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Emile et aS

_ & se souvenir avant de s’endormir _

?
...peux-tu me'dire

Emile et la Saint-Valentin
Texte
Toufik Ehm

Illustrations
Luc Savoie

Conseillers 4 la publication
Roger Aubin
Gilles Bertrand
Joseph R. DeVarennes
Jean-Pierre Durocher

MONTREAL
© 1989 Québec Agenda Inc.
Dépot légal: 3° trimestre 1989
Bibliothéque nationale du Québec
Bibliothéque nationale du Canada
Tous droits de reproduction, de traduction ou d’adaptation réservés pour tous pays.
Toute reproduction totale ou partielle, par quelque procédé que ce soit, est interdite sans
Yautorisation écrite de léditeur.
ISBN 2-89294-149-0
Imprimé au Canada
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Emile et la Saint-Valentin
Appuyé contre la cl6ture, emmitouflé dans son large
manteau, les mains enfoncées dans les poches, Emile est
plongé dans ses pensées. Tout autour, s’étendent des
champs couverts de neige. Un vol épars de moineaux
passe au-dessus de lui, mais il ne s’en apercoit guére.
Dans son regard, une sourde douleur semble figée. Le
jeune homme frissonne, serre son foulard autour de son
cou puis, d’un pas trainant, se dirige vers la ferme.
Rose et Michel, assis sur la galerie de la maison, le
guettent. Les deux enfants ne reconnaissent plus le garcon
joyeux et plein d’entrain que leur pére a engagé au début
de l’été pour l’aider dans les travaux de la ferme. II est
devenu taciturne et n’encourage guére les gens a lui
adresser la parole, se contentant de vagues réponses
lorsqu’il se voit acculé 4 entamer une conversation.
— llest bizarre depuis quelque temps, tu ne trouves
pas? s’étonne Michel.»
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— Oui, méme qu'il ne mange méme plus son dessert
apres le souper, dit Rose en hochant gravement la téte.

— Cest pire que je ne le pensais, alors. Mais qu’est-ce


qu'il peut bien avoir? se demande Michel.

Emile passe devant eux sans s’apercevoir de leur


présence. Ils suivent du regard son dos voité jusqu’a ce
qu'il disparaisse au coin de la bAatisse. Il va au hangar
fendre du bois.

Les deux enfants demeurent silencieux, le temps de


commencer a entendre les premiers coups de hache sur
les billots secs, puis Rose déclare:

— Moi, je sais ce qui lui arrive 4 Emile.


Elle prend son mouchoir, se mouche avec application,
puis se tourne vers son frére‘et, devant son air sceptique,
réaffirme:

— Je sais ce qu'il a, Emile, c’est vrai.

Et comme Michel veut ouvrir la bouche pour parler,


elle ajoute précipitamment:

— Et je ne te le dirai pas, tu es trop jeune pour ga.

Michel serre les lévres en une moue de dépit.

— Moi aussi, je sais. D’ailleurs tout le monde au


village en parle.

Rose hausse les épaules, stire de la primeur de son


information.

— Et c’est quoi ta menterie ? ironise-t-elle.

— Emile est amoureux de la belle Lucie.

On peut dire que ¢a c’est une dréle de nouvelle!


Emile, le garcon de ferme si joyeux et plein d’en-
train, est devenu triste et taciturne. C’est qu’il est
amoureux de la belle Lucie, la fille du notaire. Rose et
Michel essayent de l’aider.

Eh oui! le bruit s'est repandu comme une trainée de


poudre, et il a suffi pour cela qu’Emile, dans un déchirant
sanglot, se confie 4 monsieur Raoul, le propriétaire du
magasin général. Aussitdt, chacun des clients, avec la
commande d’épicerie emballée, recoit en prime la révélation
qui fait sourire les uns et s’esclaffer les autres. La nouvelle
se révélant distrayante et le village n’étant pas grand, elle
en fait le tour en quelques heures a peine.
—— LEmile, vous savez, le garcon de ferme des
Lacombe, celui qui est si laidsavec son front bombé et ses
oreilles en portes de grange, eh bien, voyez-vous, il est
amoureux, Si, Si, je vous assure, et vous savez de qui?
Non? De la belle Lucie, oui, elle-méme, la fille du notaire.
Vous vous rendez compte?

