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Diphyllobothrium latum

Nom commun: « botriocéphale1 », « ténia du poisson »


Helminthes, embranchement des Plathelminthes
(ver plat)
Parasite

Caractéristiques et sources
de Diphyllobothrium latum
Principales caractéristiques
microbiologiques

Figure 1.Cycle biologique de Diphyllobothrium latum (d’après


Wicht et col., 2010)

longue de quelques millimètres. Celle-ci s’enkyste dans la musculature


Diphyllobothrium adulte ou les viscères du poisson. L’Homme et d’autres mammifères piscivores
(les anneaux ont une largeur d’environ un centimètre) se contaminent alors en ingérant la chair crue ou insuffisamment cuite de
ces poissons d’eau douce. Une fois dans l’intestin de l’hôte définitif, la larve
Diphyllobothrium est un ver plat rubané (classe des Cestodes, ordre des plérocercoïde grandit de plusieurs centimètres par jour et les premiers
Diphyllobothriidés, famille des Diphyllobothriidés) d’une dizaine de œufs sont émis avec les selles, environ un mois après l’infestation.
mètres qui peut vivre plusieurs années dans le tube digestif de l’Homme. Il existe plusieurs espèces de ce parasite, pathogènes pour l’Homme,
Il est responsable d’une infection parasitaire digestive appelée la mais seule l’espèce D. latum peut être contractée à partir de poissons
diphyllobothriose. d’eau douce métropolitains. Cependant, des cas de D. nihonkaiense
Le cycle biologique du parasite (Figure 1) comprend un hôte définitif2 (espèce du Pacifique) ont été observés chez des consommateurs de
: l’Homme (et d’autres mammifères piscivores) et au moins deux hôtes saumons (Onchorynchus sp.) importés du Pacifique (Canada).
intermédiaires3 : un crustacé planctonique et un ou des poissons d’eau
douce. Lors de conditions environnementales favorables, les œufs
(45 x 65 µm) émis dans les eaux douces avec les matières fécales de
l’hôte définitif terminent leur maturation en 8 à 12 jours puis éclosent
et libèrent un embryon cilié, le coracidium. Celui-ci est ingéré par 1) La dénomination de bothriocéphale ne doit plus être employée car elle correspond au genre de
parasite Bothriocephalus, parasite de l’intestin de nombreuses espèces de poissons et différent
un crustacé microscopique du genre Cyclops ou Eudiaptomus et se du genre Diphyllobothrium.
transforme en larve (dite procercoïde) au sein de la cavité générale. 2) Hôte définitif : hôte qui héberge le parasite adulte.
3) Hôte intermédiaire : hôte qui héberge le parasite à l’état larvaire.
Lorsqu’un poisson carnivore ingère ce crustacé planctonique, cette 4) Zoonose : « maladies, infections ou infestations provoquées par des agents transmissibles
(bactéries, virus, parasites ou prions) se développant au moins chez deux espèces de vertébrés
larve se transforme en un second type de larve (dite plérocercoïde), dont l’Homme » (M. Savey & B. Dufour (2004)

Fiche de description de danger


biologique transmissible par les aliments
Avril 2017
Sources du danger Tableau 2.Principales données épidémiologiques - Mise à jour
juillet 2016.
La source du danger est constituée des poissons carnivores d’eau douce ou
anadromes (c.à.d. vivant aussi bien dans l’eau douce que dans l’eau salée). Nombre de cas
Pays/Région Années/Période
(en moyenne)
Le réservoir est constitué des hôtes définitifs du parasite (Homme, chat,
chien, renard, etc.) et de ses hôtes intermédiaires (poissons carnivores). Lac Léman (France) 2001-2002 24 cas /an
Haute-Savoie (France) 2002-2007 7,3 cas/an
Haute-Savoie (France) 2011-2013 2 cas /an

