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Se Monde Ss aS USES TES Maa a a7 Cal Ua Ta a PEs ICES CU ee eer Cae OCR CL CO Oe eRe aT ier SC ee Mt Cm er ee me registres, la soprano a connu un destin exceptionnel, perpétuellement Cee ee ee ce encs pre eae ani ee eM ce eeu a Re a Rec Uc PaO Ree gee cae een ee des époques et des esprits de chapelle. Maria Callas a su insuffler au bel Ceara ec My eee CRC Ma eas rou tyt aay eee eee eed cs Ne Cee aco) Sere ory s : Une vie, une voix 36 Jésus : ce que l’on sait vraiment «Jésus face a Histoire. Est-il possible d’étudier Jésus indépendamment de toute conviction religieuse ? LAntiquité a livré sur lui et sur les premiers chrétiens plus de sources fiables que sur bien des grands personnages. Des sources que les historiens savent interpréter et cexploiter pour leurs recherches. ENTRETIEN AVEC JAN-MARIESALAMITO + Qui sont les Evangélistes ? Que nous apprennent les textes du Nouveau ‘Testament, rédigés dans la seconde moitié du" siécle, sur leurs propres auteurs, Marc, Matthieu, Luc et Jean ? PARFRANCOIS HUGUENIN * L’Eglise face a l’épreuve du martyre. Que représentait le martyre pour les premiers chrétiens et pour 'autorité romaine ? PARFRANCOISHUGUENNN 22 Leffondrement des Mayas Les spécialistes commencent & expliquer la crise violente qui ravagea les cités mayas entre le Ix et le X* siécle. PARANA GARCIA BARRIOS 58 Cervantés 4 Alger En 1575, le futur écrivain est fait prisonnier par des Barbaresques, qui le garderont captif a Alger durant cing ans. paRJOSE MANUELLUCIA MEGIAS 70 Les guerriers de Sparte Vainere ou mourir. Tel était l'état desprit des soldats les plus redoutés et les plus rusés de la Grétce antique. PAR AViER MURCIA ORTURO 6 vacruaure 10 tes personnaces William et Caroline Herschel Aidé de sa sceur, le savant allemand a révolutionné lastronomie moderne, 14 vevenement LEmpire khazar Du vit au sce i fut le rempart de pire byzantin face aux Arabes. 18.aviequoriiewe Les espions au Moyen Age éiarges ent eur ryaume 80 vain ou temps Napoléon et Joséphine Une histoire d'amour et de pouvoir sur fond de bataille des Pyramides et de sacre impérial 86 1s cranve vécouverte Les tétes d'Ife Un explorateur allemand élabore tne théorie trouble sur la localisation de l/Atlantide en Afrique, SOLES LIVRES ET LEXPOSITION SS U'HISTOIRE EN SORTANT 98 LA QUESTION DES LECTEURS PEFC ae ~~ Joawsts , J HISTON RE -MALESHERBES PUBLICATIONS (0, avene Perre-Mendes- ance (Ce hea, 75707 Paris Codex 1. TH = 0248 88 46 00 Directeur de ta publication MICHEL sre REDACTION: Redacteuren he :JEAN-MARC BASTIERE BReaseabons DIIERT CONSULTANTS Aeylnw CAURENT COURCOUL ‘Ont cllabere ce amar: [ACUES-OLIVIER BOUDON, ‘SEANGJOH. pRECEON, SVIVIEBRIET ANA GARCIA BARRIOS, Ric GARCLA MORAL. MATHILDE Ga fRANGOIS HUGUENIN, HDUAKDO JUAtez VALERO FRANCOW KASBL DIDIER LET7, JOSE MANGEL LUCIA Mts JAviER MCT Extucs parca Misina, ANTONIO RATT, ANMARE SALAMITO. Traduction: AMELIE COURAL)ISABELLE LANGLOS-LEFEBVRE, [NELLY LHERMILLIER. ANNE LOPEZ. ADMINISTRATION-PROMOTION-ABONNEMENTS : ‘Secrtavat nda: CATHERINE LEBEAU ‘tion IRYMEL OUFR eos de gestion Faction: NATHIALTE COMMUNEAU etic Abia eben SYLVINA LE FLOCH, FABIEN COSTES (Gtr de arcaton Nemvteation | SEBASTIEN LAURENT, HUBERT JOURDIN, [BRYAN SILVA RODRIGUES (Commeri: FLORENCE MARIN etic matting. [MEARE DEAUNAY EMMMANULLLE LEBRUN, MAGAL NOHALES, ROMANE PALEZEUR Chet de pod kenneth Public: ORVELLA BLANC: MONALDI (0148884648, DAVIDOGER (a1 4888 4003). Serie relation abonnés: 67-9 avenue Pere Mens Pance (CS anay sa Pals Cedex Defame: 014888 204 De Ferngor (9): 4808 st04 mail ogetcvintonngnbonnementemp.som fe “Sean oa Be en To Emil sbooom@edioupbe * Salen Anna ress Eigoup SA, chemin di Chiten-Blch 0, SED Lagan Sued Tal obs Sooke o ‘Ema: sboane@edgoupch Directeur del fusion td production: XAVIER LOTHL Directed vente: SABINE GUDE ‘heed produ: EMILY NAUTIN-DULIEU ‘Aesiatant commerce CAISTINE KOCH (0 5 28.3929) RRRE LAURE SIMONIAN (relations presse, o1 48 8846 02, CHRISTIANE MONTILLET Semin: ACI GRAPE soa LAVAL ISSN !S4y-6760leton paper) IBSW; t-ogyane ge) SITE INTERNET wre istie-t-irisatons.com ‘COURRIER DES LECTEURS: {MILIEFOROSO ‘istate€ Cinthaons 76g, wenue Pere-Mendts-Pance mail snare fe ‘nc, Sei. Spleen phioge ica dete = ee oe tomta depot L'EDITORIAL & Chére lectrice, cher lecteur, Le magazine que vous tenez en mains est le numéro 100 Histoire & isations. Voici donc l'occasion, aprés un voyage de neuf ans a travers les siécles, de vous exprimer notre reconnaissance et de vous redire ce qui nous anim offrir un plaisir du récit toujours renouvelé, ouvrir nos pages aux meilleurs historiens, contempler une iconographie exceptionnelle. Plonger dans la vie des grandes civilisations @’hier et aujourd'hui posséde aussi cette vertu précieuse : élargir notre regard et nous faire réver en nous abstrayant d’un quotidien parfois contraignant et anxiogane ! Notre magazine, qui a trouvé trés vite, dans la presse historique, une place incontournable et reconnaissable entre toutes, n’a cessé, année aprés année, de se développer avec des dossiers plus étoffés et plus denses, des conseils accrus de sorties et de lectures, une actualité éclairée par la profondeur historique, des rubriques nouvelles comme « la question des lecteurs », etc. Si nous sommes, comme vous sans doute, attachés au caractére irremplacable d’un magazine papier que l'on touche, respire et découvre en prenant son temps, nous avons aussi 4 coeur de proposer ’accés numérique a toutes les archives du site histoire-et-civilisations.com et a plus de 500 podcasts de notre chaine storiavoce.com. Avec ce numéro de fin d’année consacré, avec son dossier principal, a ce que les historiens peuvent aujourd’hui dire (ou pas) de Jésus, nous vous souhaitons une excellente lecture ! L'ACTUALITE PREHISTOIRE DE VAMERIQUE Premiers pas en arriére La découverte d'empreintes fossiles humaines dans le sud des Etats-Unis a bouleversé la datation et les théories sur les premiers peuplements du continent nord-américain nn grand pas vient @étre franchi sur la question controversée des premiers peuplements de VAmeérique du Nord. De nouvelles études confirment que des hommes vivaient bien sur ce continent voici 23 000 ans, bien plus tot, qu’on ne le croyait. Dévoi- Ies grace a V’érosion, des cempreintes de pas avaient, été découvertes au Nou- ‘veau-Mexique, fossilisées dans la roche, dans le parc national des White Sands, surlesberges d'un lac assé- ché, devenu un désert de gypse blanc quiadonnéson nom au parc. Le site a éga- ement conservé des traces @’animaux, comme des ‘mammouths ou des oups. Période glaciaire Datées une premiére fois en 2021 par les scienti- fiques, les traces de pieds gardaient néanmoins leur mystere, car les résultats avaient été trés controver- sés. Ils ne reposaient que sur une méthode, celle duu carbone 14présent dansune plante aquatiquemélée aux empreintes humaines. Deux autres techniques considé- réescomme plus fiables ont été utilisées dans une nou- velle étude, et les résultats publiésdanslarevue Science semblent apaiser ledébat qui agitaitlespréhistoriens. Les scientifiques ont cette fois prélevé des pollens fossili- sés,etle carbone 14adonné des dates remontant entre 23.400 ans et 22 600 ans. Pour confirmer ces résul- tats flsontutiiséladatation par luminescence stimulée optiquement, qui permet de déceler quand certains ‘minéraux, comme le quartz, ‘ont vu pour la demiere fois Ialumiére, Cette méthode a fixé la date a 21 500 ans. Plusde doute pourlescher- cheurs les humains étaient déja présents en Amérique durantledernier maximum dlaciaire, de 26500819000 avant notre ere, Or jusqu’ici,latheserete~ nue était que les hommes avaient franchi le détroit de Béring, en provenance de Sibérie orientale, ily aenvi- 10n.13 500 ans, apres la fin du dernier maximum gla- ciaire. On pensait qu’avant celalesglaces qui couvraient Je nord du continent ren- daient presque impossible les migrations humaines par le détroit de Béring. Cette époque fut considé- 1ée comme celle de la pre- miére culture américaine, appelée culture de « Clo- vis »,dunom d'une villedu Nouveau-Mexique. Cette importante découverte remet tout en question :qui étaient les premiers habi- tants d’Amérique et par od sont-ilsarrivs ?, La plus vieille mosquée de France Cest un édifice emblématique du patrimoine de Ile de Mayotte que les archéologues ont investi pour des fouilles : une mosquée du xvr' siécle, la plus ancienne du territoire national aplusanciennemos quée de France se trouve a... Mayotte. Et plus exacte- ment a Tsingoni, ot elle a fait Vobjet durant été et une partie de Pautomne une campagne de fouilles approfondies, sous la mai- trise d’ouvrage de la mai- rie, Datant du xvr siécle, la mosquée,emblématique du patrimoine mahorais, a été classée monument histo- rigue en 2015. Elle souffrait, de problémes d’infiltra- tions, sans doute a cause un enduit ne permettant pas aux murs de respirer. Pour obtenir le feu vert et centreprendre les travaux de restauration, des fouilles archéologiques, indispen- sables, ont été menées par Vinrap (institut national de et embellie avec deux ailes été mises en évidence par recherches archéologiques latérales et un mihrab, puis des sondages — des défunts préventives) continue a se modifier sans doute musulmans, car : au cours des sigcles. Les les dépouilles étaient pla- Capitale du sultanat — archécloguesontanalyséles_céessurle coté droit latéte Un premier diagnostic, différentescouchesdesédi- en direction de La Mecque. réalisé en 2016, avait révé- ments danse sol,et déca-__Cettemosquéede'Tsingo- leédes traces doccupation _pé les murs de la mosquée _niétant toujoursenactivité das le xr siécle, ainsi que pourétudierlespierresetles les chercheurs interrom- laprésence d'une mosquée enduitsutiliséslorsdesdif- _paient le travail durant les primitive en pierre datant férentesphasesdeconstruc~ _ tempsdepriére,cequiaper- du xiv'sidcle: il s‘agissait tion, et d’autres matériaux misunchantier trés ouvert, alors d’une petite struc comme le coral, la roche ot les fidéles n’hésitaient ture de type swahili, sans volcanique ou le mortier. pas a venir rencontrer les tour-minaret, composée Sous les épaisses couches archéologues et échanger Pune salle unique. La ville de peinture, ils ont mis au _surlesméthodes tradition de Tsingoni a connu un jour des entrelacs sculptés. nelles de construction. Les, cessor important en deve Et ils ont eu la surprise de _analysesenlaboratoire per- nant lacapitale du sultanat trouverunmorceaudeCoranmettront de dater plus pi deMayotteauxvr'sidcle.Laniché dans un mur. A Vex- _cisément les traces de bati mosquéeest alors agrandie _térieur, six sépultures ont antérieures au xvr siécle. LACTUALITE Deux rondins quichangent tout Une structure en bois vieille de 476 000 ans pourrait révolutionner nos connaissances sur les capacités technologiques des espéces antérieures 3 Homo sapiens. eboisneseconserve aux hypotheses. II pour pascommelapierre! rait s’agir d’une passerelle C’estdoncunedécou- oubien d’une plate-forme verte extraordinaire surélevée permettant aux qui a été révélée en Zam- habitants — des chai . bie:unestructureenbois, seurs-cueilleurs, qui peut ‘i ne travaillée pardeshumains, étre s’installaient a un ‘ datant de 476 000 ans. endroit pour une saison — Ce qui en fait la plus d’évoluer sur unespace sec ancienne jamais trou- encasd’inondations. vée,réalisée une époque Pour dater ce bois, les oi notre espace n’exis- chercheurs ont utilisé la tait pas encore! Les plus méthode de datation par anciennes traces actuel- luminescence : les cris lement connues d’Homo taux comme le quartz ou sapiensremontent eneffet le feldspath stockent de A environ 300 000 ans, et _’énergie proportionnelle- se situent au Maroc. ‘ment au temps passé dans Vobscurité, cette technique Enformede croix permettant de mesurer le Fouillé par des préhisto- temps écoulé depuis leur riens de Belgique et du derniére exposition a la Royaume-Uni, esiteloca~_ lumiére. lisé prés des chutes dela L'assemblage montre riviére Kalambo, dans le en tous