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120 Snr, /r., 'igaer. l?.' ,l)attg;' t <.1'aime, .l'aine, .l'aime...

> l2r

tion permettrait de mieux compreÌrdrc I'orìginaììté dc la communtca- pourtant capital : non seulement il s'agissait de pénétrer Ìe mar-
tion cl'ule marque, le succès d'une canìpâÉine dc lancement et même ché porteuÌ de la gamrne moyenne supérieure des ô/7 chevaux mais
r;elui d'rrn fììm qui Íìt, sans conteste! I'un des plus nartluants des iÌ fâllait aussi ra-jeunir Ìa marclue, ìurrer contre Ìa (pépérisation, de
années 80? Rappeìez-vous : "J'aime,.j'aime, -j'aime"..., un air de Citroên, pour reprendre I'expression de J. Séguéla lui-même. Enfin,
J. CÌerc sur trois notes ascendaÌìtes, une voiture rouge qui pìonge on rappeÌlera que, depuis 1982, la communjcation de Citroën a
dans la n.rer ! Le Iìlm -r v de lancement de la Citroën BX a f()rteme nt souvent exploité Ìe capitaÌ d'image de marque créé par cet air et ce
nrarrluí: lc grand pubÌic à sorr époque, en septcmbre 1982. IÌ obtient pÌongeon: Ìe même air a été repris pour Ìes autres campaBnes BX,
dcs scores ÌPsos d'impact et d'agrément très éÌevés. Les résultats du pour Ie film dit institutionneÌ des Chevrons Sauvages en Ì 984 et pour
s t cl2 molltrèrent n()taÌrÌÌìeÌlt Ìa bonne associatiotr du film à la mar<1ue Ìes campagnes de I'ex depuis 1985 ; et une vtS^ a ploÌrgé dans la mer
et I'agrénìerlt très positif rencoÌltÍé auprès clcs jeunes et des catégories depuis la piste d'envol d'un po)-te-avion. De plus, comme on le mon-
socio-professionnelles aisées tlui ótaient visées par cettc caÌnpagne et treÍa plus Ìoin, des enquêtes menées taÌìt auprès des conducteurs que
ce lanccment. L'air chanté par -J. CÌerc et Ìe pl()ÌÌgcoÌì de la roirurt des concessionnaires citroënistes et noD-citroënistes ont montré Ìa
cl:ins la mer fìrrent ìes iterns les plus fréquents dans Ìes réponses four- réelle contribution de cette communication à I'image de Ìa nrartlue.
nies prrur établir le score Ptoul)í, c'est-à-dìre la <:orutaissnnce eÍJèctive Mais ne brülor.rs pas Ìes étapes; reveÌÌons à Ìa façon dont on peut
du Íìlnì post-tcsté. Par ailleurs, deux mois aPrès le lancemeÌÌt, oÌì a organiser la communication sectorielle de Ì'automobile et au discours
si particulier qu'y a tenu le Íìlm de Ìancemcnt de la Bx.
Ìru corìstater quc Citroën alait vendu cltrclque I 200 e>l par jotrr, dont
cirrcluante pour ceÌlt cìe cotLleur roufte, une coulcur clui n'avait.janr.ii.
marché cbez les coÌÌstrucl.eurs ftançais. Le succi's du Ìattcement cìe la Imaginons deux énoncés très différents, un badge représcntant une
Bx ne {rìt donc pas seuÌement publicitaire: il Íìt aussi commercial. Et chaine d'escÌave brisée et uÌÌ témoignage diffusé à la radio. Dans ce
le taux de comDìande de ccs modèÌes rouges établit clairement qu'iì y dernier, urr opposant poììtique raconte comment, iÌ y a dix mois, iÌ
avaìt bìen Érn l'occurrence une relation directe entre la commuÌÌiLation s'est fait passer pour malade alÌprès de ses gardiens de prison et a
pubìicitaire et les vertes. Un tel laucement était audacieux : le bud- réussi à sauter du Íòurgon celÌulaire Ìors de son transfert à l'hôpital de
get n'avait rien tle comparabÌe avec ceux quc Ìes constructeurs L... Ces deux énoncés sont très différents Ì'un de Ì'autre, à pÌus d'un
collcurreÌìts, lìenault en tête, pouvzrierÌt à la mêne époclue investir titre. L'expression du premier est constitué de quelques Ìignes et de
dans cc tvpe d'opér:itìon. De plus, contrairement alìx Lrsages, Ìe fìlm queÌques formes colorées, I'expression du second des sons de Ìa Ìangue
ne parÌait rri des caractéristiclues techniques de la voìture ni de son parÌée par cet opposant. Le premier se naniÍèste dans le déploiement
prix. O|r r'y trouv:rit aucurtc " subÌimatìon de ì'objct ", aucune vedette d'un espace et seÌon une saisie immédiate, le second dans Ìe dérouÌe-
au volant, pas même un portrait de concluctcur auqueÌ on aurait pu ment dÌr temps et sel()Ìr une saisie médìate, demandant de prendre en
avantageuscment s'jdenti[ìer. L'cnjeu du Ìancement dr: la sx était compte I'un après l'autre les signes et Ìeurs enchainements. Le badge
est un énoncé extrêmement c()ncis; or à ceLte condensation, comme
: Lc disent les sémioticiens, s'oppose l'erpaasiozl du témoignage (on peut
"Suiri IéÌérisìr,r Cinénar d Ìr'sos I'Ì,bli.ite a pt,ur
<$jcr d étabìir rrrr diagnostic
1re.is de lir' 1,rrr .r dc l,rgrtnl nl ,les c:LnìPiìgrìcs audio-visueÌìts cn tírnânt conÌPte imaginer que ì'ìnterviewé ait développé rel ou tel épisode de son récir,
,l . .rr.rrcri"tì,;'rc' '1.. 1,r,'clLr rs 'tLL(llcs ÌnelteÌìt tn avant, de ÌeuÌ Plan nìiÌÌia et cle ou qu'il I'ait plusieurs fbis suspendu pour tel ou teÌ commentaire). Ce
I'ur ' r,?r:ô r ;".1.1., r.',.l,.r' 1,,,r'rr ,1,*-^'* ìrrr 1'a,t ò,at 1t;lìquc p,ou;c t
tle retonnaìssait:e.rinsi quc rÌrs wo|cs ,l-rgrernt,rr t"\,r,1, ncBrtrt tt IrL]iÍlcÌenr PÌé(i- n'est pas toì.Ìt: Ìe petit dessin est svmbolique, iÌ est certes figuratif
\ur\,ì'rr'' \i'r.1r'r''lrr,,l rrr ",r\t', iir'.'*r -l"b,r-,l',rr' le' ' rr\, rÌr*tP,, puisqu'on y reconnait un objet, cette figure du monde terrible de Ìa
r,!.,r. , ,.r "";'l',.'Ì',''rr1t'*i'rr',-. r.'r,. d, llr -r'i,s. 't.1r'rl rrpitr " 'l'raite des Noirs, mais il ne possède rien de comparable à ces noms
Fn L,ir l,r,,,1,,,,1,, r, ir,,,' '1,\t Ì'.'r"r 't,, ,n,Lrr r,rr ,.rrF ur"r'
I'rl,r,,rrr' ,r.rrrr, rl:,r,.( l,'r . r.'lr- . r L,rr\rmerrr ll,r,r,' r-",rìn irr, '' r.,rrr'' propres de lieux ou de personnes. à ces dates ou à ces ancrages au
,tan.r'.rg. rirrr,'rr, ls ,\' 'i,'rt' L' (Ìu aPpaÌaisscnÌ les campagtrcr cnlièrement rìou
\,ll'.. ,iìr, Ìr' ,1",\.,,r l,..i l, -n,,, , '. temps présent qui caractérisent le témoignage et le donnent pour une
122 Sous les signes, Les stratégíes

ÌequeÌ Ìa sémiotique cherche à rendre compte de ìa constitutiorr pro-


histoire réellement vécue. EnÍin. le monde du xvlll'et ses instruments
gressive d'un énoncé ressembÌe à une coupe géologique ou à Ìa faÌajse
de coercition n'a pas grand chose à voir concrètement avec ceÌui du
xX' et avec ses systèmes carcéraux et ses fì)rmes de répression : les d'une carrière s'éÌevant depuis les couches les plus basses et Ìes plus
constitutives d'un terrain .jusqu'aux couches lcs plus superficielles qui
ob-jets, les ìieux et Ìes pers()Ììnages ont changé.
Il n'empêche : clans Ì'un et l'autre cas, on parÌe d'une évasion, d'une slrpportent directement le paysage dans toutc la diversité et Ìa com-
libération. D'une évasion puisque I'action consiste à s'échapper physi- pìexité de sa manifestation. On trouvera dans Ìes paues qui suirent
quement d'un lieu, tlueÌ qu'iÌ soit; d'une libération puisque Ìe suiet de
une présentation du parcours cénératif de la signification mais, Ìà
I'action, ou son bénéficiaìre, y a gagné ìa liberté. ll v a donc bien de ce encore, lc lecteur pour le moment plus intéressé par l'organisarion
point de vue, c'est-à-dire à ce niveau de.pertinence, une simiÌitrrde de du discours pubÌicitaire sur l'automobile que par les grunds concepts
coÌrtenu entre les deux énoncés, ìe badge et l'interview dilíusé. Mais
thóoriques clue celle-ci engage! peut très bien sauter ces queÌques
pages et poLrrsuivre Ì'analyse de rÌotre communication sectoriclle.
notre travail de reconnaissance. de distinction et de hiérarch isariot r
d'un certain nombre de niveaux d'analyse doit continuer: il faut clìs-
tinguer ì'évasion de la libération. L'évasion est en()re quelque chose Le potrour, gencratil de le r;gnifirctian
d'assez coÌÌcret. La libération est une notion plus abstraite, qui se situ.
en deçà de toute précision sur Ìa nature de I'acte libératoire : l'évasion
du moirts dans son Le parcours génératiÍ est une reconstitution dynamique de Ia façon dont la
implique une mise cn espace, un acte physique
-
serìs propre. Or ìl existe des Ìibérations cl'ordrc cultureÌ, idéol,'gi,1uc,
signiÍication d'un énoncé (Ìexte, irnage, Íi1m,...) se consiruit et s,ênrichit selon
un (parcours) donc qui va du plus sirnpe au plus corìplexe, du plus abs_
al'fèctif ou sexuel. Le concept pour reprendre la ternrinologie des
pubÌicitaires
- pÌus profond, plus abstrait et pÌus
de Ìibération est
trait au plus figuratif, jusqu'aux signes qui en assurent ta manifestation ver-
bae ou non-verbale- Autant dire que le parcours génératif
invariant que- ceÌui d'évasion. Au niveau de profondeur oü se situe
représente
Ìéconornie générale d'une Ìhéorie sémìotique, et non seulement tinguistique_
cette vaÌeur qu'est la Ìiberté, on peut cncore chojsir cle descendre lnsistons bien sur le Íait qu'il s'agÌt ici de génération et non cie genèse. ll
jusq+'aux positions de sens purement différentielles clue définir er n'est pas question de reconstjtution historique. Le sémioticien ne cherche
visuaÌise le carré sémiotique3; on peut aussi s'arrêter là et travailler, pas à retrouver la succession temporelle des phases du travail de la créa-
à Ì'horizontal cette í()is, pour déployer tout le contenu du concept de tion, ni la mesure dans laquelle les circonstances extérieures ont pu la
libération : pour y reconnaìtre une opération Íaite par un suiet, pour conditionner. La Íulgurance de l'idée créat ve ou Ìes diÍficulÌés d un tournage,
lui même ou p()ur un aLltre, opération quì aboutira à la conqtrête ou par exemple, n ont rien à vojr avec la siqnification d'un íilm. La richesse de
significatlon d'une création publicitaire ou même d,une simple idée, d'un
à la conservation de cette valeur qu'est ìa lìberté. L'ir.rvestigation a ec
simple concept n a (en soi) rien à voir avec le temps passé à brieÍer ou
njveau se poursuivra pour savoir si la Ìiberté est, dans Ì'énrtnce quc
débriefer, à réaliser ou à écrlre. Reconstitution ne signifie pas non plus tra-
I'on est en trairr d'anaÌyser, une valeur de base, Ìe but fìnal de l'action vai a posteriori sur des campagnes déjà réalisées ou, au miêux sur des
du héros (,vivrc libre>), ou si elle est une valeur d'usasc, tttt pouvoir- projets dê campagne finalisés soumis à quelque pré test. Le sémioticien tra-
lâire (< être libre pour...>). vaille sur des énoncés
On aura compris, à la lecture cÌe ces lignes, que Ìe sémioticiett se - sur n'importe quel type d,énoncé et un concept
ou une idée sont des énoncés dès qu its sont exprimés, -Íormulés, écrits.
donne une représentation veÌticale du sens, ou plus exacteÍìeÌ1t de la Cornme le Sont aussi des (iÍnages) du type voiture-plongeant-dans-lâ-mer
signification c'est-à-clirc du sens tel qu'iÌ peut être organisé et articulé. (Citroën Bx), lapÌn-jouant-duìambour (Duracell), ou lapin-utilisé-en-pochette-
C'est d'aiÌÌeurs ainsi rlue le parcours eénératiI de Ìa signification par de-veston (Crédit agricole dê ' e-de-France), ce que la sénìiotjque appelte
des motiÍs.
Venons-en mainÌenant aux étapes par leque les passe la production de
r RappeÌors qrrr l< r,rrré sinri.rirluc ir éra't)téseÌìté p. 27. dans ìe chapitre " t'-.res-!ous Ia signification d'un objet sémiotique, c'est-à-dlre à ta constitution progres-
ârpenteur ou vrmttanrbulcl"
\24 Sous Les signes, les stratégícs
125

sive d'une signification. On distingue deux grandes étapes dans le parcours tions ainsi établies- C'est vraiment l'instance ab quo du parcours génératif;
génératif de ìa signification :les structures sémio-narratives et les structures
le carré sémiotique est une représentation de ce qui se passe à ce njveau. A
discursives.Tout d'abord, posons que, de même que tout produit implique un niveau plus superÍiciel, les positions sont converties en valeurs recher-
une production, de même tout énoncé implique une énonciation Entendons chées par les sujets et les parcours en programmes narratìfs. Enfin, le
paí là une instance logique de production du sens. L'énonciaÌion sera alors
niveau pÍoÍond des structures sémio-narratìves, son niveau superficiel
définie comme lâ prise en charge par le suieì énonçant des virtualités que lui comme les structures discursives, possèdent deux (versants), qui sont lês
oÍfre le langage ou le sytème de signiÍication qu'il utìlìse; êt lê sLljet énon- deux composantes de toute grammaire : une composante syntaxique (ce qui
çanl - t'énonciateu - sera défini comme I'instance de production logique- relève d'un€ togique des parcoürs) et une composante sémantiqúe (ce qui
ment présupposée par l'énoncé. Ce sujet pourra être individuei ou collectif relève d'une logique des positions et des valeurs). On peut maintenant
(un créatif ou une agence, un journaliste ou une Rédaction). mais il ne sera
représenÌer le parcours génératif en reprenanÌ nos exemples du badge et
jamais, par définition. ce./e, ce nous ou ce on qui n'en sont que des repré-
de l'interview, et en djsposant dans une remontée vers la surface de ces
sentations dans le texte í(je est un autre) disait Rimbaud...). La dlstinction signes les différents niveaux que nous avions djsÌingués et hiérarchlsés lors
entre les structures sémio-narraÌives et les structures discursives doit être de l'analyse de leur contenu.
comprise par rapport à l'énonciation, à I'imâge d'un arnont (les structLlres
sémio-narratives) et d'un aval (les st.uctures discursives). Les structuÍes
sémio-narratives, c est l'ensemble des virtualités dont dispose le sujet énon-
çant; c'est le stock des valeurs et des programmes d'action dans lequel ìl vels a Ínanifeslâlon
peut puiser pour raconter son histoire ou tenir son propos- Les structures {a "suÍace des sgnes )
discursives, elles, correspondent à la sélection et à I'agencement de ces vir-
tualités. C'est le choix de tetou tel univers de réÍérence
- I'installation de tel chainebÍisée maadieleíìte
ou tel décor, si Ion veut mais aussi ìa gestion des temps et des espaces
-
ou la distribution des rôlqs : c est là que lénonciateur choisira de faire rem- ï el rìouveínenl relrouvé et prise de paroe

plir le même rôle par un ou plusieurs acteurs ou deux rôlês diíférents par (niveau Ígurali,
!n temps révo u oLl e teÍnps présent...
le même acìeur. C'est là encore qu'il pourra dépayser l'Ìnterìocuteur ou, au
contraire, l'impliquer et lui donner l'impression qu'il sagit bien de la <réa-
sÍLJclL.Iles
dscusives !n peuple ou !f indvrdu...
t
lité). Si I'on veut prendre une coÍnparaison, dangereuse comme toutes une évasion ./
(d slrbutlof des temps, des espaces dês acleurs)
les comparaisons, on dira que les structures sémio-narratives fournissent (n veaulhématique)

l'intÍigue, dans ce qu'elle a de plus âbstrait et de plus êssentiel pour la


signification de I'histoire, et que les strLtctures discursives correspondent à nNeau
supeÍìc el
t
ledonoulaconqLrétede ..
I

la mise en scène et à la dìstrìbution. Si l'on reprend nos exemples du badge a ìbeiré recherchée

et de l'inteÍview de l'opposant politique, on dira que la recherche de la stíuctutes (1e programme narÍatil) (le système de va e!rs)
liberté par le sujet ainsi que lâ façon dont celul-ci devìent libre (par lui- sérnio-narrâiÌves
même ou grâce à un autre sujet) relèvent de i'intrigue abstraite I de la com- I I
nveau parc0!rs postions
posante sémio-narrative, alors que la Íocalisation sur Iaction elle-même ou proíond ltansiotrnations tealons
sur le suiet, le fait que celui-ci soit un peupìe ou un individu ou I'inscription (carÍó sénìiotÌque)
de l'évasion dans le monde du xvlr" siècle ou dans le temps présent relèvent,
c0mposanle
eux, de la mise en scène: de la composante discursive. c0mposanle
syntaxiq!e séínantique
Poúr pouvoir présenteÍ le parcours génératif de façon complète, disons
encore qu'ìl convient de distinguer deux niveaux dans les structures sémio-
naríatives. A un niveau Íondamental, on a la mise en place des difÍérences Pourquoi suggérer par une ligne si tourmentée Ì'aboutissement du par-
qui font naitre ìa signiÍicaÌion aìnsi que des règles de parcours entre les posi- cours génératiÍ? Pour deux raisons, au moins. Tout d'abord, un discours
peut être abstrait ou ÍiguratiÍ, voire abstrait à certains moments et figuratif
eJ'aìme, J'aime, J'aíme... > t27
12ô Sous les signes, Ies stratégies

récurrents;des thèmes aussi difíèrents que ìa civilìsation, le combat,


à d'autres. l\/ais comme un discours
pas énonciation, la
- fútil
ligne
le plus abstraÌt
sinueuse Íigurant
ne peut pas
-about ssen'ìent
Ìa conlection, Ìa nervosité ou le rafíìnement, et des valeurs teÌÌes que
ne impÌiquer une I

