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Recherche e Applications ea Marketing vol XI, 2° 196 SYNTHESE Packaging : une approche sémiotique Florence Dano Professeur Associé Groupe ESC Marseille Provence, Centre de Recherche CEROG, IAE Aix-en-Provence RESUME Cet article présente une description et un approfondissement du concept packaging en suivant les préceptes développés par la sémiotique (étude des signes). L’intérét consiste & aborder le packaging comme un objet de sens en l'inscrivant non seulement dans un processus de communication mais également dans un processus de signification en se démarquant ainsi des approches techniques ou commerciales généralement suivies dans la littérature. Dans la premiére partie on s'attache & Aécrire le packaging comme un discours produisant du sens. La seconde pattie propose «identifier et d’approfondir six fonc- tions de communication que l'on peut attribuer au discours-pac INTRODUCTION Pour les entreprises et plus particulitrement pour celles produisant des biens de grande consommation, Te packaging est un élément capital du marketing du produit. Non seulement il protege et contient le pro- duit, assure sa commercialisation et sa promotion dans le point de vente, mais également, il véhicule certains messages que lentreprise souhaite faire pa venir aux consommateurs. Ces messages ont trait par exemple au positionnement du produit a image de Ja marque... A ce titre il joue un réle fondamental en matitre de communication et est aujourd’hui consi- déré par la plupart des professionnels comme « pre- mier_média du produit » (Bsn-Emballage, 1987 ; Caron, 1991 ; Devisme, 1991 ; Vitrac & Gaté, 1993) Ce réle est d’autant plus important que les entre- prises ne peuvent pas faire de la publicité média sur tous leurs produits. Quand lentreprise n'a pas les moyens de faire de la publicité, elle pourra néan- moins communiquer & travers le packaging. La publicité parle et fait parler « du» produit ; Ie packa- ging, lui, fait parler «le » produit, « il lui donne un corps, une dime et une raison d’étre » (Vitrac & Gaté, 1993, p. 128). L’action du packaging consiste alors & donner une valeur narrative au produit, & lui donner du sens. En dépit de la prise de conscience de I’importan- ce croissante du packaging en matiére de communi- cation, force est de constater que, dans la littérature, peu de travaux ont cherché & étudier en profondeur cet attribut du produit. Dans ensemble, les auteurs ont surtout montré que le packaging avait une influence sur la perception que le consommateur a du produit et qu’il permet de communiquer au consommateur une certaine image du produit et de la marque (Bilson & Granger, 1972; McDaniel & 24 Florence Dano Backer, 1977; Rigaux-Briemont, 1982; Zeithaml, 1985 ; Caron, 1991 ; Underwood, 1993). Ce proces- sus de communication est done généralement abordé de fagon mécanique c’est-d-dire sous un angle « sti- mulus-réponse ». Or communiquer, ce n'est pas seu- Iement se faire I’émetteur d’un message pour un des- tinataire donné, mais c’est eréer et échanger du sens, C'est-A-dire participer 4 un processus de signification. Crest dans ce cadre que s'inscrit loriginalité de cet article qui se donne pour objectif de proposer une description et un approfondissement du concept p: aging sous I’angle de la signification. En suivant les préceptes développés par la sémiotique nous nous aitacherons d’une part & décrire le packaging comme un signe ou plus exactement comme un discours et autre part, A définir les fonctions de communi tion que l'on peut attribuer au discours packaging CADRE THEORIQUE Si l'étude des signes est au coeur des préoccupa- tions des hommes depuis tes longtemps (Atistote, Platon, Hippocrate...) ce n'est qu’au début du xx?