ADOLPHE DE ROTHSCHILD
1823-1900
JULIE DE ROTHSCHILD
1830-1907
ADOLPHE ET JULIE DE ROTHSCHILD
ea
PES
a LAST MEDIEVAL
AU MUSEE DU LOUVRE ET AU MUSEE DE CLUNY
Panay
LES OBJET'S DE LA RENAISSANCE
AvTeL ae pren ela
eee
BtLES OBJETS DE LA RENAISSANCE
MUSEE DU LOUVRE
1901
Philippe Malgouyres
lest aussi ditficite de comprendre les intentions d'un collection-
rneur que les ambitions ou les craintes d'un donateur. Ce nies
pas nécessal rement faute de sources, mais peut-étre implement
parce que certaines choses échappent a Vhistolre, Les différents
{estaments conserves d’Adolphe de Rothschild donnent une sorte
‘image en ereux de ses désirs Hen a laiss$ quinze’, depuis un
testament mystique du 2 aod 1874, qui le montre saute de
conserver ses collections dans la famille, 4 celui du 23 janvier
1899, qu fixe les termes de sa donation aux musées du Louvre et
‘de Cluny telle que nous la connaissons ayjour
PREOCCUPATIONS SUR LA TENEUR DE LA DONATION...
La question du destin de ses collections dweuvtes dart apparait
‘oujours parmi ses inquiétuds : ses revicements, es retours, son
ton tantot lyrique, tantOt exigeant montrent bien que la volonte de
{donner était un choix qui niallait pas sans dificultés. Bn novembre
1878, Il décide de léguer aur musée des Arts décoratif,« sll existe
encore jusque-Ia ou d détaut au musée du Leuvre », toutes ses col-
lections, eparties en deux groupes, avant et aprés le xvi sige,
a 6t6 €lu membre du comité directeur de la Société des arts
‘décoratifs quelques mols auparavant mals, peut-étre en désaccord
avec la politique du comité, i en refusa la présidence et proposa
meme de se retier completement. En tout cas, dans le testament
suivant, le 20 janvier 1880, un peu plus d'unan plus tard, tout doit
aller au Louvre, pour étre présenté dans deux salles « A et B » en
respectant la méme division chronologique, I ne sera phas question
des Arts cécoratfs. Lannée 1884 marque un grand recul : par le
testament du S fevrler, I retize les objets postérieurs au Avi sivele
dune éventuelle donation, et le I novembre abandonne tout
projet de libéralité~ « Par le présent codicile fabroge ta dispost-
tion par laquelle /exprimais le désir ma femme la baronne Julie
Caroline de Rothschild de laisse sa mort ma collection d'objets
art au musée du Louvre », Lannée suivante se dessine le profil
particulier de sa donation, constituée des abjets a sujet cheétien
‘a ayant serv! au cultechrétien (testament du 28 septembre 1885),
ne te préiye pas, mals ce cholx est impllene au vu des premiers
projets: seus le objets antérieurs au xvi sce seront concernés,
Cecritere, qui parat singulier, reste une interrogation laneinante,
‘Tous es testaments suivants feront état de cette partle particule
de la collection, en différents termes « objets dat religieux et
Cchrétiens « objets religieux ou servant au Cute, verges, ete.»
