REVUE BIBLIQUE
Typographie Firmin-Didot et C'^. — Paris.
TRENTIEME ANNEE TOME XXX
REA'UE BIBLIQUE
PUBLIEE PAR
PARIS
LIBRAIRIE VICTOR LECOFFRE
J. GABALDA, ÉDITEUR
RUE BOXAPARTE, 90
19-21
,OCT 1 7 \^^^
LETTRE EXCYCLIQUE DE SA SAINTETE
BENOIT XV
non potes,t credcre nisi prius crediderit de sanctis eius vera esse quae
scripta sunt ». Exemplis deinceps quam plurimis ex Veteris Testa-
menti codice allatis, sic concludit : « Haec et cetera quae de sanctis
scripta sunt, nisi quis universa crediderit, in Deum sanctorum cre-
dere non valebit » (1). Hieronymus igitur idem omnino profitetur,
quod Augustinus, communem totius antiquitatis christianae sensum
complexus, scribebat : « Quidquid de Henoch et de Elia et de Moyse
Scriptura sancta, certis et magnis fidei suae documentis in summo
cubnine auctoritatis locata, testatur, lioc credimus... Non ergo ideo
credimus natum ex Virginc Maria, quod aliter in vera carne exsis-
tere çt hominibus apparere non posset (uti voluit Faustus), sed quia
sic scriptum est in ea Scriptura cui nisi crediderimus, nec christiani
nec salvi esse poterimus (2). » — Neque aliis Scriptura sancta obtrecta-
toribus caret; eos intellegimus, qui rectis quidem, si intra certos
quosdam fines contineantur, principiis sic abutuntur, ut funda-
menta veritatis Bibliorum labefactent et doctrinam catholicam coni-
muniter a Patribus traditam subruant. In quos Hieronymus, si adliuc
viveret, utique acerrima illa sermonis sui tela coniiceret, quod,
sensu et iudicio Ecclesiae posthabito, nimis facile ad citationes quas
vocant implicitas vel ad narrationes specie tenus historicas confu-
giunt; aut gênera quaedam litterarum in Hbris sacris inveniri con-
tendunt, quibuscum .intégra ac perfecta vcrbi divini veritas componi
nequeat; aut de Bibliorum origine ita opinantur, ut eorundem labet
vel prorsus pereat auctoritas. lam quid de iis sentiendum, qui, in
ipsis Evangeliis exponendis, fidem il lis debitam humanam minuunt,
divinam evertuut? Quae enim Dominus Noster lesus Ghristus dixit,
quae egit, non ea censent ad nos intégra atque immutata pervenisse,
iis testibus, qui quae ipsi vidissent atque audivissenl, religiose
perscripserint ; sed — praesertim ad quartum Evangelium quod
attinet — partim ex Evangelistis prodiisse, qui multa ipsimet cxco-
gitarint atque addiderint, partim e narratione fidelium alterius aeta-
tis esse eamque causam aquas e duobus fontibus
congesta; ob
manantes uno eodemque alveo sichodie contineri, ut nullâ iam certà
nota distingui inter se possint. Haud ita Hieronymus, Augustinus
et ceteri Ecclesiae Doctores historicam Evangeliorum fidem intel-
(1) In Philem. 4.
A. — Citations.
Dans Le. m, i-6 la citation d'Is. xl, 3-6 a été assimilée dans Sin et
Cur au texte de la version syriaque de l'A. T. (1).
v. i « Et faites droits dans la plaine les sentiers de notre Dieu » rend
môme temps » au lieu de v.xi o-lz-y.'. r.yzy crap; t: îwty;;:',;^; t:j Os:j. Cur
:
du Seigneur sera révélée », mais ce passage n'est pas dans le Diat. ar.
Amasias.
La version syrienne a ordinairement réussi très bien ces retours
aux formes sémitiques. Cependant la^tp;; (Me. v, 22) a été rendu
CTXV, tandis que l'hébreu correspondant doit ôlre insi.
Mais le cas le plus intéressant est celui de Beelzeboul, leçon cer-
taine et unique du LXX (IV Regn. i, 2 ss.). L'hébreu
grec, d'après les
était 2127 S"2, et c'est laforme des Syriens depuis Aphraate (xiv, 45).
Or le Diat. ar. à B'a Izeboul, contre la peschitta. C'était donc la forme
de Tatien, attestée d'ailleurs par Éphrem [Moes. 75. 160. 20(>) et l'on
ne peut supposer que l'arabe ait été corrigé d'après le grec. A lui seul
ce fait est révélateur. C'est ainsi que Jérôme a changé Beelzeboul des
latins anciens, en Beelzeboub, pour se rapprocher de l'A. T. Si les
versions syriennes avaient eu une grande et ancienne autorité sur le
grec, comment se fait-il que la forme en boub n'y soit pas signalée
une seule fois? Et il semble bien que les latins non plus n'ont pas subi
leur influence aune haute époque, caria forme en boub, quand elle
se rencontre, a probablement été empruntée à la Vulgate [\ \.
dont on peut douter qu'elles aient été employées sur place; ce sont
celles de la traduction de l'Ancien Testament -vriy Sahioim pour :
m, 23) est p'; ^y dans Gur pes et pa, moins loin du grec
A'.viov (Jo.
fl) Sur ilc. xn, 24 et 27, Soden ne cite aucun latin pour boub; sur Le. xi, 15. 18. 19.
seulement c et /-. Sur Mt. x, 25, Soden cite it eic. b gh f l. Ce jugement est sûrement
erroné. WW citent pour boul vett.
latt. fere omnes, et notamment «
ffp q h b gK Le
ms. ff-. La version af (A] est pour Ooiil.
est lacuneux.
2) The Syriac forms of New Testament Pruper yames by F. C. Burtiiit British
Academy, en 1912".
14 REVUE BIBLIQUE.
3. Il recourt à l'A. T. Par exemple nsijf (Le. iv, 26) dans Sin (Cur
hiat) est certainement moins près de la prononciation locale que Sap-
ez-:». Au contraire xna"! Ramtha, doit bien avoir été la prononcia-
tion de Rama et d'Arimathia, mais nous perdons ainsi la distinction
de ces deux endroits.
Tout cela nous inspire des doutes. D'une fidélité stricte au grec, il
2. On croit être sur une bonne piste topographique en lisant dans Sin
(Cur hiat) Us vinrent à la montagne de Magedan » (1), au lieu du
: «
texte des critiques îi; -a [j.^p-/; âaA;;.avcyOa. Mais cette montagne est
:
du type de W
qui a ~o h^oc (avec 28).
Sur Mt. XV, 39, Sin a encore y^-xii.. mais Cur itî:;^, qui a peut-être
voulu se rapprocher de n^a de l'A. T., écrit p-a^z dans Zach. xii, 11.
La pes. a nja que Gwilliam, d'après la Massore, prononce Magdou,
peut-être par une sorte de transaction, et ce doit être ce que signifie
le maghdawan de Ta. ar. que Soden prend pour une allusion ù
Magdala (2). Magdala se trouve dans les Aiiecd. syr. iv, HO de Land,
ce qui prouve l'incertitude ou plutôt l'absence d'une tradition
syrienne.
3. De même Sin (Cur hiat) écrit ij>2di; (Mt. xxvi, 36) et xcoia (Me.
XIV, 32) qui ne sont ni des transcriptions ni des prononciations locales
de Gethsémani.
k. Le cas de Béthesda (Jo. v, 2) est toujours énigmatique. La lecture
NiDrini^ 'BrfitQoa est nettement syrienne, avec 6 et la version armé-
nienne. Ce n'est certainement pas la prononciation de Jérusalem,
comme le prouvent les textes d'Eusèbe et de Jérôme [Onom.). La leçon
critique doit être XitCz^yi, comme écrit Josèphe, et M. Burkitt me semble
avoir établi que l'ctymologie est ni;i>*~-, « le morceau coupé (3) ;
cf. Jos.
(1) MayeSdtv est la leçon d'Eusèbe pour Me; cf. Onom. éd. Kloslermann, p. 134.
(2) Sur Mt., car sur Me. Talien est censé appuyer MayeSa.
(3) Et non l'oliveraie, comme j'ai dit dans les Mélanges de Vogiié.
lAYNCIEiVNE VERSION SYRIAQUE DES ÉVAMilLES. la
est allée plus loin dans cette voie en mettant un u", comme dans les
Gergéséens de l'hébreu iGen. xv, 21, etc.).
7. Cana de Galilée est dans Sin (Jo. xxi, 2) et dans Cur (Jo. iv, iO)
ni-cp, comme d'ailleurs dans Ta.-ar et dans pes., Qotneh ou Qatna.
Est-ce une identification, et avec quel lieu?
La version a toujours r^ï; pour 'Sy.'lxzih t. ou Xarapz. c'est-à-
8.
6. — Harmonisations.
Nous pensons en avoir assez dit pour prouver que syr-vet, soit
sous la forme Sin, soit sous la forme Cur, est un texte qui demeura
étranger aux Syriens, qui par conséquent ne doit pas être antérieur
à la seconde moitié du quatrième siècle, et dont le caractère de texte
mélangé et traité critiquement ne peut être révoqué en doute.
Et cependant nous n'avons pas abordé la preuve la plus décisive
de ce dernier point, c'est-à-dire les harmonisations. On entend par là
les passages ajoutés, ou omis, ou transformés, pour obtenir plus de
ressemblance ou d'harmonie entre les évangiles, surtout synoptiques.
Soden nomme ce fait influence des parallèles. Ce critique compte
:
pour syr-vet sans distinguer entre Sin et Cur 216 cas dans Mt., 204
dans Me, 107 dans Le. (2).
accord, c'est encore une des colonnes qui manque à un édifice qui
(2) P. 1584.
L'A-NCIKNNE VERSION SYRIAQUE DES ÉVANGILES. 17
reposait sur trois appuis. Celui que pourrait offrir Tatiou a certes
une tout autre valeur. Mais ou pourra se demander si Tatien n'a
pas suivi un ms. apporté de Rome. Il sera donc plus scabreux que
jamais de soutenir un texte qui n'aurait d'autres patrons que les
latins, c'est-à-dire a[ et it réunis, renforcés de D et de syr-vet (Sin
A. — V influence de Tatien.
Soden essaye bien de prouver que D avec les latins, d'une part,
et Sin et Cur de l'autre, dépendent de Tatien, lorsqu'ils n'ont pas
la même leçon. Tatien serait une sorte de mine où chacun prenait
ce qui lui convenait. Par exemple. Tatien combinant Le. xx, 20 et
Mt. XXII, 15 lisait : << Alors les Pharisiens s'en allant tinrent conseil. »
Pour Le, Sin a pris « alors » et1) it ont pris « s'en allant », tandis
que
le texte est y.at r.x^y.-r^^r^Jy.-n^^. Mais cette analyse est incomplète. Sin
a omis 19" de Le. et il porte : « Et après cela ils envoyèrent des
zix y.. T. A. (Me. IX, 3); klxGipo^--byf (Le. ix, 29). Nulle part wç yiwv. Et
cependant syr.-vet. s'est obstiné à introduire cette leçon; dans Mt.
c'est Cur avec D latt. (exe. ^.), dans Me. c'est Sin avec Antioche, D
it vg. etc., dans Le. c'est Cur (mais non Sin) avec e l. On croirait que
ont cette leçon. Il parait d'ailleurs impossible d'y renoncer, tant elle
est expressive, exprimée par un mot grec assez mal venu et très rare.
Mais sa place est peut-être mieux dans Me. où Sin l'a omise, et de
même W.
Me. II, 27 : t: ja65a-:cv cia tov avôpwzcv cV-''-'-? y-^'- -'•J'/ ^ :zv6pti3zcç
pour l'homme » ; c'est la leçon de W^, qui est aussi celle de Ta (et
L'ANCIENNE VERSION SYRIAQUE DES ÉVANGILES. . 19
ajTij de Le. viii, 9, r;pci)T(.)v ou r,-Epo)Twv (Me, Le), -riç ajTv; s'.r; y; -'xzxzz'i.c^
(Le.) et z\x ->. £v -apaSsXa-.ç AaXs'.ç auTitç (Mt.). Il est donc douteux que
Sin l'ait consulté pour faire son modeste changement, et D W fam.
13 it ont pu emprunter t-.ç tj-t,) à Le. directement.
r, -xz-Az'kt, -y:j-r, (W
Me. VIII, 32 Cas bien étrange. Après la prédiction de la résurrection,
/»• lit : et cum fiducia sermonem loqui, de même Sin et Ta.-ar. (mal
traduit par Ciasca) ; comme si Jésus devait parler ouvertement après
sa résurrection, tandis que le texte grec est le seul vraisemblable :
pour les verbes précédents, donc XaXs-.v. Quant à k qui lit loqui, il le
transforme en loquebatiir, sous prétexte que le pseudo-Cyprien de
rehaptimiate (c 8 p. 79) fait allusion à Me. en disant : quod doctrinaux
patris cum omni fiducia assereret. Or, il est bien évident que c'est une
allusion à Jo. xvi, 25 a-^YYEAw jy.-.v. combiné
-appr,(7'.a r.ipi -. r.y-pz:
avec le v. 29 >.zi vjv £v ~j.pyr,Q\j. 'tSkv.z, cf. xviii, 20 vu, 26. Si k a lu ;
6jpaç t:u ;xvr,;j.£'.:'j; -/.y.', y^tyzi.-jltyzy. Himzzjzv/. z-.i y/x/.v/.j /,'.--. y. z 'k'.Hzz:' r,v
Tatien : « Qui nous roulera la pierre du tombeau? Car elle était très
vinrent »; le reste est d'après le texte critique de Me. Qu'il ait été
éloigné de Tatien par le traducteur ou par un reviseur, peu importe.
L'étonnant est l'accord du groupe de D avec Tatien. Si le groupe
dépend de Ta, son action s'est donc déjà exercée sur Eusèbe, ce qui
est assez étrange. Et alors pourquoi détacher ce que Ta a emprunté à
Mt.? Faut-il admettre un emprunt à Tatien qui aura été diminué dans
Eusèbe, et encore plus dans Sin. plus récent? Ou bien une première har-
(1) ?mV a été pris pour un parfait par M. Burkitt. Ce ue peut être qu'un participe, équi-
valant à anoxo/iov,.
L\\>«CIENNE VERSIO-N SYRIAQUE DES EVANGILES. 21
•/.a', vi £/.î'.vy; ty; •/jjj.spa. Mais c'est tout autre chose dans D z<.x ty;; Y;;j.£=3:r,
per dicm (af it), c'est-à-dire pendant le jour, de jour, qui semble
opposer la descente de jour à l'épisode précédent qui était peut-être
situé la nuit (du moins d'après plusieurs critiques). Les deux solutions
reviennent au même en réalité, mais on ne constate pas de dépen-
dance littéraire.
Que l'on compare la difficulté d'aboutir dans les cas précédents,
avec certains tatianismes évidents de Sin et Cur, qui ne semblent
pas avoir eu d'influence en dehors des Syriens!
Mt. XV, 27. Ta.-ar. « les chiens mêmes mangent des miettes qui
tombent des tables de leurs maîtres -f- et vivent ». Cur sur Mt. xv, 27
comme Ta.-ar.; Sin om. « des miettes qui tombent ». Cet insigne
tatianisme ne se retrouve nulle part en dehors des Syriens.
Mt. XVII, 17 et Me. ix, 19, « amène » Sin Cur: Sin Cur h.) au lieu
de ssp—E. D'après Le. ix, il, mais en dépendance de Ta, qui avait
introduit un petit fragment de Le.
Me. vu, 5. Sin Xur
A.) remplace le texte de Me. x/.Xx -/.cva:-.; -/sp-'.v
£76'.;j7',v par celui de Mt. xv, 2
Tcv y.z-.z') « car ils ne lavent pas leurs :
(Ij De même les latins, sauf ^, et Orig. latin : chlamydem coccineum et purpurnm.
22 REVUE BIBLIQUE.
Me. viii, 32. Au lieu de r,p;y.-o tT.i-i\}.x^ ajTw Sin (Cur) « mais Simon
Céphas, comme s'il avait compassion de lui ». De même Ta.-ar.
Me. 30 etc. est un cas plus compliqué qui nous servira de
XIV,
transition. Dans Me., Pierre reniera avant que le coq ait chanté
deux fois. Les trois autres placent le reniement avant le chant du
coq, c'est-à-dire le premier. Si je comprends bien Tatien, il avait
harmonisé avec beaucoup d'art. Il omettait le premier chant du coq
de Me. XIV, 68; ensuite le coq chantait deux fois (v. 72), ce qu'on
pouvait entendre deux fois de suite. Muni de cette ingénieuse
:
supprimé dans tous les textes de Me. toute trace de deux chants.
C'est exactement l'autre système d'harmonisation. Or c'est celui de
souvent avec celles de syr-vet, trop souvent pour qu'on puisse expli-
quer la coïncidence par un hasard, et nous sommes pleinement de
il en conclut que ces harmonisations proviennent toutes
son avis. Mais
pratiquement de l'harmonie de Tatien. Or les statistiques de M. Yogels
elles-mêmes témoignent contre lui. Il n'a pas signalé moins de 282
(1) I, 1592.
,2) Concerning the Genesis of the versions... II, p. 285.
24 REVUE BIBLIQUE.
XIX, 30.
Quand le texte parle dune voix, nos Syriens disent qu'elle a été
entendue : Mt. m, 17 dans le grec iBou owvy); de môme Le. m, 22;
y.ai
Mt. XVII. 5; Le. ix, 35. Cur et Sin, selon l'occurrence : « une voix fut
entendue. »
môme Tatien). Cependant les latins n'ont pas ce « pain » qui donne
à la tournure son cachet sémitique. Et de plus spatium en latin,
comme NiriN en syriaque, ne signifient pas ici un lieu au sens propre,
mais la latitude, l'opportunité (Ta.-ar.) ce sont deux excellentes tra- ;
(1) Concerning Ihe Genesis of the versions of thc New Testament, 1910, p. 218,
421, etc.
L'ANCIENNE VERSION SYRIAQUE DES ÉVANGILES. 25
Le texte critique (Hort) de Mt. est : ^''-/.y.'. locu sic zpiaeAGcov v.'j-.m
[>.z sptoTaç r.zp'. -O'j avaOcu; v.q sffxiv o xy^Oo;' v. iz OîAst; v.ç r^v i^orr^v £17EA-
Oîiv ~r,pii (1) Ta; evTsXa;... Kf{Zi tj-m o v£av',7y.2; -oc'j-x r.Tny. (2) ssuAa^a*
XI exi uff-spio; zor, auTW s T^ssuç" v. Oeasi; teaeic; î'-va». 'j-aYS -rro/Ar^^ov cou to:
UTzap'/ovTa y.ai ooç toi; (3) ztw/o'.;, y.ai s;£'.ç ôr^îa'jpov sv oupavo'.;, y^f. îîupo
ay.oXouôî'. |xoi.
Celui de Me. ^^Ka», £-/.-op£îJo;;.£vo'j autou £i; ooov 7:po(7cpa;j.tov eiç v.y.'. yovj-
TC£Tïj73t; auTOv cZYipwTa ajTOv' oioajxaXî y\'yf)t, ~'. 7:o',r,70) '.vz Cf«>"'i"^ aiwvwv
y,AYjpovo[r/]7(.); '^ o o£ Ir^jou; eizsv auTW* -'. |j.£ Aîys'.ç ayaOov ; cjosiç ayaGoç zi
[;-•/; £1; Oeo;... '^^o Bî (i) îs-r] a-jTor o'.oaaKiiAî, TauTx r.x^nx ^^puXa^aixrjV £/,
VïOTr^To; ;;.0'J. o 0£ I-r]70'jç £;;,6a£'];3:; scuto) r,-;y~r^r:z') xjtov, ya-, £',::£v auTw"
£v (jc uaTspc'," u-aY£ oaa e/î'-Ç ::ojA'^70v ya». oo; TOtç TTTwyo'.ç, /.y/. £;£'•; Or^Taj-
parfait, va, vends tout ce qui est à toi et donne aux pauvres; et porte
ta croix et viens après moi. »
Le début est d'après Me. y.ai v/-oç,t'jz\}.v)z-j tj-z-j ci; c;cv., « un (jeune)
homme » est ajouté... « des principaux » est d'après ap^o^v (Le,)...
/Sli (Mc. Mt. Lc.) xv^Oe (Mc. Le); -.i Trc.r^jto (Mc.) en omettant a^afcv
de Mt. y.Ar<pcv:;ji.r,(7a) (Mc. Le); Ir^acu; (Mc); ti \}.t
;
'hi-;v.z 3:YaO:v (Mc. Le.)
(1) L'arabe dit bien un jeune homme, mais Tatien a diï dire un homme, d'après Sin et
(3) D'après Éphrem {Moes. p. 169), il y avait ensuite dans Tatien : Pater, qui in Cœlis.
TC £Tf, (1) UTTspw (Mt.)', z Oz. Ir,(j0tj:; £;j,5X£'ia? aii-w r^vacKYi^ev a'JTOv 7.a', £'--îv
a-JTw (Me); £', 0£À£i; --Xziz:; c-.va', (Mt.) ; £v (7£ •jc7T£p£t (Me); uT:aY£ (Me. Mt.) ;
Trav-ra oaa cX£iç (Lc. cf. Mc.) ; 7:o)X-r]cTcv (Me. Mt. Le.) y.a', Scç (tciç) -tctw^toiç
(Me. Mt. ef. Le.); /.a'. £;£'.^ G-^o-aupov £v cupxvto (Me.); «paç tov ŒTaupov
(authentique dans Me. d'après Soden, mais c'est plutôt une addition
aotioehienne), placé logiquement avant /.a-, csjp: a/.:A:'jO£'. [j.;i (Mc. Mt.
omis comme une simple élégance grecque.
Le.), ozupo étant
Pour une Harmonie, le problème était résolu, ou plutôt le nœud
gordien tranché résolument. Conçoit-on que l'éditeur des séparés
ait pu appliquer cette méthode au texte de Mt., qui était sacrifié
dans cet arrangement?
Nous avons Sin et Gur sur Mt. Leur dépendance de Tatien pour
la langue n'est pas discutable. Tous deux omettent '.s^u au début
non £',î£>.0£iv, Sin a traduit « pour que je vienne (2) et non pas « pour
:
que j'entre ».
Pour son compte, Cur harmonise davantage, car il om. 7.^;xho'/
V. 16; au v. 17 il ajoute Iï;7;jç au début et 0£c; p. y.^;yS)z- avec Mc. et
On dirait donc qu'il est plus près de Tatien, sans cependant l'avoir
imité dans ses deux procédés radicaux. Mais est-ce bien de Tatien
qu'il se rapproche directement?
La question se pose, car un autre texte a été beaucoup plus près
de Tatien, et c'est le texte grec d'Antioche. Dans le texte reçu (déjà
dans ^y) en effet, les vv. 16 et 17 ont z'.oy.z7.yJ.t y^'xdt, x';xfiov : -.'.
T.0':r,(7b) '.va £'/(o Imt^v x'.ojvi^v. ''0 $£ £!,7:£v a'jT(i)* -'. [j.z Xtyv.ç y.^;y^o^)\ Z'^'^v.c,
jf/xOc; V. [j.r, £•; : f)z::. C'est-à-dire que sauf ^lyaOcv au v. 16, il n'y a
plus de vestige de la leçon propre à Mt.
Dès lors, ou bien le texte grec d'Antioche a subi l'influence de
Tatien sur deux points de première importance : 1) la substitution
de -: \j.i '/.z\'t'.: 7.';xHz\- à -'. \xt spwTaç -iz<. t:u a^aOcj; 2} la substitution
de zjzv.t a-'adcç s-. ou bien ce texte
;j.r, v.z z bizz à v.z sjt'.v : j.-;yS)zz,
« porte » et non
prends » (pes.) ta croix. Il a les variantes y.r,zy.z\f)v.z
«
et y.z%z -::v z-y.-jpz-/ que Soden tient pour le texte authentique, et qui
d'ailleurs n'ont rien d'harmonisant. Il y a seulement au v. 21 un
« tout » qui paraît emprunté à Le. par Tatien, avec la place de
Dans W
17, iBsj -ir xasuj'.c; post zlz^i, rappelle le <.zz-j de Mt. et le
apywv de Le. ; aeyojv p. yj-z-t 2" comme Le. et Ta. — 20 add. -\ -jz-iç-m
=-'.
p. ;j,:j; 21 v. f)t\v.: -ikv.z: ivty. p. ajTw. C'est-à-dire précisément
les deux traits saillants de Mt. retenus par Tatien! Encore 21 z-jç,y^z'.z
l'influence de Tatien s'est exercée davantage sur ceux qui très proba-
blement ne pouvaient pas le lire que sur une version syrienne qui
lui empruntait sa langue? Ou n'est-il pas plus vraisemblable que le
texte de Me. a été complété directement d'après celui de Mt.? Voici
un indice en faveur de la seconde hypothèse. La leçon £ç;jAa;3:;j.r,v
qui est propre à Me. a été insérée trois fois par et deux fois par D. W
Dira-t-on que c'est d'après un Tatien grec? Mais Aphraate, qui paraît
bien confirmé par Ephrem [Moes. 191 s.) a « j'ai fait », qui est ici
le texte de Sin (1). L'harmonisation se poursuivait donc en dehors
/.x-.r,'[z^r^'zv. x'j'Z'j.
Distinguons deux points : y.). Pour la clause 1), sauf svojr'.cv ttxvtc;
si l'on comprend très bien que les traducteurs n'aient trouvé que des
équivalents sans couleur, on ne comprend guère qu'un copiste ait
osé lui-même opérer ces transformations. Le plus probable est donc
que D ne nous offre ici qu'un grec de traducteur.
Mais est-ce d'après le syriaque ou d'après le latin? M. Chase a
conclu à l'influence du syriaque sur D (1).
Et en efiet, Sin et Car ont presque exactement le même texte, si ce
n'est pour l'ordre des Pharisiens par rapport aux scribes, et Sin omet
la clause 6) 1) « Et quand il eût dit ces choses en face d'eux (2)
:
que la même formule est traduite par Gwilliam Le. Vi, 7 ut mveni-
rent, [unde] accusarent eum, et Le. xi, 54 ut possent accusare eum.
Mais puisque Le. vi, 7 porte dans D iva sopwc-iv y.(x\t\-^[z<^r^<sy.\ auTou, il a
donc ici simplement harmonisé.
Pouvons-nous recourir àTatien comme source du texte D?
Nous ne le connaissons que par l'arabe, entièrement semblable,
dit-on, au texte de la peschitta. —
Sauf un mot, mais qui est carac-
téristique. Au V. 55 Ciasca a bien traduit capere, ce qui serait l'équi-
valent de la pes., mais l'arabe porte « pour prendre à la chasse »
(3) D'après Soden Sin ajoute Xoyov p. a-jxou. Quelle confusion est-ce là?
L'ANCIEN.Nt: VERSION SYRIAOL E DES ÉVANGILES. 31
B-qpz'jGoci -'. £•/. -cj z-z[j.7.-z: xj-.zj peut-il être l'origine des variantes
occidentales?
Cependant il n'est point du tout impossible de regarder la traduc-
tion de a r occasionem al'iquam invenire ah illo comme équivalent
au texte critique, 6r,p£jja'. étant invenire occasionem, et ab illo étant
l'abrégé de v/. tcj 7t:;j.:zt:; ajTCJ.
Au premier abord, on serait tenté de regarder xzzo\J:^^'^ -vty. Xace-.v
aj-cu comme le texte commun à tous les latins et au syriaque. Chacun
aurait expliqué à sa manière cette énigme : « de lui, contre lui, à son
sujet »; dautres se tirant de la difficulté par l'omission, sans parler
de la traduction littérale de d occasionem... eius. Mais en réalité la
leçon de D est inintelligible; ce ne peut être qu'une faute lourde de
copiste pour -x-' d'après le cod. a. En tout cas le syriaque
xj-.zj,
dans Soden). Elle ne peut donc venir que d'un texte grec très ancien,
qui a amplifié l'harmonisation avec Mt.
On suit donc assez bien les déviations du texte original. De très
bonne heure un texte antiochien harmonise avec Mt. pour le début,
harmonisation plus complète du chef des latins, de D et de syr.-vet.,
en même temps que les mots difficiles disparaissent. L'addition finale
est ajoutée aussi de très bonne heure dans le texte antiochien, har-
monisé dans D avec son texte de Le. vi, 7.
Dans le Codex D on lit 1) ufJLstç os: Zr,-.v.-=. e/. ;j.',/.pou au^r,c:at /.ai £/.
avax/avcffOs (p. tsttouç <i>) sic tou? a^e/cv-aç t=-cuç, i):r,r.z-=. evSo^oTepcç
GZ'j i7:tkOr, v.ai TrpocîXOwv c cî'.7:vcy,A*/;-it)p et-ïj jc/ z-i -/.ato) xwpsi •/.ai
y.aTa'.j/'JvOr^jr, £av ot ava-srr;; îi; -;v r,--Z'/x tc-cv xai (om tï>) et.zkHt, gcj
r^-Twv, spst <70'. c C£i-vc;/.Ar,-:(j)p t;uvaY£ (ays 'I*) t~i avo) -/.ai £C7Tai. soi tcuto
prends place, et il y aura pour toi une gloire excellente aux yeux
des convives. »
(1) HoRT et Westc. Introduction, Notes on sélect readings, ii, 15 ; Chase, The Syro-
latin text of the Gospels, 1895, p. 9 ss. ; Nestlé, Einfiihruny... V éd. p^ 179 ss., 214 ss.
Le. xxH, 26; or le texte de Cur est beaucoup plus semblable dans les
deux endroits que dans D. C'est donc Cur qui a extrait le passage de
Le, en le remaniant déjà, mais on a augmenté la différence en
traduisant du syriaque en grec. Le terme « le maître du diner « en
syriaque est emprunté à Le. xiv, 12. On peut ajouter que le —
texte de Cur gagne encore beaucoup à l'omission des deux et-., si
étranges, ce me semble, dans le grée, à la suppression de v.-izyz-
[iviz: Il v.x'. qui est mis à rebours avant l'invitation. Tout cela est bien
clair, mais c'est la preuve que le texte de Cur est un texte arrangé
et en partie harmonisé avec Le.
On pourrait être tenté de se rejeter sur Tatien. Cependant Soden
et Vogels, tatianistes renforcés, se tiennent sur la réserve. Il n'y a
pas dans le Diat. ar. le moindre indice de la clause 1;, et il a mis Mt.
XX, 28 sans addition assez loin après Le. xiv, 7-10. Tatien eût pu
mélanger deux passages semblables, mais quand il n'y avait qu'un
passage sur un thème, il ne pouvait que le reproduire tel quel. Dans
notre cas, il a donc reproduit Le.
Ajoutons —
et c'est encore un indice du peu d'action de l'ancienne
syrienne en Syrie —
que le Rev. Cureton (1) a noté l'addition à la
marge d'un ms. de la version philoxénienne et d'un ms. de la pes.
Elle est traduite d'après le grec, parce que c'est là seulement cpi'on
l'a trouvée, comme le suggère la note du ms. philox. reproduite par
Tischendorf d'après Adler : haec quidrni in exemplis antitjui.-> in Le.
tanlum leguntio' capite 53 ^c'est-à-dire Le. xiv, 7 ss,;; invemuntur
autem in exx. graecis (an potius in exemplo graeco?) hoc loco;
quapropter hic etiam a nobis adiecta sunt).
Infiniment rare dans le monde syrien, et de même en grec, l'addi-
tion couvre le monde latin; il faudrait dire les deux additions.
La première 1) a deux formes en latin toutes deux connues de saint
Léon'2'i, l'une aisée : vos autem quaeriti.^ de pusillo crescere et de
minore maiores esse (b, cf. g"-) ; l'autre semblable au grec. Il est
clairque cette dernière est primitive, et Juvencus en a parfaitement
rendu le sens :
inintelligible.
D'autre part le latin n'a pas créé l'addition, puisqu'elle se trouve
encore dans •!» et dans les mss. grecs connus des copistes de la pes-
chittà et de la philoxénienne.
Il est donc plus sûr de dire que le grec est une traduction d'un
texte sémitique. Il n'en est peut-être aucun dans leX. T. qui présente
aussi nettement ce caractère, avec le balancement exact des situations
(1) Sabalier.
(2) Si on supposait un autre grec, ce pourrait être pour ccCpo.
L'ANCIENNE VERSION SYRIAQUE DES ÉVANGILES. 3o
•
l'affirmer; il apu écrire d'après une tradition orale, qui n'aurait été
écrite sous sa forme plus sémitique qu'après la rédaction du premier
etdu troisième évangile.
Puisque nous avons reconnu le caractère secondaire de Cur par
rapport à D, on pourrait voir dans Cur une traduction de D, un peu
arrangée. Mais on pourrait supposer aussi une source araméenne
commune.
Le terme de oE'.zvc/.Aïj-rwp, rendu diversement par les latins, est un
indice que le grec est original par rapport au latin. Le sens grec
paraît être celui de nomenclator iAthén. iv, 171 B), le ser\-iteur qui
indique les places, une sorte de maître d'hôtel. Mais les latins ont
compris comme Hilaire : dominiis coenac. D'où vient ce mot rare? Il
Cur ont emprunté à un même original qui pourrait bien être l'évangile
des Nazaréens, comme l'avait déjà conjecturé Bengel. Mais quoi qu'il
en Cur ne peut être l'original du grec ni du latin.
soit,
nise avec Me. et avec Le, et c'est la leçon de D, a, Irénée grec (m, 9).
Mais Tatien Hic est fîlius meus 'Moes. 99
: .
Mt. XII, i6 iv. a été omis par D et Sin Cur. af h, d'après Vogels
pour supprimer une différence entre Mt. et Me. \\\, 31 avec Le. viii, 19.
— Ta.-ar. n'en a pas été gêné.
Mt. xiii, 1. Sin avec D afom.it £•/. rr,; c./.'.a:, peut-être pour harmo-
niser avec Le. viii, 4. Mais ces mots se trouvent dans Cur et dans Ta.-
ar.
Mt. XIV, 19 et Me. vi, 2G /.a-. t:j; ava/.£'.;j.£vcj;. mais Sin et Cur dans
36 REVUE BIBLIQUE.
•
Mt., Sin (Car h.) dans Me, ajoutent c-.a après v.xk, et de même (bis; D
et plusieurs latins. — Ta.-ar. om. contre pes.
Mt. XYii, 14 y.ai caGcvtwv, Me. ix, 14 v.xi saOcvts; Cur et Sin, Sin (Cur
h.) ont le singulier, avec D et les latins dans les deux cas. —
Ta n'avait
que le texte de Le. (1; ix, 37.
Mt. XVIII, 20 [Burk.) — sans parallèle. Sin u car il n'y a pas deux ou
:
trois réunis en mon nom, que je ne sois au milieu d'eux, » D cuy. staiv...
T.xp' o'.ç cjy. v.\).i<.. d non enini siint — aput qaos non ero. Clém. Al.
