disgrâce mortelle, une
existence au luxe insensé, entouré de son armée d’esclaves…
Le Phénix politique
Des législateurs
Considérations générales
Les Présocratiques
L’école de Platon
L’époque du néoplatonisme
Textes et traductions
DIOGÈNE LAËRCE, Vies, doctrines et sentences des philosophes illustres,
GF-Flammarion.
PHILODÈME, Agli amici di scuola (Pherc. 1005), édition traduite et
commentée par A. Angeli, Naples, 1988.
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commentée par T. Dorandi, Naples, 1991. (Voir aussi l’édition
partielle commentée de K. Gaiser, Stuttgart-Bad Canstatt, 1988.)
—, Storia dei filosofi. La Stoa da Zenone a Panezio, T. Dorandi ed.,
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Cosmologie
À quelques rares exceptions près, les Grecs qui ont écrit sur la
nature du monde tenaient la Terre pour immobile, comme notre
intuition nous porte à le croire, vu que la différence entre
mouvement et repos nous est donnée dès notre venue sur Terre, et
que nous prenons cette dernière comme point de référence fixe. Mais
si la Terre est en repos, il s’ensuit que les étoiles, les planètes, le Soleil
et la Lune sont en mouvement par rapport à elle ; et l’observation,
complétée par quelques inférences simples, laisse penser que ces
corps célestes se meuvent autour de la Terre, probablement sur des
orbites circulaires.
On remarque vite que Soleil et Lune sont emportés sur des
orbites différentes, et que, en revanche, les étoiles se meuvent toutes
sur des orbites distinctes de celles du Soleil et de la Lune, en
conservant leur position les unes par rapport aux autres. Une
observation plus poussée montre qu’il existe cinq autres corps
célestes dont les trajectoires varient par rapport aux étoiles fixes :
cela leur valut très tôt le nom de planêtai, « astres errants ».
Décider que la Terre était immobile entraînait une conséquence
capitale : cela revenait à penser la totalité du système des étoiles, des
planètes, du Soleil et de la Lune comme un tout fini. Il y eut d’abord
quelque hésitation sur les distances relatives des corps célestes par
rapport à la Terre ; mais à l’époque de Platon et d’Aristote, on
s’accordait généralement à dire que les étoiles sont les plus éloignées
de la Terre. Et, comme les constellations conservent leurs positions
relatives selon des schémas invariables, et n’offrent jamais de
variation perceptible ni en taille ni en éclat quand le ciel est dégagé,
on admettait qu’elles tournaient autour de la Terre en un ensemble
unitaire, toujours situé à une même distance de la Terre, et qu’elles
constituaient la limite de tout le système.
Alors s’introduisit un doute : y avait-il quelque chose au-delà des
étoiles fixes ? Les uns soutenaient qu’il y avait au-delà soit un espace
vide illimité, soit absolument rien, pas même un espace, tandis que
d’autres prétendaient qu’il existait une quantité illimitée d’autres
mondes qui échappent à notre regard, dans l’espace s’étendant au-
delà des frontières de notre monde, tout comme il existe d’autres
villes au-delà des murailles de la nôtre.
Les deux camps s’accordaient toutefois sur certains caractères de
notre monde : c’est un système caractérisé par la durée temporelle
(sans être nécessairement éternel) et la régularité. Les mouvements
réguliers des corps célestes constituaient, avec toutes leurs
différences qualitatives, la référence pour mesurer les saisons, et
établissaient la distinction entre la nuit et le jour. La merveilleuse
régularité de tout le système justifiait qu’on lui donnât le nom de
« cosmos », terme signifiant « beauté et ordre ».
Pour différencier ceux qui croyaient que notre monde est la seule
chose existante, de ceux qui étaient convaincus qu’il existe quelque
chose en dehors de lui, les auteurs grecs établirent un distinguo entre
le concept de « monde » (cosmos) et celui d’« univers » (to pan) :
nous maintiendrons cette distinction dans le présent article. « Le
Cosmos est un système qui se compose du ciel, de la Terre et des
natures qui y sont renfermées. » Cette définition, extraite du traité
pseudo-aristotélicien Du cosmos (391b9), était la plus répandue.
Quant à l’« univers », il comprend notre cosmos ainsi que tout ce qui
peut bien exister en dehors de lui.
À la suite d’Aristote, des auteurs tardifs ont reconnu qu’une
nouvelle façon de concevoir la nature du monde s’était fait jour au
e
VI siècle avant J.-C. dans une cité grecque d’Ionie, Milet, située sur la
côte égéenne d’Asie Mineure. Les trois Milésiens qu’ils mentionnent
sont, dans l’ordre chronologique, Thalès, Anaximandre et
Anaximène. Aucun écrit de ces derniers n’a survécu : nous ne les
connaissons qu’à travers les citations qu’en ont faites des auteurs
bien plus tardifs. Ce qui paraît clair, c’est qu’ils rompaient avec les
récits primitifs concernant la nature que nous définissons comme des
mythes, et dans lesquels les rôles principaux sont tenus par des
dieux et des déesses anthropomorphes.
À en croire Aristote – bien qu’il n’ait dit que peu de chose de ses
tout premiers prédécesseurs, il est le fondateur de l’historiographie
philosophique – la rupture avec le mythe fut très brutale. Si nous en
savions davantage, nous serions en mesure de reconstituer un récit
un peu plus nuancé du passage d’un mode de pensée religieux à un
mode naturaliste, et très probablement, en même temps, du passage
d’une conception proche-orientale du monde à la conception
grecque. Dans les quelques fragments conservés de Phérécyde de
Syros, contemporain des premiers philosophes reconnus comme tels
par Aristote, il subsiste des traces d’étapes intermédiaires. Mais, bien
qu’on puisse généralement tenir la mythologie du Proche-Orient
pour la source à laquelle puisa la philosophie naturelle des Grecs
(celle des Grecs d’Ionie, en particulier, qui étaient en contact
permanent avec leurs voisins proche-orientaux), il est fort difficile de
prouver l’existence de liens directs. La tradition grecque esquissée
par Aristote, qu’elle soit ou non partiale, est plus claire.
Dans sa Théogonie, Hésiode avait écrit un récit de la naissance du
monde, suivant un modèle plus ou moins inspiré de la génération
sexuée : « De Chaos naquirent Érèbe et Nuit noire ; et de Nuit, à leur
tour vinrent au monde Éther et Jour, qu’elle conçut des œuvres
d’Érèbe. Et Terre d’abord enfanta Ciel étoilé, à sa mesure, pour la
recouvrir […] » (v. 123-127). Les Milésiens, pour autant que nous
puissions en juger, continuaient à parler de l’origine et de la
croissance du monde, mais en des termes qui n’étaient plus
anthropomorphiques. Thalès considérait que le monde avait pour
origine l’Eau (« parce que le germe de toutes choses est humide »,
disait Aristote) ; Anaximandre écrivait que de l’Illimité primitif
naquit quelque chose comme « un germe du chaud et du froid » ;
quant à Anaximène, il faisait de l’Air la substance première, et il
recourait à la compression et à la raréfaction de l’Air pour expliquer
la génération des différentes multitudes de mondes. À côté des
métaphores liées à la croissance biologique, d’autres apparaissent :
Anaximandre attribuait une part de la régularité et de l’équilibre de
l’alternance présente dans la nature (été et hiver, peut-être) à la
« justice » – non pas la justice de Zeus, mais une relation interne
entre les puissances en lutte entre elles. Anaximène, lui, comparait
l’Air qui engendrait le monde différencié à la psykhè – la force vitale
des vivants. Ces physiciens fournissaient, tous trois, des descriptions
de la Terre et des corps célestes, ainsi que des phénomènes
météorologiques ; mais l’interprétation de ce qui nous en reste est
trop sujette à controverse pour qu’on en discute ici.
L’apport le plus important des Milésiens est sans doute qu’ils
furent à l’origine d’une tradition d’esprit critique : à moins que les
sources postérieures qui nous renseignent n’aient cru trouver des
schémas de développement là où il n’y en avait pas, chacun des
penseurs suivants eut connaissance de l’œuvre de son prédécesseur,
et y découvrit des faiblesses auxquelles il proposa d’apporter les
remèdes qu’il jugeait indispensables sur des bases rationnelles : un
point de départ plus fondamental, une analogie plus convaincante,
une explication plus plausible.
La génération suivante poursuivit cette tradition critique.
Xénophane de Colophon (cité située, elle aussi, dans la partie
grecque de l’Asie Mineure, près d’Éphèse, et qu’il abandonna pour le
monde de la Grèce occidentale) et Héraclite d’Éphèse sont les deux
premiers penseurs dont il subsiste des restes relativement
substantiels de l’œuvre. Tous deux critiquaient leurs grands
prédécesseurs :
« Les dieux sont accusés par Homère et Hésiode de tout ce qui chez nous est honteux et
blâmable : on les voit s’adonner au vol, à l’adultère, et se livrer entre eux au mensonge
trompeur. »
(Xénophane, fragment B 11.)
« Instituteur de la plupart des hommes est Hésiode. Ils savent qu’il connaissait
beaucoup de choses, lui qui n’était pas capable de comprendre le jour et la nuit, car ils
sont un. »
(Héraclite, fragment B 57.)
Modéliser/représenter
Décrire/Inventorier/Expliquer
2) Les intervalles :
si musicographes et théoriciens les appellent unanimement
diastèmata, leur entente s’arrête à peu près là. Ils admettent encore
qu’un intervalle est constitué de deux sons émis successivement ou
simultanément, qu’ils soient identiques ou de hauteur différente.
Quant à leur dénomination et à leur définition, c’est une tout
autre affaire. Dans la terminologie ancienne de Philolaos le
Pythagoricien, rapportée par Nicomaque, la quarte
s’appelle« syllabe », syllaba, la quinte, dioxéia (littéralement « en
montant vers l’aigu ») et l’octave, harmonia.
Ce vocabulaire fut, semble-t-il, rapidement abandonné, même
par les Pythagoriciens, pour être remplacé par les termes
consensuels de dia tessarôn, dia pente et dia pasôn pour désigner la
quarte, la quinte et l’octave. Ils dérivent directement du jeu des
instruments à cordes (la notion de « corde » et de « note » se
confondant alors : chordôn est sous-entendu pour les trois
expressions) : « à travers quatre », « à travers cinq », « à travers
toutes les [cordes] ».
Dès qu’on en arrive aux intervalles inférieurs au diton (notre
tierce majeure), les terminologies divergent. Le ton s’appelle
épogdoon (diastèma) pour les Pythagoriciens, mais tonos pour les
Aristoxéniens. C’est que la terminologie est ici le reflet immédiat de
la manière dont chaque école décrit et définit les intervalles.
Les Pythagoriciens, on l’a dit, les expriment par des rapports
numériques, tandis qu’Aristoxène ne veut les considérer qu’en
fonction de leur étendue sensible à l’oreille et définissable par la
réflexion.
Depuis le pythagorisme ancien, l’octave est le rapport 2/1, la
quinte, le rapport 3/2, la quarte, le rapport 4/3, et le ton
(« différence » entre la quinte et la quarte), le rapport 9/8. Comment
en est-on venu à établir ces rapports numériques ? Par l’expérience
dite du monocorde, dont fait état la littérature pythagoricienne et
néopythagoricienne dans son ensemble : si l’on intercepte une corde
tendue entre deux chevilles en son milieu, le son produit est à
l’octave supérieure du son donné par la corde dans son entier.
Interrompue aux trois quarts de sa longueur, il est à la quarte
supérieure ; aux deux tiers, à la quinte supérieure et ainsi de suite.
Ces observations constatées sur un monocorde gradué (de plus en
plus complexe au fur et à mesure que l’on avance dans le temps) se
vérifient ou prennent leur extension par le calcul arithmétique : en
combinant une quarte et une quinte : (4/3) ( 3/2) = 2/1, on obtient
le rapport de l’octave.
Pour connaître le rapport numérique du ton, on procède par
« soustraction » (en réalité par division) des deux mêmes rapports :
(3/2) : (4/3) = 9/8.
Ce rapport 9/8 est épogdoon, parce qu’il fait intervenir le nombre
8 (octo) et un autre nombre qui le dépasse d’une unité ou d’un
huitième. La quarte 4/3 est pour la même raison appelée épitrite.
L’octave est tout naturellement « double », diplasion. Le point
commun à tous ces rapports est d’être de forme superpartielle ou
épimore (n + 1)/n : leur numérateur (dirait-on aujourd’hui) est plus
grand d’une unité que leur dénominateur.
Dès qu’on en arrive aux subdivisions du ton, les divergences
entre écoles deviennent absolues. En effet, là où Aristoxène déclare
que la voix humaine et les instruments sont capables de produire un
demi-ton juste (que l’oreille perçoit exactement), les Pythagoriciens
considèrent, eux, qu’il ne peut pas exister de demi-ton juste.
Pourquoi ? Parce que, comme le dit le Pseudo-Euclide, « il n’y a pas
de moyen au rapport double » (dont il faudrait en fait trouver la
racine carrée). Comment procède-t-on alors pour « trouver » un
demi-ton ?
Il faut « ôter » d’une quarte un diton, puisque la quarte, c’est un
fait admis de tous, couvre deux tons et demi. Ce qui donne le calcul :
4/3 : (9/8)2 = 4/3 : 81/64 = 256/243.
Ce demi-ton, multiplié par lui-même, n’est pas équivalent à
l’intervalle épogde du ton juste. Il est plus petit que le demi-ton
juste, comme on le constate par un calcul supplémentaire très
simple, qui consiste à rechercher la « différence » entre le ton 9/8 et
le leimma de rapport 256 : 243 :
9/8 : 256/243 = 2187/2048.
Ce nouveau demi-ton est appelé apotomè. Pour désigner d’un seul
mot les deux demi-tons ainsi obtenus, on utilise le terme diésis,
« division » ou « passage », selon l’interprétation qu’on en donne.
Les sectateurs d’Aristoxène s’insurgent contre une méthode qui
aboutit à faire exister par le calcul des intervalles qu’aucune voix,
aucun instrument ne peut produire, et que l’oreille ne peut pas
distinguer. C’est, dit le Tarentin, un ouvrage à la nature et aux
phénomènes musicaux. Aussi, lorsqu’il parle de diésis, est-ce pour
désigner le quart de ton ou le tiers de ton tels qu’ils existent dans la
pratique vocale et instrumentale.
3) Les systèmes,
systèmata, font intervenir deux intervalles et trois sons au moins,
dans une succession répondant à des règles précises. Le système de
référence sur lequel raisonne l’harmonique est le tétracorde ou quarte,
qui reste la cellule de base à travers les dix siècles de littérature
musicale grecque, puis latine. Les limites de ce système sont fixes, à
deux tons et demi l’une de l’autre, tandis que ses deux sons
intermédiaires sont susceptibles de changer de position selon le
genre auquel appartient le système. Deux tétracordes peuvent être
conjoints ou disjoints, selon qu’on laisse entre eux un ton disjonctif ou
bien que la note supérieure du tétracorde inférieur est aussi la note
inférieure du tétracorde supérieur. Dans le premier cas, le système
couvre un septième ; dans l’autre, il atteint l’octave. L’étendue
maximale de systèmes de tétracordes combinés entre eux, par
conjonction et par disjonction, est de deux octaves qui génèrent alors
le grand « système parfait » (systèma teleion), complété dans le
courant de l’époque hellénistique. Il est formé, du grave à l’aigu,
d’une note « ajoutée » appelée pour cette raison proslambanomène,
puis des tétracordes qui portent chacun un nom particulier. Comme
on peut le voir sur la figure 1, le tétracorde no 3 est tantôt disjoint si
sa note inférieure est à un ton au-dessus de la note la plus haute des
moyennes, tantôt conjoint si les deux tétracordes ont une note
commune.
7) La mélopée (melopoiia)
relève en effet tant de la théorie musicale que de son application
pratique. Dans les classifications de Lasos d’Hermione ou d’Aristide
Quintilien, elle entrerait dans la partie exécutive ou pratique,
puisqu’elle suppose un usage, une chrèsis.
Dans les écrits d’harmonique, la mélopée ne consiste pourtant
pas à définir les lois de la composition ou, si l’on préfère, de
l’écriture musicale – loin de là. Chez Aristide Quintilien, le plus
disert en cette matière, le chapitre qui lui est consacré se borne à
définir les « figures de la mélodie » (skhèmata tès mélôdias) en termes
analytiques et descriptifs. Une ligne mélodique donnée se déploie de
trois manières différentes : dans l’agôgè, « conduite », elle procède
par mouvement ascendant ou descendant. Lorsque la mélodie saute
des degrés, alternant mouvements vers le grave et mouvements vers
l’aigu, il y a « entrelacement », plokè, ou mélos keklasménon, « ligne
mélodique rompue ». Enfin, la petteia désigne une ligne stationnaire,
que la note soit tenue ou répétée sur des syllabes différentes. Elle est
fréquemment utilisée dans toutes les partitions antiques parvenues
jusqu’à nous.
Voilà donc les parties constitutives de la science harmonique.
L’école platonicienne et les Pythagoriciens ne s’en tiennent pas là,
convaincus que la musique produit sur l’âme et sur le corps des
effets à elle spécifiques (ce n’est le cas d’aucun des autres arts), qu’il
convient de décrire et d’expliquer, pour mieux en codifier la
pratique. C’est ce qu’ils nomment l’ethos, concept qui concerne non
seulement les tropes, mais aussi les instruments et le type d’œuvre
musicale. C’est parce que le trope phrygien, particulièrement adapté
à l’aulos, est relâché, ce qui débilite l’âme humaine, que Platon et les
Pythagoriciens en bannissent l’usage, avec l’instrument à vent qui
lui correspond. Pour sa virilité, propre à dynamiser les énergies, ils
recommandent en revanche le dorien.
Aristoxène nie que la musique puisse avoir des effets moraux,
sans pour autant renoncer, dans son austérité réputée dans
l’Antiquité, à admettre que certains genres, comme l’enharmonique,
sont plus nobles et plus beaux que d’autres. Mais pour lui, seules
s’appliquent les catégories esthétiques du beau et du laid. Celles du
bien et du mal restent en dehors de la science harmonique telle qu’il
la conçoit.
Notre passage en revue des parties constitutives de l’harmonique
peut laisser perplexe : il y manque (selon nos habitudes) tout ce qui a
trait à la notation musicale. Mais on chercherait en vain, dans les
traités les plus savants comme dans les petits manuels didactiques,
le moindre développement sur cette question, qui s’étudie dès les
premières classes de solfège dans le monde moderne. Il y a pire, et
plus surprenant encore : jamais aucun théoricien, jamais aucun
musicographe ne cite de passage emprunté à telle ou telle œuvre de
grand compositeur ; jamais non plus ne sont fournis d’exemples
musicaux, si fréquents dans nos ouvrages de solfège, d’harmonie ou
d’orchestration. La coupure entre réflexion théorique et pratique
musicale reste absolue à travers toute l’Antiquité.
Cette exclusion de la notation tient à une raison de fond,
qu’explique Aristoxène à loisir, et non sans venin, dans le préambule
de la deuxième partie de son traité : non seulement, dit-il en
substance, la notation d’une mélodie n’est pas, comme le prétendent
certains, la fin ultime du savoir harmonique, mais elle n’en est même
pas une partie. De même, la notation des mètres n’est ni le but ni une
partie intégrante de la métrique. Il invoque deux arguments
principaux pour défendre son opinion. Tout d’abord, un notateur est
capable d’écrire, en se guidant sur la justesse de son oreille, les
signes musicaux d’une mélodie qu’il entend et qui se trouve être en
phrygien, sans pourtant connaître et comprendre le phrygien : car,
pour noter la musique qu’il perçoit, il n’a besoin que d’identifier
l’étendue des intervalles, sans atteindre à la vraie compréhension du
melos. C’est là le deuxième argument : cette compréhension passe par
la saisie intellective de la dynamis des sons, des systèmes et des
genres, c’est-à-dire de leur fonction à l’intérieur de l’espace sonore.
La diatribe d’Aristoxène atteste l’existence en Grèce d’écoles de
musique ou plutôt d’harmonique où, après un cursus destiné à leur
inculquer les notions musicales nécessaires, les élèves recevaient un
enseignement de la notation, mélodique et rythmique. Nous en
avons d’ailleurs la preuve par le papyrus d’Oxyrhynchus no 3705,
récemment publié : il s’agit d’un exercice d’apprenti notateur, où un
vers iambique, toujours le même, reçoit plusieurs mises en musique.
Le professeur a volontairement parsemé la notation d’erreurs, soit
dans les signes eux-mêmes, soit encore dans le choix des notes (il y a
alors contravention aux lois complexes qui régissent les rapports
entre l’accentuation des mots grecs et la hauteur des sons musicaux
qui leur sont attribuables).
Comme art, comme savoir-faire et comme science, la musique a
toujours occupé une place privilégiée, voire primordiale, dans la
civilisation grecque : l’abondance des témoignages écrits, directs et
indirects, l’atteste amplement. Le monde romain n’a jamais produit
de théoriciens d’aussi grande qualité que l’Antiquité grecque : les
ouvrages musicographiques des auteurs latins sont très largement
redevables aux penseurs grecs, qu’ils ne comprennent d’ailleurs pas
toujours.
Du VIe siècle avant notre ère au Ve siècle après J.-C., la Grèce, en
revanche, a connu une pléiade de musiciens (professeurs de
musique, spécialistes « harmoniciens », musicographes et
philosophes) qui ont œuvré sans relâche pour faire progresser le
savoir musical sous toutes ses formes. La tradition manuscrite n’a
sauvé qu’une petite partie de leurs ouvrages : si notre connaissance
de l’harmonique et de son évolution est satisfaisante, la perte des
traités d’organique, et surtout des manuels de composition musicale,
n’est qu’en partie compensée par la survivance de partitions et de
vestiges d’instruments, grâce auxquels nous ne parvenons à saisir
que l’expression particulière et matérielle des deux savoirs musicaux
dont ils relevaient. On peut cependant espérer découvrir de
nouveaux papyrus, analogues par exemple au papyrus Hibeh 54, qui
nous transmettront des fragments de ces traités perdus.
Mais, fait unique dans les civilisations antiques, la Grèce nous a
laissé des traces écrites, figurées et archéologiques, de nature à nous
donner une image sinon complète du moins significative de la
science musicale et de son histoire, dont la plus précieuse est
constituée par la cinquantaine de partitions sauvées du naufrage des
siècles. Si, après deux millénaires de silence, nous sommes
aujourd’hui en mesure de les déchiffrer, de les transcrire et même de
les jouer, c’est, ne l’oublions pas, moins grâce aux musiciens-
philosophes qu’à un humble musicographe appelé Alypius, qui
nous a laissé des tables de signes musicaux, dans les deux notations,
vocale et instrumentale, en usage dans l’ensemble des partitions que
nous a léguées l’Antiquité. La séméiographie musicale n’était peut-
être pas digne d’être une science. Il n’empêche : c’est elle qui a
permis à la musique grecque de renaître, après vingt siècles de
silence.
Annie BÉLIS
ORIENTATION BIBLIOGRAPHIQUE
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CD
De la pierre au son : musique de l’Antiquité grecque. Ensemble Kerylos,
direction Annie Bélis. Référence K617-069.
Histoire
Introduction
C’est dans son très court écrit Sur la mesure du cercle – qui nous est
parvenu en deux versions, comme l’atteste la traduction arabe –
qu’Archimède établit la proposition sur l’aire du cercle à laquelle il
vient de faire allusion. C’est dans ce même écrit qu’il montre, de
manière définitive, que
CD respectivement).
L’arithmétique et la théorie
des nombres : Diophante
Dans les mathématiques hellénistiques, on peut distinguer trois
espèces d’arithmétique d’entiers : euclidienne, telle qu’on la trouve
dans les livres VII, VIII et IX des Éléments ; néopythagoricienne, telle
qu’elle est exposée dans l’Introduction arithmétique de Nicomaque de
Gérase (IIe siècle après J.-C.) ; et, enfin, l’analyse de Diophante,
consignée dans les Arithmétiques. Les deux premières traitent pour
l’essentiel des mêmes problèmes, mais selon des méthodes
différentes. Alors en effet qu’Euclide représente les entiers par des
segments de droite et peut ainsi donner des démonstrations
déductives des propositions, les Néopythagoriciens procèdent par
induction incomplète. Quant à l’analyse de Diophante, même si elle
partage avec ces arithmétiques les mêmes notions du nombre et des
opérations, elle appartient davantage à la théorie des nombres, en ce
sens qu’elle traite des propriétés des triangles rectangles
numériques, des solutions en nombres rationnels positifs des
équations, etc. Or ces trois arithmétiques sont, bien plus que les
disciplines géométriques, chacune à sa manière, dans la continuité
des anciennes traditions égyptiennes et babyloniennes. Ici, on
n’évoquera que l’analyse de Diophante.
Les Arithmétiques, ouvrage principal de Diophante, a vu son
volume doubler après la découverte de la traduction arabe de quatre
livres perdus en grec, de sorte que, des treize annoncés par l’auteur,
on en possède aujourd’hui dix : six en grec, quatre en arabe. Dans les
quelques décennies qui viennent de s’écouler, l’historiographie de
Diophante a donc subi une authentique mutation, qu’il s’agisse de
l’œuvre elle-même ou de ses interprétations.
Le but explicitement formulé par Diophante dans son traité est
d’édifier une théorie arithmétique (arithmètikè theôria) dont les
éléments constitutifs seraient les nombres, considérés comme
pluralités d’unités (les entiers), et les parties fractionnaires comme
fractions de grandeurs. Ces éléments de la théorie sont non
seulement présents « en personne », mais comme espèces des
nombres. Sous le terme d’« espèce » de nombres, Diophante entend
également et indifféremment la puissance d’une pluralité déterminée
et la puissance d’une pluralité quelconque, c’est-à-dire
provisoirement indéterminée, mais qui toujours sera déterminée à la
fin de la solution du problème. Diophante parle de trois espèces de
nombres : linéaire, plan et solide ; celles-ci engendrent toutes les
autres, lesquelles doivent, à la limite, adopter leur nom. Ainsi, les
espèces de nombres ne peuvent l’être que par composition, et la
puissance de chacune est nécessairement un multiple de 2 ou de 3.
Une fois définis les termes de la théorie, Diophante explique les
opérations arithmétiques que l’on peut leur appliquer et donne la
règle des signes. Il combine ensuite ces espèces entre elles, sous
certaines contraintes et à l’aide des opérations de l’arithmétique,
pour déterminer des problèmes à résoudre. Par exemple : « partager
un carré donné en deux carrés » ou « trouver deux nombres, carré et
cubique, dont le produit soit un nombre carré ». Pour chacun de ces
problèmes, il cherche à déterminer une solution rationnelle positive.
Les Arithmétiques se présentent alors comme une succession de
problèmes de ce type – les dix livres réunissent 290 problèmes.
Notons que certains de ces problèmes sont déterminés, d’autres
indéterminés, mais que, pour ces derniers, Diophante ne donne
qu’une seule solution ; il ne distingue pas nettement entre les deux
genres. D’autre part, il n’explique pas ses méthodes de solution, et
c’est sur ce silence que les historiens ont bâti les multiples
interprétations de ses méthodes. Or une lecture attentive montre que
Diophante ne suit qu’un nombre limité de méthodes.
Considérons quelques exemples des problèmes étudiés par
Diophante. On peut récrire comme suit le problème énoncé ci-dessus
(2. 8) :
x2 + y2 = a2
un cas d’un triangle rectangle numérique. Diophante assigne à a
au cours de la solution une valeur donnée (a = 4). Il pose ensuite
x = t et y = ut – a
et substitue dans l’équation ; d’où
d’où
et
L’équation se récrit
et
ou
Les Arithmétiques de Diophante vont contribuer, à partir du IXe
siècle, à la constitution de l’analyse indéterminée rationnelle (al-
Karajī) et de l’analyse indéterminée entière (al-Khāzin, etc.) ; et, une
seconde fois, à ces deux mêmes chapitres, au XVIIe siècle, avec Bachet
de Méziriac et Fermat.
Roshdi RASHED
ORIENTATION BIBLIOGRAPHIQUE
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À la recherche de la mécanique
Développements de la mécanique
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Théologie et divination
La tradition
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Aristote et Épicure
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SCHNEIDER, I., Archimedes : Ingenieur, Naturwissenschaftler und
Mathematiker, Darmstadt, 1979.
Aristote
Dialectique et science
La métaphysique
Aristote parle du dieu, Premier Moteur immobile, avec des
accents quasi mystiques. Le dieu est acte pur, et comme tel parfait ; il
est vivant, mais impassible puisque c’est le désir que le premier ciel
éprouve pour lui qui fait mouvoir la sphère des fixes, alors que le
dieu, lui, n’aime rien ni personne ; il serait attentatoire à sa
perfection qu’il puisse agir sur autre chose que lui-même ou penser
quelque chose d’autre que lui-même : il est « pensée de la pensée ».
