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Eugene Oneguine - Tchaikovski
Eugene Oneguine - Tchaikovski
Personnages LA NIANIA
Comme une gravure de mode!
MADAME LARINA, propriétaire terrienne
LENSKI, fiancé d'Olga MADAME LARINA
EUGÈNE ONÉGUINE, son ami Vêtue au goût du jour et belle!
TATIANA et OLGA, ses filles
LE PRINCE GRÉMINE, vieux général LA NIANIA
F!LIPIEVNA, nourrice de Tatiana Vêtue au goût du jour et belle!
ZARETZKI
MADAME LARINA
MONSIEUR TRIQUET, un Français
Un jour, sans m'avoir consultée...
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LA NIANIA
On vous a conduite à l'église,
Et puis, bientôt,
ACTE I Notre maître est venu s'installer ici.
MADAME LARINA
PREMIER TABLEAU J'ai tant pleuré les premiers mois,
J'ai failli réclamer le divorce...
La scène représente le jardin de la propriété des Et puis, je me suis occupée du ménage,
Larine. La porte qui donne sur la terrasse est ouverte. Je me suis adaptée, j'ai été heureuse...
Mme Larina. aidée de la nourrice, prépare des confitures.
Tatiana et Olga chantent en duo à l'intérieur de la mai- LA NIANIA
son. Vous vous êtes occupée des soins du ménage,
Vous vous ètes adaptée, vous avez été heureuse.
N°1. Duo et quatuor
Dieu merci!
MADAME LARINA (On entend le choeur des paysans qui peu à peu se rap-
C'était un fier dandy, proche.)
Gros joueur et sergent de la garde!
N°2. Chœur et danse des paysans
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- Médée -
2
- Médée -
Qui luit sur l'absurde firmament!
MADAME LARINA
Mais oui! LENSKI
Ah, mon ami,
TATIANA Nous sommes encore plus dissemblables
Il n'est pas seul... Que la vague et le roc, la poésie et la prose,
L'onde et la flamme!
MADAME LARINA
Qui cela peut-il être? TATIANA
L'heure est venue et mes yeux s'ouvrent!
LA NIANIA (elle accourt suivie d'un serviteur) C'est iui, c'est lui - je l'ai reconnu!
Madame, c'est Monsieur Lenski, Hélas, plus de repos pour moi,
En compagnie de Monsieur Onéguine! Ni la nuit ni le jour
Son image chérie
TATIANA (elle veut s'enfuir mais M" Larina la retient) Occupera toutes mes pensées!
Je préfère partir! La flamme ardente de l'amour
Va dévorer mon âme!
MADAME LARINA
Où cours-tu, Tania? OLGA
On te critiquera!... Seigneur, Je savais bien
Mon bonnet est tout de travers! Que l'apparition d'Onéguine
Allait faire grande impression
OLGA (à Mme Larina) Et intriguer tous nos voisins!
Demandez qu'on fasse entrer! Tous vont se poser des questions,
Avancer des hypothèses,
MADAME LARINA (au serviteur) Plaisanter non sans méchanceté
Fais vite entrer! Et voir en lui le futur de Tania
LENSKI TATIANA
Pourquoi? Parfois je me promène en rêvant...
ONÉGUINE ONÉGUINE
J'aurais choisi la première, A quoi donc rêvez-vous?
Si j'étais poète, comme toi!
Olga a un visage inerte: TATIANA
On dirait la madone de Van Dyck, La rêverie est ma compagne
Toute ronde, comme la lune stupide Depuis que j'étais tout enfant...
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- Médée -
Et, certes, il ne pouvait mieux faire!
ONÉGUINE Puisse son exemple servir aux autres,
Vous aimez la méditation; Car si vous saviez comme il est pénible
Jadis, j'ai été comme vous... De veiller un malade jour et nuit,
Sans jamais le quitter d'un pas!