du parcours génératif ne peut pas descendre jusqu au niveau des seules Ìe conÍòrt, Ìe plaisir, la beauté, Ìa puissance, le prix ou Ì'état sauvage.
structures sémio-narratìves. Deuxième raison : le dlscours est élastlque, C'est la définition narrative de ces thèmes (le Petìt Robert est aìors le
c'est-à-dire qu il existe des règles d expansion ou de condensation du d s- meilleur ami du sémioticien!) et l'étude des récits dans ìesqueÌs ces
cours (nous en avons déjà parlé à propos du badge et de l'interview). Pre- valeurs soÌìt recherchées qui permettent de dépasser la simple liste
nons un exemple. Dans úne histoire, un même épisode peut être réduit à un des ( concepts, dont se contente trop souvent Ìa traditionneìÌe analyse
simple et unique proqramme d'action, mais il peut aussi être traité en pou- de coÌltenu. On reconnait aÌors la dr>uble fbnctionnalité de l'auton.ro-
pée russe, ou en cascade si Ion veut, sur un certain nombre de niveaux de bile, <pratique) et (mythique) pour reprendre Ìes termes
dérivaÌion: on peut scier sa chaine avec une scie à métaux, on peut aussi d'4.J, Greimas dans son analyse des objets de vaÌeura. Quand on
apprendre en prison le métier de menuisier pour se Íaire affecter à Iatelier exaÌte et qu'on illustrc d'une tàçon ou d'une autre la maniabilité, la
de réparation pour se construire petÌt à petit une scie pour... C'est ce que
sobriété, I'habitabiÌité ou Ìa fiabilité de la voiture, celle-ci est valori-
les sémioÌiciens appellent le phénorÌlène de récursivité. Ainsi, le lecteur se
rend bien compte que plus on rejoint la suÍace des signes, plus la signiÍica-
sée comme un moyen de transport: eÌÌe est investie de vaÌeurs
tion se complexifie et s'enrìchjt. L analyse d'une communication ou d'un d'usage. Par contle, quand Ìa voiture représente Ì'identité même de
- son coÌìducteur ou de sa corductrice", son statut social, sa vìrjÌite ou sa
simple concept, encore unê fois correspond à une descente vers les
couches profondes, vers les prernières articulations du sens; aussi peut_ féminité, ou quand elÌe est Ìa figure de la vie ou de la beauté, la voi-
elle apparaitre à certains, et à cette phase d'une étude, appauvrissante ou ture est aÌors investie d'une valeur de base. On entend ici par valeur
réductrice. lvlais lors de la (remontée) vers la maniÍestation, vers la diver de base, une de ces valeurs quì correspondent au plan des préoc-
sÌté des messages et des signes, le parcours génératif rnontre
- ou mieu}, cupations ftrndamentaÌes de Ì'être et dont la quête sous-tend Ìa
simule l'enrichissement de la signiÍication. En sén'ìiotique, le superficiel, vie et donne sens à ìa réalisation de muÌtiples programmes d'action
-
c'est le riche. secondaires, pìus superficiels, plus
"pratiquesr. Mais un constat
s'impose à l'analyse de lir communication sectorieÌle automobile, si du
moins Ì'on veut rendre compte de l'ensemble des campagnes et de la
LÌne axiologie de la con-çommation ìogique des scenarii, des accroches et des visueÌs: Ìa doubÌe fbncrion-
naÌité de la voiture est donoée in.rpÌicitement mais aussi souvent expli-
citement pour antinomique. Les valeurs d'usage et Ìes vaÌeurs cle
La rapidc anaÌyse comparative du badge et clu témoignage m'ntrajt base sont données pour contraires. Tout se passe comme s'il falÌait
conìment on pouvait reconnaitre un certain nombre de plans et de a priori choisir entre I'utilisation d'une voiture qui répor.rde à
niveaux rÌc pertinence selon lesqueìs ces deux énoncÉ's étajent dif- -vos besoins -et Ìa possession voire \a jouissance d'une voiture qui cor-
Iérents ou ressemblants. Sans parlcr de leur expressiott, visuelle ou respond à vos envies ou à vos désirs. <Trop belÌe pour être sagerô,
sonorc, ou de leur manifestation, immédiate ou médiate, Ìe badge et le (Luxus pas cherum rrt, nVroom, vroom, pas glou-gÌou 18 ou encore
témoigÌÌage voyaient leurs cortenus rcspectiÍs conv()qtier des lrnir -rs
íìsuratiÍì très cìiÍÍérenrs nrais exploiter urr même thène, Ì'evasiotr, et
renvoyer finalement à une valeur abstraite, la libertó. De la mèmc a Â.
J. Creimas, Un probÌème cìe sémiotique narrativc : Ìes objets de vaìcur, ill ]]z Sazr
façon, c'cst-à-dìre sclon ces mêmes niveaux Iìguratif, thématique ct 11,Paris, Seuil, Ì 9i13.
5 On pense i.i à ìa campâgne ()pel (loÌsâ l9B5 dens Ìaquelle une jeunc tcrnme affir-
abstraiL, on pcul. arìalyseÌ- cornParativemeÌÌt et systématiqucnÌenl les mâit : nNÍa Corsa, c'est rour moi,.
films et lcs alÍìches cle la comn.runicatiort automobile. Ott y reconn'ri- 6 Campagne Renâulr ÌB (af}ìche) Ì979.
Ì A1Íìchc Rrn,,ulr 5 L'dnìpu\ l9B2
tra, derrière la ric:htssc íìgrtrirtive évoquée au début de ce chrpitre q
Àffi.he Renrtrlr 5 c rlqst
et qui iÌÌustre asscz ìr'gétrie cles créatjfìs, des thèmes et des \"âìerrrs
128 Sous les signes, les str(üégìes <
J' aíme, .l' aime, .l' aime... > r29

<Sous la beauté, la sécurité"e, u9 cv sur le pare-brise, 129 cv sous le


capot,10, u Aérodynamique et raffinéeorÌ,.,La voie de Ì'équilibre "t'...
autant d'énoncés qui exploitent d'une façon ou d'une autre Ìa mise en
contrariété des valeurs d'usage et des vaÌeurs de base dont Ìa voiture
peut être investie. Ìls ì'exploitent teÌle queÌÌe * si I'on peut dire
dans Ìe cas de <-I'rop beÌle pour être sage> ou en prétendant avoir
-
enfin rompu le paradigme ou concilié Ìes contrajres comme dans Ìes
autres accroches citées. Car Ìa voiture représente moins une valeur
ou un type de valeurs qu'une reÌation entre ces valeurs données
pour contraires. Nous disons bien données pour contraires ou mise en
contraÌiété parce que la chose n'est pas évidente. Si Ì'on prend ìa tra-
ditionneÌle et pédagogique histoire du singe qui va chercher un bâton
pour pouvoir dêcrocher Ìa bananel3, la recherche du bâton est un
programme d'usage Ìe bâton figure, ( matérialise ) la valeur corres-
pondante
-
et Ìa quête de Ìa banane Ìe prograrnme de base, Dans ce
-
cas, le programme d'usage est un programme simpÌement présupposé .lawihre dont v'ourãver;r berrin.
par Ìa réalisation du programme de base. Et de fait, quand on analyse
à rebours une histoire ou une destinée, on peut dégager son econo- làÌL.nd* iruÌlhrLr,L -!rrr
mie générale, I'implicatìon des dilférentes actions eotre elles, et don-
ner à chaque programme sa valeur, d'usage ou de base. SeuÌement
voilà: Ìes gens, dans Ìa vie quotidienne ou dans la vie tout court,
ne raisonnent pas en sérnioticiens dotés d'un savoir sur le point final.
Ce ne sont pas davantage des robots sans état d'âme sur leurs pro-
grammes d'action complexes ou des sages qui peuvent tout classer en
choses nécessaires ou non nécessaires, natureÌÌes ou non naturelles.
Pour leur malheur ou leur bonheur, peu importe Ìes gens se
- -
mettent tôt ou tard à se dire : et si mes moyens s'opposaient à mes
Íins? Une grande partie de leurs états d'ârne, de leurs pratiques et
de Ìeurs consommations au grand bonheur, cette l'ois, des gens du
marketing et de publicité- vient de cette transformation d'une impli-
-
cation entre valeurs d'usage et valeurs de base en une contrariété,
et de Ìa recherche plus ou rnoins systématique d'une conciliation

, Affiche Ford taunus ? cv 198'{.


to ÂfÍìche RMw 5201 Ì985. Ìlourellelimcal{Xtït t
rì Affiche Audi 100 Ascrt 1986.
RenâuÌt I 1983.
hr envies et rcr beroinr ront enfin d'acçoüd. I
''? Affiche
Ì3 Cf. I'article Valeur darrs Sémiotiquc, A. 1,4,ì d!Ìúdíi l9/l.r19rj I' Mrti! lrnu !t!.u I
J. Greimas et J. Co.uÍtês, Díctiannaire rai:onni í t,À.1RÌ âìèç3,ü4 r"svN ï.í
de La théoíie du Ìangage, l'aris, FlâcheÍe, Ì979 (r. l), p. 415.
130 5uar /er vgrer, les ttrategìe, <J'aime, J'aime, J'aíme... > 13i

nìythiquc entre ces valeurs désormais vécues comme contraires. On la talorise.tion ludiquels, correspondant à la négation des valeurs
rêve de -joindre < ì'utiìe à ì'agréabÌe ou de pouvoir, mêm.' temps, ( utilitaires ) (Ì;r valorisation Ìudique et Ìa vaÌorisation pratique solt
"
<rendre à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieur,... Etre donc contradictoires entre eìÌes: Ìes valeurs ÌudiqLres soÌlt Ìe luxe,
aveÌÌturier et inscrit à la Sécurité socialel QuelqueÍoìs, Ìe progrès Ìa gratuité, Ìe raffinenent, Ìa
technoÌogique aide bien à rationaliser i(la passioÌÌ et la raison' sont "pctite lolic>...) r

la talorìsa,tion critique\!, correspondant à la nésation des valeurs


enfìn conciliées grâce au turbo-diesel1r. Et ce discours mythiquer5 ne - existentielles > qu'on pourraìt investir dans Ì'automobiìe (valo-
"
date pas cl'hier. L'ouvrage cÌassique de J. Lendrevie et B. Brochand risatior.rs critique et existentielle sont contradictoires, les rapports
Le Publicìtor\ti reproduit uÌre alìnonce pour la Simca I100 t I divisée etl quaÌitó/Ìlrix ou innovation/cr)üt sont des valeurs critiques).
moitié haute et moitié basse : dans la moitié haute une photographìe
mct en valeur Ìa spÌendide et lissc création cultureÌÌe en Ì'opposant à Des excmples de ces derrx dernières valorisations ? Sans parler dijà
un décor rÌatureÌ aÌors que, dalrs la moitié basse, un dessin a sélec- de la Íameuse séquence du pÌongeon de Ìa gx, on peut citer comme
tionné tous Ìes "pÌus" techniques qu'offre Ìe modòle. La photographie exempÌe rÌe vaÌorisation Ìudique I'accroche d'une affiche pour Ìa
a pour accroche <la voiture dont vous avez envie>, le dessin
"la voi BNÍw 320I (coÌldLrire sans motif apparent) : unc expressìon ìittérale
ture dont vous avez besoin>. F.n base-line, sous le nom du modèÌe, on de la négation c.Ìe la vaÌorisation pratique. Comme exempÌes de vakrri-
pcut lire r <Vos envies et vos besoins sont enfin d'accord". sation critique, or perÌt citer I'allusion arÌ slosan du [,oto : nC'est pas
A partir du rnoment oü Ì'<tn reconnait que cette Ìllise en contra- cher et ç:r peut Lransportcr gros)) Ì'afíiche Fiar Panda (1985) ou
liété dcs vaÌeurs d'usage et des valeurs de base sous-tend lcs diverses cÌÌcore cette accroche pour la Ford - llscort Manhattan : < L'affaire
- du
représentations et exaltations de ì'automobile, on est amené à el tirrr
ìes conséquences:à en expÌoiter ìa pertinence, à cn éprouver la ren- valorlsat on valor saÌ on
tabilité. Le sémioticien Ìe fera en (projetaÌlt ) sur Ìe carré sémiorìque praÌq!e utopique
la catósorie ainsi reconnuc. On identifiera et dófinira aÌors quatre man ab ité VS VC

erands types de valorisation : conÍoÍt valeurs "ut itaires" les"


va eurs"er slent e dentité
íiab ité (vale!rs d'usage) valeurs de base) aventLïe
la taLorisation pratique, coÍrespondant aux valeurs d'usage conçues
- comme lcs (:orìtl'aires des valeurs de base (on peut aussi parÌer de t
I
l
valcurs <utilitairesr: ce sont Ìa naniaÌrilité, Ìe confort, Ìa robus- I

tesse...); coúíbénéÍces va eurs non'exìstenlìel es


' valeurs'non-utilita:res' gratuté
qua té/prlx rafïin €íìt
la ralorisation utapìquet'-, correspondant aux vaÌeurs de base
e rn

- conÇues, encore ule fois, commc les contraires des valeurs cÌ'usage
va orÌsalion
critique
valorlsatlon
ud qle
(on pourrrait aussi parler cle valeurs existent ieÌÌes , : ce sont
"
Ì'jdentité, Ìa vie, l'aventurc ...);
rB Ìì conlienr;ci dc souligüer quc Ìc tcrÌne de ludlue est certainemenr t].op r€srÌicri1.
r' tr-ous Ì'avons choisi err nous lappelarrt Ìa corrceptior du Ìudicluequi étaitceÌÌe.lelì (l.il'
\r i,h, r, r{È,,r ''r,r 1r. ,..l)ii., .t8t lois. Pour r:e dernier, 1e ÌLrdiqrrc csi ì'(a(tìvitó ììÌrrc par cxccììcÌìce'. lÍrsistorrs bierr sur
| ()n , r r, ,lr., i,. t.;,Ì,1u" tl u rr;" ,1, ur.,,, rrr J,, rr tJ ,,! ,ì,ri r r r.r le lait que la valorisatron ludique dont nous parlrns esr d'abord er slri(:(íìnìcÌìr
tit' r.r lt"LÌ r ., ,, r,, r1: , , ,1,-,r, r' rcr.r o r.rrrr.,-r.' uurrt , Lrrp,.rì. - s i|scrit. PeLrt êtÌe
délìnie pâr le sysrèÌnc dc rcìâ(ions et .l'opaìalions derrs lcqucì l]lÌc -
l- I L-rrdr.'r", Ì lt u,." ,,, ,.. t. t ,!ü,,,e,L P.,-r.. Irr lôl. t9BJ. tì1.
i I nptlue nt:r p-,\ ri ., I,,,,,1r. ru vrs d'iÌÌusoire, m.ris n,, scn'P.d. r,isée finaÌe. On est ce Ìe terme de gratuiré qui est Ìe plus .rpproprié p lâ .lénoìììnati{)n d. cc
lvpc dc vaÌorì5ation. Mais I'adjcctif Ílratujt ìui même ue saurait corrverir.
utapìtÌ e, ír) \énìil,riquc |arrarive, Ì$pace oü Ìe héros se réaììsc, Ìc licrr I Là ercore, Ìa dérorainatiorr doit ôtrc comprise, et acceptée, comme lelarrv.mtnr
^ppelle-espftt:e
oü s'ef1ì'clue sa lrrlornrarrcc. arbrtraire. Précisons 11u..c typ. dc !âlorìsâtìr)n corrcspoììd À Lrnc lÒgique dc lr\.rmrr,
Ì32 Sous les signes, les strcttégìes Ì33

siècÌe' (1987). Disposons mainteÌrant ces quzìtre grands types de vaÌo-


risation sur le carré séniotique, qui a cet avantage de lburljr une
topouraphìe des positions et surtout de leurs relations.
On a ìlÌustré par ccs cluelques afíìches les quatre tvpes de valorisa-
tion cle l'autornobiÌe. D'autres ilìustrations pourraient être tirées de la
commrrnicatiorr fìlm. Ce qui irrporte au sérriotìcien une fois le carre
coÌrstruit, c'est de ( nourrir > chacune des positions cn remontant vers
ìa <surface> dcs diverses manifestations pubìicitaires du sccteur, de
reconnaitre quels crrncepts, queÌs symboles, quels motifs et même
qucl bestiaire peuvent être crtrrélés à ces positions, et de s'assurer qu'iÌ
existe bien alors des règles de transíirrmation qui lolt de cette com-
munìcation un système. Outre Ì'organisation progressive de la com-
munication scctorjelle et la rcconnaìssance que teÌ détail apparem-
ment gratuit ne ì'était pas du tout, Ì'analyse montre à queÌ point une
même accroche, un même visuel, une même campaene peut manifes-
ter des vakrrisations qui ne reÌèverrt pas d'un seuÌ et même type. Se
pose aiols le problème de la cohérence des discours:cohórence de
la campasne, de la comnunication. de son évolution dans Ìe temps.
Se pose aussi celui cÌe I'adéquatioÌì entre Ie statut donné à la roiture
(, Macaclam Star> pour Ìa Renault 9) et Ìes concepts sur lesquels
reposent la déclinaison de la campagne (précision, confOrt...en l'occur-
rence). D'un point de vue encore plus généraÌ, on peut ainsi aborder
tles probÌèmes cle syncrítísme dans une affiche, une annonce ou un
ÍìÌm, en analysant les rapports, les relations eÌìrre les dilférentes
manifestations vcrbaÌes et non verbalcs de ì'énoncé, ou des probÌèmes
de marketing-mix, Ìa < réalité produìt >, ìe prix, l'étiquette, ìa mise en
rayoo et la commuDication pubÌicitaire pouvant vaìoriser dilïérem-
meÌÌt uÌì même procìuit. De pìus, si ce modèÌe topographique et reÌa-
tionnel permet de travaìller en synchronie (en analysant la communr
catioÌr sectorieÌÌe de la même année), il sert aussi à travailler err
diachronie une communication sectorieÌÌe ou une cclmmunication de
marqur. On ra le r,,ir .rver ( itroërr.

de Ìr distanr:iation ct dLr caÌcui. écoìrorriclue oL! technìquc. Simpììcité, travail bien lair,
soìutioü éléÍlrnte r)u.ìslu.irrrÍ....:rrrtart dr vaÌeurs c1ui, finalerrent, sonr celÌes de
I'industricrx. C.lÌ( s (ìr( rcÌ,róÍ,ÌÌrlit tÌÌ1"sse, .aux ÌÌìilìe rusr5"? Valorisâtion pratique
Valorisation ludìque Valorisation utopique
<
J'aime, J'aíme, J'aime... >

L'apport de la publícitó à L'image Citroën (1982-1985)

La bonne santé d'urì carré s'éprouve au parcours <1u'on peut en fàire;


ilest en efÍèt à la base d'un système de relations et de positìoÌls
d'une sémantique -
mais aussi d'uÌìe svÌrtaxe puisqu'il propose deux
-
types d'opérations et, grâce à elÌes, un parcolLrs possible nen ailes de
i 850. Celle qui lreine sur
papillon r. Il nous semble que ìe Íìlm de larrcermcrtt cle la Bx montre
bien les <lualités syntaxiques du carré et que, par un juste retour des
choses, ìe paÌ(nurs air.rsi reconnu fait mieux conprendre la simpììcité
et Ìa Íorce de son scénario; venons-cn donc à ce fiÌm et à la façon
clont il valorise ce quì était alors le nouvcau modèle taÌÌt attendu
de Cìt roën.