cas des capacités nord de la Zambie, est un cognitives que les scien~ endroit en permanence tifiquesn’imaginaient pas hhumide,quibénéficie,avec pour des périodes aussi les inondations, de l’'ap-_anciennes. On savait que port desédiments. Lebois, des Homo utilisaient du ‘qui généralement pourrit bois, mais pas de maniere et se désagrége, a pu étre sophistiquée, et la plus ainsipréservé. Léquipe, qui _vieille structure en bois publie ses résultats dans connue jusqu’alors ne latevue Nature, a décou- remontait qu’ag 000 ans, vert un assemblage en Ce qui conduit Larry forme de croix:deuxron- Barham, principal auteur dins superposés, emboi- de l'étude et professeur a tés grace a une entaille T'université de Liverpool, a de plus de 10 cm de large, déclarer dans un commun pratiquée intentionnelle- qué: « Oubliez I’étiquette ment, et donc forcément “Age de pierre”. Ces gens réalisée par des humains. fabriquaient quelque chose A quoi servait-elle ? Les de nouveau et de grand, a chercheursen sont réduits partir du bois. » HISTOIR CIVILISATIONS Voyagez tous les mois au cceur de l'histoire! Fe Asonnez-vous A Histoire & CIviLisATIONS Offre spéciale numéro 10! A Voccasion du numéro 100, je vous invite a profiter de cette offre exceptionnelle : — 2 ans (22n) pour 75,90€ seulement — Unmot de Jean-Marc Baste, soit 1 an offert ! rédacteur en chet histoire & civilisations Nog lecteurs nous disent les surprises et les joies que leur réserve chaque numéro. dL ne tient qu’a vous de découvrir cette aventure ! VOS AVANTAGES NUMERIQUES GB > SITEHISTOIRE & CIVILISATIONS - Accés illimité a tous les contenus du site histoire-et-civilisations.com (BH » LEKIOSQUE NUMERIQUE - Accédez a vos numéros et a l'intégralité des archives du magazine. > STORIAVOCE : NOTRE CHAINE DE PODCASTS HISTOIRE & CIVILISATIONS. Accédez a plus de 500 podcasts dédiés a Ihistoire sur toutes les plateformes —— ote, &° A compléter et & renvoyer avec votre réglement par chéque a ordre d'Histoire & Civilisations a l'adresse suivante Histoire & Civilisations ~ Service relations abonnés ~ 67/69 av. Pierre-Mendés-France ~ CS 21470 - 75212 Paris Cedex 13 QM Nine Nan (ui, je mabonne & Histoire & Civlisations, je choisis Prem fre n-100 : abonnement pour 2 ans (22 n~) pour 75,90¢ seulement Arse aulieu de 151806 soit 0% déconomie ou 1 anofert. 93621 Calpe A Labonnement pour 1 an (11 n=) pour 44€ seulement hen aulieu de 7590€ sot 42% ctconomie ouAnuméros offers, 93622" ee a re iat 8 eset te inf es tes stave & Cans lage bets, ‘ener des bess.) Caeser inde es oes es parenaesd ste & Cats CI Me y=), =A Le ™ LES PERSONNAGES William et Caroline Herschel, les yeux rivés vers le ciel Ayec l'aide de sa sceur, 'astronome allemand parcourait le ciel a la recherche de corps célestes inconnus, grace a d’énormes télescopes construits de ses propres mains. Unduo d’astronomes passionnés 1738 William Herschel voit le jour 8 Hanovre. En 1757, ilfuit saville, occupée par les Francais, et se réfugie fen Angleterre 1772 Caroline Herschel ejoint William en Angleterre, ou elle Fassiste dans ses observations astronomiques. 1781 La découverte d'Uranus fait décoller la carriére de Wiliam, qui est nommé astronome du oi dAngletere, 1822 Wiliam s'teint Slough, apres ‘avoir ouvert la vole ’Tastronomie scientifique modeme 1848 Caroline s'éteint 3 son tour deux ans aprés avoir 16 récompensée de la ‘médaille for de la science par le roi de Prusse ¢ Allemagne a l’Angle- terre, de la musique a Yastronomie, de 'anony- mat ala célébrité :Vétour- dissante trajectoire de Friedrich Wilhelm et de Caroline Lucretia Herschel témoigne des profonds antagonismes et dubouillonnement intellectuel qui ont métamorphosé Europe du xvur siécle, Danslamodeste famille allemande oii le frére et la sceur voient le jour, la passion pour la musique se trans met de génération en génération. Né €n1738 a Hanovre, le jeune Friedrich Wilhelm Herschel apprend a jouer de différents instruments et devient hautboiste dans la garde hanovrienne Lorsque laguerre de Sept Anséclateet que armée francaise occupe sa ville natale en 1757, il décide de se réfu- gier en Angleterre. D’abord copiste de partitions a Londres, od il arrive lespoches vides ge de 18 ans, puis organiste et professeur de musiquea Bath, ilconnaft une fulgurante ascen- sion gracea ses talentsde virtuose et decompositeur. Epris de musique, William Her- schel— c'est ainsi qu’ilse fait appeler désormais —n’en consacre pasmoins de temps a Vastronomie, une disci- pline en plein essor au xvur siécle. I commence en 1766 a tenir un jour- nal d’observations astronomiques, Bath, od sa sceur Caroline le rejoint six ans plus tard pour épouser cette autre passion gurls partagent. Ensemble, ces deux musiciens accomplisne tardent pas. faire leurs preuves en astronomie, Voyage dans les nébuleuses Initiéalamécanique parlapratiquede ses instruments et résolument attiré par ’astronomie, William Herschel se metaVouvrage:en1773,ilentreprend de fabriquer son propre télescope a réflexion, en substituant des miroirs métalliques aux lentilles astrono- miques des télescopes a réfraction utilises par Galilée, puis perfection- néspar Johannes Kepler et Christiaan Huygens, dans lespoir d'en accrottre lapuissance et laprécision. Pour don- ner corpsacet ambitieux projet, dont lemiroir concave nemesure pas moins de 15 cm de diamétre, ingénieux amateur aménage chez lui un atelier optique, o® il faconne des moules Grace au télescope qu’ila créé, William Herschel découvre une nouvelle planéte: Uranus. ‘Télescope 3 exon aig pa Willa Hersch, 1u'l lui faut encore polit pendant di Misauy "81774 met d'expl utr | \strument lui pe ere a Lune et de dresser un wtalogue les étoiles doubles, comme I'étoil Polaire, dont ilest lepremier adécou- rit l'un des astres « compagnons Sasceur participea leticheen idant aclasser lesastres, a calcule leurs positions et a réviser les résul ats de leurs travau Tne faut que quelques ai William Herschel de son propre télescope, pour faire s plus grande découverte. Dans la nuit vers la constellation des Gémeaux oi il remarque la présence d’« une curieuse nébuleuse oup ela ine comete ». Au bout de quelques s, apres avoir calculé son orbit lavérité se fait jour il s'agissait belet bien d’une nowvel Ste, qui sera Jus tard baptisée Uranus, la septi¢me du Systéme solaire et la premiére découverte depuis Anti les DE FABULEUX PAYSAGES LUNAIRES FASCINE PAR LA LUNE, com Peer ee caat ue an esses Peotone Ere ne aed Etre ras) Per caster! article publié en 1780, il établit «la forte probabilité, voire la Cee eee a eee eet on eis SE ar eel SLE cst acs Brrr de verdure » & la surface dela ecco cr peer Ne eons coe luxuriantes Cee ere ion oem ta bases de la connai mique ayant été consignées par Pto- lemée au tr sidcle apr. J.