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Le Conseil de l’Europe

En quelques mots…
Cette fiche présente les institutions, le fonctionnement et les objectifs du Conseil de l’Europe
ainsi que de la Cour européenne des droits de l’homme. Il s’agit de comprendre le rôle du
Conseil de l’Europe comme protecteur des valeurs européennes que sont la démocratie, l’Etat
de droit et les droits humains. En présentant l’origine et les grandes étapes historiques du
Conseil de l’Europe, l’objectif est de démontrer le pouvoir d’intervention du Conseil de
l’Europe comme forgeur d’identité européenne, comme créateur de droit international et
comme organisation représentant la « grande Europe » qui englobe tous les membres de l’Union
européenne, mais aussi par exemple la Turquie et – jusqu’en 2022 - la Russie. Il s’agit
d’appréhender à la fois le rôle fondamental que le Conseil de l’Europe a joué dans la
réunification du continent européen après la fin de la guerre froide et son rôle précurseur pour
répondre aux grands défis de la société européenne : cybercriminalité, traite des êtres humains,
violence contre les femmes, biomédecine, etc. Un accent est également placé sur la Convention
européenne des droits de l’homme, qui interdit par exemple l’application de la peine de mort
en toutes circonstances et plus généralement son mécanisme de contrôle assuré par la Cour
européenne des droits de l’homme qui peut être saisie par tout citoyen sur le territoire d’un Etat
membre du Conseil de l’Europe, après avoir saisi le juge national (principe de l’épuisement des
voies de recours internes).

Faits et chiffres

■ Le Conseil de l’Europe est une organisation intergouvernementale créée par le traité de


Londres du 5 mai 1949 ; elle a son siège à Strasbourg. Son objectif est de protéger les valeurs
fondamentales (démocratie, de l’Etat de droit et des droits de l’homme) en Europe. Créé par 10
Etats fondateurs, il s’est élargi jusqu’à 47 Etats. En 2022, la Russie a été exclue après l’agression
de l’Ukraine.
■ En 2023, il abrite 224 traités et conventions internationales.
■ Il est composé d’un Comité de ministres, d’une Assemblée parlementaire, d’un Congrès des
pouvoirs locaux et régionaux et d’un secrétariat général avec 2000 fonctionnaires.
■ Pour contrôler le respect de la Convention européenne des droits de l’homme adoptée en
1950, il dispose d’une Cour européenne des droits de l’homme, qui est composée de 46 juges
et qui a rendu 796 arrêts en 2022.
■ Un Commissaire aux droits de l’homme observe les violations des droits de l’homme en
toute indépendance.

Origines et faits marquants


A la suite de l’appel de Winston Churchill en 1946 à Zurich en faveur des « Etats-Unis de
l’Europe », le Conseil de l’Europe, dont le siège est à Strasbourg, est créé par un traité, signé le
5 mai 1949, à Londres, par 10 Etats membres (Royaume-Uni, France, Benelux, Italie, Irlande,
Danemark, Norvège, Suède). C’est la première organisation européenne qui vise à « réaliser
une union plus étroite entre ses membres ». Son objectif est de défendre les droits de l’homme,
la démocratie parlementaire et la primauté du droit. Dans ce but, il conclut des accords à
l’échelle du continent pour harmoniser les pratiques sociales et juridiques des Etats membres et

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favoriser la prise de conscience de l’identité européenne fondée sur des valeurs partagées et
transcendant les différences de culture.
Dès le départ, le Conseil de l’Europe souhaite englober le plus grand nombre d’Etats
démocratiques en Europe occidentale. Il invite la Grèce et la Turquie à participer aux travaux
et très vite, de nombreux pays sont admis, y compris des pays non-membres de la Communauté
économique européenne (CEE) comme la Suisse, ou des micro-Etats comme le Liechtenstein.
Après la transition démocratique dans les années 1970, le Conseil de l’Europe s’élargit aussi au
Portugal et à l’Espagne et il intègre la Finlande en 1989. Le Conseil de l’Europe oeuvre non
seulement pour la protection des droits de l’homme, mais intervient également de manière
prioritaire dans le domaine de la culture, de l’éducation et de l’identité européenne. Ainsi, il
adopte le drapeau européen avec les douze étoiles sur un fond bleu en 1955, tout comme
l’hymne européen, le prélude à l’ode à la Joie de la 9e symphonie de Beethoven, en 1971, qui
deviennent ensuite les emblèmes de l’Union européenne (à l’époque Communauté Economique
Européenne).

