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Blanchet - Review Kraus
Blanchet - Review Kraus
Blanchet Marie-Hélène. Christof Rudolf Kraus, Kleriker im späten Byzanz. Anagnosten, Hypodiakone, Diakone und
Priester 1261-1453. In: Revue des études byzantines, tome 68, 2010. pp. 256-259;
https://www.persee.fr/doc/rebyz_0766-5598_2010_num_68_1_3074_t13_0256_0000_2
Olivier DELOUIS
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un prêtre (le grade de sous-diacre est très rarement mentionné à cette période). S’il
existe bien un âge requis pour accéder à chaque degré ecclésiastique (20 ans pour être
ordonné lecteur, 25 ans pour diacre et 30 ans pour prêtre, selon une règle qui semble
avoir été respectée), la progression dans cette hiérarchie n’est absolument pas la
norme, en sorte qu’un clerc peut très bien rester lecteur toute sa vie tout en exerçant
différentes fonctions. Sur ce point, les interdits matrimoniaux ont pu jouer un rôle : le
prêtre et le diacre doivent en effet être mariés avant d’être ordonnés et ne peuvent se
remarier en cas de veuvage, tandis que le lecteur peut se marier ou se remarier après
son ordination. En pratique, dans les campagnes et les petites métropoles, les prêtres
dominent, car ils sont indispensables à la célébration de la liturgie ; mais au sein du
clergé des grandes métropoles et du clergé impérial, les diacres sont aussi nombreux
que les prêtres car leur présence rehausse le faste des cérémonies. En ce qui concerne
l’administration ecclésiastique, l’étude de C. Kraus montre que les grandes métro-
poles – et même les moins grandes comme Serrès par exemple – calquent leur fonc-
tionnement sur celui du patriarcat de Constantinople : on retrouve donc partout les
cinq premiers offices (économe, sakellarios, skeuophylax, chartophylax et sakelliou),
mais aussi toute une série d’offices inférieurs (26 identifiés au total pour Serrès, 25
pour Thessalonique, 17 pour Zichna).
Si les déviances et conflits sont aussi bien étudiés, on regrettera en revanche que
certains aspects soient évoqués beaucoup plus brièvement par l’auteur : hormis la
question du mariage, où le rôle du clerc comme garant de la légalité de l’acte est bien
analysé, les activités liturgiques sont très peu explorées ici, sans doute parfois par
manque de sources. L’auteur indique que le système d’organisation des fidèles en
paroisses, tel qu’il existe alors en Occident, ne se retrouve pas à Byzance, mais il
n’étudie pas les conséquences d’un encadrement pastoral aussi lâche, par exemple sur
la fréquentation de la liturgie dominicale, la catéchèse ou encore l’administration des
sacrements. De la même manière, la formation des clercs est examinée fugitivement,
la question délicate de l’existence d’une École patriarcale n’étant même pas évoquée
sauf erreur. Or l’un des points communs à tous les clercs réside certainement dans
leur aptitude à lire et sans doute aussi à écrire, ainsi que dans leur connaissance,
même sommaire, des textes sacrés, de la liturgie et du chant. Une telle recherche reste
à faire, même si les sources précises sur ce point sont certainement difficiles à réunir.
À l’issue de son étude, C. Kraus est en mesure de répondre avec quelques nuances
par l’affirmative à la question qu’il avait posée initialement : les clercs forment bien
un groupe social spécifique à Byzance. Ils sont tout à fait distincts des moines, avec
lesquels ils semblent du reste entretenir peu de liens (ce qui n’est en revanche pas le
cas des métropolites, le plus souvent issus des milieux monastiques). Les simples
clercs n’appartiennent pas non plus à l’aristocratie, pas même ceux de Constantinople,
comme le montrent toutes les analyses prosopographiques effectuées dans l’ouvrage.
Ils se distinguent enfin du peuple par l’ordination qu’ils ont reçue et par les fonctions
liturgiques qu’ils exercent, sans doute aussi par leur degré d’alphabétisation et enfin
par leur régime matrimonial particulier, même si de fait la plupart des simples clercs
semblent être mariés et pères de famille. Il reste que les différences sociales à l’inté-
rieur de ce groupe sont considérables, en sorte que les clercs pouvaient difficilement
se concevoir eux-mêmes comme une catégorie homogène.
Cet ouvrage de synthèse rendra de grands services à tous ceux qui s’intéressent à
la période paléologue, tant il est vrai que chacun est amené à rencontrer de simples
clercs dans les sources sans savoir toujours comment interpréter les données qui les
concernent. Le plan géographique du livre ainsi que les index des noms de personnes
et des actes patriarcaux, qui figurent à la fin, en rendent la consultation aisée : cette
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ultime qualité devrait contribuer à faire de cette étude un ouvrage de référence tant
pour les historiens de l’Église byzantine que pour les spécialistes des 13e-15e siècles.
Marie-Hélène BLANCHET