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Le service public

Des éléments d'introduction :

* Le service public est une activité que l'administration exerce ou alors cette activité peut être
également exercée sous sa responsabilité. L'administration a le devoir d'offrir des prestations aux
administrés. Ces prestations peuvent être par exemple, la fourniture d'énergie ou offrir des
subventions, accorder des prestations de service (culture, loisirs, etc.).

* Le but du service public est de satisfaire l'intérêt général. C'est difficile de dire ce qu'est l'intérêt
général car c'est un terme très subjectif. En fait l'intérêt général est très lié à la satisfaction d'un
besoin collectif. Cette notion est difficile à définir car elle évolue selon les périodes. Par exemple
initialement, seuls quelques services étaient compris comme satisfaisant l'intérêt général : il
s'agissait des services essentiels comme la fourniture de l'énergie et les transports. Par la suite, la
notion d’intérêt général s’est considérablement étendue aux nouveaux besoins de la population (en
matière de loisir, d’enseignement, de protection sociale, au domaine sportif…).
Cette notion est évolutive et l'exemple du théâtre le démontre très bien. En 1916, le CE dans l'arrêt
Astruc avait refusé de reconnaître que le théâtre soit considéré comme un service public. Il faut
attendre 1944 pour que le juge accepter le théâtre comme un service public. Par un arrêt « Léoni »
selon lequel un théâtre municipal présentait un intérêt public dans la mesure où il faisait prédominer
la qualité et les intérêts artistiques sur les intérêts commerciaux de l’exploitation.

* Qui crée le service public ? la création d’un service public revient normalement à l’État ou aux
collectivités territoriales qui ont pour mission de déterminer les besoins de la population. Toutefois,
le lien entre l’administration et le service public peut être fluctuant. Il arrive que la personne public
confie la gestion d'un service public (d'une mission) à une autre personne publique ou privée qu'elle.
Cela ne veut pas dire que la personne publique abandonne le service public en question, il garde son
contrôle sur ce que font les personnes à qui elle a confié la gestion.
Nous avons par conséquent deux conceptions du service public :
Tribunal des conflits 1908 Feutry : Est service public, l'activité d'intérêt général qui est gérée
par une personne publique. (Définition initiale)
CE 1908 Caisse primaire d'aide et protection : le Service public est une activité d’intérêt
général gérée par une personne privée avec des prérogatives de puissance publique sous le
contrôle de l’Administration. (ce qui veut dire qu'on offre la possibilité aux personnes
privées de gérer une activité de service public.)
Le service public est qualifié par Gaston Jèze de "pierre angulaire" du droit administratif.

- La notion la plus complexe et la plus utilisée en droit administratif


- Aujourd'hui, il y aurait un courant doctrinal qui prônerait l'utilisation de la notion du « service
d'intérêt général » au lieu du « service public ».

I) L'histoire brève du service public

* Au XIX° siècle, on se trouve dans un Etat qui n'est pas très actif en matière de service public. Il y
a très peu de services publics. On a une vision restreinte de ce qu'est le service public qui était
réduit à la mission d'assurer la sécurité. C'est le développement de l’État providence sous la III° et
la IV° République qui va permettre le développement de nombreuses prestations d'intérêt général.

* Quand on parle du service public en droit administratif, le premier arrêt qui vient à l'esprit du
juriste est l'arrêt Blanco 1873. C'est dans cette décision que l'idée du service public va apparaître

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pleinement.
Une petite fille va être renversée et blessée par un wagonnet poussé par des ouvriers qui bossaient
pour des manufactures de tabac de Bordeaux exploitées par l’État. Le père de la fillette va attaquer
l’État devant le juge judiciaire. Mais le problème est qu'on attaque l’État et on ne sait pas qui est
compétent pour juger ce type d'affaires. C'est la raison pour laquelle le TC va intervenir et va dire
qui est compétent. Qui est compétent pour décider des affaires en dommages et intérêts contre
l’État.Le TC va affirmer que c'est le JA qui est compétent. Le TC consacre à la fois la responsabilité
de l'État à raison des dommages causés par des services publics et la compétence de la juridiction
administrative pour en connaître.