(Oneguine et Tatiana s'éloignent de l’autre côté du
jardin, tandis que Lenski et Olga reviennent.) LA NIANIA
Ma chère colombe marche à pas lents,
LENSKI Baissant la tête.
Je vous aime, Olga, Elle est si timide!... Hé,
Comme seule l'âme d'un poète Ce jeune seigneur l'aurait-il troublée?...
Est encore capable d'aimer!
Partout, toujours, la même image, (Elle s'éloigne. l'air pensif)
Le même songe, un seul désir
Et une seule peine d'amour! DEUXIÈME TABLEAU
Enfant, je t'avais aimée,
Avant même de connaitre les tourments du cœur, N°8. Introduction et scène de la nourrice
J'ai été le témoin ému
De tes jeux d'autrefois! La chambre de Tatiana, sobrement meublée; quelques
Ces jeux, auxquels je prenais part chaises de bois, peintes en blanc à l'ancienne mode et
Sous les grands arbres du jardin... recouvertes d'indienne, des rideaux de la même étoffe et.
Ah je t'aime! au-dessus du lit, des livres. Un miroir est posé sur la
Je t'aime comme seule l'âme d'un poète commode. Devant la fenêtre, une table, une plume. En lon-
Est encore capable d'aimer! gue robe de nuit blanche, Tatiana, pensive. est assise
Tu remplis tous mes rêves,
devant le miroir. La nourrice est auprès d'elle.
Tu es mon seul désir,
Tu es ma joie et ma peine!
Je t'aime, je t'aime, LA NIANIA
Et jamais rien, Assez bavardé!
Ni l'éloignement, Il est temps de dormir.
Ni le bruit d'une fête Demain, je te réveillerai pour la messe.
Ne sauront dégriser une âme Dors vite, Tania!
Qui brûle d'amour pour toi!
TATIANA
OLGA Nourrice, j'étouffe
A l'ombre de ces grands arbres, Ouvre la fenêtre et viens t'asseoir ici.
Nous avons grandi côte à côte...
LA NIANIA (ouvrant la fenêtre)
LENSKI Tatiania, qu'as-tu donc?
Je t'aime!
TATIANA
OLGA De la peine...
T'en souvient-il, du temps de notre enfance, Parle-moi de l'ancien temps.
Nos parents nous avaient déjà
Promis l'un à l'autre! LA NIANIA
De quoi, Tafia ?... Jadis
LENSKI Je connaissais bien des contes
Je t'aime! Je t'aime! Et de vieilles légendes
Pleines de méchants esprits
Et de pures jeunes filles...
(Sur la terrasse où la nuit peu à peu tombe, Mme Lari-
Mais j'ai tout oublié depuis:
na parait) Je me fais vieille.
Je n'ai plus de mémoire!...
N"7. Scène finale
TATIANA
MADAME LARINA Nourrice, parle-moi
Ah! vous voilà! Où donc est Tania? De ton propre passé:
As-tu été amoureuse?
LA NIANIA
Elle doit se promener avec notre hôte LA NIANIA
Au bord de l'étang. Je vais l'appeler. Fi donc, Tania! De mon temps,
On ne parlait jamais d'amour!
MADAME LARINA Sinon, feu ma belle-mère
Dis-lui qu'il est grand temps M'aurait gaillardement corrigée!
De rentrer. Je gage que nos invités
Meurent de faim! TATIANA
Mais alors, comment t'es-tu mariée?
(La nourrice sort)
LA NIANIA
MADAME LARINA (à Lenski) Selon la volonté de Dieu! Mon Ivan
Entrez, je vous prie. Était encore plus jeune que moi,
Or, j'avais treize ans!
LENSKI Deux semaines de suite, la marieuse
Nous vous suivons! Est venue voir mes parents,
Et puis, un jour, mon père m'a bénie!