Minuit, Paris ... unc voifurc débouche tl'une bretelie cÌ'autoroutt:


sombre et rnouillée. L'heure, ìa vilìe, les points de susperrsion en sur-
imprcssion, conrne les redorrblemenls cle batterie, suggèrent I'atmo-
sphère d'un poìar. Lc premier plan du Íilm construit :rinsi une
voiturc rapide, súre : Ìir voiture idéaìe pour un galg. La BX est-elle
l'heririère de Lì TÌactioÌì Avant? Le .jour se lève; la voirure, rougt',
Íìle dans la campaqnc. A son bor<ì, une passagaìc, unejeune íernme
bourgcoise, souriante, enlève son ch:rpeau..fulien Cìerc, en voix oÍ1,
11ì2n1s : "j':riÌÌre,.j'aime,.j'aime ... " (;ros plaÌrs cl'un phare avant r:t
d un phare arritì:rc. Nouveau plân sur la jcunc femme confortable-
nÌcnÌ irÌstallée et pÌaÌìs géncÌaLlx sur la voitrrre qui poutsuìl sa course
.justlu'à Ìa mer. si:quencc de ravitailìement, aucun plan sLlÌ'
le concÌucteur. Au dixième plan, dix-sept sctrrndes après le début du
^LrclÌnc
film, la voitr.rre roulc sur La pÌage. Une nouvcllc surimpression appa-
Ìilit sLrr l'imagc: "...8 heures, ìa mer>, ule surimpression symé-
trìque tìe La première. l,es points de suspension devancent cette Íois
lildication dc lheure et du lieu.

tcmps, ÌÌeu temps, lieu

Ou MINUÌT, PARÌS
po nts de slspers on points de suspensjon

8 IIDURES, I-4. MER

unevollcì fitgêtï. Le driasme ainsi constitué assure la clirture d'un récit oü la voitLrre
est le moyen súr, rapide ct confortable de s'évader de la vic quoti-
Valorisation crtique dienne et t:itadine : uAvec elle, oÌl peut partir', quitter Paris sous la
138 Sous les signes, les strutégies < > 139
I'aime, I'aime, .l'aime...

pìuie et fbnccr vers le soleil)2i). Avec eÌle, on passe de ìa nuit aujour,


C'est err cffet à la fìn du fiìm que la voitur-e Peut être dófinie selon
de la tcrre à Ìa ncr. [,e film pourrait s'ar]-êter Ìà, sur ìa plage. Mais
l'álre, clu'cÌle est investie de cette vaÌeur de base qu'est la vje. Pas
cette fbis ci, le ÍiÌm continue : la vojture plonge dans la mer, bientôt
avant. l,e scéÌlari(), d'autre part, est simPle si l'on reconn:rit tlue Ìes
suivie par ses oc(:upants. Pi<1uer une tête dans la grande bìeue, c'est
pÌans et séqucÌÌces du fìlm représentent la seulc suite Ìogìc1ue de dertx
normaÌcment ce que vous pouvez Íàire après que votre voiture súre,
opérations : ìa négation, soudaine, cÌ'unc positìon prog-rcssive ne n r ins-
rapide et con{brtable vous a amene en huit heures a la mer. Ici, c'est
tallóe et tenrre, et l'asscrtion consócutive de ìa position contraire. PeÌl-
la voiture eìÌe-même qui pÌonge, sans qu'on puisse attribuer cette dant dix sept secoÌrdes, le {ìlm a corrstruit une voiture utiÌitaire (súre,
(petitc Íbiie), cet acte gratuit, au conducteur, qu'on ajamais vu. Ce
rapidc et conÍbrtablc) pour souclaitt la nier en taÌrt que teÌle, et Ì'exeÌ-
pÌonpcon, inattendu et sans raison, représente ]a négation des vaÌeurs
ter comme cxistcntielle. Voici commetrt le carró sénìotique des types
utilitaires investies dans la BX .lurarr ler dir-sept premìères secorìdes
de vaÌorisatiott, éÌaboré pour rendre comPtc du discours pubÌiciteire
du fìlm. La BX n'est pÌus ce pur instrumerrt, ce véhicuÌe efficace; elÌe âutomobile, peut Íì)rmaliser et visualiser cet ellèt dc Ìinéarité et de
peut désormais clevenir sujet, un su-jet accompÌi dans la mesure oü iÌ simplicìté, syntaxiclue donc, clu scónario de Ìa gx.
a réalisé son programme de base I (Citroën BX. F.Ììe vit). La der-

WW
nière surimpression fait de Ìa r','jture ule pcrsonne, rt une pers()nne
vivante. Qui Ìa désire n'est pìus en quête d'rlr,'oir mais en quète d'átre
pour rcprendre 1'opposition séguélienne. l-a BX devient une star
toLrjours selorr Séguéla dans Ìa mesure oü elle incarne une valeur -
de base2r. 'CÌTROEN BX EÌ-Ì-E 1,'n '

Cela clit, Ìa laçon dont on vient de rendre compte du film, en alter-


nant descriÌltioÌr et analyse ne saurait reprodujre cet effet de simpÌìcìré
et de liÌÌéarité si frappant quand on Ie voit et revoit. Celui qui s'inté-
resse à la genèse des choses, au < processus de création publicita ire ,22, valotlsalon vaorisaton
attribucra cet effet réussi au prìviÌège que J. Séguéla donne toujours ì crl quê !dlqLre Ìa "foÌie" du pÌongeorÌ
la quaììté du scénario. On sait cluc ce dernicr-a I'halrirucle de rippeler
ces mots cÌe Sam Goldwin: <Pour faire un borr film, il faut d'aborcl
un bon scénario, ensuitc un bon scénario, enfìn un bon scélrario>. Le
sémioticien, Ìui, retrouvcra Ìa même idée en montrant du moins
l'espère t-il -
en quoi le scénario est à l'origiÌle de Ìa production du
- il est simple. Le scénario cst à ì'originc de la valori-
seÌìs, et eÌì quoi
satioÌì, utopique, de la gx: si Ìa voiture est vivante, c'est bien Ìe fait
On ajoLrtera que ccttc simpììcité syÌrtaxique et narríìtive, assurére
dès ces couches prolcrndes de Ìa significatiorl qui sc réÍère au
clu récit cÌe cette évasion de Paris puis de cette,.lolie, du plorrgeon.
parcours séÌÌóratif de la sìgnilìcation
- Polrr
est d'autaÌÌi imnédi2Ìe-
- qu'cìle esl Plus
Ìncnt perceptibÌe pour le spectateur Prise en cÌrarge
NouscìtoDsici l.spropos minrcs de RrLtrrrd Rrrnrt, ctirccreur cle trCre-ìu,,n à rscc, jusqu'à ìa manifestation fìlmiquc par des procédures discursives :rdé-
'?o
rl, l.'r."r',r c -rrr.,ri,, rtu trtrl quates. Les points de vuc inrpÌiqués par les mouvements Ìatérarl\ dc l:r
(Ìl.di./i, n trl, srprrn,l,rr 1,r8

1)
caméra, la Íìontalité soudaine clu plongeon et l'arrêt sur image pour
C'est d'ailÌenrs l::. rÌìasí. qLre .ló1.,ìd .J. SéB-uélâ dans;on dernic.r ou\tà,Ãe l)ntaír:,;t
sera tr.f üaì , Paris l1l8{). Ìe dernier plan-sécluence assurcnt Ìes contirruités et discontinuités cor-
?? Nous Íàisons rÌì,,sj(ìx.ici rì lrrrv1lrgc d ÌL
J(,ânnis, Le pn.etsus d. h ü.íot;on pubrì.ì resp()ÌÌdant â chacune cÌe ccs posilirltts par(ollÌ-Lles. On pourrait ení'in
taire, PÃtir, Dunod, I972.
indicluer le travail du syncrétisme cles bande-son et baÌìde-imalie. La
140 Sous les signes, les stratígies " J'aìme. J'o ine, J'aine..., 141

chansor de J. Clerc précède en queÌque sorte le scénario du fiÌm : fiÌm, Ìe logo de Citroën devient le symboÌe de la liberté et de la
<J'aime,1'aime, j'aime ... j'aime Ìes routes bÌeues, les routes Citroën!) puissance sauvage; comme dans un rêve, des chevaux s'échaPPent
Une krgique de vaìorisation utopjque est ainsi manifestée, avant même des espaces souterrains de la ville et, lancés au gaìop, se rassemblent
qu'eÌle ne porte sur Ìa voiture, Une voix chaude et puissante chante dans le désert pour Íormer les deux chevrons. Ces chevrons ne sont
I'amour, Ì'amour des routes qui ne sont pas de simpÈs vecteurs mais pÌus dès lors un motif héraldique, abstrait, qu'on aurait pu croire sans
qui ont une couleur et un Ììom23. signification. Il est redevenu chargé de sens, comme iÌ Ì'était à I'ori-
Ce parcours d'une valorisation pratique à une valorisation uropique gine: André Citroën avait produit pour Ì'industrie des engrenages à
de la voiture, c'est gÌobaÌement le parcours que Ìa publicité Citroën a chevrons, une révolution à l'époque. Figure emblématique de ìa tech-
fait depuis 1982, à Ì'instigation de Rscc et notamment sous Ia direc- nologie, les chevrons parlaient alors de technoÌogie et de conlort (des
tion de R. Raynal. C'esr bien ce qui lrappe quand on reprend valeurs non existentieìÌes et utilitaires). Cette fois, avec le film réalisé
1'ensemble de cette publicité et qu'on dispose leì difÍérentes cam-
pagnes tous modèÌes confondus sur Ìes positions Í981:eÌ1a@Ìrt le c@foÌt
par le
carré des - Ìogiques de talorisation. - se passe commedéfinies
Tout si le scénario
du film de Ìancement de Ìa BX était, en résumé, celui de Ì'évoÌution de
Ìa communication de la marque, jusqu'aux Chevrons Sauvages. Avant
1980, avec Ìa publicité de la cs^, on en esr encore à la valorisarion
de type pratique, voire critique : Ìa cse <refait la route>l. Son animaÌ
symboÌique esr domestique: c'est Ìe dromadaire dont Ìa bosse est celle
7F
des économies. Mais I'essentieÌ des accroches et des scenarii pour Ìa
VISA et la CX tourne aussi autour des valeurs utiÌitaires et non existen-
tielÌes ; ìes voitures sont accueillaÌÌtes, basses caÌories >, performantes,
<<

sobres, conÍortables et, natureÌÌement, la concurrence est secouée.


distancée, doubÌée. A partir de Ì982, la communication bascuÌe. Les
campagnes sont axées sur une valorisation Ìudique et utopique. La ' EN AVÀNT LE CONFORI' LES CHE\,RONS SA(r'VAGES 1985
vtsA s'illustrera dans des paris fous; ses embÌèmes serona ceux du ],N AVANT L AERODl'Ì{AMISME
plaisir et de Ìa beauté (Ìa pomme er la rose). La cx, eÌle, prendra Ìes
'ï*x
valorìsalion vaorisalon
uÌopique
traits d'un requin, avant de devenir queÌques années pìus tird un être
mythique, mi-Íêmme mi-démon. Par aiÌÌeurs, dans la campagne dite l!ìul I
I
^II
I
ittstitutionneÌÌe de l98l illustrec par Savignac. lcs chevr.rns servent
à exprimer Ìa rapidité, le conÍort, la sécurité... Bienrôr ils symboÌise- vaorisation vaorìsation
ront Ìa gÌatuité du sport olympique puis le plaisir de la ritesse et le EN AVÂNT L'ECONOMIE cÍllque udque cA vA DECoIFFER 1984

refus de Ia sagesse : <Ça va décoiÍÍèr!>2a. EnÍìn viendront les Íãmeux


Chevrons Sauvages, un fiÌm-cuÌte comme on dit aujourd,hui. Avec ce

23 Les (routes blerrcs" font cn efïèr allusrun âux pdnneàux dc srsndlisauorr rourìè.p
airÌuin qu, cra.'nr dr.p,,-, lF l,',,q ,1.. .o.,r., dc Irrr,,e aLr Jebrrr"du ,ie, t.. Cc. p"rr_
neaux, par..Ìeur gr.aphismc jaune sur fõnd bÌeu, renvoyaienr ì Ì'identité visuìeÌle
Citrírén rle ì'époque.
'1a Campâgne (institutionììclÌe" l1)84.
142 Sou.t Les signes, les stratégies 143

par R. RaynaÌ lui même, Ìes chcvrons racontcÌrt la conquête de la xx'sìècle, on vit avec>l, ou ellcore ndans les fiÌms, on peut vraiment
liberté définie commc une vaÌeur de base2l; ils relèvent d'une valori- faire passer des messages d'action et de rapiditér. 'froisième enseigne-
satioÌÌ utopique et sisniÍìeront désormajs des valeurs existentieÌles. (Jn ment : interviews et liroupes aboutissent à un consensus sur la commu-
peut reprendre maintenant Ie carré dcs quatre grancls types de vaÌori- nicatìon Citroën. C'est une communication qui frappe, qui séduit et
sation en iÌÌustrant, par quelques canìpagÌres très représen tatir es, ce qui se clémarque nettement de Ìa concurrence: iÌ y a un styÌe Cirroën,
parcours de la cornmunìcation publicìt;rire dc Citroën condensé, si une signature. ElÌe suscite de I'iÌrtérêt mais aussi et surtout du rè\'e,
Ì'on peuL dirc, dans Ìe scénario du film dc lancernent de Ia Bx. de ìa sympathie et dc l'émotion.,. Prolongeant aìnsi la comnìunicati()Ìl
A partir du moment ()ü I'oÌl reconnait que la comnunicatirrn Citroën telÌe qu'eìÌe était conçue par André Citroën lui mênre. EnÍìn,
Citroèn a évoÌué seÌon ce parcours logique, I'apport de cctte commu- Ìes pubs Citroën, c'est un coup de fouet à la marque )J < Citroên est
nication à l'image dc la marque sera saisie et déÍìÌrje en disposant sur "
en train de changer son image, iÌs sont en train de se décrotter, de se
Ìe carré lcs images ancienne et actueÌÌe de celÌe-ci d'une part et d'autre dépoussiérer; iìs ont pris un virase ). Car l'image désormais ant icnue
part ce que I'on peut appeler ìe capital d'image de Ìa marque, dont les de Citroën était celle d'une marque aux incontestables innovatior.ts
images ancienne et actuelle ne sont jamais que des expÌoitations plus technoloaiques mais par trop Ìiée à Ì'âee des conducteurs de certains
ou moins partielles. En 1985, Ipsos-opiÌìion a mené uÌÌe investigatior, de ses modèÌes : la fameuse < pépérisation > dont parlait J. SéguéÌa. Du
de nature quaÌitative, sur Ì'image de Citroën. Des conccssion n a ires sérieux, du rapide, du confortabÌe... pas d'existentieÌ, rien de Ìudique
Citroërì et Renault ct des Íburnisseurs Citroèn furent intervieu,és: des ou d'utopique. Et pourtaÌÌt Ie capitaÌ de Citroën n'est Pas rédrrclibÌe
jeunes conducteurs et des citroënistes, cl'hier et d'au-jourcÌ'huì, clients à cette ancienne image;le travail de la publicité séguélienne ne s'est
fidèÌes ou récemmert acquis, furent réunis en groupe. 'I'nus par- pas fatt ex nihílo.
lèrent de Ìa publicité automobile en généraì, de celle de CitroèÌÌ er I-e capitaì de Citroên, c'est son mythe si Ì'on aclmet qu'uÌÌ mythe
de RenauÌt en partjcuÌier et des images respectìves des deux marques. est un Íécit qui se construit de tclìe -
sorte qu'une conciliation dcs
Les conducteurs parlèrent aussi de Ìa voiture, des voitures et de la contraires tels qLre nature et cuÌture, vie et mort ou identité et altérité
conduite: il s'agissait de savoir si leurs Ìogiques de valorisation de est d()nnéc comme possibÌe. Citroën, pour Ìes professionnels comme
I'automobiÌe recoupaient bien ceÌles qui sous-tendent la communica- pour les conducteurs, ce sont des voitures: la Traction Avant, la
tion pubìicitaire, auqueÌ cas * et ce fìt le cas Ie carré sómìotique 2 cv, Ìa DS. C'cst aussi un homme:André Citroën. Ce sont enfin Ìes
corÌslruit plus haut pouvait légitimemcnt servir- de topographie com- Íàmeuses Croisières, Noire et Jaune. Or, à l'analyse des propos tenus
nlune au discours des marques et au discours des cibÌcs. Premier srrr ces voitures. sur cet homme et sur ces croisières, ()rÌ retrouve
enseignemcnt : de I'avis dcs proÍèssionneìs comnre du srand pubÌic, la toujours cette conciliation enÍìn róalisée des valeurs utilitaires et des
pubìicité automobjÌe a évolué nettement d'une pubÌicité produit vers vaÌeurs existentielÌes : de la techrrologie et de la Ìnarginalité avec la
une publicité de marque, et Ìe rôÌc de Cjrroën daÌrs cette évolution Traction Avant, de la robustesse et de la jeunesse avec la 2 cV, du
est uÌìanimement reconÌtu. lleuxième enseignenìerìt : Ìe film I.\r est le conÍì)rt et de I'l-listoire française avec la DS (de Gaulle, le Petit-Cla-
média Ìe pÌus présnant en communicatior'Ì automobile. Peut-être cette mart...), d!Ì torture test et de l'ópopée avet: Ìcs Croisières et, eÌìfiÌì,
ft>rce du Íìlm t v est d';ìutaÌìt pÌus aclmise quc trop d'affichcs c.lans Ìe de ì'ìngénieur et de l'aventurier (industrieì) avec André Citroën lrri-
secteur autonobile ne sont pas traitées comme teÌles mais comme de mêne. Désormais, il est possiblc d'identiÍìer ce que ìa publicité a
pseudo-vitrines. 'IÌrujours est il que co[dLlcteurs, et concessioÌr naiÌ es apporté en une demi-douzaine d'années (1982-1985) à Ì'image de
Ìrlus eÌÌc()re, estimeÌlt quc le rrédia rv est en parfaite adequation avec m:Ìrque : eÌÌe a rétabÌi les conditions d'une pérénnité du mythe
I'automobilc: <Ìa voiturc ct la téÌé soÌrt les deux urands ob.jets de Citroën en exaÌtant les vaÌeurs non-utiÌitaires et existentielles qui
étaient en passe de disparaitre de son capital. L'image de Citroën
Campagnc " (
" l lllì5. n'aurait bientôt reposé que sur Ìes seules valeurs non-existeÌìfìelles
.
i Ìì s rir L , r i ( rÌì Ì Ì( l l
'?1
144 Sous les signes, les stratégies <
J'aime, J'aìme, J'aime... > 115