Nous avons vu que la théologie était en contact avec la physique par
l’intermédiaire des corps célestes. Ceux-ci partagent avec le divin
l’éternité individuelle, dont tous les phénomènes cycliques ou
récurrents du monde sublunaire sont une imitation ; ainsi en est-il,
par exemple, de l’éternité spécifique, et non individuelle, des
animaux et des plantes. C’est par le biais de ce concept d’imitation
qu’Aristote rend compte du comportement et de la cohérence du
sublunaire. La distance n’est pas moins grande entre le divin et le
sublunaire aristotéliciens d’une part qu’entre l’intelligible et le
sensible platoniciens de l’autre. Mais il y a, si l’on peut dire, un
monde entre cette imitation aristotélicienne des réalités supérieures
par les êtres d’ici-bas, et la participation platonicienne de réalités
inférieures aux réalités éminentes. Si infirmes soient-elles, les
substances terrestres n’ont pas une réalité déléguée, ne sont pas la
simple ombre portée du monde idéal, et méritent donc qu’on les
considère en elles-mêmes. D’autant plus que ce qui imite peut nous
renseigner sur ce qu’il imite.
C’est précisément parce que l’univers, et notamment notre région
sublunaire, n’est ni une émanation, ni une copie du dieu, que le
métaphysique ne se réduit pas au théologique, et que nous avons
besoin d’un discours sur l’étant, c’est-à-dire d’une ontologie, terme
par ailleurs absent chez Aristote. La simplicité absolue du dieu fait
qu’il n’est pas justiciable d’un tel discours. Mais les êtres non divins
se caractérisent par la scission et la dispersion. C’est ce que révèle le
discours même que nous tenons sur les choses. Ce discours combine,
en effet, des éléments de statut différent. C’est ce qu’ont ignoré les
Sophistes qui soutenaient que, comme le disait aussi l’Euthydème de
Platon, instruire Clinias, c’était faire disparaître Clinias ignorant.
L’ont ignoré aussi ceux, comme Antisthène ou les Éléates, pour qui
toute prédication est nécessairement tautologique, et pour qui dire
de ce qui est autre chose que « c’est », revient à dire de l’être qu’il
n’est pas. Ces difficultés, qui avaient fasciné, c’est-à-dire
partiellement paralysé, les penseurs grecs jusqu’à Platon, sont
résolues par Aristote grâce à sa distinction entre la substance et
l’accident. Dans la phrase « Clinias est savant », « Clinias » signifie la
substance (ousia), qui peut être affectée de différents accidents,
comme « savant », « blanc », « ici ». La forme développée de ces
distinctions donne la fameuse doctrine aristotélicienne des
catégories. « Chacun des termes, écrit Aristote, qui sont dits sans
aucune combinaison indique soit une substance, soit une certaine
quantité, soit une certaine qualité, soit un rapport à quelque chose,
soit quelque part, soit à un certain moment, soit être dans une
position, soit posséder, soit faire, soit subir. Ce qui est une substance,
pour le dire sommairement, c’est par exemple : homme, cheval ; une
grandeur : de deux coudées, de trois coudées ; une qualité : blanc,
lettré ; un rapport à quelque chose : double, moitié, plus grand ;
quelque part : au Lycée, sur la place ; à un certain moment : hier, l’an
dernier ; être dans une position : est couché, est assis ; avoir : est
chaussé, est armé ; faire : couper, brûler ; subir : être coupé, être
brûlé. » (Catégories, chap. IV.) Doctrine qui a deux versants,
qu’Aristote fait cohabiter sans y voir de difficulté particulière. D’un
côté il s’agit de la liste, exhaustive selon Aristote, des différentes
formes que peut prendre l’être : un étant est soit une substance, soit
une quantité, etc. Mais, d’un autre côté, les catégories recensent les
différentes figures de la prédication, c’est-à-dire les différentes
manières dont un prédicat peut être attribué à un sujet, car dire
« Socrate est un homme », c’est attribuer une substance au sujet
« Socrate », mais dire « Socrate est blanc », c’est lui attribuer une
qualité.
Quant à l’impossibilité du mouvement, lequel, selon les Éléates,
reviendrait à faire procéder l’étant du non-être, Aristote la réduit par
sa distinction de l’acte et de la puissance : l’ignorant Clinias est
savant en puissance. Mais cette distinction est assortie d’une
condition, qui fait qu’Aristote prend pleinement en compte
l’objection éléate : radicalement, l’acte est antérieur à la puissance.
L’embryon, par exemple, devient enfant et l’enfant devient adulte
parce qu’il contient en puissance les caractéristiques que lui a
transmises un homme adulte. « L’homme engendre l’homme », parce
qu’il y a toujours eu des hommes, ce qu’Aristote traduit parfois en
disant que l’homme est par nature antérieur à l’enfant, même si cet
enfant est chronologiquement antérieur à l’adulte qu’il sera.
Mais c’est cette science, que la tradition a appelée la
métaphysique, qu’il faut maintenant considérer. En effet, écrit
Aristote, « il y a une science de l’être en tant qu’être et de ce qui lui
appartient par soi » (Métaphysique, Γ, 1, 1003a21). Cela ne va pas,
pour nous, sans de multiples difficultés : signalons-en une. L’être, dit
Aristote, n’est pas un genre qui pourrait être divisé en espèces,
comme par exemple le genre « figure » peut être divisé en « figures
rectilignes » et « figures curvilignes ». Déjà, dans le Sophiste, Platon
avait été contraint de le reconnaître partiellement en faisant de l’être
une sorte de genre « transversal ». Or, l’une des caractéristiques
cardinales de l’épistémologie aristotélicienne, nous l’avons vu, c’est
qu’il y a une science par genre. Ce qui veut dire notamment que si la
figure et le son sont deux genres différents, les propositions de la
science des figures (géométrie) ne sont pas transposables dans celle
des sons (acoustique), sinon par analogie, comme quand on dit que
tel son et tel angle sont « aigus ». Tenter de décrire la « science de
l’être » en termes strictement « scientifiques » ne peut donc qu’être
inadéquat. S’agit-il là du fantôme de cette science universelle
qu’avait jusqu’à lui prétendu être la philosophie, et dont Aristote fut
le premier à refuser la possibilité ?
Aristote a donné deux contenus, complémentaires, à cette science
de l’être en tant qu’être. Dans le livre Γ de la Métaphysique, où il en
pose l’existence, il lui assigne comme objet les grands principes
communs à toutes les sciences, comme le principe de non-
contradiction, lequel est établi de manière « dialectique », c’est-à-dire
en remarquant que le discours même de l’adversaire de ce principe
est impossible. Mais ailleurs dans le même livre et surtout dans les
livres dits « centraux » de la Métaphysique (livres Z, H, θ), Aristote
réduit l’étude de l’étant à celle de la première de ses catégories, la
substance ou essence (ousia). Cette « ousiologie » est proprement le
cœur de la métaphysique aristotélicienne. L’ousia se caractérise par
trois propriétés essentielles : elle est par soi, elle est séparée, elle est
« cause et principe ». Plusieurs réalités peuvent, à des degrés divers,
prétendre au titre d’ousia. L’universel et le genre peuvent être
considérés comme des ousiai, mais en un sens second, puisque
l’universel n’a qu’une existence de raison. La rupture avec Platon
est, sur ce point, fort nette. En un sens, la matière est ousia, mais la
matière ne subsiste pas par soi, et les ousiai que nous saisissons le
plus immédiatement dans notre expérience concrète – les substances
sensibles – sont ce qu’elles sont davantage en vertu de leur forme
que de leur matière. La forme seule n’est pourtant pas pleinement
ousia, parce que décrire par leur seule forme les unités ontologiques
que sont les substances naturelles, c’est en donner une connaissance
schématique – pour désigner la forme, Aristote emploie aussi bien
eidos, qui indique la visibilité d’une chose, que schèma qui renvoie à
son contour –, car il y a une relation complexe et non arbitraire entre
forme et matière. N’importe quoi ne peut pas être fait de n’importe
quoi. Ce qui, finalement, est le plus proprement nommé ousia, c’est
ce qu’Aristote appelle d’une formule qui a gardé une grande part de
son mystère, le ti èn einai. Cette expression, que les Médiévaux ont
traduite par quiddité, semble être une question en quelque sorte
substantivée, comme c’est aussi le cas de l’expression to ti estin (« le
qu’est-ce que c’est ») qui sert à désigner l’essence d’une chose. Mais,
par rapport au ti estin, le ti èn einai indique un degré supérieur de
propriété. Aristote écrit dans les Seconds Analytiques que le ti èn einai
est « constitué des éléments propres du ti estin », ou, selon la
correction proposée par un éditeur moderne, « ce qu’il y a de propre
parmi les choses qui sont dans le ti estin » (II, 6, 92a7).
Pourtant, Aristote prétend que le ti èn einai des substances
naturelles ne contient pas leur matière, parce que la matière est, dans
une certaine mesure, accidentelle. Ainsi la quiddité d’un étant
naturel (sensible), sans être une partie de cet étant, est autre chose
que cet étant. Poussons le paradoxe, au moins celui de l’expression,
jusqu’au bout : le ti èn einai d’une chose est, en un sens, plus
réellement cette chose que cette chose elle-même. Ainsi pour l’âme,
acte vital du corps animé : elle est plus réellement le vivant que le
corps animé lui-même. Le platonisme est alors réellement renversé : il
y a certes quelque chose de plus réellement ceci que le ceci que je
vois et touche ; mais cette réalité n’est pas en dehors et « au-dessus »
de ce ceci. Le cas de l’âme est intéressant. Dans son traité De l’âme,
Aristote a soigneusement laissé de côté les problèmes que toute la
tradition philosophique s’attendait vraisemblablement à le voir
traiter, et notamment le problème de l’immortalité de l’âme. L’âme
est un emboîtement de « facultés » qui fait qu’un animal, par
exemple, qui possède un corps adéquatement constitué à cet effet,
est capable de croître et de se reproduire, de discriminer les
informations données par son milieu, d’agir dans ce milieu. Ainsi
est-elle plus définitoire du corps vivant que ce corps vivant lui-même,
parce qu’elle donne les causes des manifestations vitales, ce que la
connaissance anatomique et physico-chimique des organes, tissus,
etc., ne fait pas.
La philosophie pratique
Textes
La plupart des œuvres d’Aristote sont disponibles en collection GF-
Flammarion dans de nouvelles traductions annotées.
Études
AUBENQUE, Pierre, Le Problème de l’être chez Aristote, Paris, PUF, 1962.
—, La Prudence chez Aristote, Paris, PUF, 1963.
BARNES, Jonathan, « Aristotle’s Theory of Demonstration », Phronesis,
no 14, 1969.
GOTTHELF, Allan, LENNOX, James A. (eds), Philosophical Issues in
Aristotle’s Biology, Cambridge University Press, 1987.
GRANGER, Gilles-Gaston, La Théorie aristotélicienne de la science, Paris,
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JÆGER, Werner, Aristoteles. Grundlegung einer Geschichte seiner
Entwicklung, Berlin, Weidmann, 1932 (trad. fr. 1997).
LE BLOND, Jean-Marie, Logique et méthode chez Aristote, Paris, Vrin,
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PELLEGRIN, Pierre, La Classification des animaux chez Aristote, Paris, Les
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Aristote, Paris, Alcan, 1908.
DÜRING, Ingemar, Aristoteles. Darstellung und Interpretationen seines
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Démocrite
Textes et traductions
On trouvera les textes originaux dans DIELS, Hermann, et KRANZ,
Walther (= DK), Fragmente der Vorsokratiker, vol. II, 6e éd., 1952 (avec
traduction allemande), ainsi que dans LURIA, S., Demokrit, Leningrad,
1970.
DUMONT, Jean-Paul, Les Écoles présocratiques, Paris, Gallimard, coll.
« Folio-Essais », 1991.
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Enseignement et œuvres
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Empédocle
Religion et philosophie
Chronologie
Génération et destruction
L’histoire de l’univers
Le « démon » et l’Amour
Empédocle matérialiste
Textes et traductions
Éditions et traductions complètes
ARRIGHETTI, Graziano (éd.), Epicuro. Opere, Florence, 2e éd., 1973.
Inclut les fragments papyrologiques, mais les progrès accomplis
depuis sont considérables. De nombreuses éditions partielles ont été
publiées en particulier par les Cronache Ercolanesi, qui paraissent
annuellement à Naples.
BAILEY, Cyril (éd.), Epicurus. The Extant Remains, Oxford, 1926 ; rééd.
Hildesheim-New York 1975.
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Euclide d’Alexandrie
Les Éléments
L’histoire de l’œuvre
Dès l’Antiquité, à l’exemple des grandes œuvres, les Éléments
furent l’objet d’abondants commentaires. Celui de Héron
d’Alexandrie a été partiellement conservé en arabe et est guidé par le
souci de compléter et de perfectionner le traité. Le logicien
néoplatonicien Porphyre de Tyr s’est surtout intéressé, semble-t-il,
aux formes d’argumentation, à la précision des énoncés, à la rigueur
des preuves. Le mathématicien Pappus d’Alexandrie avait laissé une
contribution importante à la discussion dont il nous reste
notamment, en une version arabe, son Commentaire au livre X.
L’Aristotélicien Simplicius examina essentiellement les « principes »
c’est-à-dire les énoncés liminaires, et son commentaire formait une
introduction à la géométrie, dont des extraits sont conservés en
arabe. Subsiste enfin en grec le très important Commentaire au livre I
de Proclos de Lycie, le Diadoque de l’Académie (Ve siècle de notre
ère) : abordant tous les aspects, historique, logique, épistémologique
et philosophique du texte et du contexte, il demeure un témoignage
irremplaçable sur la place des Éléments dans la science grecque, les
intentions de leur auteur, les progrès qu’ils couronnent, les critiques
qui leur sont faites et les difficultés qu’ils recèlent.
Ainsi les Éléments furent le principal véhicule de la transmission
du savoir mathématique de base aux époques hellénistique et
romaine. Au IVe siècle de notre ère, le mathématicien Théon
d’Alexandrie en fit une édition nouvelle, enrichie à des fins
didactiques, dont dérivèrent tous les manuscrits grecs connus avant
le XIXe siècle. C’est dans l’Empire byzantin que se perpétua la
tradition. Par exemple, en l’an 888, Aréthas, archevêque de Césarée,
fit copier les Éléments et les annota de sa propre main : ce codex est
aujourd’hui à Oxford. Les manuscrits grecs, actuellement encore très
nombreux en Europe, contiennent au total mille quatre cent quarante
scholies de dates diverses.
Mais avant de reprendre vie à la Renaissance, l’œuvre d’Euclide
devait connaître une autre carrière dans les pays conquis à l’islam.
Dès les débuts du IXe siècle, les lettrés de Bagdad eurent en main le
texte grec et les califes en encouragèrent la traduction en arabe. Deux
traditions initiales d’Al-Haggag, l’autre procédant d’un travail de la
seconde moitié du IXe siècle dû à Ishaq ibn Hunayn, révisé par Thābit
ibn Qurra. Ces traductions, bien que témoignant d’un intérêt pour
les sources et la confrontation des manuscrits, ne faisaient pas
mystère de leur intention d’améliorer le texte, à des fins soit
didactiques, soit proprement logiques et mathématiques. À partir
d’elles se développa toute une littérature « euclidienne » formée de
recensions, d’abrégés, de résumés, d’« émendations », enfin de
commentaires, complets ou partiels, des Éléments. Les plus grands
mathématiciens et philosophes du monde arabe, du IXe au XIIIe siècle,
commentèrent Euclide, s’intéressant principalement à la question
des parallèles et du 5e Postulat, au livre V et à la théorie des
proportions, au livre X et à la théorie des lignes incommensurables.
Ces débats furent d’un grand poids pour le développement de la
pensée mathématique dans le monde arabe, tandis que les
traductions jouèrent un rôle dans la transmission des Éléments à
l’Occident latin médiéval.
Le haut Moyen Âge n’avait connu les Éléments que par des
recueils contenant des fragments altérés d’une traduction latine due
probablement à Boèce. Au XIIe siècle vit le jour en Sicile une
traduction latine du texte grec qui n’eut probablement pas
d’influence. En revanche, une traduction faite sur un manuscrit de la
tradition Ishaq-Tabit est attribuée à Gérard de Crémone, célèbre à
Tolède au XIIe siècle, et à la même époque Adélard de Bath est crédité
de trois versions successives des Éléments : une traduction, un abrégé
commenté, enfin une « intégrale », d’après la tradition d’Al-Haggag,
dont il subsiste plus d’une cinquantaine de manuscrits. C’est le point
de départ d’une tradition vivante jusqu’au XVe siècle avec une
quinzaine de révisions, dans laquelle se situe la traduction de
Campanus de Novare, parue en 1259, la meilleure version latine de
l’arabe au point de vue mathématique. Il est donc faux que le Moyen
Âge ait ignoré la mathématique grecque ; ses derniers siècles
disposaient de plusieurs versions des Éléments qui présentaient
certes des différences notables avec le grec puisque provenant de la
tradition arabe, mais qui permettaient comparaisons et discussions.
Le Moyen Âge s’intéresse à la logique et aux principes, aux
problèmes de l’infini, actuel ou potentiel, donc à la question de la
divisibilité des grandeurs et du continu géométrique. Les
préoccupations philosophiques l’emportent sur l’invention
mathématique. Par la suite, le latin restant longtemps la langue
savante, l’usage d’accompagner le texte grec d’une version latine
subsista jusqu’à l’aube du XXe siècle.
Depuis l’invention de l’imprimerie, les Éléments d’Euclide sont,
après la Bible, l’ouvrage qui a connu le plus grand nombre d’éditions
ou de traductions. Le premier Euclide imprimé paraît à Venise en
1482 : c’est le texte latin de Campanus, qui fait ainsi la transition vers
les temps nouveaux, bientôt suivi en 1505, toujours à Venise, par
l’Euclide complet de Zamberti, version latine du texte grec cette fois.
Ces deux ouvrages se partagent les faveurs des éditeurs et des
érudits au cours du XVIe siècle, bien qu’en 1530 paraisse à Bâle
l’édition princeps du grec, fondée malheureusement sur deux
manuscrits parmi les moins bons. La querelle dure jusqu’à la
parution en 1572 à Pesaro de la version latine de Commandino, la
première d’après un original grec acceptable, sur laquelle
s’appuyèrent beaucoup de travaux ultérieurs.
Outre ces faits marquants, le XVIe siècle se signale par un grand
nombre de publications dans toute l’Europe, dont les options sont
variées, mais l’ambition commune de fournir un instrument de
travail adapté aux étudiants. Paraissent également les premières
traductions dans les langues vernaculaires : en français, celle de
Pierre Forcadel (1564/1566). Enfin, le siècle voit fleurir le genre du
commentaire, qui porte souvent sur la structure logique des
Éléments, mais aussi sur les implications mathématiques de la théorie
des proportions du livre V. C’est à ce genre qu’appartient l’œuvre
magistrale de Christophe Clavius, recension latine parue en 1574,
fréquemment rééditée par la suite : réécriture, notes, apports
nouveaux, critiques et éclaircissements s’y combinaient pour fournir
une approche mathématiquement instructive et stimulante du legs
hellénique. Il y a tout lieu de croire qu’au collège de La Flèche, c’est
dans l’Euclide de Clavius que Descartes s’instruisit d’abord des
mathématiques.
L’histoire du texte grec est jalonnée ensuite par l’édition de
Gregory à Oxford en 1703, la découverte par Peyrard du manuscrit
du Vatican, témoin d’une tradition antérieure à l’édition de Théon,
qui lui permet sa publication trilingue de 1814-1818, enfin la grande
édition critique moderne de Heiberg qui fait actuellement autorité
(1883-1916). D’autre part, la tradition des publications d’ordre
didactique, des commentaires et des manuels à l’usage des collèges,
persiste aux XVIIe et XVIIIe siècles, et même jusqu’au XIXe siècle dans
certains pays, comme l’Angleterre. Là est l’origine de la perception
des Éléments comme un ouvrage scolaire et élémentaire, alors même
que les discussions mathématiques auxquelles ils donnent lieu se
révèlent de première importance. En même temps, Euclide est
progressivement traduit dans toutes les langues de l’Europe, et
pénètre jusque dans la Chine et l’Inde.
É
Les Éléments et la pensée mathématique
moderne
L’essor moderne des mathématiques ne s’est pas fait par un rejet
des Éléments mais par un dialogue permettant de mieux élaborer les
conceptions nouvelles, en y intégrant les anciens acquis appelés à
être dépassés. Par exemple, au XVIIe siècle, les mathématiciens tirent
tout le parti possible de la théorie des proportions et de ses notions
clés, y compris dans les analyses géométriques infinitésimales, avant
l’avènement de l’algorithme du calcul différentiel, et l’on en peut
dire autant de la « méthode d’exhaustion » qui fonctionne en
association avec les proportions avant la mise en œuvre des
méthodes d’intégration.
Depuis Henry Savile qui en 1621 étudie les postulations
implicites jusqu’à Girolamo Saccheri qui en 1733 tente de prouver le
5e Postulat, on trouve chez les meilleurs commentateurs, comme
Isaac Barrow (1655), Robert Simson (1756), John Playfair (1795), une
foule d’indications sur les moyens de perfectionner les
démonstrations. En Angleterre en particulier, jusqu’au XIXe siècle, les
Éléments demeurent la base de l’enseignement et continuent de
susciter un fructueux travail de critique. Un logicien comme De
Morgan les étudie de très près. Si ce pays est celui des initiateurs de
la logique mathématique moderne, c’est peut-être bien parce qu’on y
recherche les lois logiques dans le discours normalisé en vue de la
preuve, celui des mathématiques, dont les Éléments restent l’exemple
type.
Ce travail allait d’ailleurs avoir des retombées sur les
mathématiques elles-mêmes. En effet, de l’analyse logique des
raisonnements, on remonte nécessairement aux axiomes. Depuis
Descartes, le statut épistémologique que leur avait donné Aristote
avait évolué au milieu des divergences entre doctrines
philosophiques. Au recours à l’évidence, Leibniz avait opposé
l’ambition de les dériver du principe de non-contradiction. D’autre
part, depuis Pascal, la discussion sur les définitions des termes
premiers, amorcée par Aristote, avait pris un tour nouveau. Le
e
XIX siècle se caractérise par des réflexions plus techniques, où l’on
cherche des reformulations plus adéquates. Corrélativement, les
distinctions entre axiome et postulat, voire entre définition et
postulat, commencent à être mises en doute. Les discussions autour
du 5e Postulat y contribuent fortement. Relancées par Saccheri, les
tentatives de prouver le célèbre énoncé aboutissent à la mise au jour
d’une dizaine d’énoncés équivalents, présupposés implicitement
dans les prétendues nouvelles démonstrations. La suite est trop
connue : l’échec des essais de preuve par l’absurde conduit à
l’apparition des diverses géométries non euclidiennes. La notion de
théorie mathématique et celle de vérité mathématique se
transforment ; le statut des « principes » liminaires également. On
dégage progressivement les propriétés logiques que doit posséder
un ensemble de tels énoncés qui reçoit le nom d’« axiomatique ». À
l’extrême fin du siècle, en 1899, David Hilbert donne une
axiomatisation moderne de la géométrie « euclidienne » qui
parachève l’évolution amorcée depuis un siècle. Comme la
présentation du contenu mathématique des autres théories figurant
dans les Éléments a été profondément transformée par la
généralisation de la notion de nombre et l’essor de l’analyse, on peut
admettre qu’à la fin du XIXe siècle la discussion sur l’œuvre d’Euclide
et sa fécondité pour le développement de la science est achevée et sa
place dans l’histoire définitivement assignée.
Ce que cette œuvre a procuré à l’histoire de la pensée humaine,
ce n’est rien de moins qu’une des formes de la rationalité
scientifique. Celle-ci se caractérise par la mise en œuvre de règles
universellement reconnues d’administration de la preuve. Or, la
preuve de la fausseté d’un énoncé peut être obtenue de deux
manières, soit parce que les faits le réfutent, soit parce qu’on le
montre en contradiction avec des énoncés tenus pour vrais. Dans le
premier cas, l’administration de la preuve est d’ordre expérimental,
dans le second d’ordre exclusivement logique, c’est-à-dire qu’elle est
liée à la structure d’un discours normé écrit dans une langue
technique, que les Grecs ont nommé logos. C’est ce second mode
dont les Éléments ont fourni l’exemple insigne, repris dès l’Antiquité
par les plus grands mathématiciens. Or, un tel type de rationalité,
correspondant à ce qu’Aristote décrit comme « science
démonstrative », exige non seulement que l’on définisse les objets
sur lesquels porte le savoir, mais aussi qu’on spécifie un petit
nombre d’énoncés tenus initialement pour vrais en référence à
l’univers contenant ces objets et qu’on s’autorise sur eux certaines
manipulations (en géométrie, les « constructions ») compatibles avec
la structure de cet univers. C’est la fonction des postulats d’être des
hypothèses assurant l’applicabilité de la mathématique euclidienne à
un monde où les corps physiques sont invariants pour le groupe des
déplacements (translations et/ou rotations). Ce choix lui assurait le
privilège d’apparaître comme « naturelle » pour une durée séculaire
qui ne devait prendre fin qu’au XIXe siècle. Pour le reste, à savoir la
part de « vérité » qui relevait de l’intuition de « vérités premières », il
était loisible aux mathématiciens de réduire de plus en plus le rôle
de l’intuition, et cette marche vers toujours plus d’abstraction fut la
ligne principale du développement historique des mathématiques.
Cela restait parfaitement compatible avec le type de rationalité que
proposaient les Éléments ; aussi ceux-ci demeurèrent-ils l’idéal à
atteindre même dans les périodes où des méthodes nouvelles
concentraient l’attention sur le foisonnement de résultats obtenus
par la puissance du calcul plus que par la rigueur démonstrative.
Lorsque, sous l’effet de l’apparition des « géométries non
euclidiennes », la référence au « monde naturel » cessa d’être
exclusive, on assista à un déplacement du sens des hypothèses
initiales. Les théories mathématiques apparurent comme des
paradigmes de mondes possibles, partagés entre l’exigence de non-
contradiction et l’exigence de constructibilité. Quoique
singulièrement épuré, le modèle de rationalité des Éléments
subsistait. Au XVIIe siècle, Roberval rédigeait des Éléments de
géométrie, au XXe le groupe Bourbaki intitulait son grand œuvre
Éléments de mathématiques.
Théorie de la démonstration
Méthode thérapeutique
et pharmacologie
Éthique et religion
Être un bon médecin repose sur cette attention aux idées et aux
choses. Mais chez Galien, cet idéal comporte aussi explicitement une
dimension morale. Lorsqu’il affirme que Le bon médecin doit être aussi
philosophe, titre de l’un de ses traités, c’est bien dans le sens moral.
D’abord l’éducation rigoureuse de la pensée et le travail fournissent
une aptitude générale à distinguer le vrai du faux. Les excès des
« sophistes » et leurs mensonges sont ainsi détectés par le vrai savoir.
Et le médecin instruit évite donc de perdre son temps, de « radoter »,
pour s’occuper de son art. Mieux encore, l’étude elle-même fortifie
contre les vices. L’ascétisme qu’elle impose est incompatible pour
Galien avec la recherche des richesses et des protections qui
caractérise ses contemporains. Pour conventionnel que soit ce genre
de diatribe sociale contre la vie luxueuse à Rome, il faut croire au
lien fort qu’établissait Galien entre éducation, exercice et vertu.
L’exercice permanent est la garantie la plus sûre d’une vie droite,
dévouée au savoir et à la vertu.
Mais la médecine n’est pas non plus détachée chez Galien de
toute religiosité. Comme pour les médecins hippocratiques, la
science va de pair avec la piété. Elle n’exclut pas l’intervention des
dieux dans les cas où, par exemple, le médecin est désarmé devant la
gravité de la maladie. Parmi ceux-ci, Galien éprouve une piété
particulière pour Asclépios. Il croit à ses révélations dans des rêves,
même s’ils interfèrent avec son activité scientifique. Ainsi Galien
accepte certaines prescriptions médicales dans ses rêves, comme
celle d’effectuer une saignée dans une artère de la main. C’est qu’en
général, le dieu approuve ou confirme la médecine rationnelle, ou
l’éclaire, lui apportant en plus un élément surnaturel. Galien
admettait en outre que la médecine des temples constituait une
médecine spécifique. Il n’exprime ni scepticisme ni ironie à son
égard, comme certains médecins semblent l’avoir fait de son temps.
Il reste à mi-distance entre les Sceptiques et les dévots comme son
contemporain Aelius Aristide.
Plus intellectuelle est la vénération que Galien porte à la
puissance divine qu’il nomme tantôt Démiurge, tantôt Nature, à la
source d’une représentation très fortement téléologique de la nature.