(On voit apparaitre Onéguine et Tatiana suivis de la J'en ai pleuré de peur!
nourrice qui essaie d'écouter leur entretien. Tout en On m'a fait une belle tresse
traversant la scène, Onéguine chante. Tatiana est trou- Et conduite à l'église en chantant...
blée) Et je me suis retrouvée dans une autre famille...
Tu ne m'écoutes pas?...
ONÉGUINE (à Tatiana)
Mon oncle connaissait les usages: TATIANA
Une fois tombé gravement malade, Nourrice, nourrice,
Il ne tarda pas à rendre son âme, Je souffre tant!
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- Médée -
Je suis au bord des larmes! Elle me parlait dans mon silence,
Lorsque je secourais les pauvres
LA NIANIA Ou allais prier pour dissiper
Mon enfant, tu es malade! La tristesse de mon âme...
Que le Seigneur te protège! Et dans mes nuits silencieuses,
Vite, de l'eau bénite! N'était-ce point toi qui venais
Tu es toute brûlante!... Te pencher à mon chevet,
Pour me parler doucement à l'oreille,
TATIANA (hésitante) Me chuchoter des mots d'amour,
Je ne suis pas ... malade... Des mots d'amour et d'espoir?...
Nourrice... j'aime... je suis amoureuse... Qui es-tu? Mon bon ange
Laisse-moi, laisse-moi seule... Ou bien un cruel tentateur?
Je suis amoureuse... Oh, dissipe mes doutes!
Ou bien tout cela est-il vain,
LA NIANIA Mirages et fantômes d'un trop jeune cœur,
Comment cela? Et ma destinée serait tout autre?...
Ah! qu'importe! Je livre mon sort
TATIANA Entre tes mains,
Va, nourrice, laisse-moi seule. En versant des larmes
Donne-moi une plume, du papier Et te conjurant de m'aider...
Et approche la table... Je dormirai bientôt... Oh! oui, je te supplie!...
Je suis seule, si seule,
LA NIANIA Et nul ne me comprend!
Bonne nuit, Tania... Ma raison m'abandonne
Et je dois périr en silence!
(Elle sort.) Je t'attends!
Je t'attends! Un mot,
N°9. Scène de la lettre
Un seul mot d'espoir!
Ou bien qu'un reproche mérité
Mette fin à mes rêves!
TATIANA
J'ai fini! J'ai peur de me relire!
Qu'importe si je cours à ma perte! J'ai honte et j'ai peur!
Pleine d'un fol espoir, Mais je fais confiance
J'appelle un bonheur inconnu, A son sentiment de l'honneur!
Je découvre la volupté de vivre!
Je bois le poison des désirs,
N°10. Scène et duo
Des rêves délirants me poursuivent.
Partout, partout, je le revois.
Partout, il est présent! (Tatiana s'approche de la fenêtre et tire le rideau.
Non, ce n'est pas cela, je recommence... Le jour envahit la pièce)
(Elle déchire la lettre.)
Mon Dieu! Mon Dieu! Qu'est-ce que j'ai?... TATIANA
Je ne sais par quoi commencer... Oh! il fait jour! Tout s'éveille.
Je vous écris - c'est tout vous dire! Et le soleil se lève...
Que pourrais-je ajouter? J'entends le chalumeau du pâtre
A présent, il dépend de vous Dans le silence...
De me châtier par votre dédain! Et moi.. et moi!...
Mais non! pitié pour ma détresse,
Ne me repoussez pas, (Entre la nourrice)
Ayez pitié de moi!
Au début, je voulais me taire. LA NIANIA
Croyez-le: vous n'auriez jamais rien su Il est temps, mon enfant! Debout!
De ma honte... Mais tu es prête, ma beauté!
Non, jamais ! Ma colombe matinale!
Je m'étais juré de garder secret Hier au soir, tu m'as fait peur,
L'aveu d'une âme en délire... Mais, Dieu merci, te voilà bien alerte,
Hélas, je ne peux plus me taire! Il ne reste plus trace de ta tristesse,
Que mon destin s'accomplisse! Et tu es belle comme une fleur!