et utilitaires : une image oü les points forts, technoÌogiques, de la


marque auraient óté certes reconnus mais aussi attendus, et oü Designs et axiologíe de Ia uie tluotidienne
Ìa
conduite pépère de certains possesseurs de cSA et surtout de DS aurait
empêché toute exaltation uÌtérieure des valeurs non-existentiellesr6, L'organisatiorr des quatre types de valorisation à partir de Ìa mrse en
Voici donc comment le carré des ìogiques de valorisation peut aider à contrariété cìes valeurs d'usage et des vaÌeurs de base a permis de défi-
identifier et visuaÌiser cet apporr de Ìa publicité à Ì'image Citrrrël : nir I'apport de Ìa publicité à Ì'image de Citroèn. Mais cette organisa-
tion offre un caractère de pÌus grande généralité puisque ces valori-
. LE CAPITAL MYTHIQUE
sations sont indépendantes des contenus investis et des univers
DECITROFN
Iìguratifs qui en sont Ìa n.ranifestation concrète. De Íait, on Ìa retrouve
Le banc d'e.\ai. .. . .... CROISLERFS JAUNE & NOTRE . ........... .. . .....LavenÌrre dans bien d'autres secteurs; rappeÌons-nous, par exemple, cette dis-
rérolurion lFchnoìogique .... ........1 RAC'TION. . . a!enruÍe de t:ì mÁrginalrÌe pute entre joggers et gourmets à propos d'une huiÌe qui Íìnissair par
I (gâng, résistance) Ìes réconcilier : Elle est bonne, et en pÌus elle est bonne >2t. Mais elle
. .-........... ...DS.... "
1aeroaynamisne............... ...... ....1a Frânce et dc GautÌe est aussi présente ailleurs que dans la pubÌicité. R. Barthes opposrir
et suspensjon
écrivant et écrivain. L'un écrit pour témoigner, annoncer ou dénon-
robJsles'e ....... .... ......... . . .......... ....,) Cv ................Jeunesse. a!enture
lingenieur........................ANDRECITROEN....................................._...l,avenrurier
cer; I'autre conçoit ì'écriture comme son mocle d'existence mémc.
Pour Ì'écrivant, l'écriture est une vaÌeur d'usage; pour l'écrivain une
valeur de base. L'écriture n'est pas Ìe seul programme d'action sus-
Lt ceptibÌe d'être investi de vaÌeurs d'usapçe ou de vaÌeurs de base tenues
pour contraires. Dans Ìe même univers de Ìa culture et de Ìa commu-
nication, Ìa Ìecture peut être traitée de cette façon. Le phiÌosophe
f de paÍ es innovâlions
teclrnoloqiques et les E. Levinas introcluit son livre Ethique et Infni par les réflexions sui-
vantes: <Le rôÌe des Ìittêratures nationales Peut être ici très impor-
tant. NoÌr pas qu'on y appreÌÌne des mots, mais on y vit une vra je r je
qui est absente... Je pense que, dans Ìa grande peur du Ìivresque,
()n sous-estime la référence oÌ.ìtologique de I'humain au livre que
l'on prend p()ur uÌÌe sou|ce d'informations, ou Pour un Lrstensile rle
ì'apprendre, pour un manuel, alors qu'iÌ est une modaÌité de notre
être r,28.
La reconnaissance de la généraÌité cÌe ce système de valeurs, de ce
clui parair bien être une axiologie de la vie quotidienne et non de la
seuÌe corrsommation, suggère alors une reÌecture du fameux Slslàme
r! Ld pip' ri'a1,,r".,,,'rrr- Llr.cle,h(ì,h, x Iul.r ta des objets de J. BaudrilÌard. l)ans ce livre, J. Baudrillard posair uÌa
;,ublrrrre,gr.elrcrrrre, rr',s,
eììe p.r' -n fin,re,,'r.rpre,. riÌine\\u! de nrurnri,,rr r,.rrje-bouru."rie rlelrr_romo questioD de savoir commeÌìt les objets sont vécus, à quels besoìns
biìe prl l" publl d., rirn..s,ì',,t'.a,r- d. rnà, e. prr tr ieun- r.r eiiri"r,.ur,,r,rct U,n, autres qLre ftrnctionneìs iìs réporrdcnt, queÌÌes structures mentaìes
.es r.Ír,i,àologi,, {1957,. t,. t:,2. IÌ. B:rrrhe. nor rrr ; pr.ü,,, de t,.r tr.e..e. que t. pubt r
'',errnr.c rr$ r re d, r.irrr.qr' r uì.-,ô,,,tu.Ì- la"i'r.rri"n rr d u.r.n.itÌi".. L!\pô- s'enchevêtrent avec les strLlctures íònctiortnelles et y contredisent, sur
.rtiorr auro.nobir'.'r .. t,' ;r.'iirt- ph r,c r,,, r le dc'ì la dcr,,urerre, l. mom.rrr ,,Lr le m-r.
lerll€u\ \r\uelvâ \úÌ,ir Iir$dül rJr\(,rrn.rnrdLr roucher... partìe du cicÌ de MérropoÌis, lâ
I)éesse est en_ur quaÌt d'ìrcurc nrédiarisée, accompÌissant dans cet exorcisme Ìe mouve ?7 Campagnc Film Ir Lesieur 1986
mFìr mcme de ìr pr,,m,,ri,,r, IÍ rir, L,,,Ìr'c.,,ire . l-. l.evìnas, I:thique et Infi i, Paris, Livre dc Poch€, Ì984.
':3
1,1ô 14'7
Sous les signes, Ies stratttgies

quel système cuÌturel, infia - ou transculturel, est fondée ìeur qrrou- praÌiqué, Ì'autre qui est d'être possódé. La première relève du champ
dienneté vécue r21r. Après avoir organìsé Ì'ensembÌe cÌes oppositions de Ìa totalisation pratique du monde par le sujet, ì'autre d'une entre-
et des significations Ìatentes de I'intérieur don.restique sur <la grande prise de totaÌisation abstraite du su.jet par lui-même en dehors cÌu
opposition ransement/ambiance >, le sociologue s'attaque à cet monde. Ces c.leux fonctions sont en raison inverse l'une de Ì'autre.
"éÌé- A la limite, Ì'objet strictement pratique prend un statut social:c'est
ment extérieur qui constitue à lui seul une dimension du système des
objets quotidiens", l'automobiÌe : Ìa machine. A Ì'inverse, I'objet pur, dér'rué de lonction ou abstrait de
"objet par excellence en ce qu'iÌ s()Ìr usage, prend un aspect subjcctìf : il devient objet de collection "3r.
rósume tous les aspects de l'anaÌyse : l'abstraction de toutc Íìn pr rtique
dans la vitesse, le prestige ìa connotation Íbrmelle la connoratiorr PÌus loin dans Ì'ouvrage, à propos de Ì'opposition entre machine et
technique -
la difÍérenciation forcée - t passionné
Ì'in vestissemen machin, J. BaudriÌlard donnera de la r.régatiott d'une valorisation pra-
- phantasmatique
la pro-jection - - tique uÌìe interprétation psychanaìytique : < N'inlporte quel objet d'aiÌ-
"3r. leurs est un peu machin : dans Ia mesure oü sort instrumentalité pra-
Puis, dans la deuxième partie de son livre, J. Baudrillard aborde
Ìe système non-fbnctionneÌ dont reìèvent t()Lrte une catégorie d'objets ticluc s'effàce, il peut être investi d'une instrumer.Ìtalité libidinale"33.
qui scmblent échapper au systèrne qu'il vient rÌ'analyser : < ils semblent Là, Ìes chemìns du sémjoti<:ien et du Ìlsycho-sociologue se séparerìt ou,
contredire aux exigences de calcuÌ folctionnel pour répondre à un plutôt, le sémioticien Ìaisse le psycho-sociologue aller jusqu'à Ì'inter-
vcu d'un autre orclre I témoisnage, souvenir, nostalsie, évlsi.,n,.. prétation, se refusant par discipline aux delÌx serns du mot
cÌ'opter pour telle ou telÌe -
ontologie. La déÍlnìtìon narrativc (en-
l.'objet fonctionnel est alors opgrsé à l'objet mythokrgique:l'un est
(efficace', l'autre est uaccompli". Bien plus, si I'on se rappelle qu'un vaìeurs d'usage et valeurs de base) de I'opposition pratique/mythique
système sisnilìant est d'abord un systèmc de relations et que cette d'A.J, Greimas permet Ìa reconnaissance des relations et des i,Pcra-
axiologie de la vie quotidienne que n()us avons définie pÌus ìraut tions qui déÍinissent quaire types fbndamentaux de vaìorisation des
repose sur une mise en contrariété, la réflexion de J. BaudriÌ- objets de la vie quoticÌienne. L'axioìogie ainsi constituée rend compte,
lard devìent pour nous d'autant plus pertinente et suggestive qu'eÌÌe selon nous, des mêmes pratiques signifiartes analysées par le socio-
s'attache à défiDir Ìa relation qui existe entre ces cleux types d'objets, ìouue; clle eÌÌ retrouve de pÌus l'économie pocrr Ìa lbrmaliser davan-
une relation qui correspond en Íait à Lrne contrariété, au sens oú tage, rÌotamment dans sol] dynamisme, sa syntaxe. Enfin et peut-
être surteut
- concrètc:
clle s'orieine eL s'autorise dc la seuÌe anaìyse
nous I'avons définie Ìors de Ia présentation clu car.ré sémiotique : -
<Sur le pÌan vécu, ces postulations contradictoires (du fcrnctionnel et d'énoncés, que ce soicnt des campagnes publicitaires ou des propos
du mythologique) coexistent à Ì'intérieur du même système comme de consomn-rateurs.
cornplémentaires... une compìémentarité illustrée à la limite par ìa Commcnt peut-on exploiter cette déí'ìÌÌition narrative de l'c,pposi-
doubÌe propriété, maintenant couraÌìte : appartemerìt de ville-maisol tion ? Queìle peut être la rentabilité d'une tellc fornalisation ? Tout
de campagne. Ce duel d'objers est au fi)nd Ìul duel de conscieuce)3Ì. d'abord, iÌ est possibÌe cÌ'élaborer à partir de cettc topographie des
valorisations une typoìogie cles sujets vaÌorisants corresporldarÌtsJ une
Bientôt, le socioìogue e1Ì arÌive ìogiquement à l'idée clue tout objet typoÌogie de clientes et de cÌients par exemple. Nous avons présenté
peut réaliser, incarner si Ì'on peut dire, Ìes deux 1.ypes contraires de ailleurs3a uÌÌe telle typoìogie, Íondée sur la nêtne axioìogie : ceÌÌe des
Ìa vaÌorisation, mais confondant virtuaÌité et actuaÌisation, iÌ se r-isque :\, tb;d., p. r21.
à affirmer : (ToLrt objet a ainsi deux fonctions : I'une qui est d'être r:ì 1áìd., p. I65.
3' l.-ì\Í Fbch, Ihe cortributiorr ol sructural semiotìcs tc, rhc design ofa h,vpermar
l-t,i.1nt,tro,t.)"al l,tutn.t I1t'\". tt t..\la,b't."i4. Arr ."',Lr|. \' rrÌ, ll, Ìrr,ì \,ì l.
L" .\,!;np dp., /,,., Pr, ,. C,l i ,,r'r. l:,hq.,, l,,,,,. tcl,.
l,(1,. Pr'.- r \.ãr, l'88,,'1. :r..rr.-:L. ' rrr''L, rr ,'r'lurre "rr,,ri,,rrr.rru'tu
l'"" I. BdJd,iil:ì '1. rale à la corrcepti<xr ri'un hypermarchÉ, irr lÌ(hett:tu et AlrpÌintions en Xlarhetíng, rcl IY.
\ Ibìd., | 92.
rkd., i. t 11-t t \. n" 2/1989, PxÌis, PUr, l!89.
ì18 5ou' l": signa,, l?s tlrntcgt?r 149

visiteurs, des chalands d'un hypermarché dont tln avait analysé les Trouvet, le uodlit))ite. en qüathë stúì"
"l'aime me trouver dans quelque chose à
sante, touiours du même rawn."
récits de visite, les critiques à l'encontre des bvpermarchés actueÌs Paurqbi craJez-vous qu'on í1ille dans un taÌlle hu aine c! nôn pas dans qüelqu!
rhosë d itmease. {le clënesurc "
et les attentes vis-à-vis d'un hypermarché ude nouvelle genéì-atioÌr " htper,snonpaur rerluú e l€ïaüeur tenpr ?
fnuquti ne pas íaìre un hypet au on ìruìt "Dans les htpers d'dujoutd'hui, il n'y a pas
L'analyse de I'ensemble de ces énoncés m()Ì.Ìrrait que ì'hypermarché encore plus yÌte. (Onferait) des parkínss ò de mN ialité. Ce terme me plait beau
peut ètre conçu comme un moyen de s'approvisionner rapidement, étages pour rendÍe pLu: compact lespace,
poto être encorc plus ptès dei produits.
coüp. IÌ faut avob ewie d'j aller. Ce n'est
posmoncas aujoutd htli; ì'j vais pat néces.
efficacement et économiquenent ou qu'il PeLrt, au colltraire! repre- Ayec des systèmes de descentes et de mon sité. Dans non hrBcrto4liligl iÌiawanen
rcês pout les .addes: rc senir ttus eííi
senter I'espace d'une nouveìÌe Íaçon de vìvre, Ìe dernier avatâr dìì
marché ou de Ìa Íbire, espaces queÌque peu mytÌriques de ia,,rrrri-
vialité. En d'autres termes, I'hypermarché, réeÌÌement ou PoteÌrtielle-
ment, est investi de valeurs pratiques ou, au contraire, de vaÌeurs
Le "corvéablê"
utopiques: convivialité, modernitó ou équiÌibre enfin possibÌe entre PR RTIOUT
Le "convivial"
UÏO P I QUE
Ìa nature et Ìa cuÌture.
Le Íait que Iâ catégorie Pratique/utoPique assure Ì'organiserion
minimale du Íonds commun dcs vaÌeurs recherchées dans La r isite f ^II
d'un hvpermarché suggère la possibilitê d'une typologie des chalands CB ITIQUE IUDIQUE
Le "consumériste" Le "chineui
selon ì'accent qu'iÌs mettent sur teÌ ou tel type de valeurs inve\tics
dans Ì'hypermarché. Certains, pour s'en ré-jouir ou pour le dépÌorer,
définissent l'hypermarché comme ex r-lt rsivemeÌìt trtilitaire: d'ârÌf res "MÒn moti, il n'en a rien àÍairc qu'iÌy aìt "Je fdis d'abà la paruë uítlilaire (r ayìs
assurent qu'ìÌ permet et exprime une certairle faÇon de vjvre. D'autres Llcs pnap6n5, 4" 1o ,orrìyialìíe... Ce ,ru1l Ìe maccotde un fetìt plus...le rais odìhet
rox. cerr roa porrc nannrÌìe Lui. it re-
encore, estimeÌrt ou imaginent qu'iÌ conciÌie tant bien que maì ì'utiÌe clans le rcJon bouquins" .
Eanl.e la qualìté du praduit e, Ie prir-"
et Ì'agréable, Ìa nécessité et le pÌaisir. Davantage, certains chalands, "ll faut aroi en!ìe d alltt tà Ih|Detmar
"Je ne ww d'th yíeLÍ
pús dc L'exotisme au che), sesenir chtzsoì u a"at auìè.hore à
qui pouvaieÌìt par aiÌleurs rechercher avant tout la rapidité et la fonc- rìlktge: je wur que les gens de I tryper faÌre que d'aller remplit son carldie de ce
soient retérables pour leür demandeí des
tionnaÌité, ont insisté sur le plaisir qu'ils trouvaient en certaines occa- renseignements qwnd c'est nécessaire, et
sions à flâner, à rêvasser voire à errer... ou sur ce plaisìr paradoxaì qui quc tien ne me gêne pour allet rie'.

consiste à ne n rien làire, du temps gagné à ne pas en perdre ìors cle


ses (achats de nécessité>. Et d'autrcs chaÌatrds, enfin, s'en sont tenu à Signalons ici qu'une exploitation simiÌaire du système des quatre
nier tout investissement personneì dans l'hypermarché, et oÌìt afïìrmé types de vaÌorisations serait l'éìaboration d'une véritabÌe typoÌogie des
Ìeur souci constant de le démythifier, de Ìe parcourir et de Ìe vivre tensioÌrs entre sujets et objets reÌevant de chacun des types. Le carré
en ,, acheteurs et non en consommateurs naïfls >. L'ensemble de ces sémiotique pourrait permettre une première articuÌation et organisa-
propos dessine en creux quatre types londamentaux de chalandise qui tion de cet univers sémantique: ceÌui du désir, de I'envie, du besoin et
peuvent être d'aiÌÌeurs diversement incarnés par Ìes consommateurs- de Ì'intérêt. IÌ y a Ìà, selon nous, tout un champ d'investìgations, rejoi-
visiteurs d'un hypermarché. Voici conrment on a pu dénon.rn-rer aÌors gnant celui des passions, qui est aujourd'huj au centre de nombreuses
ces quatre types et coÌnment ()n Peut iÌÌustrer Ìeurs ìogiques de vaìrrrì- recherches non seulement en psychosémiotique mais aussi en sémio-
sation respectivcs par queÌques-uns de Ìeurs propos: tique généraìe35

3 Orr,irera n,,rrn rìênr :H. PJ. er. Llcmenrrpuur ,.rì.rhcuìÌeÌJr\onr.Fde,p.rsr,,n..


it, Art'\ \;nrc!ìqu.\ - Lt," t'n"rts rrHr\\., \k\r. IV. J7. IgR2. D. tserrrarrd rcor. Le, pr,
çìôll\ jn t,r,. ,.nia!Ìqu?, , Butte!tn \r,n..-, \t,r. tX. ,9, t986;t. IaÌrdurv.ki, La .o;tie
r 50 Sous les stgnes, Ies stratégìes l5Ì