{Strom. III, X, 68) -vtz: lï y. o'js... -jrap' ziz ;j.e7:ç c-t-.v c y.jp'.:;. — Mais
Cur et Ta [Ephrem, Aphraate) ont le texte grec ordinaire. On dirait
que le copiste a confondu zZ en sj, et arrangé la phrase en consé-
quence. Mais, quoique la phrase de Clém. ait une allure positive, son
rrac' :iç ressemble bien à D.
Me. VI, 53 =-'. -çi Yr;v r,A6;v ziz \'vrrf,jxpt-/.x>. r.pz::iùp[j.'.aQr,<jxv. Da écrit :
(Cur h.). Rien de plus fort! Or Ta s'est contenté du texte de Jo. vi. 21''.
Notez que /.ai -::p;7a)c;j-'.76r,c7av est omis par D fam. 1 28 565 700 a W
h c ff i q r pes. arm. M. Burkitt (2) en conclut que ces mots man-
quaient généralement à Me. au commencement du iii^ siècle. Ce ver-
dict tombe avec l'antiquité de Sin.
Me. XV, 1\ Sin (Cur //.) om. fp. Cela
ti; Tt apr,, de même D af n r
rend le texte semblable à Mt. xxvii, 35 et Le. xxiii, 3i. Tatien n'a
retenu que .lo. xix. 2i.
Le. m, 9 ;j.r, r.ziz^)] /.:zpz:v y.aXov Sin Cur D (seul) le pluriel. De même
Sin Cur (D hiat) sur Mt. m, 11. On dirait ici que le pluriel est dans
les habitudes syriennes.
Le. VI, 42. La leçon propre de Le. t^-zz Tr,v ev tw zo^x\\j.<s) cz'j zz-az^^
:j ^As-wva été remplacée dans D par celle deMt. vu, 4, sous la forme
y.ai izz'j zz/.z: sv tw -w ivOa/.y.w j-zv-u-x'., de même Sin (Cur h.) afit.
r,
—
Ta.-ar. a la forme authentique, ipse in ociilo tuo trabeni non videns,
qui doit être originale, car la pes. lit. quum ecce, trabes quae [est] :
Le. vil, 7 z<.z z'jzz £;j.a'jT:v r,;'.(o-a -pz: zt sXôs'.v, omission volontaire
pour s'accorder avec Mt. viii, 5, dans Sin (Cur) D trois cursifs, abc
e ff"^
l ri. Mais Tatien avait été plus radical en lisant '.et venit ad eum
cum senioribiis ludaeorum.
Le. VIII, i9 sp'/e-au.. Xe^oiv est remplacé par le plur. zpyz^KX'....
sing-.
Me. Il, 23 :
(1) W au-:;v £v -o<.- Taoêa^iv zapî'jsjQa-. Sin « le jour du
sabbat il allait ». om. coov zîisiv D W Sin.
II, 26 om. £-'. ao'.aôap toj ap-/'.ep£a); /.a-. D W Sin.
II, 27 et 28. La coïncidence si remarquable de W et de Sin a été
déjà citée.
III, 7 om. r,/.:Xo'j6Y;a-av D W Sin.
— 8 om. 7.3;'. y-o ty;ç looj'^.y'.ocç D W Sin.
— 10 sOepaTTE'Jsv 1 idipy-t'jzv, W Sin.
— 20 ep^rsTai 1 zpyzv-x>. W Sin.
V, 1 w Y£pYU!7rf,va)v Sin Gergéséniens.
Au surplus, ces ressemblances et d'autres encore — — sont com-
pensées par des divergences nombreuses. Le texte de W dans cette
partie est tellement corrompu, qu'on ne peut songer à le considérer
comme descendant en droite ligne d'un ms. grec qui aurait été l'ori-
ginal de Sin.
Pour le reste de Me, le texte est nettoyé des plus criants lati-
nismes; il demeure cependant apparenté à ce qu'on nomme les textes
occidentaux. Voici la statistique de M. Sanders (p. 73) : sur 490
variantes peu soutenues par les mss. grecs ou même pas du tout :
latins anciens 186; fam. 13, J70; fam. 1, 122; Ms. 565, 120; Ms. 28,
118; D, 111; Sin 101; Sa 101 ; Bo 71. — n 2i, B 16.
Il est sûr que cette variante absurde s'explique très bien en syriaque
par une dictée, puisque le ivair final ne se prononçait pas. Mais
imagine-t-on un copiste consultant le syriaque pour aboutir à ce non-
sens? N'y a-t-il pas des deux côtés un lapsus de scribe?
VI, i5 — £iç -0 r.tpci'f fam. i; q.
— 55-1- £i; a. ohr,-^ fam. 13. M. Sanders voit une origine syrienne,
Sin ayant : « ils envoyèrent « tout le pays ». Mais si on lui empruntait
la préposition, pourquoi pas le verbe?
23 —
VII, -auxa.
— 24 — a b ci £7.£iO£v n.
— 33 leçon signalée plus haut. W va exactement avec fam. 13 ; 28
et Sin (cf. 0) contre Éphrem aussi bien que contre le texte des cri-
tiques {Bio'kitt).
— 37 — aXaXcyç 28.
VIII, 4 ti)C£ cuvaaai auTCUç arm.
— 10 r.poq TO ope; 28.
— 27 £-Y;po)Ta... £V ty; oBo).
lumière au baptême; après Mt. xx, -28 sur l'humilité; Me. xvi, 3
la lumière à la résurrection; Le. vi, o l'homme qui travaille le jour
du sabbat; Le. xxiii, 2, 5 séductions; Le. xxiu, 53 la grande pierre,
et qui sont omises par le texte reçu.
Mais Tatien en admettait cinq (3) et la recension antiochienne
six (i). D'où vient l'abstention de Sin, primitive ou secondaire? Nous ne
sommes pas obligés de recourir à une parenté avec les textes B n,
qui serait contredite trop souvent(5). Il suffit de reconnaître une
forme brève sur ces points du texte auquel appartiennent D et
consorts. Inversement on pouvait se demander comment Sin appar-
(1) p. 216.
(2) Il est iacuneux dans un cas. Dans deux autres la lacune ne pouvait contenir
le passage.
(3) Ml. m, 15; XVI, 2''
3; Lc. xxil, 43. 44; xxiii, 34»; Jo. v, 4.
(4) Les mêmes sauf la première et de plus Lc. ix, 55; Jo. vu, 53-vm. 11.
(5) Cf. RB. 1913, p. 501. ^ ^
L'AiNCIENNE VERSION SYRIAQUE DES ÉVANGILES. 41
(1) On eût pu en effet attribuer les coupures de Sin à l'inQuence de B.-M. Burkitt
(p. 226 ss.) a objecté que dans ce cas on aurait encore enlevé certains traits dans Mt. iv, 10;
V, 22; X, 23; XX, 16; I\V, 1; Me
X, 24; XIII, 6; Lc. XX, 34; XXIU, 48; Jo. Ill, 6; XI, 39;
XII, 12 ; XX, 16. — On pourrait répondre que ce sont de petites additions déjà acclimatées
qui n'attiraient pas au même degré l'attention des critiques. Le savant anglais est mieux
inspiré en notant certaines particularités de »S B ou de B seul absentes de Sin :
(2) D ov [loYi; ei/offi îxjXiov c quem vix viginti volvebant. En sah. quatre variantes
rendent lé même sens. On sait que M. Rendel Harris [Cod. Bez. 47) supposait l'influence
originale d'un hexamètre (?) latin.
42 REVUE BIBLIQUE.
sa taille une coudée, pour que vous soyez anxieux sur le vêtement »?
Cette soudure ne se trouve nulle part. Or on lit dans le logion
1. 13 SS. t(ç âv 7:po70 <Cv.^ è-'i tyjv Y;A'.y.(av •jjj.wv;
r, à'j':b[ç ojwaei 6[aîv t;
CONCLISION.
doit donc pas être nommé occidental, il ne doit pas non plus être
nommé syro-latin. Tatien n'est pour rien, semble-t-il, dans cette
conception. Et quant à syr.-vet. elle e.st plutôt le lieu où les
deux manières se sont fondues.
.le ne veux pas prononcer le nom d'Ammonius, parce que ce ne
serai' rien de plus qu'une pure conjecture. Il serait un peu plus sûr
de nommer Hésychius, dont nous savons du moins par saint .lérôme
que son texte était allongé comme celui de Lucien, quoique sans
doute d'une autre manière. Il faut toujours en revenir à ce résumé,
le seul point d'appui positif que nous ayons :
44 REVUE BIBLIQUE.
Jérusalem.
Fr. M.-J. Lagrange.
LES SYMBOLES PROPHÉTIQUES D'ÉZÉCHIEL
[suite).
Symbolisme —
Pour éviter des confusions regrettables, il faut
.
correspondent.
On est surpris que cette belle allégorie ne soit pas expliquée sur-
6 REVUE BIBLIQUE.
(1) M. Touzard paraît adopter sa manière de voir {Reoue Biblique, 1919, p. 8).
LES SYMBOLES PROPHÉTIQUES D'ÉZÉCHIEL. 47
Symbolisme. —
Néanmoins la scène n'a de sens complet qu'à la
fin du deuxième tableau et les deux parties qui la composent ne
comportent qu'une seule et même sig-nifîcation.
Cet enseignement serait-il en général, comme l'ont pensé quelques
anciens, que les morts doivent ressusciter un jour? Non, car une
telle leçon ne correspondrait ni à la situation psychologique des
(1) In h. L
''2) C'est ce que dit clairement Théodoret « Si j'ai montré pouvoir sans peine ce qui
:
vous
paraissait très difficile, il est évident que je vous dégagerai sans effort des liens de la capti-
vité comme de sépulcres, et que je vous ramènerai dans votre patrie » (in h. 1. Mi"ne
•
•'
o
P. G., t. LXXXI, col. 1193). '
phète n'avait pas à cette date des convictions très fermes sur le relè-
vement national de son peuple. Plusieurs critiques, Bertholet, Krae-
tzschmar, Gautier, croient pouvoir en déduire qu'il ne croyait pas à
la résurrection des morts. S'il y avait cru, ne se serait-il pas empressé
de répondre franchement oui [ein rundes la! Kr.) à la demande du
Seigneur? De cet embarras prétendu, M. Lucien Gautier donne la
raison suivante : « Le prophète est trop honnête, trop loyal pour oser
dire oui, parce qu'il a perdu l'espérance... Et cependant il est trop
pieux et croit trop fortement à la puissance de Jéhova pour pouvoir
dire non (1). » — N'est-ce pas raffiner à l'excès sur les sentiments du
prophète? Que lui demandait le Seigneur? Il ne lui demandait pas
s'il croyait à la résurrection des morts en général, ni même si les
ossements desséchés devaient un jour reprendre vie. Il lui demandait
si les cadavres dont les os couvraient la plaine allaient ressusciter
sur l'heure et tous ensemble. C'était là une chose inouïe, et qui
dépendait assurément du bon plaisir de Dieu; mais cela n'avait qu'un
rapport très lointain avec la croyance en la résurrection des morts.
Ézéchiel répond ce qu'il doit répondre ; mais ses paroles n'excluent
nullement la foi au dogme. S'il avait dit : « Seigneur, les morts
ressuscitent-ils? « à la bonne heure, nous tiendrions l'aveu d'une
ignorance formelle. Mais on voit combien sa réponse est éloignée
de cette formule.
Ce n'est pas tout. Avec plusieurs Pères, Tertullien, saint Jérôme,
Théodoret, et généralement les auteurs catholiques, il y a tout heu
de croire que l'argument de la parabole présuppose je ne dis pas —
établit —
la foi en la résurrection. Comme l'a très bien dit saint
IV
ACTES SYMBOLIQUES.
15 ss.), les deux chemins (xxi, 23 ss.), les deux bâtons (xxxvii,
15 ss.), il en signale d'autres qui, d'après lui, sont irréels, tel le
III, 25. Et toi, fils de l'homme, on t'a mis des cordes, et on t'en a lié, et tu ne
sortiras plus au milieu d'eux.
IV, 8. Et voici que je t'ai mis des cordes, et tu ne te tourneras pas d'un côté sur
l'autre, jusqu'à ce que tu aies achevé les jours de ton siège.
font mis des chaînes, ils t'ont lié. Qui, ils? Des domestiques? Ezéchiel
n'en avait vraisemblablement pas. Les anciens du peuple? Il eût fallu
le spécifier. Des ennemis personnels? Il n'y avait pas lieu non plus
de le sous-entendre.
Cette indétermination, qui ne saurait être fortuite, doit se rendre
en français par le pronom indéfini on : On t'a mis des chaînes, on t'a
lié, ce qui convient à Dieu aussi bien qu'aux hommes. De fait, un
très grand nombre de critiques modernes, qui essaient de corriger
lié; Cornill Us t'ont mis des chaînes et je fai lié. D'autres, Kloster-
:
Enfin, nous lisons iv. 8 : «Et voici que je Cai mis des cordes ». Je,
c'est bien lahvé cette fois; c'est lui-même qui attache le fils de Buzi,
de soi qu'il serait garrotté par des liens véritables, tel Samson aux
mains de Dalila ou des PhiUstins. Mais si c'est Jahvé en pereonne
qui éprouve son prophète, il est plus naturel d'entendre les cordes
au sens métaphorique. C'est la solution à laquelle on croit devoir
Il Les Septante portent : 'I5o-j liZo-i-x'. ItJ. •ri oî^^oî, /.ai orjo-o-JTiv atli avToï;...
54 REVUE BIBLIQUE.
[A suivre.)
Denis Buzv, S. C. J.
(1) Ainsi interprété, le symbole des cordes se confond avec celui de l'inamobilité sur
le côté, qui sera étudié un peu plus loin.
.
MÉLANGES
•^^-i>^a. « Noms des femmes des patriarches suivant le livre des Juifs,
qui est appelé Jubilés. »
sive. » Même formule dans The Apocrypha and Pseudepigrapha of the old Testament
in énglish, tome II, Londres, 1913, p. 3.
(2) Ou UoCa/; Ceriani déclare ne pas être sûr de l'exactitude de sa copie pour l'ortho-
graphe de ce mot, Monumenta sacra et profana, vol. II, fasc. 1, Milan, 1861, p. ix.
Charles reproduit l'orthographe de Ceriani sans annotation dans The ethiopic version of
the hebreir book of Jubilees... Anecdota oxoniensia, Semitic séries, part. VIII. Oxford,
1895, appendix III, p. 183.
(3) Charles, toc. cit. une faute d'impression.
^»^l, ce qui doit être
(4) Op. laud., Texte reproduit par Charles, The ethiopic version... p. 183.
p. ix sq.
Rubens Duval s'étant arrêté à l'expression de Ceriani a écrit « De la Parva genesis ou :
(1) The ethiopic version... p. x : « The ragment prinled in Appendix III points most
probablv to a Syriac version as ils source. « La référence aux Juifs dans le titre du
fragment insinue que la version syriaque aurait élé faite directement sur Ihébreu, la
présence du mol grec aTâo:o'j transcrit ^o^Lè»^ ne constitue pas une objection sérieuse,
beaucoup de mots grecs ayant été admis dans la langue hébraïque deux siècles avant la
composition du Livre des Jubilés.
(2) Dans E. Kaltsch, Die Apo/injphen und Pseudepigraphen des Allen Testaments,
vol. II, Tubingue, 1900. p. 35. Littmann semble s'être décidé pour le recours direct à
l'original hébreu sous l'influence de J. Barth, lequel, sans exprimer d'opinion positive
sur le mode de composition de la liste, estime ({u'elle ne prouve pas 1 existence d'une
traduction syriaque du Livre des Jubilés. Cf. le compte rendu de l'édition par Charles
du texte éthiopien dans Deutsche Literalurzeituwj, XVI (1895j, col. 1063.
(3) The Book of Jubilees... translated, p. xxix.
MÉLANGES. 57
table des versets contenus dans les divers livres de la Bible (1).
Les scolies Vonomasticon proviennent apparemment de manus-
et
crits ayant subi l'influence des Hexaples. Les marges des manuscrits
syro-hexaplaires étant constellées de scoiies, il est facile d'en tirer
un choix analogue à celui des if. 178-180. Vonomasticon viendrait
soit des marges (2) soit de quelque annexe. La préface au livre des
psaumes dans la Bible syro-hexaplaire du couvent de Sainte-Marie des
Syriens (3) contient un onomasticon, qui dépasse de beaucoup les
noms propres de ce seul livre (4); Vonomasticon à'Add. I'2.id4,
qui commence par les noms propres delà Genèse, a peut-être figuré
dans le premier volume, aujourd'hui perdu, de cette même Bible.
Le compilateur des miscellanées semble bien avoir utilisé cette
Bible, car il a inséré au f. 31 un scholion d'Hippolyte, qui fait
partie de la préface déjà citée au livre des Psaumes (5).
D'autre part, les éléments de la liste se trouvent en grec dans un
célèbre Pentateuque à chaîne, riche en notes critiques de toutes
sortes et tout à fait analogue par sa disposition aux manuscrits syro-
hexaplaires, le Basileensis graeciis (6). Dans ce manuscrit, il est
vrai, les noms des femmes des patriarches sont disséminés dans les
marges des chapitres IV et V de la Genèse, et ils ne dépassent pas
la génération de Noé; mais la matière est la même. Ici isolés, là
(1) W. Wrk.iit, Catalogue o/ syriac manuscripls in the British Muséum, vol. II,
Londres, 1871, Le texte de Y onomasticon a été édité par Frantz Wutz, Oiiomas-
p. 985.
tica sacra, dans Texte und Untersuchungen, vol. XLI, p. 820-837.
(2) Plusieurs onomastica marginaux ont été publiés, dont on trouvera la liste dans
Wutz, op. laud.
(3) Cette préface est conservée dans deux manuscrits, le célèbre Ambrosianus C. 313
inf., f. {Codex syro-hexaplaris Ambrosianus phototypice edilus. Milan, 1874) et
5'-5"'
(6) Autrefois B. VI. 18, n" 13-') de Holmes et Parsons. Cf. J. Deconynck, Essai sur la
chaîne de l'Octateuque dans Bibliothèque de l École des Hautes-Études, fasc. 195,
Paris, 1912, p. 35 sq. Les notes du Basileensis ont été publiées sous le sigle r par Paul
nE Lagarde, Genesis graece, Leipzig, 1868, et celles qui concernent les femmes des
patriarches longuement commentées par H. Rônsch, Das Buch der Jubilaen..., Leipzig,
1874, p. 367-372. Il est assez étrange que Ronscb ne cite pas le scholion publié par
Ceriani plus de dix ans avant son ouvrage.
58 RKVUE BIBLIQUE.
réunis dans un scholion pourvu d'un lemme, les noms des femmes
des patriarches nous apparaissent dans le même milieu, que nous
appelons hexaplaire, le mot étant employé ici dans un sens large, et
couvrant, en plus de l'œuvre personnelle d'Origène, celle de l'atelier
critique palestinienoù les Hexaples furent conservés et complétés.
D'autre part, Ceriani avait deviné juste en pensant qu'il y avait un
texte grec entre l'original hébreu des Jubilés et la liste syriaque. Je
ne m'arrêterai pas sur ^o;>.és^ (j-âBtov, dont Charles a récusé la =
valeur probante mais l'équation i-^-^^-
(1), 'lo)|3r;XaTa (2) me paraît =
très significative jamais l'hébreu rr'Sn'' ou mSsii (3) n'aurait donné
:
transcription normale de gy;. Cette forme, qui est un à-i; 'kz-;z\).z-^ov (4),
aura été imaginée par le traducteur syrien en face d'un mot grec
qu'il ne comprenait pas, ou qu'il a voulu respecter comme un nom
propre, car il n'y a qu'une expression pour traduire « jubilé » dans
l'Ancien Testament syriaque, c'est ^oos. ita^ « année du retour » =
de la terre à son propriétaire (5). On peut remarquer aussi que le
mot ux^o. n'est pas marqué du ribbouï, signe distinctif du pluriel,
probablement parce que le traducteur a cru se trouver en face d'un
féminin singulier; s'il avait eu sous les yeux un original hébreu
DiSn'!i ou mS^i^, le caractère pluriel du mot n'aurait pu lui échapper.
Il n'y a pas à rechercher plus précisément la paternité du scholion;
on pourrait penser à Origène (6) et raisonner en s'appuyant sur un
détail du titre, car les noms proviennent d'un livre
il y est dit que
juif, pv^ LQ\; = zapi apud Hebraeos. Or, en dehors de
Toïç 'E;3patctç,
saint Jérôme, qui semble avoir connu l'original hébreu du Livre des
Jubilés, je ne trouve, dans tous les témoignages patristiques recueil-
(3) aiSn"' est la forme biblique; mais le Livit des Jubilés est appelé rnSn^n 1SD
dans un commentaire sur le Cantique attribué à un disciple du Gaon Saadia, cf. Eppstein,
Le livre des Jubilés dans Revxie des Éludes juives, XXI (1890), p. 82.
(4) Pavne Smith, Thésaurus syriacus..., col. 1540 sq.
Cf.
(5) On
trouve cependant U^i^aa- dans le commentaire de saint Éphrem sur Ézéchiel
(S. Ephraemi opéra..., Rome, 1740, vol. II, p. 198) dans les expressions P^^ûH.» |^a»,
1^ iovo pisûii. p^ao^t.) **^" ^ i^i*. ovi*^*/. L'éditeur a vocalisé pâJA:;, en rattachant ce
v;
mot à jii>Q^ qui signifie « série, succession ». Notre chroniqueur emploie parfois Usû*
pour « jubilé », p. ex. p. 7, 1. 5.
Origène avait écrit un grand nombre de (jy_6\\y. sur les divers livres de la Sainte
(6)
Écriture la plupart de ces scolies sont perdues, on en retrouve
; toutefois dans les
chahies, cf. 0. Bardenhewef., Geschiehle der althirchlichen Literatur, vol. II, 2' éd.,
Fribourg-en-Brisgau, 1914, p. 119-124.
MELANGES. 59
àr.OY.pôçz'j \éyo-JGi Tbv aj-rbv £ivat /.al osT::6-:r,v y.al ::îvOspbv YîvÉo-Ga'., est-il
(1) Catena Nicep/wri, istpa vih- -/.ai TrEvtr.xovTa 'j-ou.vr,u.7-'.ffTwv îî; -rrjv 'Oy-TaTî-j/ov. ..,
(1) Traduction de la Chronique syrienne anonyme éditée par Sa Béatitude M-' Rah-
mâni, dans Revue de l'Orient chrétien, XII (1907), p. 429-440; XIII (1908). pp. 90-99;
321-328; 436-443.
(2) L'étude détaillée sur les sources de la chroaique, que le savant éditeur projette de
publier avec le dernier fascicule, fera juger l'ouvrage plus favorablement encore.
(3) Apocryphe syriaque résumant assez rapidement l'histoire de l'Ancien Testament, et
qui doit son nom de Caverne des Trésors à la place tenue dans ses premiers chapitres
par la caverne où est enterré le corps d'Adam, sous le Golgotha. Cf. Rubens Dlval, La
littérature syriaque. 3° éd., Paris, 1907, p. 81 sq.
(4) Dans les traductions de Jub., Cav. et Chron., ce qui est commun à Jub. et Chron.
1 L
MÉLAiNGES. 61
Cai\ z=. Caverne des trésors, citée d'après C. Bezold, Die Sc/ta(z-
hùhle. Leipzig, 1888. Les pages sont celles de la traduc-
tion allemande.
Chron. ou C/ir. =
L E. Rah3iam. Chronicon civile et ecc/esiasticum
anonyrni auctoris..., Charfé, 190i.
Epiph. = S. Épipliane. De mensuris et ponderibus, cité d'après
G. DiNDORF, Epiphanii episcopi Constantiae opéra, Leip-
zig, 1863 et Paul de Lagarde, Symmicta, II, Gottingen,
1880.
Epiph. *•''. =: Traduction syriaque du même traité d'après l'édition
de Paul DE Lagarde, Veteris Testamenti ab Origene receii-
,(3oCoo . IW-t-3 IJOiOJO U^^oo \^'l° ^.^ci lov^ 1;.^ ) 11 1 „.. wOioN^i {.lOo,^ |.^ao..i^ N.« .;-3
. ^oV> I
St V)o .|Loju,^> )"-i|IVKa .\ZBlf l'illv ,^ooCoo . loCiX ^i-o y««v>t y» |Jl:>(l.^o; |_jin.^
(.^oo.. |jow»o . . . . |>Oiaj> ~010^>^/ [. «N N | . vi t ooio . ^.x>.Ai wOv't-oo . (-.N^l | .?m » \i.s r^'^', l-^a-'>-3
. . . |l r. I -^o l<<:i^«.3 P^.^! (.^aii^oo iLoV^vJO . yOovvu',:_oIo | viSn yo:»^ IV.3 pO) |
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v>o . -> ,.:>A {.sVoi Iv^t^ \^-^''l • lr-<^.^° \^V I ' ^'fo il;'- l^.^^/o tvjL^«.âO ^>|J |oCi^ ^ixSo
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iy>.i; oïLriv» . vi ., N.CD'r3l/o . )3ja:>o |«ov£D3 |.A.àaA jovSS. ,.â^ |\jf/» | -s^ r» . -.
. |jfn ..N )j&aj N..^ -ji;=^>aN 1 y. t\ ^ouo .)-^>( ^^ M>'0 t <Cl-^;^ ^^.' |Nj_s5tvi,o )
1 - - '" )i
(éventuellement aussi à Cav. dont nous n'étudions pas la composition particulière) est
en caractère romain ordinaire; ce qui est commun à Chron. et Cav. est en italique; ce
fpii est particulier à chaque document est en caractère gras.
(1) Dans le ms. il y a un blanc de cinq lettres environ, l'édition porte /? >*-»'
62 REVUE BIBLIQUE.
^^..*-; (1) Loaooi^o ^[S-Qi.0 IjUjL .\=\\-..*^ MqJU^ o^o/o pLioi». )oiS^ ;.ci3 M-iou-; ^ioa^u
|ju|;.3^ )V^ >o,.iaio iN-ao . I^î/ N>^ J-î» ^j^soioo |;^iJ>oo .|-i>>(.» |l-«ii- ^^ov^ r^ii^ 1^*» I^Q-i^
|JooO)N-30 ) S^v' --" lAî^^o |^^^« ->; ^c^o-;^^ ^ooiio )ovS\ ^cîijo . Ipii. ^»l.o ^ Visai, ^j^o^ 000)0
il créa les cieux en haut premier jour, qui est le premier jour, qui est le
et la terre et les eaux et dimanche^ Dieu créa les dimanche, chef et pre-
tous les esprits qui servent cieux et la terre et les eaux mier-né de tous les
devant lui: les anges de et la lumière diffuse et jours. Dieu créa les cieux
'
(1) Ms. :
'û» OV3 en deux mots.
^^i»— », en
Ms. et éd. '^^^ suivi d'un blanc; l'^- restitué d'après Cav. qui porte
(2)
considérant Lûsoov» comme un pluriel.
MÉLANGES. 63
du firmament iqui est) spirituel. C'est donc la son aspect, des cieux
au milieu, sur la face Jérusalem céleste. Et, en qui sont au-dessus de
de toute la terre. ce jour, les eaux furent lui, à savoir du ciel
divisées la moitié monta supérieur, qui est :
de
au-dessus et la moitié fut feu, et ce deuxième
sur la face de toute la terre. ^est) lumière et celui-ci
inférieur de... (raufîton?)
et parce qu'il a la na-
ture condensée de l'eau,
il est appelé firmament.
Et Dieu divisa, le
deuxième jour, l'eau
d'avec Teau, c'est-à-dire
l'eau supérieure de
l'inférieure. Et celle-là,
monta deuxième jour
le
au-dessus du ciel, comme
une épaisse masse de
nuages elle s'éleva
:
et monta
et s'étala au-
dessus du firmament,
dans l'air. Et elle ne
se verse pas, ni ne se
meut d'aucun côté.
Et il ne fit que cette Dieu ne fit que cette
œuvre le deuxième jour. œuvre le deuxième jour.
5. Et le troisième jour, Le troisième jour, il dit Et le troisième jour. Dieu
il dit aux eaux de se retirer, aux eaux de se retirer ordonna aux eaux de
de la surface de toute la de la surface de la terre dessous le firmament,
terre, en un seul lieu, et en un seul lieu, dans le de se rassembler en un
à l'aride d'apparaître. creux de ce firmament, et seul lieu, et à l'aride
6. Et les eaux firent l'aride apparut. d'apparaître. Et lorsque
comme il leur avait dit, la couche des eaux fut
et elles s'éloignèrent écartée de la surface de
de la surface de la terre
apparut que
la terre, il
en un seul lieu, en dehors rien n'était" ferme ni
de ce firmament, et l'aride solide, mais de nature
apparut. humide et molle.
u REVUE BIBLIQUE.
leur espèce.
Le Seigneur ût ces Il lit ces quatre grandes
quatre grands genres le œuvres le troisième jour.
troisième jour.
8. Et, le quatrième jour, Le quatrième jour, Dieu Et. le quatrième jour.
il fit le soleil, la lune et fit le soleil, et la lune et Dieu fit le soleil et la lune
les étoiles, et il les éta- les étoiles, et la chaleur et les étoiles et aussitôt
blit dans le firmament du soleil se répondit sur la que la chaleur du soleil
du ciel, pour qu'ils face des eaux, pour la se répandit sur la face
brillent sur toute la vigueur et la croissance de la terre, elle se
terre, etqu'ils séparent de tout ce qui germe et fortifia (sortant) de sa
la lumière des ténèbres. qui croit sur la terre; et mollesse, parce que
9. Et le Seigneur éta- il donna le soleil pour l'humidité et la fluidité
blit le soleil en grand séparer la lumière et les de l'eau lui avaient été
signe sur la terre pour ténèbres. enlevées. Et lorsque la
les jours, et les poussière de la terre
semaines, et les mois, eut été chauffée, elle
et les fêtes, et les produisit tous les
années, et les semaines arbres, et les plantes,
d'années, et lesjubilés, et les semences, et les
il créa les grands ordonna aux eaux, et elles Dieu ordonna aux eaux, et
monstres marins au enfantèrent des espèces elles enfantèrent tous les
milieu des abîmes des diverses, les cétacés, et poissons de différents as-
eaux, —
car ceci fut Léviatltan, et Béhcmoth pects et ce q ui serpente dans
la première oeuvre horrible à voir, c'est-à- l'eau les ctHacés, et Lévia-
( i
:
de chair qui fut faite dire les sauterelles, et than, et les Béhémoth horri-
par ses mains, —
les les oiseaux, et les jioissons. bles à voir, et les oiseaux
13. Et, le sixième jour, Le sixième jour, il fit Et le sixième jour, qui
il fit toutes les bêtes de toutes les bètes de la terre, est le vendredi.
1-4. Et après tout cela, Et après tout cela, il créa Dieu forma Adam de
il l'homme
fit il les fit l'homme :il les fit homme la poussière et Eve de:
2* fragment).
(1) Chapitre dans G. Di>dorf. Epiphanii episcopi Constantiae opéra, vol. IV,
22,
part. 1. 2, p. agarde, Sijmmicta. p. 176 >q. Le texte du ms. Mar-
27 sq. ou dans Paul de 1
cianus, qui contient des variantes importantes est donné dans la préface de Dindorf,
p. \v sq. Charles a réédité le te\te de Dindorf, avec plusieurs corrections, en face du
texte éthiopien des Jubilés dans The ethiopic version..., p. 5.7.9.
68 REVUE BIBLIQUE.
plété par un passage sut- le ciel au sens chrétien, qui lui est propre.
Il a ensuite reproduit Jiib., sans mentionner toutefois le mouvement
de descente des eaux inférieures; il s'agit peut-être d'une omission
accidentelle analogue à celles des manuscrits grecs d'Épiphane (3).
Au troisième jour, Chron. a une omission causée par l'homoiote-
leuton « en un seul lieu », si bien que l'ordre donné aux eaux n'est
pas suivi de l'habituel compte rendu d'exécution. Epiph. n'a rien
des vv. 5 et 6. Malgré la perte d'une clausule, le témoignage de
Chron. est ici très intéressant, car Elh. a une leçon peu satisfaisante
« à l'extérieur de ce firmament » =: 'afP'a 'em, qui traduit habituel-
lement le mot grec 'CzmHvk Le syriaque « dans le creux du firmament »
ou « à l'intérieur du firmament » =^ a^ semble préférable, car
les eaux dont il est question sont les eaux inférieures, recouvertes
par le firmament comme le sol d'une maison est recouvert par le
toit en se réunissant pour constituer la mer, les eaux inférieures
:
En ce point où le traducteur syrien a hésité, il n'y a pas accord parfait entre Eth.
(1)
et Epiph. .les trois manuscrits B. C el D ont « les anges du feu et les anges du souille
de la respiration », tandis qu'.4 a seulement « les anges du souille de la respiration «.
La disparition du premier terme s'explique en éthiopien par une omission due à l'homoio-
teleuton manfasa : wamalâ'ehta manfasa 'esOt u-amalû'ekla manfasa 'estanfâsa
devenu namalû'cMa manfasa 'ëstanfû sa, mais ceci n'explique pas l'omission ^ax Epiph.
Quoi qu'il en soit, Charles a peut-être tort de préférer la leçon de A. Epiph. à celle de
B. C. D.
(2) La place occupée par le terme « lumière » a causé l'addilion du qualificatif « dififuse »,
Jub. Chron.
sujet : quiconque fera en ce jour œuvre que le profanerait, qu'il meure de mort!
quelconque, qu'il meure! et celui qui le
|La.>^ aV>i.^aj (J; |.\i( ^^ v&^i; ^3fo |Lcu,^> | v>f>q pNjsf \.-x>a^ oovso
.Jub. Chron.
Jub. Chron.
des animaux (domestiques), des oiseaux sur la terre, afin que les bêtes ne parlent
et de ce qui marche et de ce qui se pas.
Jub. Chron.
mourutet tousses enfants l'ensevelirent... vécu 970 ans, au temps de sa fin, les
cause de cela, il n'acheva pas les années n'acheva pas les années de ce jour, car
de ce jour, car il mourut en lui. il mourut en lui.
(1) Cf. Josèphe, Antiquités judaïques, I, 1, 4; Livre d'Adam et d'Eve, I. 18; Georges
le Syncelle, éd. Bonn, I, 14; Cedrenus, Zonaras, etc.
T2 REVUE BIBLIQUE.
70 années pour (avoir) mille ans », c'est pour cela que la faute a pu
passer inaperçue. L'expression au temps de sa fin », dans une phrase
<>
Jub, Chron.
5, 1. Et ils les prirent pour leurs Et ils les prirent pour femmes, entre
femmes, entre toutes celles qu'ils choi- toutes celles qu'ils choisirent, et elles
sirent, et elles leur enfantèrent des Bis et leur enfantèrent des fils, les géants,
ceux-ci furent les géants (4).
Textuellement
(1) au temps de la fin du Jubilé, n
: <(
Par exemple Georges le Syncelle, éd. Bonn, I, 19, qui reproduisant Jub., 4, 29, écrit
(2)
930 ans au lieu de 19' jubilé, ',' semaine, ti' année.
(3) Le premier de ces passages ;p. 8, 1. 5-11; a un parallèle dans la Chronique de Michel
qui avaient pris pour des êtres angéliques les benê elohim de la
Genèse.