Et comme cela va de soi, une seule personne est dans


lignorance de cet état de fait: la belle Lucie, devant
laquelle on évite soigneusement d’aborder le sujet que
certains jugent amusant et que d’autres considérent
comme scandaleux.
Les seules exceptions sont Rose et Michel qui ont de
la peine pour le malheureux Emile. Depuis que celui-ci a
rencontré la jeune fille sur la rue principale, il a soudaine-
ment changé. Plus de taquinerie, finies les chansonnettes
et les plaisanteries et son appétit s’est tari 4 tel point qu'il
ne se nourrit plus que par habitude. Et il passe le plus
clair de son temps a guetter de loin la maison du notaire
située a la sortie du village, espérant entrevoir ne serait-
ce qu'un instant Lucie, ou alors en de longues promenades
dans les bois, solitaire, le regard dans le vague.

— J] faut faire quelque chose! s’exclame Rose.

— Qui, mais quoi? demande son frére en écartant les


bras en signe d’impuissance.

D’un bond, elle se léve. Ses joues sont rouges d’exci-


tation. ;
— Je sais. Tu es d’accord ?
%
Michel hésite, mais sachant d’avance que sa soeur
finit toujours par le convaincre d’adhérer 4a ses idées, il
acquiesce sans discuter.

_ Mais quelle idée a donc trouvée Rose pour aider


Emile?

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Emile, le garcon de ferme si joyeux et plein d’en-
train, est devenu triste et taciturne. C’est qu’il est
amoureux de la belle Lucie, la fille du notaire. Rose et
Michel essayent de l’aider. Et Rose a trouvé une idée
pour le faire.

Du jour au lendemain, la belle Lucie se met a recevoir


du courrier. Quotidiennement, elle trouve une lettre sur
laquelle sont tracés quelques mots simples disant que
quelqu’un pense a elle, est bouleversé par sa beauté et son
charme. Un court poéme termine chaque missive qui est
signée d’une simple lettre: E.

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Le notaire et son épouse s’en amusent et Lucie aussi
au tout début. Mais, les jours ‘passant et les lettres se
succédant, elle se met as’interroger sur l’aimable inconnu
qui passe devant sa porte tard dans la nuit ou tot al’aube,
car, malgré ses efforts pour le surprendre, elle ne le peut.
Kt de plus en plus, elle se met 4 penser a lui, se surprenant
a lavoir en téte a longueur de journée, s’étonnant de
soupirer le soir dans son lit en sachant que malgré le froid
de lhiver, il vient déposer son offrande d’admiration
quotidienne 4 sa porte.

Un matin, elle ne trouve rien, pas le moindre petit


message. Aussit0t son coeur se met a battre fort. Elle
passe une longue journée d’inquiétude et a du mal a
fermer loeil le soir. Ce n’est que le lendemain, 4 la vue
d'une enveloppe coincée dans la boite 4 lettres, qu’elle
retrouve son sourire.
Quant a Emile, il fait de plus en plus grise mine.
L’automne est passé, ’hiver acommencé, les fétes de Noél
s’achévent dans la joie, et le Nouvel An est souhaité avec
allégresse. Mais Emile se referme de plus en plus, exécutant
de son mieux louvrage demandé, mais se refusant a
toute discussion, préférant demeurer seul avec l'image de
celle qu'il sait inabordable.

Lucie ne manque évidemment pas de galants qui se


déclarent, l’invitent 4 sortir, lui font de menus cadeaux.
Mais en aucun d’eux, elle ne devine celui qui signe ses
lettres par un E.

Mais qui est-il? ne cesse-t-elle de se demander de


plus en plus souvent.
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Emile, le garcon de ferme si joyeux et plein d’en-


train, est devenu triste et taciturne. C’est qu’il est
amoureux de la belle Lucie, la fille du notaire. Rose et
Michel essayent de l’aider. Et Rose a trouvé une idée
pour le faire. La belle Lucie se met a recevoir des
lettres d’un inconnu qui signe d’un simple E ses
missives.