* Initialement, cette notion était comprise de façon restreinte. Cette notion était définie comme une
mission d'intérêt générale exercée uniquement par une personne publique dotée de prérogatives de
puissances publiques soumis à un régime juridique exorbitant qui est justifié par les besoins du
service. Le service public- la personne publique- l'intérêt général- on applique le droit public.
Par le service public on comprenait seulement les pouvoirs régaliens de l’État : la police, la justice,
la défense, la diplomatie et aussi d'autres domaines comme l'éducation, la santé publique et l'action
sociale.

* Le champs d'intervention de l’État va s'étendre suite aux conséquences de la première guerre


mondiale qui va pousser celui-ci à intervenir dans le domaine industriel et commercial. Etant donné
les conséquences de la guerre, on a admis que l’État et la personne publique puissent agir dans des
domaines qu'on attribuait initialement au domaine privé. On a admis que la personne publique
puisse agir comme une entreprise privée et exercer des activités de service public auxquelles
s'appliqueraient le droit commun c'est-à-dire le droit privé. C'est ce qu'on appelle le SPIC. Il faut
distinguer ce qu'on appelle le SPA et le SPIC. Le SPA est une activité du service public gérée par la
personne publique et le SPIC est une activité de service public gérée par une personne privée. C'est
la loi qui qualifie quelles activités sont des SPA/SPIC. En cas de silence de la loi, c'est au juge
d'identifier la nature du service. C'est-à-dire un service public géré par une personne privée. Cela
concerne par exemple les services publics d'eau et d'assainissement, les services de remontées
mécaniques et de pistes de ski.

II) La notion du service public

Jacques Chevallier, « nulle part ailleurs qu’en France, la notion de service public n’a pris une telle
importance ».
C'est à la fois une notion juridique et politique.

Mais comment fait-on pour identifier le service public ?

Classiquement, le service public se reconnaissait avec trois éléments :


Un élément organique : c'est-à-dire que c'est une personne publique qui gère l'activité.
Le rattachement à une personne publique.

Le rattachement à une personne publique est indispensable et aussi il faut démontrer que l'activité
en question satisfait un but d'intérêt général.
Une activité est gérée directement par une personne publique lorsque c’est la personne publique
elle-même qui exécute le service public, en recourant à ses moyens matériels, humains et financiers.
On parle alors d’activité gérée en régie. Il en va ainsi du service public de la justice géré
directement par l’Etat

Parfois, il arrive que la personne publique gère indirectement la mission du service publique. C'est-
à-dire qu'elle va le gérer par le biais d'un organisme privé qu'il va garder sous son contrôle. On parle

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alors de délégation du service public. Il faut distinguer entre deux types de délégations :

- Délégation expresse : La délégation est la conséquence d’un acte contractuel de délégation, conclu
entre une personne publique et une personne privée. Ce contrat détermine, entre autres, l’objet de la
délégation, sa durée, les obligations de la personne privée et sa rémunération.

- Délégation implicite : plusieurs indices vont nous permettre de reconnaître la mission du service
public
* Le capital de la personne privée, c'est-à-dire vient majoritairement de la personne publique. Le
capital est majoritairement détenu par la personne publique.Les ressources financières viennent de
la personne publique.
* On doit prendre en compte le caractère d'intérêt général de l'activité qui est géré.
* Le contrôle de la personne publique sur la personne privée qui gère la mission du service
public.(nomination des dirigeants, contrôle de la gestion, représentation des intérêts de l’Etat,)
*l’existence ou de l’absence de prérogatives de puissance publique.

Ces indices sont dégagés par le CE dans Narcy 28 juin 1963 :


.La mission doit être d’intérêt général.
L’organisme doit disposer de prérogative de puissance publique.
Le contrôle de l’organisme doit être fait par les pouvoirs publics.

L'élément matériel pour identifier le service public : Concerne le contenu et le but de


l'activité. Son caractère d'intérêt public. C'est un critère cumulatif, l'activité doit
obligatoirement satisfaire l'intérêt général. En effet, si le critère organique est important, il
ne suffit pas. Il est nécessaire que l’activité gérée directement ou indirectement par une
personne publique soit d’intérêt général. En fait, les personnes publiques n'exercent pas
nécessairement tout le temps des activités d'intérêt général. C'est la raison pour laquelle, il
faut absolument que ce caractère d'intérêt général soit présent. Comme on l'a vu dans
l'introduction, l'intérêt général est une notion au contenu flou. La jurisprudence elle-même
démontre à quel point c'est difficile d'identifier cet intérêt général et a fortiori la mission de
service public.
CE 26 1966 Ville de Royan : Le juge avait considéré une activité de Casino comme un
service public parce qu'elle contribuait à l'activité touristique et balnéaire de la
commune.