Après un long récit d'après Cav. sur Jubal et Tubalcaïn, et une
note sur le service de lared dans la Caverne des trésors, l'auteur en
vient à mentionner Hénoch comme père de iMathusalah. puis comme
ministre du culte adamique dans la caverne. Il en prend occasion
pour insérer un passage du Livre de< Jubilés sur le service d'Hénoch
devant Dieu :
Jitb. Chron.
gneur. sur la montagne du raidi. 26. Car Seigneur, sur la montagne du midi. Car
quatre lieux sur la terre sont) au Sei- quatre lieux sur la terre (sont/ au Sei-
et le mont Sion.
proposée en note.
La première difficulté de l'éthiopien est à propos du mot « soir ».
Deux manuscrits, C et D, que Charles considère comme les moins
recommandables, portent mesëta =: « le soir » B omet ce mot, A ;
(1) Cf. DiLLMA>N, Lexicon linguae aethiopicae, col. 467; références kjub. 49, 16 et à
74 REVUE BIBLIQUE.
cheveux.
Le témoignage de la chronique Rahmâni permet de proposer une
meilleure interprétation de ce passage elle précise en effet qu'Hénoch
:
MÉLANGES. 75
(1) Dillmann ne cite que ce passage pour le sens en question, Lexicon..., col. 442.
d'autre part; mais il ne faut pas que celte antilogie apparente obscur-
cisse l'évidence fournie par le contexte.
Dès lors, il faut d'abord chercher ce que pouvait être pour l'auteur
du Livre des Jubiles la « montagne de l'orient ». L'expression est
biblique montagne, mpn in est citée dans Gen. x, 30, en rela-
: cette
tion avec Seba, Ophir et Havila, dans le pays des Yoktanides; à.
défaut de localisation précise, on peut la situer sans erreur dans la
partie méridionale de l'Arabie. Le rabbin égyptien, Saadia le Fayyou-
mite, écrivant dans un milieu musulman, la place sans hésitation à
l'est, — le sud-est serait mieux, — de iMédine, ïjljwOI JI ^ .,' -j!
(1) I Hénoch, 18, S: 24, 3: F. Martin, Le livre d' Hénoch, p. 50, 64.
(2) Séjours et habitats divins d'après les Apocryphes de l'Ancien Testament, dans
Revue des Sciences philosophiques et théologiques, IV (1910), p. 696-702.
Seul Charles a senti qu'il devait y avoir identité entre la montagne du v. 25 et la
(3)
i( montagne del'orient » du v. 26; mais il ne s'est pas attaché à celte idée, alors «jue sa
correction de qatr en qëtârê, permettant de traduire la première fois « montagne des
aromates » faisait disparaître la ditliculté provenant de la divergence des noms dans le
texte éthiopien.
(4) J. Derenrolro, Œuvres complètes de R. Saadia hen Josef al-Faijyoï'nni, I, Paris,
1893, p. 17.
MELANGES. TT
dans son voyage vers l'est, les montagnes productrices des aromates
les plus variés, et l'auteur des Jubilés lui faisant instituer, au même
lieu, le sacritice de parfums du culte officiel, représentent la même
tradition.
Ceci dit, la leçon primitive du texte hébreu des Jubilés au v. 25 n'est
pas encore certaine ;nous supposerions volontiers un original r^-::-: --
ou ^'^z: ".", où le grec et l'éthiopien auraient cru trouver un nom
propre à transcrire comme les noms des trois autres sanctuaires,
Éden. Sion, Sinaï '-2 Le chroniqueur, qui n'était pis un simple
.
copiste et avait assez d'exégèse pour savoir désigner par son vrai
nom la montagne de l'encens, n'a pas hésité à uniformiser les deux
leçons divergentes des vv. 25 et 26 ; même avec cette pointe de liberté
son témoignage est précieux et permet de fixer difinitivenaent le sens
de ce passage.
Jub. Chron.
4, 17. Or c'est lui qui. le premier Cet Héaocli est le premier qui apprit
•des hommes, de ceux qui oat été engeii- l'art d'écrire et la science et la sagesse,
Jub. Chron.
drés sur la terre, apprit l'art d'écrire et et qui écrivit les signes du ciel dans un
la science et la sagesse et qui écrivit dans livre, pour enseigner aux hommes les
de leurs mois, afin que les hommes con- vant leurs lois, et suivant leurs mois.
naissent le temps des années, selon
leurs lois, chacun suivant leurs mois.
18. Lui, le premier, il écrivit un Et il fit connaître les jours de l'année
témoignage et témoigna aux enfants des et il fixa le compte des mois.
hommes parmi les familles de la terre,
et il dit les semaines des jubilés, et il
connaître.
19. Et il vit dans une vision de son Et il vit dans une vision de son som-
sommeil ce qui a été et ce qui sera, meil tout ce qui a été et tout ce qui
comment cela se passera pour les en- est(l), (et) aussi tout ce qui vient pour
fants des hommes, dans leurs généra- les enfants des hommes, dans leurs gé-
21. Or, il fut avec les anges de Dieu Et il fut avec les auges de Dieu, et,
six jubilés d'années, et ils lui montrè- ensuite, Hénoch plut à Dieu 300 ans et
(1) .Vu lieu de l'imparfait, qui s'entend aussi bien du futur ([ue du présent, le traducteur
syriaciue des Jubilés a rais un participe à traduire par le présent; il a commis une erreur,
mais son original correspondait à celui d'EUi.
qu'il y a de plus banal
(2) Trad. p. 16. Le passage omis par le chroniqueur
est tout ce :
changements des luminaires du ciel, chacun comme ils sont selon leurs
senres, chacun selon leur puissance, et selon leur temps, chacun
selon leur nom et le lieu de leur naissance et selon leurs mois i . »
queur n'aura pas voulu rapporter son témoignase contre les veilleurs
(suite du v. 21 et qu'il a tourné court, pour revenir à Cav.
ooof o^'yal 0)-3; —Of (.^i/ N. mv^ lf» ).^^ 1 1 ï . i ->; |La;>ïs |A^ ^^ ^ ^« p»;.. -^ a\^>.oi;; | Vi^
. yOOlLOuw,^CO ^ )_3ÏO) (1I\L 000)0 y^0Ol-.œ'.:^ r. . .tn •> l 'o . »oovioi ^
Juh. Chron.
P,^ ^jixojo .ot'^o; )iQ.g>o |-.;^a\ |.....-3,.^ ^-aj )jjo . )LQ.a^ ^ nn'^ j )C^L» ^-'i-»-» t—=o
^,><N).\x ^olGDO . |.«3y^ ^^ V'-^î wxxxo/o .pj<x. ^..ul^o 1
1 Ji°iQjLO .\.Jii~^oo IV^/o IP'O P^° il^^;
) ^^ .\ )..,^o; ^»_; ^...XlcoIo . |ISja.a^ y^ooiXa ^io ^v.\ ^^i/o . Iv^ia.» ^iuo ) .. i v>-i \>oy3; pLsioi:
^\^iO l-ViO yOOl^ «.Oâ; ^^/ OV».3lL30 OViO^i l^.^^^ \J'^^>^P Vt "Ol^^O ^-O-" l-iO-O •l-'j-iO ^_r-0
Jub. Chron.
son sang, il expia pour tous les pécliés des tourterelles et des petits de colombe,
de la terre... 3. Et il prit un taureau, et il offrit un holocauste sur l'autel. Et
un bélier, une brebis, des chevreaux, il plaça une offrande (de
là-dessus
du une tourterelle et un petit de
sel. farine) mêlée avec de l'huile, et il
colombe; et il offrit un holocauste sur arrosa de vin, et il jeta sur tout cela
l'autel. Et il versa là-dessus une offrande de l'encens, et il ût monter une bonne
(de farine) mêlée avec de l'huile, et il odeur, en agrément devant le Seigneur.
arrosa de vin, et il jeta sur tout cela de
l'encens, et il fit monter une bonne
odeur, qui fut agréable devant le Sei-
gneur...
7. Et seulement ne mangez pas la Et jXoé et ses fils jurèrent qu'ils ne
chair qui est avec son âme, avec le sang, mangeraient pas la chair avec son sang
car l'âme de toute chair est dans le et son âme, ainsi que le Seigneur le
sang, de peur que je n'en demande leur avait prescrit; car l'âme de toute
compte... 10. Et J\oé et ses enfants chair est dans son sang.
jurèrent qu'ils ne mangeraient point de
n'importe quel sang qui est dans une
chair quelconque.
ii^uj.» Uy^ pour que l'on ne puisse pas confondre chevreau et agneau.
Le terme suivant « veau » parait plus correct que « taureau » de
Jub^^^. Il semble aussi que la mention des chevreaux » au pluriel, ((
par paire.
Pour exprimer que la bonne odeur du sacrifice plut au Seigneur,
le syriaque emploie une expression nominale i-i-^ji., tandis que l'éthio-
cpsai Tou ApapaT àvà [iÀQC'i 'Ap!j.îv{wv y.a', Kapsuatcov sv tw Aoujâis octi
y.aXouaévw.
y^o...^> oM-^euL ^ .^^ojf IJL.H |;^ yn ..N ^1->L« |lw3 ^.o\ff>o -^p^.. i»^o |LoïL/« Mr^° |Nj>a. 3 V^
^^/; [JiQ-. ^^.i t-3;\^\ p)|o .|;<u; )ïq4, vpoviJ l«-a^o | laa.ISJi». \ijlo .|xa-.«;â> ovi-<^^eu ^
.
jy^j ov»->> ^>- )-..-s;^ PL/o . jo| PI )^r^ ov^ N-*J P; OO) .^AO^:»; )
vii>\ l-^È^^ol-; \^o^
|-.N^L I^J N^^.N |l!si.lj |U3 Nn\mo -t-^oo^yti. ^0) QÏ :>\ o ^o--\ )l-ol-W N^Vœ; )j).;( «O) )»Oi
*j^^; )Nj» |^;/o ..jL^a.. IN-aVoî )l-ï>^ wOi 'à i -»\ o Cs-Sl.:^ 0)LoL;-.; )Lj.3 NnXro; )^>/ wOj );0) .
)V^/»
ovi.»/ . |-»»Q^»j ) vici .«3 wO) ^^).iOLio PI .\'r^tO po taaik:»Q.>. p pa-Jj oy^H •>^Vi:i. |.iOj.i. ^owïji.
Chron.
8, 11. ... Et il partagea, par tirage Noé partagea la terre entre ses trois
au sort, la terre que devaient posséder fils, Sem, Cham et Japheth.
billet, au milieu de la terre, un lot qu'il (terre) habitée; depuis le torrent d'Egypte
devait posséder en héritage... 21. Et il et la mer Erythrée jusqu'à la mer de
(Noé) connut que c'était une part bénie, Phénicie et de Syrie. Et appartinrent à
et qu'une bénédiction était venue sur Sem et à ses enfants ces pays connus :
Sem et sur ses enfants pour les généra- la Palestine et toute l'Arabie, et la Phé-
tions éternelles : toute la terre d'Éden, nicie et la Syrie, et toute la Mésopo-
tout le pays de la mer Erythrée, tout le tamie et l'Hyrcanie, et l'Assyrie, et le
sur l'Erythrée] et ses montagnes, tout le terre de Perse et toutes les localités de
pays de Basa, tout le pays du Liban et ses environs, jusqu'à l'Inde occidentale,
les îles de Raftor, toutes les montagnes et le reste des pays orientaux.
du Sanir et de l'Araanâ, les montagnes
d'Assur qui sont au nord, tout le pays
dElam, d'Assur, de Babylone et de
Suse, la Médie et tous les monts de
l'Ararat, tout ce qui est au delà de la
mer, ce qui est au delà des monts
d'Assur, vers le nord, pays béni et
vaste, et tout ce qu'il contient est extrê-
mement
22.
beau.
Pour Cham, la part qui lui échut Etdeuxième part échut à Chanlf
la
I
fut au delà du Gihon, vers le sud, à deuxième fils de Noé. depuis le sud du
droite du jardin. Elle va vers le sud et Gihon, à la droite du paradis. Et elle va
s'étend vers toutes les montagnes de feu. vers le sud, et s'étend vers toutes les
MELANGES. S3
Jub. Chron.
Puis, elle va à l'occident, vers la mer montagnes de feu. Puis elle va à l'occi-
dAtel, et elle va à ToccideLt jusqu'aux dent, vers la mer d'Alel, jusqu'à ce
approches de la ruer de Mâ'ouk. qui est qu'elle arrive à la mer de Mahouk, à
'tellej que < tout ce qui y descend, laquelle rien ne descend qui ne meure.
périt >. 23. Elle arrive ensuite au nord, Elle arrive ensuite au nord, vers la tête
vers l'extrémité de Gâdîr, puis elle par- de Gâdîr, puis elle parvient aux rives de
vient au bord de l'eau de Ja mer, aux la grande mer jusqu'au fleuve Gihon, et
et à ses enfants, comme part de son d'héritage à Japhet et à ses fils : cinq
héritage, qu'il doit posséder pour lui et grandes îles et une grande région au
pour ses enfants, selon leurs familles, nord pour leurs générations jusqu'à
jusqu'à l'éternité : cinq grandes îles et l'éternité.
une grande région au nord. 30. Mais elle La région de Sem n'est ni torride, ni
est froide, tandis que la région de Cham froide, car elle est mélangée de chaud et
est torride ; mais la région de Sem n'est de froid; la région de Cham est torride,
ni torride, ni froide, car elle est un la région de Japhet est très froide.
mélance de froid et de chaud.
(1) Il faut restituer ^n^ ou î*?^; le ms. porte U^Jss^^. qui donne une leçon insoutenable
« à l'orient du nord ».
84 REVUE BIBLIQUE.
qu'Hérodote attaque avec raison, en disant qu'il faudrait alors dénombrer quatre parties
du inonde, le delta n'étant ni en Afrique, ni en Asie (II, 16). Ptolémée, tout en conservant
le cours du Don comme ligne de démarcation entre l'Europe et l'Asie, a été mieux
inspiré en donnant comme limite commune à l'Asie et l'Afrique l'isthme de Suez, afin de
est une description des trois parties de l'Ancien Monde. Mais les termes
géographiques désuets l'ont embarrassé; ne les comprenant peut-
être pas et soucieux en tout cas d'être intelligible pour ses contem-
porains, il en a omis plusieurs et a dû remanier en conséquence. En
outre, il n'a conservé que la deuxième description de la part de Sem,
et, se sentant sur un terrain connu, il a traité assez cavalièrement
les noms encore bibliques des Jubilés « Basan, Kaphtor, Elam, Suse,
Médie ».
répété deux fois dans l'original et qu'il faut entendre « et (la part de
Japhet) va jusqu'à s'approcher de l'Afrique, et elle revient vers le
milieu de l'Afrique {A, contre BCD : vers l'Afrique) », — par où il
mots des Jubilés au sujet du lot échu à Japhet < cinq grandes îles :
(^4 suiv?'e.)
Eugène Tisserant.
II
{suite).
B. Indices formels.
littoral Mer Noire jusqu'à l'extrémité de la mer d'Azov, et au fond de cette mer
de la
l'embouchure du Don. On trouve dans Pline les distances de l'itinéraire marin qui joint
les points extrêmes de ce littoral, Hist. nat. VI, 206-208; éd. Mayhoff, Leipzig, 1906,
p. 516; cf. Detlefsen, Die geographischen Bilcher der Naturalis Historia des C. Plinius
Secundus..., Berlin, 1904, p. 173.
(2) C'est l'auteur juif qui a exprimé là son sentiment; les géographes grecs donnaient la
palroe à l'Europe.
MÉLANGES. 87
n'avait pas jusqu'alors laissé présager une telle science et qu'ils con-
naissent ses frères et sœurs.
Marc VI, 2 Kal ol toaasI àxcùcv-rE; à;£-Xr,(J!TCVTC /.éyovts; : ::56ev :3Û-:(|>
TajTa;.... Oj7 jtsç èitiv ô tév.tiov 5 uro; t^ç Mapîa; /.ai àosXœb; 'Iay.o')êcu
xaî 'Iwff-^TSç '/.ai 'Iijsa y.ai — t^^''-?' ''•^' ^'-'''- s'-^'-'^ ^- assAsal xjtij moi
part du peuple; c'est une parenthèse qui n'a guère de rapport avec
le contexte : r.Tn'i: èsira'Jcv tcv Oîbv irJ. tw ysy^vÔt'." kwv yip V' icXeiôviov
T£ajapây.sv-:a c à'vQpw-cç is' cv YE^'ivs', tc s-r;y.sîcv tijt: t?;; '.â7£o)ç. Un
détailanalogue qui paraît donné pour lui-même, sans relation avec
l'ensemble de l'exposé, se lit également chez Marc dans le récit de la
fille de Jaïre :
Marc V, 42 y.ai sjSjç héG-r, tc y.:pac7'.;v y.a'i -spis-aTSi, ^v yzp ^"£>v ciossy.a.
Luc raconte le même miracle et donne également l'âge de la jeune
fille, mais la place où il note ce détail est toute différente de celle
où nous le trouvons dans Marc; Luc le reporte.au début de son récit,
si bien que celui-ci est beaucoup mieux ordonné.
Tsjç [j.st' a-j-cu y.al t\7T.opiùt-y.'. ottou -^-^v -o xa'.cisv. Même précaution de la
part de Pierre avant la guérison de Dorcas : Actes, ix, 40 à/,6aAÔjv oè
zï ajTY] yjipy. k^iG-r,(7t^ ajrf,v, IX, 41; il en avait agi de même lorsqu'il
guérit le paralytique zujaç y.al aÙTbv m, 7.
tt,; oiiixç, y^eipb: v-Ysipcv «jtîv.
7.px-r,(joi,ç --qç
X^'P^Ç ajTcO Y^vçtpev auxsv xai àvearf,.
La première fois, le même détail est rapporté par les autres
synoptiques, mais dans l'autre cas, Luc et Matthieu, qui relatent
cependant la même guérison, ne parlent pas de cette circonstance
relevée par Marc.
6. Dans les questions de dépendance littéraire, l'argument de loin
le plus objectif et le plus convaincant est la similitude de style :
Cependant les remaniements que Luc fait subir à ses sources sont
assez superficiels, ses retouches sont légères et laissent apparaître
maint indice propre aux documents M
ou Q qu'on n'aurait pas trouvé
chez Luc si celui-ci eût rédigé librement lès mains et le vêtement
:
(2) Ibidem,
p. 69 liegen doch Ev. C. I u. 2 und Apostelgesch. 1-12, 15 sicher schrift-
:
liche Quellen zugrunde, trotzdem sei aber der Stil dieser Capp. und ihr Wortschatz
ganz und gar lukanisch.
(3) Ibid., p. 68. Die von Lukas vorgenommenen Verberserungen haben die Besonderhei-
len der Quelle doch nich verwischt.
MÉLANGES. 89
<i Or cet effet assez saisissant est obtenu presque toujours par le
« même verbe zzp'.z'/.i-r.oy.x'.. ». Le R. P. Lagrange cite quelques
exemples (1).
Il aurait pu y ajouter les cas où Marc à Vexclusion des autres évan-
gélistes emploie d'autres verbes pour désigner le même geste, soit
qu'il s'agisse de Jésus ou d'autres acteurs.
Ch. III, il /.'A -.'x r.'ti'j'j.x-.y. -.7. x/.ihxz-.x :Tav ajTSv èOewpcjv
Or ces regards dont Marc parle avec tant d'insistance, il en est aussi
fait mention avec une fréquence remarquable dans plusieurs scènes
ATENI — A— 2£ n£Tp2Ç £'.Ç ajTbv (JJV TW IcoivY; £rZ£V 3/-^'i'-'' î'-; ï;;J-3tÇ.
VII, 55-56 k-zt^ntjX^ e\q tov ojpavbv £r2£v 22;av f)£2j y.al £lz£v
'.20Ù ôîwpô) Toùç oùpavojç.
^) vil^ 31 2 2£ M2'J7?;; '.20)7 £Oa'j;j,a'r£V Tb '2px;j.a.
et spécialement ly.ôatjistffôai.
Cf. ch. I, 27; IV, 41; v, 15; v, 42; vi, 2,50; x, 26, etc.
Naturellement le même sentiment est mainte fois noté par les
autres synoptiques, mais dans plusieurs cas, Marc est seul à faire cette
remarque, Matth. et Luc, même lorsqu'ils ont un récit parallèle, ne
signalent pas cette impression où ils y insistent moins.
Par exemple, Me. v, 33 r, ce yuvy; çoêrjôsTca xjtî -pé'^.ouaoL... r^.Osv
(Luc VIII, 47 i, ^('j^r, -p£[j.ouaa ^XGsv).
Ot33!)^Y] aÙTOD.
Dans les deux derniers cas, la « manière » de Marc se trahit bien et
s'oppose assez nettement à celle de Luc; tandis que Marc insiste sur
le sentiment de crainte et d'étonnement que provoque Jésus, Luc qui
rapporte le même fait à peu près dans les mêmes termes, omet de
signaler l'impression produite.
Me. XIV, 33 v.xl r,pçx-z^ïy.(ix[xoE'.!jfioci.
XVI, 8 tlyz'f vip x'j-'xç Tpoixo; xat 'éy.c-XGiç' y.ai oùosvl oùoèv cîzaV
èçocsijvTû yôip-
Ce dernier texte traduit encore le genre spécial de Marc qui n'est
pas adopté par les autres synoptiques. Luc, en effet, ne note chez les
saintes femmes aucun sentiment xxiv, 8-11, Matthieu les dit partagées
entre la crainte et la joie xxviii, 8 ;j.eti z,ôoo-j y.aî yxpx; [j.cvâXr,? £Îpa[j.cv
a) Effusion du Saint-Esprit.
II, 6-1*2 7jvy;X0£v -0 T.'/àfis^ AX'. (j-j^ityùHr, èr-isTavTO oi y.a'i àOâj-
b) Guérison du paralytique.
III, 10 5-AY;76r,7xv ^^[j.cij;
-/.y.'. /.a': èxj-:â7£0j; ïrJ. tw arj[A6e6r//.iT'.
c) Ananie et Sapphire.
V, 5 -/.ai èviVî-: 9260? ;j.éYa; s-', -avTaç tcj? ày.o'JiVTaç.
/) Conversion de Corneille.
X, 4 ; 5È àT£v{aaç aÙTco y.a'c s;j. 5:ê:ç y-''^î-''-''5^ .
g) Délivrance de Pierre.
XII, 16 3:v;(;3cv':e; oè sloav xjtjv y.al ir éjTr, jxv .
A) Aveuglement d'Elymas.
XIII, 12 TOTî '.âwv 6 àvOjraTCç ts y-T^^'^Ç àTT-'aTeu^sv ày.;: Ar^Tîiy.svo?
£-'. ty; S'-îayf, -oj y.updj.
Une seule fois au cours de ces chapitres l'auteur signale que le
sentiment provoqué par des faits surnaturels fut la joie. C'est à l'oc-
casion des miracles accomplis par Philippe à Samarie :
Au ch. XIII, 52, il est dit des disciples d'Antioche de Pisidie qu'ils
furent remplis de joie sî -t '^.y.(ir,-y:<. èzXr.pcjvTi yy-py: v.y.l 'vij\j.y-oz iY'oj;
10 xal ù>q OL'tvito^xtq "^aav £'.; 6;j-(i)v v.c, xbv ojpavbv outwç k'kvjazxy.\
MÉLANGES. 93
II, 6 z'x^e.yùhr^ o~i •/;•/.: usv st; 7 où'/'- iooj TrivTcç ijtoi î'.jiv c '.
sxaffTOç Tïj îotat s'.a/.iy.TW /.a- XaXouvTc? Fa/aXaict xai | zw? YJixsîç
III, 8 '/,yX èçaXXi- 8 /.at eîffvjXôev gjv au- 9 y.al îiosv zaç s Xabç
[j-îvoç è'ffTYj xai rôpiî- Tst; îîç TO (epbv Tuepi- ajxov zspi7:a-oî3vTa
r.x'tu. zaTÔJV v.at àXXi [JI.SV5Ç /.al a'. vouvTa -bv
Xa i à iV 0) V Ts V 6eôV . G £sv
efepov lîxq ~v^.'zq toîv ^£7 xh Xp^[Ji.a xal £6ï;- xal èvÉ^xaç [AÉpoç -rt,
T wV 2 •;: 7 - ô X 0) V .
v{a, -f^
/.Xâîs'. tou apTou y.at Tafç 7cpc(j£'j-/aTç, après quoi il passait â l'ex-
posé de la guérison du paralytique opérée par Pierre et Jean en
montant au Temple.
Ce miracle, que Luc allait raconter dans ses détails, était l'occasion
pour lui de rappeler la mention générale des miracles apostoliques
qu'il lisait dans sa source au ch. v, 12, mais cette mention était pré-
cédée dans son document, d'une remarque sur la crainte inspirée aux
fidèles par la mort de Sapphire, ch. v, 11. Luc transcrit également la
note sur la crainte non pas parce qu'elle était nécessaire dans le
ch. II mais plutôt par la simple raison qu'elle se trouvait précéder
dans le ch. v la note générale sur les miracles qu'il y reprenait. Par
le fait même, il insistait sur le rôle primordial que jouaient les
apôtres dans la première communauté et développait un peu l'idée
que l'auteur de la source avait énoncée plus brièvement au v. 42 -^cfav
(1) Harnack, Lukas der Artz, p. 66. Sehr lehrreich ist, und an Dutzenden von
Cfr.
Lukas bei seinen Correcturen und Umforraungen des Markustextes
Slellen zu belegen, dass
den Bibelstil bzw. den Stil des Markus zu kopieren sich berauht. Er setzt nach Kraften
einen Lappen ahnlichen Zeugs auf die Risse.
MÉLANGES. 93
Développement.
1. II, 43 'Ey.:v£tc oè za^y; V, 11 Kal EFENETO 4>0B0E
KOINA.
45 Kaî Ta xti^ txaTa xai xà; IV, 34 Ojoè vip èvosv^ç ti; v' Iv
(iTzapzziq ïr.iT.poczv.cv y,ai 0'.ctj.£- ajTOî;, cjc. yàp KTHTOPEI!
ptuov a'jTx 7:xcvf. y.iOstc àv t'.ç y^wpîwv r, o'.y.iwv YITHPXONtjwAcjv-
ypz.iy.y zlyi^^. ~tq 'észpo-* -kq •:i\i'xç xwv milPAS-
KOMENQN xal è-iOcuv -rrapa tcjç
Y'Jva'.xwv.
96 REVUE BIBLIQUE.
puient pour faire la distinctioa des sources sur le ch. ii, 43-47, c'est
que ces versets ont beaucoup plus l'aspect d'un remaniement rédac-
tionnel à attribuer à Luc, que d'un texte primitif.
ayp". £!xou'
àpyaîç xa6i£(j.£vov ki:\ t^ç y^Ç- 6 elq 'i^v àxîvi'aaç xaxsvso'jv, xal
12 £v (j) uzYjpyîv ::âvTa xi Texpâ- £tSov x£xpa'::cca x^ç y^/Ç ''•^^ ''^
-ruoSa y.at spzexà t^ç y^ç xat -âc- ôr^pia xal xà £p7:£xà xal xà 7:£X£ivà
xstvà Toy oùpavou. xou oùpavoU.
13 y.al sv-'^^'^'' ©wvï] "xpbç àutév' 7 fjxouffa C£ xat çu)Vf5ç XsyoûcTrjÇ
àvacj-âç, IIsTpE, 60aov xai çccys. ixcf àva(7xâç, n£xp£, 6îiaov xat
oàye.
14 6 Se riÉrpoç eiTeV p.-/;Sa[ji.à)ç, 8 sÎ'kOv Se' p.YjSa[xwç, x'jpis, oxt
y.tipis, OTi cùâsTroTe sœaycv ';:avxoi- xotvbv xaî àxàôapxov cjâeTuoxs
vbv xài àxâGapxcv. £'.G'^XO£v £Îç xb (jx6[/.a \),0\>.
L. Dieu.
Louvain.
(t) Cfr. Lagrange, op. cit., i.xxiii et sv.
CHROMQUE
1. — Le tombeau.
Phoi. Sarigiiac
Fig. -2. — En'rée de Thypogée après sa déformation.
2. — Le mobiliei' funéraire.
Dans cet ainas d'ustensiles aux galbes les plus divers, l'objet qui
attire tout dabord l'attention est une représentation féminine en
terre cuite, dont le réalisme très grossier n'échappera à personne
pi. I, 3 . Brisée lors de la découverte, cette figurine put être recons-
tituée .avec son piédestal, mais le sein droit dont la cassure paraît
toute fraîche est irrémédiablement perdu. L'ensemble forme une
Clichés Savignac.
Abou Ciluiih. Mobilier funéraire judéo-hellénique.
Planche II.
Clichés Siivifjuac.
Abou Ghôcli. Céramique Tuiiéraire judéo-lieliénique.
CHRONIQUE. 101
panse et l'élancé de la lèvre iûg. 3 b; pi. II, 6) (1). Qui n'y recon-
naîtra linfluence des modèles grecs? Un type
de caractéristique
la céramique judéo-liellénique nous est livré ici par les deux
amphores à épaules plates et à goulot reproduites à la planche I, 1, et
à la planche II, 5. que Ion chercherait vainement dans les époques
antérieures (2). C'est encore de la même période que relèvent indu-
bitablement les lampes à pied rudimentaire et les lampes à bec pincé
et à rebord d'assiette dont nous avons deux spécimens planche II,
-T07V5
Les autres pièces : écuelles et plat delà figure 3 et delà planche II, pots
sans anses, se casent aisément dans la même période. Sauf les deux
(1) On en trouvera des types similaires dans Buss et Macalister, Excav., pi. 53.
(2) Voir Canaan, pi. Xf, 3, et surtout Buss et Macalister, Excav., pi. 49 et 50;
(1) The philistine city of Ashelon, PE Fund, QS., 1913, p. 8-23; pi. 1 et If.
CHRONIQUE. 103
fuit eis in Ascalone...; liée autem mahumeria a Sarrace7iis dicitur Calhara, latine
vero Viridis. Cet ouély probablement place à une église Saint-Jean dans la suite
fit
loniiana, olim Mahomeria dicta. (Roehricht, Regesta regni HierosoL. Additam., 393*).
104 REVUE BIBLIQUE. •
(2) Au moyen âge deux autres églises sont signalées : Saint-Paul (auparavant la grande
mosquée, ;Ghll. de Tyr, ïmi, 30), et Sainte-Marie, probablement à Deir el-Hawa, sur
la ligne sud du rempart (Palm, Codice diplom., i, 63'.
(3) Ces deux sculptures découvertes momentanément par M. Ni.*sim Behar. directeur de
l'Alliance Israélite à Jérusalem, ont été publiées dans la Revue des Études juives, XVI, 1888,
CHRONIQUE. iO-&
Comme Niké et Iréné, taillées |en haut relief, font corps avec des
Isis,
p. 24 ss. M. Théodore Reinach les regarde comme deux Victoires. La notion du Puteus
Pacis pourrait n'avoir qu'une origine biblique et chrétienne.
(1) Geïer, liin. Hierosol., p. 180 Ingressi sumus in Ascaloyia. Ibi est puteus pacis
:
m
latitudine maior in modum theatri faclus...
,
siet devers oriant. Toute la cité est ausint comme eti une fosse qui se
penche vers la mer. Elle est ceinte tout entor de murgiers [aggeres)
-de terre aporté ice, sur quoi li mur siéent et les torneles. Cil terraus
sont ausint dur comme s'il fussent fet de ehauz et de sablom. Li mur
sont assez haut et espés, etc. (1). »
me
remit une photographie sommaire de ce groupe d'objets. Sans
Il
(1) Photographie dont M. Cl. -G. place une épreuve sous les yeux de ses confrères.
108 REVUE BIBLIQUE.
Mou cher Maître, Je reviens de Saïda où j'ai exécuté la mission dont j'ai été
Gesprâche Jesu mit seinen Jûngern nach der Auferstehung. Ein Katho-
lisch-apostolisches Sendschreihen des 2 Jahrhiinderts, nach einem Koptischen Papy-
rus des Institut de la mission archéologitjue française au Caire, unter Mitarbeit
von Herrn Pierre Lacau, derzeitigem Generaldirektor der âgyplischen Museen;
herausgegeben, iibe/setzt und untersucht nebst drei Exkursen von Carl Schmidt.
Mit Lichtdruck-Faksimile der Handschrift. Uhersetzung des âthiopischen Textes von
Dr. IsAAK Wajnberg. (Texte imd Untersiichungen... Band XLIII); 8" de vii-
731-83* pp. Leipzig, Hinrichs' sclie Buchhandluing. 1919.
guement excité la curiosité des érudits, le texte copte de VEpistola apostolorum (i)^
ou plus exactement peut-être de rentrctien de Jésus avec ses disciples après la
Patrologia orientalis (2). Mais le savant et modeste éditeur ne nous avait présenté
son travail que comme une œuvre provisoire. « C'est, disait-il, à M. Schmidt, qui
pourra désormais comparer le texte copte qu'il a découvert avec le texte éthiopien,
qu'il appartiendra de donner des conclusions plus fermes en conformité ou en
opposition avec les nôtres (3). Peut-être vaut-il mieux avouer tout de suite que
»>
(1) La première annonce de la découverte du texte copte remonte à i89'> Eine bisher
:
unbekannle allchrislliche Schri/t in Koptischer Sprache, von C. Schmidt, dans les !Sitzungs-
berichte der Kgl. preuss. Akademie der Wissensch. zu Berlin: pitilol. hislor. Klasse, p. 705 ss.
Un fragment, contenant le récit de la résurrection, fut ensuite publié en traduction alle-
mande par A. Harnack Einjùngst enldeckler Auferstehungsbericht, dans les Theolog. Studien
:
fur Bern. Weiss, Gôtlingen, 1897. Ce fragment est étudié par E. Henneke, Neuteslamentliche
Apokryphe, tom. I, p. 38 (l'JOi), et reproduit par E. Preiscben, Anliiegomena^, p. 83 s. (Gies-
sen, 190.-;).
veur Jésus-CItrisl en Galilée, Revue de l'orient chrétien, t. III (1907\ p. \ ss., sans rapprocher
d'ailleurs ce texte de celui qu'avait signalé Schmidt. Les relations des deux textes furent Indi-
(juées par une lettre de M.M. R. James, à M. Schmidt, qui n'eut pas de peine à constater alors (ju'il
s'agissait d'un même ouvrage.
Enfin en 190S, M. J. BiCR découvrit dans un palimpseste de Vienne un fragment de version
latine de cet écrit: Wiener Palimpseste : L Teil Cod. Palat. Vindobonensis 16, olim Bobbien-
:
sis, dans les Sitzungsber. der K. Akad. der Wissenschaften in Wien, Phil. hist. Klasse, 159.