™* sitcle que les fondements théoriques de la sémiotique ont 616 définis & la suite des travaux fondateuts du linguiste suisse Ferdinand de Saussure (1916) et de ceux du philosophe américain Charles Sanders Pierce (1931-1935). Pour Saussure! la sémiotique (qu'il nomme sémiologie) est une « science des signes » & construire et se congoit comme celle qui étudie la vie des signes au sein de la vie sociale « On peut conce- voir une science qui étudie la vie des signes au sein de la vie sociale ; {...] nous la nommerons sémiolo- gie (du gree semeion, «signe »). Elle nous appren drait en quoi consiste les signes, quelles lois les égissent... ». Pour Pierce, la sémiotique se présente comme une doctrine des signes, plus proche de logique que de science. Elle se donne pour objet Pétude de la « sémiose » qu’il définit comme le pro- cessus de signification qui donne du sens aux chose. Ces deux approches se différencient d'une part dans leur définition du concept de «signe» et autre part, dans leur projet général de l'étude des, signes. 1. 1916, cit dans Eco, 1972, p 21 Le concept de signe Si nous suivons Pierce, le signe est rriadique : en tant que forme signifiante (representamen) le signe renvoie A une image mentale, & un signifié (interpre- tant) qui n’a un sens que parce que le signe lui-méme, renvoie & une entité physique, un événement, ou encore une action réelle (objet ou référent). Le signe ne représente pas la totalité de Pobjet, mais le repré- sente d'un certain point de vue ou en vue dun cer- tain usage pratique. L’ensemble de trois facettes (Signifianv/signifié/référent) forme le signe et leur réunion crée la signification. Néanmoins, on peut concevoir que le processus de signification puisse avoir lieu sans l’existence du référent. Par exemple le signifiant /fantéme/ existe et le signifié « fant6me » est assez clair pour ceux qui sont familiarisés avec le mystérieux et le fantastique, mais le référent fantdme n’a jamais eu d’existence réelle. C'est pourquoi, Saussure estime que le signe doit étre congu comme une entité & deux faces. Ainsi, dans la tradition Saussurienne, le signe est une entité qui ne comprend que deux faces : un signi- fiant et un signifié. Le troisidme pole (référent) n’est pour lui d'aucune pertinence pour I'étude de ta sémiose (Greimas & Courtés, 1979, p. 349-351) : le processus de sémiose peut avoir lieu sans l"existenc de Pobjet, Cette conception duale du signe a été approfondie par Hjelmslev (1971). Selon cet auteur, tout systéme de signification comporte deux plans et le signe deux faces : le plan de "expression et le plan du contenu assimilés au signifié et au signifiant définis par Saussure. C’est la conjonction de la forme de expression et de la forme du contenu (aussi appelée fonction sémiotique ou sémiosis) qui définit le signe. Dans les contributions sémiotiques _anglo- saxonnes, les chercheurs se reférent principalement, aux travaux de Pierce, et postulent un signe a trois faces (Sapir et Worf, Morris, Austin, Sebeok...) alors que les Européens (Hjelmslev, Eco, Greimas, Barthes...) suivent les écrits de Saussure et parlent un signe & deux face Des projets différents pour l'étude des signes Pour la sémiotique européenne (issue des travaux de Saussure), «Ja problématique du signe n'est qu'une étape a franchir vers la description de réseaux d'articulation des formes». La sémiotique anglo-saxone (issue des travaux de Pierce) « marque un arrét au niveau des signes et tend & procéder a leur classification qui est basée alors, pour une large part, sur le type de relation que le signe entretien avec le référent » (Greimas & Courtés, 1979, p. 350), Morris (1946)? a proposé de distinguer trois mensions pour étudier le signe: une dimension syntaxique qui est une dimension grammaticale ob on, S‘intéresse a la structure interne de la face signifiante du signe indépendamment du signifié qu’il véhicule ; une dimension sémantique od le signe est abordé dans sa relation & ce qu'il signifie ; et enfin, une dimension pragmatique qui décrit la relation entre les, signes et ceux qui les interprétent, le signe étant pergu en fonction de sa relation avec l'objet La sémiotique de Pierce est plus orientée vers la dimension pragmatique et sémantique du signe. C’est ainsi qu’il