Le caractére chrétien ou pas de Ficonographie semb e disparaitee,
mais est bien ce qui a determine le choix, matérialisé parla liste
des objets destinés respectivernent aux musées du Louvre et de
‘Cluny?. Raymond Karehlin va jusqu'a éerire que ly magnifique
collection qu’Adolphe aléguée, mais qu r’était pas visible aupara-
vant, «ne fasait pas vritablement partie de sa collection», Une
Intention patriotique et évergétique est parfois exprlmée aussi;
le 27 novembre 1891, Adolphe écrit: «Je confirme mon legs au
Louvre, cestai-die a la nation a laquelle jai Yhonneur appar
tenir, ma collection dobjets sactés et religieux cesta-dire ce que
Fal de mieux et de plus précieu et que fal jnciqué dans une liste
spéciale, » La collection était peut-éte la plus préciesse a ses yeux
mais, au regard du reste de ses collectlons d'armes, dfarmures, de
meubles, de pelentures anciennes, de porcelaines, et, dire que C'est
‘ce quill avait de mieux est d'une humilité étrange. Le testament
suivant (moins d'un mols plus tard!) souligne son « désir den,
faire jouir tous [ses] concitoyen »
ET JUSQUA SA PRESENTATION
Lanxiété dAdolphe de Rothschild se manifeste asl dans son soucl
de la future exposition de ses trésors, qui doivent étre présentés
ddans les galeries publiques et (..J places dans des vitcines spé
late »;iL alssa cet effet 300000 francs, qul permireat 'amenager
lune salle sous Foul vigilant de fa baronne, Au detour d'une lettre,
nous apprenons qu’elledésapprouvait les colonnes ct les frontons
de Farchitecte Gaston Redon, ne soubaitant que des « ornements
simples mais artistique », Elle avait auparavant fait savor via son
secrétalre*que Iidée de confier la malson André Pastallation de
la collection au musée du Louvre allait Feneontee des volontés,
tu défunt baron, qui» toutes les dernigres années do sa vie stalt
fache” avec M, André » La salle, enrichie d'un plafond en bois
doré et peint acquis pour Foceasion’ ainsi que d'une tapisserie
du xv" slécl', fut install afin de eréer Fatmosphére voulue :« I
fala, en la Gécorant, li conserver un certain caractere "intl
mité [.. un coin de riche et sobre distinction, qui fat comme une
‘oasis au milieu des froideurs des installations administratives »
Eerit Gaston Migeon au moment de inauguration’
265—fi? jaton: Mia
OBJETS SACRES
Thvagtson gc
0
dans les vertes et dans les collections, Nous employons le m
sts libre et si éelectique que cela rest pas surpren
attenclre une vingtaine d’années pout les voir se multiplier
plets, beauccup de ces abjets sont
des assemblages modemnes d’@lements elisparates ; de véritables
plaquettes dans de faux cadres, un beau cadre ancien complete
dun nielle moderne, divers éléments authentiques remontés
ensemble pour eréer un nouvel objet, ete. Is sont putt présents
chez les co
ale des formes, co mb,
Frédéric Spitzer ou Alessandro Castellani, Les deux derniers sont
savants » qui sinéressent a la typolo-
nme Chatles Davillier, Louls Chales T
des collectionneurs marchands qui furent en rapport avec Adolphe
{de Rothschild: cela peut expliquer la présence chez.lul de ces objets
tn pew inattendus. & Yon mest pas sans inquigtude devant certain
entre eux, qui portent parfos des traces trop évidentes «/amélo-
rations apportées par Alfted Andé* ou d’auties, Cela semble avoir
décourage les chercheurs cat les objets posterleurs au Moyen Ag
veritable étude &
aiser de pal
(Christ devant Pilate (fg. 2, au centre), en or émaill
attendent, depuis la publication de 1902, u
peine esquissée le, Le relief au centre dus
vant le
appartient 8
une série bien connue autrefois étudige par Eich Stelngraber"!.
