16 MERCREDI 9 MARS 2022
Une histoire d’adultes,
pas un jeu d’enfant
Le réalisateur Samuel Theis
revient sur ses propres émois
de jeune garçon dans « Petite
Nature », en salles ce mercredi
Caroline Vié
C’
est une œuvre semi-autobiogra-
phique, sensible et passionnante,
que propose Samuel Theis avec
Petite Nature. Le réalisateur, découvert
l’an dernier à la Semaine de la critique
du Festival de Cannes, présente un
gamin de 10 ans qui tombe amoureux
de son instituteur. Ce dernier ne répond
évidemment pas à la passion de
l’enfant, mettant, au contraire, des dis-
tances, tout en lui faisant découvrir
la culture.
« C’est mon histoire jusqu’à un certain
point, prévient Samuel Theis. J’y parle
de mon enfance et de la façon dont je
me suis émancipé de mon milieu d’ori-
gine, avant le cinéma. » Coréalisateur
Le choix de Caro
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AUSSI a aimé le film
« Petite Nature »
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CINÉMA
de Party Girl, récompensé de la Ca-
méra d’or en 2014, le quadragénaire
signe ici un premier film en solo,
très réussi.
« Sans complaisance »
« J’ai essayé de montrer cet âge
tendre sans complaisance, ni
tabou, précise-t-il. Les pre-
miers émois que ressent
le héros me semblent
aussi importants
que le fait qu’il
peine à trouver sa
place parmi les siens. »
Samuel Theis n’occulte
aucun sujet et souligne
bien la sexualité nais-
sante d’un gamin attiré
par un adulte. « La force de
mon personnage vient du
fait qu’il n’y a aucune am-
biguïté de sa part, confie
Antoine Reinartz, qui joue
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l’enseignant. Il est gêné par l’attirance
que son élève ressent à son égard. Elle
n’est absolument pas réciproque. » Ce
n’est pas du côté du scandale ni de la
polémique que réside l’intérêt de Petite
Nature. Samuel Theis montre la nais-
sance cruelle d’un éveil, mais indis-
pensable. « J’ai tenté de retrouver ce
que je ressentais à cet âge, insiste le
réalisateur. Et ce sans apporter le ju-
gement de l’adulte que je suis
devenu. »
Le film sonne juste. Tous les in-
terprètes sont fabuleux, avec
une mention spéciale pour Izia
Higelin, dans le rôle de l’épouse
de l’instit, et pour la débutante
Mélissa Olexa, dans celui
de la mère du héros.« Re-
plonger dans mon
passé a été dou-
loureux, re-
connaît
le cinéaste.
J’ai revécu mon
désarroi et mon désir
d’autrefois avec une certi-
tude : la différence entre
un adulte et un enfant, c’est
que l’adulte est respon-
sable de ses actes alors que
l’enfant ne l’est pas. »
Le jeune héros face à un amour hésitant.
2021 Avenue B Productions / France 3 Cinéma
Pierre Niney avide dans « Goliath »
O
n a envie de gifler Pierre Niney
quand on le voit dans Goliath, de
Frédéric Tellier. Pas l’acteur, mais
l’odieux lobbyiste qu’il incarne dans ce
thriller écologique bien mené. Vendu
à la cause des fabricants de pesticides,
il donne la réplique à Gilles Lellouche
en avocat de victimes et à Emmanuelle
Bercot en activiste luttant contre ces
produits cancérogènes.
« Je suis parvenu à rencontrer des lob-
byistes pour préparer mon rôle », confie
l’acteur à 20 Minutes. Il a particulière-
ment travaillé l’attitude de ce techno-
crate glaçant, épaulé par un collègue
joué par Laurent Stocker. « J’ai essayé
de livrer une performance géomé-
trique, comme si je devenais un requin,
La leçon de
« Kung-fu » de
Sabrina Ouazani
Elle est sublime, Sabrina Ouazani,
dans Kung-fu Zohra, de Mabrouk El Me-
chri. L’actrice incarne une femme bat-
tue qui apprend les arts martiaux pour
donner une leçon à son mari, joué par
Ramzy Bedia. Entre la fiancée de Kill
Bill et le gamin de Karaté Kid, Sabrina
Ouazani donne naissance à un person-
nage dynamique dont le spectateur suit
la métamorphose avec délice.
Son professeur de kung-fu lui apprend
notamment à utiliser les meubles de
son appartement pour mettre en échec
l’homme qui lève la main sur elle dès
que leur fillette a le dos tourné. « On a
pensé à La Guerre des Rose pour don-
ner ce ton de comédie noire quand le
couple s’affronte », explique la comé-
dienne à 20 Minutes.
Entraînement intensif
Sabrina Ouazani a dû se plier à un en-
traînement de six à huit heures par
jour pour atteindre le niveau de kung-
fu exigé. Le résultat est bluffant. « Il
fallait être très précis pour ne pas se
blesser, explique-t-elle. Ramzy et moi
avons beaucoup travaillé. » La perfor-
mance et le charisme de la comédienne
éclairent Kung-fu Zohra. C.V.
Laurent Stocker (à g.) et Pierre Niney.
C. Tamalet / StudioCanal
dit Pierre Niney. J’ai exploré un aspect
très différent de mon jeu. » Ce qui le
rend effrayant.
Intelligence vive et cœur sec
Le spectateur ne peut qu’être impres-
sionné par la métamorphose de l’ac-
teur quand son personnage nie les
cancers causés par les produits qu’il
défend. Rien ne semble émouvoir ce
garçon à l’intelligence vive et au cœur
sec. « J’aimerais que le film invite à s’in-
terroger sur la façon dont nous avons
envie de nous nourrir et de nourrir nos
enfants », déclare Pierre Niney. On sort
de Goliath galvanisé par le désir de
faire la guerre à son personnage et à
ses semblables. C.V.