Il crée aussi par exemple un soutien pour les jeunes avec la création de deux centres de la
jeunesse à Strasbourg et à Budapest et un soutien pour le cinéma européen avec le fonds
Eurimages. A la fin des années 1980, un rôle clé se dessine pour le Conseil de l’Europe, celui
d’une organisation paneuropéenne pouvant accueillir les pays de l’Europe centrale et orientale.
Les signes politiques vont en ce sens : Michael Gorbatchev y prononce le 6 juillet 1989 un
discours sur la « maison commune européenne ». Après la chute du mur de Berlin le 9 novembre
1989, le Conseil de l’Europe remplit ce rôle d’ouverture. En 1990, il crée la Commission de
Venise qui devient une instance d’appui à l’élaboration des constitutions pour les nouvelles
démocraties à l’Est. Trois vagues d’élargissement suivent : il accueille d’abord les pays de
l’Europe centrale et orientale et les pays baltes, puis, après 1993, de nombreux pays de l’ex-
Union soviétique, dont notamment la Russie (1996). A partir de 2000, le Conseil de l’Europe
s’élargit aussi aux pays des Balkans, dont le dernier à adhérer est le Monténégro (2007).
A partir de 2009, le Conseil de l’Europe entre également dans une coopération structurée avec
l’Union européenne (UE) autour de trois volets qui visent à une complémentarité : la
coopération politique, la coopération juridique et les programmes de coopération pour des pays
non-membres de l’UE. L’Union européenne doit adhérer à la Convention européenne des droits
de l’homme (CEDH).
Depuis 2022, le Conseil de l’Europe est confronté à une crise, car, pour la première fois dans
son histoire, un Etat membre, la Russie, est expulsé à cause de la guerre qu’elle mène contre
l’Ukraine et la violation des valeurs du Conseil de l’Europe qui s’ensuit.

Les institutions européennes

Le Conseil de l’Europe est une organisation européenne intergouvernementale, composé de six


principaux organes et institutions :
■ Le Comité des Ministres est l’organe décisionnel du Conseil de l’Europe, où siègent les 46
ministres des Affaires étrangères des Etats membres ou leurs représentants permanents à
Strasbourg. Il est présidé à tour de rôle par un des Etats membres pour une durée de six mois et
sa fonction principale consiste à statuer sur l’application des textes juridiques du Conseil de
l’Europe (conventions, chartes, accords partiels). Il peut également adopter des résolutions
politiques sur l’actualité européenne et internationale. Enfin, il veille à la mise en oeuvre des

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arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme. Ses décisions sont pour la plupart prises à
l’unanimité.
■ L’Assemblée parlementaire « délibérante » est composée de 306 parlementaires nationaux
des 46 Etats-membres. En 1949, c’était la première assemblée européenne créée en Europe,
mais son rôle reste aujourd’hui consultatif, car les recommandations et les résolutions adressées
au Comité des Ministres ne doivent pas être prises en compte obligatoirement par ce dernier.
Elle offre toutefois un forum démocratique de débats sur les grands enjeux européens. Comme
toute instance démocratique parlementaire, elle prend ses décisions à la majorité, mais
contrairement au Parlement européen, ses membres ne sont pas directement élus par la
population. L’Assemblée parlementaire élit le Secrétaire Général de l’organisation, le
Commissaire aux droits de l’Homme et les juges à la Cour européenne des droits de l’Homme.
Le président de l’Assemblée parlementaire est élu chaque année parmi ses membres pour une
période maximale de deux sessions. L’Assemblée est composée de cinq groupes parlementaires
et son travail est principalement effectué dans des commissions parlementaires qui participent
à l’élaboration des textes du Conseil de l’Europe.
■ Le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux est créé en 1994 afin de renforcer la
démocratie locale et régionale dans ses 46 États membres. Il est divisé en deux chambres (la
Chambre des pouvoirs locaux et la Chambre des régions) et comprend 612 élus représentant
plus de 150 000 collectivités territoriales. Il peut adresser des recommandations à l’Assemblée
parlementaire et au Comité des Ministres et participe à l’observation des élections régionales et
municipales. Il veille également à l’application de la Charte de l’autonomie locale adoptée par
le Conseil de l’Europe en 1985.
■ Le secrétariat général composé de 2200 fonctionnaires est dirigé par un secrétaire général
élu pour cinq ans par l’Assemblée parlementaire, qui est responsable de la planification
stratégique, de l’orientation du programme d’activités et du budget du Conseil de l’Europe.
■ La Cour européenne des droits de l’Homme a été instaurée sur la base de la Convention
de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH) adoptée à Rome le
4 novembre 1950 et entrée en vigueur en septembre 1953. Elle siège depuis 1999 en
permanence à Strasbourg et est en charge de toutes les étapes de la procédure de contrôle de la
CEDH : de la recevabilité d’une requête à l’arrêt définitif.