Courage! Il saura tout!...
Pourquoi, pourquoi être venu TATIANA
Troubler ma solitude?... Nourrice, rends-moi un service...
Je n'aurais pas connu ce tourment
D'une jeune âme découvrant l'amour. LA NIANIA
Qui sait, avec le temps, Bien volontiers... Ordonne...
Peut-être aurais-je trouvé un compagnon,
Serais-je devenue sa fidèle épouse TATIANA
Et la vertueuse mère de ses enfants?... Ne vas pas croire... non, non...
Un autre que toi? ... Oh! non, jamais, Vois-tu... Oh, ne refuse pas!
Jamais je ne l'aurais accepté
Le destin en a décidé: je suis à toi, LA NIANIA
Telle est la volonté du ciel! Je te le promets devant Dieu!
Toute ma vie n'a été que l'attente
D'une rencontre avec toi. TATIANA
C'est Dieu lui-même qui t'envoie: Sans rien dire à personne,
Tu es mon compagnon jusqu'à la mort! Demande à ton neveu d'aller porter
Tu m'apparaissais dans mes songes Cette lettre à 0... à notre voisin...
Et je t'aimais avant de t'avoir vu, Mais surtout qu'il n'en souffle mot
Ton doux regard m'attirait, A personne!
Et ta voix résonnait dans mon âme... Et qu'il ne cite pas mon nom...
Il y a longtemps... Non, non ce n'était pas un songe...
Tu es entré... je t'ai reconnu, LA NIANIA
Et, de tout mon cœur enflammé, A qui faut-il porter la lettre?
Je me suis écriée: c'est lui! Tu vois, je deviens vieille et sotte!
C'est lui! Nous avons beaucoup de voisins:
Ta voix m'était familière: Comment veux-tu que je devine?
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- Médée -
Chez qui faut-il aller? Explique-toi. entendant les pas d'Onéguine.)
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- Médée -
(Onéguine danse avec Tatiana. A ce moment tous les LENSKI (il s'approche d'Olva qui vient de danser avec
danseurs s’arrêtent et observent le couple.) Onéguine)
Ai-je vraiment mérité cette raillerie?
DAMES MÛRES Olga, pourquoi etes-vous si cruelle?
Voyez, voyez tous ces jeunes lions Qu'ai-je donc fait?
Qui s'adonnent à la danse!
OLGA
SECOND GROUPE Je ne vois pas
Il serait grand temps... Ce que vous pouvez me reprocher!
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- Médée -
LENSKI
Il est charmant!... Olga, LES CONVIVES
Tu ne m'aimes donc plus ! Bravo, bravo, bravo, monsieur Triquet!
Votre couplet est admirable
OLGA Et si joliment chanté!
Tu es étrange!
N°15. Mazurka et scène
LENSKI
Tu ne m'aimes plus... LE LIEUTENANT
Veux-tu danser Le cotillon avec moi? Tous à vos places
Le cotillon commence!
ONÉGUINE Je vous en prie
Non, avec moi!
Vous l'avez promis... ONÉGUINE (il fait un tour de danse avec Olga, la fait as-
seoir, puis, comme s'il venait d'apercevoir Lenski, se
OLGA (à Onéguine) tourne vers lui)
Et je tiens parole! Tu ne danses pas, Lenski?
(à Lenski) Tu es là comme un Childe Harold!
Votre jalousie mérite un châtiment! Qu'as-tu donc?
LENSKI LENSKI
Olga!... Moi? Je n'ai rien!
J'admire quel merveilleux
OLGA Ami tu fais!
En aucun cas!
(Mr Triquet. entouré de jeunes filles, apparaît au ONÉGUINE
fond le la scène.) Quoi donc?
Regardez. En voilà des nouvelles!
Voilà monsieur Triquet Pourquoi es-tu fâché?