Nous conciurorts ce chapitre cn inclicluant une toLlte autte exPloi rrobilicr ou celui d'uÌÌe société de vente par correspondance pour
tation dc cette axiologie : l'analysc sémiotique du design Par leurs ì (Ì oÌrlaitre derrière les trois oll quatre ( st) les ) proposés l,exaÌtatictn,

designs, un meublc, ull téléphone, une m()Ììtre Peuvent se donlìer r()Lrte collvenue, de teÌle ou telle valorisation clu canapé, de Ìa tabÌe
p,r.,i protiq,res, Ìudiques, utopiques... Les formes, ìes matières' Ìes ou clu lit. Là encore, ce soÌÌt des anaÌyses concrètes portaÌlt sur des
iignes, les couleurs et les volumes mais surtout Ìa conccption même Í.{aÌlìÌncs ou des univers-produits ciÌ.conscrits et hornogènes qui per-
dès <>bjets c()nstiLueÌrt Ìes signifiants de leur valorisation. SeÌolt Ìrìr'ttcnt d'ìdentiíìer les traits d'expressiorr (ìes quaÌités de {ormts,
leurs dèsigns, les objets seront luxueux et ralÍìnés, traditionnels c.rtt (l'rìÍle ncements, les accords chromatiques...) qui soÌ.ìt soÌidaires, dans
modernes, soÌides et mocìuìabìes, astucieux et éc()rìomiques Le desicrt lcl secteur particuÌier, de chacun des grands types cÌe vaÌorisatiorr, or-r
a cìéjà une Ìongrrc histoirc: iÌ v a des mouvements, des écoÌes, des rlui <:onstittLcnt le sisniÍìant d'une articulation ou c.l'une conciliation cle
."r'ri1èrt"t, cles rtuvres majeures... et des marques ! Lcs obiets cr ìes ( ( r-lairìs d'cntre eux. C'est eÌr procédaÌÌÌ ainsi par commutation,
c,est-à
eÌrvironrlemeÌìts <1ui ont été créés témoignent de la diversité de lr:rrrs <lir-r'en cherchant svstémati(pement les corróÌations qui existent entre
vaÌorisations, comme de l'âPreLé des d(rbats icléologiques entre écoles ili'rncrrts ou grand,eurs de Ì'expression d'une part et du contenu axilr-
ou de ìa sr4rÌristication des stratégies marketins dcs nrarques. LÌn té1é Iori<1ue dcs prroduils cl'autre part qu'il est possible cle dégager une
phor.re peui cìevenir utt ob-iet ludique, un procìuit de beauté significr ÌogirlLrt' cÌu desien sectoriel, étlnr enterLdu ici quc. srìon,,i,1,5,,,r,
i'urbarrité yuppie et les valeurs existentielles de Ìa <cénératioll vidéo- rlcsigrr reìève d'une sómiosis, c'est-à-dire de l'instauratiotr d'une rela-
rock,116... Et ìl n'est que de consuLter le catalogue d'une rrarque de tiorr de présupposirion réciproque entre la forme de I'expression et ìa
Íirrrne du contenu d'un sysrème d'ob-jets3t. Autrement clit, Ìe clesign
n'r'st pas.cìu srul orclre du signifiant: un desigrr est tout à Ia fcris siglì-
,clÌnhr. Pt',. \e r'1. lqFr\,rr.r,. I,: \ | (l êr'r J' 1"1 \'t ll l',r '. cc'r'ì !naì: Íiirì)t ct signiÍìé, plus exactement c'est une relation entre ul signifiant
l.'Fonr-rnirl(. IF tl..e'ìr' r, ti,, :,^:.íq,,' I'"uü.a,' ll l/ì. l"U!':ì' f"L'rrrrr
i. P-zzi' ' q.,11. .r t, ir"'" 't '''r, " .-ni"r ,r' l. 1,n"i,'rr 'l ,li'nr- rr lr 'r'
q7 r8. ì!rì7
' t:c,r ,Ir\r. oar cr"rnol,, i|li,r,r r'r,nr'1Lr' rr lr1"'r ,, \ì'r'i" Je l'rr'" r" r"r
drrrait Ller, nii l" n ,'r rl l'.'.ì.r tl, l" A.rrnr' le. 'e ' 1 ho re Je ìr r 'r'qrr' rrr^r '1r e '|l..'|ll.Ìln'].ll'.u'''.u't'led.'iqrrle.le'r'rir.deur
lr l,'r" rLe or"cluiti tl. br.rLrtc rr,,Lrr h"riires'Ircndv de Shirciclo. Se]!i)r Creatian Xlagt rrr,"l, l', r.n-.,r\ u,rlê .r l..,hFr;,t, c ôpl,u\ ,,r.r , , ìt-nrelr I r.
z,nel i q.,,'1".I-qÒ i,,,\. I.ò9. \lu',.,. d,'iqnÈ p,r \lìrË'rrr otJ'rli ''r 'Ì"rrr!
.
l,.llr'.lr .,rl' ,lrrr.r.rer rrr l't,,r,J!'.,1,..,..r' ..U.',:rr, qrr''r,.ìF,,,.È pJr
.{lb-rrir(. d, \.r 2Íl ,r'. r,-'lr l''q.l.1' , r'l.l'hurr, ''r JeUrrrr 'rrr ., ,l',,\,,.,. ir...,.rrerrr...t,, t,i,.,tic,,, \,r, rìL ,,..,,".,.1,, ilcL\ r.,,m,,JcJuU
.,r-ril e'eììrirl L,r'Ì':r' i .sr' " r, 'Jli" ' ,* "'gir., "r ' ' r'r ' l'* 'ì"r 1,1,,*,r, 1.' :l,nr arr,.rr.,ire í,t.,.r,.,r t- 1,ê.,..\..cn, ,r. \,tc,,,\ \4,.,, d_Ltô',
cucri (r LrrÌ ur,'rr,",1, r Llr', '' .ú r' 1'rr \\'rl' rlalu'l':r"Jc '"r'rl 'l rÍl'rrr " r,li rr,,rr rllri LrÈl peÌnìr r cIrUire d c\,,ciuer lcur rérrnìficarion comnìr schèm.: idéâl. On
ti,,'r'. bur.au,l, srrr.'r,,r'.1 ,l' r,lì'r:,'; l rde"rr lwr 1''r " trÌr1'h"tte r"tnt t' -r,.,r, r.'il. ,l. rF.rlcr ,, "'r rì...t,,r,m,rÌ,(,. i., r,nl r,i,..t,.r.t.t rcr_
t-.,u,,- nr,'drrit' c..r.,lÈ rri-1.:r'' r.'h' rq'rr dnrr crr' I'rr'" I'r ol't'r' l, l .rr r' t.,,r- a.c,t'- rr.,,.r rne,.",,,,,,;.,,,,. I,rri,.,rr t".,,1"ir,i r,t,., Èm_,,r,,r
L etfi.,crr" e, t'. nI r ,,rr. r' .ulli* rrr l,lu. (lrr/ri , ,:. p'"' -rr' ll. r'r1 'rrr p ' ìr-
",,.r, Í,,',r,.l,*,.,',,,id.,.i,,rr..,,rrr,,ut r..pr ,,rr,,.,,", ,;i"r, r,.,,.ru... l,,lee,r .r,,r,,.
trirrc rerlisr p;rr lcs.l.siuntrs.tnghis dé Perrtagran pour Shiseido ìcÍituc <r(Ìúes Ìes ,,,,, i,1,,,1,,q,,t,,, ,,r. q,{, e\r ,,,r.,t.i -,,rtiqrr,r,.,. ,.., l,',,,,,.t,,l .,.r.t., ,i,,.
,.r,',"..,.'. l.' ril, , r 1.,, r', rior.,l,. inu'-... H.rhrrr-.' r lirc, r,rr, l,''ir-rre'. l'' i.,.-,,,,,,, 11, ,ú/&
rt,,,t *( ,, ,,,,ì.Ì, d, ,È,,,, ,iirri,,.r ,te Lt,r,.,s.r I rrr r,,rn,. Lte tr
l,,",",,' ' Ì,r.,,. ' ,.r"ì,hr'r', 'ìe PÈ rr'rqr'rÌ-r '.r''h re'rrrr"r' rill' '''"rr \tÍ.r.,lr.,rr,'r /1., di'i.i,,' ,ì,r '.,r., 1 ,'. rì\,i rLle..,,h,'./ t-r.r- , r\,1.,t,pF1,, r,r ,t..r,
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,., r. -,r,',r, ,Lr ",il,n'r'. c, p',t";rr'3 r'r rr'ì 'i'r'ü'r\r 'l rrr" r')- rr'" \.,1",-, ,.,, !. ,ll, üÌp "t,ttrup dt l,ninn:. potittque .t",,gr,, r,.i,,. ,;. 1;., ,.,,,
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ir:l daì.' lrLru., nlnr., 'r lc' 1.1 ,, ' 1,,1"",r1, ' l,ì7',,i t, t,.2(.,.. - tPaút ,,,n\rc.rorJ.r ,t.r, rrrr"6- de p, i.rd,.,;,,8n.
L-.,lcur.i, n1l'.. rr',''.. lJr,r\"1,' 'r'"1','' 1rp"-'r:. rrn rì'r',t'1 '\"'i'urì ',ti'..rrnJIr dr B: ,rh.,.. n, i,., r$r ,tc, c.r ,1,r. pr,,i",.,.rr ,.rr :rrnrrr.e,r
souci tì'exotìsnie r iÌs I'ont ótó Parce ,lu'l\ illrr*rinr lz rtlrrrtc rlrrrv LLlrurrliré dc 'l.r.rtr'* ,1,,,.,, r.. ,r.. 1., ,,, r, r r,.rr.,rr r,,rl iq re ,t,, ,,te:r,lrritir,rie., r , \..r,..re ...
'"rr,,l, ge qur' I'r,'. ,,.1,'r 'iII'LI'''II rlr1r'r 'l'* et r'1" m' r''e' ( , Li t" ,Ìì, tl, Jir d Jillt rLr s dr nc .,,ntonclie Ì'axiol)gie Íì)Ìldaìc su]. tâ rÌisr eÌr (Í)nrra
rr.r::.n"",.r ',. r,. l, rr ,, ',..' j,," ll' '- lr'Ì' rr' rr ' r' ' lJrr qr' ' 'ì"rr- ,,ri iri 'Lr\ \rrF,,r\ (e 'lu, r.Ì 1,.,, u,ìr., hose, ce qui est dijà un faìr <l<: cuÌtLrrc ct Bau
',.,'
,'.',,"',r'r'". n. r.r','. r,l"l',,., L rri ..u1. 'r,''l 'a'- " l" ' r r r\r 'r'ì'r' " r" r' - ,r,ir.r'1.,,,i- ,Ì. , r.r ,r, .r ,1,, ii,n,pre -,.t.,,t ,,r-- r,t.,,tôe,-.,,r,1r,.r..
r;oì, d- '^,',r'r' r, l'' mr'-' plrir''rerr 'rrr'lt:'rr'ì- " tr' ,r, r ,L rrr. ,r.rr
t'..l7Z,.l''ri'
rie,t. Rn'.,"'..., ÌlaudrììÌrld prllair urr 1'ttL rì"p r.rpì'ìcmenr dr'z 'le'iqrr ct de sa , , ,,,r1 lr ,\ , r,,,i,{ m, nr , ullrr, tr,. .r hr*,,r ,1rr-..
t/(lÍ.ìartìcle(Sénìosìs'dansSéÌnì.,rique,Dìrtionnaìrernitonnédeh.thíarìedutangage
t,,n,riun dd1,,e.r..i '*r, - r l.r. e ,rr" ni, p'li rqL.,lu
!'ìÈre. l,,ìrÍ,.,1*'.t, ",*1"^'rt,t,.', rr ',t,i;r. r"rretur ,n Lrr'rl' r'e r"eìrr' rì'l' (\ J (;,riÌììas er J. Courlét, Ì,âris, IÌâí:h{ìrre, Ìi179, t. Ì, p. 339.
152 Sous les signes, Ies stratégies

(agencement, formes, voÌumes...) et un signilìé (un contenu axiolo-


gique, pour s'en tenir ici à notre propos),
QueÌ est I'intérêt d'une teÌÌe expìoitation du carré des types de vaÌo-
risation en termes d'études et d'interventioD de la sémiotique dans Ìa
communication et Ìe marketing? Nous dirons qu'il est double D'rrne L'I MAG.E, POUR'f ROUBLER LES LE'I"Ì'RÉS
part, elle permet de disposer sur Ìa même topographie ce qui relève t,F:S RAPPOÌì'fS ÉDI'Ì'EU R.LEC I'F]U R
de la communication et ce qui reÌève de la " réaÌité produit,, pour ce
INDUI'I'S PAIÌ DIX ANS DE COÌ\,í N{UNICA'I'ION PIÌì:
qui est de Ìa seule étude du sens émis (mais on peut y disposer aussi
Ì'image de ìa marque ou Ìes atteÌItes des consommatcurs, on I'a vu) ;
I'anaÌyse sémiotique peut ainsì constituer une approche intêressante
pour des études de marketing mix. D'autre Part, la reconnaissance des
traits d'expression pertinents dans la production de tel ou teÌ eflet de
sens, pour teÌÌe ou teÌÌe vaÌorisation du produit par son design, r r,ntri-
bue souvent à une meiÌÌeure compréhension entre designers et annon- LJrr livre n'est pas o. priari un produit comme lcs auLres. Le livre dis-
ceurs-fabricants dans Ìes phases de briefing et d'examen de pr'rjets pose déjà d'une Íbrmc: iì peut raconter, exposer, dénoncer, analyser
soumis. Les annonceurs, qui se trouvent Ì-Ìon Pas sans cuÌture mais ou encore (questionÌÌer Ìe monde>; dans Ìous Ìes cas, c'est urr sujet
sans fbrmation dans ces domaines issus de 1'esthétique, disposent d'un (lrrì est traité ou abordé, une vision des choses qui est proposée, c'est-à-
lanpJapçe de description et d'une méthodologie d'analyse qui Ìeur per- rÌire une certainc Íâçon de mettre en forme, d'organiser ce matériau
mettent d'expliciter Ìeurs propos, dès lors aussi moins subjectifs Acte (luc sont ìes idées et les concepts, les thèmes et les référeÌlces. Cette
de foi, présomption ? Nous pensons vraiment que Ia sémiotique peut rnise en Íorme pourra être par Ìa suite caractéristique d'uÌl auteur olr
.jouer un rôle, limité certes rnais non négìigeabÌe, dans la sensìhiìjsa- rrrôme cl'une collection ou d'un éditeur, mais elle est toLrjours d,abord
tion .roissante au design des milieux du rnarketing et de Ìa commtrnj- < c <1ui fait re ììvre, son coÌrtenu et sa vaÌeur. Aussì Ìe publicitaire doit-

cation, en France notamment oü trop souveÌìt Ìe design n'a pas encore il pron.rouvoir le Ìivre en tenanr compte de cette sisnification déjà ìà,
été considéré comme une des composantes cssentielles d'une straré- riche ct complexe, en créant à partir d'une création, qui est â Ìa fbis
gie de marque3s. Mais uceci est une autre histoire,r, et le projet d'uÌr r,ir-tualités et contraintes. De ce poìnr de r.ue. l'annonce qui resuìtera
autre ouvrafie. (lu travail de ì'agence est déjà uÌre lecture : eÌle donne du sens au
st:ns. EÌìe est Ìa traÌìsposition d'une fbrmc dans une autre Í-orme. C,est
lxrurquoi ì'annonce peut être comparée à une traduction, et ceu\ quj
la c<rnçoivent aux traducteurs des (Eutres complètes de Freud dont
l)arle le texre "'I-raducti<>n Trahison > écrìt pour Ìe lancement de cette
ídition bistorique entreprise par les pur- et réalisée en 1989 :"Les
trrdrrctcurs de Freud se reconnaissent dans I'excclÌcnte. réflexion
rl'Antoine Berman lorsqu'iì stign.ìatise le risque d'un triomphe de ìa
r ornrnunicatiorr sur Ì'authenticité : 'J'appelÌe mauvaise traduction la
t|arluc:tion qui, généraÌement sous couvert de transm issibiÌité, opere
rrDc négation svstématique de l'étranseté de Ì'euvre étrangère". C)n
Ì3 Sur Ìes rairns nÌarkclinÍl d urì nouvtuu drrlogut cnrr. l in.lLLstriel rt lc (r€ úcur' oìÌ
lira les réflexions tris /'cl.riìrarrtcs cÌc G. 14ari,'n àans suÌì relcnr 'ru\rrgi tt\ inages dc
rr substitue pas une syÌltaxe à une autre. On ne remplace pas des
Ì'entrcptise. Paris, Iltlitiorrs (l OÌÍtarìisation, l9tl9, P l26-13Ì ri
l)ét itioÌÌs par des synonymes...>
1b4 Sous Les .signes, les stratógies
L'image, paur ttoubler les Lettrés Ì 55

orr cìu portrait HarcoLrrt. On y revienclra, Ìa photographie d'auteur


Les contraintes cÌu ìivre, de son texte comme de son titre, ne soÌÌt
scrt le livle, solÌ lextc ou son titre.
pas les seuÌes qui coÌrstituert urr déÍì à Ìa créativité publit:itaire. l,es
Les pages qui suivent ploposent unc analyse des traits invariants de
Èuclgets investis cìans Ìa publicité d'édjtion ìì'ont rien de comparabÌe,
le <:onrmunication cles tL,l,, pour eÌì re()nnaïtre I'originalité, ìa cohé-
Ìa pÌupart du temps, avec ceLrx doni bénéficient les lancenìenÏs des
l(rìce et Ìa continuité. Cette analyse portera sur lcs invariants des
produìts dits de crande (:onsommatioìÌ, ni même ave(: ceux des cam-
tlt ux plars cle I'expression et du contenu, sur lcurs fìtrmes respectires
pagnes de larìcement de Íìlms, camPagncs qui sont aussi des créatirlns
( rì travaiÌlant sur Ìes exploitations des Íòrmats, Ìcs compositions pìas-
ã partì. de créations. La parution cì'utt ottvraqe, qui aura été t:hoisi
liclues, lcs rapports que celles-ci étabÌisselìt entrc texte et image ct Ìe
paìmi beaucoup d'autres Pour être promu cn Prc:\se. nc \era siBllalée
tlìscours airrsi tenu par lcs pUF sÌrr la pensée, 1c livre, la lecturc ct l'édi-
qu'une Íbis, sauÍ cas d'espèce: non seulement ì'agence va créer une
tiorr. Nous chercherons Íìnalement à rcconnaitre ìa stratégie énoncjl-
annonce PouÌ un ouvrage et Passer etlsuitc à uDe autre annonce poLlr
tìve des PUÌr vis-à-vis cÌe sa cible en anaÌysant la fàçoÌl très particulière
un autre ouvrage, mais ces annon(les Ììe Passeront qu'une seuÌe foìs ll
est dès lors capital que Ì'atrnonce dont la Prcsse est ìe média privi rIrrrt sont expkrités les relations textes et visuels ainsi que les tvpes de
-
Ìégié puisqu'ìì est le Plus facile à marier en fonction des cihlcs de
rrrist ert cspace de ceux-cì.
lecteuis visées que cette annon(le touche noÌÌ seulement ceux quì
-
sont touj()urs atteÌrtifs au{ pubÌicatitlns dals Ìe dornaine mais au.si
tous ceux dont le srUct du Iivre peut recouPer les centres d'inlérêt. Noir ct blanc, gnuche vs draite : de nércssité,7)ertu
Une fusée unique, uu seul lant:emetlt, dcux mìssions au moins F'tl
fait, une troisiòme mission est assignée à ces annonces-pressc Si  cpLclqucs exceptiolls près2, les AnnoÌrces pubÌiées par les pur'
êphémère qu'eÌle soìt, chacuoe d'elles doìt corttrjbuer à l'expres'ion i)(( upenl cÌes espaces limités dans les pages d'urr quotidien. Et pour-
et à Ì'enrichissement de I'image de l'éditeur auprès de ses diflèrents tlrrt elles accrochent immédìatement et durablement le regard du
pubìics, ainsi qu'à I'originalité, à la cohérence et à Ìa continìÌité de Icctcur. Ce qui fait d'emblée Ìa particularité de ces aurronces, c'est
sa communication. rlrr'r'llcs Lrouvent leur {brce et leur identité dans Ì'cxploitation des clua-
Pour qui vient cle retrouver les dix ans d'annonr:es-presses réelisées litís visueÌÌes dc la page de quotidien. I -'orthogonalité due au coÌon-
sous la direction deJ.-\{. Leydier par Ì'agence Aìice pour Ìes PUF et ìriìllr ct au titrage, Ìe (gris) sénéraÌ créó par la densité des espace-
récemment reproduits dans Ze ? Littres des PUF rluest?onnent le 'mond?t, rìì(Ìì(s ct des in(erljÍlnages et le parcours orienté du regard clue
Ìa cohérence et la cüÌtilluìté de la communicatioÌì des PUF ont url prrlxrsc la ìecture sont, Ìà, considérés et exploités comme de véritables
caractère d'évidence : pratiquement aucune critìque éÌopJieuse rappor- t)ìiìl('Ì iaux : Ils consLiLuent la substance de I'expression de cette comrnu-
Lée, aucul eflèt de vitrine de libraire Présentant Ìe livre dressé côté rriclttion, r:'est-à-dire Ìc matériau sensiblc, visueì en I'occurren, e, ,juj
couvertLrre ou slvannìeÌìt inrégré à une compositioll clc citations, de (st (raitó par une formc, par une certaine laçctn ìnvariantc cÌe sélec-
coupurcs cÌe presse et d'iÌlustrations de toutes sortes, ou aucun effet ti()Ì)rer et d'aecrrcer les choses, ct qui, paÍ Ìa même, permet á Lcttc
de panneau cl'al'fichage publicitaire cÌéveÌoppant sur toute la Ìargeur Íolnrc cÌe se manifester. Les Íormats sont toujours lettement affirmés
d'une pagc de quotidien le nom de Ì'autcur ou le prix remporté par plr'<re bord noir épais quì est l'uu cles éléments du code de communi-
le livre. Sur les quelque quatre cents annonces! à peine une dizaìne (rìliorì des t,ut,, ainsi que par le largc bandeau horizontal oü s'inscrit
comporte unc accrot:he, et très vite a disparu Ìa reproduction drr ììvre lrr rlcvise. Lcs proportions ou les disproportiors cleviennent dès lors
comme ob-jet cìétouré. Bictl sür, ()ÌÌ reLrouve la photographie d'ârrterrÍ
mais ellc ne donnc.jam:tis akrrs l'efÌèt, habituel, de la photo d'identité
" l. i,rìrìonce du lirrc de NÍ. Dulerger, t.e Ì)ríriai. d,, h )hab;raüon (Ì1186), er ccìtrs cle
I 1,, r,rdu(ti{). cÌcs trurres.oÌnpìèrrt de S. Fre,,d (l9Bg) soÌrr paÌLres pìcinc paee.
Paris. P(rr, Ì989-
15ô Sous les sígnes, Ies sttatégies L'image, pour traubler Les lettrés 157