le relief central fut produit en Allemagne du Sud dans ke premier
ters du xvt® sige, le cadse revient & linginiosité de Reinhold
nt Le dessin a Alfreel André
Lortevre sy inspite directement d'un baiser de paix de
Vasters, qui en donna probabl
Vordre du
Saint-Esprit conservé au musée du Louvre, Vers 1868, Yortevre
avait encadré un autre de ces reliefs germaniques en émail pour
Frederic Spitzer". Adolphe de Rothschild fil éaliver le montage
ou fut trompé sur Vauthenticité de Vobjet? Il est impossible de
le savolr, mals on voit que les saisons de se broulller avec Alfred
André ne manqualent pas... Je pense qu'Emlle Moline le savait
ar, lorsqu’ catalogua la collection lors de son entrée au musée
Balser de paix en orémaillé. Art allemand
et la fin de la notice : » Monture en beonze doé et
argent émaillé de style italien,
ppuce a forelle: qui dit style ne se prononce pas, volontalzement,
sur la date, et Molinier ne pouvait ignorer la similitude avec le
prestigieux objet des collections royales,
Les relations entre Adolphe et André, et celles de ce dernier avec
Vasters et Spitzer, se devinent parfols mais se lassent ragement
préeiser. Par exemple, un petit pendentif avec la Crucifixion et
Ja Resurrection, entré avec la donation, provient de la collection
Spitzer et apparait dans le catalogue de sa vente”. I existe unt
moulage de cet abjet dans le fonds des plitres cle atelier André
iL reste A comprendre 3 quelle occasic
histoire la
str fonk! de lapis représentant la Mise au tombeau, cans un cadve
cette empreinte fut pris
lus rocambolesque est celle d'un eeliefen or émaille
argent doré™, Cette ceuvee est en fait composée d'un cadre
(Gq. 4) et d'un relie imitant une composition de Valerio Belli da
@ Alfred André, Le fait était connu au moment de la donation
Molinier ne catalogua que le cadre, comme = plat de rllute », et
:mentionne avec diplomatic la composition au cent'e comme un,
bas-relief, exécuté d'aprés une ceuvre de Valerio Heli, ceouyre da
xv slgcle™ ». I faut comprendre que la composition est ancienne
non le rele... Les deux éléments furent ensuite dissoclés et le don,
par Alfred Andté, en 1904, de la plaquette darge
qui se trouvait
3 Vorigine a Vintérleur du cadre vint remettre les choses en ord
Neanmoins, un doute persista durablement sur la telation entre
cette plaquette d'argent exceptionnelle
rea part
et son cadre, qui fut
longtemps motLegrand baser ee pa fig. 3 gauche) en argent émailé”
ge complexe de techniques : des plagues ém:
lle sue argent, des émaux champlevéstranslucide
peinture sous verre, $3 forme, és architectursle, est rappprochée
depuis longtemps de celle de certains tombeaus florentins du
AV" sigele®, IH exlste de tels balsers de paix d'orfevrerie émailiée&
Florence : fe dessin de celui qu est conservé at Bargello est att
bbué & Antonio di Salvi". Thomas Richter sou igne avec justesse
la similitude avec le baiser beaucoup plus simple de Santa Felicia,
4 Florence; pour Dora Liseia Bemporad, il daterait de la seconde
moi du Xv sete, ce qui pal .
présente
ees en
dela
it bien trop taxi pout le ndtee
Visuellement tneaucoup plus modeste, le baiser de palx (fig. 34
stimportant
fen raison de la présence, au revers, d'une inscription qui nous
donne le nom de Vorfevte, Filippo de Sulmona = Ia ville natale
«A’Ovide, dans les Abruzzes, et la date de 1510.Le style en est fort
simple mais exécution pleine d'une delicatesse un peu naive: ila
‘mallcureusement perdu la plus grande partie ce email transtucide
ddu fond, Linscription rappelle également fe nom des donateutrs,
deux associés originales de deux petites ville
droite) orné d'une représentation de saint Léonard
a méme région,
Giovanni Franeesco Crandevo, de Caramanticn, et Don
ico de
Carrito, On aimerait savoir comment ces deux compéres en vinrent
‘offei cet ex-voto au saint patton des prsonniers... Gaston Migeon,
précise qu'il se trouvait dans la « collection Castellani (vente de
Paris) », mais objet ne semble pas figurer au catalogue des ventes,
Alessandro Castellani (1866 et 1885),
Le petit baiser de palx avec Notre-Dame du Rosaire entre saint