CE 12 mars 1999 Ville de Paris : Le juge a refusé d'accepter que le restaurant à


l'intérieur du Bois de Boulogne exerçait une mission de service public. Même si le
restaurant contribue au renforcement du tourisme, cela est insuffisant eu égard aux
modalités de sa gestion et aussi parce qu'il exerce dans son intérêt propre.

Attention, une personne privée peut également satisfaire l'intérêt général et a fortiori exercer une
mission de service public. Cela concerne les activités culturelles, animation, gestion des centres
d'insertion professionnelle, loisirs.

Le législateur est libre d'apprécier quelles activités doivent être considérées comme services
publics.

III) Les décisions les plus importantes

CE 1903 Terrier : Le conseil régional avait passé un contrat avec un chasseur de vipère. Le
problème était celui du paiement d’un certain nombre de supplément. On refusait de payer le

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chasseur. La question est de savoir si le contrat est un contrat de droit privé ou droit public.
Dans cet arrêt le CE considère que l’on est ici face à une activité de service public qui
consiste en la lutte contre les animaux nuisibles, et que cela est suffisant pour que ce soit un
contrat de droit administratif.
CE Thérond 1910 : La ville de Montpellier et Thérond ont passé un marché qui consiste à
capturer et mettre en fourrière les chiens errants et enlever toutes les bêtes mortes. Un conflit
va naître et Thérond va réclamer la résiliation de ce marché et le paiement des indemnités à
la ville. Les contrats conclus par les CT relèvent du juge administratif.
CE, 9 février 2007, APREI : l’association du personnel relevant des établissements pour
inadaptés (APREI) a demandé à l’association familiale départementale d’aides aux infirmes
de l’Aude (AFDAIM), association gérant le centre de travail en cause de lui communiquer
certains documents administratifs. AFDAIM refuse de le faire. APREI conteste ce refus et
estime que AFDAIM devait le faire car elle exerce une mission de service public selon elle.
Mais le CE va dire que non. Donc, le problème est de chercher à savoir si AFDAIM gère
une mission de service public ou non :
Le juge va d'abord regarder si la loi a consacré l'activité gérée par l'association comme une mission
de service public ou pas. Si il n'y a pas de loi, alors c'est au juge de l'identifier et de vérifier si
l'activité de cette association relève du service public ou pas. On sait que depuis l’arrêt Narcy du 28
juin 1963, une activité gérée par un organisme de droit privé est qualifiée de service public si trois
conditions sont remplie. L’activité doit, tout d’abord, être d’intérêt général. La personne privée doit
être, ensuite soumise au contrôle de l’Administration. Surtout, l’organisme privé doit être titulaire
de prérogatives de puissance publique, détention qui traduit l’importance que la personne publique
accorde à l’activité en cause. Et bien le juge va faire un changement à savoir qu'il va affirmer que si
le dernier critère n'est pas présent, ce n'est pas grave et qu'on peut quand même qualifier l'activité
gérée par l'association de mission de service public. Donc le dernier critère n'est pas un critère
cumulatif.
• CE1921 l'affaire Bac d'Eloka : établit la distinction entre les SPA et les SPIC. Il existe
deux types de service publics.Les SPA correspondent aux activités traditionnellement prises
en charge par les personnes publiques, les règles qui leur sont applicables sont dominées par
le droit public. En revanche, parce que leurs activités relèvent de la sphère marchande, où la
réalisation de profits égale la satisfaction des besoins collectifs, les SPIC sont
principalement régis par des règles de droit privé.
SPA (les universités, les hôpitaux publics)
SPIC : Pour déterminer s'il y a SPIC la jurisprudence s'appuie sur trois éléments que sont l'objet du
service, ses ressources, ses modalités d'organisation. Si le service a un caractère payant, consiste à
vendre et produire. Est-ce qu'il fait des actes de commerce, est-ce qu'il concurrence des entreprises
privées. Les ressources viennent de qui ? En général des usagers ou des bénéficiaires du service
sous forme de redevance. Est-ce qu'il fonctionne comme les entreprises privées ?

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