un m()yen d'expression. Les formats standard suggèreÌlt Ìa couverture Mais le choix du noir et du blanc et Ìeur mise er contraste ne
ou la cloubÌe page d'un Ìivre, plus rarement la planche anatomique, Ìe sont pas limités aux seuls sLrjets tragitlues, tout simpÌement parce qu'iÌ
panorama didactique ou même Ì'affiche politique. Lcs formats parti- cxiste dans Ìa réaÌité, dans Ìes innombrabÌes figures du monde et
culièrement étirés sont, eux, motivés par Ìe sujct même du livre ou <lans les univers de référence les pìus divers, des
"choses> en noir €t
par Ìa forme de ce qui est choisi pour la fignre cxcÌusive du vìsuel : un clcs,<choses> en bÌanc. La craie est blanche. et le tableau est noir : ils
Ítrsil, un styìo de Ìuxe, un crayotr, le dos d'un Ìivre ferme, la chaine sr:ront cÌ-roisis pour représenter, dans sa réalité concrète et sensibÌe, Ìe
des composants d'un embryon olr en.ore Ìa íìrrrne linéaire. matérielÌe rr:onde de Ì'école et de l'éducation, La Ìittérature? C'est un paÌimp-
et sensibÌe, d'un énoncé, qu'iì soit dactylographié, transcodé en signe' seste, des textes et des auteurs, des manuscrits et des signatures c'est-à-
qcsr uelsou lrrrtircmetrt bombé. tlire de l'écriture, de I'encre noire sur Ìe papier bÌanc. l,a paìx, quarrt à
Autre matériau expìoitó : Ìa couleur de la page du quotidien, Ìe t lle, est urre blanche et fragile colombe. Les tlerniers.jours de I'Afrique
<gris> créé par Ìa régularité des espacements et les interlìgnages da Sud sont, eux, conçus comme une partie de bras de fer entre Noirs
Cette couleur ollre la possibilité dejouer sur des noirs et des blancs et ct Blancs..,
de créer ì'impact en romPant l'étendue du rédactionnel ;il n'est pas Le parfum de la salle en noir ne pouvait pas ne pas donner I'une des
dès lors nécessaire de recourir à d'autres couleurs, un rouge ou un pltrs belles exploitations plastiques de la lumière et de I'obscuriré. Lc
bleu (c'est-à-dire à un autrc passage à l'impression) pour donner un 1r'xtc dc I'annonce indique que le ììvre nsitue Ìe ccur cle cete arri
fort irlpact à Ì'annotrce. Mais ces Ìloirs et ces blancs n'ont pas une lance (pour ìe Septième Art) dans ìa salÌe de cinéma, Ìicu par
seuÌe valcur d'impact. Comme pour les formats, on s'aperç:oit, à ìa Ìec- cxt:ellence nythologique. Ainsi se dessinent quelques raisons de pJus
ture clu titre ou du su.jet, que Ìes qualités d'expressiou offertes par Ìe <l'ainter lc cinéma, dont toLrt prouvc cyu'iÌ conserve Ìa favcur du pubÌic
matérjau chromatique de Ìa page de quotidien ont été sélectionrìées lÌrce à Ìa télévision >. Or ce qui se dessirre dans Ìe visueÌ, c'est le gaÌbe
et exploitées en fonction du thème du livre. rlcs -jambes de l'ouvreuse souÌigné par la couture de ses bas noirs, et
Prenons ì'exempÌe des représentations de la mort Bien súr Ìa mort ( ctte autre projectiol, non pas horizontale sur Ì'écran mais verticaÌe

peut
-N{ais,
être symboÌisée très conventionnellement par Ìa couleur noire rl;rns la travée. Comme le projecteur invisiblc dessine sur Ì'écran des
Ìe pÌus souvent, la m()rt est exPrimée par le noir seÌon une véri- joux chaÌrgeants de Ìumière et d'ombre et fait rêver le spectateur qui
table p:rrt:r>urs de Ìa pensée intuitive ? qui Part de Ìa mort que Ìe ne peut arrêter ì'ìmage, les mouvements de la lampe de l'ouvreuse
- -
thème implique, en amont ) si I'on peut dire, à Ìa situation qu i peut
( lì)nt apparaitre et disparaitre Ìes objets irnprécis qui servent Ìa trou-
la concrétiser ( ell avalt. blante scénographie de ses aÌlées et venues.
Dans l'annonce du livre le hiros et l"Etat dans la tragéclie de Píerre 'Ì roisième matériau expìoité par les annonces : le parcours orienté
Corneille, par exempÌe, Ìa mort du héros, sa destruction par Ì'Etat qu'il rlu rcgard proposé par la lecture de Ìa page du quotidien, c'est-à-dìre
a pourtant créé, est illustrée Par Ì'étonnante strangulation dtr brrste lc privilège donné à I'horizontalité et la mise en tension de cet axe, de
d'un sénéraÌ romain; Ì'assassin est un technocrate anollymc arr stri(t gauche à droite dans notre cuÌture. -I'out d'abord, rcmme Ìe Íèrair un
veston noir, La création. en I'occurrence, c'est non seulement une jtrckrka, ì'annonce va utiliser Ìa Í-orce d'inertie de Ìa lecture pour don-
idée Íìgurative, une mise en scène moderne et queÌqtre peu surréaliste ncr-pìus d'impact à Ia représcntation d'un passage, ou d'un chemine-
clu drame cornélien, mais aussi et surtout une idée PÌastique' ProPre- rìl(ìrÌt: ce qui passe est d'autant mieux perçu comme tel qu'il va à
ment visueÌÌe:l'enscrÍement cle la tête claire du héros par la masse I'cncontle du mouvemcnt de l'ttil. On rencontre maints exempÌes dc
sombre de Ì'F,tat. Et I'on retrouve Ìe parcours génératif (cf. supta, ((:tte technique dans Ìes annonces des pur'. L'homme préhistorique
p. 123) : en amont du thème de la destruction du héros, la mort, et ert passe devant nous en trainant une Íèmme par les cheveux pour illus-
àvaÌ une scène tròs concrète qui va permettre d'expÌoiter Ìa puis.'ence 1rr'r <la substitution de Ì'Etat patriar<:aì à Ìa société de cÌans rnatris-
d'une masse noire sLlr une page de journal. I i(lues ). OÌì pourrait citer bien d'autres mouvements ; une émigrarion
L'image, pour troubler les Lettrés Ií9
158 Sctus Les signes, Les stïatégíes
Ì

protestaÌìte, une joie d'aììer à l'école < proportionnelÌe aux eÍ1orts et I i ne fo rme d.' expre s sictn clas sique
aux oblisations), oLr erÌcore un <élan culturel, ou ì'échappée atmo-
sphérique de particules trucÌéaìres invisibÌes. Même les Répubìiques
Cl'est Ìa maqLrette de I'annonce, sa concepti()Ìr généraÌe <1ui va détermi-
passent à contre-coLlraot clu sens de la Ìecture!
rrcr Ìes proportions, les dispositiorÌs et Ìes rythmes. Et cette miSe erl
L'opposition gauche vs clroite ne sert pas seuÌement, Par sa mise en
fôrmc, dans la mesure oü elle sera préférée à d'autres et reprisc pour
tension, à I'expression d'un récir de mouvement. Elle propos.;rr,'si
chaque nouvelle aÌìnonce, deviendra ce que Ì'on appeìÌe souvent une
une symétrisation de l'espace de l'annoncc et, par ìà, l'expression
itlcntité visuelle, en Ì'occurrence ceìle d'une coopérative d'édition : les
topologique d'une confrontation. C'est une très vieille mais encore
l,tJF. Le Íait que Ies annonces des tut suggèrent darantage la double
très actuelle utiÌisation semi-svmboÌique cle I'espace3. La pÌupart du
page d'un livre bien ouvert que Ìa vitrirre d'un ìibraire indique dé-jà
temps, I'opposition figure ceÌle des idéologies voire des Partis. Cette
tlue cles qualités formellcs particuliòres existent dans ces annonces qui,
version icléologique de I'opposition gauche rs droite est teÌlcment pré-
aÌrsentes, aÌtéreraicnt ou modifieraient Ìes eÍÍèts de sens qu'eìÌes pro-
serte à l'esprit des Ìecteurs auxqueìs s'adresse Ìa commurtication des
<luisent. Comment délinir ce ttc mise en forme ? QueÌs sorrt les traits
PUF qu'elle autorise à.joueÌ sur la symetrie des chutes racontées dans
deux visuels dìÍÍérents, pour derrx Ìivres différents. Pottr L'économíe tle
<l'identité de la maquette d'une annonce des l,Uli, qui la font
r.cconnaitre parmi tant d'autres? Or dira que c'est sa lbrme ciassique.
Marx. Histoire d'un ,íchec, ìe visuel représente un blrste de N'[:rr-x ct sa
stèÌe dorique toÌÌ.Ìbant vers Ìa clroite i Po\Lr Le Patronat amlricain tn IrL
cn reovoyant Ìe Ìectcur aux pases ô5 à 72 oü nous avons rcprir, ci
txposé les cinq traìts qui caractérisent la vision cÌassiquc, sclon l'his-
mort du libóralisme, Ie dessitt représente cette fbis un gros capitaÌìste à
cigare et gibus en train de tomber raide de son PiédcstaÌ ionique, vers
torien de l'art FL WoÌÌfÌirÌ, et qui la donne pour opposée à ìa
vision baroque.
la sauchc. Cela dit, Marx tonbe t-iÌ à droite et Ìe caPitaÌiste à garrche ?
Rien n'est moins súr. Il seraìt plì.rs.juste de dire que Marx tombe ;ì J.1 Ainsi, la maquette des annonces réalisóe par l'agence AÌìce prend
gauche, sur .ça r:auche i et Ìa capitaÌiste sur sc droite : du côté de ìerrr en compte lcs quaÌités du format rectanqulaire, que ce Íbrmat soit
canrp, si l'on peut dire. Pourquoi peut-on parler de (.justesse ' de puissamment aÍfìrmé par un épais borcl nojr ou seuÌenent suggéÌé
tlans le code de Ìa coÌÌection <Quadrige> -
par un bord rrès fin. Le
cettc autre Ìecture? Parce clue ìa dispositiotl gaucìre zs droite à pertir -
de l'espace représenté, et non à partir du Ìecteur, se retrouve maintes décalage, par rapport au cadre toujours affirmé et expioité dans ses
<1rr;rlìtés plastiques devient du coup un événement visuel, exceptionneÌ,
íois dans les visuels des PtJF. Ainsi, cÌe laçon pÌus secrète et plus sophis-
tiquée, le visuel de L'LIRSS tue de gauche place le Ìecteur derrière ct par Ìà mên-re réservé aux annonces d'une publìcatiorì paÌticuÌière :
<rn l'occurrence Ia teyue Pouuoirs, L,a partition de l'cspace repose donc
un KremÌin qui n'est pour lui clu'un clécor de théátre. L'orieÌltf,tion
cle biais de ce clécor ct le point de vue que la PersPective cÌroisje fait srrr des parallélismes et des orthogonaÌités, ou sur Ì'attention portée à
adopter au Ìecteur permettent de raconter une histoire, celle cÌ'rrne la mise en valeur des angles du cadre (il n'est pour en.juger que de
désiÌÌusion. Moscou n'esr pas ce que Ì'on croyait: il ïâllait pour s'en rcgardcr commeÌrt le logo des puF se cale clans ì'angle bas droit). Les
rendre compte s'approcher et (:oÌÌtourller par Ìa gauche ce srlcialisme visuels et Ìes corps de texte sont eux-mêmes souvenL réinscrits dans un
soviétìquc qui n'était en Íâit qu'une aPParcncc tromPeuse, qu'un eÍ1ct cadre. Autres manifestations d'une pensée <linéaire> privilégiant Ìes
de reaÌìté. rlúlimitations et Ìes discolìtinuités : les iiéquentes séparations du titre
(Ìt du Ìrom de l'auteur par un trait Íìn ou par un point, ou encore ìes
t'ncadrés de Ìégendes. De plus, ìes annonces des pUF ont aussi ceci de
tÌassique qu'elles assurent une <muÌtiplicité> de la maquette : une
lcÌative autonomie des diÍférents éléments. Ce principe, cÌassiquc,
I Sur lâ pÌoÌrìónì,ìliq're (lu scÌì,i synìb()lisnìc. ci. i.i nìênÌe P. 8ó.
rlc multiplicité de Ìa maquettc cst rl'ailÌeurs devenu en 1987 le trait
160 Sout le, signc', Ìc, slrollgìct L'image, pour troubler Les lettrés l6l

d'identité visuelle de Ìa collection phare, historique, des pur':les naÌité> pour reprendre la formuÌe d'H. Wrtllflin. L'image est cepen-
<Que sais-je?> On ne trouve pas dans Ìes annonces des PUF ces che- dant traitée de telle sorte qu'eÌÌe s'intègre à la maquette de l'annonce :
vauchements du texte, de la couverture et de quelques ilìustrations, bien sür, les formes ne sont que partiellement écìairées, mais ce qui est
si fréquente dans les communicatjons concurrentes et qui soumettent éclairé est systématiquement disposé par rapport au cadre ; les mon-
Ìes dilférents éléments de l'annonce à un effet unique, généraÌement tants de siège, la main verticaÌe de I'ouvreuse et même ìe trait lumi-
la scénographie du nom de Ì'auteur. Le fait qr-r'iÌ n'y ait pas dans les neux horizontal à sa droite. C'est d'ailleurs ce jeu des verticales
annonces des pur d'effet-vitrine de libraire maìs qu'y abondent les partant des bords verticaux du cadre qui donne toute leur beauté au
eÍIèts de double page de livre bien ouvert ou de couverture dressée galbe des jambes et à la finesse du taÌon. Quel exemple plus précis,
face au lecteur, ce fait même indique assez Ìe souci du pÌan, de la sur- quelìe illustration pÌus concrète peut-on trouver de cette forme
face pÌane constituant un plan nettement situé dans l'espace, et non la d'expression et de cette compÌémentarité a priori parad,oxaÌe entre la
recherche baroque d'une profondeur. Iisibilité et le trouble qui fait I'originalité de la communication
Bien sür, il est possibÌe de trouver queÌques tentations de <rision' des PUF.
baroque dans les premiers temps de la comrnunication avec la repro-
duction du livre en profondeur ou Ìa mise en proximìté immédiate
des points de vue. Mais on doit surtout remarquer la façon dont la Sémantique structurale , par
< A. J, Greimas et non d'A. J. Greinas
maquette se rend maitre d'un visuel qui est baroque d'expression ou
de contenu,
ExempÌes. L'effet de prolbndeur que pouvait produire Ìa perspec- Parlons maintenant de Ìa <forme du contenu> propre à la communi-
tive biaise d'une rangée de dossiers et de documents iÌÌustrant une cation des puF. La fbrme du contenu, c'est ce qui informe cette
Enquête sur les femmes et la polìtique en France est évité par Ìa pÌace don- matière qu'est le sens;ce sont ìes invariants du <message> des eut
oée à Ìa tache blanche du chemisier de l'un des auteurs posant devant qui en garantissent la permanence et Ì'identité, au-delà mais en même
la bibÌiothèque. Une statue baroque ne pouvait pas ne pas iÌlustrer temps grâce aux divers discours sur teÌ ou tel ouvrage! teÌle ou telle
l'annonce pour Ìes Actes d'un colloque consacré à cet art; c'est pour- collection. Les discours sont donc des variables de réaìisation:ils
tant Ìa sinueuse calligraphie du titre disposé paraÌÌèÌement au bord coÌìstituent Ìa ., substance du contenu du langage des pur. Abordons
"
les choses de façon concrète, sur un exemple précis, pour travaiÌÌer
supérieur du visueÌ qui va redonner le privilège au pÌan, contre la
profondeur. Les annonces et les couvertuÍes de la coÌÌection <Qua- ensuite à un niveau de pÌus grande généraÌité et de plus grande abs-
drige" comportent toutes un portrait, au dessin, de Ì'auteur;la col- traction.
Ìection offre ainsi une belle série de dessins contemporains, très Assez souvent mais non systématiquement, comme Ìe font
différents Ìes uns des autres. Or certains sont de facture tout à fait d'autres éditeurs - les annonces des pUF donnent un portrait de
-
l'auteur ou des auteurs. Ces portraits font alors partie intégrante du
baroque, comme les portraits de V. Jankélévitch et de F.-A Flayek.
Dans ce cas, c'est le cadrage serré du dessin, la déÌimitation ainsi faìte visuel. Bien plus, ils Ìe servent. L'attitude et la tenue de tel auteur
de ses hachures et de ses masses sombres qui inscrivent ceìui-ci dans Ìe interprétant Ìe politique comme < l'enjeu masqué d'une tragi-comé-
dispositif classique de Ìa maquette. die > sont ceÌles d'un homme tout à Ìa fois attentiÍ et amusé:Ìe geste
Enfin, pour iìlustrer une dernière fois cette <phagocytose> du de teÌ autre est ceÌui de l'orateur attirant l'attention de son auditoire
baroque par Ìe cÌassique, on reviendra avec plaisir, avouonsle sur queÌque rappeÌ ou avertissement, et il est dit dans le texte de
-
sur I'annonce pour Le parfum de la salLe en noir. Yoilà un sujet baroque
- présentation que l'auteur < n'hésite pas ainsi à ébranÌer bien des idées
par excelÌence : un fâisceau lumineux qui écrète les fbrmes, les sort reçues tant parmi les Arabes que chez Ìes non-Arabes".
de l'obscurité et les y repÌonge! avec tous les <priviÌèges de l'irratio- L'utilisation du portrait peut alÌer beaucoup plus loin : eÌle peut se
Iti2 5oirr 1e'.'igne'. let ttratègie' L'image, pour troubler les lettrés 163