La diphyllobothriose est une parasitose cosmopolite, toujours présente


en Europe occidentale. Elle est en décroissance dans les pays baltes ou
scandinaves qui constituaient les foyers historiques de la parasitose. Par
contre, elle semble être en émergence dans les zones francophones et
italophones des lacs périalpins où une pêche professionnelle existe
souvent.
Depuis 1987, plus de 200 cas ont été signalés autour des lacs Léman, de
Morat, de Bienne, Majeur, de Côme, d’Iseo et de Garde. Quarante-huit
cas de contamination ont été identifiés sur les bassins versants suisses
et français du lac Léman en 2001 et 2002. Deux études font état d’une
part, d’une moyenne de 7,3 cas/an en Haute-Savoie (lac d’Annecy) (entre
Copyright Dupouy-Camet
2002 et 2007) et de deux cas/ an (entre 2011 et 2013) d’autre part.
Larve plérocercoïde à la surface d’un filet de perche
Rôle des aliments
Voies de transmission Principaux aliments à considérer
Ce parasite atteint les mammifères piscivores et les poissons et est donc
à l’origine d’une zoonose4. Les aliments impliqués sont la chair crue (filets marinés, carpaccio,
La contamination humaine se fait exclusivement par ingestion de etc.) ou les œufs crus de poissons d’eau douce : perche (Perca
chair ou d’œufs de poissons consommés crus ou insuffisamment cuits. fluviatilis), brochet (Esox lucius), omble chevalier (Salvelinus alpinus),
Les œufs émis avec les matières fécales humaines ne sont pas lotte (Lota lota), etc. Quatre à 10 % des filets de perches consommés
directement contaminants. sur les bords du lac Léman sont porteurs du parasite. Les corégonidés
(féras) et, probablement, les salmonidés européens du genre Salmo
sont réfractaires à D. latum. Les salmonidés canadiens du genre
Recommandations à la production primaire Onchorynchus peuvent héberger des larves de D. nihonkaiense.
A priori compte tenu de la complexité du cycle, la parasitose Une étude comparative menée sur deux périodes (2003-2005 et 2011-
n’est pas à même de toucher les élevages piscicoles dans la 2014) sur des filets de perches dans le lac Léman a montré une diminution
mesure où est pratiquée une alimentation maîtrisée5 tout au du parasitisme (taux d’infestation de 4 à 10 % évoluant à un taux <1%
long de la vie en élevage à partir du stade œuf. Ainsi, une avec un intervalle de confiance à 95 % de 0,3 à 1,5 %). L’infestation n’a
étude de 2015 indique l’absence de parasites nématodes été retrouvée ni dans les poissons du lac d’Annecy ni dans ceux du lac du
dans les saumons d’élevage.
Bourget durant la période 2011-2014.

Maladie humaine d’origine Traitements d’inactivation en milieu


alimentaire industriel
Tableau 3.Impact des traitements en milieu industriel
Nature de la maladie (Tableau 1) Traitement Condition Impact
Population sensible 7
Chaleur 65°C
Inactivation des larves
plérocercoïdes
Il n’existe pas à ce jour d’éléments permettant d’affirmer qu’il existe une
population plus à risque d’infections ou de complications. Inactivation des larves
Congélation -20°C / 24h
plérocercoïdes
Salage Sans effet
Relation dose-effet8 Marinage Sans effet
Une seule larve plérocercoïde peut provoquer une infestation.
5) Alimentation uniquement à partir d’aliments transformés et donnée ad libitum
6) Cette anémie par carence en vitamine B12 a pu être décrite en cas d’infestation prolongée,

Épidémiologie multiple et chez des populations dénutries car le ver absorbe cette vitamine.
7) Population sensible : les personnes ayant une probabilité plus forte que la moyenne de
développer, après exposition au danger par voie alimentaire [dans le cas des fiches de l’Anses],
Il n’existe pas de système de surveillance de la diphyllobothriose en des symptômes de la maladie, ou des formes graves de la maladie.
8) Relation entre la dose (quantité de larves ingérées) et l’effet chez un individu.
France et en Europe (hormis en Pologne et dans les pays baltes).
Tableau 1.Caractéristiques de la maladie
Durée moyenne Durée Durée
Principaux symptômes Complications
d’incubation des symptômes de la période contaminante
Manifestations digestives : douleurs Toute la durée de vie du Toute la durée de vie du parasite Anémie mégaloblastique
abdominales, diarrhées parasite dans l’intestin dans l’intestin exceptionnelle6
Signes généraux : asthénie, sensations Létalité nulle
Un mois vertigineuses, hyperéosinophilie