Band, VU. Abteil. 1908. Cette découverte fut suivie d'une nouvelle communication de C. Schmidt :
cle est d'une pauvreté qui étonne. Les apologistes. Hermas. puis saint Irénée. la
représentent à peu près seuls. Ce serait une bonne fortune de pouvoir ajouter ui>
document nouveau aux trop faibles restes que nous connaissons surtout si ce docu- :
ment nous renseigne sur l'activité de Jésus et ses relations avec les apôtres. Les
apocryphes n'ont jamais eu bonne presse dans la grande Église. De bonne heure,
sans que l'on puisse d'ailleurs en lixer la date exacte, les quatre Évangiles et les
Actes ont été les seuls documents où les fldèles ont demandé la connaissance de la
vie du Sauveur et de ses disciples. Il est du moins vraisemblable que Justin n'em-
ployait déjà pas d'autres testes que ceux des évangiles canoniques. Et c'est dans les
écoles ou dans les sectes hérétiques que la littérature apocryphe a d'abord trouvé le
par M. S. se retrouvent aussi dans ces textes. Dans ces conditions, l'origine de la
lettre pourra de nouveau être attribuée aux mêmes milieux qui ont vu naître laPistis
Sophia ou les livres de Jeu.
Le texte éthiopien, qu'avait édité M. Guerrier sous le titre de Testoment de Xotre-
Seigneur et de Notre Sauveur Jésus-Christ, comprend en réalité, deux ouvrages dis-
112 REVUE BIBLIQUE.
tincts les onze premiers chapitres forment à eux seuls uq de ces ouvrages; ils sont
:
entier Déjà M. Guerrier avait signalé le caractère disparate du texte qu'il publiait,
(1).
et fait remarquer qu'au chapitre xii se trouvait un nouvel incipit & que rieu, disait-il,
ne réclamait, et rien ne justifie (p. 19) ». C'est à M. S. que l'on doit d'avoir fait, de
manière sans doute définitive, la distinction de deux écrits, en iusistant sur leurs
caractères différents, et en notant que les quatre feuillets perdus au début du
manuscrit copte, suffisants pour couvrir la lacune des chapitres xn-xvii. n'avaient
jamais pu renfermer encore les chap. i-xi. Volontiers, nous serons d'accord avec lui
sur ce point; et comme
nous nous contenterons d'étudier l'ouvrage qu'il appelle
lui.
la lettre des Apôtres, et qui comprend les chapitres xii-lxii de l'édition Guerrier.
Le titre de cet ouvrage est difficile à traduire exactement « Livre {du Kidan), que :
Jésus-Christ a révélé à ses disciples (Il y est dit) comment Jésus-Christ a révélé ce
livre, c'est (le livre; du collège des Apôtres (et} des disciples de Jésus-Christ : c'est
(le livre destiné) à tous; c'est au sujet de Simon et deCérinthe. faux apôtres, qu'il a
été écrit, afin que personne ne fasse société avec eux; car il y a en eux de la ruse
avec laquelle ils tueront les hommes (2). » Les nombreuses parenthèses, qui. dans
cette version de M Guerrier, signalent les mots ajoutés, suffisent à indiquer la com-
plexité de cette phrase obscure. Heureusement, la nature de l'écrit est elle plus expli-
citement marquée dès le début du chapitre 2 (13) « (Nous) Jean et Thomas et :
Seigneur Jésus-Christ; nous écrivons ce que nous avons entendu. Nous l'avons
touché, après qu'il fut ressuscité des morts, (nous avons écrit) comme il nous a
révélé (des choses) grandes, admirables et vraies (3). » On voit dès lors que nous
avons affaire à une lettre. Les Apôtres sont censés envoyer une sorte d'encyclique à
toutes les Églises, pour leur communiquer ce qu'ils ont vu et entendu touchant le
aux Apôtres et que ceux-ci l'interrogent sur la consommation des choses : toute la
seconde partie de la lettre est consacrée à rapporter le dialogue qui eut lieu alors
entre Jésus et ses disciples; dialogue au terme duquel se place l'Ascension : « Tandis
qu'il disait cela, il acheva de s'entretenir avec nous, et nous dit encore Voici que :
dans trois jours et trois heures viendra celui qui m'a envoyé, afin que j'aille avec lui.
mente en TOUS. » Mais ensuite, il semble que l'auteur oublie complètement ce début; et l'écrit
est en réalité un dialogue entre le Sauveur et les apôtres. Il est à remarquer que S., tout en insis-
tant sur le caractère épistolaire de l'ouvrage, donne à son propre volume le titre plus exact:
* ^'espriiche Jesu.
(2) Chap. 1 ;12;. Nous donnons la numérotation des chapitres suivant le procédé de Wajnberg,
Lee second cTriffre entre parenthèses est elui de Guerrier. Nous indiquons, selon les cas, la
traduction que nous citons.
(3) Chap. 2 \13; trad. Gierrier, p.
;
[i8].
RECENSIO.NS. 1 1
:'
cieux se déchirèrent et vint une nuée luniioeuse qui le prit. (Alors se fit entendre^
la voix de beaucoup d'anges, se réjouissant, bénissant et disant :Groupe-nous
«
A première lecture, la lettre des Apôtres évoque, d'une manière presque invin-
cible, le souvenir des écritsgnostiques en langue copte, publiés naguère par M. S.
dans les Griechische christliche Schriftsteller (2). De part et d'autre c'est la même
mise en scène. Les événements se passent après la résurrection, et le Sauveur
glorifié fait aux Apôtres groupés autour de lui des révélations qui complètent tous
ses enseignements précédents. La Pistis Sophia commença par ces mots « Il arriva :
après que Jésus fut ressuscité des morts, il passa onze ans avec ses disciples '3). »
Le deruier des ouvrages contenus dans la Pistis Sophia présente un début ana-
logue : « Il arriva, lorsque notre Seigneur Jésus fut crucifié et fut ressuscité de>
morts, alors ses disciples se rassemblèrent autour de lui 4,\ M. S. fait encore »
remarquer que ce procédé se retrouve dans des ouvracres gnostiques inédits c''est :
ainsi que l'Évangile de Marie contient des entretiens du Christ ressuscité avec ses
disciples: que l'apocryphe de Jean, conservé par le même manuscrit de Berlin, est
un recueil de révélations faites par le Sauveur glorifié à l'apôtre Jean, qui a mis-
sion de les transmettre à ses compagnons d'apostolat: que la Sophia Jesv. Christi
enfin commence en ces termes « La Sagesse de Jésus-Christ, après qu'il fut ressus-
:
cité des morts, lorsque ses douze compagnons et ses sept compagues furent arrivés
en Galilée sur la moutagne qui s'appelle « ... et Joie », alors le Rédempteur se
manifesta à eux (.î . On se trouve en présen :e d'un procédé littéraire qui est
courant dans la littérature goostique. tandis qu'on a peine à en citer quelques
exemples chez les écrivains de la grande Église (6 . Sans vouloir donner à cette
première constatation une importance exagérée, on peut du moins penser qu'elle
fournit une orientation utile pour d'autres recherches et d'autres conclusions (7 1.
Au reste, notre auteur est très loin d'imiter les fantaisies plus ou moins extrava-
gantes de certains livres gnostiques. C'est un modéré qui suit d'aussi près que
possible le texte de la Bible, dont il se sert et surtout celui des Évangiles <8 La .
lettre commence, nous le disions tout à l'heure, par un résumé de la vie du Sau-
autour de lui. après l'avoir suivi douze ans, pour en recevoir la révélation du grand mystère de
lumière II Jeu 4i; op. cit., p. 30»j. 3 ss.'. Cf. ce que rapporte S. Irènée au sujet des Valentiniens:
Kal TOÙ; >.o'.-o-J; ôî/.aoxTw aîûvi; savîoov'jOat oii rwv (lîtà tï;v ix vîxpwv â/âo-iaff'.v Oï-/.«!)XTto
(ir.Ti AÉvi'.v ô'.aTETp'.îÉvai avTOv a-yj xoT; u.a6r,TaT; Adv. Haeres. I 3, 2, •. et des Ophites « re- :
moratum autem eum post resurrectionem XVIII mensibus et sensibilitale in eum descendante
didicisse quod liquidum est: et paucoa es discipulis suis, quos sciebat capaces lantorum myste-
riorum. docuit liaec [Adv. Haeres. I 30. 14\ »
(."> CI. C. ScHMiDT. Gesprûche Jes'j..... p. 203 s.
(6 Cf. Justin. I ApoL ii~, 8: Clésient d'Alexandrie, ap, Ecsebe. H. E. u, \i. .
(" La forme littéraire du dialogue n'est évidemment pas particulière aux gnostiques, encore
qu'on la retrouve dans les ouvrages rappelés tout à l'heure, et dans d'autres comme les srandes
et les petites questions de Marie, signalées par S. Epipiiane Haeres. xsvi. 8. M. s, note avec raison
les ressemblances de détail qui existent entre la lettre des apôtres et le Pasteur d'Hermas Get-
prâche Jesu... p. 207 s. Ce qui est caractéristique de la méthode gnostique, c'est l'entretien avec
.
le Christ ressuscité. Les écrivains de la grande église imitent volontiers la discrétion des év.m-
gélistes sur la période de vie glorieuse du Sauveur.
(8} En dehors des citations proprement dites, le style de la lettre est tout entier imprégné de
réminiscences évangéliques. L'Évangile de saint Jean surtout est très familier à notre auleur
qui lui emprunte un grand nombre d'expressions habituelles.
REVCE BIBLIQUE 1921. — T. XXX. 8
114 REVUE BIBLIQUE.
veur. La plupart des traits qui constituent ce résumé sont empruntés aux textes
canoniques : saint Jean et les synoptiques sont également utilisés, et l'on pourrait
frères de Jésus figurent parmi les invités des noces de Cana 5 J6^; cf. Joan. ii, 2 ;
Jésus est enseveli dans le lieu appelé Kranion \id. 3 . On peut admettre que ces
modilicatioDS apportées aux données évangéliques ne supposent pas d'autres textes
que les nôtres, et qu'elles sont le fait d'un auteur peu soucieux d'une exactitude
entière.
Deux récits méritent de retenir davantage l'attention : celui de l'enfant Jésus
à l'école (4 1-3' , et celui de la Résurrection 9 [20] ss. . Le premier, étranger aux
évangiles canoniques, nous est bien connu par la littérature apocryphe : le texte
que nous lisons ici est à peu près exactement le même que celui du Pseudo-Mat-
thieu XX.XVIII 4 . Ou sait d'autre part par saint Irénée que les Marcosiens racon-
taient une histoire analogue qui devait être contenue dans un de leurs livres '5) et le
caractère étrange de cette anecdote, la faveur rencontrée par elle dans les milieux
guostiques, ne sont pas choses faites pour inspirer grande conQance à Fécrivain qui
la reçoit au même titre que les faits les mieux attestés dans les Evangiles canoniques.
Le récit de la Résurrection, plus détaillé, a retenu déjà l'attention de plusieurs
savants, depuis que M. S. l'a publié ,à part en 1895. 11 commence par raconter
l'arrivée des saintes femmes auprès du tombeau vide. Les femmes sont au nombre
de trois: dans les manuscrits éthiopiens, elles portent les noms de Sara, Marthe et
Marie-, le copte remplace Sara par Marie. Jésus leur apparaît et envoie Marie annon-
cer la résurrection aux Apôtres. Ceux-ci restant incrédules, Jésus leur expédie Sara.
11 va enfin lui-même rejoindre les disciples, toujours sceptiques; et pour les con-
vaincre, demande à Pierre de mettre sa main dans le trou de ses mains; à Thomas,
de mettre sa main dans son côté; à André de regarder si ses pieds foulent la terre
y a des traces de pas: car. ajoute-t-il, il est écrit dans le prophète que
et. s'il les fan-
tômes, les démons, ne laissent pas de traces sur la terre. On voit tout de suite les
particularités de cette histoire. Et d'abord les noms des femmes. Le nom de Sara, J
"
qu'on ne trouve nulle part dans le ?s. T., peut bien être une invention du traducteur
éthiopien ou une faute de lecture de la part d'un copiste le texte copte semble ;
(1) s. p. i-26 exclut l'utilisation tle ïatien par notre auteur, parce «lu'il fixe pour
iGvsprâche...
»elui-ciune date antérieure à 1"0, et parce que l'ordre de la narration n'est pas le même dans
les deux cas. De fait, on ne peut prouver avec certitude l'emploi d'une harmonie.
[i Le nom d'Archelaiis ne ûgure dans l'Evangile que Malllt. n, i.i. Dans l'ouvrage intitulé Aaa-
phore de Ptlate TiscuENDOr.F, Evangelia apocrypha p. 431», 4M) Arclielaiis parait à côté de ses
"'.
deux frères Hérode et Philiiipe et des grands prêtres Anne et Caïplie parmi ceux qui ont livre
Jésus prisonnier à Pilatc.
(3) Dans les Évangiles, le Calvaire (ô
),î.yÔja6vo; xpavi'oj to-o;) est le lieu de la crucifixion
{Matth. XXVII. s^i;Mc. xv, -2-2: Le. xxiii, 33; Joan. xix, 17 Jean six, U remarque qu'à l'endroit où
.
(6; A. BAiMSTiKk : Aile und Seue Spuren eines ausserkanonischen Evantjelium [vielleichl Ayyp-
RECENSIONS llo
meutation savante n'a pas convaincu M. S. qui se refuse à admettre l'emploi par
îauteinr de ÏEpistola d'autresdocuments que des livres canoniques et peut- 1 :
être en effet n'est-elle pas décisive. Mais il faut du moins noter que Marthe se
retrouve avec Marie dans Testoinentum ,Doinini publié en 1899 par M?'' Rah-
le
niûni 2 , et surtout qu'elle figure dans la PistU Sophia, parmi les interlocutrices
(lu Sauveur ressuscité 3 . Quant à Marie, on sait la place qu'elle tient dans les
livres gnostiques; elle n'est pas seulement le personnage principal dans la Pistis
Non moins remarquables que les noms des myrophores sont ceux des trois
Apôires qui rendent témoignage de la résurrection. La scène est sans doute imitée
du quatrième Evangile Joan. x\, 2(î ss. avec la préoccupation apolo^^éiique d'as-,
17. Ces deu.K explications ne sont pas satisfaisantes. On songerait plutôt au passage
de l'Évangile des Hébreux rappelé par saint Ignace d'Antioche Xioi-.i, ^r.Xaçrj^a- :
~i ;a.5. y.yX l'osTi. oti oj/. iI^l': ox'.aov.ov à^oioaTov G OU mieux encore aux reflexious ;
des Actes de Jean : ioouXo|xr,v ôl -lÀXa/.'.; c-jv aijToi [iaoî^wv tyvo; «Ùtou Ïtù. t^ç •/r]:
'.oiï\ V. tpxfvata'-; Iojo'jjv yxs ajTÔv k-o tt"; -^r^ç sauTov i-ai'çovTx /.x'ï o'jos't.otî îToov '7j.
terevangeliums), dans la Zeitschrifl fur aeutestamenlliche Wissenschaft 1913, H. 3, pp. 232 ss.
— Cf. A. BvcMSTARK, Hippolytos und die ausserkanonische Euangelienquelle des àthiopischen
ir-iUkui-Testaments. dans la Zeitsclirift fâr neuteslamentliche Wissenschaft, l!)l J. H. i, pp. 332 ss.
1 C. ScnMiDT, Gespriiche Jesu.... p. 234 ss.
2 T'Slamentum Domini i, 16 Tune Martha, Maria, et Saloine, quae nobiscum erant respon-
:
deruui dicentes Sa'ne. domine noster, edoce nos, ut scianius quid taciendum sit. ut llbi vivant
:
aniniae nostrae.
3 Pistis Sophia 'iS: Kopt. gnost. Schrift. p. 38, I" ss. id. 57, p. 72, 1. etc. :
(i Pislis Sophia 96: Kopt. gnost. .Schrift. p. Ii8, 2"» « Marie-Madeleine et Jean le Vierge
:
koptischer Sprache aus dem Codex BriKianiis T. U. viii. 1\ Leipzig, 18!>2, p. 449 ss.
(6)Ignace, £>. ad Smyrn, III, I, 2.
7; Act. loan. 93 ;éd. Bosnet, 1898: p. 197'. Ce rapprochement est indiiiué par S., Gesprâche
Jesu... |). 211. On signalera encore d'autres ressemblances entre les Actes de Jean et la lettre des
apôtres.
(8) D'autres agrapha sont à relever dans la lettre des apôtres c. 33 44) : . Il ;Paul; parviendra :
rapidement à la foi, afin que soit accomplie la parole du prophète qui dit : voici que de la
(erre de Syrie je commencerai à appeler la Jérusalem nouvelle, et je soumeUrai Sion à moi :
elle qui) était captive, stérile, sans fils, elle deviendra féconde) en lils, et sera appelée lille de
mon Père: et pour moi elle sera mon épouse. Le passage qui se rapproche le plus de celui-ci
est Is. u\, 1 cf. Gai. iv, •ii-27; // Clern. ii 1 s.). Ailleurs, c. 49 ,00) : « Lorsque lu entends une
parole contre ton frère, ne la crois pas; ne médis pas, n'aime pas à écouter la médisance, car
il est ainsi écrit : Ne prête pas l'oreille contre ton frère >, mais, si tu le vois lual faire)
•
reprends-le. corrige-le, convertis-le. M. Guerrier rappelle à ce propos Eccli. vn, 12; s. pense
'•
H6 REVUE BIBLIQUE.
C'est à l'emploi par notre écrivain de documents étrangers au canon que se rat-
tache problème posé par
le la liste des Apôtres au début de la lettre. Celte liste
comprend onze noms, dont le premier est celui de Jean, et le dernier celui de
Céphas. Pierre y figure au o" rang après Thomas; Nathanaël s'y trouve également ;
enfin Jude y est mentionné avec le surnom de Zélote. L'intention est manifestement
de rehausser la personnalité de Jean, et ceci nous ramène encore aux gnostiques,
dont on sait la nous ne connaissons
prédilection pour l'Apôtre bien-aimé. Du reste,
aucune liste d'Apôtres qui soit identique à celle-ci rapproche le plus : celle qui s'en
naël, Thomas, Céphas, Barthélémy (1). Ici comme là, Jean occupe le premier
rang-, Pierre est distingué de Céphas, et JNathanaèl prend rang parmi les Apôtres.
On retrouve séparément l'une ou l'autre de ces particularités : ainsi Jean est men-
tionné le premier dans une liste, d'ailleurs incomplète, de l'Évangile des Ébionites,
citée par saint Epiphane (2 Une liste de l'anaphore des Apôtres (liturgie éthio-
.
pienne des Jacobites d'Abyssinie) met le nom de Nathanaël parmi ceux des Douze (3 .
M. Baumstark, en s'appuyant surtout sur les ressemblances de notre liste avec celle
de la Constitution apostolique égyptienne, et sur le fait que Clément d'Alexandrie
distingue lui aussi Céphas de Pierre cru pouvoir y trouver une nouvelle preuve
(4), a
de la lettre des Apôtres reposent exclusivement sur un emploi assez libre des écrits
de l'Ancien et du Nouveau Testaments. C'est en ce sens qu'il explique encore les
deux prophéties placées sur les lèvres de Jésus relativement à l'emprisonnement de
saint Pierre (15 [26] ) et à la conversion de saint Paul (33 [4-J] ). Les récits des Actes
servent en effet de point de départ à ces deux prophéties. Bien que Pierre ne soit
pas nommé dans la première, on ne saurait hésiter à le reconnaître dans cet Apôtre
qui sera mis en prison à cause du propre nom de Jésus et qui sera miraculeuse-
ment délivré (cf. Act. Ap. xii, 3 ss.). Mais on s'étonne de la liberté prise vis-à-vis
de ces récits : la délivrance de Pierre n'est que momentanée : après avoir célébré,
avec ses compagnons, la coramémoraison de la mort du Sauveur, il est repris au
à Hermas, Mand. ii, 2; Ttpâixov [aèv [j.r,o£vo; xaïa/âXei [jLr,03 fioéto; àxouî xaTa/aAoûvTo; p. i>i-2 s.),
ÉPiPUANE. Ilaer.. xxx, iS 7cap£p/_6(ji£vo; Tiapà Tt)y >,c(jiv7îv TiêspiàSo;, £çè).e;(i(j.rjV 'Iwivvriv
(2) : -/.ai
lâxwêov uloùç ZeStùCLio-j, xal lt|i.c>>vx xal 'AvopÉav xal Oaociaîov y.ai Iîjjlwvx tov Zrj/.wTrjv v.aù
le cercueil de la Vierge, pour les mêmes raisons (Cf. A. \Vilmai!t et E. Tisserant, l. cit., p. 348 ss.).
Ou retrouve dans ces textes probablement égy|)tiens et gnostiques la marque d'une préémi-
nence accordée à Jean, l'apotre vierge.
RECENSIONS. 117
chant du coq et remis en prison jusqu'à ce qu'il en sorte pour prêcher. Quoique
ies anciens auteurs n'aient pas eu pour le texte sacré le minutieux respect qui sera
de règle plus tard; quoique dans saint Justin en particulier les Évangiles soient
cités sans grands égards pour la lettre des formules, on n'est pas habitué à trouver
dans la grande Église un pareil sans-gêne. La lettre des Apôtres a dû être rédigée
ilune époque où tous les livres du Nouveau Testament étaient écrits, et avaient
reçu droit de cité dans les communautés chrétiennes mais elle a dû aussi être ;
rédigée dans un milieu ou ces mêmes livres n'étaient pas regardés comme une
autorité unique et décisive.
On semble attacher une grande importance à l'emploi, par notre auteur, des
prophéties de l'Ancien Testament, citées avec la formule traditionnelle afin que :
soit accomplie la prophétie (cf. 19 '30\ avec une citation du Ps. m 1-8; 35 [46 ,
avec une citation qui combine Ps. xiii, 3 et Ps. xlix. 18, 20. 21; 47 '58', avec une
v 23 ?). « L'auteur de la lettre, écrit S., se montre
citation diliîcile à identitler. Is.
dans son estime pour l'A. T. un adversaire décidé des gnostiques '1). » Mieux que
personne pourtant. S. sait qu'il y aurait lieu de faire ici des distinctions. Si, parmi
les sectes gnostiques. plusieurs refusaient en effet de reconnaître l'autorité des
prophètes de l'A. T.. qui ne pouvaient être que les serviteurs du principe du
mal 2), d'autres estimaient leurs oracles et s'appuyaient sur eux comme sur des
paroles divines. Dans l'histoire de Pistis Sophia, le récit de ses tribulations se
«
complète par des hymnes qu'elle fait monter du chaos vers la lumière. Il y en a
treize que Jésus récite à ses disciples. Chaque fois qu'il en récite un, il invite celui
de ses disciples qui se sent inspiré d'en donner l'explication. Le plus souvent c'est
une des saintes femmes, Marie ou Salomé, quelquefois Pierre, André. Matthieu.
Philippe, qui prend la parole. L'interprétation de l'hymne de Pistis Sophia consiste
en la récitation d'un psaume de pénitence ou de supplication, parfois en une de
ces odes de Salomon dont on vient de retrouver la version syriaque... L'intention
de l'auteur gnostique n'est pas douteuse. En rapprochant ainsi l'hymne qu'il met
dans la bouche de l'héroïne de son récit d'un texte biblique, il pense lui conférer
L'hymne s'appuie sur l'autorité d'un texte sacré. Le simple lecteur
plus de prestige.
ne peut manquer d'être frappé de retrouver dans l'antique psaume les expressions
mêmes de l'hymne gnostique. Ce qui donne à l'autorité biblique sur laquelle ou
s'appuie encore plus de poids, c'est qu'on l'identifie avec l'inspiration de Jésus
lui-même. Les saintes femmes et les disciples ont soin de dire que c'est Jésus,...
sa nature divine qui a inspiré, sinon dicté le psaume qu'ils citent (3 . «
Si importante que soit la question des sources utilisées par l'auteur de la lettre
des Apôtres, elle cède pourtant le pas au problème de la doctrine qu'il professe.
Il semble que cette doctrine soit résumée en une courte formule de cinq articles,
dont les cinq pains du miracle de la multiplication constituent le symbole (4] « le :
p. o3«l ss.
i) On remarquera cette explication allégorique des cinq pains. Dans l'Évan.iîile de Barthélémy
I . Il, les douze oiseaux de boue faits par l'enfant Jésus ;cf. Ev. Thom. Il sont considérés
.omme le symbole des douze ap'Hres et de leur prédication à travers le monde. C'est tout à fait
te même procède.
118 REVUE BIBLIQUE.
7 [18] ). Gérinthe et Simon sont en eftet les faux apôtres dont il faut se garder, ceux
contre qui le livre a été écrit, afia que personne ne fasse société avec eux -,
les
regretter que leurs noms sont pour nous enveloppés du mystère de la légende.
Saint Justin est le plus ancien auteur qui nous parle de Simon; à saint Irénée
remonte ce que nous savons de plus clair sur Gérinthe. Mais déjà saint Justin et
saint Irénée connaissent bien peu de détails certains sur la personne et sur l'ensei-
gnement des deux grands ancêtres de l'hérésie; ils mêlent, dans leurs notices, l'his-
toire et la fiction: et les héréséologues postérieurs sont encore moins bien docu
mentes [2\ Dans la lettre des Apôtres. Simon et Gérinthe paraissent plutôt comme
des types, déjà légendaires, que comme des personnages vivants, des hérétiques en
chair et en os, dont la mauvaise doctrine constitue pour la foi véritable un imminent
péril : leur accouplement résulte du même procédé littéraire qui rapproche Démis
et Herraogèue dans les Acta Pculi, Simon et Gleobius dans la lettre apocryphe
de Paul aux Goriuthiens, Paul de Samosate et Artemas dans la littérature du qua-
trième siècle.
Les cinq articles (3 qui constituent le symbole de notre auteur ont une allure tout
à fait rassurante du point de vue de la plus stricte orthodoxie: ils peuvent être
empruntés une formule plus complète, et l'on n'a pas de mal à trouver, le long
à
de son oeuvre, une profession de foi aux vérités élémentaires que n'exprime pa>
ce résumé (4,. Riais un examen plus détaillé de la doctrine de la lettre ne lui est
pas aussi favorable. Dieu est le Père : le Père de toutes choses au sens cosmolo-
gique ;13 [2J] ), mais surtout le Père du Sauveur ressuscité. Jésus, parlant de lui,
dit : mou Père, le Père dans les cieux [18 [29] ); mon Père céleste (19 [30] [; le Père
qui m'a envoyé (13 [24] : 26 [37] : 39 [ôO] [ : il parle aussi du royaume du Père 19 [30] .
Les fidèles de leur côté sont les enf.mts du Père céleste [19 [30] ). Ils sont encore
les entants delà vie (28 [39;. ou les enfants de la lumière (39 [50], 28 [39]. Et c'est le
Père qui est la lumière et qui est la vie ,39 [.50 dans le texte copte , [5;. Il serait
i; Il ne faut pas, semble-t-il, presser sur cette expression, et la rapproclier de la grande Église
dont parle Celse ap. Okigène, Cont. Cels. v. oi». par opposition aux conventicules liérétiques. On
n'a texte est exact, qu'une formule honorilique.
ici, si le
(2 Gesprâctie Jesu... consacre à Cérinthe et aux Aloges un long excursus, p. W-l-io^. U
M. S..
conclut à l'existence d'un guostiquc du nom de Ccnntlie qui aurait exercé son action en Asie.
Mineure, mais il ne croit pas pouvoir en dire beaucoup plus long sur ce personnage. Toile est
aussi l'opinion de M. dt. Fxyp., GnostiQues et f/nosticisine. p. 411 ss.
i3) On trouve aussi un symijule en cinq articles dans le papyrus liturgique de Der-Iîalyzeli.
fol. 3 V. : ôjiciAOYôï Tf,v TiJiTTtv <^ O'jîw; > TTiiTTêOw cl? Be'ovTTavTotpiTOpa y.ai îl; t'ov jjiovoyevf;
aoToû \,l<j'/ Tûv x'jpiov f.ixwv 'Ir,(joOv XptffTov xa't £.; to tvsOijl* t6 •<[ aytov ]> /al £Î; rjxoy.ôz
àviurcLGi <C V xa'i >
àyia y.aOoXixr, £/.y,).r,!î:a. Cf. Th. Scuf.hmann, Der liturgise/ie Papyrus von
Der-Balyzeli. einr Abenduto/ilsliturgie des Oslermorgens. T. U. xxxvi, 1 b Leipzig. 1910. I.c :
syml)0le de la Constitution a|iostolique égyptienne a aussi les cinq articles: cf. F. X. FiiNu.
Die Symbolsiûcke in der âgyptischen Kirchenordnung und den Kanones Hij/polyls. dans Kir-
chengeschichtliche Abhandlungen und Unltrsucbungen, m, p. ir» s. Dans ces deux cas. la résui-
reciion de la cliair remplace la rémission des péchés.
(4) cf. S.. Gcsprûclte Jesu... p. 400 s.
(5) Le même langage se trouve employé à propos de Dieu dans les écrits gnosti(|ues de langue
copte. Jésus, en parlant de lui, l'appelle son Père Pistis Sophia. "5: Kopt. gnost. Schr. p. 108.
25, 32 130, ((/., p. -IH. etc.. il mentionne le royaume de son Père (Pislis Sophia, 37, id., p. 37.
:
•29; 45. id. p. '»?<. 3:2 etc.. 1 Jei' 43. id. p. i>!i. 31 et 33 I.es rachetés sont enfants de lumière
.
[Pistis Sophia. ii-2. id.. p. 79, 3U: 138. id., p. 23t), 53: 2 Jet' 43, id., p. 304, 3s et 39, etc..) Il est inutile
d'insister sur le rôle joué par la lumière dans les écrits gnostiques. D'ailleurs la présentation de
RECENSIONS. 1 19
qui brille, le Parlait venant du parlait: car le Fils est rendu parfait par le Père
i
l'qui est la lumière, car le parfait, c'est le père qui rend parlait, qui de la mort
Vollkommenheit. der Sohn wird durch dea Vater, das Licht, vollkommen
Und
werdcD. denn vollkommen ist der Vater. der den Tod und die Aut'erstehung volibringt,
— und eine Vollkommenheit, die vollkomraener ist als das Vollkommene. » Le texte
copte ne peut être ici de grand secours, car il est très mutilé; au plus peut-il
amener à préférer la version de ^^'ajnberg à celle de Guerrier. Un autre texte
n'éclaire pas davantage le problème de la nature du Père Je :
cf 'suis tout entier
dans le Père et le Père est en moi: car je suis) son image, je suis issu de sa
ressemblance, de sa puissance, de sa perfection, de sa lumière, je suis son Verbe
parfait 'I7Î28]) » [l), car les manuscrits éthiopiens ne sont pas d'accord sur ce passage,
dont le copte donne encore une leçon différente « Ich bin ganz in meinem Vater. :
und mein Vater ist in mir von wegen in Riicksicht auP der Ahnlichkeit der Ges-
talt u-oo^v und der Macht.^ und der Vollkommenheit und des Lichtes und der
vollkommenen Masses und der Stirame. Ich bin der Logos (Àoyoçi, ich bin ihm
geworden ein etwas eine Sache)... S., Ges'prache Jesu... p. 59 >. II est facile de
remarquer, à propos de ces deux exemples, que le texte éthiopien a dû subir des
remaniements destinés à de la lettre pouvait avoir
corriger ce que la doctrine
d'insolite ou d'étrange. donc sage de ne pas lui accorder uue confiance
Il sera
illimitée, lorsqu'il n'est pas appuyé par le témoignage du copte 2 .
On a noté d'ailleurs que c'est bien moins à propos du Père qu'à propos de Jésus
que nos textes sont obscurs et incertains. Le Père n'occupe dans la lettre des
Apôtres qu'une place restreinte, et c'est Jésus qui apparaît au premier rang, non
seulement comme le principal interlocuteur du dialogue, mais comme le consom-
mateur et le Sauveur de toutes choses. Par rapport à ses disciples, Jésus est le
Seigneur; il est aussi le Sauveur. Par rapport à son Père, il est le Fils de Dieu
(30[41], 39[.j0^. Dès le début, les Apôtres le proclament : « Voici ce que nous
savons : >'otre Seigneur et notre Sauveur (est; Jésus-Christ. Dieu. Fils de Dieu, qui
a été envoyé par Dieu le maître du monde entier, l'auteur et le créateur (de toutes
choses), qui est nommé de tous les noms '3), qui est au-dessus de toutes les puis-
sances (4'», le Seigneur des Seigneurs, le roi des rois, le puissant des puissants, le
céleste qui 'siège au-dessus des Chérubins et des Séraphins, qui est assis à la droite
du trône du Père, qui par sa parole a commandé aux cieux. qui a créé la terre et
ce qui est en elle, qui a fixé à la mer des limites pour quelle ne les dépasse pas.
qui (a créé) les abîmes et les sources afin qu'elles jaillissent et coulent sur la terre;
Dieu comme l'Jniière fait partie aussi bien de l'authentique tradition clirélienue que du voca-
bulaire des religions à mystères. Cf. G. P. ^VETiEn Phôs (?w:, eine Unteiswhung ûber he.Ue
: ;
rnstisrhe Frommigkcil: zv.gleich eine Beilrage zi'.m Verstândnis des ilanichâismus : Uppsala UD'l
Leipzig. 1015.
vil Tiad. Gcni\r.iF.r., p. [Gb].
;2' Gespniche Jesu.... p. i">0.
(3; Guerrier traduit ici dont le nom est prononcé par tous les élres.
:
4} Cf. Acta .Joannis: éd. Bon>ft, p. 20-2, 25 s. 0EÔv Tricrr.; iÇo-jaia: àvwîîpov y.al -rinr,-
:
0-..va;jiî<04 xaî àvyf>(,)v TiâvTWv y.ai y.ri'îîwv /îyou.ï'vw/ za": a'.wvtov ô).wv TtpS'JojTîpov xal Itv'jsô-
T£SOV.
120 REVUE BIBLIQUE.
qui a fait le jour et la nuit, le soleil et la lune, les étoiles dans le ciel, etc... ;i), qui
avec les anciens patriarches et les prophètes s'est entretenu en paraboles et en vérité,
luique les Apôtres ont prêché, que les disciples ont touché (3 [14] ). » On voudrait
seulement savoir, en lisant ceci, à qui est attribuée l'œuvre de la création, à Dieu ou
au Sauveur, car le texte éthiopien est ici loin d'être clair. S. cependant n'hésite pas,
dans son oomnoentaire, à voir dans tout ce passage une description des propriétés et
de l'action du Fils de Dieu (2; s'il est certain que c'est lui en effet qui est assis à la
:
droite du trône du Père, et vraisenoblable que c'est lui qui a parlé avec les anciens
patriarches et les prophètes (3), il est beaucoup plus douteux que l'œuvre de la
création lui soit vraiment donnée, et l'on estimera plus prudent de ne pas vouloir
démêler cette inextricable confusion.