làire au détriment de la reconnaissance des traits de l'auteur. C'est Ìe chaque annonce actuaÌise Ìa signature des put : Ìes livres des pUF
cas du portrait d'A. J. Greimas dans Ì'annonce de la publication de questionnent ìe monde. Questionner, n'est-ce pas <poser des ques-
Sémantique structuraLe. La photographie d'A. J. Greimas est découpée tions d'une manière suivie, ?
en un puzzle de bandes disjointes. On voit bìen súÍ le rapport qu'il On comprend mieux ainsi une certaine pose privilégiée dans les
peut y avoir entre une sémantique structuraÌe et le -ieu de ces rìif- portraits d'auteur des annonces des pur'. En resardant attentivement
férents éléments qui, à l'analyse, arrivent à s'articuÌer ìes uns aux mais rapidement ìes dix années de la communication puF, on s'aper-
autres seÌon ce qu'iÌs représentent, c'est-à-dire selon Ìeur signifié. Mais çoit de la récur-rence du motif d,e Ia maín à Ia maísselle, de la main à
on inagine qu'un teÌ traitement puisse choquer ceux des lecteurs quì la mâchoire. Ce motif était déjà connu des Grecs, des Romains et des
connaissent A. -f. Greimas et tout particulièÌement les chercheurs qui. Byzantins. On le retrouve au Moyen Age et à Ìa Renaissance... Et c'est,
comme Ì'auteur de ces lignes, font partie du Groupe de Recherches sembÌe-t-il, à Ìa Renaissance avec Dürer que cette pose devient
que le sémioticien dirige : a-t-on jamais traité ainsi un auteur? En fait, celle du chercheur ou du savant- mélancoÌique. - L'historìen aÌÌemand
ce qui choque peut-être davantage les sémanticiens et plus largement !ì. PanoÍsky a en eflet montré que la Melancolia,l de Dürer reÌevait de
Ìe pubÌic des linguistes, des lexicoÌogues et des théoriciens du Ìangage deux sources iconographiques distinctes:celle, populaire, de la repré-
qui tous connaissent cet (ouvrage de référence pour l'étude scienti- sentatior'Ì de Ìa mélancolie dans les calendriers et celle, savante, d'un
fique de Ìa grammaire du sensr, c'est précisément que, pour eux, T)pus Geometríae clans les traités et les eÌ.ÌcycÌopédies, Cette image de
Sémantique struúurale est un ouvrage de Greìmas. la méÌancoÌie et, par Ìà-même, cette utilisarjon de la main à la maisselle
Quelìe peut être donc la significatior de ce par, surtout quand on se leraient de la méìancoÌie l'état d'âme des génies et des savants, des
rend compte qu'il est systématiquement substitué au dz attendu dans êtres susceptibles donc d'avoir des états d'âme I En représerrtant Ì'atti-
Ì'ensembÌe des annonces émises par Ìes PLIF ? L'usage de Ìa prêposition tude du fàmeux Penseur d,e Rodin, Ìes créatifs d'Alice puisent dans le
par sulie d'un nom propre et précédée du titre d'une oeuvÌe renvoie trésor des Ìnotifs et des images ìes plus populaires. Les questions que
aux univers de Ìa musique, du théâtre de la peinture ou de ìa photo- posei par exemple, I'autobiographie comme genre Ìittéraire sont illus-
graphie et, dans ces univers, aux performances interprétatives. On a trées par Ìe portrait en négatif photographique de ì'auteur, Ìe menton
écouté la Cinquième lar H. von Karayan, on va voir Le Songe d'une dans la mair.r. Les sociologues questionnent-ils ìa vie quotidienne ou
Nuit d'Eté par P. Brooke, on admire ìe portrait de MariÌyn Monroe I'université, les historiens de la lìttérature questionnent-ils la <poésie
par A,ndy \N arhol <>tt par CeciÌ Beaton, ou encore on s'efforcera d'ana- écÌatóe>, le roman d'aventures ou encore la indéterminée>?
"pensée
lyser Les Menines ou les Femmes d'Alger par Picasso. Les cuvres, []s sont alors représentés eux aussi main à Ìa mâchoire. Le motif se
dans ce contexte, gagnent une certaine objectivité, deviennent des retrouve ailleurs:dans les portraits des philosophes de I'esprit et du
référents et donnent l'eflet d'exister en soi. Ce sont ainsi moins des psychanalyste, comme dans ceÌui de Ì'enfant dont Ìa capacité à ques-
réaÌisations ou des créations qui locaÌisent l'attention sur Ìeur auteur tionner Ie monde dans < les six premières années > fait eÌÌe-même ques-
que des réflexions ou des interrogations sur une u chose déjà Ìà >. Dès tion pour les médecins-psychoJogues : "Comment définir I'enfant?
kxs, Sérnantique structurole n'est pas tant Ì'ouvraÉie d'un sémioricien Comment réagit-iÌ ? Que peuril faire ? Comment voit-il ìe monde ?
que la question posée par un sémioticier.r au monde du sens abordé C'est à toutes ces questions et à bien d'autres que répondent les
comme un système de relations. La focalisation se fait ainsi sur Ì'objet, l)'" Ames et Ilg de Ì'lnstitut Gesell. "
sur le monde (qu'il puisse être un monde d'idées, peu importe ici) et Les annonces des pur donnent ainsi une représentation de Ìa pro-
non sur I'homme qui I'aborde et l'interroge. Cha<1ue titre suivi de 1ar (luction intelÌectueÌìe ou plus précisément du questionnement qui est
et chaque recherchc ainsi présentée persuadent un peu plus le lec- Ì'activité même des auteurs, rrrmme Ìe rappelle chaque Íbis la sìgna-
teur de Ìa présence du monde comme signifiant ou pouvant l'être, et trrre inscrite en réserve blanche dans Ìe large bandeau noir. Par ce
légitiment du coup le projet de son questionnement. C'est-à-dire que rnotiÍ de Ìa main à la mâchoire, Ìes lrrnonces des pUr définissent ce
164 Sous les signes, les slr&tégies L'image, pour troubler les lettrís 165

questionnement tout à Ìa fois comme un faire et comme un être :


comme le travail et l'état passionnel qui caractérisent un su-jet face à Signes, s2mbo les, Pictogrommes et nlthogrctmmes
un monde qui, pour lui, peut ou doit avoir du sens. SignaÌons d'aiÌ-
leurs ici que le motif, teÌ qu'il est repris et traité dans les annonces La forme du contenu de la communication des PUF n'est pas seule-
des PUF, est débarrassé de ses anciennes connotations psychopathoìo- ment constituée par le récit du questionnement qui donne sens et
giques et qu'il n'exprime .jamais un mal-être. L'état passionneÌ de valeur aux livres que les Presses éditent; elÌe est aussi constituée par
Ì'intellectuel, ou plus généraÌement du sujet questionnant le monde, la relation implicite entre annonceur et lecteur qui est, elle, le fait du
n'est certes pas Ì'euphorie rnais il ne signifie plus I'abattement de celui traitement donné à ce récit. Autrement dit, la forme du contenu posì 1

qui sait les limites du savoir ou le spleen du génie qui rêve de la sède une composante sémio-narrative et une composante discursive /
"vie -
antérieure > (pour reprendre la vision baudelairienne). et Ìe parcours génératif est, rappeÌonsìe, la représentation dynamique,
Ce monde face auquel se trouve Ìe sujet questionnant est aussi cons- de Ì'articulation de I'une à l'autre. QuelÌe reÌation au lecteur est ìmplÌ-
titué de textes, pÌus exactement des grands textes selon les pUF ; ces citée par Ìes annonces des PUF, et de quelle stratégie relève-t-elle?
< textes d'hier et d'aujourd'hui qui sorÌt aussi des textes pour demain . lntéressons-nous donc maintenant à l'énonciation caractéristique de
et que les PUF éditent dans la coÌlection "Quadrige>. On a noté plus cette communication. Pour ceÌa, considérons les rapports entre Ìes
d'une fois Ìa spécificité de ces annonces : leur clarté, leur effet-couver- visuels et les textes et Ìes rôles qui Ìeur sont attribués puisque le
ture, le privilège systématiqueme nt donné au dessin (il convient d'y propre de l'énonciation, en tant qu'acteJ est d'assurer la manifestation
a-jouter l'inversion typographique du titre et du nom de I'auteur). du discours sous la forme de signes et de rapports entre Ìes sìgnes.
Ce qui les distingue des autres, au pÌan du contenu cette fois, c'est L'énonciation se caractérise ainsi entre autres traits par Ìa prise
l'absence de la préposìtion par, comme de Ìa prêposition dz. Pourquoi en compte des signifiants, par Ìeur- choix d'abord et par- la soumission
cette suppression ? QueÌ est Ìe contenu de ce qui ainsi énoncé? Ces du signitìe aux contrainles de Ìeurs narures respectiver ensuite.
annonces pour u Quadrige,) présentent des ouvrages tout à fait parti- Le rlpe de slncretisme rhoi"i terte-image i(i mai5 (e pourrait
cuìiers; ce sont des textes autant que des noms:"Kant, Althusser, être ailÌeurs texte-gestes * -
doit être considéré comme I'un des abords
Durkheim, Bergson, PouÌantzas, Attali, BacheÌard, Dumezil... autant priviÌégiés de Ì'analyse de l'énonciation et de la stratégie adoptée
de textes..., Tout se passe donc comme si I'auteur digne de cette par ì'énonciateur (l'annonceur) vis-à-vis de Ì'énonciataire (la cibÌe). En
coÌÌection éto,it le mor,de questionné, comme si les textes réaÌisaient effet, Ie syncrétisme se définissant comme la mise en oeuvre de plu-
Ìa reÌation même entre ìe sujet questionnant et le monde signifiant. sieurs Ìanuages de manifestation, il indique assez Ì'exploitation faite de
I)ans Ìes annonces Quadrige, Ìes titres et Ìes noms d'auteurs n'ont-ils la culture de Ìa cibÌe et de l'image que ceÌÌe-ci a de I'annonceur: queÌ
pas chaque fois Ìe même caractère typographique, la même graisse, le statut est accordé à Ì'image ou au texte, quels Ìangages sont attendus
même corps? La présentation des livres de la collection apparait dès du fait de l'image de la marquea ?
Ìors comrne I'aboutissement d'un changement de ÍòcaÌisation sur l'un On ne peut rechercher les différentes façons dont Ìa maquette clas-
des éìêments constitutifs de tout questionnement. A Ìa focalisation sique des annonces PUF intègre pÌastiquement teÌÌe ou telle image sans
habituelle et attendue sur le sujet, sur I'auteur, s'est d'abord substi être frappé de la très grande diversité de ces images. On trouve une
tuée la locaiisation sur Ìe monde questionné, Mais avec les textes de gravure du Ìvloyen Age, une caricature contemporaine, des documents
nQuadrige,, c'est désormais Ìa reÌation sujet/objet du questionne- photographiques. On reconnait aussi des cuvres de Watteau, Dau-
ment première, constitLrtive qui est affirmée et valorisée.
- -
! Sur Ìa problémarìque du syncrétisme et des sémioriques syncrétiques, on pourra ìire
J.-M. Floch (éd.), Sémiotiques syncrétiques, Actes Sémioíiques BUIÌetin \lI, 27,
Ì,ìrF.ss cNRs. 1983.
Ì66 Sozs les srgzes, Les sh-atégies L'image, pour troubler Les Lettrés Ì ô7

mier, Delacroix, Hugo, Bauclelairc, N{unch, Klimt, Rocku'ell, N4oe- cncore ou cléjà une conÍìguration topologique : celle d'un entre-
bius et, dans Ìes cuvrcs pÌus ancicnnes, s'avouc Lrrìc rócllc pródiìcction
- Ìui donner la torme concrète d'une ficelle délaite
lacs. Aussi peut<rn
pour Michel-Ange. De pìus, les rélérences peuvent être indirectes : et ramassée sur ellc même. L'image d'un tr()u noir au bord duqueÌ se
des <Ìessirrs, cles llhotographies ou des collages renvoient à der pcin- pen<:he, perplexe, Ì'essayiste illustrcra pÌus tard cette même peDsee.
tures de Magritte, Bacon, Ernst, Warhol ou encorc à dcs pìrotogra- Dire ici que I'image ìììustre le titre ou le texte de prósentation du
phìes de Cart ier- Rresson, ou cle NÍicbaÌs. Beaux exemples d'intertex- Ìivre est en fait inexat:t. Il s'agit pÌutôt en I'occurrence d'urr rapport
tualité visuelle. Nlais jÌ est une autÌ-e source d'images: cc sont lcs comparablc à celui existant entre une image de couvcrlure et le texte
sìgnes. 'I'ouLes les sortes de signes:Ìes caractères tvpographiques, cÌécouvert en ouvrant ìe livre. Ol ne peut pas cìouter que c'cst I'inlage
lcs syrnbolcs, qu'ils soicnt mathématiques, monétaires, idéologiqu.s. qui est vue la première dans la pcrception de I'annonce, ne serair ce
rnaçonniqucs, démographicpres, corporatifs et bien súr reÌiqicLrx; que par son déploiement dans ì'espace. Circonscrite par ìe bord noir
l'étoile de Davicì est ainsi ì'un des s1'rnboles r'écurrents cÌe la commu- qrri signe toute aÌÌn()nce,1.5 pgp, ì'image est immédiatemeÌìt perçue
nication, le nombre de ses avatars égaìe ceux des hôtes privilégiés des dans son rapport au titre et au texte. Alors Ì'image en profite;clÌr:
P{-f : NÍaru et Freud, On trouve encore des dlapeaux, un panneaLr use du fait qu'cÌÌe est vue avaÌrt qrre ne soient lus le titre ct Ìc texte
cle cir<:ulation et une multitucle de pictogramnres... Les annonces cles de présentation. L'image use aussi de son statut d'iÌÌustration dtr sujet
PLrt. puisent clonc à I'envi dans lc trósor dcs sigrres;clìcs dispcuscnt clu livre, d'éc1uìvalence visuelle même sommairc ou partielle. [,es lec-
ces signes ou les encÌrevêtrent, les brisent ou les lorÌt s'aflionter. Dès teurs soÌìt ainsi laits du moins dans une cuÌture Ìivrcsquc qu'iÌs
lors, les Ìoui<lues du sensible réapparaissent; les quaììtés íbrmelles de ne s'attendent jamais -à ce que I'image ne reproduise pas ou n'annoÌìcc
-
ces siqncs rcclcvienncnt préenantes, en rrênre teÌìps que se révèle pas simplement le contenu du textc. Les visuels des PLIF -joueÌìt sur
ì'omniprésence clu vìsuel clans Ìa vje et les pratiques quotidiennes des Ì'existence cle cc contrat tacite et tr:ès souvent refusent dc jouer le
intellectuels et ([e tous ceux dont les ]ivres ou les ìectures visent à rôle du haÌÌebardier n'interverìarìt sur scène que pour cÌamer Ì'arrivée
qLrestionner Ìe moncle. Cìes clualités Íòrrnelles, ces signifiaÌìts, sont clis- des héros. Ils se veuÌent des interprétations prélirninaires du sujet
ponibles ainsì Ìlorlr une autre utiÌisatioll voire pour uÌì discours aLltre. du livre.
CertaiÌÌs soÌÌt traitós de façon callieÌ-am matique, de telìe sorte que Ilans f'annonce pour Le Patriarcal un hommc préhistorique, la mas
l'arbitrairc relation cntre signifìant ct sigrriÍìé clisparaisse. Àpollirraire sue sur Ì'épauìe, passe devart Ìe lecteur erì trainant une lêmme par
disait à propos des callisrammes t1u'<il iaut que Ììotre ìnteÌìigence les cheveux. L'homrnc ct la fcmme, sensìbles à Ia présence du lectcur,
s'Ìrabitue à comprendre syÌlthótico idér.rgraphiqucmcnt au Ìicu d ana- lc reeardenl atteiÌtifs, un peu étorurés. Le Ìccteur cst l'étranger, c'est
Ìytico-disc:ursivement >. luì qui fàit l'événcmcÌìt. Car la préhistoìre, elle, passe d'un pas ran-
[,es anrronces des lut. rappeììer]t à l'eisprit c:lc lcctcurs trop habi- quiìle, égal,,. ou se laisse traineÌ-saÌìs résisÌance, donc sans à-coup. Le
tués aux maniíèstatioÌìs liÌìóaircs ct presque intmatér'ìeÌìes cìe la pensée rapport de lorccs est clair, cÌ'une bruraÌité admise, évidente. La s<cnc
les formes cl'inteìlicencc ct dc production cìu sens qui preÌÌÌìent en est dessinée très simplement, croquée avec une économie ccrtaine cìe
(:omlrte la spatialité mênre de ìeur support, son déploiement sensìble. rroyens. Ì)e pìus, c'est une image d'Epinal:un de ces lieux communs
Ilicn pìrrs, t()ut se pâsse comme si la créativité de ì'ageDce consìstait à visucls sur la préhistoire qu'on prend pour tel, c'cst-à-dire q['il est
nier I'abstraction des sujets cies ìivres dcs Ì'uF. cÌÌ partaÌìt du prìn.iÌìc là pour signìlìer Ì'absence de toLrte prótcntiorr historique, desoiptire
quc toute question eu monde ou toutc pcnséc, si inteìlectuelÌe soit- ou cxplicative. Autant dire qoe toLrt dans ce visuel s'avère être le
eÌle, ne peut sc c()nìllrcÌrdre ct nc peut vraiment toucher sans qu'elle contraire de ce que va dirc lc texte de présentation. Dans ceÌuì-cì, ,,n
ne sussèrc ou impliqirc Lrn clispositiÍ visuel mirrimal, sans qu'iì n'y ait p;rrìe de cliscontinuité, de chrc.uoloeic et de substitution. Il y est ques-
quelqrre palt cle vìsiblr: : ur ospacc, une obscurité, une Ìunrìère. Aìnsi t.ion d'cxplication, d'évolution et de production là oìr il n'y a dans le
ìa <pensée incÌóttr-rnirróc" n'cst pas le cootble cle l'abstraction, c'cst * <ìessin que la suugestion d'une Ìrr-utalité sans r,aÌeur ajoutée. Il est
1ô8 Sous les signes, les stratégies L'image, pour troubler Les Lettrés 1ii9