Dominique et sainte Catherine de Sienne (fig. 3, au centre) est
pique de ces objets anciens mélant différentes techniques”. Le
relief du centre, en argent tepousse, est entouré ce quirze scenes,
fen argent nielle, les épisodes de Ia vie de la Vierge et du Christ,
ui constituent les quinze mystéres canoniques du Rosaice
disposition de ces différents éléments est gravée a Varriére de
objet, sure cade de bronze. Lestyle est un pew naif, suetout en
‘comparaison dautres basers de paix beaucoup plus sophistique's
de la méme collection, mais nous sommes heureux de pouvoir
‘montrer un exemple miodeste et certain de cette famille objets,
fabriqués en Italie clans les dernibres décennies du xv siécle
Les cleux derniers baisers se rattachent a d'autres objets de la
donation «Adolphe par leur technique, la peinture souswerre, qui
‘semble Iavolr particutigrement faseiné. Le premier (fi, 9} montre
saint Michel et, ses pieds, sainte Marie Madeleine’, dans une
‘composition un peu tatonnante opportunément remple darbres
fet de buissons. Son cade en bronze doré, d'un dessin simple, est
lomné de tétes de chérubins et de rinceaux en argent émaille. Ce typede peintures est en général attribué dla Lombardi, une origine
des igutes. Les colonies
balustees en bronze sont proches de celles d'un baiser de paix
conservé i Turin, Le second, bien plus imposant, est beaucoup
plus problématique™, La peinture du centre, qui montre Adora
ton des bergers, comme les médaillons qui Fentourent, realises
nord-italienne ici confortée par le sty
dans la méme technique ~ la peintute sous verre -, n’eveillent
pas de doutes, Leur technique et leur style les inscrivent dans un.
corpus bien identifi de peinturestaliennes,srement lombardes,
‘du milieu ds xvF siete”, La délieate bordure noir et blanc qu
Imite la damasquinure est particullérement caractéristique
Les éléments d'or émaillé et de piertes précieuses qui les séparent
suseitent davantage de scepticisime ~ une perplexité qui rest pas
diminuée par le caractére sirement moderne du montage, Frédéric
Spitzer possédalt un baiser de paix du meme genre, mais d'un luxe
stuperlatif™ :entigrement en cristal de roche, rutilant de plerteries,
i présentait les mémes colonnes torses écotées que celui, I fut
congu autour d'une peinture sous vere tallenne, une Adonation des
‘ergers qui semble bien lombarde et du xs siéele, tres proche de
[drat des Mages du Castello Sforzesco i Nilan, Ces deux objets
sortent sirement des mains ingénicuses de Reinhold Vasters. Un.
dessin de cacre provenant de son atelier est tes slmilalze a celul de
notre objet, La lunnlgre du cadre est laissée ide mais Le reste des
‘ornements en or émaillé et des partes en cristal est soigneusement
dessiné. Seuls le fronton brisé et le ouronnement sont afferents
Je), Vasters a prétéréfinalement (et une fols encore) copler ls riches
palmettes du baiser de paix de Vordee du Saint-Esprit™. Le fond
Fi.
st Esso?
Seach
Sans Mare Maire Sae Mt
Assent, Lomote i ce pat
des Gee dar, OR 5552
Harpe ear Laven, Lonard,
apartment ds Ojts cart nw OR S88
«ébne, les pies et les colonnes torses, ls éléments dor émaillé ne
‘vaccordent guére avec l'art lombard du xv siecle mais rappellent
les compositions des atellers havarois autour de 1600, ou plutot
leurs imitations, Vasters connaissalt bien ces objes et en avait
ailleurs imaginé plusieurs ; le plus proche du notre, conserve
‘New York, contient lui auss! une pelnture sous verre lambarde et
pprovient également de la collection Spitze
Drune maniére plus eréative encore, un autre médaillon peint
sous verre (fig. 2, & droite) et montrant FAdoration des Mages a
6t6 transformé en mieoir”; IL est monté sur une colonne de eris-
tal de roche reposant sur un petit socle orné d'appliques en oF
xmaillé, Les pleds boules sont eux aussi en eristal, comme sur le
baiser de paix, La silhouette improbable de Vensemble ne pouvait
qu'indiquer une extravagance maniériste germanigue, mais i
faut sliement encore y voir la créativité de la maison André, Le
‘montage sinspize peut-