Jésus est le Logos dès avant l'incarnation (3 [14] ] ; il est le Verbe parfait du Père
(17 [28] . « Je suis tout entier dans le Je
Père, dit-il, et le Père est en moi (^4)...
quelque chose... (la pensée) achevée dans le type (-û-o;); je suis devenu dans
(1") ogdoade, qui est la /.jç.ia.-/.-/; (5). » Il paraît bien difficile de tirer quelque chose
V oyÔGâôi, 7] -/.up'.axT) (jvou.â^$Tat, ::a&à ttJ ;-Li^j~pt â/ôvrwv xàç iuya;, xà IvoJjxaTX, S.yjii
auvTSÀstaç, at Ôè aXXai -tara'i ij/uyat. -api tw ÔT,[jiio'JpYw, jrep\ 8è ttjv TJVTÉÀsiav ivay^wpovjst
xaî aOiat etç oySoàJa. EtT« xb ostnvov twv yàixtov xotvbv jtdvxwv "wv aïo^oasvcov a/piç av
2-t<jto6^ navra xa\ (xXXr;Xa yvwpîor, (6). M. S. pense que « lorsque Théodote identifie
son ogdoade avec la zjptaxT), il s'empare simplement d'une vieille expression chré-
tienne; l'ogdoade ne devient spécifiquement gnostique que parce qu'il en fait la
(21 [32] qui lui a donné la puissance (19 [30]). Mais c'est un étrange récit de l'in-
'
carnation que nous trouvons ici « Voici ce que notre Seigneur) nous a révélé,
:
tel qu'il nous l'a dit. Lorsque je viens de vers le Père tout-puissant, alors que je
traverse les cieux, alors que je suis revêtu de la Sagesse du Père et de sa force,
(alors que) je suis vêtu de sa propre puissance, je suis semblable) aux êtres célestes,
aux anges, aux archanges: alors que je traverse (les cieux) sous leur aspect, (alors
je suis) comme l'un d'eux, (alors que) je traverse les Fonctions, les Puissances, les
Lichtkralt hat einst daiùber prophezeit durcli den Propheten David...: cf. i<i. 36, p. 36, 24 s.;
id. 46, p. ol, 26. Au chap. 17, la force qui se trouvait dans le prophète Isaïe, a ainsi prophétisé
et annoncé par une parabole («apaêo).^) spirituelle (Ttve-jfjiaTtxo:], p. 1(>. 3» ss. cf. Acta Joan. ;
112, éd. BoxsET p. 211, 2 ô ÔEiÇaç êauTov Sià to-j vôjio'j xai xwv Ttpoçr.Twv 6 [xyj Tip£[X7)<Taç
:
TTwitOTE, à)./.à m
(Tto^wv àtô xaTaêo/.r,; x6ff(iO-j to'j; Sova|JL£vovç atoôïjvai.
de cette formule se trouve dans les Acta Joannis
(4) Cf. Joan. XIV, 10. L'équivalent exact
1(0; éd. BoNXET, p. 201, Il yl-iu^mi.t y*? (J-£ ciXov îtapà tio Ttatpî xai t&v TraTÉpa Ttap'èixoî.
:
(5) Voici la traduction allemande de S. : « Ich bin der Logos; ich bin ihm geworden ein Etwas
(eine Saches d. h... <der Gedanke>, vollendet im Typus: icii bin geworden in <der> .4clit-
Dominatious. alors que je possède la mesure de la sagesse du Père qui m'a euvoye:
les archaa^es Michel. Gabriel, Uriel Raphaël m'ont suivi jusqu'au cinquième fir-
et
iiiament. puisque je ressemblais à l'un d'eux, car une telle puissance m'avait été
donnée par le Père. Mais ensuite, jai épouvanté les archanges par ma parole. >n
leur disant, qu'ils aillent vers l'autel du Père, et qu'ils servent le Père à leur
manière, jusqu'à ce que je revienne (vers lui . J'ai fait ainsi, selon sa propre
sagesse, car moi-même je serai toujours avec eux selon le désir de la miséricorde
du Père et la gloire de celui qui m'a envoyé. Car lorsque j'ai eu fini, je suis
revenu vers lui. Saviez-vous (lue l'ange Gabriel est venu, qu'il a annonce à Alarie?
— Nous lui dîmes : Oui, Seigneur. — Il répondit et nous dit ; Xe vous souvenez-
vous pas que jadis je vous ai dit que pour les anges, j'étais comme un ange? —
Xous lui dîmes Oui, Seigneur. : — Il nous dit : Alors sous l'apparence de l'ar-
gnostiques de saint Irenée « descendisse autem eum se. Christum} per septeiu
:
caelos assimilatum ûliis eorum dicunt. et sensim eorum évacuasse virtutem 3). »
C'est surtout avec la Pistis Sophia que le parallélisme est frappant, o Lorsque je
me suis révélé au monde, je vins au milieu des archontes de la sphère, et j'avais
l'apparence de Gabriel, l'ange des éons; et les archontes des éons ne m'ont pas
reconnu, mais ils (4)... Jésus prit de nouveau
pensaient que j'étais l'ange Gabriel
la parole et dit : Il du premier mystère je jetai un
arriva ensuite, sur l'ordre
regard vers le monde de Ihumanite. et trouvai Marie qui est nommée ma mère
selon le corps matériel. Je parlai avec elle, dans l'apparence de Gabriel ... et je mis .-
en elle la première force que j'avais prise de Barbelo, c'est-à-dire le corps que
j'avais porté dans les hauteurs; puis, à la place de l'âme, je mis en elle la force que
j'avais prise du grand Sabaoth 5 . » Il est vrai qu'une histoire analogue se rencontre
aussi dans l'Ascension d'Isaïe. mais ce n'est pas une très forte recommandation en
sa faveur, car cet apocryphe est sinon gnostique, du moins teinté de gnosticisme 6 .
i iRF.XKE, Adv. Haeres. i. iî, 3: cf. Hippolyte, Refut. vi, 10, G, éd. Wendland. p. 117. ss. I
Kpiphane. Uaer. xsr, fJ. 4: éd. Holl. p. iS'iO, 3 ss. Teutullien. De aainia 3i. :
3 Iréxee, Adv. Haeres. i. 30. 1-2. On peut citer encore les doctrines analogues chez Apelle,
F>i. Tep.tilmen. Adv. 'omn. haeres. 6: et chez les Basilidiens. Ikenee, Adv. Haeres. i, 24, 5, 6.
tant est qu'elle soit complètement reodue dans les anathémati?mes qui nous en oiu
conservé le souvenir '2\, reste bien différente des récils de la lettre des Apôtres.
Au reste, certains détails de ces récits sont peut-être particulièrement significatifs.
pensée du salut des nations (4). Le rire de Marie marque son acceptation, alors le
« Ipse se sibi filium fecit (5;. « Mais il faisait aussitôt observer que d'ailleurs la
« Le Seigneur, du Seigneur, nous croyons (qu'il esH le Verbe, qui est devenu
fils
chair, de la Sainte Vierge Marie, (qui) a été porté dans son sein, conçu du Saint-
Esprit; (que) ce n'est pas parla concupiscence de la chair^ mais par la volonté du
(1 JnsTixiKN, Ep. ad Mrnam, anatli. 4 JIansi ix. iJS: cf. Syn. Constant. :>^. anath. vu. ap. Haiin
:
der vor dem Slorgenanzeiger geboren is'. der Mitscliopfer des .\lles, der Uildner der Mensclien.
der in aliem ailes (gewordene), in den l'atriarchen Patriarch, im Geselz Gesetz. in dcn Priester
Hoher priester. in den Konigen oberster Fitrst. in den Proplieten Prophet. in den Engelii
Engel. in den Mensclien Mensch, in Vater Solin. in Gott Golt. in Ewigkeit Konig. Cl. Paili> i>!
XoLE. Ep. 38, G. S. E. ].. XXIX, 327: AinEr.ANMs, aji. Pitha Bibl. Patr. xu. p. 3ft yui in patriarcliis :
js [2<t\ 13 [2i]. 29 [40] % i.a distinction est partout très nette entre les deux personnes.
(.7) Pistis Sophia, G2: Kopt. gnost. Schr.. p. 80.2!» ss. Gt. Gesprache Jesiup. 28'».
(8; Pistis Sophia G: Kopt. gnost. .^chr.. p. 28: id.. p. 6, 7: 10. p. 12. 18 etc..
.'>.
RECENSIONS. 123
Seigneur (1 Hii^l '' ^^^ engendré, qu'il a été envelojjpé de !an;:es à Belhleliem. s'est
manifesté, (qu'; il a été élevé, et agrandi, alors que nous voyions ces choses 3 14' 2'. y
Manifestement, ce n'est pas là une cliristoiogie docète. Tous les traits sont groupés
pour montrer la réalité de la ciiair de Jésus: et cette préoccupation se manifeste dans
l'ouvrage entier. Jésus est le Verbe devenu chair (3 J4], 39 [50] il est vraiment res- :
suscité corporellement (12 '23^ il a revêtu la propre chair des hommes dans laquelle
:
il a été engendré, il a été tué, il a été enseveli et il a été ressuscité par son Père
céleste (Ifl 30] . " Bien que je ne sois pas engendré par un homme, dit-il, je suis né,
et bien que je n'aie pas de corps, j'ai revêtu un corps et j'ai grandi (21 32' . L'impor-
tance donnée aux récits de sa vie mortelle, la narration détaillée de ses miracles,
l'histoire de la résurrection et de l'épreuve faitepar les trois apôtres qui en sont
constitués les témoins, autant do traits qui montrent l'intérêt de notre écrivain à
prouver la vérité de l'iocarnation. Mais il ne semble pas que son but soit exclusive-
ment, ni même principalement celui-là. il n'a pas. comme saint Ignace d'Aniioche.
par e.\emple, la haniise du docétisme. D'autre part, c'est un lieu commun de parler
du docétisme des gnostiques, et la plupart d'entre eux, en effet, ont nié la réalité de
la chair du Christ (3\ Mais ils ne pouvaient pas faire abstraction des récits évangé-
]iques ni s'empêcher de parler du corps du Sauveur. Un passage de la Pistis Soplthi
est très caractéristique : « Je n'ai rien apporté dans le monde lorsque je vins,
explique Jésus aux Apôtres, en dehors de ce feu. de cette eau, de ce vin et de ce
sang... Le feu, l'eau et le vin sont pourdu monde.
la purification de tous les péchés
Le sang était pour moi en signe, à cause du corps humain que j'ai reçu dans le lieu
de Barbelos, la grande force du Dieu invisible... Aussi vous ai-je dit Je suis venu :
jeter le feu sur la terre, c'est-à-dire, je suis venu purifier avec le feu les péchés du
monde entier. Aussi ai-je dit à la Samaritaine Si tu savais le don de Dieu et qui :
l'eau vive: et il y aurait en toi une source jaillissante pour la vie éternelle. Aussi
ai-je pris une coupe de .vin, je l'ai benie, je vous l'ai donnée et j'ai dit C'est le :
sang de l'alliance qui sera répandu pour vous en rémission de vos péchés. Aussi
a-t-on enfoncé la lance dans mon côié, et il en est sorti du sang et de l'eau. Ce sont
là les mystères de la lumière qui pardonnent les péchés: c'est-à-dire les appelIation^
et les noms de la lumière 4i. » Ce texte mélange de manière curieuse les spécula-
tions gnostiques et l'histoire évangélique, les théories docètes et les formules anti-
docetes : n'en est-il pas de même dans l'interprétation symbolique que propose la
que se termine la lettre des Apôtres : o Tandis qu'il disait cela, il acheva de s'en-
tretenir avec nous, et nous dit encore : " Voici que dans trois jours et trois heures
viendra celui qui m'a envoyé, afin que j'aille avec lui. l^t comme il parlait, survinrent
le tonnerre, des éclairs, un tremblement de terre; les cieux se déchirèrent et vint une
ii; Cf. Joan. I, 13. I.a manifeslalion de Jésus dont il est ensuite question peut être une
allusion à radoration des bergers, Le. ii. 1-ï *;?. (.'ç>{ ans?! I.\ ii. vu. :'>2. i|iii nous renseigne sur
la croissance de Jésus.
{,•2/ ïrad. GiEni-.iEn. p. [."«O].
(3; C. ScHMiDT. Gnostische Schriften in koiilischer Sprachc, p. i-H ss.
(4 Pistis Soijhia. l'<l Kopl. gnost. Sefo:. p. 242, 18 ss.
:
disait Pietournez en pai.x (5t [62] ) (1). » Les données traditionnelles sont ici traitées
:
avec la plus grande liberté on ne sait si les trois jours et les trois heures dont il
:
en marque le point de départ à sa mort sur la croix. Les cieux qui se déchirent ont
leur pendant dans l'Évangile de Pierre à propos de la résurrection .2); la nuée lumi-
neuse rappelle celle de la transfiguration {Matth. xvii, 5}. Mais le parallélisme le
plus exact est encore à chercher dans les ouvrages gnostiques : « Il arriva, raconte
la Pistis Sophia, lorsque cette force lumineuse i — Sûvaai?^ fut descendue sur Jésus,
elle l'entoura tout entièrement. Alors Jésus vola dans les hauteurs, tandis qu'il était
devenu très brillant dans une lumière immense. Les disciples le regardaient, et
aucun d'eux ne lui parla jusqu'à ce qu'il fût arrivé au ciel, mais tousse tinrent dans
un grand silence. Cela arriva le 15« de la lune, au jour où elle est pleine dans le
mois de Tybi. Il arriva alors, lorsque Jésus fut parvenu au ciel, après trois heures,
toutes les forces du ciel se troublèrent, et s'agitèrent l'une contre l'autre, elles et
tous leurs éous (aîàivsç) et tous leurs lieux (t6-o;) et tous leurs ordres (Tx?£tç% et
toute la terre s'agita et tous ceux qui habitent sur elle. Et tous les hommes qui sont
dans le monde se troublèrent, même les disciples, et tous pensèrent : Peut-être le
monde s'est-il enroulé 3 . » Ici. comme dans la lettre, on retrouve la grande lumière
qui enveloppe Jésus, le trouble et l'agitation cosmiques, et même la mention de la
troisième heure.
Si le Verbe s'est fait chair et s'il a vécu parmi les hommes, c'est sans doute pour
les sauver. Jésus est essentiellement le Sauveur (5 [16], 6 [17], 12 [23] etc..) : ce titre est
contenu dans les cinq articles essentiels du symbole, ce qui suffirait déjà à marquer
sou importance aux yeux de l'auteur de la lettre des Apôtres. Mais le sens profond
de ce mot n'est nulle part expliqué. « Il est question plusieurs fois de la mort du
Christ, soit que les apôtres en parlent 9 [20] }. soit que Jésus lui-même rappelle qu'il
est né. qu'il a été tué (18 [29], 19 [30]\ mais jamais une vertu rédemptrice n'est
attribuée à cette mort, car on ne peut voir dans le rapprochement de la crucifixion et
du salut tel qu'il est donné (19 [30] ) même une allusion à la vertu rédemptrice de la
mort de Jésus. Les apôtres disent bien à leur Maître qu'il les a sauvés (19 [30], 20 [31],
40 [.j1] ). mais quel est le salut qu'il leur a donné, et comment a-t-il été opéré, c'est
ce qu'ils ne disent pas 4). oïl faut cependant essayer d'apporter quelques précisions,
et chercher à connaître la nature du salut d'après la lettre des Apôtres.
Le dernier terme du salut, c'est la lumière et la vie : « Eu vérité, je vous dis que
j'ai reçu toute puissance de la part de mon Père, afin que ceux qui sont dans les
ténèbres, je les conduise dans la lumière; et ceux qui sont dans la corruption,
dans l'incorruptiou; et ceux qui sont dans l'erreur, dans la vérité: et ceux qui sont
dans la mort, dans la vie; alio que ceux qui sont en prison, soient délivrés. Ce qui
est impossible à l'homme, est possible au Père : Je suis l'espérance des désespérés,
l'auxiliateur de ceux qui n'ont pas d'auxiliateur, la richesse des indigents, le méde-
cin des malades, la résurrection des morts (21 "32] . » Ces oppositions sont d'nnf
littérature un peu facile t . Mais ailleurs i28 39" ), nous apprenons que c'est dacs
les cieux que se consomme le repos (2 . la vie éternelle des elus: et la description df
ce repos est faite en ces termes : « Ayez confia née et ayez foi : en vérité je vous
le dis, y aura pour vous un tel repos, dans lequel il n'y aura plus (la nécessité de,
il
fants de la vie (28 ]39] ). enfants du royaume (29 ]40] ]. enfants de la lumière 39 [50] ;.
Pour être sauvé, il faut croire à la doctrine de Jésus, telle qu'il l'a enseignée, et
telle qu'après lui renseignent les Apôtres. Après avoir rappelé le résumé de leur foi.
les Apôtres ajoutent ; « C'est cela que nous a révélé notre Seigueur et notre Sau-
veur, et qu'il nous a montré: nous aussi nous faisons^ de même pour vous) ;ifin
que vous deveniez nos compagnons, par la grâce du Seigneur, (dansi notre minis-
tère et dans notre gloire, en vous occupant de la vie éternelle. Soyez fermes, sans
chanceler, dans la science et la connaissance de Xotre-Seigneur Jésus-Christ, Qu'il
(vous) soit clément et qu'il (vous' sauve, pour toujours, dans les siècles des siècles,
sans fin. Car, quant à Cérinthe et Simon, ils iront afin de parcourir le monde.
Ceux-ci sont vraiment les adversaires du Sei2neur Jésus-Clirist. eux qui détourne-
ront réellement ceux qui croyaient au Verbe véritable et à ses œuvres, c'est-à-dire à
Jésus-Christ. Faites donc attention et gardez-vous d'eux, car par eux; surviendront
l'affliction, rimpureté. la mort, la lin de la perdition et la damnation 6-7 [17-18] i4). » ;
Mais il ne suffit pas de croire. Il faut encore agir selon sa croyance. « A celui qui
croit en moi, mais n'accomplit pas mon commandement, la toi en mon nom ne lui
servira pas 27 ]38] » Et voici le commandement nouveau que Jésus donne
. au\
siens :« Que vous vous aimiez les uns les autres, que vous soyez soumis les uns
aux autres, que toujours la paix soit au milieu de vous. Aimez vos ennemis, et ce
que vous ne voulez pas qu'on vous fasse, vous-mêmes non plus ne le faites pas à un
autre; ce que vous voulez qu'on vous fasse, faites-le aux autres 18 29] . 5 . • A
plusieurs reprises, le Sauveur indique même dans le détail les vertus qu'il entend
voir pratiquer par ses fidèles et la conduite (lu'il exige de ceux qui veulent entrer
dans le royaume de lumière 26 ]37:; 3S [49"; 47 .58]; 48 s. ]59 s." . On est étonné
d'abord de ce moralisme qui s'inspire u:ii]uemeut des préceptes évangéliques, et
(l)Sur l'usage d'un pareil procédé liuéraire dans les écrits gaostiques de langue copte, et parti-
culièrement dans la Pistis Sophia, on peut lire quelques pages sévères et exactes de E. de Fayk,
Gnostiqueset gnosticisme. p. i" ss.
(2) Le repos (âvàTîa-JTi;; est le terme de la béatitude dans les ouvrages gnostiques: cl. par
exemple Pistis Soplna, 'M: Kopt. gnost. Schr. p. I3i, 10: L'nb?kanntes altgnoslisclies \\'erk%-2:
id., p. 3:^6. 17 ss. « Lnd sie liaben die Erkenntnis uud das Leben und die HoîTnung und die
Ruhe und die Liebe und die Aulersteliung und den Glauben. und die Wieder^'eburt und das Siegel
empfaugen. » Dans la lettre des Apùtres. c 1-2 i3] le traducteur éthiopien remplace xvirï-.'j;;
qui ûgure au texte copte par à-âffiiff'.:, résurrection.
(3) f rad. Gceriuer, p. [i>-2] s.
(4; Id.. p. [o-2| s. En plusieurs endroits, notre auteur met encore en garie contre les faux enseigne-
ments • Pour ceux qui auront péctié contre mon commandement, qui auront enseigné une autre
:
(doctrine qui auront diminué ou ajouté à ma doctrine pour leur propre gloire, qui auront
.
influencé ou détourné ceux qui, dans l'orthodoxie, ont cru en moi. ils seront punis éternelle-
ment; -29 [*0] ). • Cf. ."io [01]. Ainsi Jésus est le révélateur de la véritable doctrine. Le salut est
d'abord une connaissance,
(d) Trad. GiEr-.r.irp., (>. [01]. La forme positive de la règle d'or est suppléée par le traducteur.
126 REVLE BIBLIQUE.
question se pose alors de savoir si les pécheurs pourront être sauvés malgré leurs
fautes, et la solution de ce dernier problème n'est nulle part clairement indiquée
36 47]; 49 [60] [. Certains passages même semblent donner à entendre que le salut
est acquis à tous ceux qui ont reçu Pour vous, dit Jésus aux Apô-
la révélation : «
des archontes; et tous ceux qui croient en moi par vous. Car ce que je vous ai
donné, je le leur donnerai aussi à eux. afin qu'ils sortent de la prison et des
chaînes des archontes et du feu puissant 28 [39] 3 » On pense ici aux doctrines .
goostiques, aux archontes du monde matériel qui gardent les âmes en prison jus-
qu'au temps de leur libération par le Christ.
est corrompu. L'éthiopien est plus complet « Je suis descendu et j'ai parlé à :
(!) Cet enseignement est expliqué |).ir la parabole dos Nierges sages et des vierges folles. < Les
sages, ce sont les cinq que le propliéte appelle filles du Seigneur et dout les noms sont célé-
l)res : ... ce sont la Foi. la Cbarité. la Joie, la Paix, l'Espérance. Ceux qui croient en moi les
possèdent: elles servent de guide à ceux qui croient en moi... L'Intelligence, la Science. l'Obéis-
sance, la Conlinence. la Miséricorde ce sont les vertus qui ont dormi en ceux qui croient et qui
ont confiance en moi, mais qui n'oal pas accompli mon commandement -43 '54] \ . Celte interpré-
tation de la parabole évangéli(|ue est tout à lait curieuse. Il est remarquable que les vierges
lolles ne sont pas des vices. Elles sont des vertus recommandables et bienfaisantes. Mais il n'y
avait pas moyeu de les faire entrer dans la chambre nuptiale, pour ue pas laire \iolenceau
texte formel de l'évangile. On suppose alors qu'elles ont dormi dans l'àme de ceux qui les
possèdent aussi ceux-ci sont-ils condamnes. Mais on ne sait pas si leur condamnation est
:
définitive, car Jésus refuse de répondre à cette question. Quand les apôtres lui disent Seigneur, :
il appartient à ta majesté que tu fasses grâce à leurs sœurs, il se contente derépli(|uer Cette :
parole n'est pas de votre rôle, mais de celui qui m'a envoyé, puis(|ue j'agis de concert avec lui
(i.'i 56| ). —
Cf. Dom A. \ViLM\iiT, Un anonyme ancien de Decem Virginibus. dans B. .V. L. A. C.
nui. p. 35 s.
li Cf. ce qui est dit au cliap. 44 ."».) : « Il y en a qui ont dormi et se sont tenus en dehors
du royaume, et eu debors de l'enclos du pasteur des brebis, .i celui qui se sera tenu en dehors
du bercail, les loups le mangeront, et il...; il mourra dans de nombreuses douleurs; en lui ne
seront ni repos ni support (Cuîojaovt,), et on le jiunira de grands châtiments ». Le texte copte,
«bml je suis la traduction dounée par S. est lacuneux: l'éthiopien préseuie de nombreuses
variantes, et parait d'ailleurs corrompu. Guerrier traduit • liien qu'il ait entendu la prédica- :
li'>n comme les auues il mourra. Il semble au contraire qu'il s'agisse de ceux (|ui n'ont pas
.
entendu ni reçu l'Évangile. L'image de la bergerie est empruntée ;i Joan. 10, 1 ss. C'est, sous une
autre forme, la maxime Exlra erclesiam itulla salus.
:
i3) Je cile la traduction du copte. Le texte éthio|>ien supprime ici la mention des archontes, qui
-\Lraham, Isaac et Jacob, vos pères, les prophètes, afin qu'ils apportent d'en bas le
repos dans les cieux; et je leur ai tendu la main droite, le baptême de la vie. la
rémission et pardon de tout mal. comme à vous et à tous ceux qui désormais
le
mais la Pistis Sop/iiu raconte également que Jésus a pardonne tous leurs péchés et
toutes leurs mauvaises actions à Abraham. Isaac et Jacob, qu'il leur a donné les
mystères de la lumière dans les éons et les a placés au lieu de Sabaoth et de tous
les archontes. « Quand j'irai en haut, ajoute le Sauveur, je porterai avec moi leurs
âmes à la lumière. Mais je te le dis en vérité, voici la vie. ils n'iront pas à la
lumière avant que j'aie porté à la lumière ton àuie et celles de tous tes frères 2 . »
Dans l'avenir, lorsque Jésus sera remonté au ciel, ce sont les Apôtres qui trans-
mettront sa révélation aux hommes cf. 19 ^30]; 23 34]; 30 [41 .. Ils prêcheront à
Israël et ù toutes les nations 36 [47] ) %. Paul de Tarse, converti par la parole de
Jésus, se joindra à eux : comme eux, il prêchera, il enseignera et beaucoup se
rejouiront en l'entendant et seront sauvés 31 42] ss. j 4 . Tous ceux qui écouteront
les Apôtres, qui croiront en Jésus, recevront la lumière du signe qui est dans sa
main: et par le Sauveur les Apôires seront appelés pères et maîtres 41 [02] « En .
vérité, en vérité, je vous le dis. explique le Seigneur, vous serez appelés Pères
parce que vous révélerez aux hommes) les choses de l'amour, de la miséricorde,
du royaume des cieux vous révélerez) que c'est par ma propre main qu'ils rece-
;
vront le baptême de vie et la rémission des péchés. Vous serez appelés) maîtres,
parce que vous aurez exprimé ma parole sans peine et que vous les aurez corrigés,
qu'ils se seront convertis partout où vous les aviez repris 12 [-53] . » On ne s'ex-
plique pas très bien ce baptême donné par Jésus. Du moins faut-il noter mention
la
du baptême, et remarquer encore le peu de place que tiennent les sacrements dans
rÉpître des Apôtres (.5;.
il' cr. Gespràche Jesu..., Exkurs 11, Der Descensus ad iiiferos in der alten Kirche, p. [433-370,
principalenieut p. 500 ss. S. cite ccpemiant uu pussaije des Excerpla ex Tlieodoto, 18 Clément
dWlex., c'd. ^rvuLix, t. III, p. l\-2]. dans lequel il est dit que Jésus, après sa résurrection, evangélisa
les justes qui étaient dans le repos. Il y a là, ajoute S. l'essai d'un ijnostique. [ilus précisé-
•>
ment d'un Valeutinieu. pour adapter selon sou yoilt les doctrines clirétieunes de la Descente
aux enfers p. 501,. »
ii) Pistis Sophia. 133: Kopt. gnosC. Schr., p. •i3J. 11 nest pas question dans ce passage d'uue
descente auK enfers: et les trois patriarches Abraham, Isaac et Jacoh sont les seuls à recevoir
les mystères de la lumière. Cf. C. Scumidt. Gaostisclie Schriften iii koptisclier Sprac/ie. p. 433.
'3 II faut remarquer cette distinction entre Israël d'une part et toutes les nations de l'autre.
Au cliap. 30 ]ir, les apùtres reçoivent l'ordre - d'aller préclier aux douze tribus et aux nations
et à toute la terre d'Israël, du levant au couchant et du Sud au Nord. On lit. dans une addition
ancienne à la Pislis Sophia. • Ainsi on a reconnu le royaume de Dieu sur toute la terre, et dans
tout le inonde d Israël en témoignage pour toutes les nations qui habitent du levant au cou-
cliant: Kopt. gnost. Schr. p. i'>4, 14 ss. ». S., Gesprûche Jesu, p. 18-2 ss. commente longuement ce
passage de la lettre, et prétend y voir la marque d'une o|)positiou encore vivante entre les
judéo-chrétiens et les pagano-chrétiens.
4) Ce sont les apôtres qui reçoivent Paul et le convertisseut. Le personnage d'.Vnanle disparait
complètement dans la lettre des Apôtres. Mais il n'est pas certain qu'il faut voir là, ainsi que le
pense s., p. 183 ss.. une préoccupation apologéti»iue, pour légitimer l'apostolat de Paul dans les
nations. Dans la Pistil Sophia, Paul est une fois nommé, par Marie, (jui l'appelle, par
anticipation, notre frère Paul c. 113; Kopt. gnost. Schr.. [>. 190, 13 .
(3) On doit citer du moins une allusion à l'Eucharistie « A|)re3 mon retour vers le Père,
:
faites mémoire de ma mort. Quaud ce sera la Pàque alors l'un ;de vous} sera jeté en prison a
;
cause de mon nom; et il sera dans la tristesse et l'allliction parce que vous faites la Pàque
tandis qu'il se trouve en prison et est loin; de vous. Car il s'attristera de ne pas fêter la Pàque
avec vous... nuand vous aurez uni la commémoraison qui se rapporte à moi et l'agape. il sera
de nouveau jeté en prison pour le témoignage... Et nous lui dimes Seigneur, est-il- donc : •<
encore nécessaire que nous prenions la coupe et que nous buvions? Et il dit : Oui, c'est une
nécessité jusquau jour où je reviendrai avec ceux qui auront été tués pour moi. • Dans l'élliio-
l)ien, cette linale est différente - Nous lui dimes
: Seigneur, n'as-tu pas toiméme bu définitive-
:
12S REVUE BIBLIQUE.
Une dernière question se pose au sujet de la vie morale et du salut telle que les
destinée? ou peut-il à son gré choisir le bien ou le mal? On sait que dans les sectes
gnostiques. la première solution était généralement acceptée. L's'!tj.a;iaévri réglait le
sort de chaque individu qui ne pouvait échapper à son emprise (1}. Ici au contraire,
c'est la doctrine de la liberté qui obtient les préférences. « A Adam a été donné le
lui le même pouvoir cf. Joan. i, 12) c'est à chacun d'eux qu'il appartient de
:
ment la Pâque. Quaol à nous, aurons-nous à le Taire île nouveau/ Et il nous dit Oui, jusqu'à ce :
<iue je revienne d'auprès du l'ère avec mes plaies (15 [-2G] • La Pàque chrétienne est une coni- .
niémoration de la mort du Sauveur. S., Gesprâche Jesu... p. 3G» ss., en conclut que l'usage quar-
lodfciman est attesté par cette formule de la lettre: et il consacre un long excursus à la fête
de Pâques dans les églises d'Asie Mineure (p. ol'-~-2i> 11 est en tout cas renianjuahle que l'Euclia-
.
ristie n'occupe pas plus de place dans la lettre. Dans la Pistis Sop/iia, on trouve une description
du sacrifice eucliaristique, c. li-2; Kopt. gnost. Schr., p. '2W, 2(5 ss.
(1) Cf. E. DE Fayf.. Gnostiques et gnosticisme, p. 274 ss.
f-2 On sait que dans les sectes gnostiques la désobéissance d'Adam était souvent regardée
comme la victoire du principe lumineux emprisonné dans l'homme. S.. Gesprâclie Jesu... p. 331 s.,
rappelle justement que dans les Pseudq-Clementines, Adam est considère comme le porteur de
la révélation pure et achevée: c'est en lui que s'est incarné le vrai propliète. il a élevé l'humanité
à rim|)eccal)ilite, si bien que jusqu'à la huitième génération les hommes ont été sans commettre
le mal Jlom. i, 52: 8. 11 ss.; Recog. \, 20;. Somme toute, « o-jtî 'ASàjA itapaêdcTy); r,v ô ànô tûv
Toù 6£oû Xcipwv -/.vosopTi^eî; Hom. 2, 52). • Notre auteur n'insiste pas et ne précise pas ses
idées: mais le choix qu'il attribue à Adam est à relever.
3 Le sort définitif des pécheurs parait l'un des soucis dominants dans les éerits de la Pistix
Snphia. Les questions posées au Sauveur reviennent le plus souvent à lui demander si sa misé-
ricorde a des limites et lesquelles. Cf. E. de Faye, Gnostiques et gtwsticismefp. 2G7 ss.
(4) La vie éternelle est le repos dans lequel on ne mauge ni ne boit plus, car il n'y a plus de
tristesses, ni de soudoiemeut, ni de vêtements terrestres, ni de corruption {\'j [30]': le supplice
des méchants est celui du feu. dans le corps et dans l'esprit \3!> [aOli.
UECENSIONS. 129
verront l'apparition de grandes étoiles, qui apparaîtront pendant le jour; des astres
descendront du ciel en touchant la terre; les étoiles tomberont... etc.. ^34 [45] ).
que devant moi ira ma croix (16 27') ». Les Apôtres demandent quand viendront
ces événements grandioses : il semble que la date n'en soit pas très éloignée :
« Je vous enseignerai ce qui surviendra non pas pourtant dans votre (génération),
mais dans (celle) de ceux que vous-mêmes enseignerez et qui croiront 34 (4ô] i ). »
Une époque plus précise est même fixée : « Lorsque l'an lôO sera écoulé dans les
jours de la Pentecôte et de Pàque, aura lieu l'avènement de mon Père 16 [27) ^1). »
Et bien que Jésus parle ici de l'avènement de son Père, il désigne sans aucun doute
le moment de la parousie et du jugement, puisque c'est à ce sujet que les Apôtres
viennent de l'interroger.
Après le jugement, ou au moment du jugement, les hommes ressusciteront dans
leur corps. Bien que cette doctrine ne fasse pas partie des cinq articles fondamentaux
du symbole, il y en a peu sur lesquelles l'auteur de la lettre insiste autant. On
sent, en le lisant, que la résurrection de la chair est une des croyances qui lui
tiennent le plus à cœur, et aussi une de celles qui soulèvent le plus de difficultés
de la part de ses lecteurs. Il insiste et il précise en termes énergiques : En vérité,
je vous le dis. de même que le Père m'a ressuscité moi-même d'entre les morts,
de même vous aussi vous ressusciterez corporellement... C'est pourquoi j'ai accompli
toute miséricorde : bien que je ne sois pas engendré par un homme, je suis né;
et bien que je n'aie pas de corps, j'ai revêtu un corps, et j'ai grandi, afin de vous
(sauver), vous qui êtes nés selon la chair, et afin que vous ressuscitiez réellement
dans votre chair, dans une seconde génération 21 32] i (2;. » Les Apôtres ne com-
prennent pas; ils s'étonnent; ils demandent des explications; et l'on sait en effet
que peu de doctrines rencontraient autant d'obstacles dans les esprits formés par
la culture hellénique (3). Mais le Seigneur se contente de renouveler sa promesse :
« En vérité, je vous le dis, le corps de tout homme ressuscitera avec son âme
vivante et son esprit (24 (35(). »
(1) La mention de la Parousie du Père est à relever. C'est une expression assez rare et assez
curieuse. On peut peut-être comparer // Clem, xii. l. 4 oOx oIoa(jiîv rr)/ -fmioxw tt; èïî'.^avî-aç :
TOV 6cOÛ.
[l Trad. GcERRiER. p. [65].