-C Véritable coup de tonnerre dans iel scientifique, cette e fait décoller la carriéxe de I'astronome rice a 'intercession de l’influent Joseph Banks, président de la Royal Je Londres, William Her >mmé astronome du Toi George III, malgré les critiques de ses détracteurs, D’aucuns cherchent effet a discréditer sa découverte Vat qu'une simple éto LES PERSONNAGES vingtaine de reprises depuis 1690, minimisant du méme coup la puis- sance du télescope de Herschel. ‘Au cours de la décennie suivante, William et Caroline Herschel taillent des miroits et assemblent des téles~ copesdeplusenplus volumineux. Au réflecteur de 15 cm de diametre suc- cadent ainsi des modeles de 22,5m eet. rs nee puis de 48 cm de diamatre, respec tivement montés sur des tubes de 3met de 6m de long. Internationa- Jement réputés pour la précision de leurs instruments, proportionnelle la taille de leurs miroirs, les deux astronomesne tardent pas arecevoir une commande de l’observatoire royal de Madrid. Réduit en cendres en 1808, six ans aprés sa livraison, par les troupes de Napoléon lors de occupation francaise de l'Espagne, cetélescope anéanmoins été recons: truit entre 2001 et 2004, grace aux plans quien avaient été conservés. En 1789, le duo d’astronomes achéve sa plus grande création : un ‘€lescope de 12 m de long sur 122m de diamétre, qui restera le plus grand du monde jusqu’en 1845,et dont tainsmiroirspésent plusde 3 tonne. Fort de ce coloss financé en 1785 par une subvention de 2.000 livres accordée par le roi grce & une nouvelle intercession de Joseph Banks, William Herschel espére élucider Vénigme des nébuleuses et découvrir Vorigine des €toiles, voire percer le my: tredelavie dansl'univers. UN TRAVAIL D'EQUIPE LA MANIPULATION du gigan- tesque télescope était un exercice périlleux, et William et Caroline Herschel sem- biaient piloter un vaisseau spatial: lui posté au sommet, sur une plateforme dobser- vation & laquelle il accédait par des escaliers, et elle 31a base, dans une cabine oi elle prenait des notes & la lueur d'une bougie, entourée d'une panoplie d'atlas, d'horloges, de camnets et de tases vides. Pour communiquer sans inter- rompre leurs observations, le frere et la sceur utilisaient un systéme composé de clo- chettes, d'une corde et d'un pavillon, Journal ébseratins de Cacne Hertel ob ell consgnela découverte ne come en 190, Ce nouveau télescope est desti- né a lobservatoire astronomique de Slough, od William etCaroline s‘ins- tallent pour Poccasion dans unemai- son qui se transforme bientot en un repaire de curieux, d’artisans et de spécialistes du polissage. ILleur faut solliciter un financement supplé- ‘mentaire pour terminer leur ouvrage, portant son cott total a 4 ooo livres pour la Couronne britannique. Des son inauguration en1789,cetteprodi~ gieuse invention révéle son potentiel en leur permettant de découvrir les deux premiers satellites de Saturne: ‘Mimas et Encelade. Aussi brillante que son frére Cet instrument présente malgré tout uninconvénient majeur :ladifficulté de sa manipulation est proportion- nelle a ses dimensions imposantes. Non seulement le polissage de ses vastes miroirs doit étre fréquent, Tics Seite Z eee 2 tem, a DORSCTE. penn ikers pour éviter que leur surface ne se déforme,ne se ternisse oune s’oxyde, maisle téléscope se révele de surcroit périlleux pour William et son frére, Alexander, quifrdlent unjourlamort en démontant ce colosse. Pour permettrea William dene pas nterrompre ses observations systé- matiques du ciel, comme 'exige sa méthode, sa soeur l'assiste de prés en notant méticuleusement Vheure et la position des différents corps célestes. Noncontente d’apporter son précieux concours aux travauixde son frére — ce qui lui vaut de recevoir un salaire a partir de 1787 —, Caroline fait elle- méme la découverte de huit cométes, ainsi que d'autres corps célestes. Lentreprise familiale se poursuit aprés1788, lorsque Caroline quittela maison de Slough, devenue le domi- cile conjugal de William et de son épouse, Mary Baldwin. Au cours de leur extraordinaire carriére, William et Caroline ont catalogué des milliers objets invisiblesaVceilnu, principa- lement des nébuleuses et des étoiles doubles, confrontant ainsi Europe et son romantisme naissant ai mensité de univers. En fabriquant «un télescope capable [...] de pené- trer espace et le temps », Williama contribué afaconner une vision plus moderne du cosmos, pergu comme une réalité non plus statique, mais ‘dynamique et mouvante, parsemée de grapes d’étoiles comparables a des espéces végétales ou animales suivant leur propre cycle ¢’expansion, puisde décomposition.s ‘ARLOSPREGONELERO a Pt | in eect, choir] Ra BaaA Sa aot | eres La Khazarie, l’empire juif surgi des steppes Entre le vir’ et le x® siécle, les velléités d’expansion musulmane vers I'Europe orientale ont été contrecarrées par le puissant empire d'un peuple nomade a histoire singuliére. uu vir siécle, les Khazars fondérent un vaste et puissant empire en uni- fiant les steppes d’Eura- sie : la Khazarie. Largement tombé dans Voubli, ce peuple de légende nen marqua pas moins I’Histoire en contenant pendant plusieurs sidcles la poussée de l’Islam, dont Vexpansion menagait l’Empire byzantin, D’aprés VPhistorien bri tannique Douglas Morton Dunlop, «lest peu douteux que, s‘iln’y avait eu