propose une typologie possible des signes, en fonction de leur rapport avec objet auquel ils se réferent. Le projet sémiologique de Saussure est plus orienté sur la dimension syntaxique et sémantique du signe. La sémiotique de Saussure est structurale, C'est A dire que objet consiste moins & étudier les signes en tant que tels, mais & déterminer de quoi les, signes sont faits et quelles sont les lois qui les régis- sent. Synthese Ces deux grandes approches fondatrices nous per mettent de reconnaftre des projets différents dans les recherches en marketing prenant la sémiotique come base conceptuelle. L’approche sémiotique des chercheurs anglo- saxons est plut6t fondée sur les travaux de Pierce (pour une synth?se voir Mick, 1988), alors que les continentaux suivent les travaux de Saussure (pour une synthése voir Pinson, 1988 et 1993). Dans notre recherche, nous nous réféterons & approche sémio- tique développée par Saussure. La théorie des signes de Saussure s’étant princi- palement élaborée dans le domaine de la Tinguistique, nous ferons surtout référence a ses extensions, & des 2 Cité dans Beo, 1988, Packaging “wie approche sémiotique 25 systemes autres que la linguistique, développées par d'autres chercheurs structuralistes tels que Barthes, Eco ou Greimas. LE PACKAGING COMME DISCOURS, Les images, les gestes, les objets... les packagings constituent sinon des langages, du moins des sys temes de signification. Bien que la théorie sémio- tique ait été principalement élaborée dans le domaine linguistique un certain nombre de concepts (code, signifiant-signifié, dénotation-connotation) ont été 6largis au point de valoir pour tous les systémes de signification, C’est & partir de ces concepts que nous décrirons le packaging comme un discours * Nous expliciterons tout d'abord les codes du pac- aging et les notions de « paradigme > et de « syn- tagme » qui inscrivent le packaging dans un proces- sus de signification, puis nous définirons sa «structure sémiotique» ainsi que les différents niveaux de sens pouvant éire identifiés. Les codes du packaging Le packaging peut étre défini comme un discours composé de organisation complexe de nombreux signes comme par exemple des signes linguistiques (les mots, les phrases), des signes iconiques (le gra- phisme, les images...)... Il participe non seulement 2 tun processus de communication, mais également & un processus de signification. Ce processus de signi- fication est rendu possible grace & existence d'un code entre l’entreprise (I’émetteur du discours packa- ging) et la cible (le récepteur du discours). Ce code, caractérisé par un répertoire de symboles combin 3. Un discours tout comme le signe est compris au sens dobjet cempitique, matériel ou éciit et est observable et descriptble. Dans eette recherche, il apparait plus pertinent de considéter Je packagin wun objet signifint, comme un discours (émis paar une entteprise 4 destination de consommateurs) plutét que comme un signe puisgu’il comespond 2 organisation de non breux signes comme nous le montterons par la suite: « Dans les processus de sémiose, on proctde rarement par échange de signes igotés... Dans U'univers de la sémiase, es signes s"organisent en énoncés qui ewe méme s’organisent en textes, en discours » Eco, 1988, p25 6 Florence Dano suivant certaines rgles, doit étre commun (du moins en parlie) aux deux actants de la communication sous peine d'absence de signification. Prenons l’exemple @une bouteille de Coca-Cola ; ce packaging commu- nique dune part, son usage (contenir, protéger), et autre part, un certain style de vie et de consomma- tion «jeune, dynamique, américain... ». Ceci est vrai dans notre systtme socioculturel et si l'on montre une bouteille de Coca-Cola en demandant ce que cela, représente, il y a de fortes chances que les personnes interrogées nous répondent : « une bouteille de Coca- Cola ». I existe bien un répertoire de symboles com- muns entre entreprise Coca-Cola et les individus interrogés. Par contre, si l'on présente