Le démiurge de Galien, qui par certains traits ressemble beaucoup à
celui de Platon dans le Timée, a voulu que le tout comme les parties
du corps aient la disposition la meilleure possible. Mais cette
téléologie ne va pas sans contraintes ni hiérarchie, et Galien s’oppose
explicitement à la conception, qu’il attribue aux juifs et aux chrétiens,
d’une toute-puissance divine capable de tirer n’importe quelle forme
de rien, alors que son Dieu tient compte des contraintes naturelles
comme la séparation des espèces, ou l’existence de matériaux
organiques. Pourtant, l’action de la Nature garde pour lui un certain
mystère, comme il le reconnaît en particulier dans son traité Sur la
formation des fœtus pour le processus de la génération, un domaine où
il avouera lui-même, dans son testament intellectuel (Sur mes propres
opinions), être parfois sans réponse.
Textes et traductions
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Leipzig, 1884 ; réimpr. Amsterdam, Hakkert, 1967.
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A. Pichot, Paris, Gallimard, 1994, 2 vol..
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Berlin, Akademie Verlag, 1992 (CMG V, 3, 1).
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anglaise Phillip De Lacy, Berlin, 1978-1984 (CMG V, 4, 1, 2), 3 vol.
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Parménide
La vie et l’œuvre
Le préambule
L’exposé de la vérité
L’héritage de Parménide
La doctrine de Parménide a exercé une influence énorme sur
toute la philosophie ancienne. Ses disciples, Zénon d’Élée et Mélissos
de Samos, ont complètement laissé de côté la seconde partie du
poème ; ils ont renoncé à proposer une théorie de la nature, et ils ont
interprété la première partie comme l’exposé d’une conception de
l’être essentiellement un et immuable. Zénon s’employa à réfuter la
multiplicité et le devenir, avec ses célèbres arguments par l’absurde,
et c’est pourquoi Platon et Aristote le considèrent comme le
fondateur de la dialectique. Mélissos, de son côté, interprète l’être
comme une masse unique de matière ; par suite, il le conçoit comme
infini dans l’espace aussi ; aussi Aristote verra-t-il en lui un penseur
grossier.
Les autres philosophes de la nature, Empédocle, Anaxagore et les
Atomistes Leucippe et Démocrite, subirent dans une mesure égale
l’influence de Parménide. À la base de toutes choses, ils posèrent des
réalités permanentes (respectivement les quatre éléments, les
« semences » de toutes choses, les atomes), bien que multiples. Les
Atomistes, en outre, reproduisirent dans leur opposition du plein et
du vide l’opposition parménidienne de l’être et du non-être. La
doctrine de Parménide, ensuite, fut radicalement contestée par le
Sophiste Gorgias : celui-ci affirme que l’être n’est pas, qu’il n’est pas
pensable et qu’il n’est pas communicable, avec divers arguments à
l’appui, parmi lesquels se détache celui-ci : l’être, étant uniquement
identique à lui-même, n’a rien de plus que le non-être, qui est aussi
identique à lui-même ; pour cette raison, on ne peut dire qu’il soit,
qu’il soit pensable et qu’il soit communicable plus que le non-être.
La référence à Parménide est centrale chez Platon : il le décrit
comme « vénérable et terrible » (Théét., 183e), donne son nom à l’un
de ses dialogues (où d’ailleurs il le considère avant tout comme un
partisan de l’Un), et le réfute dans le Sophiste, où il présente la
critique qu’il fait de Parménide comme une manière de parricide.
Cette critique consiste à poser, à côté de l’être, le non-être, mais un
non-être entendu, non pas comme non-être absolu (à la façon du
vide introduit par les Atomistes), mais comme un « autre » qui, en
même temps que « le même », appartient à tout être. Par là, Platon
ouvrait la voie à la critique d’Aristote, qui accuse Parménide d’avoir
conçu l’être en un sens seulement, comme univoque, et lui oppose sa
propre conception de l’être comme plurivoque, comme quelque
chose qui « se dit en plusieurs sens ».
Dans la philosophie moderne et contemporaine, Parménide, pour
avoir dit que l’être est identique à lui-même, a été considéré comme
ayant découvert ce qu’on appelle le principe d’identité, selon lequel
chaque être est identique à lui-même ; et, pour avoir dit que l’être ne
peut pas ne pas être, il a été considéré comme ayant découvert le
principe de non-contradiction. En réalité, ce dernier principe,
formulé par Platon et par Aristote, dit simplement qu’un être ne
peut avoir simultanément et sous le même rapport des caractères
opposés. L’interprétation moderne la plus juste reste peut-être celle
de Hegel, selon lequel Parménide, pour avoir pris comme objet de la
philosophie l’être, qui est le premier de tous les concepts, est le
véritable initiateur de toute la philosophie occidentale. Hegel,
toutefois, reprit aussi la critique de Gorgias, en observant que l’être,
en étant simplement identique à lui-même, c’est-à-dire dépourvu de
toute détermination, n’a rien de plus que le non-être, et se réduit
donc à ce dernier, donnant ainsi lieu au devenir. Plus récemment,
Parménide a été exalté par Heidegger, qui a interprété l’identité de
l’être et de la pensée, affirmée par le philosophe d’Élée, comme
ouverture de l’être à la pensée, et donc comme vérité (alètheia) dans
le sens original de non-voilement, une vérité qui précède la forme
logique de la proposition et toute la pensée représentative qui se
fonde sur celle-ci (Introduction à la métaphysique, 1953).
Enrico BERTI
ORIENTATION BIBLIOGRAPHIQUE
Textes et traductions
PLATON, Œuvres complètes, Paris, Societé de l’Association Guillaume
Budé.
PLATON, Œuvres complètes, traduction sous la direction de Luc
Brisson, Paris, Flammarion, 2008.
Dans la « Clarendon Plato Series » (Oxford, Clarendon Press) ont
paru plusieurs traductions anglaises récentes, accompagnées de
commentaires philosophiques approfondis.
Études
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BENSON, Hugh (ed.), A Companion to Plato, Blackwells, Oxford, 2006.
BRISSON, Luc, Platon, les mots et les mythes, Paris, La Découverte, 1994.
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Ménon de Platon, Paris, Odile Jacob, 1991.
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Canto-Sperber, en collaboration avec Jonathan Barnes, Luc Brisson,
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DIXSAUT, Monique (éd.), Études sur La République de Platon, 2 vol.,
Paris, Vrin, 2005.
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no 16, 2e semestre, 2002.
PRADEAU, Jean-Francois, Platon et la cité, Paris, PUF, 1994.
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2001.
SCHUHL, Pierre-Maxime, Études platoniciennes, Paris, PUF, 1960.
Plotin
Textes et traductions
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Londres, Heinemann & Cambridge MA, Harvard University Press,
1966-1988.
BRÉHIER, Émile, Plotin, Énnéades, Paris, Les Belles Lettres, 1924.
BRISSON Luc et PRADEAU Jean-François (dir.), Traités 1 à 50, 8 vol.,
Paris, GF-Flammarion, 2002 à 2009.
HADOT, Pierre, Traité 38 (VI, 7), Paris, Éditions du Cerf, 1988.
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—, Traité 9 (VI, 9), Paris, Éditions du Cerf, 1994.
HENRY, Paul, et SCHWYZER, Hans Rudolph (ed.), Plotini Enneades
(Editio minor), 3 tomes, Oxford, Clarendon Press, 1964-1982.
LEROUX, Georges, Plotin. Traité sur la liberté et la volonté de l’Un
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Études
ARMSTRONG, Arthur Hilary, « Plotinus », in A.H. Armstrong (ed.), The
Cambridge History of Later Greek and Early Medieval Philosophy,
Cambridge University Press, 1967, p. 195-268.
BLUMENTHAL, Henry J., Plotinus’ Psychology. His Doctrines of the
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BRÉHIER, Émile, La Philosophie de Plotin, Paris, Vrin, 1961.
EMILSSON, Eyjolfur K., Plotinus on Sense-Perception. A Philosophical
Study, Cambridge University Press, 1988.
GERSON, Lloyd P. (ed.), The Cambridge Companion to Plotinus,
Cambridge University Press, 1996.
GANDILLAC, Maurice de, La Sagesse de Plotin, 2e édition, Paris, Vrin,
1966.
HADOT, Pierre, Plotin ou la simplicité du regard, Paris, Institut des
études augustiniennes, 1989.
HIMMERICH, Wilhem, Eudaimonia. Die Lehre des Plotin von der
Selbstverwirklichung des Menschen. Forschungen zur Neueren Philosophie
und ihrer Geschichte n F. XIII, Würzburg, Konrad Triltsch Verlag, 1959.
IGAL, Jesus, Porfirio, Vida de Plotino. Plotino, Enéadas I-II, Madrid,
Editorial Gredos, 1982, Introducción General, p. 7-114.
LLOYD, Anthony C., The Anatomy of Neoplatonism, Oxford, Clarendon
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O’MEARA, Dominic J., Plotinus. An Introduction to the Enneads, Oxford,
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RIST, John M., Plotinus. The Road to Reality, Cambridge University
Press, 1967.
SCHROEDER, Frederic M., Form and Transformation. A Study in the
Philosophy of Plotinus, Montreal & Kingston, Mc Gill-Queen’s
University Press, 1992.
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—, La Purification plotinienne, Paris, PUF, 1955.
WALLIS, Richard T., Neoplatonism, Londres, Duckworth, 1972, p. 37-
93.
Plutarque
Textes et traductions
On dispose pour les Vies d’une édition complète dans la collection
des Universités de France (15 volumes + un volume d’index des
noms propres) ; les éditions bilingues grec-italien de Rizzoli (BUR
Classici greci) et de Mondadori (Fondazione Valla) offrent un
commentaire historique nourri. Parmi les nombreuses traductions
françaises, celle de Gallimard (coll. « Quarto », 2001) comporte un
utile « Dictionnaire Plutarque » établi sous la direction de Pascal
Payen, p. 1943-2117.
Pour les Œuvres morales, seules les collections Teubner (grec seul) et
Loeb (grec-anglais) sont actuellement complètes. Sont toujours en
cours l’édition de la CUF et le Corpus Plutarchi Moralium, édité chez
d’Auria (Napoli) : la première s’est enrichie en 2002 et 2004 de
BABUT, Daniel et CASEVITZ, Michel, Traités antistoïciens, t. XV 1-2 ;
mais pour le Sur le visage qui est dans la lune, les Questions
platoniciennes et le Sur la création de l’âme dans le Timée, la référence
reste toujours le travail de CHERNISS, Harold, Loeb, vol. XII et XIII-1,
auquel il faut ajouter FERRARI, Franco & BALDI, Laura, Sulla
o
generazione dell’anima, CPM n 37, 2004. Parmi les traductions seules,
le volume d’ILDEFONSE, Frédérique, Plutarque. Dialogues pythiques,
Paris, GF comporte une importante introduction (sur la traduction,
compléter par le compte-rendu de FRAZIER, Françoise, Ploutarchos
n.s., 5, 2007/2008, p. 114-121).
Études
Elles sont innombrables, avec, quasiment chaque année, un congrès
des sections espagnole et italienne de l’International Plutarch
Society, et une rencontre du Réseau de recherche (RED), et, tous les
trois ans, un congrès international de l’IPS. Depuis 2004-2005
(vol. II), la nouvelle série de la revue de l’IPS, Ploutarchos, publie un
bulletin bibliographique annuel (aussi) complet (que possible) des
articles et communications consacrés à Plutarque.
La personnalité de Plutarque
La présentation universitaire la plus complète reste celle de ZIEGLER,
Konrat, pour la Real Encyclopedie (XXI-1, 1951, col. 639-961),
complétée et tirée à part à Stuttgart en 1964. On dispose depuis 2000
d’une biographie intellectuelle due à SIRINELLI, Jean, Plutarque de
Chéronée. Un philosophe dans le siècle, Paris, Fayard. On peut y ajouter
le livre de JONES, Christopher P., Plutarch and Rome, Oxford,
Clarendon Press, 1971, toujours utile, ainsi que l’étude
prosopographique des amis de Plutarque de PUECH, Bernadette,
dans le volume II.33.6 de l’ANRW, 1992, p. 4831-4893.
La pensée politique
On complétera l’article de synthèse d’AALDERS, Gerhard J. D. et de
BLOIS, Lukas, « Plutarch und die politische Philosophie der
Griechen », ANRW, II.36.5, 1992, p. 3385-3404, par l’introduction
détaillée de CARRIÈRE, Jean-Claude, aux Préceptes politiques (CUF, t.
XI-2, 1984). Les qualités réclamées des notables ont été mises en
rapport avec les données de l’épigraphie par PANAGOPOULOS, Cécile,
Dialogues d’histoire ancienne, no 3, 1977, p. 197-235. On trouvera aussi
des éléments dans le congrès édité par STADTER, Philip A. & VAN DER
STOCKT, Luc, Sage and Emperor. Plutarch, Greek Intellectuals, and Roman
Power in the Time of Trajan (98-117 av. J.-C.), Leuven, Leuven
University Press, 2002, et, sur un point plus précis, dans le récent
commentaire de ROSKAM, Geert, Plutarch’s Maxime cum principibus
philosopho esse disserendum. An Interpretation with Commentary,
Leuven, Leuven University Press, 2009.
Les Vies
Deux synthèses ont été publiées à peu près simultanément, celle de
FRAZIER, Françoise, Histoire et morale dans les Vies parallèles de
Plutarque, Paris, Les Belles Lettres, 1996, et celle de DUFF, Tim,
Plutarch’s Lives. Exploring Virtue and Vice, Oxford University Press,
1999. L’ensemble du volume II.33.6 de l’ANRW (1994) est consacré à
l’analyse de Vies particulières ou de procédés. Les principales études
du plus grand spécialiste actuel des Vies ont été réunies in PELLING,
Christopher, Plutarch and History. Eighteen Studies, Londres,
Duckworth, 2002. L’autre grand spécialiste est STADTER, Philip A.,
éditeur d’un Plutarch and the Historical Tradition, Londres, Routledge,
1992.
Ce fragment n’était autre que l’exorde d’un livre Sur les dieux,
lequel constituait probablement la première partie du grand traité de
Protagoras sur les Antilogies. Le plan de ce traité semble livré par un
passage du Sophiste de Platon, où le Sophiste est défini comme étant
essentiellement l’antilogikos, le manieur de la contradiction.
L’Étranger invite Théétète à examiner les domaines dans lesquels le
Sophiste met au jour les antilogies, c’est-à-dire les domaines où « il y
a deux discours qui se contredisent l’un l’autre » disait Protagoras. À
la fin de l’exposé, Théétète reconnaît l’allusion aux écrits de
Protagoras.
Le premier de ces domaines était celui de l’invisible : problème
des dieux ; Protagoras examinait en outre le destin de l’âme après la
mort ; nous savons qu’il avait écrit un essai Sur ce qui se passe dans
l’Hadès.
Le deuxième domaine concernait le visible. Protagoras y
explorait :
a) la cosmologie,
« ce que les Sophistes nomment cosmos » (Xénophon,
Mémorables). Aucun fragment n’a été conservé ;
c) la politique,
c’est-à-dire l’étude des législations diverses. Ici s’insérait sans
doute la discussion sur la mort d’Épitime tué accidentellement par
un javelot ; cette discussion devait déterminer le responsable de la
mort : était-ce le javelot, le lanceur du javelot ou l’organisateur des
Jeux ?
d) l’art (technè) :
ici intervenait la réflexion sur la mathématique, qui en est un
exemple aux yeux de Protagoras (fragment B 7 sur la tangente).
Il est fondamental, pour comprendre le fragment B 4, de le situer
dans l’ensemble de la pensée de Protagoras et de ne pas le prendre
comme un absolu. C’est un fragment et il n’est qu’un moment – le
premier – de l’analyse protagoréenne. Diogène Laërce prend
d’ailleurs bien soin de nous en avertir : « Compte tenu du
commencement de cet ouvrage, on brûla ses livres » (Vies et opinions
des philosophes illustres, IX, 52).
De plus, si nous élargissons encore le contexte, nous nous
apercevons que le traité sur les dieux fit l’objet d’une certaine
publicité :
« Le premier de ses discours dont il donna lecture publique fut Des dieux. Cette lecture
eut lieu à Athènes, chez Euripide… »
(Diogène Laërce, IX, 53).
Les antilogies
L’homme-mesure
Nous retrouvons ici les termes du fragment sur les dieux, sur leur
être et sur leur non-être, mais nous franchissons un pas par rapport à
l’hésitation balancée du fragment B 4 : « […] ni qu’ils sont, ni qu’ils
ne sont pas […] », puisque de cet être ou de ce non-être, c’est
l’homme qui va décider. L’être ou le non-être des dieux aura pour
mesure l’homme : là est sans doute le vrai blasphème de Protagoras,
qui fait dépendre les dieux de l’homme, et non l’inverse. C’est
pourquoi Platon, dans Les Lois, lui opposera : « Le dieu est la mesure
de toutes choses » (716c).
Que l’homme mesure l’être ou le non-être du dieu, cela veut dire
que l’homme peut être soit croyant, soit athée (comme Diagoras ou
Théodore de Cyrène), et s’il est croyant, qu’il ait telle ou telle « idée »
très différente de ce qu’est ce dieu.
On peut rappeler que Protagoras avait, dans sa jeunesse,
fréquenté les mages de la Perse, pour qui les dieux sont des
personnifications des phénomènes naturels, et c’est une conception
différente du polythéisme traditionnel.
Mais l’on n’en reste pas moins à la dispersion des opinions car
« homme », dans la formule de Protagoras, a à la fois un sens
individuel et un sens générique : ces opinions vont se confronter et se
compter ; dès lors, des deux discours qui les expriment (discours de
l’existence et de la non-existence, du comme ceci et du comme cela),
l’un sera discours faible et marginal, l’autre discours fort et
majoritaire.
Or ce discours fort, c’est-à-dire le plus communément partagé,
existe ; c’est celui qui affirme l’existence des dieux, et qui les voit
comme le veut la tradition de la cité.
Le discours fort
Textes et traductions
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e
Berlin, Weidmann, 1951, 6 édition.
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UNTERSTEINER, Mario, Sofisti, testimonianze e frammenti, Florence, La
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Études
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philosophique, no 157, 1967, p. 43-58.
BODÉUS, Richard, « Réflexions sur un court propos de Protagoras »,
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LEVI, Adolfo, Storia della Sofistica, Naples, Morano, 1966.
ROMEYER DHERBEY, Gilbert, Les Sophistes, Paris, PUF, 4e éd., 1995.
ROMILLY, Jacqueline de, Les Grands Sophistes dans l’Athènes de Périclès,
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1993, tome I.
ZEPPI, Stellio, Protagora e la filosofia del suo tempo, Florence, La Nuova
Italia, 1961.
Ptolémée
L’Almageste
Le Tétrabiblos
En matière d’astrologie, Ptolémée écrivit ce qui, là encore, devint
un classique : le Tétrabiblos. Les procédés astrologiques babyloniens
étaient connus dans l’Égypte romaine. L’astrologie hellénistique était
florissante, et on avait besoin de méthodes astronomiques plus
faciles à mettre en œuvre que celles de Ptolémée, quitte à ce qu’elles
fussent inexactes. Le Tétrabiblos est un livre magistral et, à de
nombreux égards, un ouvrage scientifique. Là où la divination
babylonienne et assyrienne s’était surtout occupée du bien-être
public et de la vie du gouvernant, les Grecs appliquaient dans une
large mesure l’art de l’astrologie à la vie de l’individu. Cette activité
s’était trouvée encouragée, bien malgré eux, par l’enseignement de
Platon et d’Aristote touchant à la divinité des étoiles, et dans
l’Antiquité tardive nombreux étaient les astrologues qui se
considéraient comme les interprètes des mouvements des dieux.
Avec la montée du christianisme, cette attitude fut naturellement
refoulée, bien qu’elle ait été florissante comme procédé littéraire à
travers toute l’Antiquité romaine, et ait caractérisé l’Europe
chrétienne presque jusqu’à aujourd’hui. Le Tétrabiblos de Ptolémée
servit donc de manuel pour des publics de diverses et nombreuses
confessions.
Il s’ouvre sur une défense de l’astrologie, et repose à l’évidence
sur l’idée que les influences des corps célestes sont entièrement
physiques. Sur la fin, toutefois, il se contente d’enregistrer des
superstitions sans fondement, héritées en grande partie des
prédécesseurs de Ptolémée. Le livre II traite des influences du
cosmos sur la géographie et sur le temps, ce qui deviendra au cours
des siècles suivants un sujet très populaire, et inoffensif sur le plan
spirituel. Les livres III et IV traitent des influences des astres sur la
vie humaine, telles qu’elles se déduisent de l’état du ciel ; mais
curieusement, on n’y rencontre aucun élément des mathématiques
requises pour la distribution des Maisons du Ciel, et qui hantèrent
tant les astrologues des siècles ultérieurs.
Autres écrits
Textes et traductions
GOLDSTEIN, Bernard R. (ed.), The Arabic Version of Ptolemy’s Planetary
Hypothese, Philadelphie, American Philosophical Society, 1967.
HEIBERG, Johan Ludwig, Claudii Ptolemaei Opera quae exstant omnia,
Syntaxis mathematica, 2 vol., Leipzig, 1898-1903.
TOOMER, Gerald James, Ptolemy’s Almagest, Londres, Springer, 1984.
Études
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Acoustic Theory, Ptolemy, Cambridge University Press, 1989, p. 270-
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BOUCHE-LECLERCQ, Auguste, L’Astrologie grecque, Paris, E. Leroux,
1899 ; repr. Brussels, 1963.
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Written in Honour of George Kerferd Together with a Text and Translation
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1970), tome II (Lysis, Charmide, Lachès, Hippias majeur, texte établi et
traduit par Alfred Croiset, 1921, 1972), tome III, 2e partie (Gorgias,
texte établi et traduit par Alfred Croiset avec la collaboration de
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Zénon d’Élée
Histoire institutionnelle
Dès l’Antiquité même, certains avaient déjà essayé d’apporter
une solution au problème que nous venons d’évoquer et, préférant
souligner les différences plutôt que les points communs, ils avaient
distingué plusieurs Académies. La classification la plus complète se
trouve chez Sextus Empiricus, qui, en se référant à des sources qu’il
ne cite pas, distingue trois Académies : l’Ancienne, celle de Platon et
de ses successeurs immédiats, la Moyenne, celle d’Arcésilas, la
Nouvelle, celle de Carnéade et de Clitomaque. Il précise même que
certains ajoutaient une quatrième, celle de Philon et une cinquième
celle d’Antiochos d’Ascalon. Malgré son apparente rigueur, cette
classification n’a pas de valeur absolue : elle n’est confirmée ni par
Cicéron, qui a connu l’Académie de l’intérieur, comme disciple de
Philon de Larissa, ni par Plutarque, qui s’est réclamé de l’Académie
et qui en connaissait fort bien l’histoire. Le témoignage de Sextus
prouve simplement que des historiens antiques de la philosophie
s’étaient appuyés sur des différences réelles pour privilégier la
discontinuité dans leur présentation de l’Académie. Mais ce que
Sextus ne dit pas, c’est que ces changements philosophiques
n’ébranlèrent jamais l’unité institutionnelle de l’école.
Nous savons qu’à l’âge de vingt-huit ans, après la mort de
Socrate, Platon voyagea dans différentes régions du Bassin
méditerranéen ; puis, revenu à Athènes, il commença à enseigner
dans un gymnase situé dans une zone hors les murs qui tirait son
nom du héros Hécadémos, dont la légende, connue par différentes
versions, est liée au récit de l’arrivée des Dioscures en Grèce.
Quelque temps après, Platon s’installa dans un petit jardin proche
du gymnase. La date de fondation de l’Académie est 387 avant J.-C.
et l’on a longtemps cru que cette institution avait un statut
d’association. Or ce type de statut n’existait pas en droit athénien.
L’école ne se définissait pas non plus par la possession de la
propriété achetée par Platon. Institutionnellement, l’Académie
n’existait donc que par l’élection d’un scholarque, qui faisait d’un
Académicien choisi par ses pairs le successeur de Platon. La
première succession semble avoir été réglée par Platon lui-même, qui
désigna comme scholarque son neveu Speusippe. L’élection, si
élection il y eut, fut la simple ratification du choix du Maître. En
revanche, après la mort de Speusippe, un véritable processus
électoral se mit en place. On eût pu s’attendre à ce que le choix se
portât sur le disciple le plus brillant de Platon, à savoir Aristote. Or,
hasard ou résultat d’une manœuvre, celui-ci se trouvait alors en
voyage en Macédoine. Xénocrate fut élu de justesse contre deux
autres candidats, qui, après leur défaite, préférèrent aller fonder une
autre école plutôt que de demeurer dans l’Académie. Le choix de
Xénocrate ne fut pas celui du philosophe le plus brillant, car Platon
lui-même avait dit qu’Aristote avait besoin d’un frein et Xénocrate
d’un aiguillon. L’élection semble s’être faite sur un critère de
moralité, Xénocrate ayant les qualités qui dans ce domaine avaient
manqué, disait-on, à Speusippe. La désignation des autres
scholarques fit-elle l’objet d’une compétition aussi serrée ? Les
sources sont muettes sur ce point. On peut penser, en tout cas,
qu’aucun scholarque ne tenta d’imposer lui-même son successeur,
même si certains faisaient connaître leur préférence personnelle :
selon Diogène Laërce – mais quel crédit lui accorder ? – Cratès et
Arcésilas accédèrent au scholarquat pour avoir été les mignons de
Polémon et de Crantor.
Selon la chronologie la plus rigoureuse, les dates d’élection des
principaux scholarques de l’Académie sont les suivantes : 348/7,
Speusippe ; 339/8, Xénocrate ; 314/3, Polémon ; 270/69, Cratès ;
268/4 ? Arcésilas ; 244/3, Lacyde ; 167/6, Carnéade ; 127/6,
Clitomaque ; 110/9, Philon de Larissa.
Jusqu’à une époque relativement récente, on considérait
généralement que l’Académie s’était perpétuée sans interruption
depuis Platon jusqu’à la fermeture des écoles athéniennes par
Justinien. En fait, l’histoire de l’école fondée par Platon s’arrête en 88
avant J.-C., date à laquelle le dernier scholarque, Philon de Larissa,
chercha asile à Rome, fuyant Athènes assiégée par Mithridate. Cette
date marque la rupture du lien institutionnel, et les efforts du
disciple dissident de Philon, Antiochos d’Ascalon, pour substituer ce
qu’il croyait être une légitimité philosophique à la légimité
institutionnelle se révélèrent vains. À différentes époques, des
philosophes se réclameront de l’Académie, Plutarque, par exemple,
ou fonderont des écoles platoniciennes. Ce ne seront jamais des
Académiciens au sens historique du terme.
L’Ancienne Académie
Speusippe
Cette appellation d’Ancienne Académie a été donnée
évidemment a posteriori aux scholarques qui se sont succédé de
Speusippe à Cratès, pour bien marquer l’importance des
modifications introduites après eux par Arcésilas. L’étude
approfondie de l’Académie est assez récente et elle se heurte à des
problèmes considérables. Aucune œuvre de ces scholarques ne nous
est parvenue et Aristote, notre source la plus complète pour la
connaissance de leur pensée, n’a rien d’un historien objectif. Engagé
dans la réfutation de Platon et de ces Académiciens, il conduit sa
démonstration sans trop se soucier de références précises. Ainsi,
Speusippe, pourtant très présent dans la Métaphysique, n’est cité que
deux fois. Il est donc souvent difficile de savoir ce que l’on peut
attribuer à chacun des philosophes de l’Ancienne Académie. À cela
s’est ajoutée une difficulté qui tient aux controverses érudites sur
« l’enseignement oral » de Platon. L’école exégétique dite « de
Tübingen » (K. Gaiser, H. J. Krämer) a construit, à partir surtout de
quelques passages d’Aristote, la théorie d’un enseignement oral de
Platon, plus important que les écrits, et dont la compréhension serait
indispensable, selon elle, dans l’analyse de la philosophie de
Speusippe et de Xénocrate.
L’Ancienne Académie se caractérise d’emblée par un point
fondamental : l’abandon de la théorie des Formes telle que l’avait
conçue Platon et la recherche de ce que nous appellerons « une
transcendance de substitution ». En effet, même si Diogène Laërce
écrit que Speusippe demeura fidèle aux dogmes des Platoniciens, il
apparaît à la lecture de la Métaphysique d’Aristote que le premier
successeur de Platon ne conserva pas cette doctrine à laquelle le
Maître, lui, n’avait jamais totalement renoncé, même s’il évolua
considérablement dans la manière de la concevoir.