ONÉGUINE LENSKI
Qui est-il? Moi, fâché?... Pas le moins du monde!
J'admire ton jeu
OLGA Et ta façon mondaine
Un voisin qui vit chez les Kharlikov De tourner la tête aux jeunes filles.
Faut-il croire que Tatiana
LES JEUNES FILLES Ne te suffise pas, que par amitié pour moi
Monsieur Triquet, monsieur Triquet, Tu veuilles séduire Olga,
Chantez de grâce un couplet! La troubler, puis rire d'elle?
Ah! l'honnête homme!
TRIQUET
J'ai, en effet, apporté un couplet, ONÉGUINE
Mais où donc est Mademoiselle Larina? Quoi?
Il faut qu'elle soit en face de moi! Mais tu es fou!
Car le couplet est fait pour elle !
LENSKI
(On installe Tatiana au milieu d'un cercle formé par Bravo!
tous les invités. M. Triquet lui chante ses couplets. Tu m'offenses, et ensuite
Elle est toute confuse et veut s'en aller, mais on la Tu me traites de fou!
retient)
(Les danseurs s'arrêtent, les invités quittent leurs
LE CHŒUR DES JEUNES FILLES places et font cercle autour des deux jeunes gens.)
La voilà ! La voilà !
LES CONVIVES
TRIQUET Qu'y a-t-il? Que se passe-t-il?
Aha!
Voilà la reine de ce jour! LENSKI
Mesdames, faites silence, Onéguine,
Je vais chanter! Vous n'êtes plus mon ami
(Avec conviction.) Je ne veux plus vous connaître,
A cette fête conviés Vous êtes un homme
De celle, dont le nom est fêté, Digne de mépris!
Contemplons le charme et la beauté!
Son regard doux et enchanteur LES CONVIVES
Toujours rayonne dans nos cœurs, Quelle surprise!
Ah! quelle joie, et quel bonheur! Ils ont l'air de se disputer
Brillez, brillez, toujours, belle Tatiana! Tout à fait sérieusement!
Brillez, brillez, toujours, belle Tatiana!
ONÉGUINE (il entraîne Lenski à part)
LES CONVIVES Écoute, Lenski, tu as tort!
Bravo, bravo, bravo, monsieur Triquet! Cessons d'attirer l'attention de tous ces gens!
Votre couplet est admirable Je n'ai troublé le repos de personne,
Et si joliment chanté! Et, franchement, je n'ai pas envie
De le faire!
TRIQUET
Nous vous souhaitons d'être heureuse, LENSKI (de plus en plus furieux)
D'être toujours la fée de ces rives, Pourquoi
De n'être jamais triste ou malade! Lui serrais-tu la main
Et, au milieu de vos bonheurs, En lui parlant à l'oreille?
N'oubliez point votre serviteur, Je l'ai vue rire en rougissant...
Ni vos chères compagnes! Que lui racontais-tu?...
Brillez, brillez, toujours, belle Tatiana!
Brillez, brillez, toujours, belle Tatiana! ONÉGUINE
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- Médée -
Écoute-moi, c'est absurde! La jalousie étreint son cœur,
Regarde, on nous entoure ! Mais ce n'est pas ma faute!
Non, ce n'est pas ma faute!
LENSKI (hors de lui) Les hommes se disputent toujours
Que m'importe! Vous m'avez offensé, Et sont prêts à se battre
J'exige réparation! Pour des bagatelles!
LENSKI ONÉGUINE
Sous ce toit! Sous ce toit Taisez-vous ou je vous tue!
Sous ce toit, comme un rêve d'or
J'ai vécu mon adolescence! LES CONVIVES
Sous ce toit, j'ai connu la première joie Quel scandale! Nous n'admettrons pas
D'un amour chaste et tendre ! Qu'ils se battent en duel!
Mais je viens d'y apprendre une autre chose: Ne les laissons pas sortir!