les Khazars dans la région nord du Caucase, Byzance, rempart de la civilisation européenne a V’Orient, se serait trouvée débordée par les Arabes ilest probable que histoire de la chrétienté et de V'Islam aurait étéensuite bien différente de ce que nous en savons. » Dans l'Europe orientale, du vit sigcle au milieu du »¢ sidcle, ce peuple des steppes par- vint en effet a conquérir le sud de la Russie, entre la mer Caspienne et la mer Noire, et a s’étendre jusqu’a la Crimée et au sud de 'Ukraine actuelle. Pour les historiens, la puissante cavalerie khazare aurait ainsi permis au Vieux Continent de repousser les tentatives d’invasion lancées contre ses confins orientaux par les successeurs de Mahomet, bien décidés a étendre leur califat aureste dumonde. Cependant,ilest difficile de retra~ cer l'histoire des Khazars, sur les~ guels la principale source reste les récits laissés par des peuples voi ins au sujet de leurs irréductibles -nnemis. On sait néanmoins avec plus de certitude que les Khazars se seraient établis autour du v'siécle dans le delta de la Volga, au nord du Caucase. Comme nombre d'autres nomades des steppes d’Eurasie, ils auraient été poussés a migrer par Vavancée d'autres peuples guer- riers, enl’occurrence les Avars etles Sabirs, précédés par les Huns qui avaient déferléun siécle plus tat sur Europe orientale, Aucun texte ne nous est directement parvenu des Khazars. D’aprés certains auteurs, leur langue primitive aurait germé de la branche ougrienne, originaire de la Volga, comme celle des Hon- gtois partis des steppes entre le vt etle vir siécle, pour ensuite évoluer vers un dialecte turco-tartare. Une armée redoutable Affranchie au milieu du vu" sigcle des jougs successivement imposés par 'empire des Huns puis par ’em- pire des Tures occidentaux depuis le ve siecle, la Khazarie vit fleurir des disciplines comme Varchitec- ture, 'économie, laculture et Part, et atteignit de telles dimensions que le monde musulman la désignait sousle nom de « royaume du Nord ». Peuple semi-nomade, les Khazars parse- mirent leur royaume de villes pour- ‘vuesdemaisonsen pierre, de palaiset de lieux de culte, oils vivaient dans desconditions bien moins rustiques que les autres peuples des steppes. Parmi les villes de ce royaume diri gé par un « Grand Khagan », plu- sieurs remplirent successivement LEVENEMENT UN CARREFOUR COMMERCIAL SITUEESURLAROUTE des caravanes, la Khazarie prélevait un droit de 10 % sur la valeur des nombreuses cargaisons de marchandises et d'esclaves qui transitaient sur son terri- toire. Elle-méme produisait des fruits et un vin réputé en cultivant avec le plus grand soin ses vastes terres arables. la fonction de capitale: d’abord Balandjar, dans le pigmont septen- trional du Caucase, ensuite Saman- dar, au bord de la mer Caspienne, et enfin Atil (ou Itil), a cheval sur les deux rives de la Volga. Citée dans de nombreux textes médiévaux, cette derniére fut notamment décrite par Ibn Fadlan, un voyageur musulman du x‘ sigcle: « Sur une rive habitent Jes musulmans, sur autre leroiet sa cour. Les musulmans sont gouver- néspar l'un des officiers duroi quiest lui-méme musulman. » La puissance du royaume khazar reposait sur son armée de métier de 7.000 412000 hommes, « qui en temps de paix faisait régner ordre dans la mosaique des ethnies et qui entemps de guerre pouvait structu- rer les hordes, lesquelles [...] comp- taient quelquefois 100 000 hommes cet davantage ». Déterminés aconqué- rir la Transcaucasie, les Arabes s’y heurtérent donc a de redoutables guerriers, qui repoussérent systé- matiquement leurs assauts et rem- portérent les deux longues guerres livrées entre 642 et 654, puis entre 722 et 737. Conscient de cette contribution a intégrité de VEm- pire byzantin, Pempereur Constan- tin V alla jusqu’a épouser la fille d'un Grand Khagan, qui lui donna Conscient du réle de rempart que jouaient les Khazars, I’Empire byzantin noua avec eux une alliance contre le monde arabe. ‘Sokdvsbeantin eno. eligi Costar Vet eons Eon leKhazar (gauche ete), sic. EVENEMENT un béritier plus tard surnommé Léon IV «le KI La religion pri était une forme de chamanisme, originaire comme eux des steppes ’Eurasie et majoritairement prati- ‘quée par des peuples turco-mon, (comme les Turcs, les Mongols, les Bulgates, les Huns, et probablement itive des Khazars les Hongrois). Ils consacraient de rir grandioses cérémonies un dieu-ciel ls immo- aient dunom de Tengri, auque jaient des chevaux. Ils rév par ailleurs la Lune, Veau et le feu, etarboraient des amulettes solaires. Lachronologie traditionnelle situe autour de 740 la conversion du roi, de sa cour et de la classe militaire dirigeante au judaisme, qui devint Ja religion officielle de la Khazarie ie mmande See Dee Leroikhazar B lan aurait priscette surprenante décision au terme d’un débat théologique entre un musul- man, un chrétienet un juif, o0 seul le dernier serait parvenu a démontrer la verité de son texte sacré, ’Ancien face a celle du Coran et Testament, du Nouveau Testament Une conversion politique 786-809), Oba- Sous son régne diah embrassa 4 son tour la relig transmise par son grand-pére. Dansla correspondance entre leministre juif du calife de Cordoue et un roi khazar postérieur dunom de Joseph (milieu du x sigcle), ce dernier expliqua ‘qwObadiah « réformalaRegle renforca la Loi selon la tra~ dition et usage, batit des synagogues et des écoles, assembla une multitude de s d'Israél, leur distribua de nt, ifiquesprésentsd’or et d'arg LES ANCETRES DES JUIFS ? LAPUBLICATION de La Treiziéme tribu (1976) ft beaucoup parler de son auteur, Arthur Koest- ler.Issu d'une famille juive de Hongrie, celuici y défendait en effet 'idée que les juifs d'Eu- rope ne descendaient pas des peuples sémites de I'Orient ancien, mais bien d'un peuple turcique du Caucase qui se serait converti au judaisme : es Khazars. Aprés la chute de leur royaume, ces derniers auraient émigré vers 'Quest et donné naissance aux communautés ashkénazes d'Europe centrale et orientale. Tous les spécia- listes ont toutefois contesté cette thése, formulée pour désamorcer l'antisémitisme del'époque Falun dun mans aka le Peatuae de Ratstome. 