Pourquoi Speusippe s’est-il séparé de Platon sur un point aussi
essentiel ? Nous n’avons aucun témoignage sur ses motivations,
mais on peut penser que cette décision n’exprima pas seulement la
volonté d’affirmer son originalité philosophique après la disparition
de l’écrasante personnalité de Platon. Elle résulta sans doute avant
tout de la prise en compte de toutes les objections adressées aux
Formes platoniciennes à l’intérieur de l’Académie. Aristote ne dit-il
pas que Speusippe renonça aux Formes « en raison des difficultés
que renferme à ses yeux [cette] théorie ». Ces objections sont
analysées par Platon lui-même dans le Parménide ; nous pouvons en
avoir une présentation différente à travers les critiques qui sont
formulées par Aristote dans la Métaphysique, et qui reprennent des
thèmes déjà exposés dans son livre sur les Idées, antérieur à la
fondation du Lycée. Dans le dialogue platonicien qui porte son nom,
le vieux Parménide montre à Socrate quelles difficultés l’attendent
lorsqu’il considère le monde multiple du sensible comme la copie de
ces « Formes », réalités absolues situées à part des choses qui en
participent. Sans entrer dans le détail d’une démonstration très
complexe, rappelons ici quelques arguments. Si les choses sensibles
participent de « Formes » séparées, participent-elles de la Forme tout
entière ? Cela supposerait que chaque Forme, présente dans chacune
de ses représentations, se trouve séparée d’elle-même. Mais si,
abandonnant cette hypothèse, on affirme que la chose sensible ne
participe que d’une partie de la Forme, celle-ci perd l’unité
essentielle qui était présentée comme une de ses caractéristiques.
Une difficulté tout aussi considérable apparaît avec l’argument
qu’Aristote désignera sous le nom de « troisième homme ». Dans la
bouche de Parménide, cette objection est ainsi formulée : lorsque l’on
regarde un ensemble d’objets qui paraissent grands, il y a en eux un
même caractère par lequel on infère que la grandeur est une. Mais
lorsqu’on embrasse par la pensée à la fois la grandeur et les choses
qui paraissent grandes, il apparaîtra encore une grandeur par
rapport à laquelle toutes celles-là paraissent grandes. Ainsi donc
« chacune de tes Formes », dit Parménide à Socrate, « ne sera plus
une, mais infinie en nombre ». Il est fort probable que furent
également débattues dans l’Académie, à l’époque où s’y trouvait
Aristote, les objections que nous trouvons exprimées dans la
Métaphysique. Le Stagirite y condamne ce qu’il appelle l’ekthesis, la
séparation platonicienne entre le monde des Formes et celui des
réalités sensibles, dans laquelle il voit la source d’inextricables
contradictions. Par exemple, si chaque Idée constitue une réalité
séparée, elle est impossible à définir, car cette définition conviendra
également à d’autres choses. Par ailleurs, comment les Formes
pourraient-elles être, ainsi que le veut Platon, cause du mouvement
et du changement ? De par leur nature immuable, elles seraient
plutôt causes de repos ! Et si l’on cherche à définir le rapport existant
entre un objet sensible et la Forme équivalente, on se trouve encore
devant une aporie : si la Forme est identique à la fois par la nature et
par le nom à la chose, elle en constitue une doublure inutile ; et si la
Forme n’a avec la chose qu’un rapport d’homonymie, quel peut être
le sens de la participation, alors qu’il existe entre les deux réalités
une différence essentielle ? Il est également possible que Speusippe
ait perçu comme incompatibles la théorie des Formes et la méthode
de division (diairesis) par laquelle Platon avait cru pouvoir
surmonter les objections qui lui étaient faites.
Speusippe crut échapper à ces difficultés en identifiant aux
mathématiques l’absolu que Platon avait trouvé dans les Formes. Ce
recours aux mathématiques ne se fit pas ex nihilo, car les
mathématiques avaient déjà une place importante dans la
philosophie platonicienne. Mais, alors que Platon considérait les
objets mathématiques comme des êtres intermédiaires entre les
Formes et les choses sensibles, Speusippe accorda aux nombres des
caractéristiques que Platon attribuait aux Idées.
Selon Aristote, Platon admettait trois substances : les Idées, les
objets mathématiques et les choses sensibles. Les objets
mathématiques sont donc chez lui intermédiaires entre, d’une part,
les Nombres et les Figures idéaux, qui ne diffèrent pas par essence
de n’importe quelle autre Forme, et, d’autre part, les nombres et les
figures du sensible. Par exemple, entre les cercles nécessairement
imparfaits du sensible, et l’Idée de cercle, il existe le cercle en tant
qu’objet mathématique, se définissant par la parfaite rotondité. Ce
statut intermédiaire des objets mathématiques explique la différence
que Platon établit dans La République entre le mathématicien et le
dialecticien : le premier raisonne à partir d’hypothèses, dont il
recherche la vérification, alors que le dialecticien veut s’élever
jusqu’à un inconditionnel (anhypotheton) qui lui garantira une science
absolue.
Nous savons avec certitude par Aristote que Speusippe rejetait la
théorie des Formes : il ne croyait ni en des nombres ni en des figures
idéaux. Si les nombres et les figures constituent pour lui les seules
réalités absolues, ce n’est pas en tant que Formes, mais en tant
qu’êtres mathématiques. Il serait trop simple de croire que
Speusippe avait réservé aux nombres et aux figures le statut qui était
chez Platon celui de toutes les Formes. Les choses sont beaucoup
plus complexes, car c’est dans la conception même du nombre qu’il
exprima sa différence par rapport à son prédécesseur. Pour Platon,
chaque nombre idéal, du fait non de sa nature de nombre, mais de
son statut de Forme, constitue une unité séparée à la fois des
nombres du monde sensible et des autres nombres idéaux.
Speusippe, au contraire, définit chaque nombre non plus comme un
être unique, mais comme un ensemble d’unités, puisqu’il le fait
naître de deux principes : l’Un et la multiplicité. Le nombre
speusippéen est, comme les Idées platoniciennes, une réalité
éternelle, séparée du monde sensible, et les figures dérivent de lui
par analogie, le point étant l’analogue du nombre un, la ligne de
deux, le plan de trois. L’un des principaux problèmes qui se posent
est alors celui du statut de l’Un : a-t-il une substance différente de
celle des autres nombres, ou n’est-il que le premier des nombres ?
Aristote écrit : « Speusippe admet encore un plus grand nombre de
substances ; il commence en partant de l’Un ; puis il pose un
principe pour chaque espèce de substance, un pour les nombres, un
autre pour les grandeurs, un autre ensuite pour l’âme. » La lettre du
texte laisserait penser que l’Un est d’une nature différente de celle
des autres nombres, mais, par ailleurs, le même Aristote dit à un
autre endroit que, pour Speusippe, les nombres mathématiques sont
les premiers êtres. L’explication de ce problème se trouve peut-être
dans l’ingénieuse solution proposée par L. Taràn, qui a souligné la
différence existant entre Aristote et Speusippe en ce qui concerne
l’Un. Pour Aristote, qui, comme Platon, fait commencer la suite des
nombres à deux, l’Un n’est pas un nombre, mais le principe des
nombres. Pour Speusippe, au contraire, l’Un est identique au
nombre un et c’est pour cette raison qu’il est principe des nombres.
Les contradictions que l’on peut déceler chez Aristote concernant
l’Un speusippéen s’expliqueraient donc par une interférence sur ce
point entre sa propre pensée et celle de l’Académicien.
En ce qui concerne le second principe du nombre, la multiplicité,
les témoignages sont très rares et il est fort possible que Speusippe
lui-même n’ait pas été très explicite sur ce point, puisque Aristote lui
reproche de ne pas avoir précisé comment le nombre peut être
composé de l’Un et de la Multiplicité. Quoi qu’il en soit, il importe
surtout de savoir comment Speusippe passait de ces êtres premiers
qu’étaient pour lui les nombres à la réalité sensible. Nous avons déjà
dit qu’il établissait une relation de similitude entre les figures et les
nombres mathématiques. Mais selon le témoignage d’Aristote,
Speusippe distinguait plusieurs substances : outre les nombres et les
figures, l’âme – qu’il affirmait être immortelle – et d’autres qu’il ne
cite pas, jusqu’à arriver aux objets sensibles, dont il y a tout lieu de
croire qu’il faisait également une substance. D’où le reproche qui lui
est adressé par Aristote d’avoir fait de l’univers une série d’épisodes
n’ayant entre eux aucune relation. Ce grief doit être mis en relation
avec le fait que Speusippe n’identifiait pas l’Un et le Bien, affirmant
que pour les plantes et les animaux, le beau et le parfait ne se
rencontrent pas dans la semence, mais dans les produits dérivés. En
refusant ainsi de donner au Bien un statut essentiel, il divergeait de
Platon sur un point de doctrine fondamental. Selon Aristote, il
voulait ainsi éviter les difficultés liées à l’identification de l’Un et du
Bien, par exemple la nécessité dans laquelle il se trouverait alors
d’identifier le Mal et la Multiplicité. Mais comment concevoir cet
univers fait de substances différentes et qui ne révèle sa perfection
qu’en fin de parcours ?
Pour Aristote, les nombres ne peuvent être cause de rien et c’est
une des raisons pour lesquelles l’univers speusippéen lui apparaît
comme une série discontinue d’« épisodes ». Mais nous savons que
Speusippe lui-même établissait entre les différents niveaux de la
réalité une relation de similarité, d’homoiotès. Ce concept est
assurément hérité de Platon, pour qui une chose se définit par la
relation de similarité à la Forme correspondante. Mais son utilisation
par Speusippe pose au moins deux problèmes : d’une part, que peut
être cette similarité à partir du moment où les premiers êtres ne sont
plus des Formes, mais des nombres ? D’autre part, si l’on se rappelle
que la similarité va de pair pour Platon avec la causalité, puisqu’il
est dit dans le Phédon que les Idées sont à la fois les modèles et les
causes de l’être et du devenir, qu’en est-il exactement pour
Speusippe ?
En ce qui concerne le premier point, L. Taràn souligne que
chaque objet particulier se trouve être chez Speusippe le centre d’un
faisceau de relations dont l’ensemble constitue son essence. Si la
connaissance des nombres, qui sont les seuls êtres éternels et
immuables, est directe, celle des réalités sensibles exige que l’on
fasse intervenir les concepts de similitude et de différence, qui sont
issus de cette connaissance directe des nombres et qui permettent de
déterminer la relation de cet objet aux autres objets. La classification
des sensibles suppose donc la dichotomie, dont le point de départ est
d’établir si deux choses sont semblables ou différentes, et Speusippe
appliqua cette méthode à la classification des mots, des plantes et
des animaux.
Pour ce qui est du second problème, celui de l’unité de l’univers
speusippéen, la densité des critiques formulées par Aristote montre
qu’il y avait là un ensemble de difficultés très importantes. Comme
l’a fort justement écrit Léon Robin : « Speusippe, conservant l’Un
comme principe, le considérait non comme quelque chose de réel et
d’actuel, mais comme un principe imparfait et indéterminé qui
graduellement se détermine et s’enrichit. » En considérant que l’Un
est tout en puissance et rien en acte, l’Académicien s’exposait à
l’objection formulée dans la Métaphysique : si l’Un n’est pas une
substance, comment le nombre pourrait-il exister comme une réalité
indépendante ? Aristote reprochait également aux Platoniciens en
général et à Speusippe en particulier de ne pas avoir défini avec
suffisamment de précision comment les Nombres naissent des
principes. Enfin, il rejetait la théorie speusippéenne de la similarité, à
laquelle il reprochait de confondre genre et espèce. Comme le
soulignent même les exégètes les plus favorables à Speusippe, on
discerne mal comment son système peut aboutir à des concepts
comme celui d’homme ou de plante.
Un autre aspect de la philosophie de Speusippe mérite d’autant
plus d’être évoqué qu’il est à l’origine de bien des confusions : sa
relation au pythagorisme. On ne peut contester que Speusippe se
soit intéressé à cette doctrine philosophique, puisque selon
Jamblique il avait rédigé « un joli petit livre » sur les nombres,
inspiré des écrits de Philolaos et dont toute une moitié était
consacrée à la décade. Le problème de savoir ce qui dans l’exposé de
Jamblique remonte véritablement à Speusippe est objet de
controverses. Quelle que soit l’importance que l’on accorde à
l’influence du pythagorisme sur Speusippe, il reste une divergence
essentielle entre les deux pensées philosophiques : pour les
Pythagoriciens, les nombres sont inhérents à la matière, alors que
pour Speusippe ils ont un statut transcendant.
La philosophie de Speusippe, qui prétendait échapper aux
difficultés de l’idéalisme platonicien, suscitait elle-même de
nombreuses objections. Il n’est donc pas surprenant que Xénocrate
ne soit pas resté sur les mêmes positions et qu’il ait élaboré un
système par lequel il pensait sans doute éviter les contradictions
reprochées à ses deux prédécesseurs.
Xénocrate
Son effort de renouvellement ne trouva pas grâce aux yeux
d’Aristote, qui semble avoir pensé que Xénocrate, au lieu d’apporter
une solution satisfaisante, avait élaboré la doctrine la plus erronée,
puisque cumulant les incohérences de Platon et de Speusippe.
Speusippe avait été taxé par Aristote d’« épisodisme ». Xénocrate
accorda, lui, une importance toute particulière aux articulations de la
pensée philosophique et à la définition de la nature des relations
entre les différents niveaux de la réalité.
Selon Sextus Empiricus, il fut le premier à organiser la
philosophie selon la tripartition : physique, éthique, logique. Certes,
Sextus, reprenant une tradition dont nous trouvons déjà l’écho dans
un passage des Académiques de Cicéron, dit que cette tripartition était
déjà implicitement présente chez Platon. Il n’en reste pas moins vrai
que c’est Xénocrate qui définit clairement cette méthode, dont
l’importance fut considérable dans la constitution des grandes
doctrines hellénistiques, notamment du stoïcisme.
En ce qui concerne maintenant l’organisation de la réalité,
plusieurs témoignages nous montrent avec quel soin Xénocrate avait
cherché à effacer la doctrine speusippéenne d’un monde fait de
substances indépendantes les unes des autres. Sextus Empiricus –
dont le témoignage, semble, il est vrai, contredit par un texte,
beaucoup plus allusif, de Théophraste – nous dit qu’il distinguait
trois substances : la sensible, l’intelligible et la mixte, et qu’il situait
la première à l’intérieur du ciel, la deuxième à l’extérieur de celui-ci
et la troisième dans le ciel lui-même. D’après Sextus, Xénocrate avait
donc au moins ceci de commun avec Speusippe qu’il affirmait
l’existence de réalités intelligibles extérieures au monde. Mais, alors
que Speusippe identifiait ces intelligibles aux nombres, Xénocrate
revenait à la théorie des Idées, qui devait lui apparaître en fin de
compte moins génératrice de difficultés que la doctrine de son
prédécesseur immédiat. Dans le même sens de la simplification
systématique, on peut relever le fait qu’il critiquait la multiplicité des
catégories aristotéliciennes et affirmait que toutes les réalités
pouvaient être intégrées dans les catégories de l’en-soi et du relatif.
De Xénocrate, L. Robin a pu dire, en s’appuyant sur le
témoignage de Théophraste, qu’il fut le premier des Platoniciens à
effectuer jusqu’au bout la déduction à partir des principes « et à
déterminer, par leur moyen, toutes les choses de l’univers ». Cette
déduction systématique explique que Xénocrate ait pu être considéré
comme celui des Académiciens qui annonçait le plus nettement le
néoplatonisme.
Nous savons, à vrai dire, peu de chose de la manière dont
Xénocrate concevait les principes. Aristote évoque assez longuement
dans la Métaphysique les différentes manières dont les Académiciens
ont nommé le principe opposé à l’Un, mais il le fait sans préciser les
noms de ces philosophes, ce qui permet des interprétations
divergentes sur des points de détail. Nous savons par d’autres
témoignages qu’il opposait à l’Un (en) l’aenaon, concept important
pour le pythagorisme antique et qu’il interprétait comme « non-un »,
alors que le sens était probablement « toujours fluide ». Xénocrate a-
t-il défini ce principe de multiplicité par la dyade platonicienne du
Grand et du Petit ? Cela est fort possible, mais le caractère anonyme
du témoignage d’Aristote nous interdit sur ce point toute certitude.
Nous ne savons pas non plus comment Xénocrate expliquait la
dérivation des Idées, dont Platon dit qu’elles échappent au devenir, à
partir des principes de l’Un et du Multiple. En revanche, nous
sommes mieux informés sur sa conception de ces Idées dont son
scholarquat marqua la restauration après le mathématisme de
Speusippe. Il définissait l’Idée comme étant « cause exemplaire de
toutes les choses qui subsistent toujours dans l’ordre de la nature ».
Cette définition, considérée comme suspecte par certains
commentateurs du fait de son inclusion dans un texte de Proclos
dont plusieurs passages sont effectivement étrangers à l’Ancienne
Académie, nous paraît au contraire caractéristique de l’effort
xénocratéen pour échapper aux objections qui avaient été faites à
Speusippe. En effet, la définition de l’Idée comme étant
indissociablement modèle et cause constituait une parade contre le
reproche aristotélicien d’épisodisme. La référence aux « choses qui
subsistent toujours dans l’ordre de la nature » peut être, elle,
comprise par opposition aux produits de la technique qui, eux, ne
sont pas inclus dans cette relation étroite aux Idées et, par-delà
celles-ci, aux principes. Mais le retour de Xénocrate à l’idéalisme ne
signifie pas qu’il se soit enfermé dans une attitude d’orthodoxie
platonicienne. En effet, son innovation majeure dans le domaine des
Idées fut d’élaborer ce qu’Aristote appelle « le pire des systèmes », à
savoir l’identification du Nombre idéal et du nombre mathématique.
Pour Aristote, raisonner ainsi, c’est attribuer arbitrairement au
nombre mathématique des propriétés qui ne sont pas les siennes et
retrouver toutes les difficultés du nombre idéal platonicien. Le même
Aristote reproche à Xénocrate d’avoir construit les grandeurs à partir
de la matière et du nombre idéal, chaque figure géométrique
dérivant d’une Idée-Nombre. Quel est le statut de ces grandeurs,
demande-t-il, sont-elles des Idées, et en quoi contribueront-elles à
fonder l’existence des choses sensibles ? Comme l’a justement
remarqué M. Isnardi Parente, Aristote critique chez Xénocrate à la
fois sa conception mathématique des Idées et le fait d’avoir doté
celles-ci d’une sorte « de capacité intrinsèque de déploiement
dynamique dans la dimension spatiale ». Aristote et les
Péripatéticiens ont, de ce point de vue, critiqué avec vigueur la
théorie xénocratéenne – présente déjà chez Platon, selon certains
exégètes – de la ligne indivisible. Xénocrate, qui, contrairement à
Speusippe, ne concevait pas chaque nombre comme dérivé de l’Un –
à la fois principe et premier nombre –, défendait la thèse de
l’indivisibilité de toutes les grandeurs, chacune d’entre elles
renvoyant à une Idée-Nombre.
En ce qui concerne la cosmologie, Xénocrate affirmait que Platon
avait évoqué dans le Timée une création du monde pour rendre sa
pensée plus claire et il comparait cette méthode à la construction
d’une figure géométrique, destinée à faire comprendre ce qu’est, par
exemple, l’essence du triangle, même si elle ne correspond pas
parfaitement à cette réalité transcendante. Aristote lui reprochait à
propos de cette interprétation d’avoir cherché à « venir au secours de
Platon », et ce concept de « secours » (boètheia) ne relève pas
nécessairement de la polémique ; il peut être interprété comme
mettant en évidence une solidarité historique réelle entre l’Ancienne
Académie et Platon. Cette solidarité laissait une très grande liberté à
l’interprétation – le peu que nous savons de la cosmologie de
Xénocrate montre des différences importantes avec le Timée – mais
peut se définir comme la volonté de ne pas laisser le dernier mot à la
critique aristotélicienne sur des points fondamentaux. Ce double
aspect, création originale sur fond de fidélité à l’inspiration
platonicienne, apparaît avec une particulière netteté dans la
définition xénocratéenne de l’âme comme étant un « nombre qui se
meut lui-même ». Dans cette définition, on trouve à la fois un
élément platonicien – l’âme est définie dans le Phèdre comme
automotrice – et l’idéalisme mathématique propre à Xénocrate.
Simplicius, dans la continuité d’Aristote qui avait critiqué cette
définition, a prétendu montrer que l’âme était pour Xénocrate
intermédiaire entre l’Idée et le sensible, mais il y a tout lieu de croire,
au contraire, que Xénocrate, qui affirmait comme Platon
l’immortalité de l’âme, n’établissait pas de différence entre l’âme et
le nombre idéal. Par ailleurs, le fait que toute une tradition
doxographique, à l’origine de laquelle se trouvait peut-être
Xénocrate lui-même, ait fait remonter à Pythagore cette conception
de l’âme, ne change rien quant à l’adéquation de cette définition
avec l’orientation générale de la philosophie xénocratéenne. Au
demeurant, un texte de Plutarque montre comment l’Académicien –
qui avait abandonné la tripartition de l’âme, décrite dans La
République, pour la bipartition d’origine pythagoricienne : raison,
passion – pouvait invoquer le Timée à l’appui de cette définition, en
interprétant de manière très personnelle le passage dans lequel
Platon raconte la construction des âmes. Mais Xénocrate fut aussi un
penseur particulièrement soucieux d’explorer toutes les articulations
possibles entre la philosophie et la théologie, et cet aspect de sa
pensée eut une influence durable ; Varron s’en inspira en cherchant à
donner un fondement philosophique à la religion romaine. Nous
savons que Xénocrate, qui attribuait une certaine notion du divin
même aux animaux irrationnels, avait expliqué que l’Un et la Dyade
sont des dieux, le premier correspondant à Zeus, roi du ciel, la
seconde à Héra, mère des dieux, souveraine des choses qui sont sous
le ciel et âme de l’univers. De même, il identifiait le ciel et les astres
de feu aux dieux de l’Olympe, et affirmait que le monde sublunaire
est peuplé de démons invisibles, intermédiaires entre les dieux et les
hommes. Employant une métaphore mathématique, il comparait les
dieux à un triangle équilatéral – symbole de ce qui est invariable –
l’homme à un triangle scalène, et les démons à des triangles isocèles.
Par sa réflexion sur la religion, Xénocrate semble donc avoir précédé
les Stoïciens dans leur identification des dieux de la mythologie à
des concepts philosophiques. Cependant, aucun témoignage ne lui
attribue explicitement, comme le font certains exégètes, l’invention
du thème – si présent dans le moyen-platonisme – des idées comme
pensées de Dieu.
L’Académie « sceptique »
Arcésilas
La personnalité complexe d’Arcésilas est trop souvent brouillée
par le fait que l’on se réfère presque exclusivement au témoignage de
Sextus Empiricus, qui, tout en ne le reconnaissant pas comme un
Sceptique véritable, l’évoque néanmoins dans la perspective du
Néopyrrhonisme. Or, en ne voyant en Arcésilas que le philosophe de
l’epochè, on néglige d’importants aspects de sa pensée. Ainsi, on
ignore trop souvent que ce philosophe, à qui l’on attribue
communément la responsabilité d’une véritable rupture dans
l’histoire de l’Académie, fut dans sa jeunesse séduit par un
platonisme très dogmatique, puisqu’il comparait l’école de son
maître Polémon à un lieu où se seraient réfugiés des survivants de
l’âge d’or. De l’attachement à cet enseignement, il reste quelques
traces : nous savons par Tertullien qu’il élabora – on aimerait savoir
à quelle période de sa vie – une théologie dans laquelle il faisait
dériver du ciel et de la terre trois types de divinités. En tout cas,
l’importance que ce « Sceptique » accordait à l’articulation de la
philosophie et de la religion, dans la tradition de l’Ancienne
Académie, nous est confirmée par le fait qu’interprétant d’une
manière très personnelle un vers d’Hésiode, dans lequel il
remplaçait le mot bion par le mot noon, il aimait à répéter que les
dieux ont dissimulé aux hommes l’intelligence. Tout cela montre que
la philosophie aporétique d’Arcésilas conservait encore quelque
chose de l’orientation transcendantale du platonisme. Il est même un
texte tardif, mais dans l’ensemble bien informé, les Prolegomena in
Platonis philosophia, dans lequel il nous est dit que parmi les
arguments évoqués par la Nouvelle Académie pour justifier sa
philosophie du doute figurait une référence au Phédon, dialogue
dans lequel il est dit que l’âme ne pourra jamais accéder au vrai tant
qu’elle est entrelacée au corps. Mais alors que Platon, dans le plus
célèbre de ses mythes, comparait la vie des hommes à celle de
prisonniers qui n’aperçoivent que des ombres sur les parois de la
caverne, Arcésilas déclarait que le monde était entièrement recouvert
de ténèbres et il prétendait aller plus loin que Socrate, lequel avait au
moins la certitude de ne rien savoir.
L’aporétisme d’Arcésilas, qui lui faisait affirmer que les sens,
mais aussi la raison, sont incapables d’arriver à aucune connaissance
certaine, et que le sage doit suspendre son jugement en toute
occasion, a donné lieu à de très diverses interprétations. On a voulu
y voir des influences pyrrhoniennes ou péripatéticiennes, peu
vraisemblables. Beaucoup plus intéressante est la thèse défendue par
P. Couissin en 1929, pour qui les concepts fondamentaux de la
pensée d’Arcésilas résulteraient de la subversion dialectique de
concepts stoïciens. Les Stoïciens affirmaient que la plupart des
représentations sont « cataleptiques », c’est-à-dire correspondent à
une partie au moins de la réalité et entraînent de manière presque
automatique l’assentiment. Ils admettaient cependant que, dans des
cas très rares, devant certaines représentations peu claires, même le
sage devait suspendre son assentiment. En proclamant que l’homme
vit dans un monde où tout est ténèbres, Arcésilas aurait donc
transformé en règle ce qui pour ses adversaires dogmatiques était
l’exception, faisant ainsi de l’epochè l’essence même de la sagesse. De
même le concept de probable (eulogon), qu’il préconisait pour guider
l’action du sage, résulterait de la généralisation ironique d’un
concept qui pour les Stoïciens caractérisait la moralité « moyenne »,
celle précisément de l’homme qui n’est pas parvenu à la sagesse.
Cette thèse de Couissin explique bien des aspects de la philosophie
d’Arcésilas, mais elle ne rend pas compte de tous les témoignages, et
notamment de ceux qui nous disent qu’il fondait la suspension de
l’assentiment sur le principe de l’isosthénie, c’est-à-dire de la force
égale des discours opposés. Il y avait donc véritablement chez
Arcésilas une philosophie personnelle de l’impossibilité de
connaître, qui ne se réduisait pas à sa dialectique antistoïcienne,
même si la lutte contre le stoïcisme fut sa grande affaire, comme celle
des scholarques qui lui succédèrent. Arcésilas ne prétendait pourtant
pas à l’originalité : nous savons par Cicéron et Plutarque qu’il avait
constitué une généalogie de la philosophie du doute, où il incluait
non seulement Socrate et Platon, mais aussi des Présocratiques
comme Parménide, Héraclite, Démocrite, Anaxagore et Empédocle.
Il serait erroné de ne voir dans cette énumération qu’un amalgame
confus. En associant dans une même tradition des penseurs dont il
ne pouvait pas ignorer les divergences profondes, Arcésilas cherchait
surtout à mettre en valeur une ancienne manière de philosopher qui
était exempte – quels que fussent les aspects dogmatiques des uns et
des autres – de ce qu’il reprochait aux philosophies hellénistiques, et
notamment aux Stoïciens, à savoir la prétention à l’absolue certitude,
l’obsession du système parfait, l’exaltation du sage assimilé à un
dieu. Cela apparaît notamment dans la manière dont il avait élaboré
la critique de la représentation « cataleptique ». Dans le système
stoïcien, celle-ci a trois caractéristiques : elle est actuelle – c’est-à-dire
qu’elle provient d’un objet réel –, elle est conforme à cet objet, et elle
est telle qu’elle ne pourrait pas être la même si elle provenait d’autre
chose que de cet objet. En concentrant toute sa dialectique sur cette
dernière clause, qu’il avait même, si l’on en croit Cicéron, obligé le
Stoïcien Zénon à formuler, Arcésilas ne s’attaquait pas seulement au
sensualisme des Stoïciens. En effet, lorsqu’il s’efforçait de démontrer
qu’à toute représentation peut en correspondre une autre qui lui est
en tout point identique et qui provient d’un autre objet – c’est le cas
de la confusion de deux jumeaux –, ou d’un non-être (rêves,
hallucinations), il mettait en cause tout un système fondé sur la
confiance instinctive dans les données de la nature et qui établissait
une continuité dans la certitude, depuis la confiance première dans
les sens jusqu’à cette raison parfaite et inébranlable qu’est la sagesse.