La vie n'est pas un roman, Tenez-les, tenez-les!
L'honneur est un vain mot, Ne les laissez pas sortir!
L'amitié est duperie...
OLGA
ONÉGUINE Vladimir, calme-toi, je t'en supplie!
En toute honnêteté,
Je dois me faire des reproches. LENSKI
Je ne devais pas plaisanter Olga, Olga, adieu à jamais!
Avec cette passion timide.
Je devais me conduire (Lenski sort en courant. Olga se précipite derrière
Comme un homme. Lenski, mais tombe évanouie. Onéguine s'éloigne à la hâ-
Comme un homme de cœur et d'esprit, te.)
Et non pas comme un jouet de préjugés futiles!
LES CONVIVES
TATIANA Ils vont se battre!
Troublée au plus profond de mon être,
Je ne comprends pas sa conduite. DEUXIÈME TABLEAU
Et la jalousie me ronge!
Mon cœur est plein de peine, N°17. Introduction, scène et aria de Lenski
Une main glacée s'est posée sur lui
Et le serre, le serre, me fait si mal La scène représente un moulin à eau, un rideau d'ar-
bres sur la berge d'une petite rivière. Il est encore
OLGA et MADAME LARINA tôt. Le soleil est à peine levé. Au lever de rideau.
Je crains que cette nuit de fête
Lenski et Zaretski, son témoin, attendent Onéguine. Lens-
Ne s'achève par un duel!
ki est assis, pensif, au pied d'un arbre. Zaretski arpen-
LES CONVIVES te la scène avec impatience.
Pauvre Lenski! Pauvre jeune homme!
ZARETSKI
ONÉGUINE Eh bien! Votre adversaire ne vient pas?
Je me suis conduit comme un sot!
LENSKI
LENSKI Il ne tardera plus.
J'ai appris qu'une bien-aimée
Pouvait être belle comme un ange, ZARETSKI
Mais fausse et perverse Son absence me surprend:
Comme un démon! Il est six heures passées
Et je pensais le trouver là!
TATIANA
Je suis perdue, je suis perdue, LENSKI
Mais il m'est doux de périr par lui! Où donc, où donc avez-vous fui,
Je suis perdue, je suis perdue, Heures dorées de ma jeunesse?
Mais je n'ose murmurer! J'interroge en vain l'avenir:
A quoi bon murmurer? L'ombre profonde me le cache!
Il ne saurait me rendre heureuse... D'ailleurs à quoi bon? Le destin est le maitre!
Je suis perdue, je suis perdue, Vais-je tomber, frappé à mort,
Je le sais! Ou serai-je épargné ?...
Le sommeil ou la veille -
OLGA Chaque chose a son temps!
Les hommes ont le sang chaud, Bénis soient le jour et ses soucis,
Ils n'acceptent pas les compromis Bénies soient les ténèbres!
Et finissent toujours par se disputer! Le jour se lèvera,
Le soleil va luire,
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- Médée -
Et moi, je descendrai peut-être rière un arbre.)
Dans l'ombre mystérieuse du tombeau!
Le noir Léthé engloutira ZARETSKI
Jusqu'au souvenir du poète! Maintenant, avancez!
Tous m'auront oublié, mais toi?
Toi?... Toi?... Olga... (Zaretski frappe trois fois dans ses mains. Tout en
Viendras-tu, ô ma bien-aimée, s'avançant de quatre pas, Onéguine lève son pistolet,
Pleurer sur ma tombe précoce? Lenski commence à viser. Onéguine tire. Lenski chancelle
Diras-tu: Il m'a aimée, et tombe en lâchant son arme. Zaretskl se précipite et
A moi seule, il a voué
l'examine longuement.)
L'aube triste de sa vie passionnée?
Olga! Olga! Je t'ai aimée.
A toi seule j'ai voué ONÉGUINE
L'aube triste d'une vie passionnée! Tué?