3 ct leur fit interpréter les 24 livres, a Michna et le Talmud ». Des rudi- ments a Vorthodoxie, la conversion des Khazars s‘opéra donc progressi- ‘vement, de générationen génération. Parmi les historiens doutant de explication théologique et curieux de percer les vrais motifs d’une telle conversion figure John Bagnell Bury. Au début du x« siécle, ce pionnier des études byzantines écrivait «On ne saurait douter que le souverain ait 6té poussé par des motifs politiques [...]. Embrasser la foi de Mohamed efit été dépendre spirituellement des califes [..J, et le christianisme risquait de faire de lui un vassal ecclésiastique de I’Empire romain. Le judaisme était une religion hono- rable, possédant des livres sacrés que respectaient chrétiens et mahomé- tans; ill’élevait au-dessus des paiens barbares, et Passurait contrelesinter- ventions du calife oude Yempereur.» Les Khazars se seraient donc conver- tis aujudaisme pour desmotifs moins religieux que politiques. Un climat de tolérance Les rois khazars n’imposérent pas pour autant leur foi a la mosaique de peuples qui composaient leur empire: les tribus paiennes conti- nuérent a adorer leurs idoles, et les monothéismes chrétien et musul- man a vénérer leurs Saintes Ecri- tures. Persécutés dans I’Empire byzantin, nombre de jufs gagnérent ainsi la Khazarie entre le vir et le x‘ siécle, attirés par son climat de tolérance religieuse. « En Khazarie, moutons, miel et juifs se trouvent a foison », observa al-Mugaddasi, un chroniqueur qui ne fut pas le seul auteur ay constater leur poids démographique. Exilés en Khaza- rie, les juifs y introduisirent leurs pratiques artistiques, artisanales, agricoles et commerciales, ainsi que alphabet hébreu, qui devint l’écri- ture des couches les plus savantes dela société, ‘a puissante Rus’de Kiev, fondée aun siécle par des tribus vikings sur lesrives du Dniepr et constituée par les Slaves de ’Est,finit toutefois par conquérir la Khazarie. Au bout de deux années de guerres et d’incur- sions, son grand-prince Sviatoslav * parvint en 961 a faire tomber ses principales forteresses, puis s’em- parer de sa capitale Atil vers 968, cengloutissant ainsiles derniersrestes del’ Empire khazar. AxToNORAT aston Pour en savoir plus 13 Treteitme Tribu. Empire MLA VIE QUOTIDIENNE Le regne des espions, au Moyen Age Ambassadeurs, musiciens ou marchands. . Les cours étrangéres étaient le royaume des informateurs secrets. Jilest une profession com- mune a toutes les sociétés humaines, c’est celle d’es pion. Chaque fois qu’une communauté a eu quelque chose & protéger ~ un secret politique, un vantage stratégique, une ressource économique —, ses adversaires ont cherchéa s’en emparer. Dans}'Europe médiévale, la multitude des nations et leurs affrontements ont rendu la présence des espions indispensable. De fait, la premiére mention du mot espion dans un document date de 1264, lorsque les Vénitiens qualifient dlespions les Allemands qui effec- tuent des reconnaissances sur leur territoire et enquétent auprés des habitants ala recherche de renseigne~ ments. ’écrivain Tommaso Garzoni (4549-1589) les définissait comme «une catégorie de personnes qui entrent secrétement dans une ville pour transmettre leur proprearmée des informations sur ’ennemi ». Texistait alors plusieurs sortes @espions. Le plus courant était Yémissaire officiel assigné en terri- toire ennemi, qui avait pour mission de remettre un message. Ce pouvait étre de simples messagers jusqu’aux envoyés les plus honorables, appelés hérauts, quiappartenaient &Varisto- cratie. En principe, ces derniers étaient censés se tenir alécart d'une activité aussi déshonorante que es pionnage. Mais, en1389, le héraut de Louis IIL, roi de Sicile, qualifiait de malhonnéteset d’espions ses homo- logues dans toute l'Europe. Officiels ou occasionnels Quant aux ambassadeurs, envoyés @un prince qui résidaient a la cour @unautre souverain, ilsont toujours &é considérés comme des espions potentiels. Henri V d’Angleterre fit ainsi emprisonner tous les ambassa- deurs francais durant la planification de Vinvasion de la France. BOUCHE COUSUE. AUPALAISDESDoGES, 3 Verise, une sorte de botte aux lettres, appelée « bouche du Lion », servait & dénoncer des fits de maniére anonyme. Tout citoyen pouvait yalisser un papier surlequel était inscrit la personne quil accusat et son moti Bouche Lona pois des Does 8 esis. Outre cesespions « offciels »,pour ainsi dire, beaucoup d’autres per- omnes pouvaient occasionnellement remplirles fonctions d’espion :mar- chands, musiciens, médecins, reli- giewx, voire pUlerins. Par exemple, un astrologue espagnol déguisé en péle~ rin sur le chemin de Saint-Jacques- de-Compostelle a été envoyé en Angleterre pour participer dune ten tative d’assassinat du roi Henri VIL Comme il avait perdu deux dents et que ce défaut physique le rendait faci- Jement identifiable, il en avait fait fabriquer deux de rechange en ivoire de laméme couleur que les autres. Deacon générale, au Moyen Age, ondistinguait trois sortes d’espions, juotidiennes, de Ia plus grande onfiance, et le plus souvent embre de la Chambre du roi. Sa ission consistait a gérer les infor ations qui parvenaient au gouver- yement a travers le réseau d’espic lui-méme mis en plac Jacques IV est curieu: puisque son principal espion était un simple garcon ’écurie 7 Les ambassades sont de vrais nids d’espions Cee an Taco PvE eM ee Mee Mc con se Cer eer ene ec Rue Ce CE ee ete cee eee ica ed Co eee Peet ene ee cue Pe Oe nc En 1413, des envoyés du duc Ce ae ea) Ceca ect’ Ete ieee eCuemce ie dans le pays. Ceux-ci, au ser- Reet Ponca Pee eee eae etc eee at acs eee an en Pees ete oy Pee Tees Peet anor ae Ce ea enon cea aed de surveillerles personnes ren- pened ea ees QUOTIDIENNE Sele) a4) AGE ener ad Scene ty eee Cel See coe Tecate. ase eartecar el em ee ee ast See erent eee er eae nd seed pion au ser A cété de cet officier de la