Carnéade
L’inspiration d’Arcésilas fut perpétuée, et sur certains points
modifiée, par Carnéade. La postérité a surtout retenu de lui qu’il
participa à l’ambassade envoyée par Athènes à Rome en 155, pour
tenter d’obtenir l’allègement d’une amende qui lui avait été imposée
à la suite du saccage de la ville d’Oropos. Cette ambassade avait
pour particularité d’être composée de trois philosophes : outre
Carnéade, scholarque de l’Académie, Critolaos et Diogène de
Babylone, respectivement scholarques du Lycée et du Portique.
Carnéade avait fasciné le public romain par sa virtuosité oratoire, en
défendant, puis en critiquant la vertu de justice, ou plutôt les
diverses définitions philosophiques de celle-ci. L’épisode romain fut
un succès diplomatique : Caton le Censeur, craignant de voir les
philosophes détourner la jeunesse romaine des vertus ancestrales,
demanda au Sénat de régler l’affaire au plus vite, ce qui fut fait au
bénéfice d’Athènes. Toutefois, l’ambassade de 155 a longtemps
accrédité l’image d’un Carnéade proche des Sophistes, puisque
ayant en commun avec eux la pratique, fort peu platonicienne, de
l’antilogie. De nombreuses recherches récentes ont permis d’établir
qu’en dépit de certaines ressemblances superficielles, Carnéade
n’avait vraiment rien d’un Gorgias.
Du point de vue de la philosophie de la connaissance, Carnéade
est présenté comme le fondateur du probabilisme, c’est-à-dire d’un
système de hiérarchisation des représentations en fonction de leur
degré de vraisemblance, puisqu’il estimait qu’on ne peut affirmer
avec certitude d’aucune représentation qu’elle est vraie. Toutefois, ce
terme de « probabilisme » doit être utilisé avec précaution, car il
contient toutes les connotations modernes – et notamment
mathématiques de la probabilité – alors que Carnéade raisonnait
uniquement à partir du sentiment de vérité que les représentations
produisent en nous. Le terme de « probable » nous vient de Cicéron,
qui a été le créateur de la langue philosophique latine et qui a choisi
un terme qu’il avait déjà beaucoup utilisé dans sa réflexion sur la
rhétorique. Mais par « probable », Cicéron traduit à la fois eulogon et
pithanon, alors qu’ils ont correspondu à des moments différents de la
pensée de la Nouvelle Académie. On a depuis fort longtemps
remarqué que dans les témoignages concernant Carnéade, on trouve
à la place du concept d’eulogon, qu’utilisait Arcésilas, celui de
pithanon (littéralement « persuasif ») qui ne faisait plus directement
référence à l’activité de la raison, mais au sentiment de vérité que
l’on éprouve devant la plupart des représentations. Carnéade avait
repris et complété la critique élaborée par Arcésilas de la
représentation « compréhensive », faisant observer notamment qu’il
n’existe aucun critère de la vérité des représentations, puisque la
représentation, qui devrait révéler simultanément l’état du sujet et la
réalité de l’objet extérieur, est souvent une source d’erreurs. Mais il
mettait également en question la capacité de la raison à parvenir à la
vérité et affirmait douter des principes mêmes des mathématiques.
Sa dialectique utilisait comme instrument privilégié le sorite, c’est-à-
dire ce sophisme permettant de passer insensiblement d’une chose à
son contraire. Toutefois, ce refus radical d’admettre l’existence d’un
critère de la connaissance entraînait de la part des adversaires de
l’Académie l’accusation de rendre toute vie impossible. Carnéade
définit donc un critère pratique en se fondant sur le sentiment de
vérité que produisent les représentations, mais aussi sur la capacité
de la raison à effectuer un travail de vérification. Il établissait ainsi
une hiérarchie, au sommet de laquelle il plaçait la représentation qui
donne un sentiment de vérité, qui n’est contredite par aucune autre
et qui a fait l’objet d’une vérification. Carnéade assumait-il son
« probabilisme », ou celui-ci ne doit-il être interprété qu’en termes de
dialectique antistoïcienne, puisque le concept de pithanon
appartenait lui aussi à la gnoséologie de cette école ? À vrai dire, les
deux aspects de sa pensée sont indissociables. Dialectiquement,
Carnéade voulait certainement prouver aux Stoïciens qu’à l’intérieur
même de leur système ils disposaient d’éléments leur permettant de
faire l’économie d’un dogmatisme impossible à assumer, puisque
contredit par de fréquentes expériences. Mais, par-delà cette
dialectique antistoïcienne, l’Académicien voulait sans doute aussi
réhabiliter, à un moment où la philosophie était massivement
dogmatique, une conception de l’acte de penser dans laquelle
l’incertitude n’apparaissait plus comme une tare, mais au contraire
comme la marque d’une exigence et comme la condition d’un
progrès.
Carnéade ne fut pas seulement un philosophe de la connaissance.
Sa réflexion porta aussi sur les deux autres parties de la philosophie,
l’éthique et la physique. Dans le premier domaine, il s’efforça sans
relâche de montrer les conséquences contradictoires auxquelles
aboutissait la prétention stoïcienne de fonder la morale sur la
pulsion naturelle qui fait que tout ce qui est vivant cherche dès sa
naissance à persévérer dans son être. Pour les Stoïciens, l’éthique
n’était rien d’autre que le passage d’un accord instinctif avec la
nature à un accord fondé sur la raison. Carnéade, dans une certaine
tradition platonicienne, répliquait que la tendance naturelle n’est pas
source de sagesse, mais d’égoïsme et de violence. Et, de même, en ce
qui concerne la physique, il démontrait que, si les Stoïciens étaient
aussi rigoureux qu’ils prétendaient l’être, ils devaient, à partir de
leurs propres prémisses – l’observation de la nature, la prise en
compte des croyances concernant celle-ci et les dieux – ne plus croire
à l’existence d’une raison universelle gouvernant le monde au profit
des hommes, mais aboutir à la conclusion que Dieu n’existe pas et
que tout se fait et se défait par la simple dynamique des forces. Pour
Carnéade, l’enracinement stoïcien de la raison dans la sensation et
dans l’instinct aboutissait à la négation de tout ordre véritablement
rationnel. Bien qu’aucun témoignage ne fasse état d’une référence
dogmatique de l’Académicien à Platon, il est certain que la mise en
cause systématique du rationalisme immanentiste des Stoïciens
laissait comme issue possible le recours à une pensée de la
transcendance. En ce sens, on peut dire que le moyen-platonisme,
qui se développera à partir du Ier siècle de notre ère, se situe dans
une certaine continuité par rapport à la Nouvelle Académie.
Antiochos d’Ascalon
Avant même l’exil de Philon à Rome, l’école platonicienne avait
connu une scission importante avec le départ d’Antiochos
d’Ascalon, qui prétendait retrouver l’inspiration de l’Ancienne
Académie par-delà cette Nouvelle Académie qu’il avait fini par
considérer comme une parenthèse aberrante dans l’histoire du
platonisme. Les choses eussent été relativement simples si Antiochos
s’était contenté de commenter les œuvres de Speusippe ou de
Xénocrate. Mais son but n’était pas seulement de restaurer une
interprétation dogmatique du platonisme. Il avait, en effet,
l’ambition de rendre à l’Académie sa prééminence sur les écoles
hellénistiques, essentiellement le Lycée et le Portique, en démontrant
que celles-ci n’avaient en règle générale apporté que des innovations
terminologiques. Le consensus de ces écoles, dont Antiochos avait
fait le maître mot de sa philosophie, répondait à des arrière-pensées
rien moins qu’innocentes : il s’agissait de réduire Aristote et Zénon à
des épigones talentueux et quelque peu turbulents de
l’insurpassable Platon. Cette stratégie comportait néanmoins un
risque, celui d’être considéré lui-même beaucoup plus comme un
Péripatéticien ou comme un cryptostoïcien que comme un véritable
Académicien. De fait, Cicéron, qui l’appréciait beaucoup, mais qui,
dans les Académiques, reprend contre Antiochos les arguments de la
Nouvelle Académie, lui a rendu un très mauvais service en le
qualifiant d’« authentique Stoïcien », thème repris par beaucoup de
ceux qui se sont intéressés à ce philosophe. Or, le moins que l’on
puisse dire est qu’une telle formule ne rend pas compte de la
personnalité philosophique d’Antiochos.
Dans le domaine de l’éthique et de la physique, sa méthode
consistait à démontrer que les Péripatéticiens et les Stoïciens s’étaient
contentés de donner une présentation nouvelle de ce qui existait déjà
chez Platon et chez ses successeurs de l’Ancienne Académie. Il
n’hésitait pas à revendiquer comme des inventions de l’Académie
des concepts étrangers à l’école platonicienne, tel celui d’oikeiôsis,
d’adaptation immédiate de l’être vivant à sa propre nature. De
même, sa présentation de la physique de l’Ancienne Académie
contient bon nombre de propositions dont l’origine est à chercher
beaucoup plus chez Zénon que chez Speusippe ou chez Xénocrate.
Mais cet Antiochos, prétendument proche du stoïcisme, mena une
polémique implacable contre les Stoïciens sur tous les points de
doctrine qu’il ne pouvait vraiment pas attribuer à l’Académie. À titre
d’exemple, le livre IV du De finibus de Cicéron montre avec quel
acharnement il combattit l’idée spécifiquement stoïcienne que le
bonheur du sage est totalement indépendant de l’environnement
extérieur.
Dans le domaine de la connaissance, notre perception de la
philosophie d’Antiochos est quelque peu brouillée par le fait que
celui-ci utilisa pour combattre le scepticisme de la Nouvelle
Académie les arguments des Stoïciens eux-mêmes. Cela a conduit
certains historiens de la philosophie à penser que, sur ce point,
Antiochos s’était rallié totalement à la doctrine stoïcienne,
considérant que celle-ci représentait réellement un progrès par
rapport à l’Ancienne Académie. Les témoignages, pris dans leur
ensemble, incitent à plus de prudence. Antiochos exposait avec
sympathie l’idéalisme platonicien, et attribuait à l’Ancienne
Académie l’idée que la certitude ne doit pas être recherchée dans les
sens indépendamment de la raison, ce qui était une condamnation
implicite de la théorie stoïcienne de la « représentation
compréhensive ». Il y a lieu de croire donc que, dans ce domaine
aussi, le stoïcisme n’était pour lui qu’un instrument dans une
stratégie d’ensemble dont il pensait qu’elle démontrerait de manière
incontestable la supériorité du platonisme.
Antiochos, qui prétendait retrouver la véritable doctrine de
l’Académie, ne fut jamais reconnu comme chef de l’école
platonicienne, parce que le lien institutionnel, qui, par-delà les
changements doctrinaux, avait relié entre eux les scholarques de
Platon à Philon de Larissa, s’était rompu avec le départ de celui-ci
vers Rome. L’école fondée par Antiochos à Athènes survécut
quelque temps à sa mort, puis, pendant plus d’un siècle, il n’est plus
question dans aucune source de philosophes académiciens à
Athènes. Pendant toute cette période se développa en différents
points du monde romain le moyen-platonisme, dont l’une des
caractéristiques fut de fonctionner sans ce noyau central que
constituaient les écoles hellénistiques. Y eut-il une restauration de
l’Académie, au IIe siècle de notre ère, grâce à Ammonios, le maître de
Plutarque ? Le problème est controversé et ne change rien au fait
qu’avec le départ de Philon de Larissa, c’est un certain mode
d’organisation de la réflexion philosophique qui avait définitivement
disparu.
Nous pouvons tenter maintenant de répondre à notre question
initiale : qu’est-ce qui, malgré les changements survenus dans
l’Académie, différencie un Académicien d’un autre philosophe grec ?
Un premier élément de réponse nous est apporté par la référence
à Platon. Celle-ci est évidente dans l’Ancienne Académie. Elle est un
peu plus problématique dans la Nouvelle Académie, dans la mesure
où il est quand même un scholarque – et non le moindre puisqu’il
s’agit de Carnéade – pour lequel aucun témoignage ne fait état d’une
adhésion à la figure du Fondateur. Il est même un passage, sur la
source duquel on peut discuter, du De republica de Cicéron, où il
nous est dit que Carnéade avait critiqué la conception platonicienne
de la justice. Nous ne sous-estimons pas ces difficultés. Néanmoins,
le fait qu’Arcésilas et Philon de Larissa se soient explicitement
réclamés de Platon, la mention dans le De oratore de l’étude du
Gorgias sous la direction de Charmadas, disciple de Carnéade,
permettent de penser que l’œuvre platonicienne est restée, d’un bout
à l’autre de l’histoire de l’Académie, une source vivante
d’inspiration.
Si l’admiration pour Platon et le sentiment d’être le légitime
dépositaire de son œuvre ont constitué les éléments fondamentaux
de l’identité académicienne, ils n’ont jamais été compris comme
impliquant un devoir d’adhésion sur quelque point de doctrine que
ce soit. Au demeurant, la pensée platonicienne, si diverse, si difficile
à figer, préservait d’emblée les Académiciens du respect quasi
religieux pour un corps de doctrine, qui fut souvent de mise dans les
écoles hellénistiques. Que cette liberté de la recherche ait été perçue
comme essentielle à la tradition de l’Académie ne fait pas de doute.
Mais, dans l’Ancienne Académie, cette recherche semble avoir été
souvent orientée par le désir de « venir au secours de Platon » –
quitte à le contredire – sur des points critiquables de sa pensée. On
doit également souligner que la pensée de l’Académie a été
constamment dialectique, en ce sens qu’elle s’est toujours
développée dans la confrontation avec un adversaire privilégié :
Aristote pour l’Ancienne Académie, le stoïcisme pour la Nouvelle.
Or, dans un cas comme dans l’autre, l’interlocuteur est un
philosophe non pas radicalement étranger à la tradition
platonicienne, mais issu de celle-ci et ayant pris son autonomie en
utilisant la critique de Platon pour se définir.
Est-il possible de trouver dans l’histoire de l’Académie, non pas
un dogme, mais une orientation philosophique commune à tous les
scholarques ? On doit probablement la chercher dans ce que l’on
peut appeler « le sens de la transcendance », même si cela ne va pas
sans difficulté. La référence à la transcendance est très nette dans
l’Ancienne Académie – si l’on excepte Polémon, pour lequel nous
avons très peu de témoignages – qui a eu le souci d’exprimer le
caractère extra-universel des réalités essentielles. Elle n’apparaît, en
revanche, que de manière marginale dans les témoignages
concernant la Nouvelle Académie. Néanmoins, on peut penser que
la trancendance est présente chez elle « en creux », dans la mesure
où, si elle a combattu sans relâche l’immanentisme stoïcien, elle n’a
jamais, en revanche, critiqué le Platon des Formes. De ce fait,
l’idéalisme demeurait une issue aux apories que les Académiciens
dénonçaient dans la confusion stoïcienne de la nature et de la raison.
La complexité extrême de l’évolution des systèmes
philosophiques rend difficile « un bilan » de l’Académie. Rappelons
simplement que l’Ancienne Académie, que l’on eût pu croire oubliée
après Arcésilas et Carnéade, fut une des sources d’inspiration du
néoplatonisme, lequel influença lui-même fortement la pensée
chrétienne. Et les concepts élaborés par la Nouvelle Académie
serviront au néopyrrhonisme, dont le rôle fut si important dans
l’histoire de la pensée occidentale – notamment à la Renaissance – et
aussi, dans une moindre mesure, au moyen-platonisme, c’est-à-dire
à des auteurs aussi divers que Philon d’Alexandrie, Apulée ou
Plutarque. L’incapacité de l’école platonicienne à se fixer un corps de
doctrine pouvait paraître la désavantager à l’époque des grands
dogmatismes hellénistiques. Elle s’est révélée avec le temps porteuse
de richesse et de variété.
Carlos LÉVY
ORIENTATION BIBLIOGRAPHIQUE
Logique
L’Âme
Selon la définition d’Aristote, l’âme est la forme de l’être vivant.
Elle n’est donc ni une entité séparable et immatérielle (comme le
voulait Platon) ni un ingrédient matériel distinct dans la créature
entière (comme le soutiendra par exemple Épicure). Cependant,
l’âme selon Aristote n’est pas simplement un produit de
l’arrangement des parties du corps, réductible à ces parties ; le corps
s’explique par l’âme, et d’une manière générale les composés de
matière et de forme doivent s’expliquer par la forme. Un corps
humain a une certaine structure, qui est telle qu’elle permet à l’être
humain de fonctionner selon son mode propre.
Si le corps s’explique par l’âme et non l’inverse, cela ne signifie
pas qu’un certain arrangement des parties du corps ne soit pas une
condition nécessaire pour l’existence d’un certain type d’âme. Ainsi,
dans le cas de l’âme perceptive, on reconnaît avec évidence l’organe
corporel qui est en relation avec telle faculté : l’œil pour la vision,
l’oreille pour l’audition. On voit avec moins d’évidence comme relier
l’âme au corps en général – comment âme et corps interagissent,
mais aussi, quelle partie du corps joue un rôle particulièrement vital.
Aristote avait cru reconnaître que le moyen physique par lequel
l’âme opère est un « souffle (pneuma) congénital », et que le cœur est
un organe essentiel pour la vie, le premier à se développer dans
l’embryon. Seul parmi toutes les facultés de l’âme, l’intellect n’était
relié à aucun organe particulier ; et, dans le fameux chapitre III, 5, du
traité De l’âme, Aristote établit une distinction dans l’intellect entre
« celui qui produit toutes choses » et « celui qui devient toutes
choses », présentant, semble-t-il, le premier comme impérissable, à la
différence du second. Tout l’enjeu du débat sur l’âme dans l’école
aristotélicienne est de clarifier ces questions, et les différentes
tentatives en ce sens furent influencées, à des degrés divers, par les
attitudes des contemporains et les positions des autres écoles
philosophiques. Il sera plus commode de considérer d’abord la
nature de l’âme entière et ses rapports avec le corps, et ensuite,
séparément, la question de l’intellect.
Parmi les disciples immédiats d’Aristote, Dicéarque pensait que
l’âme est une « harmonie » ou un mélange des quatre éléments dans
le corps, opinion qui, selon certains de ceux qui la rapportent,
équivaut à nier purement et simplement l’existence de l’âme.
Aristoxène, lui aussi, ne voyait dans l’âme qu’une harmonie ou une
mise en accord du corps.
Aristote et Théophraste avaient utilisé le pneuma pour rendre
compte de certains processus corporels ; pour Straton, les activités de
l’âme s’expliquent par un pneuma qui se répand à travers le corps à
partir de la partie « gouvernante », qu’il situe non pas dans la
poitrine (comme le faisaient Épicure et les Stoïciens), mais dans la
tête, ou plus précisément dans l’espace entre les sourcils. Tertullien
illustre la théorie de Straton par une comparaison avec l’air qui passe
par les trous d’une flûte ; les Stoïciens utiliseront l’exemple des
tentacules du poulpe. Straton est ici influencé par des découvertes
contemporaines en médecine et en anatomie. Toute sensation,
affirme-t-il, est ressentie dans la partie « gouvernante » de l’âme, et
non dans les extrémités du corps ; et toute sensation implique
pensée. On a pu opposer Straton et Aristote sur ce sujet, en
soulignant que pour le premier, toute pensée en dernière analyse
dérive de la sensation ; mais il faudrait d’abord être sûr qu’Aristote
lui-même voyait dans l’intuition un mode de cognition indépendant
de la sensation, ce qui est pour le moins contestable.
Ariston de Céos, successeur de Lycon, a peut-être souligné la
distinction entre âme rationnelle et irrationnelle, contre les Stoïciens,
mais dans un contexte relevant de l’éthique plutôt que de la théorie
de l’âme. Selon Critolaos, l’âme est constituée d’éther, cinquième
élément. Cicéron affirme qu’Aristote identifiait âme et éther, mais
c’est peut-être là le résultat d’un malentendu, facilité par le fait que
d’autres écoles avaient répandu l’idée que l’âme est matière.
Selon Andronicos, l’âme est la puissance qui provient du
mélange des éléments corporels ; il est peut-être suivi en cela par
Aristote de Mytilène, maître d’Alexandre d’Aphrodise, et en tout cas
par Alexandre lui-même (De anima). On a reproché à Alexandre
d’interpréter Aristote dans un sens matérialiste, en faisant de l’âme
une forme, certes, mais en considérant la forme comme secondaire
par rapport à la matière. La façon dont il construit sa théorie semble
bien indiquer qu’à ses yeux la forme en général, et l’âme en
particulier, sont le produit d’un ajustement matériel : sa théorie de
l’âme apparaît comme le couronnement d’une analyse qui part des
simples éléments physiques, et se construit par des structures de
plus en plus complexes. Il n’y a cependant rien de non aristotélicien
dans l’affirmation qu’un certain arrangement du corps est une
condition nécessaire pour l’existence de l’âme. Et il se peut
qu’Alexandre ait voulu défendre une position authentiquement
aristotélicienne contre des interprétations plus matérialistes. La
théorie d’Alexandre exclut sans aucun doute toute immortalité
personnelle ; mais c’est aussi le cas de celle d’Aristote, à l’exception
possible des remarques obscures de son De l’âme, III 5 sur l’Intellect
Agent. Alexandre a comparé l’âme, comme principe de mouvement,
à la « nature » des corps simples (par exemple, pour la Terre, la
pesanteur). En recourant à cette notion de « nature » (conception
bien aristotélicienne), il explique l’application aux corps simples de
l’affirmation d’Aristote : tout ce qui se meut est mû par quelque
chose (Physique, VIII, 4), qu’il défend contre Galien dans un traité
conservé uniquement en arabe. On peut y voir l’une des origines de
la théorie de l’impulsion, utilisée par Philopon pour expliquer le
mouvement forcé des projectiles (sur ce dernier point, Alexandre
s’en tient à l’opinion aristotélicienne orthodoxe : ce phénomène a
pour cause la transmission du mouvement par l’air situé derrière le
projectile), théorie qui, de Philopon, est passée dans la science
médiévale.
L’intellect
Textes et traductions
Théophraste
Histoire des plantes, Suzanne Amigues éd., 4 vol., Paris, Les Belles
Lettres, coll. « Universités de France », 1988.
De causis plantarum, Benedict Einarson & George K.K. Link (eds),
Cambridge, Mass., Harvard University Press, Loeb Classical Library.
vol. I, 1976 ; vol. II et III, 1990.
Metaphysics, W.D. Ross & F.H. Fobes ed., Oxford University Press,
1929.
Métaphysique, André Laks & Glenn Most (ed.), Paris, Les Belles
Lettres, coll. « Universités de France », 1993.
Fragments, William W. Fortenbaugh, Pamela M. Huby, Robert W.
Sharples (grec et latin) et D. Gutas (arabe) [ed.], Theophrastus of
Eresus, 2 vol., Leyde, Brill, 1992.
Études
Générales
LYNCH, John P., Aristotle’s School, Berkeley, University of California
Press, 1972.
WEHRLI, Fritz, « Der Peripatos bis zum Beginn der römischen
Kaiserzeit », in Ueberweg Friedrich & Flashar, Helmut (ed.),
Grundriss der Geschichte der Philosophie. Die Philosophie der Antike, III,
Bâle, Schwabe, 1983, p. 459-599.
Théophraste
REGENBOGEN, Otto, art. « Theophrastos », in Pauly-Wissowa,
Realenzyklopädie der Altertumswissenschaft, Suppl., 7, 1940, col. 1354-
1562.
Nombreux articles sur divers aspects de l’œuvre de Théophraste
dans William W. Fortenbaugh et al., Rutgers University Studies in
Classical Humanities (= RUSCH), New Brunswick, Transaction, 2
(1985), 3 (1988), 5 (1992) et 8.
Straton
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L’école absorbée :
Porphyre et les Néoplatoniciens
d’Athènes jusqu’à Simplicius
Textes et traductions
De nombreux ouvrages des Pères sont traduits en français (avec
texte grec ou latin, introductions et notes) dans la collection des
« Sources chrétiennes » (Paris, Éditions du Cerf). Les Apologies de
Justin sont traduites par A. Wartelle (Paris, Études augustiniennes,
1987), et le Dialogue avec Tryphon par G. Archambault (Textes et
documents 8 et 11, Paris, Picard, 1909, et Justin martyr, Œuvres
complètes, Paris, Migne, 1994). Une traduction nouvelle, annotée, des
Homélies clémentines, par Calvet M.-A., Côté D., Geoltrain P., Le
Boulluec A., Pouderon B., Schneider A., a paru dans la
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L’hellénisme romanisé : Cicéron
Nous n’insisterons pas ici sur les années de formation qui, grâce
au soin apporté par le père à l’éducation de ses enfants, furent d’une
exceptionnelle richesse. Parallèlement à l’apprentissage des
pratiques du forum, auquel l’initièrent, entre autres, les deux grands
orateurs Crassus et Antoine, Cicéron suivit d’abord l’enseignement
de l’Épicurien Phèdre, ce qui contribue à expliquer la relation
finalement assez complexe qu’il entretint avec le Jardin. Ce furent
ensuite les leçons du Stoïcien Diodote et celles de l’Académicien
Philon de Larissa, scholarque de l’école platonicienne venu
s’installer à Rome en 88 avant J.-C., dont l’enseignement constitua
pour lui une expérience très forte, qu’il décrit ainsi dans le Brutus :
« À la même époque, le chef de l’Académie, Philon, ayant fui
Athènes à cause de la guerre de Mithridate… et étant venu à Rome,
je me livrai à lui tout entier : je m’étais pris d’un amour incroyable
pour la philosophie. » Son éducation s’acheva par le voyage de
formation en Grèce et en Asie Mineure, lequel était devenu
traditionnel pour les Romains de bonne famille, qui pouvaient ainsi
se plonger dans le système universitaire mis au point depuis
longtemps par les détenteurs du savoir grec. Il y rencontra
Antiochos d’Ascalon, tenant d’un platonisme dogmatique renforcé
par des éléments péripatéticiens, à l’opposé de celui de Philon, mais
aussi Posidonios de Rhodes, le plus célèbre Stoïcien de son époque,
et également des rhéteurs, dont Apollonios de Rhodes qui lui donna
le goût de l’équilibre entre la sécheresse de certains orateurs attiques
et la profusion des orateurs asianistes. Le voyage en Asie, le retour
aux multiples activités du forum, ne mirent pas fin aux contacts de
Cicéron avec le monde de la culture grecque. Il hébergea longtemps
chez lui Diodote, avec lequel il s’entretenait notamment de
dialectique. La défense du poète Archias fut pour lui l’occasion de
plaider non seulement pour un individu mais pour une intégration
de l’hellénisme au mos maiorum, les activités culturelles devenant le
contenu privilégié des moments d’otium. Un épisode symbolique
survint en 51 avant J.-C. et nous est raconté dans la correspondance
(Fam. V, 11, 6). C’est à Cicéron que l’Épicurien Patron demanda
d’intervenir auprès de Memmius pour éviter qu’une villa ne fût
construite à la place de la maison d’Épicure. Situation hautement
paradoxale, puisque visiblement ce Memmius, pourtant, le
destinataire du De rerum natura de Lucrèce, que le poète avait voulu
convertir à la vérité épicurienne, ne se souciait pas outre mesure du
patrimoine de l’école, dont la protection devait être prise en charge
par l’Académicien Cicéron. Alors que la Quellenforschung, l’érudition
germanique du XIXe siècle et du début du XXe, aujourd’hui
discréditée, s’était fondée sur l’idée de sources écrites précises pour
toutes les œuvres philosophiques cicéroniennes, il apparaît donc
aujourd’hui qu’une place doit être accordée aux échanges que
Cicéron a pu avoir tout au long de sa vie avec des savants grecs qu’il
rencontrait et pour lesquels sa maison était un lieu permanent
d’accueil. Reste que cet apport demeure difficile à évaluer, tout
comme les connaissances que Cicéron a pu acquérir par d’éventuels
manuels doxographiques, tel celui que Michelangelo Giusta a tenté
de reconstituer pour les doctrines morales. Si la question des sources
conserve donc, probablement à tout jamais, son opacité, il n’en reste
pas moins vrai que beaucoup d’œuvres grecques sont mentionnées
dans le corpus cicéronien, et notamment dans la correspondance.
Cela permet d’entrevoir le lecteur que fut Cicéron, un lecteur
boulimique, mais qui, parce qu’il vit le plus souvent dans une
activité débordante, ne prend pas le temps de rendre compte
amplement de ce qu’il lit. En fait, on trouve dans ses lettres des
mentions d’ouvrages techniques, comme la cosmographie
d’Alexandre d’Éphèse, qu’il reçut en juillet ~59 et sur laquelle il
porta un jugement extrêmement négatif, tout en reconnaissant que
cette lecture pouvait avoir quelque utilité, ou encore des ouvrages
médicaux, comme le traité que le médecin grec Nikon avait consacré
à la bonne chère. Évidemment, sa lecture pouvait également porter
sur des ouvrages de philosophie politique. Dans une lettre de ~60 (?)