2 Fiche de description de danger biologique transmissible par les aliments / D


 iphyllobothrium latum
• Wicht B, Peduzzi R., Dupouy-Camet J Diphyllobothriose ESKA MAJ
Recommandations aux opérateurs N°1 2010 in Actualités Permanentes en Bactériologie clinique. Section
XIII, chapitre 7 http://congres.eska.fr/pdf/APBC_1_2010.pdf
La cuisson (60°C à cœur) et la congélation telle que décrite
Liens utiles
dans le règlement (CE) n°853/2004 du 29 avril 2004 dans des
conditions de temps et températures précises (- 20 °C en • DPDx - CDC: http://www.dpd.cdc.gov/dpdx/
tous points du produit pendant au moins 24 heures), sont • Expertise parasitologique et identification moléculaire disponibles
les traitements les plus efficaces pour tuer les larves de dans le Laboratoire de parasitologie de l’hôpital Cochin, 27 rue du
Diphyllobotrium latum. Faubourg Saint-Jacques, 75014 Paris
• Reportage de la Téle Suisse Romande sur le danger de manger des
En matière d’hygiène collective, un traitement des eaux poissons crus : http://www.rts.ch/emissions/abe/1375410-poissons-
usées dans des stations d’épuration modernes interrompt crus-ou-peu-cuits-attention-aux-parasites.html
le cycle de transmission.
• FDA :https://www.fda.gov/Food/FoodborneIllnessContaminants/
CausesOfIllnessBadBugBook/
• FAO/OMS : http://www.fao.org/docrep/006/y8705f/y8705f00.htm
Surveillance dans les aliments • Laboratoire national de référence (LNR) des parasites transmis par les
aliments, hormis Echinococcus sp. : Laboratoire de santé animale de
La règlementation européenne et sa déclinaison dans la note DGAL/
Maisons-Alfort, Anses
SDSSA/2014-576 mentionnent l’obligation de réaliser des contrôles
visuels des produits de la pêche, sur la chaîne de production et un tri/
parage/filetage associé pour autant qu’il soit possible. Aucune méthode
normalisée de détection, de dénombrement et de typage n’existe.
L’examen direct des filets coupés en fines lamelles permet d’observer
les larves plérocercoïdes. De plus, l’examen sur une table de mirage
permet une détection efficace des larves plérocercoïdes. En raison
de la présence de larves d’autres parasites proches, une identification
moléculaire est utile pour affirmer le diagnostic d’espèce.

Hygiène domestique
Recommandations aux consommateurs
• L’inactivation du parasite est assurée par :
--une cuisson à cœur (60°C pendant dix minutes
ou 65°C pendant une minute). Une cuisson rose à l’arête
est insuffisante pour inactiver les larves potentiellement
présentes,
--la congélation (-20°C pendant 24h) des poissons dans un
congélateur domestique.
• Les poissons sauvages doivent être consommés après
cuisson ou congélation (-20°C pendant 24h).

Liens
Références générales
• Bonsdorff VonN B. Diphyllobothriasis in man. Academic Press.
Londres, 1977, 189 pp.
• Dupouy-CametJ, Malak Haidar, Eduardo Dei-Cas, Hélène Yera,
Laurent Espinat , Amine Benmostefa, Jean Guillard Cécile-Marie
Aliouat-Denis. Prévalence de l’infestation par Diphyllobothrium latum
de différents poissons des lacs Léman, du Bourget et d’Annecy et
évaluation de l’incidence des cas humains auprès des laboratoires
d’analyse médicale de la région (2011-2013). Bulletin épidémiologique,
santé animale et alimentation, mars 2015, n° 67. https://pro.anses.fr/
bulletin-epidemiologique/PHI0.htm
• Dupouy-Camet J, Peduzzi R. Current situation of human diphyllobothriasis
in Europe. Euro Surveill. 2004 May;9(5):31-5. http://www.
eurosurveillance.org/ViewArticle.aspx?ArticleId=467&LanguageId=2
Version française : http://www.eurosurveillance.org/ViewArticle.
aspx?ArticleId=467&LanguageId=1
• Levsen A, Maage A. Absence of parasitic nematodes in farmed,
harvest quality Atlantic salmon (Salmo salar) in Norway – Results from
a large scale survey. Food Control. Octobre 2016. 68, 25-29.
• Nicoulaud, J., Yera, H., Dupouy-Camet, J., 2005. Prevalence de
l’infestation par Diphyllobothrium latum, chez les perches (Perca
fluviatilis) du lac Léman. Parasite. 12, 362–364.

3 Fiche de description de danger biologique transmissible par les aliments / D


 iphyllobothrium latum

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