Debout prés de la fenétre, Rose regarde la neige


tomber 4 gros flocons. A ses cétés, Michel souffle sur la
vitre et trace du bout du doigt un E dans la buée.

— Qu’est-ce qu’on écrit dans la lettre d’aujourd’hui?


demande-t-il.

Rose ne répond pas.

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— Tu m’écoutes, dis?
— Qui, mais je crois qu'il esttemps de compléter mon
plan.
— Comment ¢a?
— Le jour de la Saint-Valentin est dans une semaine.
— Et alors? s’impatiente Michel. -
— Ilyaun bal dans la salle des fétes et tout le village
y assiste comme dhabitude.
Michel devient pensif.
— Je me demande bien ce que signifie la féte de la
Saint-Valentin...
Rose hausse les épaules.
— Mais c’est la féte des amoureux et de l’amitié. Si
quelqu’un aime secrétement une personne, c’est le jour
choisi spécialement pour le lui faire savoir. C’est la méme
chose si tu veux devenir ami avec quelqu’un.
— Mais ga, je le sais. Je veux dire d’oli est-ce que ¢a
vient, quand est-ce que ca a commencé?
— Viens voir, j'ai un livre 4 ce sujet dans ma chambre.
Ils vont dans la chambre de Rose qui prend un livre
rangé dans sa bibliothéque: «La Féte de la Saint-
Valentin ». \
Elle Pouvre et commence alire:

— «La Saint-Valentin a des origines qui remontent


trés loin dans l'histoire du monde. On raconte que déja du
temps des Romains, on célébrait vers le 15 février de
chaque année la “Lupercalia”. Cette féte avait pour but de
souligner l’amour dont avait fait preuve la louve qui avait
adopté Rémus et Romulus, les deux fréres Jumeaux fon-
dateurs de Rome, la capitale de I’Italie. A cette occasion,
lesjeunes filles déposaient leurs noms dans une urne. Des
jeunes hommes venaient ensuite piger, 4 tour de role, le
nom de celle qui allait devenir leur “amie de coeur” pour le
reste de l’année. Vers la fin du IITé siécle, lEglise catholique,
encore toute jeune, s’inquiéta de la popularité de cette
féte paienne et, ne pouvant la faire disparaitre, puisqu’elle
était beaucoup trop populaire, décida de lui donner pour
patron un saint martyr dont la féte tombait.en février.
C'est ainsi que saint Valentin fut choisi pour patronner la
féte des amoureux. Au Moyen-Age, cette belle féte s'imposa
définitivement dans les moeurs. »
— Eh bien! fait Michel, bouche bée. .
— Attends, ce n’est pas fini: « A cette époque, la
coutume populaire voulait que les oiseaux se trouvent un
partenaire le 14 février. Voulant sans doute les imiter, les
hommes prirent alors ’habitude d’embrasser, a la Saint-
Valentin, la premiére jeune fille rencontrée ce jour-la. »
Michel pouffe de rire.
— Ils sont fous.
— Et pourquoi donc? Je trouve cette tradition amu-
sante.
— Mais quel est ton plan pour la Saint-Valentin ?
— Ce serait trop long a t’expliquer, mais fie-toi a moi.
— Comme d@habitude, soupire Michel.

18
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;
— Bon, d’accord, arréte de ronchonner et écoute.
Voila ce qu’on va faire.

Mais que vont donc faire Rose et Michel? Quel est


leur plan? Mystére!
Emile, le garcon de ferme si joyeux et plein d’en-
train, est devenu triste et taciturne. C’est qu’il est
amoureux de la belle Lucie, la fille du notaire. Rose et
Michel essayent de l’aider. Et Rose a trouvé une idée
pour le faire. La belle Lucie se met a recevoir des
lettres d’un inconnu qui signe d’un simple E ses missives.
Et voila que la féte de la Saint-Valentin approche.