[Att. II, 2, 2] il se met en scène entouré de volumes écrits par
Dicéarque sur différentes constitutions grecques et dans un courrier
de la même période, il demande à Atticus d’aller chercher chez
Quintus Cicéron un traité de Théophraste sur l’ambition. Plus tard,
après la guerre civile, il entreprend d’écrire en ~45 (Att. XII, 40, 2)
une lettre admonitoire à César, pour laquelle il utilise comme
modèles les lettres écrites par Aristote et par Théopompe à
Alexandre. En ce qui concerne les œuvres de philosophie théoriques
écrites après cette date, nous pouvons avoir une idée de sa manière
de travailler sur les textes grecs à partir de la scène qui est racontée
au début du livre III du De finibus. Cicéron réside dans sa villa de
Tusculum, il a besoin de livres qui se trouvent dans la bibliothèque
du jeune Lucullus, il s’y rend et il y trouve Caton assis entouré
d’ouvrages stoïciens. Lui-même a besoin de traités aristotéliciens,
dont il ne précise pas le titre, ce qui est bien regrettable car nous
avons du mal à déterminer avec précision la connaissance qu’il
pouvait avoir de l’œuvre du Stagirite, en dehors de rares indications
précises comme celle de l’Éthique à Nicomaque en Fin. V, 12. Quoi
qu’il en soit, nous avons là le portrait de deux personnages qui sont
plus que des amateurs éclairés, de véritables chercheurs dont la
pratique n’est pas fondamentalement différente de celle des
chercheurs d’aujourd’hui. Pour le reste, dans la plupart des œuvres
qu’il écrit alors, Cicéron ne révélera pas la documentation sur
laquelle il a travaillé, même s’il donne habilement quelques pistes.
Ainsi, dans les Academica, on trouve la mention à la fois des livres
romains écrits à Rome par Philon de Larissa, dans lesquels il
renonçait au doute radical de ses prédécesseurs pour se concentrer
sur la critique du stoïcisme, insérée dans une perspective
platonicienne, et celle du livre, le Sosus, qu’Antiochos d’Ascalon
écrivit pour répondre à ces innovations. Une seule exception, le De
officiis, pour la rédaction duquel Cicéron lui-même nous dit qu’il a
adapté l’ouvrage sur le devoir du Stoïcien Panaitios, en le
restructurant, c’est-à-dire en passant de deux livres à trois. Mais,
comme Panaitios n’avait pas traité de la question du conflit, au
moins apparent, entre l’utilité et la beauté morale, Cicéron ne se
contenta pas de se procurer l’ouvrage que le disciple de Panaitios,
Posidonios, avait écrit sur cette question, il demanda à un autre
Stoïcien, Athénodore Caluus, de lui en faire le résumé. Le travail se
fit donc à deux niveaux, la fiche de lecture élaborée par une sorte
d’assistant et le livre lui-même. L’ensemble se révéla insuffisant, si
bien que Cicéron décida de s’atteler au traitement de cette question
et que c’est avec ses propres moyens qu’il écrivit le dernier livre du
De officiis. Le Romain ne se contente pas de traduire et de commenter
l’œuvre de Panaitios, il y ajoute, comme il l’a revendiqué ailleurs,
son iudicium, son esprit critique. En cette fin de vie, il se place par
rapport au savoir grec dans une position de réflexivité décomplexée.
Textes et traductions
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Pensée grecque, pensée arabe
Continuité
Les conquêtes arabes du Proche-Orient et de l’Égypte ont lieu
moins d’un siècle après les derniers enseignements connus à
Alexandrie. Le général ‘Amr ibn al-‘Āṣ achève la conquête de
l’Égypte en 643 et l’on peut situer l’activité des derniers professeurs
alexandrins, Élias, David et Stephanus, au milieu du VIe siècle.
L’intervalle est donc relativement bref. Les Arabes s’installent dans
des zones qu’on peut encore considérer comme « tardo-antiques ».
Les Omayyades, dont la capitale est Damas, adoptent l’organisation
administrative byzantine qu’ils trouvent sur place, en Syrie, et une
partie de leurs fonctionnaires demeurent hellénophones. Le Proche-
Orient syriaque traduit des textes grecs depuis déjà plusieurs siècles.
Les populations lettrées des milieux urbains sont donc parfaitement
habituées, au moment où les Omayyades s’établissent en Syrie, à
traduire le grec en une langue sémitique. Un bilinguisme diffus
estompe les fractures entraînées par l’ordre nouveau.
Les polémiques théologiques chrétiennes, encore très vives,
véhiculent en outre un bagage philosophique élémentaire, puisé à
l’enseignement alexandrin, qui favorise la conservation et la pratique
de certains textes de base. Les milieux lettrés syriaques connaissent
donc les parties les plus élémentaires de la logique d’Aristote (la
syllogistique la plus simple des Premiers Analytiques) et les
distinctions ontologiques élémentaires – mais fondamentales –
contenues dans l’Isagogè de Porphyre et les Catégories d’Aristote.
Cette continuité a des effets évidents sur l’hellénisme arabe.
Lorsqu’on tente de dresser la liste des œuvres grecques traduites ou
paraphrasées en arabe, on s’aperçoit qu’il s’agit, à quelques
exceptions près – quelques dialogues de Platon et certains textes
néoplatoniciens – de tout ce qui était disponible à la fin de
l’Antiquité en matière de philosophie, de sciences exactes et de
médecine. Une telle systématicité dans l’acquisition reflète certes
avant tout une politique volontaire d’assimilation. Mais elle serait
tout simplement impossible si les Arabes ne s’étaient pas installés là
même où la philosophie et les sciences se pratiquaient depuis des
siècles – en Égypte et en Grande Syrie. Les sources arabes anciennes
conservent d’ailleurs la mémoire de découvertes importantes de
textes grecs à Damas : la moitié du traité De la démonstration de
Galien (son œuvre maîtresse aujourd’hui perdue en grec comme en
arabe) ou la version corrigée par l’Alexandrin Eutocius des quatre
premiers livres des Coniques d’Apollonius. On se rend compte, en
lisant par exemple le Fihrist – un catalogue de livres composé au Xe
siècle par un libraire de Bagdad, al-Nadīm – que les Arabes
disposaient encore à cette date de très nombreux textes inconnus des
Byzantins contemporains. La géographie, en cela, a certainement
aidé l’histoire.
Une continuité aussi évidente a produit son schème
historiographique, qui a été structurant dans les études de
philosophie arabe au cours du XXe siècle. C’est celui que l’on peut
dénommer « d’Alexandrie à Bagdad », d’après le titre d’une
contribution célèbre de l’historien de la médecine M. Meyerhof,
« Von Alexandrien nach Bagdad » (1930). Le titre parle de lui-même :
les élites de l’Islam auraient pratiqué la philosophie et les sciences en
vertu d’un dynamisme irrésistible d’un triple donné, historique,
géographique et culturel. La philosophie et la science bagdadiennes
seraient ainsi la simple résultante d’un processus de transmission
d’une entité circonscrite et identifiable : les corps de doctrine
alexandrins. De manière tacite ou avouée, ce schème est celui avec
lequel ont travaillé, et travaillent encore, maints chercheurs de la
discipline.
Il est dès lors piquant de remarquer que ce schème n’est que la
version affadie d’une construction historiographique éminemment
philosophique, surgie vers 900 du cerveau du philosophe Abū Naṣr
al-Fārābī (ca 870-950). Celui-ci tente en effet de ressaisir, dans ce qui
en lui fait époque, le mouvement de transfert du savoir grec au
monde qui est le sien. Contrairement à ce qu’une lecture rapide – ou
orientée – peut laisser croire, le philosophe arabe ne soutient
pourtant pas du tout la même thèse que M. Meyerhof. Il ne conçoit
pas la transmission comme un long fleuve tranquille, une trajectoire
continue d’un émetteur à un récepteur, mais comme une tentative de
recollement par continuité, rendue nécessaire par des ruptures
historiques majeures, qui s’accompagnent toujours d’une
déperdition du sens. Pour al-Fārābī, le présent est séparé des anciens
Grecs par une coupure, qui fait, précisément, que nous ne sommes
plus des Grecs. Mais cette coupure n’est pas telle qu’elle nous
interdise tout accès aux textes fondateurs. En mobilisant des efforts
considérables, nous pouvons la surmonter. C’est l’une des tâches
principales de la discipline philosophique.
Rupture
Et pourtant, la philosophie arabe n’est pas la simple poursuite
historique de la philosophie grecque. On ne saurait trop insister, tout
d’abord, sur la rupture linguistique induite par les bouleversements
politiques. Les élites musulmanes, y compris les théologiens et les
philosophes, n’ont jamais eu la moindre vélléité d’apprendre le grec
pour pouvoir lire les textes fondateurs de leur discipline dans leur
langue originale. Lire le grec, semblent-ils toujours penser, voilà
l’affaire des traducteurs ! L’appartenance socioculturelle très unitaire
de ces derniers – il ne s’agit jamais de musulmans, mais toujours de
chrétiens ou de sabéens – n’est d’ailleurs sûrement pas le fruit du
hasard. Les philosophes et les savants arabophones se déclarent
satisfaits quand la traduction est bonne. Certes, al-Fārābī, dans le
Livre des lettres, a des réflexions du plus haut intérêt sur la langue
grecque, et se montre parfaitement conscient des contraintes
sémantiques et syntaxiques qui ont conduit les traducteurs de son
temps à produire une langue à certains égards artificielle, calquant le
mieux possible, par exemple, les différents emplois possibles du grec
estin, « est », mot sans équivalent satisfaisant en arabe. Sans
s’attarder ici sur l’intérêt de telles réflexions – qui vont produire un
véritable débat dans la Bagdad du Xe siècle : la « philosophie » est-
elle un reflet des particularités morphologiques du grec ou le grec
est-il la langue la plus adaptée à la grammaire de la raison
humaine ? –, on se contentera de souligner qu’en dépit de cette
parfaite reconnaissance du problème, les philosophes arabes n’ont
jamais pensé qu’il exigeât de leur part un « retour au grec ».
En second lieu, les Arabes ne sont pas prisonniers d’un face-à-
face avec les anciens Grecs. Certes, ils s’en estiment – à juste titre
d’ailleurs si l’on compare, comme ils le font, le foisonnement de
disciplines savantes en arabe avec ce qui se passe au même moment
à Byzance – les héritiers intellectuels. Mais les trois premiers siècles
de l’Islam se signalent surtout par une curiosité pour l’ensemble des
cultures savantes disponibles : grecque bien sûr, mais aussi pahlavi
et sanskrite (astronomie et médecine en particulier).
Enfin, et c’est le troisième et plus redoutable obstacle aux
scénarios « continuistes », le gros des traductions du grec en arabe
(impliquant ou non le syriaque comme langue intermédiaire) n’a eu
lieu qu’environ deux siècles après la conquête arabe de la Grande
Syrie et de l’Égypte. Qui plus est, ces traductions, qui se comptent
par dizaines, n’ont lieu qu’une fois le centre de l’Empire transféré de
Damas à Bagdad, c’est-à-dire d’un monde sémitique très largement
hellénisé – qu’on pense à des personnalités comme Jean Damascène
(676-749), grand théologien grec et fonctionnaire du fisc omayyade,
ou à Théodore Abū Qurra (ca 750-825), théologien et traducteur
d’Aristote en arabe – à un monde davantage soumis à l’influence
culturelle perse. L’explication par simple capillarité s’avère donc
difficile. C’est au contraire une fois les amarres rompues avec un
hellénisme « de proximité » que le mouvement des traductions en
tant que tel – c’est-à-dire abstraction faite de quelques rares
traductions antérieures datant de la période omayyade – va naître et
croître.
Conclusion
Nous avons indiqué comment, sur des points aussi essentiels que
l’acte humain, l’infini et le continu, ou la distinction de la forme et de
ses prédicats, les discussions grecques sont utilisées dans un cadre
nouveau, produit par la nouvelle epistèmè de la théologie rationnelle
et, sans doute aussi, de l’algèbre. La philosophie arabe se caractérise
dès lors par un double mouvement qui ne va pas sans tension, une
extension de l’ontologie biologisante d’Aristote à quelque chose de
plus abstrait et formel, et une transformation d’un monde si continu
qu’il en devient parfois indéterminé en la détermination
séquentielle, fondamentalement discrète, des actes humains, des
phénomènes physiques et même des natures instanciées. On assiste
là, bien sûr, aux débuts de l’occasionnalisme dans l’histoire de la
philosophie ; mais il s’agit aussi, plus généralement, et si l’on se
méfie des étiquettes, de l’intrusion d’un Dieu omnipotent et
omniscient dans le champ purement philosophique, qui ne pouvait
qu’affecter profondément la philosophie de l’Antiquité tardive.
Nous avons aussi pu constater que ces thématiques ne sont pas
dans la simple continuité des débats grecs de l’Antiquité tardive.
Elles renouent avec eux une fois qu’elles sont elles-mêmes assez
développées pour tirer profit d’une telle confrontation – et plus
simplement, que les traducteurs arabes, formés dans un univers de
débats intellectuels intenses et autochtones, sont devenus capables
d’aborder les sommets de la philosophie grecque encore disponibles
à leur époque : Platon, Aristote et leurs commentateurs, sans oublier
la logique et l’épistémologie de Galien.
Marwan RASHED
ORIENTATION BIBLIOGRAPHIQUE
De l’Académie au médioplatonisme
Présentation de l’enseignement
des doctrines de Platon
La cosmologie d’Atticus
Conclusion
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Sophistique
Textes et traductions
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et Fernanda Decleva-Caizzi, Florence, Olschki, 1989, I, 1, p. 176-236.
ANTIPHON, Discours, texte établi et traduit par Louis Gernet, Paris,
Les Belles Lettres, 1923.
CASSIN, Barbara, Si Parménide. Le traité anonyme De Melisso Xenophane
Gorgia, Lille, PUL/MSH, 1980.
DIELS, Hermann, Die Fragmente der Vorsokratiker (texte grec, trad.
allemande des fragments), t. II, Berlin, Weidmann, 1903 ; 6e éd. rév.
par Walther KRANZ, 1952, II, p. 252-416 et 425-428.
PLATON, en particulier : Euthydème, Hippias majeur, Hippias mineur,
Gorgias, Protagoras, Théétète, Sophiste/Aristote, en particulier :
Métaphysique, IV, et Réfutations sophistiques.
UNTERSTEINER, Mario, Sofisti, testimonianze e frammenti, I-IV, Florence,
Nuova Italia, 1949-1962.
Seconde sophistique
AELIUS, Aristide, Orations, I, Orations I-II, éd. tr. C.A. Behr, Loeb
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DION DE PRUSE, dit Chrysostome, éd. trad. J.W. Cohoon, H. Lamar
Crosby, Loeb Classical Library, Londres, Cambridge/Mass., I-V,
1932-1951.
LUCIEN, éd.-trad. Harmon, Kilburn, Macleod, Loeb Classical Library,
Londres, Cambridge/Mass., I-VIII, 1913-1967.
PHILOSTRATE, The Lives of the Sophists, éd. tr. W.C. Wright, Loeb
Classical Library, Londres, Cambridge/Mass., p. 2-315, 1921.
Romans grecs et latins, textes présentés, annotés et traduits par Pierre
Grimal, Paris, Gallimard, 1958.
Études
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DETIENNE, Marcel, Les Maîtres de vérité dans la Grèce archaïque, éd.
augmentée, Paris, Agora, 1994 (1re éd. 1967).
DUPREEL, Eugène, Les Sophistes, Neuchâtel, Éd. du Griffon, 1948.
GOMPERZ, Heinrich, Sophistik und Rhetorik. Das Bildungsideal des eu
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Berlin, Teubner, 1912 (repr. Darmstadt, 1965).
GROTE, George, History of Greece, VIII, Londres, J. Murray, p. 479-544,
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HEGEL, G.W.F., Leçons sur la philosophie de l’histoire, II, La philosophie
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Textes et traductions
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BRÉHIER, Émile, SCHUHL, Pierre-Maxime, Les Stoïciens, Paris,
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CHRONOLOGIE
Repères historiques Repères culturels Repères scientifiques
1270 ( ?) : Guerre légendaire
de Troie.
ca 1200 : Première Composition des poèmes
colonisation grecque (Asie homériques (ca 850-750).
Mineure).
753 : Fondation de Rome.
750 : Deuxième colonisation Hésiode (ca 700 ?).
grecque (Occident et Orient).
593 : Réformes de Solon à Les « MILÉSIENS » : Thalès, 585 : Éclipse prédite par
Athènes. Anaximandre et Anaximène Thalès.
(ca 600-550). Anaximandre
écrit le premier traité grec en
prose vers 546.
540 : Fondation d’Élée.
Activité de PYTHAGORE (ca
532 ?).
509 : Fondation de la HÉRACLITE (ca 545-480). 510-490 : Voyages d’Hécatée
République romaine. de Milet.
508-507 : Réforme de
Clisthène à Athènes.
490 : Bataille de Marathon,
défaite des Perses.
481 : Alliance d’Athènes et de Activité de PARMÉNIDE à
Sparte (deuxième guerre Élée (ca 478).
médique).
Eschyle : Les Perses (472),
L’Orestie (458).
480 : Bataille de Salamine, ca 454 : Procès d’impiété à
victoire navale des Grecs. Athènes contre
ANAXAGORE (ca 500-428).
EMPÉDOCLE (ca 492-432).
PROTAGORAS (ca 492-421).
ZÉNON D’ÉLÉE (ca 490-454). ca 440 : Leucippe, première
formulation de l’atomisme.
443 : Périclès stratège ca 450 : HÉRODOTE (ca 484-
d’Athènes. 425) écrit les Histoires.
Alcibiade (ca 450-404), Sophocle : Antigone (443).
homme politique athénien,
disciple de SOCRATE.
ca 435 : Enseignement de Hippocrate de Chios (ca 470-
SOCRATE (469-399) à 400) : Éléments de géométrie.
Athènes.
DÉMOCRITE (ca 460- ?)
Guerre du Péloponnèse (431- THUCYDIDE (ca 455-400).
404).
427 : Gorgias (ca 480-376)
exerce son éloquence à
Athènes.
ca 423 : Dans les Nuées,
Aristophane ridiculise
l’enseignement de SOCRATE.
ANTISTHÈNE (ca 445-360). HIPPOCRATE (ca 460-380).
404 : Régime oligarchique ca 405 : Euclide de Mégare
des Trente à Athènes. fonde l’école mégarique.
403 : Restauration de la
démocratie.
399 : Procès d’impiété contre
SOCRATE, condamné à mort.
399 : Aristippe fonde une
école à Cyrène.
ca 390 : Isocrate ouvre une
école à Athènes et enseigne la
« philosophie » à un large
public.
XÉNOPHON (ca 428-354).
387 : PLATON (429-347) fonde Travaux mathématiques de
l’ACADÉMIE. l’ACADÉMIE (Théétète,
Eudoxe, Archytas,
Léodamas).
384-322 : Démosthène. Diogène de Sinope (ca 400- 381 : Observations d’Eudoxe
325). de Cnide (400-347) en
Égypte ; mouvement
épicycloïdal des planètes
(370).
347 : Mort de PLATON ;
Speusippe lui succède à la tête
de l’ACADÉMIE.
343 : ARISTOTE précepteur
d’Alexandre de Macédoine.
340 : Guerre entre Philippe ca 388-315 : Travaux
de Macédoine et Athènes. d’Héraclide Pontique
(rotation de la Terre).
338 : Défaite des Athéniens à Aristoxène (théorie
Chéronée. harmonique).
336 : Avènement d’Alexandre 335 : ARISTOTE (385-322)
le Grand, roi de Macédoine. fonde le Lycée à Athènes.
PYRRHON (~ 365-275)
accompagne Alexandre en
Asie.
332 : Fondation d’Alexandrie.
323 : Mort d’Alexandre à 322 : Mort d’ARISTOTE ;
Babylone ; formation des Théophraste lui succède.
différentes monarchies
hellénistiques.
306 : Épicure (ca 342-271) ca 300 : Éléments d’EUCLIDE.
fonde l’école du Jardin à
Athènes.
ca 301 : Zénon de Kition (~
334-262) fonde le Portique à
Athènes.
er
ca 295 : Ptolémée I fonde à
Alexandrie le Musée.
283-239 : Antigone Gonatas, ca 281 : Aristarque de Samos
roi de Macédoine, protège les et l’héliocentrisme.
philosophes, particulièrement
les STOÏCIENS.
268-264 : Arcésilas succède à ca 270 : Activité d’Hérophile
Cratès à la tête de (médecin) à Alexandrie.
l’ACADÉMIE et donne à
l’ACADÉMIE une orientation
« sceptique ».
262 : Cléanthe succède à ca 260 : Activité d’Érasistrate
Zénon à la tête de l’ÉCOLE (médecin).
STOÏCIENNE.
Bible des Septante.
250 : Activité de Diophante
(mathématicien).
ca 232 : Chrysippe (ca 280-207) ca 245 : Ératosthène (ca 275-
succède à Cléanthe à la tête de 194) est bibliothécaire à
l’ÉCOLE STOÏCIENNE. Alexandrie.
218 : Deuxième guerre ARCHIMÈDE (ca 287-212)
punique. est tué par un soldat romain
lors du siège de Syracuse.
217 : Première guerre de ca 200 : Œuvre d’Apollonius
Macédoine. (théorie des coniques).
POLYBE (208-118).
167-166 : Carnéade,
scholarque de l’ACADÉMIE.
169 : Guerre entre les 161-126 : Activité
Séleucides et les Juifs de d’Hipparque (origines de la
Palestine. trigonométrie, théorie des
excentriques et des
épicycles).
155 : Carnéade est envoyé
comme ambassadeur à Rome.
Diogène de Babylone
(stoïcien) et Critolaos
(péripatéticien)
l’accompagnent.
148 : La Macédoine devient ca 150 : Carte géographique
province romaine. d’Hipparque.
146 : La Grèce province
romaine.
146 : Destruction de Carthage
par les Romains.
110-109 : Philon de Larissa
scholarque de l’ACADÉMIE ;
en 88, il fuit Athènes et se
réfugie à Rome.
ca 88-86 : Guerre de
Mithridate.
ca 79 : Antiochos d’Ascalon, Posidonios (ca 135-51)
scholarque de l’ACADÉMIE, (travaux de géographie et
ouvre sa propre école à d’astronomie).
Athènes et s’oppose à
l’orientation « sceptique »
adoptée depuis Arcésilas
jusqu’à Philon de Larissa.
Lucrèce : De natura rerum (ca
54-53).
Cicéron : De republica (54-52).
Philodème de Gadara fonde à
Naples un centre d’études
épicuriennes.
48 : Premier incendie de la
bibliothèque d’Alexandrie.
ca 40 : Andronicos de Rhodes
édite les œuvres d’ARISTOTE.
30 : Bataille d’Actium ; 30 (?) : Inscription épicurienne
l’Égypte devient province de Diogène d’Œnanda (datée
romaine. Fin de l’époque aussi, par certains savants, de
hellénistique. ca 125 après J.-C.).
27 : Fin de la République, et
début de l’Empire romain.
10-25 : Strabon : Géographie.
29 (?) : Mort de Jésus de
Nazareth.
37-41 : Ambassade de Philon
d’Alexandrie auprès de
Caligula.
54-68 : Règne de Néron ; 48-65 : Sénèque, stoïcien, ca 60 : Héron d’Alexandrie :
incendie de Rome (64) ; précepteur, puis conseiller de les Mécaniques.
persécution des chrétiens. Néron, avant d’être contraint
au suicide par celui-ci. Il écrit
les Lettres à Lucilius en 63-64.
60 : Enseignement
d’Ammonios, platonicien, à
Athènes.
64 (?) : Mort de saint Paul.
70 : Prise de Jérusalem par
Titus.
93-94 : Expulsion des
philosophes de Rome par
Domitien. Épictète (55-135)
fonde une école à Nicopolis,
sur la côte grecque de
l’Adriatique.
ca 110 : Plutarque (ca 46-ap. ca 100 : Nicomaque de
120) conseiller de Trajan, puis Gérasa (théorie des nombres)
d’Hadrien, pour les affaires et Ménélaüs (théorie de la
grecques. sphère).
ca 120 : Les apologistes
chrétiens se mettent à
présenter le christianisme
comme une philosophie.
135 : Diaspora des Juifs. ca 133 : Premières traces de la ca 125 : Théon de Smyrne
gnose (Basilide). (théorie des nombres).
161-180 : Règne à Rome de ca 150 : Didaskalikos (résumé Activité de Ptolémée à
Marc Aurèle. du platonisme) d’Alcinoos. Alexandrie ; Almageste (150) ;
Géographie (155).
176 : Marc Aurèle fonde à
Athènes des chaires de
philosophie pour les quatre
principales écoles :
PLATONICIENNE,
ARISTOTÉLICIENNE,
STOÏCIENNE,
ÉPICURIENNE.
ca 177 : Celse, platonicien, 129-200 : GALIEN.
polémiste antichrétien.
ca 180 : Stromates de Clément
d’Alexandrie.
ca 190 : Hypotyposes
pyrrhoniennes de Sextus
Empiricus, qui nous
renseignent sur les arguments
des Sceptiques antérieurs
(Agrippa et Énésidème).
ca 198 : Enseignement
d’Alexandre d’Aphrodise
(péripatéticien) à Athènes.
200 : Vies et opinions des
philosophes de Diogène Laërce.
244 : PLOTIN (205-269) ouvre Diophante : les Arithmétiques.
une école à Rome.
ca 260 : Fondation de l’école
d’Antioche.
263 : Porphyre devient le
disciple de PLOTIN ; il publie
les Énnéades vers 301.
312 : Conversion au
christianisme de l’empereur
Constantin.
313 : Édit de Milan : le culte ca 313 : Jamblique (250-325) ca 320 : Pappus d’Alexandrie
chrétien est toléré dans fonde à Apamée une école commente Ptolémée et
l’Empire. néoplatonicienne. Euclide.
314 : Premier partage de
l’Empire romain.
Écrits de Basile de Césarée, Théon d’Alexandrie lui
Grégoire de Nazianze, succède comme professeur
Grégoire de Nysse. de mathématiques.
361-363 : Règne de Julien
l’Apostat, philosophe
néoplatonicien. Réaction
antichrétienne.
380 : Le christianisme, 386 : Conversion d’Augustin ;
religion officielle de l’Empire il écrit les Confessions en 400,
romain. et La Cité de Dieu en 413-426.
410 : Sac de Rome par Alaric.
ca 438 : Proclos succède à 415 : Mort d’Hypatie, fille de
Syrianus à la tête de l’école Théon, savante et figure de
néoplatonicienne. proue de l’école
néoplatonicienne.
476 : Fin de l’Empire
d’Occident.
520 : Damascius succède à
Zénodote à la tête de l’école
néoplatonicienne.
529 : Justinien ferme l’école
d’Athènes. Sept philosophes
néoplatoniciens se réfugient
en Perse (parmi eux :
Simplicius et Damascius).