Cou- ronne se trouvaient les agents de ter- rain, dont lerdle était de recueillirles informations. La plupart étaient des agents occasionnels, que la Couronne obligeait parfois & effectuer cette tache enrraison d'une faute commis. Beaucoup, cependant, le faisaient pour de argent, pris surla caisse per- sonnelleduroi. Ainsi, partir de 1378, Nicolas Briser, espion francais payé par ’Angleterre, recut chaque année une rétribution de 50 marks. A la méme époque, un certain Frank de Hale, capitaine Calais, base anglaise dans le nord de la France pendant la guerre de Cent Ans, disposait d’un budget de 104 livres pour payer «divers messages et autres espions LJ, pour espionner et connaitre la volontéet les actesdes ennemisdela France », ainsi que 50 marks pour la propagation de fausses rumeurs. Cy De tous les espions, le plus utile était agent retourné -direun espion ennemi démasquéet contraint de travailler comme agent double. Dans la plupart des cas, I'agent démasqué était liming, Maisiln’était pas rare qu'il entre au service du prince quil’avait capturé. Ce futlecas de Thomas Turberville, emprisonné par les Frangais en 1294 et contraint de les servir la cour d’Edouard I @’Angleterre, tandis que ses fils étaient gardés comme otages en France. L'année suivante, Turberville fut démasqué, jugéet finalement exé- cuté publiquement & Londres. est L’usage de la cryptographie S'il était difficile de retourner des agents capables d’obtenir un re gnement exactetutile, il étaitencore plus detransmettre une information en territoire sar. Des systémes de prorat’ oes cxyptage ont été congus trés tot dans Histoire pour protéger les rensei- gnements secrets. Les plus simples consistaient & remplacer des lettre pardeschifites. On protégeaitle me: sage en changeant ses lettres par une série de chiffres ou de symboles sans ‘gnification apparente. Bien stir, il fallait au préalable communiquer la clé du code au destinataire et & lex- péditeur pour le décryptage. Les Archives générales de Simancas, en Espagne, conservent des dizaines de documents chiffrés, congus par 'am- bassadeur d’Isabelle la Catholique en Angleterre, le docteur Rodrigo Gonzalez de Puebla, et plus tard par lecardinal de Granvelle, avec des ins~ tructions et des négociations sur le ‘mariage du futur Philippe Il avec la reine d’Angleterre. evanche, les méthodes de des agents occasionnels Lettre codée a l’ambassadeur de Londre c 'ambassadeur des Rois Catholiquesalac ea Cres ee car ne clé permet de déchiffrer Cras eusE Pee ane aed que lui écrit une missive en utilisant ce systéme de codage 3 Vos Altesses 97. troupes ie la Bretagne ee ee Or eee oe Bi de by fi cle prada etre eb 188. Jl semblat done fn gulls Se Romsina 64. paix 8. le roi de France ‘piennent se rpeser ic, puisqu’on n eoait pas besoin dlls en 36. 97 ne Ait 1 97, Les troupes Bretagne perroaient sub-oenir a ers besins, fate de prisions. es ents cmtraires ote ar pris date Ae de lem de Cage. Connells seneeyewnce deer leshsi sherri sderatls pas ordres |] De grands prparaif sont néesaires, cw 3 seulement exooyer Wt uc ell tis, as fi as fire rte "att 658 des dares parts de es 1. Da psi fat i ede ent — (itt ds cis 3, 9 le deer Ea fe 102. Grenade 371. tenttoires 39, ilnest pas ag et tat pins (91. perdre 102. Grenade 92. gagné —marchands, religieux, musiciens, Vespionnage était la plusmalhonnéte paysans, artisans — étaient plusima- detransmettrelecontenuaugouver- des activités, car elle reposait sur la ginatives. Les commergants au ser-nement. Pendant la guerre de Cent trahison de la confiance obtenue vice du Conseil des Dix, responsables Ans, l’Angleterre a misen place un Tout au long de Histoire, la fin durenseignement danslarépublique couloir protégé pour latransmission _attendue des espions était la mort, de Venise, ont développé une de ce type d'information. Le point _aprésavoir été soumisauxméthodes méthode métaphorique dans leurs de départ desdifférents agents surle de torture les plus variées. Trés peu messages :lorsqu'lsécrivaient draps continent étaitla ville de Calais, et le d’espions démasqués ont survécu, et vermeils, ils faisaient référence la passage sir pour la livraison des ceux quiont survécuT’ont fait au prix marine turque; la marine espagnole informations se situait entre la ville d'une double trahison. Deméme, trés, Gtait désignée sous le nom de draps frangaise de Wissant et la ville peu d’hommes honorables se sont verts,etlenombrede drapssollicités anglaise de Douvres. Une fois sur le livrés une telle pratique au Moyen correspondait aux unités militaires; territoire insulaire, un couloir sr Age. Cen’est qu’au xx¢ siécle que la s‘ilsrecommandaient 'utilisationde vers Londres était prévu, jalonné de figure deT’espion a été débarrassée du. lanappe de table, ils demandaient de _postes, avec des haltes obligatoires —discrédit, de 'infamieet de la calom- Vartillerie, et sil fallait absolument danslesvillesdeCanterbury, Roches- nie quil'entouraient. payer une livre de soie par envoi, lester et Southwark. En 1373, on dispo- ATMEL agents réclamaient d’urgence un _saitd'unbudget de1 mark par jour par DocrEe¥ SORE ND envoi de poudre a canon, homme et par cheval Cependant, s'il était important de En tout cas, contrairement ea protéger le contenu des messages, il VimageromantiquedeT'espionaven- sa *rplonnage au Moyen Age Vétaitplusencoredesécuriserlecanal turierrépandueparlalittératureetle Plus | 20% de communication entre les espions cinéma, pour la plupart des gens, fate le 1xXetle x’ si Secreta fare) ol eel era a kets ee puis abandonnée Sur cet effondrement longi i a Oe eS Pometenerc etre ee Paces Pree eed Cet ec se dresse le temple V de 'ancienne Sees Guatemala. Cet édifice de 57m dehaut, situé sur 'acropole eee eee) Pees Atta Ms bj ee ius ane “ Senta gael Campeche, surgit au milieu de la végétation luxuriante. La ville VEE > eee eae Say Pee eae Se era ee eu ‘ pened ntre 600 et 900, les Basses Terres — un vaste ter- ritoire comprenant le sud du Mexique, le Guate- mala, le Belize, l’ouest du Honduras et le