cette bouteille A des individus ne possédant pas ce répertoire, il est plus que probable que ce packaging ne communique- a pas la méme chose que pour nous ; c’est exemple de Ja tribu Bushman dans le film « Les dieux sont tombés sur la téte», ot le packaging se voit doté dun sens totalement différent entrainant un biais dans son utilisation, semant, par 1a, la zizanie dans la tribu ! En sémiotique, le code est défini selon deux com- posantes dont T'articulation permet la production de message (Greimas & Courtés, 1979, p. 29): axe paradigmatique et 'axe syntagmatique. L'axe para- digmatique est T’axe de la sélection qui ordonne et qui structure les unités signifiantes et qui permet de faire un choix parmi celles-ci ; il est caractérisé par une hiérarchie de relations du type «ou...0u...». L’axe syntagmatique est celui des combinaisons de ces unités qui, organisées et enchainées, permettent la formation du message ; il est caractérisé par une hiérarchie de relations du type «et... et... ». Ainsi, nous définirons les codes du packaging en spécifiant d'une part les éléments de axe paradigmatique cest-A-dire les traits pertinents, et d’autre part les, régles d’enchainement ou d’articulation de l'axe syn- tagmatique Les traits pertinents du packaging sont les él ments constituants des unités signifiantes parmi les- quelles Ventreprise va concevoir son correspondent aux éléments suivants nessage. Is = les matériaux : Pentreprise aura Je choix entre différents matériaux, par exemple utiliser du plas- tique « ou » du verre « ou » du fer blanc... = les €éments morphologiques : au niveau mini= ‘mal on a les angles, les lignes, les courbes..., 2 un niveau plus élevé on a les formes élémentaires (carré, triangle, sphire, rectangle, tube...), et & un niveau encore supérieur, on a les formes et les volumes... ~ les éléments scripturaux : les lettres, et un niveau supérieur, les mots, les phrases (base-line, inscriptions publicitaires, informatives). — les éléments chromatiques : luminosité, valeurs, couleurs, — Les éléments graphiques et typographiques symboles, sigles, logos, dessins, illustrations, photo- graphies. Comment ces traits pertinents se combinentils pour donner du sens ? Quelles sont les régles d'art culation ? On constate qu’au niveau des traits pert nents, nous avons des éléments trés différents qui peuvent, en les observant séparément, étre décrits & partir de codes géométriques, gestaltistes (les angles. courbes... se combinent suivant les lois de la géomé- trie ou de la gestalt permettant Mobtention de «bonnes formes » ou « formes prégnantes »), ou de codes coloriels associés & la symbolique des couleurs (dans certains eas, symbolique lige & la culture, dans @auttes, aux univers sectoriels du produit...... I apparait cependant que le packaging puise ses codes dans des univers plus vastes que ceux décrits précé- demment. Pour nous, les codes qui déterminent le. packaging sont liés & univers de la marque et du produit. Ils fonetionnent sur un double registre, & ta fois verbal et visuel. Le registre verbal (par exemple le nom du produit, les inscriptions publicitaires...) a pour fonction principale d'ancrer le message (d’apré's la terminologie de Barthes, 1964), ce qui permet de réduite Vambiguité du message visuel. Le registre visuel s'appuie sur certains codes des messages visuels. D’apres ta classification des codes visuels de Eco (1972, p. 215-217), on pourra identifier quatre, niveaux de codage & partir desquels les codes de la ‘marque, et du produit s’articutent — le niveau iconique comme les icones dits « gas tronomiques » qui se manifestent lorsque Ia qualité un objet (illustration de Ponctuosité d'une créme, du croustillant d'une céréale...) stimule directement, dans sa violente représentativité, notre désir au Tiew de se limiter & dénoter « créme » ou « céréale » ; — le niveau iconographique : la communication packaging emploie des configurations qui, en terme iconographie classique, renvoient A des signifiés conventionnels comme