Les 46 juges sont élus par l’assemblée parlementaire pour un mandat de six ans. C’est la seule
Cour internationale à laquelle les citoyens européens peuvent s’adresser, car en dehors des
requêtes interétatiques introduites par un Etats membre contre un autre (qui sont plus rares),
l’individu victime d’une violation de ses droits humains par un Etat membre du Conseil de
l’Europe peut saisir la Cour par requête individuelle, après avoir épuisé les voies de recours
offertes dans l’Etat dans lequel il réside.
■ La fonction du Commissaire aux droits de l’homme est créée en 1999 pour attirer l’attention
sur les violations des droits de l’homme en toute indépendance. Ce Commissaire est élu pour
un mandat non renouvelable de six ans par l’Assemblée parlementaire. Il/elle se rend dans les
Etats membres du Conseil de l’Europe pour évaluer la situation des droits de l’homme et adresse
des rapports à ces derniers sur d’éventuelles insuffisances dans le droit et la pratique en la
matière. Il/elle joue également un rôle pour promouvoir l’éducation et la sensibilisation aux
droits de l’homme dans les États membres du Conseil de l’Europe.
■ La Conférence des organisations non-gouvernementales (OING) est composée d’environ
400 ONG qui disposent d’un statut d’association et participent ainsi activement aux travaux du
Conseil de l’Europe. La Conférence crée ainsi un lien entre les Etats membres et les citoyens et
permet de faire entendre la voix de la société civile au Conseil. Cette approche d’une association
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des représentants de la société civile à travers un lien fonctionnel entre le Conseil de l’Europe
et les ONG existe depuis les années 1970 et fait du Conseil de l’Europe une organisation
européenne originale, car c’est la seule qui permet cette participation fonctionnelle.

Le Conseil de l’Europe comprend également des organes et institutions annexes :

■ Les Centres européens de la jeunesse à Strasbourg (1972) et à Budapest (1995) organisent


des séminaires à destination des jeunes et qui sont cogérés par des associations de jeunes en
Europe.
■ La Direction européenne de la qualité du médicament et soins de santé créée en 1974 contrôle
la qualité des médicaments à usage humain ou vétérinaire. Elle définit des exigences de qualité
auxquelles doivent satisfaire les substances pharmaceutiques qui composent les médicaments
pour les 46 Etats membres du Conseil de l’Europe. Elle joue un rôle majeur dans la lutte contre
les médicaments falsifiés en mettant en œuvre la Convention Médicrime.
■ Le Centre européen pour les langues vivantes à Graz créé en 1994 encourage l’excellence et
l’innovation dans l’enseignement des langues et soutient ses Etats membres du Conseil de
l’Europe dans la mise en œuvre de politiques éducatives linguistiques.
■ Le Centre Nord-Sud créé à Lisbonne en 1990 a pour but d’encourager un dialogue entre le
Nord et le Sud et de renforcer la solidarité et la sensibilisation de l’interdépendance mondiale.