3 Cf. Act. Ap. XVII 31-3-2: —
et se rappeler les nombreux traités qui dès le second siècle
furent consacres par les écrivains chrétiens à déiunntrer la résurrection de la chair Athê- :
déjà jugés dés ce monde; ni surtout de la résurrection de la chair, car les gnostiques
ne s'intéressent pas à la matière qui est mauvaise et se contentent de décrire
rentrée des âmes sauvées dans le séjour de la lumière. Sur tous ces points, la lettre
des Apôtres rejoint pour les confirmer les espoirs et les croyances de la grande
Église. Ce n'est pas pour nous le moindre sujet d'étonnemeut. après avoir vu que
sa doctrine du Christ et sa représentation générale du monde étaient plutôt le fait
d'être fixé sur le lieu et la date de sa composition. Pour le lieu, M. S. est très
ferme en laveur de l'Asie Mineure '1). Quatre arguments surtout lui paraissent
établir cette hvpothèse : lesnoms des deux hérétiques dont la lettre dénonce les
enseignements pervers, Simon et Cérinthe, qui étaient particulièrement connus en
Asie; la prédilection accordée à saint Jean parmi les Apôtres et l'influence prédo-
minante de la pensée et du style johauniques; la lutte contre le docétisme; enfin
sans remonter à saint Paul qui écrivait : Le Christ notre Pâque a été immolé ;2),
on peut rappeler que Clément d'Alexandrie dit tout comme l'Apôtre que le Christ
est notre Pàque (3\ Le même Clément a pour saint Jean une admiration particu-
lière : il dit du quatrième Évangile que c'est l'Évangile spirituel ; il connaît, relati-
vement à l'Apôtre, des traditions spéciales, et raconte seul la touchante histoire
sentée par les lettres de saint Ignace d'Antioche qui est syrien, mais Clément
d'Alexandrie nous fait aussi connaître l'existence d'un docétisme égyptien (5). Quant
aux noms de Cérinthe et de Simon, ils sont purement légendaires, et ne sauraient
suffire pour constituer une preuve en faveur de l'Asie Mineure saint Justin (6,, qui :
liques.
Dans ces conditions, si les arguments qui, selon S., établiraient l'origine asiatique
de 'la lettre des Apôtres sont insuffisants, je crois qu'il vaudrait mieux se tourner du
côté de l'Egypte. C'est quelque chose déjà que les seuls textes existants de la lettre
soient l'un copte, l'autre éthiopien. L'éthiopien dérive probablement du copte, bien
qu'il puisse avoir été traduit d'après une version arabe encore inconnue ^8). Le copte
a été sans doute traduit sur un original grec, et cette traduction est très ancienne,
puisque le ms. qui nous l'a conservée doit remonter à la fin du iv« ou au début du
v« siècle. L'Egypte a donc été de bonne heure le centre de diffusion de cet écrit.
Car c'est plutôt aussi au m" siècle qu'au second que nous serions tentés de
placer la composition de la lettre des Apôtres. Les arguments multiples apportés par
S. pour reculer autant que possible la date de cetécrit, sont naturellement de valeurs
diverses. Il ne faut pas, je crois, s'arrêter longuement sur la forme littéraire donnée
à notre ouvrage : nous l'avons jusqu'à présent et pour simplifier, appelé une lettre ;
mais si le début paraît autoriser cette désignation, rien dans la suite ne montre que
l'écrivain se soit attaché à garder le style épistolaire; il se contente de rédiger un
entretien de Jésus avec ses apôtres, analogue, pour la forme et jusque dans de nom-
breux détails d'expression, avec la Pistis: Sophi/i qui peut être du m'" siècle. Les
libertés prises avec l'histoire évangélique ne sont pas nécessairement un indice d'an-
tiquité, et les Évangiles apocryphes témoignent assez de la facilité avec laquelle
dans certains milieux, on arrangeait du Sauveur. I/interprétation
le détail de la vie
proposée par S. du récit de la conversion de saint Paul comme marquant une oppo-
sition entre judéo-christianisme et pagano-christianisme paraît subtile et beaucoup de
lecteurs ne se laisseront pas convaincre que tel soit en effet le sens de cette anec-
dote. Si ailleurs S. tire argument de l'omission de Vly.^i-ii.yi dans la liste des vertus
pour conclure que la lettre est antérieure à la crise montaniste, on pourrait lui faire
remarquer non seulement que M. Guerrier traduit par continence (èvacâTsta), le nom
de celle des vierges folles qu'il désigne par |jia7.po9j(j.''a (j-oaovTji, mais qu'il donne
aussi la même traduction un peu plus haut (38 [49] ), en un texte où S. persiste à
elle pas au nombre des vertus dans le Pasteur d'Hermas et dans la lettre de Bar-
nabe? Il est vrai que la lettre ne mentionne nulle part l'organisation ecclésiastique et
citer encore une fois, les ouvrages gnostiques ne diffèrent pas d'elle en ceci: on ne
voit figurer dans la Pistis Sophia et les livres de Jeu que les disciples, hommes ou
femmes, qui accompagnent Jésus ressuscité. La sainte Eglise figure au nombre des
articles fondamentaux de la foi au grand christianisme, et l'on ne saurait demander
toutes ces preuves est qu'aucune d'elles n'a rien de décisif et que leur accumulation
même ne suffit pas à faire naître une véritable probabilité. Nous avons trop peu de
livres chrétiens datés de la seconde moitié du second siècle ou de la première moitié
(1; Dans ce dernier passage la traduction de Wajnberg et celle de Schmidt sont certainement
plus exactes, puisque le copte porte le mot uTtop-Éveiv ; dans le premier passage, le texte copte fait
défaut.
in REVUE BIBLIQUE.
est de ne pas porter trop visiblement la date réelle de leur composition. Le grand
nombre des réminiscences évangéliques qui caractérisent le style de notre auteur lais-
sent voir en lui un esprit formé par une lecture attentive du Nouveau Testament et
surtout de l'Évangile de saint Jean, dont il reproduit les façons habituelles de parler;
ellesdonnent par contre à cette œuvre une allure impersonnelle et intemporelle.
Deux passages cependant pourraient apporter quelques indications précieuses.
Comme les Apôtres demandent au Sauveur la date du jugement, celui-ci leur
répond : « Je vous enseignerai ce qui surviendra, non pas pourtant dans votre (géné-
ration) mais dans celle de ceux que vous-mêmes enseignerez et qui croient en moi
(34 [45] La traduction de M. Guerrier (p. [76]) que je viens de citer, paraît précise.
). »
Jésus anoonce que la fin du monde arrivera durant la génération qui suit immédia-
tement celle des Apôtres, c'est-à-dire celle de leurs propres disciples. Mais la version
proposée par Wajnberg est beaucoup moins claire « Ich werde euch lehren und :
niclit was euch geschehen wird, sondern auch denjenigen, die ihr belehren
nur,
werdet und die glauben werden, sowie auch denjenigen, die jenen Mann hôren und
an mich glauben. » L'avenir annoncé par Jésus pourrait donc avoir pour témoins le?
Apôtres eux-mêmes et aussi leurs disciples. Comme le copte fait ici défaut, on ne
saurait tirer à coup sûr de ce passage un argument quelconque.
Le second texte paraît plus explicite, car on y lit une date « Quand cent cin- :
quante ans seront passés, dans les jours de Pâques et de la Pentecôte, aura lieu
l'avènement de mon Père (17 [28] ). » Le copte est malheureusement altéré : « Wenn
das Hundertundzwanzigstel vollendet sein wird, zwisohen der Pentekoste und den
Fest der Ungesâuerten, wird, stattfinden die Ankunft der Vaters. » Et la version
latine, dont le fragment recouvre par hasard cet important passage, et dont on pour-
raitespérer quelque éclaircissement utile, est en réalité plus obscure encore à cause
du mauvais état oii elle nous est parvenue « Ego eni(m) <i>n omnibus omnia :
fac[u]tus sum, simul ut voluntatem patris mei laudera, quia misit me i[u]ta anno
implente inter pentecosten et azyma erit adventus patris mei ». De tout cela pour-
tant, S. essaie de tirer un original grec qu'il reconstitue de la sorte : tou IzaToatoiî xat
7w£VT)r)xoaTou £TOu; 7îXT)pa)0évTOç, Eaxat r) jîapouafa ToO narpoç. Et il conclut : « Die Parusie
wird also in den Zeitraum nach 180 n. Chr. verlegt, so dass die Schrift selbst vor
180 verfasst sein muss (1) ». Il est évidemment regrettable que ce passage si intéres-
sant nous soit parvenu dans un texte si incertain. Mais il ne semble pas vraiment
qu'on ait le droit de tirer grand'chose d'un manuscrit latin presque illisible et de
versions copte et éthiopienne en désaccord. La mention de Pâques et de la Pente-
côte reste en toute hypothèse obscure. Il vaut mieux ne pas risquer là-dessus des
conclusions trop fermes.
Aussi bien les deux morceaux que nous venons de rappeler n'apportent-ils à S.
lui-même qu'une confirmation en faveur d'une thèse qu'il croit avoir démontrée par
ailleurs. Il estime désormais établi que la lettre des Apôtres est un document catho-
lique antérieur à 170. Nous ne saurions avoir la même assurance. S'il est pratique-
ment certain que notre document est antérieur au iv^ siècle, on peut encore hésiter
entre le second et le troisième siècles, qui sont pour nous des périodes obscures, sur
lesquelles nous soumies trop mal informés du développement de la pensée et de la
vie chrétiennes.
Peut-être v aurait-il lieu de s'arrêter plus que ne le fait S. (2) à une hypothèse
pas de raison pour croire que le copiste n'a pas reproduit fidèlement un texte suivi
qu'il avait sous les yeux. Dans ces conditions, on supposerait assez volontiers l'exis-
tence d'un écrit grec sous la forme d'une lettre 3). écrit traduit en latin, et qui
présentait des tendances gnostiques assez accentuées. A
une époque difficile à
déterminer, mais antérieure à la fin du i\^ ou au début du \^ siècle, cet écrit aurait
été repris, refondu, découpé, et introduit ainsi, pièces et morceaux, dans un ouvrage
plus considérable, de tendances orthodoxes, dont le voisinage serait pour atténuer
le mauvais effet produit par les théories étranges de la lettre sur l'incarnation et
sur la parousie du Père. Ainsi s'expliquerait encore que tout un passage de notre
écrit (34 [4ô]-35 '46] , du Testament de Notre Seigneiu- et
soit littéralement repris
Sauveur Jésus-Christ M. S. qui a reconnu cette similitude estime que le Tes-
'4;.
pourrait encore que le Testament et l'Epître dépendissent l'un et l'autre d'une apoca-
lypse comme il en a circulé un si grand nombre dans la littérature éthiopienne (5).
Il faut ici se contenter d'indiquer cette hypothèse qui demanderait à être exami-
ser des révélations du Sauveur ressuscité à ses Apôtres. L'Église est là pour ensei-
gner à ses enfants toute vérité. Les inventeurs d'apocryphes ont presque toujours
appartenu à des milieux hérétiques, et l'imprudent auteur des Acta Pauli, bien
avant la lin du second siècle, apprit à ses dépens ce qu'il pouvait en coûter de com-
poser, même avec les meilleures intentions du monde, des actes sous le nom d'un
Apôtre. Quand on passe au contenu de la lettre, on n'est pas moins surpris de sa
doctrine. L'assimilation du Christ à un ange, le salut consistant surtout dans la
licisme que beaucoup d'autres. Dans la mesure où la lettre des Apôtres témoigne
de tendances gnostiques, ou gnosticisantes, elle suppose aussi- une évolution dans le
sens d'un rapprochement vers l'orthodoxie, et c'est une des raisons pour lesquelles
nous n'y verrions pas un ouvrage trop ancien.
Somme toute, et ce sera la conclusion d'une étude qui serait sur bien des points
à compléter et à perfectionner, il ne semble pas que le document édité avec tant de
soin et d'amour par M. S. ait pour l'histoire des origines chrétiennes l'importance
que lui attribue le savant professeur. C'est l'œuvre d'un homme mal instruit qui
pouvait vivre tout à la 6n du second ou au début du troisième, sinon d'un
siècle
hérétique pleinement conscient de son erreur et soucieux de la répandre un apo- ;
Gustave Bardv.
Lille.
The Pastoral Epistles with introduction, text and commentary, by R. St. John
Parry; in-8°, cl\v-101 pp. Cambridge, at the University Press. 1820. — 20 sh.
Dans son introduction à un commentaire sur les Pastorales R. St. John Parry
a étudié à nouveau et sous ses divers aspects l'authenticité paulinienne de ces
épîtres. Il s'attache surtout à démontrer que les points : organisation ecclésiastique,
hérésies, doctrine, style et vocabulaire de ces épîtres, sur lesquels on a insisté pour
démontrer la non-authenticité de ces épîtres, ne sont pas, tels qu'ils sont présentés,
incompatibles avec l'origine paulinienne.
L'auteur examine d'abord la situation historique que présupposent les Pastorales.
a été prisonnier à Rome. La teneur du récit des Actes, serein et confiant, implique
1 cf. E. DE Paye. Gnostiques et gnosticisme, p. 23f. s., et surtout A. Harnacs, (Jber das gnv-
tische Buch Pislis Sophia ^T. U., VII, -2], Leipzig, 1891, p. S9 ss.
RKCENSIOiNS. 135
cette délivrance de l'Apôtre: un disciple et un ami de Paul n'aurait pas gardé cette
impassibilité d'esprit si la mort avait terminé cette captivité de l'Apotre. dont il
nous a raconté les débuts avec tant de détails. Les derniers versets des Actes,
XXVIII, 30, 31, impliquent qu'après un séjour de deux ans à Rome, où il prêcha
l'Évangile, Paul partit de cette ville l'aoriste iviu-Eiviv marque que cette période de
:
deux ans est écoulée. Le passa^ie souvent cité de Clément Romain dans son épître
aux Corinthiens, v, et celui du canon de Muratori sont suiflsants pour établir
la réalité historique d'un voyage de Paul en Espagne et impliquent sa délivrance
d'une première captivité. Cette délivrance aurait eu lieu vers l'an G2 et le mar-
tyre de Paul en l'an 67 : c'est dans cet espace de cinq ans que se sont déroulés les
clairement définie: un auteur pseudonyme, qui aurait écrit des lettres pour défendre
l'organisation ecclésiastique de son temps, aurait été, au contraire, très précis sur
le caractère et la' nature de l'offlce qu'avait à occuper Timothée, sur son autorité
et sur ses droits. Si nous examinons les relations personnelles entre Paul, Timothée
et Tite, telles qu'elles ressortent des Pastorales, nous constatons combien elles sont
consistantes et naturelles : il n'y a aucune fausse note dans l'expression des senti-
ments, aucun défaut dans la psychologie des personnages.
Comparant l'organisation ecclésiastique que révèlent les épîtres pastorales avec
celle que nous trouvons dans les Actes et les épîtres pauliniennes, Parry constate
que les Pastorales ne marquent pas un état de développement sur celles-ci. Voici, en
résumé, quelle est l'organisation ecclésiastique que présente le Nouveau Testament.
Nous relevons d'abord un ministère général, exercé par les apôtres, les prophètes
un ministère local, exercé par les presbytres, à qui, suivant
et les évangélistes, puis
leur fonction, on donne les noms^de È-bxo-o'. ou de ôiâzovo-.. Dans une note sur le
terme jrpeaoÛTspo; l'auteur relève l'emploi de ce terme en Egypte et en Asie Mineure
pour désigner les fonctionnaires civils et les fonctionnaires des temples. A. Chrios,
le collège des -psTojTEço-. est appelé -h nsEaojT-.y.ov ; à Cos et à Philadelphie, ajvsop'.ov
?t3v -pcaojTÉp'jjv.
La propagande des fausses doctrines, telle qu'elle nous est représentée dans les
Pastorales, rappelle le mode d'enseignement des docteurs juifs dont l'activité se
résout en deux formes : une arapliQcation des récits de l'Ancien Testament par un
développement d'histoires mythologiques, basées sur le Pentateuque et l'élaboration
d'im code moral appuyé sur la Loi, dont elle développe les préceptes en des détails
inflnis; c'est la Haggada et la Halacha. Cela rappelle les fables judaïques, les généa-
logies, les querelles sur la Loi, dont parlent les Pastorales. Ces descriptions n'exigent
pas pour leur élaboration une date plus récente que l'atmosphère du temps de saint
Paul.
On fera la même remarque pour les doctrines enseignées dans les Pastorales.
Elles répondent à l'état des choses, telles qu'elles sont présentées dans ces épîtres.
Ainsi, on ne s'étonnera pas que r.'.z-i;, y soit employé au sens de fides quae credi-
y est constamment question des enseignements que doivent donner
tur, puisqu'il
Timothée et Tite. Si Paul n'insiste plus sur l'antithèse entre la foi et les œuvres,
c'est que cette question était résolue : l'épître aux Romains avait mis lin à la
controverse.
136 REVUE BIBLIQUE.
1) Les Pastorales sont séparées des précédentes épîtres de saint Paul d'au moins
deux ans et même de quelques-uaes. d'un espace de sept ans. De ce fait et de ce que
Paul était plus vieux et affaibli par les souffrances, le style peut en être moins
vigoureux, plus prolixe. 2) Ces épîtres ne sont plus adressées à des églises mais à
des particuliers, à des amis et des disciples fidèles une lettre écrite à un ami :
lières à saint Paul, telles que apa, apz ouv, oi6, 8i6ti, îôov, ixTÎTtw;, etc., sont absentes
des épîtres pastorales, mais on remarquera que la plupart de ces particules sont
employées surtout dans la discussion, dans l'argumentation et elles ne trouvaient pas
leur application dans un exposé doctrinal ou moral, ou dans une réglementation,
tels que le présentaient les Pastorales.
Nous reconnaissons que la plupart de ces observations ont déjà été présentées,
mais Parry les a établies d'une façon scientifique, en les appuyant constamment sur
les textes. Il en résulte que l'authenticité paulinienne des épîtres pastorales sera
démontrée pour les esprits de bonne foi. Cette conviction s'accroîtra par l'étude du
Commentaire, très riche en observations philologiques, critiques et théologiques; il
complète le travail,
E. Jacquier.
Lyon.
D"^ F. M. Th. BÔHL. Het Oude Testament, Wolters. Groningen, 1919. Relié toile
6, 90 FI.
plus obscurs des protestants hollandais y paraissent, soit; mais des hommes tels que
Ms"' Poels et le père V^an Kaster sont ignorés. On passe sous silence les auteurs du
Cursus scripturoe sarrae; item les professeurs de l'école biblique de Jérusalem alors
que leurs ouvrages sont pourtant mentionnés dans la bibliographie qui termine les
articles. Ni Calmet. ni Vigouroux n'ont l'honneiu- d'être nomenclatures. Plus heu-
reux que M. le marquis de Vogue, M. Clermont-Ganneau échappe à ce dédain.
pas l'opinion qui ne reconnaît dans l'Ancien Testament qu'un Messianisme à brève
échéance? trouve que ce système a l'avantage de supprimer les prophéties tout en
Il
maintenant aux passages invoqués leur caractère messianique. Pourtant son article :
de penser autrement.
Voici qui est plus grave : au dire de l'auteur la théorie qui cherche le Sinaï, sur
lequel fut promulguée la Loi, aux environs de Cadès, mérite une sérieuse considé-
ration...
En général la documentation est bien à jour, mais elle a été mal digérée-, cela
nest pas trop étonnant, le menu était trop chargé pour être assimilé par un seul
estomac.
J. Vandehvobst.
Malines, Grand Séminaire.
BULLETIN
Et in generali consessu habito feria IV, die 21 aprilis 1920, Emi ac Rmi Domiui
Mt. Me. Le. s'expliquent par l'identité de la tradition entre Me. et le Matthieu
primitif; l'accord de Le. et de Mt. par la dépendance commune du Mt. araméeu
(1) Kurzgefasste Einleitung in das Xeue Testament, von Dr .Tosepli Sickenbergeiî, Professer
an der Universilat Breslau. l" édition en 1916: '2» édition en 1920, Fribourg-en-Brisgau, Herd£r,
Jn-16 de xv-lti6 pp. Imprimatur.
BULLETIN. 139
nauer ne sont pas moins plausibles. La plupart d'entre eux sont universellement
admis, et la difficulté naît surtout de l'examen des cas concrets. Théoriquement
on devrait faire grand cas de la leçon attestée par les Pères du second siècle et du
troisième. Mais les cas sont rares ou ils ont voulu attester la leron précise d'un
évangile spécial. Ce serait assez souvent le cas dans Origene. s'il n'y avait contra-
diction entre la traduction latine et l'Origène grec, parfois entre deux endroits
du grec. Aussi sommes-nous d'accord avec le R. P. quand il refuse de suivre aveu-
glément les mss. N et B, mais nous ne comprenons plus du tout lorsqu'il ajoute :
alios tamen testes, qui antiquiorcm, puriorem, securiorem textum habent, iis prae-
ferimus (p. 28). Il faut pourtant avouer qu'exalter la V'ulgate, c'est soutenir les
deux grands mss. contre l'ancienne version latine.
première tentative catholique, depuis de longues années, qui ait un caractère scienti-
le regretté critique faisait uue moyenne entre les éditions de ^\"estcott-Hort, Tischen-
dorf, Weymouth et B. Weiss. Il se décidait avec la majorité et notait les leçons de
ces critiques, avec quelques autres. M. Vogels a pris la décision sur lui et met dans
l'apparat le témoignage des mss. et des versions. Mais il ne pouvait songer à le
donner complet. Il a le plus souvent négligé les versions égyptiennes et les leçons
des deux mss. W iFreer) et 6 Koridethi). récemment découverts et si importants.
Dans ces conditions, un apparat a encore son utilité. Il renseigne sur l'histoire du
texte et sur les caractéristiques des principaux témoins. Mais il ne peut permettre
au lecteur de se décider, car il ne possède pas les données nécessaires. D'autant
que, suivant la déplorable manière de Soden, poussée même en toute rigueur,
nous ne savons jamais que par induction sur quoi s'appuie la leçon choisie par
Wesen und Principien der Bibelkritik auf katholischer Grundlage, Innsbruck, 1900.
2)
neuf fois, avec TS six fois, avec H ^eul deux fois. Le rapprochement avec Soden n'est
donc pas contestable. L'édition de Hort était assurément trop courte. Cependant
quelques additions de Vogels ne paraissent pas justifiées par exemple sa :
(I) Exemple : sur Jo. 18, 17, le syrsin n'a pas r; naioiixT) t\ ôypwpo; mais • la servante du
portier ».
BULLETIN. 141
tioclie à l'accord de n B avec les latins (1). Mais l'ensemble est vraiment critique, ce
qui ne signifie pas l'abandon, qui serait injustifié, de textes traditionnels dans
l'Église. On a raènoe inséré la finale courte de Me, mais entre crochets, ce qui
cette fois du moins ne peut signifier que le rejet.
iM. Vogels qui a tant étudié la question des harmonisations aura sans doute
sans compter que l'addition toj Ôsoj avait ses difficultés dans sa théologie.
Devons-nous donc croire que cette leçon a été choisie avant lui dans le simple but
de conformer Le. aux autres évangélistes? Mais en le privant de toj 0£ou, ou
l'éloignant de Mt! et sur un point grave. La vraie harmonisation c'est celle de
D 28 e : T. y. u-.ov toj 6eoj. C'est simplement pour éviter la lourde tournure indirecte
que Sin Cur et sa (ce dernier sans omettre toj O^oj) ont écrit : " Tu es le Christ! »
A moins qu'on ne voie là l'influence d'Origène dii, 53.3 ss.), ce qui n'est pas pour
nous déplaire. Mais le grand critique lui-même témoigne moins d'une leçon de Le,
que de la position de Me. et de Le, d'une part, et de Mt. d'autre part,
Encore un exemple. Dom Chapman cite sur Le. 10, 6 Marcion /.x-a r.olti; /.%i
y.oj;jLa;, avec h c ff- l q cur pes sa arm, d'après Le. 13, 22 (cf. 8, 1 , tandis que le
texte neutre est /.aTa Ta; xuijLa; (D om). — On croirait voir les principaux tenants du
texte occidental marcher d'accord avec Marcion. Mais D, s'il omet Ta; /.wu.aç, le
remplace par -oXei;: b c l q disent /.aTa /m-xj.; xa-. -oXn:, et c'est aussi le cas de Cur
et de Sin, avec pes. dont Soden ne parle pas. Quant à sa, cité aussi par Soden pour
-oXt'.; zaï /.ojaa;, c'est le fait d'un seul ms. ; Horuer lit xaTa xwaaç. Il reste donc
avec Marcion tout juste ff- civitates et caslella et un cursif grec de Soden peut-
Dans Me. 15, 8. avaoor,(7a; est banal à souhait: a/aoa; a non seulement N B D lat. mais
I
encore bo, sa, go. M. Vogels donne ici la préférence à une leçon antiochienne facile contre
H S T. De même pour c-^ôox-.a ^Lc. 2, 14 pour Br.OîTÔa (Jo. 5, 2), pour raoaprjviûv dans Me. 5. I.
,
original. Car on ne pept faire cette réduction à l'original qu'avec des copistes
soigneux.
Cependant il y a lieu de croire quelquefois que l'accord de Marcion, de D et des
latins (af et it) indique bien un original occidental. Par exemple dans Le. 12, 39
Tov ic;/aTov /.oopavTrjv (1) au lieu de to EsyaTov àetztov, moins peut-être pour se rap-
procher de Mt. 5, 26. que pour remplacer une monnaie grecque par un« monnaie
romaine; de même 5, 24 xpaSaTov pour /.Xtvo8tov.
Mais Soden a eu raison de nous mettre en garde contre l'hypothèse d'un texte
harmonisant, par conséquent secondaire, qui se serait imposé à Marcion et à ïatien.
Lui, le grand tatianiste, estime que Marcion se rencontre très rarement avec
Tatien (2). — Et comment le disciple de Justin, exagérant même dans le sens de
l'encratisme, ne se serait-il pas délié d'un texte qu'il eût retrouvé dans Marcion? —
L'accord de D avec Marcion paraît à Soden trop fréquent pour être le résultat du
hasard. Mais 6 ne s'y associe qu'une fois (20. 36 , ce qui est peu favorable à l'hypo-
thèse d'un texte grec ancien qui serait la source commune. Enûn cet accord de
Marcion et de D se produit dans des cas où sûrement Marcion a retouché le texte
dans l'intérêt de sa doctrine (3. II faut donc conclure que D a été influencé par le
texte de Marcion, directement ou indirectement.
source. Le travail intéressant, amorcé par Norden, eût été de comparer l'usage
des Sémites et celui des hellénistes. M. Schiitz s'est contenté de quelques exemples
empruntés surtout à Marc. 11 eût pu citer l'ouvrage de M. Dav. H. Millier sur
le Sermon de Mt. 5-7 (5). Reconnaître le parallélisme est bien ; y réduire l'auteur
de gré ou de force est une mesure violente. Que le rythme vienne en aide à la
critique, rien de mieux. Mais ce ne doit pas être un lit de Procuste, puisque celte
prose se rapproche de la poésie sans en adopter les règles sévères. Il est juste
de dire qu'en M. Schiitz pratique cette critique avec modération et aussi bien
fait
pour défendre certains passages que pour en attaquer d'autres. Mais s'il admet par
exemple une fin de strophe difîérente dans Me. 9, 48 pour laisser une impression
plus forte, pourquoi ne pas admettre le même phénomène à la fin de Me. 2, 22?
Il est aussi bien exagéré de ne pas reconnaître le caractère sémitique de la para-
taxe dans le N. T. sous prétexte qu'elle caractérise la diatribe depuis Teles. Luc
(3) Par exemple quand il conserve eç' Yi|Aa; dans le Pater (11, 2), quoique non pas à la même
place.
(4) Der parallèle Bau der Satzglieder im Neueti Testament wid seine Verwertimg fur die
Textkritik und Exégèse, von Lie. th., Dr. ph. Roland Scmrz; Gdttingen, 19-20.
(5 Die Bergpredigt im Lichte der Strophenlheorie; \Vien, di»08.
BULLETIN. 143
avait si bien le sentiment de son caractère sémitique qu'il a adouci l'eftet qu'elle
produisait dans Marc.
même personne en avait fait un autre. La situation est donc très nette on doit :
ou sacrifier Luc à Josèphe, ce qui n'est pas critique, quand l'autorité de l'historien
juif se montre de plus en pkis suspecte; ou récuser Josèphe sur le nom de Quiri-
nius-, ou traduire : ce recensement fut antérieur à eelui de Qairinius (Le. 2, 2).
C'est encore une exagération d'affirmer qu'il faut être entraîné par des préjugés
dogmatiques — (ou plutôt antidogmatiques) — et ne voir que la surface, pour nier
que le Fils de l'homme de Daniel primo
et per se n'est pas le Messie personnel
prouvent seulement, comme l'a dit le P. Buzy, que « le symbole qui désignait le
royaume des saints pouvait s'appliquer en même temps à son roi (3) ».
C'est une exagération de l'ordre historique de prétendre que le livre des Para-
boles d'Hénoch représente la doctrine messianique qui était commune dans les
écoles rabbiniques vers 160-75 avant J.-C. (1). Et cela pour plusieurs raisons. On
peut bien concéder que les écoles juives du ii'= siècle avant J.-C. n'avaient pas les
conceptions étroites du rabbinisme au W siècle après. Mais ce n'est pas un motif
pour transporter tout le judaïsme au pôle apocalyptique. Deuxièmement, personne
ne peut prouver que le livre des Paraboles soit aussi ancien. Et s'il ne date que du
Comment supposer qu'elle a pris ce sens suh influxu linguarum Orientis sepfen-
trionolis (p. 51)? Quelle est cette énigme? Ce qui est vraisemblable, c'est que ce
fut toujours son sens quand pas employée avec un accent particulier,
elle n'était
comme c'est le cas dans Daniel. Le silence des documents araméens ne prouve pas
le contraire.
Et n'est-ce pas encore une exagération de qualifier les Sadducéens omnino
increduli et materialistae (p. 168)?
Enfin il ne nous paraît pas établi qu'en prenant le titre de Fils de l'homme le
Christ non solum dignitatem suam messianicam in génère déclarât, sed etiam veram
divinitatem suam clare manifestât (p. 157). Et certes nous ne songeons pas à cultiver
l'esprit de couardise devant des adversaires souvent aussi disposés à s'asservir à la
von D. RudoU, Knopf Professor der Théologie in Bonn, gr. in-8", p. 417-681; Gottingen, 1917.
BULLETIN. 145
mière communaulé des disciples ne lui avait déjà rendu un culte religieux. Et
en effet cela ne s'entend guère. Mais si ce culte religieux était humain, comme
l'entendait "VVeiss, la difficulté est aussi grande, quoique déplacée. Comment les
disciples juifs de Jésus auraient-ils consenti à suivre les Gentils leurs prosélytes
dans l'adoration de celui qui n'eût été pour eus qu'un Prophète?
Tel qu'il est, le livre de M. Jean Weiss est représentatif d'une école. C'est une
nouvelle étude de l'âge apostolique qui remplacera louvrage autrefois si célèbre
de Weizsàcker, surtout en ce qui regarde ^saint Paul qui a pris plus que la part
du lion.
sation (I), avec l'exergue a Elle est tombée la Grande Babylone! » Et en effet
on dirait bien, à lire ce théologien protestant, que la chute de Rome fut le vœu
du christianisme pendant trois siècles. Mais l'ancien protestantisme aussi appela
de ses vœux la chute de la Grande Bjbylone. par où il entendait le pouvoir papal.
Les premiers chrétiens répétaient les paroles de l'Apocalypse en l'entendant de la
Rome païenne, capitale de l'idolâtrie.
Au début, la question paraît bien posée. Le christianisme a-t-il sucé la société
antique comme un vampire, ainsi que l'ont prétendu Renan et Nietzsche? M. Causse
estime cette accusation excessive. Le monde antique avait vieilli avant la propa-
gande chrétienne. Mais « le christianisme n'a rien fait pour retarder le dénouement
fatal » p. 2;. Quels étaient donc les maux du monde antique : « Dépopulation,
affaiblissement de l'esprit militaire et du zèle civique, corruption des mœurs »
(p. 2). Alors le christianisme n'a rien fait pour remédier à ces maux? Si M. Causse
n'était pas convaincu de la supériorité de la religion et de la morale chrétiennes,
il ne serait pas chrétien. Mais il lui paraît établi que les progrès de la moralité,
qu'il reconnaît sans doute, ne compensaient pas pour la stabilité du monde ancien
la haine des chrétiens pour la civilisation. C'est donc alors que la civilisatiou ne
peut être conçue autrement que comme la grande organisation païenne du monde
antique? Il semble d'ailleurs que l'auteur n'en ait pas une grande idée, quand
il dit de Jésus : « Il a condamné le travail égoïste et mercenaire, et la lutte pour
la richesse, ces deux conditions essentielles du progrès économique » ^p. Mani-
G .
pour lui les âmes, il a ruiné la croyance païenne. L'édifice devait s'effondrer.
Et en effet il s'est effondré, et par du christianisme. Mais cet édifice était-il
l'effet
mœurs, plus de douceur dans les rapports sociaux, adoucissement aussi de l'escla-
vage en attendant son extinction, soin des pauvres et des faibles. Mais l'empire?
Le miracle aussi a consisté en ceci que l'autorité impériale absolument ruinée à la
fin du iir siècle, imparfaitement restaurée par Dioclétien, retrouvait une force
nouvelle dans le principe d'autorité et dans une légitimité naissante.
l'a très bien compris aussi : « Les ne sont pas des conventicules de contem-
églises
platifs. L'ascétisme chrétien est une conception héroïque de la vie-, il consiste dans
la joyeuse indépendance de l'âme, dans un désintéressement superbe vis-à-vis des
choses visibles qui ne sont que pour un temps » (p. 25), indépendance qui ne fait
inévitable entre « l'idéal évangélique et les réalités politiques et sociales » (p. 26)?
Il n'v avait d'inévitable que le conflit entre la doctrine païenne et les cultes
païens.
L'auteur, fort au courant de la littérature, même des manifestations de la vie
par les inscriptions et les papyrus, n'a point été embarrassé pour trouver dans
certains écrits chrétiens des anathèmes un peu vifs contre un pouvoir persécuteur.
Mais rien cependant qui ressemble à la révolte dont le protestantisme naissant
donna souvent l'exemple. Encore parmi ces témoignages faut-il choisir. Tatien, et
non Justin serait d'après M. Causse le représentant du plus grand nombre. Et il
lient pas pour une société. Les écrivains manifestent, il est vrai, les tendances
de cette société, mais ceux qui ont été notés d'hérésie ne sont pas ses meilleurs
organes. Il est lise dans le texte de M. Causse
vraiment étrange qu'on « Dès lors :
l'État non comme une institution divine, mais comme une invention
apparaît
démoniaque. L'État est une œuvre de Satan- » (p. 38). L'appel de note Satan-
n'est accompagné d'aucune note. Mais la note 1 rappelle ces admirables réponses :
en tant que César; mais à Dieu nous oflVous l'honneur et la prière. » Distinctions
d'imc merveilleuse précision, que les fidèles tenaient de renseignement des pasteurs.