CARTES
‘Abd al-Malik : 1
Abū al-Hūdhayl : 1-2
Abū Kāmil : 1
Abu Qūrra : 1
Ælius Aristide : 1, 2, 3
Agésilas : 1, 2
Aghānis : 1
Agis : 1
Agrippa : 1, 2, 3-4
Aidésius : 1
Al-Baṣrī : 1
Albert le Grand : 1
Albinos : 1, 2, 3, 4
Al-Bīrūnī : 1
Al-Būzjānī : 1
Alcibiade : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8-9, 10
Alcidamas : 1
Alcinoos : 1, 2, 3-4, 5-6
Alcméon de Crotone : 1, 2, 3, 4, 5
Alexandre d’Aphrodise : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8-9, 10-11, 12-13, 14, 15, 16,
17, 18, 19
Alexandre d’Égée : 1
Alexandre d’Éphèse : 1
Alexandre le Grand : 1-2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14-15, 16, 17,
18, 19, 20, 21-22, 23, 24, 25, 26
Al-Fārābī : 1, 2, 3
Al Hazen : voir Ibn al-Haytham
Al-Jubbā’ī : 1
Al-Karajī : 1
Al-Khayyām : 1, 2
Al-Khāzin : 1
Al-Khujandī : 1
Al-Khwārizmī : 1
Al-Kindī : 1, 2, 3
Al Magusi : 1
Al-Nadīm : 1
Al-Naẓẓām : 1-2
Al-Qūhi : 1
Ammonios d’Alexandrie : 1, 2, 3-4
Ammonios d’Athènes : 1, 2-3, 4
Ammonios Saccas : 1, 2-3
ANAXAGORE [1] : 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10-11, 12, 13, 14, 15-16, 17-18,
19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27
Anaxarque : 1, 2
Anaximandre : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7, 8, 9, 10-11, 12, 13, 14-15, 16-17, 18-19,
20, 21, 22, 23, 24, 25, 26
Anaximène : 1, 2, 3, 4, 5, 6-7, 8, 9, 10, 11
Andronicos de Rhodes : 1, 2, 3-4, 5, 6-7, 8, 9, 10
Antalcidas : 1
Anthémius de Thralles : 1
Antigone : 1-2, 3
Antigonos Gonatas de Macédoine : 1, 2
Antiochos d’Ascalon : 1, 2-3, 4-5, 6, 7, 8, 9-10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17
Antipater : 1, 2, 3, 4, 5
Antiphon : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8-9
Antisthène : 1, 2, 3, 4, 5, 6-7, 8-9, 10-11, 12
Antoine : 1, 2
Anytos : 1, 2-3
Apelle : 1
Apellicon de Téos : 1, 2, 3-4
Aphrodite : 1, 2
Apollodore d’Athènes : 1, 2, 3, 4
Apollonius de Perge : 1, 2, 3, 4-5, 6-7, 8, 9, 10, 11, 12
Apollonios de Rhodes : 1, 2
Apollonios de Tyane : 1, 2, 3, 4, 5, 6
Apollonios Dyscole : 1, 2
Apulée : 1, 2, 3
Aratos de Sicyone : 1, 2, 3
Aratos de Soles : 1, 2
Arcésilas de Pitane : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7-8, 9-10, 11, 12-13, 14, 15, 16, 17,
18
Archélaos : 1, 2
Archias : 1, 2
Archiloque : 1, 2, 3, 4
ARCHIMEDE [1] : 2, 3-4, 5, 6, 7, 8, 9-10, 11, 12-13, 14, 15-16, 17, 18, 19
Archytas de Tarente : 1, 2-3, 4, 5, 6, 7, 8-9, 10
Arendt, Hannah : 1-2
Aristarque de Samos : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7, 8, 9
Aristarque de Samothrace : 1, 2, 3, 4
Aristée l’Ancien : 1
Aristide : 1-2, 3, 4
Aristide Quintilien : 1, 2-3, 4, 5
Aristippe de Cyrène : 1, 2-3, 4-5, 6
Aristobule : 1, 2
Aristoclès de Messine : 1, 2
Ariston de Céos : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7, 8, 9, 10, 11-12
Aristophane : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12
Aristophane de Byzance : 1
ARISTOTE [1] : 2, 3-4, 5, 6, 7-8, 9-10, 11, 12-13, 14, 15, 16, 17-18, 19, 20,
21, 22-23, 24-25, 26, 27-28, 29-30, 31-32, 33, 34, 35-36, 37, 38-39, 40-41,
42, 43-44, 45-46, 47, 48-49, 50-51, 52, 53, 54, 55-56, 57, 58, 59, 60, 61, 62-
63, 64, 65, 66, 67-68, 69, 70-71, 72-73, 74-75, 76, 77, 78-79, 80-81, 82-83,
84-85, 86-87, 88-89, 90, 91-92, 93-94, 95-96, 97-98, 99, 100, 101, 102-103,
104-105, 106-107, 108-109, 110-111, 112, 113, 114-115, 116, 117-118, 119,
120, 121, 122-123, 124, 125-126, 127-128, 129, 130-131, 132, 133-134,
135, 136, 137-138, 139, 140, 141, 142, 143-144, 145, 146, 147-148, 149-
150, 151, 152-153, 154, 155, 156, 157, 158-159, 160, 161-162, 163-164,
165, 166-167, 168, 169, 170, 171, 172-173, 174-175, 176-177, 178, 179,
180, 181, 182-183, 184, 185, 186, 187, 188, 189, 190-191, 192-193, 194,
195, 196-197, 198-199, 200, 201, 202-203, 204, 205-206, 207, 208, 209,
210-211, 212-213, 214, 215, 216, 217-218, 219, 220, 221, 222-223, 224-
225, 226-227, 228-229, 230-231, 232-233, 234, 235, 236, 237-238, 239-
240, 241-242, 243-244, 245, 246
Aristote de Mytilène : 1-2
Aristoxène de Tarente : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7, 8, 9, 10, 11
Arius Didyme : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7-8
Asclépios : 1-2, 3, 4, 5
Aspasios : 1, 2, 3
Athénodore Caluus : 1
Atticus : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8-9
Auguste : 1, 2, 3
Augustin (saint) : 1, 2, 3, 4, 5
Aulu-Gelle : 1, 2, 3
Averroès : 1, 2, 3, 4
Avicenne : 1, 2, 3, 4
Bachelard, Gaston : 1
Banū Mūsā : 1
Basile de Césarée : 1, 2
Bataille, Georges : 1
Bayle, Pierre : 1
Bentham, Jeremy : 1
Benveniste, Émile : 1
Boèce : 1, 2-3, 4, 5
Boéthos : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7, 8, 9
Boileau, Nicolas : 1
Bourbaki, Nicolas : 1
Brahé, Tycho : 1, 2
Calliclès : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9
Callimaque : 1, 2, 3
Callippe : 1, 2-3
Callisthène : 1, 2, 3
Carnéade : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11-12, 13-14, 15, 16, 17, 18, 19
Cassandre : 1
Celse : 1, 2, 3-4, 5, 6, 7, 8, 9
César : 1, 2, 3, 4, 5, 6-7
Charondas de Catane : 1
Chasles, Michel : 1
Chrysippe : 1, 2, 3-4, 5, 6, 7-8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17-18, 19, 20,
21-22, 23, 24, 25, 26, 27-28, 29-30, 31-32, 33-34
CICÉRON [1] : 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13-14, 15, 16, 17-18, 19-20,
21, 22-23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33-34, 35, 36, 37, 38, 39-40,
41-42, 43, 44-45, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 52, 53, 54-55, 56
Cimon : 1, 2
Cléanthe : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13
Cléarque de Soles : 1-2
Clément d’Alexandrie : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7
Cléomène : 1, 2, 3, 4
Cléon : 1, 2-3, 4, 5, 6-7
Clisthène : 1, 2-3
Clitomaque : 1, 2, 3, 4-5, 6
Condorcet : 1
Conon d’Athènes : 1
Conon de Samos : 1, 2, 3, 4, 5
Copernic, Nicolas : 1, 2
Crantor : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7
Crassus : 1
Cratès de Thèbes : 1-2, 3, 4
Critias : 1-2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14
Critolaos de Phasélis : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8
Cyrille d’Alexandrie : 1, 2
Damascius : 1, 2, 3, 4-5
Dante : 1
Delambre, Jean-Baptiste : 1
Démétrios de Phalère : 1, 2, 3, 4, 5
DÉMOCRITE [1] : 2-3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10-11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18,
19, 20, 21, 22, 23-24, 25, 26, 27-28, 29, 30-31, 32-33, 34, 35, 36, 37, 38,
39, 40, 41, 42, 43-44
Démosthène : 1, 2, 3-4, 5
Denys d’Alexandrie : 1, 2
Denys d’Halicarnasse : 1-2, 3, 4
Denys de Syracuse : 1, 2, 3, 4, 5
Denys de Thrace : 1, 2
Descartes, René : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7, 8, 9, 10
Diagoras de Melos : 1, 2, 3
Dicéarque de Messine : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7, 8, 9, 10, 11
Diderot, Denis : 1
Dioclès : 1, 2
Diodore Cronos : 1-2, 3-4, 5, 6
Diodore de Sicile : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7
Diodote (l’orateur) : 1-2, 3, 4, 5
Diodote (le Stoïcien) : 1
Diogène d’Apollonie : 1, 2, 3-4, 5
Diogène d’Œnoanda : 1, 2
Diogène de Babylone : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9
DIOGÈNE DE SINOPE [1] : 2, 3, 4, 5, 6-7
Diogène Laërce : 1-2, 3, 4, 5-6, 7, 8, 9-10, 11-12, 13, 14, 15, 16, 17, 18,
19, 20, 21-22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33-34, 35-36, 37, 38,
39-40, 41, 42-43, 44, 45, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 52, 53, 54, 55, 56, 57, 58,
59
Dion Chrysostome : 1, 2, 3
Dion de Pruse : 1-2
Dion de Syracuse : 1-2, 3
Diopeithès : 1, 2
Diophante d’Alexandrie : 1, 2, 3-4
Dioscoride : 1
Domitien : 1
Dosithée : 1, 2, 3-4
EMPÉDOCLE [1] : 2-3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10-11, 12-13, 14-15, 16, 17, 18, 19,
20, 21, 22, 23, 24, 25-26, 27-28, 29, 30
Enée le Tacticien : 1-2
Enésidème : 1, 2, 3-4, 5-6, 7, 8-9
Ennius : 1, 2, 3
Épaminondas : 1, 2-3
Éphialte : 1
Épictète : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13
ÉPICURE [1] : 2, 3, 4, 5-6, 7, 8, 9-10, 11-12, 13, 14, 15-16, 17, 18, 19, 20,
21-22, 23, 24, 25-26, 27-28, 29, 30-31, 32, 33, 34, 35, 36, 37-38, 39, 40, 41
Épiméthée : 1, 2-3, 4
Érasistrate : 1, 2-3, 4, 5, 6, 7, 8, 9
Érasme : 1
Ératosthène : 1, 2-3, 4, 5-6, 7, 8, 9, 10, 11, 12
Eschine (l’orateur) : 1
Eschine de Sphettos : 1, 2, 3-4, 5, 6
Eschyle : 1, 2, 3
Étienne d’Alexandrie : 1
EUCLIDE [1] : 2, 3-4, 5, 6-7, 8, 9-10, 11, 12-13, 14-15, 16-17, 18, 19, 20,
21, 22
Euclide de Mégare : 1, 2-3, 4-5, 6
Eudème de Rhodes : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7, 8-9
Eudore : 1, 2, 3
Eudoxe de Cnide : 1, 2, 3-4, 5, 6-7, 8-9, 10, 11, 12, 13, 14-15, 16, 17
Euripide : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11-12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20
Eusèbe de Césarée : 1, 2, 3, 4
Eutocius : 1, 2, 3, 4, 5
Évhémère : 1, 2-3
Favorin d’Arles : 1
Fénelon : 1
Flavius Josèphe : 1, 2-3
Foucault, Michel : 1, 2, 3, 4
Freud, Sigmund : 1, 2, 3, 4
GALIEN [1] : 2, 3, 4, 5, 6-7, 8, 9-10, 11, 12, 13, 14, 15, 16-17, 18, 19, 20,
21, 22, 23-24, 25, 26, 27, 28, 29, 30-31
Galilée : 1, 2, 3, 4
Gérard de Crémone : 1, 2
Giraudoux, Jean : 1
Gorgias de Léontinoi : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7-8, 9, 10-11, 12, 13-14, 15, 16, 17,
18, 19-20, 21-22, 23, 24, 25-26
Grégoire de Nazianze : 1, 2
Grégoire de Nysse : 1-2
Hadrien : 1, 2, 3, 4-5, 6
Harvey : 1, 2
Hécatée de Milet : 1, 2, 3, 4-5, 6-7, 8, 9, 10, 11, 12, 13
Hegel, G. W. F. : 1, 2-3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13
Heidegger, Martin : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7, 8
Hélène de Troie : 1, 2, 3-4, 5, 6, 7, 8-9, 10
Héliodore : 1
Héraclide Pontique : 1, 2, 3, 4
HÉRACLITE [1] : 2, 3-4, 5, 6, 7, 8, 9-10, 11, 12, 13, 14, 15-16, 17, 18-19,
20, 21-22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34-35, 36, 37-38, 39
Hermarque : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7-8
Hermogène : 1, 2-3
Hérode le Grand : 1
HÉRODOTE [1] : 2, 3-4, 5-6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16-17, 18, 19-
20, 21, 22-23, 24, 25-26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39,
40, 41
Héron d’Alexandrie : 1, 2-3, 4, 5-6, 7, 8-9, 10, 11, 12
Hérophile de Chalcédoine : 1, 2, 3-4, 5, 6-7, 8, 9-10, 11-12
Hésiode : 1, 2, 3, 4, 5, 6-7, 8-9, 10-11, 12, 13, 14-15, 16, 17, 18, 19, 20-21,
22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31-32, 33, 34
Hiéron de Syracuse : 1, 2-3, 4, 5
Hilbert, David : 1
Hipparchia de Maronée : 1
Hipparque : 1, 2, 3, 4-5, 6-7, 8-9, 10-11, 12, 13-14, 15, 16, 17-18, 19-20,
21
Hippase de Métaponte : 1-2, 3
Hippias : 1, 2, 3-4, 5, 6, 7, 8, 9, 10
HIPPOCRATE [1] : 2, 3-4, 5-6, 7-8, 9, 10, 11-12, 13-14, 15-16, 17, 18, 19,
20, 21
Hippocrate de Chios : 1-2, 3, 4, 5
Hippodamos de Milet : 1
Hirtius : 1
Hobbes, Thomas : 1, 2
Homère : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7-8, 9, 10-11, 12, 13-14, 15, 16, 17, 18-19, 20, 21-
22, 23-24, 25-26, 27, 28-29, 30, 31-32, 33, 34, 35, 36-37, 38, 39-40, 41-42,
43, 44, 45, 46, 47-48, 49, 50, 51, 52-53, 54, 55, 56-57, 58, 59
Horace : 1, 2
Hume, David : 1, 2, 3
Hypatie : 1
Lamarck : 1
Lasos d’Hermione : 1-2, 3, 4
Leibniz, Gottfried Wilhem : 1, 2
Leucippe : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8
Lévi-Strauss, Claude : 1
Longin : 1, 2, 3
Lucien : 1, 2, 3, 4, 5
Lucilius : 1, 2
Lucrèce : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7, 8-9, 10-11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18-19, 20
Lycon : 1, 2, 3, 4, 5
Lycurgue : 1, 2, 3-4, 5, 6
Lygdamis de Naxos : 1
Lysias : 1, 2, 3
Machiavel, Nicolas : 1, 2
Marc Aurèle : 1, 2, 3-4, 5, 6, 7, 8-9, 10, 11, 12-13, 14, 15, 16
Marinus de Tyr : 1, 2, 3
Marsile Ficin : 1
Martianus Capella : 1
Marx, Karl : 1
Mélissos de Samos : 1-2, 3, 4, 5, 6
Memmius : 1
Ménechme : 1, 2
Ménélaüs d’Alexandrie : 1, 2, 3-4, 5
Ménippe de Gadara : 1
Méton : 1
Métroclès de Maronée : 1
Métrodore de Lampsaque : 1, 2, 3
Métrodore de Stratonice : 1-2
Miltiade : 1, 2
Montaigne, Michel de : 1, 2, 3
Nausiphane : 1, 2
Néléos de Skepsis : 1-2
Néron : 1, 2, 3, 4
Newton, Isaac : 1
Nicias : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7
Nicolas de Damas : 1
Nicomaque de Gérasa : 1, 2, 3, 4, 5-6
Nietzsche, Friedrich : 1, 2, 3
Novalis : 1
Numénius d’Apamée : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7, 8, 9
Œdipe : 1, 2-3, 4
Œnomaos de Gadara : 1
Olympiodore : 1, 2-3, 4, 5
Onésicrite d’Astypalée : 1
Onomacrites de Locres : 1
Origène : 1-2, 3, 4, 5-6
Orphée : 1, 2, 3
Orthagoras de Sicyone : 1
Ovide : 1
Panaitios de Rhodes : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10
Pappus d’Alexandrie : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10-11, 12
PARMÉNIDE [1] : 2, 3, 4, 5-6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13-14, 15, 16, 17, 18-19,
20, 21, 22-23, 24-25, 26, 27, 28, 29-30, 31-32, 33, 34, 35, 36, 37-38, 39-40,
41, 42, 43, 44, 45, 46-47, 48, 49, 50-51, 52, 53, 54, 55, 56, 57-58
Pascal, Blaise : 1, 2, 3, 4, 5
Patron : 1
Paul (saint) : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7
Pélopidas : 1
Périandre de Corinthe : 1
Périclès : 1, 2-3, 4, 5-6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20-21,
22, 23-24
Pétrone : 1
Phaléas de Chalcédoine : 1
Phédon de Corinthe : 1
Phèdre (l’Épicurien) : 1
Phidias : 1, 2, 3
Philinos de Cos : 1, 2, 3-4
Philippe de Macédoine : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7-8, 9, 10
Philodème : 1-2, 3, 4, 5, 6, 7, 8-9, 10, 11, 12
Philolaos de Crotone : 1, 2-3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10-11, 12
Philon d’Alexandrie : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9
Philon d’Athènes : 1
Philon de Byzance : 1, 2, 3-4, 5, 6, 7-8
Philon de Larissa : 1, 2-3, 4, 5, 6, 7-8, 9, 10, 11, 12, 13, 14
Philopoemen : 1, 2, 3
Philopon, Jean : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9-10, 11
Philostrate : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8-9
Phocion : 1
Photius : 1-2, 3
Pindare : 1, 2, 3, 4, 5, 6
Pisitrate : 1, 2, 3, 4
Pittacos de Mytilène : 1
PLATON [1] : 2, 3-4, 5-6, 7, 8-9, 10, 11-12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19-20,
21, 22, 23, 24-25, 26, 27, 28, 29-30, 31, 32-33, 34, 35-36, 37, 38, 39-40, 41-
42, 43-44, 45-46, 47, 48, 49, 50, 51, 52-53, 54, 55, 56, 57, 58-59, 60-61, 62-
63, 64-65, 66, 67, 68-69, 70, 71-72, 73, 74, 75, 76, 77, 78, 79-80, 81, 82-83,
84-85, 86, 87, 88, 89, 90-91, 92, 93-94, 95, 96-97, 98, 99-100, 101-102,
103-104, 105, 106-107, 108-109, 110, 111-112, 113, 114, 115-116, 117, 118-
119, 120, 121, 122, 123, 124, 125-126, 127-128, 129-130, 131-132, 133,
134-135, 136, 137, 138-139, 140, 141, 142, 143, 144, 145, 146-147, 148-
149, 150, 151-152, 153-154, 155-156, 157, 158-159, 160, 161-162, 163,
164, 165, 166-167, 168, 169-170, 171, 172-173, 174-175, 176-177, 178,
179, 180-181, 182, 183, 184, 185-186, 187-188, 189-190, 191, 192-193,
194, 195-196, 197, 198, 199, 200, 201, 202-203, 204, 205-206, 207, 208,
209, 210-211, 212-213, 214-215, 216, 217-218, 219-220, 221-222, 223-224,
225, 226, 227, 228, 229-230, 231-232, 233, 234-235, 236-237, 238, 239,
240
PLOTIN [1] : 2, 3-4, 5, 6, 7, 8-9, 10, 11, 12, 13, 14-15, 16-17, 18-19, 20,
21, 22, 23
PLUTARQUE [1] : 2, 3, 4-5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15-16, 17, 18,
19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29-30, 31, 32, 33, 34, 35, 36-37, 38,
39, 40, 41
Plutarque d’Athènes : 1, 2, 3, 4
Polémon : 1, 2, 3-4, 5, 6, 7
POLYBE [1] : 2-3, 4, 5-6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16
Polyclète : 1
Polycrate de Samos : 1, 2
Porphyre : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9-10, 11-12, 13, 14, 15, 16-17, 18, 19, 20,
21-22, 23, 24
Posidonios d’Apamée : 1, 2-3, 4-5, 6, 7, 8, 9, 10, 11-12
Potamon : 1
Praxagoras de Cos : 1, 2, 3, 4, 5
Proclos : 1, 2, 3-4, 5, 6, 7, 8-9, 10, 11-12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19-20, 21-
22, 23, 24-25, 26, 27
Prodicos de Céos : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7-8, 9-10, 11, 12, 13
Prométhée : 1, 2, 3-4, 5, 6-7
PROTAGORAS [1] : 2, 3, 4, 5-6, 7, 8-9, 10, 11-12, 13, 14, 15, 16-17, 18,
19-20, 21-22, 23-24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31-32, 33-34
Pseudo-Clément : 1
Pseudo-Euclide : 1
PTOLÉMÉE [1] : 2, 3, 4, 5, 6-7, 8, 9, 10-11, 12, 13-14, 15, 16-17, 18-19,
20, 21, 22, 23, 24, 25, 26-27, 28, 29, 30
PYRRHON [1] : 2, 3, 4, 5, 6-7, 8, 9-10, 11, 12, 13, 14-15
Pythagore : 1-2, 3, 4, 5, 6, 7-8, 9, 10, 11, 12-13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20,
21, 22, 23, 24-25, 26, 27-28
Quine, W. V. : 1
Quintus Cicéron : 1
Rabelais, François : 1
Renan, Ernest : 1, 2
Rhazès : 1
Rousseau, Jean-Jacques : 1, 2
Tatien : 1, 2
Thalès de Milet : 1-2, 3, 4, 5-6, 7-8, 9, 10, 11, 12, 13-14, 15, 16, 17, 18,
19, 20, 21, 22-23, 24, 25, 26
Théétète d’Athènes : 1, 2
Thémison de Laodicée : 1, 2, 3
Thémista : 1
Thémistius : 1, 2, 3
Thémistocle : 1-2, 3, 4, 5, 6
Théodore de Cyrène : 1, 2, 3-4, 5
Théodose : 1-2
Théognis de Mégare : 1-2, 3
Théon d’Alexandrie : 1, 2, 3, 4
Théon de Smyrne : 1-2, 3
Théophraste d’Érèse : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14-15, 16, 17,
18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25-26, 27-28, 29, 30, 31, 32-33, 34-35, 36, 37, 38
Théopompe : 1, 2
Théramène : 1, 2
Thessalos de Thralles : 1, 2
Thrasimaque : 1
Thrasybule : 1, 2
Thomas d’Aquin (saint) : 1, 2, 3-4, 5
THUCYDIDE [1] : 2, 3, 4-5, 6, 7, 8, 9, 10-11, 12, 13-14, 15, 16-17, 18-19,
20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31
Timée de Locres : 1
Timée de Tauroménion : 1, 2
Timoléon de Syracuse : 1
Timon de Phlionte : 1-2, 3-4, 5, 6
Tirésias : 1
Tite-Live : 1
Varron : 1, 2, 3, 4
Virgile : 1
Vitruve : 1, 2-3, 4, 5
Wallis : 1
Wittgenstein : 1, 2
Xénocrate : 1, 2, 3-4, 5, 6, 7, 8, 9-10, 11-12, 13-14, 15, 16, 17, 18, 19, 20
Xénophane de Colophon : 1, 2-3, 4, 5, 6-7, 8-9, 10-11, 12, 13, 14-15, 16,
17, 18-19, 20-21, 22, 23, 24, 25, 26-27, 28, 29, 30, 31, 32, 33-34, 35
Xénophon : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14-15, 16, 17-18, 19, 20,
21-22, 23, 24, 25, 26, 27
Xerxès : 1
Zénodote : 1, 2, 3
ZÉNON D’ÉLÉE [1] : 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10-11, 12, 13, 14
Zénon de Kition : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7-8, 9, 10, 11, 12-13, 14-15, 16-17, 18,
19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28-29, 30-31, 32
Zoroastre : 1
Zosime : 1-2
INDEX DES NOTIONS
Académie :
— platonicienne : 1, 2, 3, 4, 5, 6-7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18,
19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27-28, 29, 30, 31-32, 33, 34, 35-36, 37-38,
39, 40
Nouvelle — : 1, 2, 3, 4, 5, 6-7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15-16, 17, 18, 19, 20,
21, 22, 23, 24-25, 26, 27, 28, 29-30, 31
Âme : 1-2, 3, 4, 5-6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16-17, 18-19, 20, 21, 22-
23, 24-25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35-36, 37, 38, 39, 40, 41-42,
43, 44, 45, 46-47, 48-49, 50, 51, 52, 53-54, 55, 56, 57, 58, 59, 60, 61, 62,
63, 64, 65, 66-67, 68-69, 70, 71, 72, 73, 74, 75-76, 77, 78, 79, 80, 81-82,
83, 84, 85-86, 87-88, 89-90, 91, 92, 93, 94, 95, 96, 97-98, 99, 100-101, 102,
103, 104, 105, 106, 107-108, 109-110, 111, 112, 113, 114, 115, 116, 117,
118, 119, 120
parties, facultés de l’— : 1, 2, 3, 4, 5, 6-7, 8, 9, 10, 11, 12, 13-14, 15, 16, 17
immortalité de l’— : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12-13, 14, 15
— du ciel, du monde : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7, 8, 9
Analogie : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11-12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20,
21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30-31, 32, 33, 34-35, 36, 37, 38, 39, 40,
41, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 48, 49-50, 51, 52, 53, 54, 55, 56
Aphorisme : 1, 2-3, 4, 5, 6, 7
Aporie : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18-19
—s de Zénon : 1-2
Argent : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11
métal : 1, 2, 3, 4
Arithmétique : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15-16, 17, 18, 19-
20, 21, 22, 23, 24, 25, 26-27
Art : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11-12, 13, 14, 15, 16, 17
artiste : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9
Ascétisme : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19
Assemblée : 1, 2, 3-4, 5-6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20,
21, 22, 23
Astrologie : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9
Atome : 1, 2-3, 4, 5, 6, 7, 8-9, 10, 11, 12, 13, 14-15, 16-17, 18, 19, 20-21,
22, 23, 24, 25, 26-27, 28, 29-30, 31, 32, 33-34
les Atomistes : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7-8, 9, 10, 11
Barbare : 1, 2, 3, 4, 5, 6-7, 8, 9, 10, 11, 12-13, 14-15, 16, 17, 18, 19, 20, 21,
22, 23-24, 25, 26-27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37
Bien : 1-2, 3-4, 5, 6, 7-8, 9-10, 11-12, 13-14, 15, 16, 17, 18-19, 20-21, 22,
23-24, 25-26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33-34, 35, 36, 37, 38, 39-40, 41, 42,
43, 44, 45, 46-47, 48, 49, 50, 51, 52, 53, 54, 55, 56, 57, 58, 59-60, 61, 62,
63-64
souverain — : 1, 2, 3-4, 5, 6, 7, 8, 9
homme de — : 1, 2, 3, 4
vivre — : 1-2, 3-4, 5
Forme platonicienne du — : 1-2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11
Biologie : 1, 2-3, 4, 5, 6, 7-8, 9, 10, 11, 12, 13-14, 15, 16, 17, 18, 19, 20,
21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32
Bonheur : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13-14, 15, 16-17, 18, 19, 20,
21-22, 23, 24-25, 26, 27, 28, 29, 30-31, 32-33, 34-35, 36, 37-38, 39-40, 41,
42-43, 44, 45, 46, 47, 48, 49-50, 51, 52, 53, 54
Catégorie : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15-16, 17, 18, 19, 20,
21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34-35, 36, 37, 38, 39, 40,
41, 42, 43
—s aristotéliciennes : 1, 2, 3-4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11-12, 13, 14, 15, 16, 17-
18, 19, 20, 21, 22, 23
Syllogisme catégorique : 1-2
Cause : 1, 2-3, 4-5, 6, 7, 8-9, 10, 11-12, 13, 14, 15, 16, 17-18, 19, 20, 21,
22, 23-24, 25-26, 27, 28-29, 30, 31-32, 33, 34, 35-36, 37, 38-39, 40, 41-42,
43, 44, 45-46, 47, 48, 49, 50, 51-52, 53-54, 55, 56-57, 58, 59, 60, 61-62, 63,
64, 65, 66, 67-68, 69, 70, 71, 72, 73, 74, 75, 76, 77, 78, 79, 80, 81, 82, 83,
84-85, 86, 87, 88, 89, 90, 91, 92, 93, 94, 95-96, 97, 98, 99, 100, 101, 102,
103, 104, 105, 106, 107, 108-109, 110, 111-112, 113, 114, 115, 116-117,
118-119, 120, 121, 122-123, 124, 125, 126, 127
Changement (physique) : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7-8, 9-10, 11-12, 13, 14, 15, 16-
17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30-31, 32-33, 34, 35
Cité : 1, 2, 3-4, 5, 6, 7, 8-9, 10, 11-12, 13, 14-15, 16, 17-18, 19-20, 21-22,
23-24, 25, 26-27, 28-29, 30, 31-32, 33, 34, 35-36, 37-38, 39, 40-41, 42, 43,
44, 45, 46, 47-48, 49-50, 51, 52-53, 54, 55, 56, 57-58, 59, 60, 61, 62, 63,
64, 65-66, 67, 68, 69, 70, 71, 72-73, 74-75, 76, 77, 78-79, 80, 81, 82-83, 84,
85-86, 87, 88, 89-90, 91-92, 93-94, 95-96, 97-98, 99, 100, 101, 102, 103-
104, 105-106, 107, 108, 109, 110, 111, 112-113, 114, 115
citoyen : 1, 2, 3-4, 5, 6, 7-8, 9, 10, 11, 12, 13-14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21-
22, 23, 24-25, 26, 27, 28, 29-30, 31, 32-33, 34, 35, 36, 37-38, 39, 40, 41-42,
43-44, 45, 46, 47, 48, 49, 50, 51-52, 53
citoyen du monde : 1, 2, 3, 4
Commerce : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7-8, 9
Contemplation : 1-2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12-13, 14, 15, 16, 17, 18,
19, 20-21, 22-23, 24, 25
Corps : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8-9, 10-11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21,
22-23, 24, 25, 26-27, 28, 29-30, 31, 32-33, 34-35, 36-37, 38-39, 40, 41, 42,
43, 44, 45, 46-47, 48, 49, 50, 51, 52, 53, 54, 55-56, 57, 58, 59-60, 61, 62,
63, 64-65, 66-67, 68, 69, 70-71, 72, 73, 74, 75, 76, 77, 78, 79-80, 81, 82,
83, 84-85, 86, 87-88, 89, 90, 91, 92-93, 94, 95, 96, 97, 98, 99, 100, 101,
102-103
— et âme : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10-11, 12, 13-14, 15, 16, 17, 18, 19, 20,
21
— célestes : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7-8, 9-10, 11, 12, 13-14, 15, 16-17, 18-19, 20,
21, 22, 23-24, 25, 26-27, 28, 29, 30-31, 32, 33, 34, 35
corps civique : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8
corpuscules : 1, 2-3, 4, 5, 6-7, 8, 9
incorporel : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10
Cosmos : 1, 2, 3-4, 5-6, 7-8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16-17, 18, 19-20, 21,
22, 23, 24, 25, 26-27, 28, 29-30, 31-32, 33-34, 35, 36, 37, 38-39, 40, 41-42,
43, 44, 45, 46, 47, 48-49, 50, 51
cosmologie : 1-2, 3-4, 5-6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14-15, 16-17, 18, 19, 20-