Missions principales et principales actions

Le champ d’action du Conseil de l’Europe est très vaste, mais les statuts excluent la défense
qui relève du Pacte atlantique (OTAN). Le Conseil de l’Europe est d’abord créateur de droit :
il élabore des conventions européennes, des chartes et des accords partiels qui sont adoptés par
le Comité des Ministres et ensuite ouverts à la signature et à la ratification des Etats-membres.
Les conventions du Conseil de l’Europe sont élaborées et négociées dans le cadre institutionnel
du Conseil de l’Europe. Dans beaucoup de cas, les conventions sont aussi ouvertes à des Etats
extérieurs et d’autres organisations internationales (notamment l’UE). Le Conseil de l’Europe
associe par ailleurs des pays extérieurs à travers un statut d’observateur créé en 1993 dont
profitent actuellement le Saint-Siège (1970), les États-Unis d’Amérique, le Canada, le Japon
(1996) et le Mexique (1999).
Les droits de l’Homme ou droits humains sont sans aucun doute le champ d’action prioritaire
du Conseil de l’Europe : le 4 novembre 1950, la Convention de sauvegarde des droits de
l’homme (CEDH) est signée à Rome. Elle prévoit un mécanisme pour garantir leur protection,
notamment par la mise en place d’une Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH),
instituée à Strasbourg en 1959. La CEDH a été amendée par 16 protocoles annexes qui ajoutent,
soit de nouveaux droits, soit améliorent la procédure d’instruction des requêtes. Les plus
significatifs ajouts sont d’une part, le protocole n° 11 qui met en place la nouvelle Cour
permanente, le protocole n° 13 relatif à l’abolition de la peine de mort en toutes circonstances
et le protocole n° 14 qui prévoit notamment la création de nouvelles formations judiciaires (à
trois juges) pour les affaires les plus simples ainsi que l’adhésion de l’UE à la CEDH.

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Mais le Conseil de l’Europe intervient également dans de nombreux autres domaines, ce qui est
reflété par la multiplicité des conventions, chartes et accords partiels adoptés depuis 1949 (plus
de 200). Dès 1954, la convention culturelle est signée à Paris, qui est aussi ouverte à des pays
non-membres. Une charte sociale est adoptée en 1961 et en matière de jeunesse, un centre et un
fonds sont créés en 1971-1972. Le Conseil de l’Europe effectue également un travail précurseur
dans de nombreux domaines, dans lesquels d’autres organisations internationales et
européennes n’interviennent que plus tardivement. Par exemple, une première convention sur
la répression du terrorisme est adoptée en 1977, suivie par une convention sur la prévention du
terrorisme en 2005. Pour protéger l’environnement, une première convention est signée à Berne
dès 1979, bien avant toute intervention de la CEE/UE dans ce domaine. Après la fin de la guerre
froide, ce rôle précurseur est renforcé. Des conventions sont ainsi établies, par exemple, en
matière protection des minorités de (1995), dans le domaine bioéthique (1997), contre la
corruption (1999), la cybercriminalité (2001) ou en matière de sport contre le dopage (2002),
les manipulations des compétitions sportives (2014) et la sécurité lors des compétitions
sportives (2016).
En matière de protection des droits de l’Homme, le Conseil de l’Europe ne cesse de compléter
la CEDH par des conventions plus spécifiques, comme la convention de Varsovie contre la
traite des êtres humains (2005), la convention de Lanzarote sur la protection des enfants contre
l’exploitation et les abus sexuels (2007) ou encore la convention d’Istanbul contre la violence
à l’égard des femmes (2011).
Mais tout au long de son histoire, le Conseil de l’Europe promeut également les valeurs de la
démocratie et de l’Etat de droit. L’Assemblée parlementaire organise ainsi régulièrement de
conférences sur les thèmes relatifs à la démocratie et se rend dans les Etats membres pour
observer les élections. Elle est appuyée dans cette fonction pour promouvoir la démocratie
locale et régionale par le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux. Au moment de la transition
démocratique des pays de l’ancien bloc communiste, le Conseil de l’Europe a appuyé celle-ci
par des programmes de formation et d’échange d’expériences. Il y a également annuellement
la tenue d’un forum pour la démocratie à Strasbourg. En ce qui concerne l’Etat de droit, c’est
la Commission de Venise créée en 1990 qui a fourni une expertise pour l’élaboration des
constitutions de nouvelles démocraties. D’abord focalisée sur les pays d’Europe centrale et
orientale, ceux de l’ancienne URSS et de l’ex-Yougoslavie, cette Commission oeuvre
aujourd’hui au niveau international pour des pays extérieurs, par exemple en Afrique ou en
Asie.
En somme, le Conseil de l’Europe effectue un travail de formation à l’éducation et à la
sauvegarde des valeurs fondamentales en Europe ce qui se traduit aussi par des activités en
matière de dialogue interculturel et interreligieux. Il coopère largement aussi avec d’autres
organisations internationales et européennes, et notamment avec l’UE, l’Organisation pour la
sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et l’Organisation des Nations-Unies (ONU).

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