par exemple la téte de mort qui signifie « danger, poison »... — Ie niveau thétorique : certaines figures de théto- rigue (Voir Durand, 1975, p. 72-75) sont fréquem- ‘ment utilisées dans le packaging. On pourra citer, par exemple, la métonymie avec les packagings de fro- mage de chévre ott le fromage est illustré par une chévre, l'accumulation avec les packagings pour céréales de petit déjeuner oti 'on ajoute des éléments autres que les céréales (jus de fruit, laitage...) pour accentuer l"effet « forme ». = enfin, le niveau stylistique : il est plus particu- ligrement Iié aux codes de a marque et on parle sou- vent du « style » particulier dune marque comme la bouteille d’Orangina avec son verre granuleux fagon peau d’ orange, la forme et la couleur spécifiques des bouteilles de Perrier ‘On pourra représenter comme suit les codes du packaging (figure 1) : La structure sémiotique du packaging Suivant le paradigme sémiotique développé par Saussure (1915) on peut décrire le packaging d’aprés les deux plans que posstde tout «ensemble signi- fiant » ; le plan de l’expression (signifiant) et le plan du contenu (signifié). Le plan de expression est, pergu comme une entité physique et composé d’élé- ments tangibles, comme sa structure générale, sa forme, son volume, ses qualités plastiques, sa texture, les matériaux, les couleurs, le graphisme, la typogra- phie... Le plan du contenu correspond & ce qui est exprimé, signifié et qui ne représente pas une entité physique comme par exemple les thématiques déve- loppées, les valeurs véhiculées... Le sens résulte de la réunion (sémiosis), dans le packaging (manifesta- tion), de ces deux plans. On peut le représenter comme suit (figure 2) Axe poradigmatique Matviaux Elements morphologiques Elements scripturoux Elements coloriels lémeets graphiques et ‘ypoeraphiques Packaging : une approche sémiorique 2 Quaiités plastiques, > matériaux, couleurs, structure générales Expression Manifestation | > Le packaging Conteny Le Thematiques développées, valeurs véhiculdes Figure 2. —La structure sémiotique du packaging Barthes (1985, p. 76-80) propose d’analyser deux niveaux du sens: le niveau dénoté et le niveau connoté. Pour expliciter ces différents niveaux, il faut, tout d'abord supposer que le signe devienne & son tour Pune des faces dun autre signe (appelé signe de ‘ond niveau). Le signifiant du signe du second niveau sera formé par ensemble signifiant/signifié du premier signe (signe de premier niveau) : un signe devient le signifiant pour un nouveau signifig et entre dans une nouvelle relation de signification. On parle dans ce cas de connotation, L’analyse du discours- packaging peut étre décomposée suivant ces deux niveaux (figure 3). Au niveau dénoté le packaging véhicule des significations matérielles et techniques (on usage et sa manipulation, Ie fait qu’il protege bien le produit, qu’il contient une certaine quantité, qu’il respecte environnement. correspond & la logique de objet, a sa valeur maté- rielle et fonctionnelle, Au niveau connoté, le packa- ging dénoté devient le signifiant d’un nouvel « objet signifiant »: le packaging connoté. Le packaging véhicule des significations non-matérielles et ima- gées sur le produit, la marque, 'utilisateur... Ce second niveau correspond & ta logique de communi- cation du packaging, a ses valeurs médiatiques. ‘Axe syntagmatique ‘Combinaison suivant es codes de la marque et Ju odut lig aux codes verbaux et vsuels(niveaux iconique, iconographique,rhterique et stlitiqu) igure 1, —les codes du packaging 28 Florence Dano ‘Le packaging Niveau connoté Niveau dénoté ‘Signifiant: le packaging en tant qu‘objet ‘économique, en tant que contenant Signifié: le packaging ‘en tant que discours: vehiculant des signi- fications non-matérielles et imagées Signifiant: technologie matériaur, formes, volumes, couleurs, ‘graphisme... Signifié : Sens d¢- ‘oté: signfications rmatérielles et techniques Figure Source : Adapté de Barthes, 1985. Cette logique de communication associée