21, 22-23, 24, 25, 26, 27-28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40,
41, 42-43, 44, 45, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 52-53, 54, 55, 56, 57-58, 59-60, 61
cosmogonie : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9-10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19
cosmographie : 1
Critère : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21,
22-23, 24-25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35-36, 37, 38, 39, 40, 41-
42, 43-44, 45, 46, 47, 48, 49-50, 51, 52-53, 54, 55, 56-57, 58, 59, 60, 61,
62, 63-64, 65, 66, 67, 68-69, 70-71, 72-73
— de la vérité : 1, 2, 3
Démesure : 1, 2, 3, 4, 5, 6
Démiurge : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13-14, 15, 16, 17, 18, 19-20,
21, 22
Démocratie : 1, 2, 3-4, 5-6, 7, 8-9, 10, 11-12, 13, 14, 15, 16-17, 18, 19, 20,
21-22, 23-24, 25-26, 27, 28, 29-30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39-40, 41,
42-43
Démonstration : 1, 2-3, 4-5, 6-7, 8-9, 10, 11, 12-13, 14, 15-16, 17, 18-19,
20, 21-22, 23, 24, 25, 26, 27-28, 29, 30, 31-32, 33, 34, 35, 36-37, 38, 39-40,
41, 42, 43, 44-45, 46, 47, 48-49, 50, 51-52, 53-54, 55, 56, 57-58, 59, 60-61,
62-63, 64, 65, 66-67, 68, 69, 70, 71-72, 73, 74, 75-76, 77, 78, 79, 80, 81,
82, 83, 84, 85, 86, 87, 88-89, 90, 91, 92, 93, 94-95
indémontrable : 1-2
Dialectique : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7, 8, 9, 10-11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19,
20-21, 22-23, 24-25, 26, 27, 28, 29-30, 31-32, 33, 34, 35, 36, 37-38, 39, 40,
41, 42, 43-44, 45, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 52, 53-54, 55
Dialogue : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20-
21, 22-23, 24-25, 26, 27, 28, 29, 30, 31-32, 33, 34, 35
— platonicien : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12-13, 14, 15, 16, 17, 18, 19,
20, 21, 22, 23, 24, 25, 26-27, 28, 29-30, 31, 32, 33, 34, 35, 36-37, 38-39,
40, 41, 42-43, 44, 45, 46, 47-48, 49-50, 51-52, 53, 54-55, 56, 57, 58-59, 60,
61, 62, 63, 64, 65, 66-67, 68, 69-70, 71, 72-73, 74, 75, 76-77, 78, 79, 80, 81
Dieu(x), divin : 1, 2, 3, 4, 5, 6-7, 8-9, 10, 11, 12-13, 14-15, 16-17, 18-19,
20-21, 22, 23, 24, 25, 26-27, 28, 29, 30-31, 32-33, 34, 35-36, 37-38, 39, 40,
41, 42, 43, 44, 45, 46-47, 48-49, 50, 51, 52, 53, 54-55, 56-57, 58, 59, 60,
61-62, 63-64, 65-66, 67, 68-69, 70, 71, 72, 73, 74-75, 76, 77, 78-79, 80, 81-
82, 83, 84, 85, 86, 87, 88, 89, 90-91, 92-93, 94, 95-96, 97, 98-99, 100, 101,
102-103, 104, 105, 106, 107, 108, 109, 110, 111, 112-113, 114-115, 116-
117, 118, 119, 120-121, 122, 123-124, 125-126, 127, 128, 129, 130, 131,
132, 133, 134-135, 136, 137, 138, 139, 140, 141-142, 143-144
Doxographie : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7-8, 9-10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19,
20-21, 22, 23, 24-25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34-35, 36
Dualisme : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7
— de l’âme : 1, 2
Éclectisme : 1, 2, 3, 4, 5, 6
Écoles philosophiques : 1, 2, 3, 4-5, 6-7, 8, 9, 10, 11, 12-13, 14, 15, 16,
17, 18, 19, 20-21, 22, 23, 24-25, 26-27, 28-29, 30-31, 32, 33, 34, 35-36, 37,
38, 39-40, 41, 42, 43-44, 45-46, 47, 48, 49-50, 51, 52, 53, 54-55, 56, 57, 58,
59, 60, 61-62, 63, 64, 65-66, 67-68, 69, 70-71, 72-73, 74-75, 76-77, 78, 79-
80, 81, 82-83, 84-85, 86-87, 88, 89-90, 91, 92, 93-94, 95, 96-97, 98, 99,
100-101, 102, 103, 104, 105, 106, 107, 108, 109, 110, 111-112, 113-114,
115-116, 117-118, 119-120, 121
écoles médicales : 1, 2-3, 4, 5-6, 7, 8-9, 10, 11, 12
Éducation, paideia : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7-8, 9-10, 11, 12, 13, 14-15, 16, 17-18,
19-20, 21, 22, 23, 24, 25-26, 27-28, 29-30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37-38, 39,
40
Égalité, inégalité : 1-2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17
— politique : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9-10, 11, 12-13, 14
— des fautes : 1, 2
— mathématique : 1-2, 3-4, 5, 6-7, 8, 9-10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17
Éléments :
— de l’univers : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7-8, 9-10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19-
20, 21-22, 23-24, 25-26, 27, 28, 29-30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38
— du corps : 1, 2, 3-4, 5, 6, 7-8, 9, 10, 11, 12-13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20-
21, 22, 23, 24, 25, 26-27, 28-29, 30-31, 32, 33, 34-35
—s mathématiques, logiques : 1, 2-3, 4-5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12-13, 14-15,
16, 17, 18-19, 20-21, 22, 23, 24-25, 26, 27
—s linguistiques : 1, 2-3, 4, 5
Enfant : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11-12, 13, 14-15, 16, 17, 18, 19, 20, 21,
22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29
femme et — : 1, 2
père et — : 1, 2
Enquête : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7-8, 9, 10, 11-12, 13, 14, 15, 16-17, 18-19, 20-21,
22, 23-24, 25, 26, 27-28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39-40, 41,
42, 43, 44, 45, 46, 47, 48, 49
— sur la nature : 1, 2-3, 4, 5-6, 7, 8-9, 10, 11, 12, 13
Épicuriens : voir Jardin
Esclave : 1-2, 3, 4, 5, 6, 7, 8-9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20-21,
22, 23-24, 25, 26, 27, 28, 29, 30
esclavage naturel : 1, 2
Ésotérisme : 1, 2, 3, 4, 5, 6
Éternité : 1-2, 3-4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12-13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21,
22, 23, 24, 25, 26-27, 28, 29, 30, 31, 32-33, 34-35, 36, 37-38, 39, 40, 41,
42, 43, 44, 45, 46-47, 48, 49
— du monde : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12-13, 14-15, 16, 17
éternel retour : 1, 2, 3
Éthique : 1, 2-3, 4, 5, 6-7, 8, 9, 10, 11-12, 13-14, 15, 16-17, 18-19, 20, 21,
22, 23, 24, 25, 26, 27-28, 29-30, 31, 32, 33-34, 35-36, 37, 38, 39, 40, 41,
42, 43, 44, 45, 46, 47-48, 49-50, 51-52, 53, 54-55
— socratique, platonicienne : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7, 8-9, 10-11, 12, 13, 14-15, 16,
17, 18, 19
— aristotélicienne : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7, 8, 9-10, 11, 12
— stoïcienne : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7-8, 9-10, 11
— épicurienne : 1, 2, 3, 4
Ethnocentrisme : 1, 2-3, 4, 5
Étranger : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7-8, 9, 10, 11, 12, 13-14, 15, 16, 17, 18, 19, 20,
21, 22, 23
Étymologie : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7, 8, 9, 10-11, 12, 13-14, 15, 16, 17, 18, 19, 20,
21, 22, 23, 24, 25, 26, 27
Excellence (vertu) : 1, 2-3, 4-5, 6, 7-8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18,
19, 20, 21, 22, 23, 24
— politique, constitutionnelle : 1-2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10
vertu éthique : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14-15, 16-17, 18, 19,
20, 21, 22, 23, 24, 25, 26-27, 28, 29, 30, 31, 32, 33-34, 35, 36, 37, 38-39,
40, 41, 42, 43-44, 45-46, 47, 48, 49, 50-51, 52, 53-54, 55, 56, 57-58, 59, 60,
61-62, 63, 64, 65, 66, 67, 68-69, 70, 71-72, 73, 74-75, 76-77
Expérience : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15-16, 17, 18, 19, 20,
21, 22, 23, 24-25, 26, 27, 28, 29, 30-31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40-
41, 42-43, 44, 45, 46, 47, 48-49, 50, 51, 52-53, 54, 55, 56, 57, 58, 59, 60,
61, 62-63, 64, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 71-72, 73, 74, 75
— sensible : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7
— religieuse : 1, 2, 3, 4, 5
expérimentation : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8-9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18,
19-20, 21, 22-23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30
Feu : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7-8, 9, 10, 11, 12, 13-14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22,
23, 24, 25-26, 27, 28, 29-30, 31, 32, 33-34, 35, 36, 37
élément : 1, 2, 3-4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12-13, 14, 15, 16
Forme : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7-8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16-17, 18, 19, 20, 21,
22, 23, 24, 25-26, 27, 28, 29-30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41,
42, 43-44, 45, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 52, 53-54, 55, 56, 57
— linguistique, littéraire : 1, 2-3, 4, 5-6, 7, 8-9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16,
17
— des atomes : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7
— de la prédication : 1-2, 3
— mathématique : 1, 2, 3, 4, 5, 6-7, 8-9, 10
cause formelle : 1, 2, 3-4, 5-6
Formes platoniciennes : 1, 2-3, 4, 5, 6, 7, 8-9, 10, 11-12, 13, 14, 15, 16, 17-
18, 19, 20, 21, 22, 23-24, 25-26, 27, 28-29, 30, 31-32, 33, 34, 35, 36, 37-38,
39-40, 41, 42
— aristotélicienne : 1, 2-3, 4-5, 6, 7, 8, 9, 10, 11-12, 13, 14-15, 16-17, 18
— de pensée, de raisonnement, formel : 1, 2, 3-4, 5, 6, 7, 8, 9, 10-11, 12, 13,
14, 15, 16, 17, 18-19, 20-21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29-30, 31, 32, 33,
34, 35, 36-37, 38-39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 52
Géographie : 1, 2, 3, 4, 5, 6-7, 8-9, 10, 11, 12, 13, 14-15, 16-17, 18, 19-20,
21, 22-23
carte géographique : 1-2
origine géographique : 1, 2, 3
Géocentrisme : 1, 2, 3, 4
Géométrie : 1-2, 3, 4, 5, 6-7, 8, 9-10, 11-12, 13, 14-15, 16, 17, 18, 19, 20,
21, 22-23, 24, 25, 26, 27-28, 29, 30-31, 32-33, 34-35, 36-37, 38, 39, 40-41,
42, 43-44, 45-46, 47, 48, 49, 50-51, 52, 53, 54, 55, 56, 57-58
Gnose : 1, 2, 3, 4-5, 6-7, 8
Grammaire : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8-9, 10, 11-12, 13-14, 15, 16, 17, 18, 19, 20,
21
Guerre : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8-9, 10, 11, 12, 13, 14-15, 16, 17, 18, 19, 20, 21,
22, 23-24, 25, 26, 27, 28, 29-30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39-40
— cosmique, divine : 1, 2, 3, 4-5
— de Troie : 1, 2, 3-4
—s médiques : 1-2, 3, 4-5, 6, 7-8, 9
— du Péloponnèse : 1, 2, 3-4, 5-6, 7, 8-9, 10, 11, 12-13
sens figuré : 1, 2, 3
Harmonie : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20,
21, 22, 23
— musicale : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7, 8-9, 10, 11, 12, 13, 14, 15
— mathématique : 1, 2
Héliocentrisme : 1, 2, 3, 4
Homosexualité : 1, 2
Hypothèse : 1-2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19-20,
21, 22-23, 24-25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40
— philosophique : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9-10, 11-12, 13-14, 15, 16, 17, 18,
19-20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36-37, 38,
39-40, 41, 42, 43
épistémologie : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13
nécessité hypothétique : 1
Imitation : 1, 2, 3, 4, 5, 6-7, 8, 9-10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20,
21, 22, 23, 24, 25, 26-27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36
Incorporel : 1, 2, 3, 4, 5, 6
— stoïcien : 1, 2, 3
Infini : 1, 2, 3, 4, 5, 6-7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17-18, 19, 20, 21,
22-23, 24, 25, 26
univers — : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7-8, 9, 10, 11, 12, 13
nombre — : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7, 8-9, 10, 11, 12, 13
vide — : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8-9
régression à l’— : 1, 2-3, 4, 5, 6, 7, 8, 9
divisibilité —e : 1, 2, 3-4, 5, 6, 7-8, 9
infinitésimal : 1, 2, 3, 4, 5, 6-7
Justice : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7-8, 9-10, 11, 12, 13, 14, 15-16, 17, 18, 19, 20-21,
22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34-35, 36, 37-38, 39, 40, 41,
42, 43, 44-45, 46-47, 48, 49-50, 51, 52, 53, 54-55, 56-57, 58, 59, 60
— cosmique : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7, 8, 9, 10-11, 12-13, 14, 15, 16
dans la cité : 1, 2, 3, 4, 5, 6-7, 8, 9, 10, 11
— et nature : 1, 2, 3, 4, 5, 6
Langage : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14-15, 16, 17, 18, 19, 20,
21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31-32, 33, 34, 35-36, 37
— mathématique, scientifique : 1, 2
— ordinaire : 1, 2, 3, 4
Loi : 1, 2, 3, 4, 5, 6-7, 8, 9, 10-11, 12-13, 14-15, 16, 17, 18-19, 20-21, 22,
23, 24-25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35-36, 37, 38, 39, 40, 41, 42,
43-44, 45, 46, 47-48, 49-50, 51, 52, 53, 54-55, 56, 57, 58, 59, 60, 61, 62-63,
64
— naturelle : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7, 8, 9, 10, 11-12, 13-14, 15-16, 17
— divine : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7
— scientifique, logique, cosmique : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14-
15, 16, 17, 18, 19, 20
Lycée (école aristotélicienne) : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7, 8-9, 10, 11, 12, 13, 14-
15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23-24, 25-26, 27, 28, 29-30
aristotéliciens, péripatéticiens : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7-8, 9-10, 11, 12, 13, 14, 15,
16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23-24, 25, 26, 27, 28, 29-30, 31, 32
Magie : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7, 8, 9-10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19
Maïeutique : 1, 2, 3, 4
Maladie : 1, 2-3, 4-5, 6, 7, 8, 9, 10, 11-12, 13, 14-15, 16-17, 18-19, 20, 21,
22, 23, 24, 25-26, 27, 28-29, 30, 31-32, 33, 34, 35, 36, 37, 38
Matière : 1, 2, 3-4, 5, 6-7, 8, 9-10, 11, 12, 13-14, 15, 16-17, 18-19, 20-21,
22, 23, 24, 25, 26, 27-28, 29, 30, 31-32, 33, 34, 35
primordiale, principielle : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7-8, 9, 10, 11, 12, 13-14, 15
— et forme : 1, 2-3, 4, 5, 6, 7, 8-9, 10, 11
hylémorphisme : 1, 2, 3, 4, 5, 6-7
cause matérielle : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7, 8
Mégariques : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9
Mélange : 1-2, 3, 4, 5, 6, 7-8, 9, 10-11, 12-13, 14-15, 16, 17, 18, 19, 20, 21-
22, 23, 24, 25-26, 27-28, 29-30, 31
— éthico-politique : 1, 2, 3, 4, 5
Mesure : 1-2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14-15, 16, 17, 18, 19, 20, 21-
22, 23, 24-25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32-33, 34, 35, 36, 37-38, 39, 40, 41-
42, 43
Monde : 1, 2-3, 4-5, 6, 7, 8-9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19-20, 21,
22, 23, 24, 25-26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38-39, 40, 41,
42, 43, 44-45, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 52, 53, 54, 55, 56, 57-58, 59, 60, 61,
62, 63, 64, 65, 66, 67-68
— grec, hellénisé : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8-9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17-18,
19, 20, 21-22, 23-24, 25, 26, 27, 28-29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36
— habité : 1, 2, 3, 4, 5, 6
Terre : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7-8, 9, 10, 11, 12, 13, 14-15, 16, 17
origine du — : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7-8, 9, 10-11, 12-13, 14, 15, 16, 17, 18, 19,
20, 21, 22, 23, 24, 25-26
— sensible, physique : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14-15, 16, 17,
18, 19, 20, 21-22, 23, 24, 25-26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35-36, 37,
38, 39, 40-41, 42, 43, 44, 45
— humain, social, intellectuel : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7, 8, 9, 10, 11-12, 13, 14, 15,
16, 17, 18, 19, 20-21, 22, 23, 24, 25, 26, 27-28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35,
36, 37, 38, 39, 40
— d’Aristote : 1, 2, 3-4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14-15, 16, 17, 18, 19,
20, 21, 22, 23, 24-25, 26
— politique : 1, 2, 3, 4
— intelligible : 1, 2, 3-4, 5-6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14
— vivant : 1
âme du — : voir Âme.
Monothéisme : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7
Mort : 1, 2, 3, 4, 5, 6-7, 8-9, 10-11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21,
22, 23-24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37
après la —, au-delà : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17,
18, 19
les mortels : 1, 2-3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20-
21, 22, 23, 24-25, 26-27, 28
immortel : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14-15, 16, 17-18, 19, 20-
21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29-30
Mouvement (physique) : 1, 2, 3-4, 5-6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14-15, 16,
17, 18, 19, 20-21, 22-23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36,
37-38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 48-49, 50-51, 52-53, 54, 55, 56,
57, 58-59, 60, 61, 62-63, 64-65, 66, 67, 68, 69, 70-71, 72, 73-74, 75, 76, 77
— céleste, cosmique : 1, 2, 3, 4, 5, 6-7, 8-9, 10-11, 12-13, 14-15, 16, 17-18,
19-20, 21, 22, 23-24, 25-26, 27, 28, 29, 30-31, 32-33, 34, 35, 36
(doctrinal) : 1-2, 3-4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12-13, 14
Mystique : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10-11, 12, 13, 14, 15, 16, 17
Mythe : 1-2, 3, 4, 5-6, 7, 8-9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16-17, 18, 19, 20, 21,
22, 23-24, 25-26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33-34, 35-36, 37, 38, 39, 40, 41,
42, 43, 44, 45-46, 47, 48, 49, 50, 51, 52, 53, 54, 55, 56-57
mythologie : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11-12, 13, 14, 15, 16
Nature : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7-8, 9, 10-11, 12, 13, 14-15, 16, 17-18, 19, 20, 21,
22, 23, 24, 25-26, 27, 28-29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41,
42, 43, 44, 45, 46, 47-48, 49, 50, 51, 52, 53, 54, 55, 56-57, 58, 59, 60-61,
62, 63, 64, 65-66, 67, 68, 69-70, 71
— des choses, de l’univers : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14
— des dieux : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7
philosophie, sciences de la — : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7, 8-9, 10-11, 12, 13-14, 15,
16, 17-18, 19-20, 21-22, 23, 24-25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34-35, 36,
37, 38-39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 47-48, 49, 50, 51-52, 53, 54-55, 56, 57
selon la —, naturel : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11-12, 13, 14, 15, 16, 17, 18,
19, 20, 21, 22-23, 24, 25, 26, 27, 28, 29-30, 31, 32-33, 34, 35, 36, 37, 38,
39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 52, 53, 54-55
contre — : 1, 2, 3, 4-5, 6
— humaine : 1, 2-3, 4-5, 6-7, 8, 9-10, 11-12, 13-14, 15-16, 17, 18-19, 20,
21, 22, 23-24
— et convention (culture) : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7, 8, 9, 10, 11
— et morale : 1, 2, 3
— et cité : 1-2, 3, 4-5, 6, 7
lois de la — : voir Loi
Néoplatonisme : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7-8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18-
19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27-28, 29, 30-31, 32, 33, 34, 35-36, 37, 38,
39-40, 41, 42-43, 44, 45-46, 47, 48, 49-50
Oligarchie : 1-2, 3-4, 5, 6, 7-8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18
Orphisme : 1, 2, 3
Passion : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8-9, 10, 11, 12, 13, 14, 15-16, 17, 18, 19, 20
action et — : 1, 2
sans — : 1, 2, 3
Perception : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7-8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17-18, 19-20,
21-22, 23, 24, 25-26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35
— et savoir : 1, 2-3, 4-5, 6, 7, 8
imperceptible : 1, 2, 3
sensation : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9-10, 11-12, 13, 14, 15, 16, 17-18, 19, 20,
21-22, 23
sensation et pensée : 1, 2, 3
Persuasion : 1, 2-3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13-14, 15, 16-17, 18-19, 20,
21, 22-23, 24, 25, 26, 27, 28, 29-30, 31-32, 33, 34, 35, 36
Piété : 1-2, 3, 4, 5, 6-7, 8, 9, 10, 11, 12-13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21
impiété : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13-14, 15, 16, 17
Poétique : 1-2, 3, 4-5, 6, 7, 8, 9, 10, 11-12, 13-14, 15-16, 17, 18, 19, 20, 21,
22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31-32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40-41,
42, 43, 44, 45, 46-47, 48, 49, 50, 51-52, 53, 54, 55, 56-57, 58, 59, 60, 61,
62, 63-64, 65
Polythéisme : 1, 2, 3, 4, 5
Présocratique : 1-2, 3, 4, 5, 6-7, 8-9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17-18, 19-
20, 21, 22, 23, 24, 25-26, 27, 28, 29, 30-31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39,
40-41, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 48-49, 50, 51, 52-53, 54, 55, 56, 57, 58-59,
60, 61, 62, 63, 64, 65
Principe : 1, 2, 3-4, 5, 6, 7, 8, 9-10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20,
21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33
— de mouvement, vital : 1-2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14
— philosophique, scientifique : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8-9, 10, 11, 12, 13, 14, 15,
16-17, 18-19, 20, 21, 22, 23, 24-25, 26-27, 28, 29-30, 31-32, 33, 34, 35, 36,
37, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45-46, 47, 48-49, 50-51, 52, 53-54, 55-56, 57,
58, 59, 60-61, 62, 63, 64, 65-66, 67, 68, 69, 70, 71-72, 73-74, 75, 76, 77,
78, 79-80, 81, 82, 83, 84-85, 86, 87, 88-89
— du cosmos, du réel : 1, 2, 3, 4-5, 6-7, 8, 9-10, 11-12, 13, 14, 15, 16, 17-
18, 19, 20, 21, 22-23, 24, 25, 26, 27-28, 29, 30, 31, 32-33, 34
—s mathématiques : 1, 2, 3, 4-5, 6, 7-8, 9-10, 11, 12, 13, 14, 15
— de non-contradiction : 1-2, 3, 4, 5, 6, 7, 8
— de raison suffisante : 1, 2, 3-4
— de bivalence : 1, 2, 3-4
— d’indifférence : 1, 2
— d’identité : 1
— de plénitude : 1
Probabilisme : 1, 2-3, 4, 5
Providence : 1, 2, 3-4, 5, 6-7, 8-9, 10, 11, 12, 13, 14, 15-16, 17, 18-19, 20,
21, 22-23, 24, 25, 26
Réfutation : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9-10, 11-12, 13-14, 15, 16, 17, 18, 19, 20-
21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32-33, 34, 35-36, 37, 38, 39-40,
41, 42, 43-44, 45, 46, 47, 48, 49-50
Réminiscence (platonicienne) : 1, 2, 3, 4, 5, 6
Rhétorique : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8-9, 10, 11, 12, 13-14, 15, 16, 17-18, 19, 20,
21, 22, 23, 24, 25-26, 27, 28, 29-30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40
Sagesse : 1, 2, 3-4, 5, 6, 7, 8-9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21,
22-23, 24-25, 26, 27, 28, 29, 30-31, 32, 33, 34-35, 36, 37-38, 39-40, 41, 42,
43, 44-45, 46, 47, 48-49, 50, 51, 52, 53-54, 55-56, 57, 58-59, 60-61, 62-63,
64-65
— et philosophie : 1-2, 3-4, 5, 6, 7-8, 9, 10
— pratique : 1-2, 3, 4-5, 6, 7, 8, 9-10, 11, 12, 13
— et divinité : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7, 8, 9, 10-11, 12
— populaire : 1
les Sept Sages, législateurs : 1, 2, 3, 4, 5, 6-7, 8, 9, 10
Sophiste : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7
sage : 1-2, 3, 4, 5, 6
les Sophistes : 1, 2, 3, 4, 5, 6-7, 8-9, 10, 11, 12, 13, 14-15, 16-17, 18, 19, 20,
21, 22, 23, 24, 25, 26-27, 28-29, 30-31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40,
41, 42, 43, 44, 45, 46, 47-48, 49, 50, 51-52, 53, 54, 55, 56, 57-58
sophisme : 1, 2, 3, 4, 5
Seconde sophistique : 1, 2
Temps : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7, 8-9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17-18, 19, 20, 21,
22, 23, 24, 25, 26, 27-28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35-36, 37, 38, 39, 40, 41,
42, 43
— cyclique : 1, 2
espace et — : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15-16, 17-18, 19
— anciens : 1, 2, 3-4, 5, 6, 7, 8
hors du — : 1, 2
Théâtre : 1, 2, 3, 4, 5
bâtiment : 1, 2, 3
amphithéâtre : 1-2, 3
Théorème : 1, 2-3, 4, 5-6, 7-8, 9-10, 11, 12, 13, 14, 15-16, 17-18, 19-20,
21, 22, 23-24, 25-26, 27, 28-29
en médecine : 1-2
Vérité : 1, 2, 3, 4, 5-6, 7, 8, 9-10, 11-12, 13, 14, 15, 16, 17, 18-19, 20-21,
22, 23, 24-25, 26-27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37, 38, 39-40, 41,
42-43, 44-45, 46, 47-48, 49, 50-51, 52-53, 54, 55, 56, 57, 58-59, 60, 61-62,
63, 64-65, 66-67, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 74, 75, 76, 77, 78-79, 80, 81, 82-
83, 84, 85, 86-87, 88-89, 90, 91, 92-93, 94, 95-96, 97, 98, 99, 100, 101,
102, 103, 104, 105, 106, 107-108, 109, 110, 111, 112, 113, 114, 115, 116,
117, 118-119, 120-121, 122, 123, 124, 125-126, 127-128, 129-130, 131-
132, 133
— et erreur : 1, 2, 3, 4
— et opinion : 1-2, 3, 4, 5
opinion vraie : 1-2, 3, 4, 5, 6, 7
— mathématique : 1-2, 3-4, 5-6, 7
— historique : 1, 2, 3-4, 5, 6, 7
— révélée : 1, 2, 3, 4, 5, 6
critère de la — : voir Critère
Vide : 1-2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12-13, 14, 15, 16-17, 18, 19, 20, 21,
22-23, 24, 25, 26, 27-28, 29-30, 31, 32, 33, 34, 35-36, 37-38
terme, assertion — : 1-2, 3
sens figuré : 1, 2, 3, 4, 5
TABLE DES AUTEURS