Il eût fallu aussi montrer, à côté du christianisme, d'autres influences qui ne
minaient pas moins l'ancien ordre social, mais sans reprendre en sous-œuvre la
chrétiens rendaient exactement. Mais, comme race qui savait se perpétuer dis-
beaucoup plus que les chrétiens, un ferment de désagré-
tincte,' n'étaient-ils pas,
gation? Le bon Marc-Aurèle ne faisait pas moins fidèlement son métier de Romain
i
BULLETIN. 147
prendre femme, avoir des enfants, manger des fruits de la terre, prendre leur part
des choses de la vie, des biens et des maux qui y sont attachés, il faut qu'ils
rendent à ceux qui sont chargés de tout administrer les honneurs qui convien-
nent (1). »
Comment entendre cette logique de Celse ? Si vous voulez jouir des avantages
de la vie sociale, rendez des honneurs à ceux qui vous en assurent le proût,
c'est-à-dire, comme comprendra tout lecteur moderne, aux fonctionnaires impériaux.
Voilà donc les chrétiens accusés de manquer à leurs devoirs de l'ordre social.
Entendre ainsi le texte serait un contresens. Car les administrateurs des biens
de la terre, d'après Celse, n'étaient autres que les démons ou les dieux. Si
^I. Causse a bien compris le texte de Celse. ainsi que nous devons le supposer, il
a du moins fait naître une équivoque inévitable pour la ciodide lecteur. Et alors
il n'y a plus dargument, il n'y a plus de solidarité entre l'État et la religion sinon
parce que l'État s'obstinait à imposer un culte idolàtrique. Quand Celse a reproché
en réalité aux chrétiens leur indifférence envers la patrie, Origène a très bien su
répondre que les chrétiens se faisaient soldats pour la défendre, et qu'ils lui
Ainsi d'une part conservatisme étroit, attachement à un culte auquel on rie croit
plus, incapacité de discerner entre la notion de l'Etat et celle de la religion,
mesures violentes pour opprimer la liberté de conscience, refus de rendre hom-
mage au Dieu unique d'autant plus obstiné que la notion en devient plus claire
pour tout le monde. D'autre part distinction sûre et précise des pouvoirs, senti-
ment profond de ce qui est dû à Dieu, revendication de la plus noble des libertés. Il
eût fallu dire plus clairement qui voyait juste. Le triomphe du christianisme dans
l'empire ne fut pas seulement « une grande victoire de l'idéalisme «, que célèbre
enfln l'auteur « avec respect et piété », mais un progrès pour la civilisation.
Il y a de tout dans ce petit livre : aussi ne sera-t-on pas étonné de son adhésion
à l'influence des mystères sur le christianisme, mitigée en ces termes : « Encore
que les chrétiens se soient exprimés dans la langue des adorateurs des mystères,
et qu'ils en aient adopté quelques-unes des conceptions fondamentales sur le dieu
mort et ressuscité, sur la renaissance de l'âme et l'immortalité (3). »
La Revue doit s'astreindre à son emploi spécial. Elle envie ceux auxquels il est
donné de faire goûter les paroles de Jésus, dans une exposition limpide, pour ainsi
dire filtrée des controverses.
C'est M"" Reynès-Monlaur les présente comme des appels du
ainsi que
Christ beaucoup lu, mais seulement pour comprendre l'Evangile, et
(1). Elle a
c'est l'Évangile, médité dans la Galilée, sur les bords du lac, au Calvaire, qui par elle
pénètre dans les âmes de bonne volonté. Oa croira volontiers le Cardinal de
Cabrières qui retrouve dans ces pages « une tradition de vingt siècles » pour en ;
de ce qu'elle enseigne.
Ne quittons pas cependant cette belle histoire sans reconnaître les services éminents
qu'elle a rendus et qu'elle rendra encore. C'est une mine admirable, un recueil
des livres et des opinions, un véritable dictionnaire en abrégé. 1/impression est
d'une netteté merveilleuse, et le papier irréprochable. Le nouvel éditeur, M. Brau-
mûUer a pour devise : per noctem ad lucem. L'ouvrage est déjà dans une bonne
lumière, en attendant une lumière meilleure encore à la huitième édition.
c'est que les patriarches avaient fait alliance avec leur dieu. En Egypte les Israélites
furent polythéistes et idolâtres.
Le nom de lahvé fut révélé à Moïse comme étant le nom jusqu'alors inconnu
du dieu spécial des Pères. Comment le monothéisme en est-il sorti? C'est parce
qu'environ cent cinquante ans auparavant Aménophis IV avait essayé d'imposer
le culte unique du disque solaire Aten. Ce culte avait un caractère panthéistique (3),
et il avait échoué. Mais Amon, vainqueur d'Aten, avait absorbé ses attributs de
dieu unique, et lorsque lahvé se montra le vainqueur du dieu Egyptien, il se révéla
comme le seul vrai Dieu. Manifestement M. Wiener a voulu faire une part aussi
large que possible aux causes naturelles dans l'origine
du monothéisme, sans recourir
au Dieu moral de Wellhausen, en remontant beaucoup plus haut que l'école
critique de ce savant.
D'autre part, il parle de révélation faite à Moïse, et si par là il entend une
communication surnaturelle de Dieu, elle était beaucoup plus propre à l'éclairer
que le ricochet des attributs divins du disque unique se terminant à lahvé. Les
Égyptiens n'ont sûrement pas cenfessé la victoire de lahvé, et la victoire d'Amon
sur Aten n'a pas avancé la cause du monothéisme parmi eux. D'autre part, si la
Bible enseigne la révélation de Dieu à Moïse, elle connaît aussi les manifestations
de Dieu à Abraham, Isaac et Jacob. Et ces manifestations avaient pour but
d'exclure le culte de tout autre être divin. Du simple point de vue de l'histoire
des religions, le dieu principal honoré par le culte ne saurait être un dieu innomé
— à moins que ce ne soit Dieu tout court.
Mais on se demandera pourquoi M. Wiener se livre à une manipulation si
sévère des textes relatifs aux noms divins, au point d'altérer si profondément leur
physionomie? C'est que cela est nécessaire, selon lui, pour éviter l'hypothèse des
sources, qui s'appuie en partie sur le changement des noms divins.
Si Wellhausen est le rocher de Scylla, M. Wiener pourrait bien être le perûde
remous de Charybde. Et l'on attend toujours le pilote qui conduira l'exégèse
catholique entre ces deux dangers —
à moins qu'on ne préfère rester chez soi.
Le roman biblique devrait être interdit — à moins qu'il ne soit traité par un
(i; The Main problem of Deuteronomy. S" de 37 pp. Oberlin, Ghio, U. S A., 1330.
(2) The Religion of Moses, S" de 36 pp., 1919.
(3) On dirait plutôt solaire.
150 REVUE BIBLIQUE.
exégète qui connaisse aussi bien le pays que la littérature. C'est le cas du R. P.
Zapletal, et comme il a parcouru la Palestine dans tous les sens, y compris la
Le soin que met le R. P. Zapletal à s'enquérir de tout ce qui touche aux realia
bibliques se retrouve dans sa brochure sur le vin dans la Bible (2). La Palestine,
pavs de vin, la disposition des vignobles, la vendange, la préparation, l'usage et
l'abus du vin, même l'usage du vin dans le repas pascal, tout cela est passé en
revue et expliqué par les textes. La philologie est. comme toujours, diligente et
précise. Ou regrette qu'il n'ait pas été fait allusion à ces étiquettes d'amphores
des meilleurs crus retrouvées à Samarie par M. Reisner. Les prohibitionnistes se
réjouiront de voir disparaître de Zicharie 9, 17 le texte : « le froment [fait
croître] les jeunes gens et le moût fait croître les vierges », où, paraît-il, il faut
lire : « Froment et moût y coulent », c'est-à-dire dans le pays de lahvé. Une
justification de ce changement du texte, respecté par M. von Hoonacker, n'eût pas
été de trop (3).
Les novices ne doivent pas s'occuper d'études. Mais ils voudraient com-
prendre le sens des psaumes de l'office de la. Vierije {4' qu'ils récitent chaque jour.
Et voilà pourquoi le^R. P. Hugueny 0. P. leur a commenté le texte sacré en
tenant grand compte du sens de l'hébreu; voilà comment le nom de M. Duhm
figure à côté des effusions de la piété. A vrai dire les applications spirhuelles sont
de telle nature que peu importe le point de départ précis; c'est moins de l'exégèse
qu'une transposition du sens ancien eu faveur des âmes ferventes de notre temps.
NéanMoins c'est quelque chose que de comprendre mieux le sens littéral. On ne
voit pas sur quoi s'appuie cette décision « Il est de foi que notre texte latin
:
(p. 6 . Ce n'est sûrement pas sur le décret disciplinaire de Trente qui déclare la
(1) Jephlas Tocher. Kulturbilder aus der Frùhzcit des jùdischen Volkes, von Yincenz
Zapletal, 0. P. in-16 de viii-372 pp. Paderborn, Scliôningh. sans date. Cartonné aux armes du
bouclier de David.
\2) Der Wcin in der Bibel. KulturgeschichUiche luid exegetische Studie, von Dr. Yincenz
Zapletal 0. Pr. Professor an der Lniversitat Freiburg in der Schweiz {Biblische Sludien, xx, 1),
8» de 79 pp.
(3. RB. l'jll, p. -2(3.
M. Micha Josef bin Gorion continue à publier en allemand Les légendes des
Juifs '1}. Le volume qui vient de paraître a pour thème les douze tribus. L'indi-
cation des sources est rejelée eu appendice. Citons comme échantillon la manière
de préparer les téraphira. « Ou coupait la tète à un homme qui devait être un
premier-né, et on arrachait les cheveux. La tète était saupoudrée de sel et ointe
d'huile. Après cela on prenait une tablette de cuivre ou d'or, on écrivait dessus
le nom d'un faux dieu, et on la glissait sous la langue de la tète coupée. La tête
était ensuite dressée dans une chambre, on allumait des cierges et on se proster-
nait devant elle. » Tout cela est fort intéressant, et il faut remercier les savants
juifs qtii mettent ces choses à la portée du grand public, dans l'intérêt du folklore.
une fois on avait cueilU le fatal rameau. Ce sont maintenant douze volumes qui
forment la collection du Golden Bough. Assurément il faut les lire si l'on veut
apprécier les richesses de cette galerie. Mais on aura une vue d'ensemble dans :
The magical origin of kings, que M. Paul Hyacinthe Loyson vient de traduire en
français (2).
L'auteur nous introduit donc d'abord dans le bois sacré d'Aricie. et c'est là qu'il
nous laisse. Le prêtre roi. c'est Virbius, le favori de Diane, ou >'uma. conseillé
par Egérie il incarnait le dieu du chêne,
; et devait donc s'accoupler à la déesse
du chêne. D'où de longs développenienis sur les mariages sacrés, spécialement sur
le mariage des plantes. Et rarement en effet les religions anciennes se pratiquaient-
elles sans quelque allusion à une union sacrée. Mais si un culte faisait exception,
n'était-ce pas celui d'Artémis et d'Hippolyte, que les Grecs ont cru reconnaître
dans Diane et Virbius? Les grossières superstitions des sauvages sont peut-être
moins loin des croyances du Latium que la virginale poésie d'Euripide. Mais il
doit y avoir eu au rapprochement d'Hippolyte avec Virbius une raison qu'on ne
trouve pas dans le dernier ouvrage de M. Frazer. Aussi bien, quand il s'agit des
amours des plantes... d'autant que ce n'est pas la thèse principale. Celte thèse,
nos lecteurs la connaissent déjà. Avant la religion était la magie, et quand la
religion fut née. la magie prit un autre cours et devint la science. Semblable
évolution dans l'ordre politique. Les magiciens étaient eu même temps les chefs
des tribus primitives, comme ils sont encore les principaux personnages des tribus
1) Die Sagen der Juden. Die Zwôlf Stàmme. Jûdische Sageti und ilylhen. 8" de sji 308
pp.; Francfort-sur le-M., 1919.
(-2) 10-4" de -iof} pp. Paris, Geulliaer, 19-20.
132 REVUE BIBLIQUE.
conteste pas, et Ton admire avec quelle sagacité M. Frazer a réuni pour la prouver
des exemples topiques. La réunion primitive du pouvoir sacré et du pouvoir poli-
tique dans les mêmes mains ne fait pas de doute. Il est plus malaisé de discerner
les rapports de la magie avec la religion et avec la science. C'est le droit, c'est le
La magie pure, c'est une conception purement naturelle du monde et des relations
de cause à effet, d'où les hommes ont déduit ces deux conséquences fausses, qu'on
peut produire certains effets en les imitant, et qu'on atteint une personne si l'on
dispose d'un objet qui a été à son usage. C'est ce que M. Frazer nomme la magie
homéopathique et la magie contagieuse. La religion, au contraire, dans son état
le plus rudimentaire, suppose l'intervention de forces inconnues, qu'il s'agit de
capter. Voilà pour l'analyse; mais ces concepts se retrouvent-ils à l'état pur dans
les cas concrets? une question de savoir si les deux systèmes, magie
Ce n'est pas
Et pourtant, ce n'est pas une question pour lui, c'est une certitude, que la magie
pure a précédé la religion, dans un temps où il n'existait aucun soupçon de forces
inconnues qu'on nommera Inexactement) surnaturelles, pour employer le terme
reçu communément. —
Or c'est ce que le recenseur regarde comme non prouvé,
et même comme inconcevable. En effet l'on ne saurait concevoir (jne les hommes,
si pénétrés qu'ils soient de croyances magiques, mettent les jictious magiques
exactement sur le même pied que les aclFons naturelles, qu'un homme s'imagine
tuer son ennemi aussi silrement en perçant le cœur d'une image de cire qu'en lui
donnant un coup de couteau. Et la preuve qu'on ne le pensait pas, c'est que d'ordinaire
on a recouru à des magiciens. C'est donc qu'on leur attribuait une puissance
inconnue et inexplicable, qui ne peut leur appartenir simplement parce qu'ils
connaissent les recettes qui, d'après le principe de la magie, doivent être à la portée
de tous. Qu'on nomme tnana ou autrement ce pouvoir supérieur, s'il entre en scène,
et le plus vaillantde sa tribu, c'est émettre une de ces théories commodes que le
philosophe en pantoufles fabrique les pieds sur les chenets, sans se donner la peine
de consulter les faits » (p. 83;. Et cependant il a écrit aussi « Il est raisonnable :
(1) p. 41. 43. G7; p. l!.t-2 : • Ici encore il faut faire remar«iuer la fusion de la religion et de
la mayie ».
BLLLETIX. 153
agile,en Grèce, ou au plus gras comme le plus beau pas eu Grèce! Le philosophe —
en pantoufles avait tort de dédaigner rélénient religieux, mais M. Frazer exagère
les mérites des magiciens et les bienfaits de la magie. C'est un brillant paradoxe,
mais un paradoxe quand même, que ce tableau du magicien intelligent qui veut
savoir pour n'être pas suspect d'imposture. Le principe de la recherche, a dit
Aristote avant Descartes, c'est le doute. Le magicien a confiance dans son pouvoir
magique, et s'il a perdu cette confiance, il se gardera bien d'ouvrir les yeux aux
autres. Ce n'est pas dans les milieux oîi règue la superstition que l'on s'éprend du
savoir. Et non seulement le magicien ne se résoudra pas à compruraettre son
propre empire; il sera l'ennemi acharné de ceux qui chercheraient aux mystères
du monde d'autres solutions que celles qui sont son gagne-pain et la raison d'être
de la corporation. Si la science est sortie de la magie, c'est par une réaction que
les magiciens ne se sont jamais souciés d'aider par leurs recherches. Cette phrase :
€ à la longue les plus fins d'entre eux percent l'imposture de la magie et imaginent
une méthode plus efficace d'utiliset les forces de la nature au profit des humains;
bref, ils abandonnent la sorcellerie pour la science » (p. 165, peut être vraie des
hommes en général; c'est une gageure de l'entendre comme M. Frazer des magi-
ciens spécialement.
Et il en est de même de la royauté. La distinction des pouvoirs est cliose moderne,
et, parmi les pouvoirs, les hommes
anciens ont sans doute donné le premier rang
aux pouvoirs surnaturels prétendus. Mais la valeur d'un chef, son intelligence, ont
pu passer aussi pour des pouvoirs surnaturels plus efficaces que les opérations
magiques. La royauté a pu se dégager de la corporation des magiciens non pas
comme le papillon sort de la chrysalide (1), mais en vertu de la formule : « ceci
tuera cela non sans de multiples compromis, comme la vertu des insignes de la
»,
leurs morts violentes comme des cas de meurtre rituel du roi. 11 nous appartient
plutôt de protester contre la conversion de la fête de Diane le 13 août en fête
d'Assomption de la Vierge p. 16 Assurément nous ne prétendons pas établir que
.
le 15 août soit une date historique, conservée par la tradition. Mais que le choix
fauves», etc. 'i., c'est encore un paradoxe 3. Pendant qu'il y était, M. Frazer
aurait pu citer ce passage du Cantique qui figure dans l'office de l'Assomption :
Yeni —
de cubilibus konum, de montibus pardorum. Voilà du moins quelque chose
qui rappelle la Diane chasseresse! Il faudra, longtemps encore, se tenir en garde
contre l'écueil de la science des religiojis : les rapprochements forcés et arbitraires.
La traduction de M. Paul Hyacinthe Loyson est fort agréable à lire, aussi coulante
que du français (4;.
(1) p. «31.
(2) p. 15.
f3i La fête prit sans doute naissance à Jérusalem; peut-être en Occident se célébrait-elle
le 18 janvier. Cf. dom Cabrol, dans le Dictionnaire d'arch. et de liturgie.
ii P. 233 « F,a Campaaie » ne saurait sans équivoque désigoer la campagne romaine.
134 REVUE BIBLIQUE.
Mais l'ouvrage le plus important de sir James George Frazer, du moins pour
les biblistes, est intitulé Folk-lore in ihe Old Testament (1). Il est considérable,
en trois volumes très denses, et comme toujours bourrés de faits. Depuis le
est partie d'un état social et religieux ressemblant plus ou moins à celui des sau-
vages, et qu'on doit en trouver la trace chez les Hébreux aussi, ces survivances
ne faisant que mieux ressortir la religion spirituelle et la pure moralité de l'Ancien
Testament. Et comme les Hébreux sont un peuple très jeune, qui a émergé d'un
milieu polythéiste, qui a été constamment tenté de retomber dans ses erreurs ou
de partager celles des peuples voisins, il est en eîî'et impossible qu'on ne trouve
dans la Bible des traces de ces coutumes et de ces croyances que les hommes
(l) Sludies in comparative religion legend and law, in tliree volumes, de xxv, 560; xxi, 571 ;
XVIII, SC,6. —
London, Macmillan, 1919.
(2; II" aiiywhere I hawe forgoueu tlie caution wicli I reeommend to otliers, and hâve expressed
myself with an appearance of dogmatism wliioh tlie évidence does nol warrant, I would
request llie reader lo correct ail sucli particular statements by this gênerai and sincère
profession of scepticisra (I, ix s.).
BULLETIN. 155
tantôt ce sont de purs mythes. M. Frazer range le récit biblique dans le premier
groupe, du moins cela lui paraît probable, et rattache ce fait réel à des inondations
normales plutôt qu'à une catastrophe, ce qui paraît moins naturel.
La tour de Babel et l'explication de l'origine de la diversité des langues ont
des répondants dans le folk-lore. Mais en dehors de la Bible et des réminiscences
bibliques, on ne voit pas que les deux faits aient été mis en relation. Alors
il n'y a plus de ressemblance sur l'espritmême du récit.
Le scepticisme de M. Frazer vis-à-vis de ses propres recherches le sert utilement
lorsqu'il s'agit du radicalisme de la critique, et le préserve d'un autre scepticisme,
qui serait moins justiûé, vis-à-vis de l'histoire. Il ose le dire : « Je ne vois pas
de raison suffisante pour révoquer en doute, avec quelques écrivains modernes,
la réalitéhistorique des grands patriarches hébreux », tout en ajoutant « Quoique :
Le droit de Jacob n'en eût été que mieux constaté. Et enfin le fait n'en serait
que plus vraisemblable en soi. —
L'alliance contractée par Abraham avec Dieu
(Geu. 15, 9-21), n'était pas évidemment un rite institué ad hoc, et l'on doit savoir
gré à l'auteur d'avoir indiqué des rites plus cruels dont celui d'Abraham était une
mitigation. Il n'y a rien à objecter à son hypothèse que les deux moitiés de deux
squelettes d'un jeune garçon et d'une jeune fille, trouvés à Gézer, soient les restes
lamentables d'une cérémonie d'alliance entre Cananéens. .
pratiques adoptées pour tout ce qui les touche. A ce compte il faudrait bien
conclure que la religion spirituelle magie des
n'a pas réagi en ce point sur la
à révéler la richesse des notes que l'auteur a mises au service des biblistes;
il leur sera difficile de s'en passer, sauf à se former une conviction toute différente
sur la nature des rapports "entre le folk-lore et nos Livres saints.
La question de principe avait d'ailleurs été déjà abordée par les Pères.
Le R. P. Pinard, S. J. nous le rappelle dans un intéressant article sur Les infiUra-
lions païennes dans l'ancienne Loi d'après les Pères de l'Église (2). On a mauvaise
grâce à critiquer un titre, mais il faut avouer que le mot d'infiltrations suggère
une pénétration de la Loi de Moïse par des usages païens. Est-ce donc à cause
des Pères que le P. Pinard dit infiltrations quand Frazer dirait plutôt survivances?
Mais les infiltrations eussent sans doute paru inadmissibles aux Pères, et elles
seraient en effet en contradiction avec le progrès chez les Israélites de la religion
de l'Esprit. Et en effet la pensée des Pères, c'est que Dieu a toléré certains points
qui existaient déjà, pour conduire peu à peu le peuple de Dieu vers la perfection
que devait être le christianisme (3). C';la dit, on ne peut que féliciter le R. P.
d'avoir rappelé ces beaux textes de saint Justin, de saint Cyrille, de saint Chryso-
stome, etc., qui témoignent d'un sens religieu.x si siir et d'une incontestable péné-
tration historique. Comme il le dit trcs bien, cette étude « permettra de plus au
lecteur chrétien d'apprécier les latitudes que lui laissent les principes émis par ses
pères dans la foi : ilsn'ont pas cru que l'originaliié de la « vraie religion » dût
consister à n'avoir aucun point de contact avec les « religions fausses », ni que
toute analogie entre celles-ci et celles-là dût provenir d'un plagiat à la charge
du paganisme « (p. 221).
On ne voit pas non plus comment concilier ce qui est dit t. I, p. 4iO et p. 490 ss. sur
(1)
le jus primne noclis en Ecosse.
(2) Extrait des Recherches de Science religieuse, sept. 1919.
(3) C'est ainsi d'ailleurs que le R. P. résume la pensée de saint Cyrille d"Al. p. 20".
(i) Semaine d'ethnologie religieuse. Compte rendu analytique de la II« Session, tenue à
LouvaiD (27 aoiU-4 septembre lois;, in-S'de 505 pp.
BULLETIN. 157
M. Brillant n'a point osé rejeter tout à fait la correction de Lobeck dans la
formule de Clément d'Alexandrie : « J'ai jeîlné, j'ai bu le kykéon, j'ai pris dans
la ciste, et après avoir goûté [aux aliments] » etc. (p. 90). Le texte dit : « après
avoir manié », après avoir fait usage.
M. Kôrte en a tiré une conclusion singulière (2). Pour lui l'objet qu'on prend
dans la ciste et qu'on y remet est, comme pour Dieterich, un pudendam, mais un
pudendum muliehre. Mais, si je le comprends bien, dans une matière plus que
scabreuse, l'initié ferait le simulacre de naître de la déesse. Ce serait un rite
celle d'en haut; fort est celui qui est engendré de la sorte. »
Les scrupules que Dieterich (4) avait encore de faire fond sur ce commentaire
naassénien n'arrêtent plus du tout M. KiJrte. La combinaison est ingénieuse. Si
c'était bien là le secret d'Eleusis, sou prétendu sacrement aurait ressorti à la
plus crasse magie, telle qu'on l'a retrouvée chez les Hindous for the purpose of :
Et c'est bien d'après ce rite singulier que les Grecs ont imaginé l'adoption
d'Héraclès par Héra (6). Mais on hésite à leur attribuer renouvellement pra- le
tique de cette fiction. Si l'on admet qu'après tout ce n'est pas pire qu'une hiéro-
gamie qui est censée produire immédiatement son effet, ou ne comprend plus
« je suis arrivé ».
n'aura pas reçu confirmation d'ailleurs, on pourra se demander s'il n'y a pas eu
confusion », etc. —
Mais il semble que le nom de Brimô donné à Déraéter par Clé-
ment d'Alexandrie est précisément la confirmation d'Hippolyte (3) et nous en
déduisons en même temps que l'acte mis en scène n'était pas un rite d'adoption,
mais une imitation de l'union de Zeus et de Déméter.
Le même savant croit avoir trouvé dans un texte d'Aristote « la preuve for-
melle que le meurtre de Zagreus tenait une grande place daus les mystères
d'Eleusis (-1) ». Preuve formelle, c'est beaucoup dire, car M. Reinach a seulement
prouvé qu'Aristote se demandait si l'interdiction de bouillir une viande avant
de la rôtir ne s'explique pas par ce qui est dit « dans la célébration des mys-
tères », £v Tfj TEXîTr;. que l'on traduirait plus volontiers « dans l'initiation » elle-
même (5). Que cette initiation soit celle de Zagreus, cela va sans dire, mais que
l'initiation soit celle d'Eleusis, la -iXE-ri par excellence, cela ne résulte pas de ce
que le rédacteur où les rédacteurs des Problèmes n'avaient pas d'autre horizon
que celui L'initiation, avec l'article, est peut-être simplement celle
d'Athènes.
qui est en quand on parle de viandes bouillies et rôties. Le fait de
question
fermer le temple de Junon quand on célèbre les mystères d'Eleusis n'est pas un
argument plus clair. Quant au texte de Pindnre, M. Picinach y voit avec M. Tan-
nery une allusion au péché originel des Orphiques « Ceux de qui Perséphone :
agrée la satisfaction de l'ancienne rancœur '-oivàv ;:aÀatoij -jvOeoç), elle les renvoie
au bout de neuf ans à la lumière du soleil. » Cette interprétation nous paraît
aussi tout à fait vraisemblable. Mais toute l'importance qu'on donnera aux dogme^
des Orphiques ne prouve point qu'ils aient tenu une grande place à Eleusis.
L'Orphisme, religion de convaincus, qui exigeait une ascèse austère et étrange,
était trop absorbant pour se contenter d'une place, et l'on ne peut cependant pas
dire qu'il avait pris à Eleusis toute la place. Ce ne sont pas seulement des rites
qu'il eût fallu combiner, ce sont deux esprits iaconciliables qu'il eût fallu foudre
en un seul.
style lui paraît trop étrange. Et il se peut que le texte ait été un peu transformé,
comme dans le cas de saint Justin sur Simon le mage, qui faisait bien allusion à
quelque chose de quoique ses renseignements aient été peu exacts. D'ailleurs
réel,
nous avons maintenant une inscription aux dieux inconnus. C'est celle de Per-
game (2). Quoiqu'elle soit malheureusement incomplète. M. Weiureich établit que la
restitution déjà proposée par M. Hepding est la seule vraisemblable : ôcou if[i(hi-oii.
Après le gamma, la petite barre pourrait appartenir à un iota ou à un gamma
comme à un nu. Mais à-i-voï; serait trop court, àyvoTdtrotç ou à'i-(éXoiç, improbables;
«YuoTâTûtç se place ordinairement avant le nom. Quant à l'Apollon où/. àyvwcTTOî du
papyrus 3 de Giessen, il ne faut pas le prendre au tragique, non plus que la
Varia. —
La TJieologisch Tijdschrift de Leyde vient de suspendre définiti-
vement sa publication. Elle a eu sa période de gloire du temps de son fondateur
Kuenen, le chef de l'exégèse hypercritique hollandaise. Comme cette exégèse n'eut
jamais grande influence sur la pensée théologique et religieuse des Pays-Bas, la
Revue Théologique eut à lutter pour l'existence, et dans les dernières années
surtout changea plusieurs fois de rédaction. Maintenant elle tombe victime de la
J. V.
Le Gérant : J. Gabalda.
Seigneur Jahvé. Que celui qui écoute, écoute, et celui qui ne le fait pas, qu'il ne le
fasse point, car ils sont une maison rebelle.
XXXIII, 21. Et il advint, la 'onzième' année de notre captivité, le cinq du
dixième mois, qu'un fugitif de Jérusalem arriva vers moi. disant : la ville est
détruite. 22. Et la main de Jahvé fut sur moi le soir qui précéda l'arrivée du fu-
gitif, et il m'ouvrit labouche au moment de son arrivée' au matin; et il m'ouvrit
la bouche et je ne fus plus muet.
Raison du mutisme. —
Le mutisme d'Ézéchiel n'étant pas à pro-
prement parler un symbole, on n'a pas à en rechercher le symbo-
lisme. C'est pourtant un fait dont on veut connaître la cause et noter
la leçon. Écoutons le discours de Jahvé à son prophète « Je vais :
c'est pour leur parler un jour d'une manière plus terrible, dans
(1) In h. 1.
(4) In b. 1.
LES SYMBOLES PROPHÉTIQL'ES D'ÉZÉCHIEL. 163
1. Et toL fils de l'homme, prends une brique, place-la devant toi et graves-y
une ville, Jérusalem. 2. Mets le siège contre elle, construis contre elle un mur
de circonvallation, élève contre elle des chaussées, dresse contre elle un camp et
dispose contre elle des béliers tout autour. 3. Et toi, prends une plaque de fer et
place-la comme un mur de fer entre toi et la ville : tourne ta face de son côté,
et elle sera assiégée et tu l'assiégeras. Ce sera un signe pour la maison d'Israël.
7. Et pour le siège de Jérusalem, tu disposeras ton visage et ton bras nu, et tu
prophétiseras contre elle.
(1) U ne reçoit pas ici l'ordre de parler; par conséquent son mutisme n'est pas inter-
rompu.
164 REVUE BIBLIQUE.
(1) Je traduis "liïQ par xiège comme au v. 3, plutôt que par instruments de siège,
Symbolisme .
— Il ne saurait faire de doute. Le siège grossièrement
esquissé sur la brique annonce le siège prochain que Jérusalem
devra supporter. Mets le siège contre elle (v. i). disait le Seigneur,
tourne-toi contre elle v. ,3 , elle sera assiégée et tu l'assiégeras [ibid.) ;
qu'à disposer la brique en face de lui, à dégager son bras des plis
de son manteau, et il s'acquittera de son rôle d'assaillant. Il y aura
des choses plus difficiles dans sa carrière symbolique.
On a dit parfois '^Bertholet, Kraetzschmari que, dans ce rôle, Ezé-
chiel tenait directement la place de Jahvé, lequel serait en consé-
quence le véritable assiégeant, et Ion a voulu découvrir dans cette
identification une supériorité de la morale des prophètes sur la morale
populaire. Le peuple, dit Bertholet, confondait toujours les destinées
de la nation et de son Dieu, tandis que, pour les prophètes, Dieu pou-
vait parfois prendre parti contre son peuple et le châtier.
Quoi qu'il en soit de ces observations — qui appelleraient bien
des réserves — ou cherche en vain dans le symbole une expression
et même dans tous les autres, Ézéchiel se distingue de Dieu comme son
agent, son instrument, son mandataire ; il ne se confond pas plus avec
Jahvé qui l'envoie qu'avec le peuple auprès duquel il est accrédité.
Résumons symbole le :
seras contre elle. 8. Et voici que je t'ai rais des chaînes pour que tune puisses changer
de côté, jusqu'à ce que tu aies accompli les jours de son siège. »
sable et, par suite, devait être regardé comme une pure allégorie.
Voici ce qu'écrivait saint Jérôme dans son commentaire d'Osée, où il
expliquait métaphoriquement le mariage du prophète et de Gomer :
qu'un homme demeure enchaîné et couché sur son côté pendant trois
cent quatre-vingt-dix jours. On a tous les jours des expériences qui
en prouvent la possibilité dans les prisonniers, dans divers malades,
et dans quelques personnes qui ont l'imagination blessée et qu'on
(4) Manuel Biblique, t. II, 13' éd., p. 736, note l. C'est encore l'hypothèse de Knaben-
bauer : in Éz., p. 67.
168 REVUE BIBLIQUE.
dente. Elle a ceci de curieux que le prophète n'aurait passé que ses
nuits dans cette attitude, alors que le texte sacré ne parle précisément
que de jours. Et puis, qu'y aurait-il de surprenant à ce que le
prophète dormit la nuit sur le côté gauche ou sur le côté droit? Et
comment les Juifs auraient-ils pu s'assurer de la réalité du symbole?
A moins d'aller déranger le prophète durant son sommeil...
Venons enfin à l'interprétation littérale. C'est celle qui a été tou-
jours le plus en faveur parmi les commentateurs, celle qui rallie
aujourd'hui encore les suffrages les plus autorisés. Nommons parmi
ses partisans Théodoret, Maldonat, C. a Lapide, Calmet, Le Hir,
Klostermann, Bertholet, Kraetzschmar, Crampon, Gautier. Quel-
ques-uns de ces exégètes, il est vrai, recourent à la catalepsie pour
expliquer l'immobilité du prophète; mais admettent tous qu'il
ils
côté gauche, puis sur le côté droit... Je t'ai mis des liens pour que tu
ne puisses changer de côté... De telles formules n'ont-elles pas une
signification franchement réaliste? Elles n'ont même de sens qu'à la
condition de désigner des faits réellement accomplis. Car cette
immobilité, si pénible en raison de sa durée extraordinaire, n'est
autre chose — le symbole le dit assez — qu'un châtiment imposé à
Ézéchiel pour figurer le châtiment infligé aux deux royaumes
d'Israël et de Juda. Il est nécessaire que les faits soient réels, si l'on
lié à d'autres symboles, celui des liens (v. 8), celui de la nourriture
rationnée (vv. 10, 11, 16, 17), dont la réalité n'est guère discutable.
On ne comprendrait pas qu'un symbole imaginaire fût mêlé à la
trame de symboles nettement réalisés.
Combien de temps dura cette pénitence? Le texte original et les
versions s'accordent à dire que le prophète devait rester quarante
jours sur le côté droit; ils diffèrent sur le chiffre relatif au côté
gauche, et, par suite, sur la durée totale du symbole. L'hébreu
porte 390 jours pour le côté gauche, ce qui élève à 430 jours la
durée totale de l'épreuve. Le texte des Septante est plus compliqué.
Nous y lisons 4. Et toi., tu te coucheras sur le côté gauche, et tu y
:
Ézéchiel serait donc resté 190 jours sur le côté gauche et iO sur
le côté droit.
Que couché? Quel est le but de cette pénible immo-
fait-il ainsi
(2) Contrairement à ce que dit M. Vigouroux « Afin de montrer combien les péchés
:
du peuple sont grands et nombreux, le prophète reçoit l'ordre de se coucher 390 jours
sur le côté gauche...; il obtiendra ainsi une diminution de châtiment pour ses frères »
[Manuel Biblique, t. II, p. 736; la même explication est reproduite dans les annotations
de la Sainte Bible Polyglotte).