Salvador — abritait les centaines de cités qui constituaient la civilisation maya. L’une d’elles, Cancuén, était une enclave prospére, politiquement liée au puissant royaume de Calakmul, qui occupait une position stratégique sur les routes commer- ciales de la région. Parmi les nombreuses inscriptions trouvées sur ses monuments, la derniare date écrite remonte a 800. Les preuves archéologiques indiquent que la ville a subi a cette époque une vio- lente attaque. La famille royale et d'autres membres de lanoblesse ont été tués et jetés, avec leurs emblémes de pouvoir et leurs bijoux en jadéite, dans trois espaces funé- raires improvisés:: un ravin et deux bas- sins artificiels. Dans le plus grand bassin, 38 corps ont été retrouvés, dont ceux de deux jeunes enfants. Tous présentaient des traumatismes craniens précis et brutaux. Cette violence n’est pas un fait isolé dans le sud de aire maya. Dans les premiéres décennies du 1x siécle, une crise politique et sociale dans les Basses Terres a touché presque toutesles villesmayas. Alafindela période classique (250-900),les scribes, les sculpteurs et les prétres ont cessé de sculp- terdes monuments, les récits écrits sur les actes des souverains se sont interrompus, et laconstruction des acropoles, avec leurs palais et leurs temples, s’est arrétée. Les villes ont été abandonnées, parfois pour coat plateau r influenc atre occupées par des groupes de ruraux gui se sont installés dans les palais et les temples. Ce que les chercheurs ont appe- 16 ’« effondrement maya » commencait a prendre forme. Cet effondrement n’a pas été immédiat, et il ne sest pas produit en méme temps dans tous les royaumes. II s’agit d’un long processus de décadence, qui aduré plus de 100 ans, une lente érosion qui s’est trans- misede villeen ville. Le déclinacommencé dans la région de Petexbattin, il s'est éten- du a la région du fleuve Usumacinta, puis a fait tomber peu a peu tous les royaumes comme les pices d’un jeu de dominos. La junglea commencé a reconquérir les terres que lacivilisation maya avait soustraites ala nature pendant des siécles. Les arbres et la faune locale ont pris possession des palais, des temples et des places. Leffondrement des Mayas a fait 'objet denombreuses études et a inspiré diverses théories concernant ses causes. Les cher~ cheurs s'accordent a ire que c’estlasomme de plusieurs facteurs quiaconduit la société maya plonger dans une crise finale. Ainsi, diverses hypotheses ont été émises, qui fermi fi Pores APUISSANCE ROYALE Lepanneau3 de Cancuén, sculpté en 795, montre le roide la vile, Tajal Chan Ahk, accompagné d'un noble et d'un prétre. Musée régional du monde maya, Flores (Guatemala) aut dignitaie maya Tete ensue dépoave cdasiqu (600-900. EGE oe tics Copnaley sete Fee mettent en cause la démographie, 'écono- mie, la sécheresse, les affrontements et les guerres, les maladies, la politique, la reli- gion, et méme l’astronomie. Lun des éléments déclencheurs de cette terrible crise, selon certains historiens, serait la surpopulation des cités mayas. Au début du n* siécle, en effet, la civilisation maya avait atteint le sommet de sa courbe démographique. La cité de Tikal, dans I'ac- tuel Guatemala, était la plus peuplée de toutes les cités mayas jusqu’a cette date, atteignant un pic d’environ 50 000 habi- tants, avec une densité de population supé- rieure a celle que 'on trouve aujourd'hui dans certains Etats mexicains. En consé- quence, Vapprovisionnement en nourriture représentait un défi croissant, quia conduit l’expansion des terres agricoles au moyen de la déforestation des surfaces environ- nantes. Mais il est probable que ces déve- loppements n’aient pas permis de nourrir une population aussi élevée. Rébellions contre le pouvoir Certains chercheurs ont également mis en évidence, comme élément déclencheur de lacrise maya, incidence de phénoménes climatiques mondiaux qui se sont pro- duits a cette époque. Des études récentes sur le paléoclimat suggérent qu’autour du 1x* siécle des périodes prolongées de séche- resse se sont succédé dans certaines régions des Basses Terres, mais pas dans toutes. Les mauvaises récoltes ont entrainé des famines, des épidémies et des maladies telles quele scorbut et la tuberculose. Dans ce contexte de difficultés de toutes sortes, les souverains n’ont finalement pas réussi Aenrayer le chaos, la dispersion dela popu- lationetlaruine du systeme politique. Avec une structure hiérarchique aussi rigide que celle des cités mayas, ot le roi était la plus haute autorité et le responsable dela vie des citoyens, les révoltes politiques internes et les rébellions contre le pouvoir en période de pénuries ne devaient pas étre rares. Unautre facteur quia sans doute contri- bué a la crise du monde maya a été les LEMO IDE MAYA Ape aor 6s drigés par de puissantes dynastie meet din ence maya en Ama guerres entre royaumes et cités. Dans ’es- pace maya, de grandes cités gouvernées politiquement et religieusement par un roi (gjaw) — lui-méme membre d'une dynas- tie familiale qui se maintenait sur le tréne pendant des sidcles — cétoyaient d'autres royaumes plus petits, qui leur devaient allégeance et étaient administrés par des souverains de moindre impor- tance, liés aux premiers par voie dynastique. Les relations entretous ces royaumes étaient compliquées, et, en ces temps de tension, elles donnaient liewa des conflits armés qui entrainaient des migrations massives de population. Ajoutons cela que lesbataillesetles guerres Statute dun digit maya dee de in dans tat mexican de Capethe eee tye ee Stile 1 dePetas Negras. ‘Musée national darchelogie et dethnologe Guatemala ‘éote desin dea stile par Linda Schl 986, ‘Musée Ghrt ducts elas Angeles. i : i i j } i LE SORT DES VAINCUS ‘CONNU SOUS LE NOM DE STétE 12, ce monolithe représente une prise de captifs apres labataile ‘que la cité de Piedras Negras a menée contre celle de Pomoné le 1" avril 792. La stéle est présidée par le vainqueur, le souverain de Pie-

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