Le lendemain, Lucie lit et relit avec une attention


particuliére le message qu'elle trouve asa porte: « J’/espére
que vous irez au bal de la Saint-Valentin. J’y serai aussi.
Vous me reconnaitrez a “l’étincelle du paradis” que j’aurai
dans les yeux. Signé E. »

Une intense émotion se saisit d’elle et elle doit s’asseoir,


de peur de défaillir. Enfin elle va le rencontrer celui qui
depuis plusieurs mois fait battre son coeur!

Et elle se met 4compter les heures quilaséparent du


bal annuel.

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La veille du fameux jour, aprés le souper, Emile se
retire dans sa chambre. Il a 4peine touché a son assiette
et son allure est de plus en plus chagrine. A peine a-t-il
fermé sa porte que de petits coups y retentissent. I] ouvre.
C’est Rose et Michel. Ils semblent tout excités.

— Nous avons un message pour toi..., dit Rose en


entrant, suivie de son frére.

Emile ’écoute a peine. Il vas’affaisser dans un fauteuil


au coin de la piéce. Les deux enfants s’approchent.

—... De la part de Lucie, ajoute Michel.

Emile demeure un moment inerte, comme foudroyé,


puis il léve des yeux humides vers eux.

— De la part de qui? balbutie-t-il.

— Lucie, la fille du notaire. Nous l’avons rencontrée


cet aprés-midiet elle nous ademandé situ allais au bal de
la Saint-Valentin.

— Elle a dit quelle aimerait bien que tu sois 1a,


poursuit Michel.

Emile semble abasourdi. II fixe les enfants a tour de


role plusieurs fois a travers les larmes qui embuent ses
yeux.

— Crest vrai? C’est vrai qu’elle a dit ca? réussit-il a


demander malgré sa gorge nouée.

— Oui, dit Rose, et elle nous asuppliés de te remettre


cette tablette de chocolat. Ou plutét cette moitié, car elle
en a gardé un morceau. —

Emile tend une main tremblante et prend le morceau


de friandise. Il le regarde avec attention puis sourit.
®

22
— Ilfaut mettre un bel habit, Emile, conseille Rose en
poussant son frére vers la porte, et bonne nuit.

— Bonne nuit, Emile.

— Bonne nuit, les enfants.

En guise de nuit, celle d’Emile est blanche. II n’arrive


pas a fermer I’oeil, arpente sa chambre des centaines de
fois, guette le lever du soleil alors qu’il fait encore sombre
a lhorizon. Et malgré tout, l’aube le retrouve frais et
dispos, et méme guilleret. La mélancolie qu'il traine depuis
des semaines s’est miraculeusement évanouie.

Sacré Emile!

~ peuxtume ee. |

- Qui a ec écrit i toute leslettres


Et quia acheté latablette de chocolat y

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Emile, le garcon de ferme si joyeux et plein d’en-
train, est devenu triste et taciturne. C’est qu’il est
amoureux de la belle Lucie, la fille du notaire. Rose et
Michel essayent de l’aider. Et Rose a trouvé une idée
pour le faire. La belle Lucie se met a recevoir des
lettres d’un inconnu qui signe d’un simple E ses missives.
Et voila que la féte de la Saint-Valentin approche. Rose
et Michel disent 4 Emile que la belle Lucie aimerait
bien qw’il soit présent au bal du village. Emile en est
tout ému.

Depuis plusieurs années, la municipalité organise un


bal a l’occasion de la Saint-Valentin. La salle des fétes est
décorée de ballons multicolores et de guirlandes et une
estrade est aménagée pour l’orchestre. Les gens viennent
nombreux, ceux du village et aussi ceux qui habitent les
hameaux et la campagne alentour.

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La salle est déja pleine et la féte bat son plein lorsque
Lucie arrive. Les regards se tournent vers elle, admiratifs.
Lucie est merveilleusement belle dans sa toilette neuve et
sa chevelure admirablement coiffée. Elle rayonne de splen-
deur. Elle va s’asseoir sur une des chaises qui longent le
mur. Aussitot les jeunes gens s’approchent d’elle, ’un lui
langant un compliment, lautre linvitant 4 une danse
qu'elle refuse. Elle les dévisage un a un et ne reconnait en
aucun celui qui a pu lui écrire de si belles lettres et de si
émouvants poémes. Tous ces garcons sont chahuteurs et
banals dans leur conduite.
Cependant, Emile, accompagné par Rose et Michel,
sen vient dans une charrette le long du chemin. Depuis
qu’ils ont quitté la ferme, Rose n’‘a pas cessé de parler.