au niveau connoté du packaging peut étre explicitée & partir des différents messages dont Mexistence est sous-tendue aux fonctions de communication propo- sées par Jakobson (1963). Ces fonctions sont déve- loppées dans la section suivante. LES FONCTIONS DE COMMUNICATION DU DISCOURS-PACKAGING D'aprés Jakobson (1963, p. 213-219) dans toute communication, un destinateur (ou émetteur) envoie tun message (ou discours) & un destinataire (ou récep- teur) ; ce message renvoie & un référent (objet de communication) et il requiert un code commun, du moins en partie, au destinateur et au destinataite ; enfin, le message nécessite un canal ou encore une connexion entre les deux actants permettant détablir et de maintenir le contact. A chacun de ces six fac- tcurs, Jakobson associe une fonction de communica- tion spécifique : expressive, impressive, référentielle, esthétique, métalinguistique et phatique. Cette classification nous permet de reconnaitre six fonctions de communication du packaging (figu- re 4), Les deux niveaux de signification du packaging Dans un discours, ces fonetions se chevauchent et se superposent. Selon Jakobson (1963), la diversité des discours ne réside pas dans le monopole de I"une ou autre de ces fonctions, mais plutdt dans les diffé- rences de hiérarchie entre celles-ci. La structure d'un discours dépend avant tout de la fonction prédon nante. Explicitons chacune de ces fonctions dans le cadre du packaging +, Fonction expressive Cette fonction est lige 4 Pémetteur du discours ; ce sont toutes les tentatives faites pour renseigner Pautre sur Videntité et Ja personnalité de celui qui émet, Dans le cadre du discours packaging, elle cor- respond & l’expression de l'entreprise-marque dans le packaging Du point de vue de Ientreprise, cette fonction est fondamentale puisqu’elle doit lui permettre de signer et d’authentifier ses produits, de se démarquer des concurtents et d’éviter Ia confusion avec d’autres 4. Nous ne proposerons ici qu'une description de ces fonctions telles qu'eles sont susceptibles de coexister dans une communi- ‘cation packaging. Nous aabordetons pas le probleme des interac- tions entre ces fonetions au sein d’ une communication packaging, ce qui serait "objet Pun article & past entire. Packaging - une approche sémiotique 29 Code fonetion fonction expressive | Packagin i Entreprise - << >| ae eo Consommateur Marque fonction phatique g Hees canal fonetion rétérentiello Produit Figure 4. ~ Les facteurs de la communication du packaging et les fonctions associées marques. En particulier, expression des signes dis- tinctifs de l’entreprise-marque sur le packaging doit ire suffisamment claire et spécifique pour pallier les problémes de copies et de contrefagons *, Du point de vue de I’acheteur et du consomma- teur, la fonction expressive doit permettre & ’ache- teur-consommateur dune part, de repérer et de reconnafire ses marques au moment de achat et autre part, de le sécuriser en lui fournissant une garantie au niveau de son choix. Par ailleurs, cette fonction permet également & Tentreprise-marque de donner une certaine image delle-méme aux consommateurs. L’émetteur cons truit par le message expressif ne correspond qu’& une vision parcellaire de la réalité, c'est a dire aux él. ments de lidentité, de la personnalité et des signes istinctifs que Ventreprise-marque souhaite faire connaitre d’elle-méme. La communication packaging sinscrivant dans le cadre de la communication mar- keting, Pémetteur construit sera le plus souvent exprimé par Vintermédiaire de la marque. Kapferer (1990, p. 56) représente lidentité de la marque par un prisme dont les six faces comprennent les diffé- rentes composantes de cette identité : le physique, la culture, la relation, te reflet, 1a mentalisation et ta personnalité. Trois facettes de ce prisme nous sem- blent intéressantes pour cemer I’émetteur construit par la fonction expressive : te physique qui est la base de la marque, et correspond au registre tradi- tionnel de Ia communication