LES SYMBOLES PROPHÉTIQUES DÉZÉCHIEL. 171
mation des 190 jours, il n'y avait pas d'inconvénient à envisager la pénitence de Juda
sous un autre aspect, moins historique que symbolique.
LES SYMBOLES PROPHÉTIQUES D'ÈZÉGHIEL. 173
9b. [Durant les jours que tu seras couché sur le côté..., ... jours, tu la mangeras.]
10. Et ta nourriture, tu la mangeras au poids, vingt sicles la mangeras
par jour; tu
d'un jour à un autre jour. 1 1. Et l'eau, tu la boiras à la ration, un sixième de hin d'un ;
jour à un autre jour, tu la boiras. 16. Et il médit Fils : de l'homme, voici que je vais
briser le bâton du pain à Jérusalem, et ils mangeront le pain au poids et dans l'an-
goisse, et ils boiront l'eau à la ration et dans l'épouvante, 17. afin qu'ils manquent
de pain et d'eau, qu'ils dépérissent les uns et les autres et qu'ils se consument à cause
de leurs iniquités.
Et, toi, prends du froment, de l'orge, des fèves, des lentilles, du millet et de
l'épeautre ; mets-les dans le même vase et fais-t'en du pain.
Sijmbole. —
Les nombreuses remarques qu'appelle ce fragment de
symbole ont été présentées au § 2. Il a été établi qu'il n'occupe pas
actuellement la place qui lui avait été assignée par le prophète;
qu'il n'appartient même pas à la période d'immobilité stricte à
laquelle Ézéchiel a été voué plusieurs mois durant ;
qu'il a été sans
doute réalisé après le symbole de l'immobilité, pendant les années de
mutisme; enfin, qu'il a été inséré à cette place par un scribe qui a
cru bien faire de placer le pain composite à côté du pain rationné.
Dans l'état actuel du texte, nous ne savons si le prophète dut pré-
parer son pain un ou plusieurs jours avec ces substances hétérogènes.
Mais il n'y a pas de doute que le symbole n'ait été réalisé au moins
une fois.
176 REVUE BIBLIQUE.
peuple pour frapper vivement tous les esprits, précisément parce que
le symbole était, en matière d'impureté légale, une exagération
énorme, une charge.
12. Et une galette d'orge tu mangeras, et tu la feras cuire avec des excréments
humains sous leurs yeux. 13. Et Jahvé dit C'est ainsi que les Israélites mangeront
:
leur pain souillé parmi les nations où je les chasserai. 14. Et je dis Ah! Seigneur :
Jahvé, jamais je ne me suis souillé; je n'ai jamais mangé de bête morte ou déchirée
depuis mon enfance jusqu'à ce jour, et jamais viande impure n'est entrée dans ma
bouche. 15. Et il me dit : Vois, je te permets la bouse de vache au lieu des excré-
ments humains : tu feras ton pain là-dessus.
était de ceux dont on n'oublie pas les leçons. Il n'était pas nécessaire
de le renouveler. Il ne le fut pas.
On connaît les fades plaisanteries du xviir siècle sur le déjeuner
(TÉzéchiel. En voulant faire de l'esprit, Voltaire commettait un épais
contresens. Le texte original ne contient nullement l'invitation sau-
grenue qu'y découvrait le trop célèbre philosophe; il dit seulement :
améliorée, puisqu'elle porteEt stercore quod egreditur de hornine, operies illud in oculis
:
eorum. Le pain ne doit pas être recourerf d'immondices, une fois cuit, il doit être cuit
avec ro cornbustiblf.
iiicvur; BiELii.n E ly^l. — t. xx.v. 12
178 REVUE BTBIJQUE.
pas enfreint une seule fois les prescriptions divines sur les aliments.
Cette fidélité ne méritait-elle point quelques égards?
La répulsion d'Ézéchiel était si profonde et si vive que Jahvé con-
sentit à tempérer la rigueur de son ordre. « Vois, lui dit-il, j'au-
torise la bouse de vache au lieu des. excréments humains. » Cette fois,
l'ordre divin ne contenait rien d'inacceptable car, quoi qu'en dise
;
Bertholet (1), il ne semble pas que le fumier des animaux fût regardé
chez les Juifs comme une chose impure il est au contraire probable
;
avec des excréments humains... C'est ainsi que les Israélites man-
geront leur pain souillé parmi les nations où je les chasserai. » Il est
visible que l'accent est sur l'adjectif souillé.
De même que le prophète reçoit l'ordre de manger un pain impur,
ainsi les Israélites auront à manger des aliments impurs parmi les
nations où ils seront bientôt dispersés.
Il est vrai, Dieu revint .sur sa première injonction et le prophète
n'eut pas à manger de ce pain souillé. Est-ce à dire que le symbo-
hsme ait été modifié et que la menace du pain d'exil ait été écartée?
Nullement, car la valeur sémantique dépendait du symbole tel qu'il
avait d'abord été proposé, non du symbole tel qu'il a été réalisé.
Le deuxième mode de
cuisson ne possède aucune signification parti-
culière ;
qu'un adoucissement accordé aux instances du pro-
ce n'est
phète; seul le premier mode, quoique non réalisé, a un symbolisme,
et c'est le symbolisme initial. Pour tenir compte de cette nuance,
on n'a qu'à retoucher légèrement la formule précédente et dire :
1. Et toi. fils de riionime. pieods une lame affilée, prends-la en guise de'
rasoir dç barbier, fais-la passer sur ta lëte et ta barbe : prends aussi la balance à
peser, et fais-en plusieurs parts. 2. Tu eu brûleras un tiers au feu, au milieu de in
ville, lorsque seront accomplis les jours du siège; tu en prendi^s un tiers que tu
frapperas de lépée tout autour de la ville; quant à lautre tiers, tu le disperseras
au vent et je tirerai l'épée derrière eux. 3. Tu en prendras un tout petit peu et tu
le serreras dans l'aile [de Ion naintean]. 4. Ta en prendras ener,,-, ,/ /,/ i^ j^fi.,,-,,^
12. Un tiers de se.s habitants perim pur la peste et sera consumé par la famine
dans son sein, un autre tiers tombera sûi(s le glaive autour de toi: quant ou dernier
tiers, je le disperserai à tonJ vent, el je tirerai l'épée derrière lui.
réalisation. Ézéchiel devra exécuter les ordres reçus dès qu'il aura
terminé les -230 jours de siège et d'immobilité, sans doute lorsque,
dégagé de ses liens et de sa pénitence, il aura recouvré sa
liberté
d'action v. 2). C'est alors qu'il devra se raser et partager son poil
d'après les instructions divines.
Je ne sais comment dom Calmet a pu s'imaginer que le prophète
devait se raser avant l'ouverture du siège symbolique et détruire
chaque jour une part de ses cheveux. «... A mesure que les jours
de ce siège figuratif s'accompliront. Vous ne brûlerez pas tous ces
y
.
cheveux à la fois, mais par parties (1) ». Le texte original est formel
en sens contraire le prophète devra brûler le même jour le tiers
:
qui doit être livré aux flammes, et cela « à la fin des jours du sièee ».
Nul doute qu'il ne réalise d'une manière analogue le reste de son
programme.
Les ordres transmis possèdent une clarté qui se passe de commen-
taire. Ézéchiel doit diviser ses cheveux en trois parties. Les Septante,
il est vrai, parlent de quatre parties: mais leur texte témoigne
d'un visible embarras, puisque, au lieu d'identifier la quatrième partie
avec le petit reste caché dans le manteau, comme on s'y attendrait,
ils l'en distinguent, en lui assignant le même mode de destruction
qu'à la première partie. Les trois tiers de l'hébreu sont donc à pré-
férer aux quatre quarts des Septante. Le premier tiers doit être —
brûlé sur la brique qui représente Jérusalem le deuxième, frappé ;
(2) C'est dans un coin de leur kefDeh ou de leur abay que les Arabes cachent encore
leurs objets précieux argent, monnaies antiques à vendre aux
: étrangers...
'o; Cité par Troclion, in h. I.
LES SYMBOLES PROPHÉTIQUES D ÉZÉCHIEL. 181
Suspect, le début du v.
+ Test également et pour la niènie raison,
suivante :
;'l ; La glose aura été insérée par un scribe désireux d'attirer l'attention sur les malheurs
ijui atteignirent encore les Juifs de Palestine sous Godolias et dans la suite.
182 REVUE BIBLIQUE.
de jour, ;i leurs yeux, cl toi, lu sortiras le soir, à leurs yrii.r, comme ou sort pour
l'exil (^lose?) 5. A leurs yeux, perce la muraille : tu sortiras par là. 6. A leurs yeux
tu 'seras porté feur les épaules' et tu sortiras dans l'obscurité; tu voileras ton visage
et tu ne verras pas la terre, car jai fait de toi un signe pour la maison d'Israël.
7. Et je fis comme j'en avais reçu l'ordre: je sortis de jour mes bagages, comme
les bagages d'un exilé; et. le soir, je perçai la muraille de mes mains et je sortis" ;
maison rebelle, ne l'a-t-elle pas dit : Que fais-tu.' 9. Dis-leur : 10. Ainsi parle le
Seigneur Jahvé : Cette cliarge est i)Our' le prince qui est à .lérusalem et pour toute
la maison d'Israël qui est au milieu d'eux. Dis :
Et il se voilera le visage,
Pour ne point voir de ses yeux la terre.
Mais, cette fois, rien n'autorise les conjectures des critiques alle-
mands. Kraetzschmar allègue comme raison que les prophètes n'ont
pas coutume de faire des prédictions spéciales, personnelles, analo-
gues à ces oracles sur Sédécias. —
Pour se convaincre du contraire, il
•
nouvelle raison de penser qu'il n"a pas été inventé par un scribe eu
quête de pittoresque. On comprendrait plutôt que le détail de l'hé-
breu, incorrect et vulgaire, ait été substitué au précédent par un
copiste timide. En bonne critique, lorsqu'on se trouve en présence de
deux leçons, l'une banale, l'autre originale et difficile, la présomption
est d'ordinaire en faveur de cette dernière.
Mais doù viennent les hésitations des commentateurs, quand il
s'agit de reconstituer la scène? Comme toujours, de l'imprécision de
quelques termes, et surtout de la liàte avec laquelle on remplace les
indications objectives du
par des reconstructions subjectives.
texte
L'expression tu perforeras le mur prêtant à quelque ambig"uïté, on
s'est empressé d'y voir le mur de la maison que le prophète habitait à
' suit. Le prophète doit prendre ses bagages en plein jour et les porter
devant sa maison. Après quoi, il rentrera chez lui. Le soir venu, il
en captivité.
Comme si ce u'était pas assez d'une menace, on y revient aux
vv. 14-lG : Ils vont être dispersés à tout vent, parmi les nations;
2o. La parole de Jahvé rae fut adressée en ces termes : 24. Et toi, fils de l'homme,
trace deux chemins pour Tépée du roi de Bahylone; tous les deux partiront du
même pays: grave une main, grave-ld à l'entrée du chemin de la ville. 2-5. Tu
traceras un Rabbat des Ammoniies, et vers .Tuda et Jéru-
chemin au glaive 'vers
salem qui est en son milieu'. 26. Car le roi de Bahylone s'est arrêté au carrefour.
à la tête des deux chemins pour consulter les présages il secoue les flèches, il :
interroge les teraphim, il examine le foie. 27. Les présages ont été à droite, 'contre'
Jérusalem, pour dresser des béliers, pratiquer une entrée par la brèche, pousser
le cri de guerre, pour dresser des béliers contre les portes, élever des chaussées
et construire un mur de circonvallation.
'1j Sédécias. ariolé dans la plaine de .léricho, lui conduit a Nabutljodonosor, qui lui
creva les yeux, après l'avoir fait assister au massacre de ses fils, et l'envoya mourir
dans les cachots de Chaldée.
188 REVUE BIBLIQUE.
signe en tête de chaque chemin (au die Spitze eines jeden' Weges).
Malgré la divergence des remaniements proposés, les critiques,
Cornill, Toy, Rertholet, Kraetzschmar... s'accordent en ceci qu'ils
placent un signe en tète de chacun des deux chemins qui partent du
carrefour dans la direction de Rabbat Ammon et de Jérusalem.
En vertu des principes d'exégèse symbolique, semble qu'ils se il
Simplement pour marquer que les présages ont indiqué cette voie au
monarque assyrien. Il a hésité à ce carrefour, consulté le sort, lequel
a désigné la route de Jérusaieai de préférence à celle de Rabbat
Ammon. Il fallait indiquer tout cela sur la brique : cVst la main qui
remplit cet oflice.
2. Autre raison qui remaniements textuels des
suffirait à écarter les
De même que des signes sont placés en tête des chemins conduisant
à Rabbat Ammon et à Jérusalem,
ainsi Xabuchodonosor, après avoir consulté les présages, prendra la
route de Jérusalem.
On appréciera la beauté de cette structure symbolique! En réaUté,
tout cela est boiteux et porte à faux. Tout se tient au contraire, dès
qu'on abandonne les conjectures des modernes pour ne garder que
.
190 REVUEÎBTBLIQUE.
les données positives du texte une seule inaiii sur la route de Jéru-
:
Judée.
Ces résultats si harmonieux: dans leur simplicité n'exigent pas la
moindre retouche du texte hébreu. Tout au plus, pourrait-on négliger
comme une glose le dernier mot du v. '2ï grave iX"i2i, qui nest pas
:
tour à tour les Hiérosolymites, dont les iniquités ont rendu inefficaces
les serments divins les plus solennels (28, 29), le roi Sédécias, u le
1-5. La parole de Jahvé me fut adressée : 16. Fils de l'hoaime, voici que je vais
l'enlever par ud coup [soudain] les délices
tu ne te lamenteras point de tes yeux :
20. Je leur répondis : La parole de Jahvé m'a été adressée : 21. Dis à la maison
d'Lsraël : Ainsi parle le Seigneur Jahvé Voici que je vais profaner mon sanctuaire,
:
l'orgueil de votre force, les délices de vos yeux, l'amour de vos âmes. Vos fils ei
vos que vous avez laissés périront sous le glaive. 22. Et vous ferez comme
filles
J'ai fait Vous ne vous couvrirez pas la barbe, vous ne mangerez pas le pain de
:
douleur'. 23. Vous garderez la mitre sur la tête et la chaussure aux pieds; vous
ne vous lamenterez point ni ne pleurerez: mais vous vous consumerez dans vos
iniquités et vous gémirez l'un auprès de l'autre. 24. Ézéchiel sera pour vous un
signe : vous ferez tout ce qu'il a fait: et lorsque tout cela arrivera, vous saurez
que c'est moi, le Seisneur Jahvé.
Symbole. —
Le Seigneur annonce au prophète que sa femme va
lui être enlevée par une mort subite. A celle occasion, il ne lui inter-
dit pas la douleur secrète et silencieuse ; il lui défend seulement
toutes les marques extérieures de deuil, les lamentations et les larmes
bruyantes; il gardera sa coiffure
aux sur la tête et sa chaussure
pieds; ne paraîtra pas en public la barbe voilée; il prendra sa
il
(I) In il. 1.
(3) In li. 1.
LES SYMBOLES PROPHÉTIQUES DÉZÉCHIEF.. 193
13. La parole de Jalivé me fut adressée : 16. Toi. fils de l'homme, prends un
bâton et écris dessus : A Jiida et aux fils d'Israël, ses compagnons. Prends ensuite
un autre bâton et écris dessus : A Joseph, [le bâton d'Éphnûm]. et à toute la
maison d'Israël, ses compagnons. 17. Rapproche-les l'un de l'autre comme un seul
bâton, afin qu'ils soient un dans ta main. 18. Et lorsque les fils de too peuple te
diront : Ne nous expliqueras-tu pas ce que tu entends par là? 19. Dis-leur : Ainsi
parle le Seigneur Jahvé : Voici que je vais prendre, moi aussi. Je bâton de Joseph
qui est dans la main d'Ephraim et les tribus d'Israël, ses associées, et je les mettrai
sur le bâton de Juda, et j'en ferai un seul bâton et ils ne seront qu"uo dans ma
main.
20. Et les bâtons sur lesquels tu écris seront dans ta main, à leurs yeux. 21. Dis-
leur : Ainsi parle le Seigneur Jahvé : Voici que je vais retirer les fils d'Israël du
milieu des nations où ils sont allés: je les assemblerai de toutes parts et les amènerai
dans leur pays; 22. j'en ferai une seule nation dans le pays, sur les montagnes
d'Israël; ils auront tous un seul roi, ils ne seront plus deux nations, et ils ne seront
plus divisés en deux royaumes. 23... Ils seront mon peuple et je serai leur Dieu.
24. 3Ion serviteur David sera leur roi et leur uuique pasteur... 2G. Je ferai avec eux
une alUance de paix, une alliance éternelle...
Symbole. —
Aucun éxégète, à ma connaissance, ne conteste la
réalité du symbole. Il n'y a pas davantage de voix discordante pour la
manière d'entendre cette scène, laquelle du reste est d'une extrême
simplicité. Le prophète doit prendre deux baguettes de bois en v
inscrivant quelques mots, puis les rapprocher et les tenir unies dans
la même main, comme si elles ne formaient plus qu'une seule
baguette. Sur lune délies il doit écrire ces mots : .1 Juda et aux fils
compagnons, allusion à la tribu de Benjamin, aux débris
d'Is/'aqj^^ ses
De même que le prophète réunit dans une seule main deux baguettes
qui ont l'air de n'en plus faire qu'une,
ainsi le Seigneur réunira du milieu des nations tous les enfants
en sorte qu'ils ne feront plus qu'une
d'Israël sans distinction de tribu,
seule nation, un seul royaume; peuple désormais purifié et fidèle,
qui vivra sous la houlette d'un même roi et pasteur, Das-id. et avec
lequel le Seigneur contractera une alliance éternelle.
Israël et Juda s'étaient divisés au lendemain de la mort de Salomon.
REVUE BIBI.IOLE 1921, — T. XXX. 13
194 ElEVUE BIBLIQUE.
Bethléem.
(1) In h. 1.
LE CA>0> Dl XOUVEAL TESTAMENT
ET LE CRITERE DE LÀ CANONICITÉ
Les paroles de Xotre-Seisneur : < L'n seul est votre Maitre » [M \xiii,
8 , nont fait que réclamer d'une manière explicite une soumission
absolue à laquelle ses disciples s'étaient déjà habitués. Dès le commen-
cement, à Gapharnaiim, il une autorité surprenante,
avait parlé avec
et ces hommes qui furent choisis pour « être avec lui pendant qu'il •
quée chez la plupart des auteurs qui ont traité la question. On com-
mence généralement, comme nous venons de le faire, par constater
que les paroles de Jésus possédaient une autorité canonique. Ces
paroles, confiées à l'Écriture, lui auraient communiqué leur caractère
sacré; plus tard, l'on serait venu à_regarder les paroles parlées ou
écrites des apôtres comme l'expression de l'Esprit de Jésus et canoni-
ques, elles aussi. C'est le système de M. Jûlicher dans son introduction
au Nouveau Testament.
La « vieille Écriture » et le Seigneur, c'était, nous assure-t-il, pour
Paul aussi bien que pour les chrétiens de son temps, les sources
infaillibles de la connaissance religieuse. Partant ceci contenait le
« çerme d'une nouvelle Écriture. Le professeur de Marbourg est
>
-outenir. me
au point de vue théologique. L'assimilation
semble-t-il.
d'écrits, comme non inspirés,- aux écrits de 1 Ancien
d'abord regardés
Testament, introduirait une nouvelle doctrine, nullement contenue
dans la doctrine primitive ce ne serait pas du tout un développe-
;
mais de la foi à une vérité que l'Église enseis'ue comme révélée ('i\
1 Das Urteilstehl lest dass dièse Sammlang ein Restproduct isteinst galt ailes fur ins-
iriert, was ein Christ zur Erbaunung schrieb. » Die Entstehung des Xeuen Testaments,
ijI die irichtitjste Folgung der tieuen Schopfnng. Leipzig, 1914, p. 1.
,2) Article Bible dans ÏEncyclopedia Britannica, vol. III, p. 87Ô-8T7.
3) Sanday^ Ibid.
,'4) CL J. V. Baixvel, De Sacra Scriptura, p. 169;. Comme le remarque M. Tou-
zard : D'après renseignement de l'Église elle-même, l'inspiration échappe à nos moyens
or(.linaires d'investigation, il n'y a pas de critères humains assez sûrs, a^sez universels
pour permettre à qui que ce soit de discerner un livre inspiré d'un autre qui ne l'est
pas ->. [Revue pratique d' Apologétique, 15 mars 1908, p. 344). La révélation ^eule peut
nous renseigner.
198 REVUE BIBLIQUE.
d'une manière générale sans nous occuper de savoir si tel ou tel écrit
a pu obtenir une place dans tel ou tel endroit parmi les livres inspi-
rés, par erreur ou par fraude.
dans son dialogue avec le juif Tryphon, demandait qu'il s'en tînt à
lAncien Testament; et l'on comprend qu'en sadressant à des païens,
qui ne savaient pas même ce que Aoulait dire le mot Evangiles, il
Pierre place les écrits de saint Paul sur le niveau de l'Ancien Testa-
ment, semble aux mêmes critiques un argument de plus pour la mettre
aussi vers 150 A. D. On ne peut pas dire que cette argumentation soit
entièrement à priori.
Et cependant, si les Pères Apostoliques croyaient inspirés les écrits
qui formèrent le Nouveau Testament, ils ont dû leur attribuer une
que Dieu lui-même, la vérité suprême, puisse dire ce qui n'est pas
vrai (1). »
sonne. {Ad. Rom., V.) Saint Polycarpe, qui avait, lui aussi, une collec-
tion très considérable peut-être complète des écrits que l'Église a
définis comme inspirés, nous indique clairement qu'il y trouvait un
enseignement divin. Il dit, en etïet, dans sa lettre à cette église de
Philippes, à laquelle saint Paul avait jadis écrit : « Nous ne pouvons,
ni moi ni aucun autre de ma sorte, atteindre à la sagesse du bienheu-
reux et glorieux Paul (3). »
Les premiers sont cités comme s'ils formaient un seul livre, dont
chaque ligne faisait connaître la révélation de son unique auteur, le
Saint-Esprit. Les. derniers sont employés comme des livres distincts
les uns des autres comme des sources de renseignements
et surtout
IV, 1,1; m, 19, 2i. Ceci semblerait exclure l'action de l'Esprit dans
ment.
Est-ce à dire que la mise des deux Testaments sur le même pied,
leur " égalisation », si je puis m'exprimer ainsi, n'était pas encore un
faitaccompli ? La réponse à cette question dépend de ce qu'on entend
au juste par le mot « égalisation ». M. Leiphold s'exprime clairement
à ce sujet. Il ne veut pas que les livres du Nouveau Testament aient
été canoniques et égaux à ceux de l'Ancien avant que les chrétiens en
soient venus à les traiter comme l'Ancien Testament au point d'admet-
tre, par exemple, l'interprétation allégorique (2). Cela n'est jamais
Nous croyons que les vingt-sept livres qui forment notre Nouveau
Testament sont inspirés; qu'ils ont été transmis comme tels à l'Église;
que le fait de leur inspiration est une vérité révélée. La conclusion
qui semble se dégager de cette croyance est que les apôtres ont
enseigné l'inspiration de ces livres. Autrement il faudrait dire que
l'Église peut être guidée dans ses définitions par une révélation qui
ne vient pas des apôtres. Ce ne serait pas aller contre une définition
de l'Église mais ce serait nier un principe qui est à la base de beau-
;
Saint Pierre n'avait pas besoin de dire aux chrétiens de l'Asie Mineure
que sa lettre était inspirée par le Saint-Esprit : ils le savaient, puis-
qu'ils savaient ce qu'était un apôtre. Cette thèse d'Ubaldi, dans sou
Introduction classique, n'a pas été accueille avec beaucoup de faveur
parles théologiens: mais personne n'en a nié l'orthodoxie. Déplus
historiques semblent bien l'appuyer. Le R. P. Bainvel, tout
les faits
srine apostolique d'un livre pour qu'il fût accepté comme inspiré (1).
les auteurs humains des instruments passifs aux mains de Dieu, ceux
qui ne peuvent concevoir l'inspiration que comme une dictée, ont
raison de s'attendre à en trouver mention dans le Nouveau Testament
et dans les auteurs de l'âge apostolique. Mais ils devraient se rendre
compte que l'inspiration avait cessé de paraître bien extraordinaire à
une époque où Ion recevait l'enseignement du Christ par les lèvres
d'apôtres inspirés, assistés dévangélistes inspirés; où l'on attendait
de prophètes et de docteurs inspirés « les paroles de sagesse » et c les
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.. i 1;..^
Chron.
son père lui enseiïçna l'écriture; puis enseigna l'écriture; et il alla se cons-
l'a doctrine des Veilleurs, selon laquelle horoscopes du soleil, de la lune, des
ils avaient exercé la divination par le étoiles et de toutes les <constellations>
soleil, la lune et les étoiles dans toutes du ciel. Or il n'en révéla rien à personne,
les constellations du ciel. 4. Or, il parce qu'il craignait que Noé s'irritât
(ÏEth. ne vaut pas '< bâtir )> du syriaque; il semblerait que le traduc-
teur grec a lu ":p au lieu de ,1:2, mais le syriaque a omis la première
expression « chercher un lieu n. Plus loin, Chron. a remplacé « Veil-
leurs » par " anciens )>, soit sous l'influence des premiers mots du
V. 2, soit parce qu'il entendait attribuer aux descendants de Seth
la connaissance de la divination parles astres (1 La leçon de l'éthio- .
au lieu de hoïw.
Jub. Chron.
10, 29. Et Canaan vit que le pays, Et les fils de Canaan virent que la
la mer, mais il demeura dans le pays du Yoktan, petits-fils de Sem (ms. : Chamj,
Liban, à l'orient et à l'occident, à et elle leur plut aux Benë Canaan], et
partir du bord du Jourdain et à partir ils y demeurèrent, et ils ne voulurent
de la mer. pas aller dans la terre de leur héritage.
(1) Ainsi en est-il dans Josèphe, Aat. Jud. I, 1, 3. L'auteur des .Jubilés, qui condamne
fortement les spéculations astrales, ne pouvait faire honneur de l'astrologie aux vertueux
descendants de Setii; tandis que la faire inventer par les Veilleurs, c'était en préparer
la répudiation par Abraham; cf. Jub., 4, 15. Le livre du Yasar cite Qaïnan, petit-fils de
Seth, et non Qaïnan, petit-lils de Sem, à propos de la divination par les astres.
208 RE\ LK BIBLIQUE. ^
d'Egypte " = ^ij.io; jîovj. qui fait trop d'honneur au Ouâdy el Arich (1) ;
13" fragment : Chrori., p. 18. 1. 28-p. 19, 1. 16. =Jub., 11. 16-23: 12. 1-7, 12-29.
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Via4tooo ^i) |oO) K^ulio .l.i.») ^os>v3 o..>.M;ïa\ p-3 >-«.Ï£d ^io ^i^X ).jJà.*û ^^jieuj )V<ç«-'^
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yo^a .p^oii. Ij-su; ^^ NootVi/j ^oja-/ ^^îoio -x-i-^O! tli>ov\ ao/ ,j-J.i l^jo ^^JLiet- ;oo
^ovio Vio/o .oviocia.\ I^Vio ai JP- .);^oao . )IX.i.a; dwïa^ ^0-"/ (j.io )^«o» I^Sj.'^ p>Ojo.
J.30
|;^oo N--:io PVio Vsç^ I-3J y/ -P/ -^ l-Lio."^ -^QJ/ |ov^ -r-(-3 . l-».iQ-i;o jjovœjo . PLjqjj; |LbL/
. j^iOr^ Ih<^*» \r4 \-^''°l ^iOj-o jOÎLoi . pO) J-iab.» |LQ..i^i.{, ^io ^...i.*X)OV3 . p>o.^po loCiv ;»->a.-.i^
)J-.^5^^>P ^Q-s/ N-.^ ,.ioo ;.l!^;jk ^o ;^>/ ^io ;-\ jL ••riol O ]io ovi. )L/ Q_C^j.io\ ^ia\» jJO
)
v«\--^ ; lovS^ . l-^XiLB ^) .oii. po/o .^JL3; p.;p ^)p; ^..oiaj/ ^ ^c>,Vo( p-a ^*1a ^LjL JN^o
(1) HabUuelleraent à sec; cependant lorsqu il pleut, le Ouàdy roule vers son embouchure
une quantité d'eau considérable les remblais de la voie ferrée furent coupés plusieurs fois
:
Jub. Chron.
11, 16. Or l'enfant (Abram) com- Abraham, âgé de douze ans, com-
mença à connaître l'erreur de la terre, mença à comprendre l'erreur de la terre,
comment chacun errait après les idoles comment chacun était pris par l'erreur
sculptées et après l'impureté. Et son des idoles) sculptées et des (idoleS;
pour ensemencer la terre : et ils sortirent peuple sortit, chacun pour préserver
tous ensemble pour préserver leurs sa semence des corbeaux. Et Abraham
semences des corbeaux. Abram sortit sortit aussi avec eux, et il cria en disant
aussi avec ceux qui étalent sortis; c'était aux corbeaux : « Retournez, retournez
un enfant de quatorze ans. 19. Et une à l'endroit d'où vous venez. » Et ils s'en
nuée de corbeau.\ survint pour manger retournèrent. Et en ce jour, il fit retour-
les semences, et Abram courait à leur ner les corbeaux soixante-dix fois.
Et son nom (devint) grand dans tout Et il se sépara de son père; et son
le pays des Chaldéens. 22... nom devint grand dans toute la terre
des Chaldéens.
23. Et dans la première année de la Et il apprit aux ouvriers en bois
cinquième semaine, Abraham instruisit à faire des instruments au-dessus de
ceux qui faisaient des instruments pour l'extrémité des charrues pour jeter la
bœufs, les ouvriers en bois, et ils firent semence par leur moyen. Et la semence
un instrument au-dessus du sol, contre descendait par là, et elle était enfouie
le manche de charrue, pour y placer
la en terre ; et ils ne craignirent plus (rien)
la semence, et la semence descendit des corbeaux.
de là à l'extrémité du soc, et elle était
Jiib. Chron.
les adorez pas. 4. Adorez le Dieu du qui fait descendre la pluie et la rosée,
ciel, qui fait descendre la pluie et la et qui fait tout ce qu'il veut dans le
rosée sur la terre, et qui fait tout sur ciel et sur la terre. »
je sais cela, mon fils. Mais que dois-je je sais, mon fils. Mais que dois-je faire
faire à l'égard du peuple, qui m'a établi à l'égard de tout le peuple, qui m'a
afin de servir devant les (idoles) ? Si établi afin de servir devant les idoles) ?
je leur dis la vérité, ils me tueront, car Si je leur dis la vérité, ils me tueront,
leur âme les suit des idoles ,
pour car leurs âmes sont fixées dans la
les adorer et les glorifier. Tais-toi, mon crainte des idoles. Mais tais-toi. mon fils,
lô. Ensuite Tharé sortit d'Our des Et à l'âge de soixante ans, Abraham,
Chaldéens. lui et ses enfants pour venir avec Tharé son père, Nachor son frère
au pays du Liban et au pays de Canaan, et Lot. fils de Haran. sortit d'Our des
et demeura au pays de Haran. Et
il Chaldéens; et ils allèrent et) demeurèrent
Abram demeura avec Tharé, son père, à Haran pendant quatorze ans.
à Haran, deux semaines d'années.
16. Et dans la sixième semaine, eu Et dans la quinzième année, le pre-
sa cinquième année, Abram demeura mier du septième mois, tandis qu'Abra-
pendant la nuit, à la nouvelle lune du ham était à Haran, il resta pendant la
septième mois, à observer les étoiles, nuit pour observer les étoiles, depuis le
depuis le crépuscule jusqu'au point du crépuscule jusqu'à l'aurore, afin de voir
jour, afin de savoir quelle serait Tœuvre quelles seraient les œuvres de l'année
de l'année pendant les pluies; et il était pendant la pluie.
seul tandis quil demeurait et qu'il
observait.
une parole vint à son cœur,
17. Alors, Et tandis qu'il observait, une parole
et il Tous les signes des étoiles,
dit : « vint à sa bouche, et il dit : « Tous les
et les signes du soleil et de la lune, signes des étoiles, et de la lune et du
sont tous aux mains du Seigneur. Pour- soleil, sont dans les mains de Dieu.
quoi chercherais-je? 18. S'il veut, Il fait Pourquoi chercherais-je.' Car, s'il veut,
pleuvoir le matin et le soir, et s'il veut. le Seigneur fait descendre la pluie soit
Il ne laisse pas tomber (la pluie), et tout matinale soit vespérale; et s'il ne veut
est dans ses mains. pas, la pluie ne descend pas. »
Jub. Chron.
28. Et il arriva dans la septième année Et après deux ans, Abraham demanda
de la sixième semaine, qu'il adressa la à son père d'aller vers la terre de
parole à son père, et il lui fit savoir Canaan.
qu'il allait partir de Haran pour se
29. Et Tharé, son père, lui dit : Et (celui-ci) lui dit : « Va en paix.
« Va en paix. Que le Dieu de l'éternité Que le Dieu de l'éternité fixe ta route,
dirige ta route et que le Seigneur soit et que personne n'ait pouvoir sur toi
Ep. 78 ad Fabiolam, raans. 24, P. L. 22, 713; éd. Hillerg ii, p, 70.
(1)
Ephraemi Syri opéra, éd. Petrus Benedictus, Rome, 1737, I,p. 156 syr.-lat. Mais
(2) S.
dans le commentaire d'Éphrem. les corbeaux ont été remplacés par des sauterelles.
MELANGES. 2i:}
caractéristique de sa manière.
La phrase « et il invoqua le Dieu du ciel, et Celui-ci lui répondit »,
que le texte actuel ./«/ô'^'" ne porte pas, et qui d'ailleurs est mal
placée dans CA/'o;i., rappelle les termes de saint Éphrem auxquels il
a été fait allusion ci-dessus.
tion agricole palestinienne n'en a pas gardé trace non plus; ici
placent les deux faits en l'année 60. Cedrenus lisait dans son texte
de Jub. la date que nous trouvons dans Eth. (3). L'incendie du temple
des idoles est cité par Michel le Syrien (i) et, d'après lui, par Barhe-
braeus (5).
j) chronique..., livre II, chap. \i, trad. Chabot, I, p. 26 « Abraham, étant âgé de :
quinze ans, commença de lui-même à prier et adorer Dieu. II chassait les corbeaux, qui
avaient été envoyés par Dieu sur la terre des Chaldéens pour détruire et dévorer leurs
semences. »
(2) Histoire abrégée des dynasties, J-^-^^^
y,:^^' -^y^i ^^- Salhanl, Beyrouth,
temple des idoles, qui était à Our des Chaldéens; son frère Harôn entra pour l'éteindre
et sauver les idoles, afin qu'elles ne brûlassent pas. et il fut consumé. »
(5) Hist. abr., p. 21 Chron. sijr., p. 11 incendie du temple placé en l'an 60 d'Abraham.
; :
214 REVUE BIBLIQUE.