— Tu sais, Emile, tu es trés beau dans ton habit.


Lucie va étre contente de te voir. Et je crois bien qu'elle est
trés amoureuse de toi.

; Emile fait claquer le fouet et le cheval allonge le pas.


Emile a hate d’arriver. I] rayonne de joie.

... peux-tu me dire ?


Qv
Pourquoi la belle Lucie refuse les
Qa
C
invitations a danser des jeunes gens ?
Pourquoi Emile a-t-il hate d’arriver a la
salle de bal?
—_
Emile, le garcon de ferme si joyeux et si plein
d’entrain, est devenu triste et taciturne. C’est qu’il est
amoureux de la belle Lucie, la fille du notaire. Rose et
Michel essayent de l’aider. Et Rose a trouvé une idée
pour le faire. La belle Lucie se met 4a recevoir des
lettres d’un inconnu qui signe d’un simple E ses missives.
Et voila que la féte de la Saint-Valentin approche. Rose
et Michel disent 4 Emile que la belle Lucie aimerait
bien qu’il soit présent au bal du village. Emile en est
tout ému. La belle Lucie est arrivée au bal. Rose,
Michel et Emile y entrent a leur tour.

Lorsqu’ils entrent dans la salle, Emile a un mouvement


de recul devant tous ces gens qui dansent, parlent haut et
rient fort.

— Allons, Emile, n’aie pas peur, viens, dit Rose en lui


prenant la main et en la serrant fort.

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Elle repére Lucie, lache la main d’Emile et court vers
elle. Elle se penche vers son oreille et murmure: « Le voila,
il arrive ». %
‘“

— Qui donc? s’étonne Lucie.

— Celui qui a l’étincelle de paradis.

Rougissante, Lucie léve son regard et voit Emile. Tout


d’abord, elle est surprise de sa maigreur,ses larges oreilles
et son air un peu gauche. Une vague déception monte peu
a peu en elle pendant qu’elle détaille son accoutrement si
peu élégant. Mais aussitdt elle croise son regard et ce
qu'elle y voit déferle en elle en une douce chaleur: il
projette une telle admiration, une telle sincérité, qu’elle
regrette aussitot sa premiére réaction.

Ainsi donc, c’est lui qui, jour aprés jour, a rédigé en


poémes sa silencieuse vénération envers elle. Et c’est
alors qu'elle la voit distinctement cette étincelle de paradis
qui luit rien que pour elle, cette étincelle de paradis dans
les yeux d'Emile, le garcon de ferme.

Elle se léve et s'approche du jeune homme figé d’émo-


tion. Elle lui prend la main et lentraine sur la piste de
danse. Et tout le monde, ébahi, se met a contempler cette
scéne inattendue. Emile et Lucie dansent, les yeux dans
les yeux, un sourire attendri sur les levres.

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— Tu pleures? demande Michel a sa soeur.
— Moi? Mais non, idiot, s’offusque Rose en s’essuyant
les yeux. \
\

— Et si ton plan avait échoué, ricane Michel.


— Impossible! rétorque Rose en lui donnant une
tape sur le ventre.
— Ah! Et comment le savais-tu ?
— Ca, c’est un secret et tu es trop petit pour le savoir.
Michel hausse les épaules.
— Mais toi aussi, tu es aussi petite que moi, rétorque-
t-il.
— Oui, mais ce n'est pas pareil. Moi, je suis une fille.

y XX
.. peux-tu me dire?
ee) Pourquoi la belle Lucie est-elle tout
d’abord décue a la vue d’Emile?
Et pourquoi ensuite change-t-elle d’avis
| a son sujet?
Que penses-tu de la féte de la Saint-
Valentin ?

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