de la marque, c"est par exemple le savoir-faire, le positionnement classique 5. Voir étude de Kapferer et Theenig (1991) Ja personnalité qui correspond au caractére que 1a marque acquiert & travers sa fagon de parler de ses produits; la culture c’est-ddire un systéme de valeurs, une source "inspiration et d’énergic pour la marque et qui lui confére un statut d’ univers culturel Cette fonction définit également les rapports que Ventreprise ou la marque souhaite instaurer d'une part avec les consommateurs (est-ce un message a’égal 2 égal instaurant une relation ludique, compli- ce, ou alors un message d'expert plutot persuasif et pédagogique 2), avec le produit (par exemple rapport d'enthousiasme, ou de distanciation...) et d’autre part avec le discours-packaging lui-méme (par exemple y-at'il implication forte de Ventreprise, ou au contraire une certaine distance 2). Ces éléments don- nent le «ton» de la communication, C’est ce que Fouquier (1981, p. 262) appelle les figure d’allocu- tion qui « spécifient le (ou les) rapport(s) mis en sebne au ceeur du message entre I’émetteur-construit et le récepteur-construit », les figures de modalisa- tion «qui mettent en évidence les types de rapports unissant Iémetteur & la réalité dont il est chargé de parler» et les figures expression « traduisant les relations que I’émetieur entretient avec son propre ‘message en tant que produit formel ». Un packaging qui serait essentiellement expressif serait un packaging qui mettrait en avant ’entreprise- marque en donnant au discours ses propres valeurs et sa caution. C'est le cas par exemple des packaging des « branduits » comme Suze, ou Orangina... 30 Florence Dano Fonction impressive Cette fonction a pour objectif dimpliquer le récepteur afin d'obienir de sa part une réaction, but de toute communication, ceci par la prise en considé- ration de sa personnalité, de son caractére, de sa cul- ture, de son langage, de son comportement... Le mes- sage impressif doit permettre au consommateur de. retrouver, 2 travers les différents signes qui lui s destings, des ééments de son identit cont de sa person- nalité ; il faudrait qu'il puisse se dire en regardant le packaging «c'est pour moi! ». Il est nécessaire de faire une distinction entre le consommateur qui ache- te evVou consomme le produit (le récepteur-réel), et celui qui est représenté dans le discours-packaging (le récepteur-construit). Le message impressif du packaging doit égale- ment tenir compte de la différence entre acheteur et consommateur. En effet, certains éléments de ce message sont plus orientés vers ’acheteur et d’autres plus vers le consommateur, en particulier quand ces, deux personnes sont différentes. Le message orienté vers l’acheteur se voudra persuasif et cherchera 2 modifier sa réponse affective en le séduisant (attrait, agrément) ou sa réponse conative en le tentant (inci- tation, détournement). Le message orienté vers le consommateur aura une dimension plus pragmati- que; il s'agira de mettre en avant les bénéfices, apportés par Pusage du produit, en rassurant et en, aidant le consommateur au moment de l'utilisation, Le message impressif construit une image du consommiateur réel en Je mettant en « scéne », en lui proposant une certaine image de son « soi », une cer taine fagon de vivre, de se comporter et dutiliser le produit Fonction métalinguistique Cette fonction lie le discours packaging aux codes auxquels il se référe. C’est une fonetion de tra- duction d’un langage dans un autre langage. La fone- tion métalinguistique a pour objectif de faite com- prendre, de traduire par Vintermédiaite d’un code spécifique les informations que lentreprise veut faire parvenir aux acheteurs/consommateurs et également de permettre & Mentreprise d’instaurer un nouveau code de communication. Le choix du code est trés important d’un point de vue stratégique : Mentreprise souhaite-telle faire appel aux codes « classiques », e’est-A-dire aux codes

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