Olga! Olga!! Je t'ai aimée!
Ma bien-aimée, ma seule amie, ZARETSKI
Viens-tu?... Viens-tu?... Tué!
Oh! viens vers moi! Je suis l'époux!
Vers moi!... Vers moi!... (Onéguine effaré se cache la tête dans les mains.)
Je t'attends, ma bien-aimée,
Viens, oh! viens: je suis l'époux!
Où donc, où donc avez-vous fui, ACTE III
Heures dorées de ma jeunesse?
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- Médée -
D'irritante vanité.
TATIANA (elle parle aux invités qui l'entourent et dési- De calculs sordides -
gne du regard Onéguine dont le prince Grémine vient de Elle rayonne comme un astre,
s'approcher) La nuit, sur un ciel pur.
Qui donc est-ce là-bas, Et m'apparait comme entourée
Avec le prince... Je vois mal... D'un chœur d'anges radieux!
L'amour nous enflamme à tout âge,
LES HOMMES C'est un bienfait pour le jeune homme,
Un faux original, Qui ne fait que découvrir la vie,
Un fou bizarre et triste C'est un bienfait pour l'homme mûr,
Qui rentre de voyage... A la tête grisonnante,
Et endurci par l'existence!
UN GROUPE Onéguine, j'aime Tatiana
Onéguine, de retour parmi nous. Avec l'ardeur de la jeunesse..
Ma vie s'écoulait triste,
TATIANA Puis elle est apparue,
Onéguine? Tel un soleil perçant les nuages,
M'apportant le bonheur, illuminant ma vie...
LES HOMMES
N°21. Scène et arioso d'Onéguine
Vous le connaissez?
GRÉMINE TATIANA
Aha! Tu es resté longtemps absent! Je suis très heureuse...
Attends. Je vais te présenter. Nous nous sommes déjà vus autrefois...
ONÉGUINE ONÉGUINE
Qui est-elle? À la campagne... Il y a longtemps!
GRÉMINE TATIANA
Ma femme! D'où venez-vous? De notre région?
ONÉGUINE ONÉGUINE
Tu es marié? Je l'ignorais! Oh! non, je reviens
Depuis longtemps? D'un long voyage!
GRÉMINE TATIANA
Près de deux ans. Depuis longtemps?
ONÉGUINE ONÉGUINE
Qui est ta femme ? Aujourd'hui même!
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- Médée -
Partout, partout!... TATIANA
Le bonheur était si proche...
DEUXIÈME TABLEAU Si possible!... Si proche!
TATIANA TATIANA
Je souffre tant! De nouveau, Onéguine Le bonheur était si proche...
Se dresse sur mon chemin, impitoyablement... Si possible! ... Si proche!...
Son regard enflammé a troublé mon âme, A présent, mon destin
A ressuscité la passion d'autrefois, Est fixé, et sans retour
Comme si rien ne s'était passé, Je suis mariée, et vous devez
Comme si je n'avais jamais cessé de le voir! Renoncer à moi, je vous en conjure!
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- Médée -
ONÉGUINE
Oh non!
Tu ne peux pas me repousser!
Tu dois renoncer à tout.
A tout, à tout!
Au monde vain, à ton foyer!
C'est le destin qui te l'ordonne!
Ne me repousse pas, je t'en conjure
Tu m'aimes!
Tu ruinerais ta vie!
Tu es à moi, à tout jamais!
TATIANA
Je pars!
ONÉGUINE
Non! Non! Non! Non!
TATIANA
Suffit!
ONÉGUINE
Écoute-moi!
TATIANA
Non, je suis ferme!
ONÉGUINE
Je t'aime! Ah, je t'aime!
TATIANA
Laisse-moi!
ONÉGUINE
Je t'aime!
TATIANA
Adieu à tout jamais!
7ONÉ7GUINE
Tu es à moi!
(Tatiana se retire)
FIN
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