même question d'erìtreprise intellectuelle risquée, de tentative ( d'éta- de ce titre, et annonce Ìa liberté d'esprit du Ìivre et ce qui fait Ìa
blir une chronologie de Ìa préhistoire, fondée sur Ì'évolution des valeur de I'orrvrage. Autre exemple de visueÌ qui s'ofÍie aux Ìecteurs-
moyens de production, pour explìquer Ìa substitution de l'Etat patriar- c:ibles de l'annonce et clu Ìivre comme urÌ objet d'analyse privilégié, et
caÌ à Ìa Société de clans matristiques". La complexité syÌìtaxique du <1ui Ìui aussi corÌcerne Freud : I'annortce pour le
"Que sais-jc?r' consa-
texte contraste, elle aussi, avec Ìa simpìiciré du dessin. L'humour du cré au fondateur de la psychanaìyse. Le visuel [\'9 teprésente rien : il er,
visueÌ et Ìa force d'impact ainsi donnés à Ì'annonce résultent d'un Ìui-même I'une de ces petites choses de Ìa vie quotidienne Íàites sans
montage sémantique en deux temps ulÌ peu comme on parÌe y penser et que Freud nous a appris à considérer comme signifiantes
-
d'un n.rontage financier. Tout d'abord ì'ìmage dessine en creux, sans de uÌa puissance du désir autant que (de) ceìÌe des fbrces de destruc-
le représenter un lecteur<rbservateur dont les raisons d'obsener ju"- tion), pour r-eprendre les termes du texte de présentation du livre.
tement sont bien peu évidentes pour les protagonistes de la scène. Pour lcs disciples de !-reud, qucllc magniÍìque idée dc corpus
-
Qu'a-t-iÌ donc à nous regarder? IÌ Íaut que ce type soìt étranger pour comme disent les universitaires qu'une collection de ces gribouiÌÌis
observer urÌe scène sans histoirel I)ans un deuxième temps, 1e texte -
réalisés dans le temps d'une conférence ennuyeuse ou c.l'un coup de
donne une identité à cet observateur impÌiqué par le dessin. Le iecteur- téléphone intermir.rable et qui démarÌ-erìt à par tìr d'un titÌ-e de com-
observateur est identifié au psychanaÌyste: ce cÌernier n'est-il pas i.i erÌ munication ou d'un encart pubìit:itaire dans Ìe Bottinl Dans Ìes deux
train d'essayer de comprendre le monde de Ìa préhistoire ? L'humour exemples qlii vienÌÌcÌìt d'être donnés, orÌ aura remarqué que Ìc visLrel
est <urÌe lorme d'esprit clui consiste à présenter Ìa réalité de manière à n'est pas là uniquement pour renvoyer à autre chose, à I'ob.jet de sens
en dégager Ìes aspects pÌaisants et insoÌites>, nous dit Za Petìt Robert. qu'est Ìe livre annoncé : iÌ est luimême un objct dc scns pÌací: dcvant
C'est bicn, sekrn nous, Ìa forme d'esprit de ce visucl qui dégaae d'une le Ìecteur. On reviendra, à la fin de ces pages, sur cette rnisc en pré-
réelle tentative intellectueÌle Ì'aspect insoììte et plaisant que pr-endrait sence et sur son eÍïet.
toute ÌencoÌÌtrfì ellective entre I'historien et l'âge qu'iÌ prêtend resti- Il íaut enfin parler ici d'une autr-e relation image et texte róali-
tuerr surtout si vous êtes vous-même Ìe psychanaÌyste héros de la ren- sée par AÌice pour le Bréaiaire de la cohabitatíon A ìa parution de
contre et que Ì'histoire est saÌls paroles, sans états d'âme et saÌls ì'annolce en pleine page de quotidien, Ie Ìecteur rre pouvait pas ne
compÌexité. pas voir cl'aborcl l'image; la reproductioÌì de l'annonce au format du
Par son humour, Ìe visuel de l'annonce pr.tur Le PatriarcaÍ vise à préscÌÌt volume ne redonne pas la présence qu'elÌe a pu avoir ce.jour
gagner un public plus ìarge que celui des seuls spéciaÌistes. Le visuel là pour le Ìecteur. Mais, même ainsi reproduite, I'image reste Íiap-
de l'annonce Sx>ttr Freud et le Diable, chcrchc, lui, à séduire Ìes colrrais- paute; eÌle reste ce qui est vu d'emblée. Et le lecteur qui aura lu
seurs des textes de Freud. En eÍïet la transÍòrmation iconocÌaste de ensuite Ìe titre du livre saisira tout à Ìa fois le rapp()Ìt entre l'ìmase et
Freud en diable n'est pas seuÌement inspirée du texte de pr-ésentation le titre et Ì'adéquation partiellc entre ceux-ci. Ces deux fauves gucuìes
qui met en avant I'indiscrétion, I'inconvenance de Ì'auteur. C'est un ouvertes et serrés I'un contre l'autre dans une mise en présence contre
visuel conçu comme un caÌembour, à partir du titre du livre, c'est-à- nature, ce soot bien les deux lìrrces politiques qui cloivent cohabìter.
dire comme un de ces énoncés spiritueìs dont Freud a montré la NIais ricn dans I'inage n'annonce l'idée du bréviaire (aucune figure,
richesse et la ìogique et clue les ()Ì-ìnaisseurs de son cr:uvre appré- aucun objet eccÌésiastique), rien dans Ì'expression visueÌÌe eÌÌe-rnemc
cient et recherchent. 'I rès proche cÌes photographies utilisées dans Ìes ne c()ÌÌnote la religion ou le livre de I'office divin. La référence qui
annonces de la tracluctior intésraÌe de Freud aux PLIF, I'image quasi vient à Ì'esprit, par la présence irréaliste des deux animaux comme par
institutionnelle de Freud est ici piratée, détournée I elÌe donne à voir Le choix technìque de la gravure, c'est la làbÌe. L'image serait ì'iìlus-
ÌittéraÌement que le titre trouvé par I'auteur, Freud, et le Diabl,e, tration parfaite d'un livre r]ntrtult ].able de la cahabitation. Cependant,
-s'entend aussi commc
- uFreud cst le Diabìe). Le rajout des petites cctte référence à Ìa fabÌe indique que Ì'adéquation de l'image au titre
cornes et de la qr-reuc poiÌltue permettent une Ìecture homonl mique cst n-roins partielle qu'il n'y paraissait : Ìa íable aussi c()ntient un ensei-
t70 Sous les sígnes, Ies stratégies

gnement et dit Íairc; eÌÌe iìlustre aussi un précepte.


ce que I'on cloit
.1rrrÍlfii,11 r,
4
Ainsi I'image-fable des dcux fâuves visualise une partie du contenu
même du mot bréviaire. Un bréviaire cont;cÌÌt lui aussi un enseigne-
ment; il dit aussi ce que Ì'on doit faire comnÌent Ìouer Dieu
chaque.jour et à chaque heure. C'est d'aiìleurs - ainsi que le bréviaire
est déÍìni dans Ìe texte de présentation, écrit dans un styÌe de dic
tionnaire : uPetit Ìivre oü sont cìairement expliquées Ìes règÌes...>
Oü réside dès lors, la dilfórence entre Ìa Iãble prise pour référence
de discours ÌroÌmatiÍ par Ì'homme d'image ct le bréviaire choisi par
Ì'auteur du livre ? On ne peut penser raisonnablcment qu'un homme
d'ìrrage. Íôt-iÌ soucieux d'impact, soit moins inspiré par un bréviaire
et par ì'univers eccÌésiastique. La raison est autre, F.t eÌÌe est assez
suggestive de ìa stratégie énonciative de Ì'annonceur : la lablc cst un
clis<rrurs poÌitique traditionnel, populaire, et qui, chez n'importe queÌ
ï ,)l
Ìecteur, est rattaché à dcs souvenirs personneÌs, très forts, très ancicns
et surtout très visuels. Encore une íbis, on peut ici saisir I'une des
coÌìstaÌrtes créatives de Ìa communicatioÌ.Ì des PUF réaìisée par Alice:
révéler aux geÌls de texte que sont avaÌlt tout les Ìecteurs des ljvres
des PUF Ìa part véritabÌemerÌt essentielÌe du visibÌe et de Ì'image dans
Ìeur propre Íbrrration, dans Ìeur propre relation au sens.
Majs revenorrs à cette spatiaÌisation de l'écriture déjà engagée par le
traitement calliurammatique de certains titres. Les annonces des PUt'
peuvent Ì'ompre Ìa Ìinéarité du verbaÌ r:Ìì rec()uraÌÌt au caÌÌigramme.
Mais iÌ arrive même que ì'espace du visueÌ de certaines annonces aiile
jusqu'à se déployer, jusqu'à <rayonner> et devenir Ìe lieu de réali-
satiorì d'un nìytlìogranìme. On sait que A. Leroi-Gourhan déiìnit Ìe
mythogramme par opposition au pir:toer:rmme norì seuÌeÌl-ìent comme
un certain type d'images mais aussi c()mme uÌr certain mode de pensee
propremeÌÌt mythique : n Ce quì caractérise Ìe pictogramme, dans ses
liens avec l'écriture, c'eijt la Iinéarité : comme c'est le cas par Ì'aÌigne-
ment successif des phases d'une action. Quand on reprósente les états
successiÍìs des phases d'une action en de petits dessins, comme err
ont Íait les F.skimos, on est indiscutablement en présence d'un pict,r-
gramme. On peut étendre ceÌa à une action oü Ie gcste évoque le
déroulement clu tcmps, conlme oÌÌ Ìe voit à Lascaux:l'homme ren-
versé par Ìe bison, c'est un pictogramme, c'est-à-dire une imagc qui a
un passé, un présent et un futur. L,e mouvement même du bis.rL quì
renvcrsc I'hommc lurit rltr'iÌ y a un a7)ant oü I'homme n'était pas encore
Pìctogrammes
ILYA DE IAIR
DANSURGO.

Ecriture et folie

Scotch \ü7hiskv.

l\4ythogrammes Mythogrammes
t7 4 Soz.r le.r .rgne.r, les stratégies L'inage, pour troubler les lettres r75

renversé, tti\ peÌtd(olt cÍ un apràs oü l at:te était Iini. [,e mvthogranrme, voir, un-jour, ks disposer selon des arrangenìents qui n'auront rren à
lui, prí:scntc non pas lcs ótats successils cl'une action, nais les per'- voir avec ìeurs Lrsages prenriers: t:'erst ainsi par bricolage au sens
sonniìges non struc:turés Ìinéairenrent qui sonl ìes protagonisÌes rÌ uner cocnitiÍ que CÌ, l-évi-Strauss a donné à cc ternÌe -
que la rencontre
opération nì ytholosique... "5. Et A. Ler.oi-GorLrhan d'iÌjouter : ( l)ans -
de cct eÌÌt()ÌìÌloir ct cle cette plume crée urì myth()gramnle. " Rendre
nos sociétés, (luantités cle représent:rtions sont mtthograph itlutr. l'idóc de paix en plaçant une íêmmc slu\ uÌì t,,il r)u\Ìc urc Ìlcrspcc-
L'affichc cn oÍ1ic bcaucoup tì'cxcmplcs. Dans Le geste et la parole,.j'at tive proprement ulthographique parcc quc ccla le correspond ni à la
reproduit une Íìgure pubÌicìtirire: 'l,e thon, c'esL Ìron", F.ìle rt-prr- traÌìscriptiorì d'un son ni à Ìa représentation pìctouraphique d'un actc
scrìtc uÌì tlr(rÌÌ coupé cn plusicurs m()rccaux, 1'un corrcspondant à Ia orr d'une tluaÌìté, mais à Ì'assemblagc dc cleux images qui eDtÌent en
boite <lc conscrvc (du cótó dc la qucuc), I'autre à la tête et aLr buste .jeu avec Loute la prolìrntlctrr dc lcur- contexte ethnique), écrivait
d'une Bretonnei et le tout alec ì'ìnscriptìon : le tìron, c'est bon.r,o Â. Lcroi GoLrrhan à propos des pìus anciennes insrr-iptions t:hinoiscs3.
l)e {:rir, Ìrien des aííiches t:élèbres relèvent du mvthosramme : il sul'- l{endre Ìa lollitrérature en plaçant une pÌume sous un entoÌÌrÌoir rcrÌ-
fit, poLrr s'cn colvaincre visuclÌcmcnt, de penser aux affiches Borril- versé prot:ède la même kruiclue. Et La figure mythogriÌplì ìque Jiììsi
lon Kub cÌe Cappiello ou N{onsavon cÌe Savignac, ou pÌus réct:mmcnt c()nstituée possède, dès lors, nurre extensìbilité oralc". Enlln, il ínut
à ccLlcs cÌ'Ur-go ou cìe Benetton. Le visuel conçu pour Ecriture et folie recoÌìnaitre la strit:te t:onformitó sémantique clu vìsuel c.JnçLr poLlr
constitLre un exemple Lrès représentatiï de Ìa pensée mvthographiqlle. Ecriture e.t Jìtlìe avcr: lc tcxtc qui presente ce Ìi'" re ; < (]ueì rapport entre
U ne plume et un entonnoir r:nvcrsé s()ÌÌt lcs dcux figurcs clu r isucl fìrlic et écriture?... QueÌ cherrin MaupassaÌÌt, Woolf. Bcckett, Duras,
cÌe Ì'arrrrrrncc cl'lttritute et folíe. Les dcux ob.jets ne sont pas disposés Ilighsmìth et d'autres oÌìt-ils cmpruÌÌté pour partir à la rencontre de
Ì'trn par r:rpport :ì Ì'autre selon Lrn axe h<irìzontal qrri rerrverrait à la fìrlic ? C'cst à toutes ces intelrogations clue répond Monique Plaza,
Ì'é|oncé clLr Li1re. [-'nn est au-dessus cle l'autre; et I'imaec qu'ils (loctcur en psvchoìogie et ps,vchotherapeute. Lc mythograÌnÌnc a
'
fòrment s'organise à partir de I'irtersection cÌe Ì'axe vertìcal de Ìrien la partic:ularití: dc solliciler un colnmentaire. Corrrne ìe rrytho-
l'entonnoil et de celui, horizontal, de Ìa pìunre. Euit'Ltre et Jòlie s'êt:rit gramme cst une occasioìl de raconter telle ou teÌÌe légerrde ou terl
dans ì'espace Liuóaìre cl'un titrc: l'ócriturc et la folie sont clonnés à ou tel mythe, ìe mytìrogrammc publicitairc cst urìe occasiolÌ pour
voir, dans un ( espacc rayonnant ). Les deux objets, dont le dessin le pubìic de se raconter urrer histoirc. Les afÍìcÌres mvthograplì iqLres
ér'oque queÌc1ue vieux catalogue de vente par crrrresponclarÌce, sorÌt tireÌìt, scìon nous, ìeur force et Ìeur perénnité de <:ette incitatior-t du
mis en présencc I'un de I'autre, sarÌs autrc corÌtexte cluc celui dc pLrblic à les nettre eo récit, à imap-iner mille actions ct iÌÌtrigues là
l'espace blanc de l'anlronce. Cette ren<rntre est tÌu même ordre que orì iÌ n'y a que clueÌques relirtions établies et mises cn t'spacc. C'est Ìa
celle, imaginí:e par M. !ìrnst, d'une maclrinc à couclrc et d'uÌÌ paru- Íìrrce du visuel conçu pctar F)criture et .folie; c'est aussi sa perti
plLric sur-une table de dissection. C<urme celle-cj, elÌe invìte Ì'<r:il et Ìrence et s()ÌÌ propos: Maupassant, WoolÍ, Beckett, Duras, Hìg-hsmìth
Ì'esprìt <au cloubìe.jeu d'oppositìon et cÌe corrélation, cì'une p:irt entre et (Ì'autres nc clésignent janais que certains des " c:hemirts ", cles récits
une fisure complcxe et le forìd sur lccluel elle se profile, d'autre part clLre la littérature a conçus à partir tLu tÌròmc écritrrre et folie.
crrtrc les derrx éléments constitutiÍì de ìa Íìgure eÌÌe-mênrer,, rrn jerL
d:rns Ìequel, selon CÌ. Lí:vi-Strauss, se rcconììait La móthoclr: strlrctura-
listeT. Des olrjets hors de lcrrrs c()ÌÌtcxtcs soÌìt coÌÌscrvós afirt de pc-rir L'émotíon et Le regard

l-a plupart des annonccs presse des éclileurs dorrtent I'clÍêt cÌe pan-
ì' Â. Lcroi Grrrrìrrr, tr tnrì,er h ntontle, t'tris, Ì,]d. llcÌÍônd, 1982, p.6.1 neaux pubÌìcitaires ou rÌe vitrines de libraìre. Ces el{êts ne soÌìt certes
" l-'a1fiche est rcP|rxÌuitc (lrrìs,\. Lcroi-(;() rh..rt, L? geste et Ia laÌaÌe, t'aris. lìÌ. ÀÌìrìn
IíicheÌ, ì9iì.1, p. 2S'1.
' CÌ. l-i'rì-Strarrss, Lt ttyatl íltìgní, Ì'â.ìs. l'1on, 198:1, p. :ì28 i Á. Lerc,ì Gourì,arr, Le ge!í( ,t Iì pannt. op. rìt., p.28i.
176 Sous les signes, les stratégies L'image, pour troubler les lettrés \77

pas le fiuit du hasard, Ce sont de véritabÌes codes de communica- de couverture ou Ìa première double page. C'est I'instant oü se conju-
tion choisis en fonction d'une stratégie et d'eÍlèts de sens recherchés guent non pas ,,le son et le sens) comme dans Ìa paroÌee, mais Ìes
auprès de cibÌes cÌairement jdentifiées et visées. Et chacun de ces lignes, les formes et Ìe sens.
choix est évidemment signiÍicatif d'une certaine conception du livre, Tout au long de ces pages! ÌÌous avons reconnu clue Ìa part de
de l'édition et dLr choix d'un certain lectorat. Quand on regarde Ìes I'image et pÌus généralement du visible est essentielÌe dans l'ótablisse-
annonces des puF, Ìes eÍfets sont tout autres. On a indiqué I'effet de ment de Ìa reÌation entre l'éditeur et sa cible. Les visuels et la
couverture produit par cette colÌection particulière qu'est Quadrige. qualité même de I'espace des annonces ne sont Pas le seul fait d'une
On remarque surtout, au regard des autres annonces, un eÍÍèt qu'on recherche d'impact. Cette part de l'image et du visible actualise et
proposera d'appeìer < effet-frontispice produit par la bipartition ver- enrichit, chaque annonce davantage, la signatuÌe des PUÉ'. L'image et
"
ticaÌe de la surÍâce de l'annonce. Cette partition divise également ìa Ìe visible servent Ìe positionnement de ì'éditeur: le questionnement
surface en une moitié gauche pour Ìe visuel et une moitié droite pour du monde par les ìivres, c'est-à-dire tout à la fois une certaine concep-
Ìe texte de présentation. La relation entre ces moitiés produit l'effet tion de la réflexion intellectuelle et non uniquement universilaire
d'un livre ouvert sur une doubÌe page, plus précisément sur Ìa pre- -
et Ìe privìlège donné aux ouvragcs plus qu'à l'éditeur ou aux
mière double page de ces Ìivres cìassiques oü Ìa partie gaur:he était -auteurs eux-mêmes. L'irnage et Ìe visible servent aussi la stratégie
occupée par un frontispice, une gravure que le typographe et l'éditeur adoptée dans la communication pour faire passer ce positionnement.
plaçaient face au titre la plupart du temps suivi d'uÌr texte d'explici- L'éditeur et son agence, connaissant ìes Íàçons de penser et de Ìire
tation. - de leur cible, s'en servent pour troubÌer et séduire, en réactivant des
Aussi diÍ1érentes soient-eÌÌes, les annonces-couvertures de euadrige Íàçons d'être au sens que ces Ìecteurs ont oubliées ou qu'ils ne pen-
et Ìes très nombreuses annonces-doubles pages traitées en effet-Íion- saient pas devoir adopter en telle circonstance. Il convient d'aiÌÌeurs
tispice produisent finalemenr un même effet gónéraÌ, rout à fajr parri- de remarquer que ce travaiÌ n'est possibÌe que si l'éditeur-annonceur
culier quand on considère Ìa communication publicitaire du secteur. dispose d'un solide capital de sérieux mais cherche aussi et ce n'est
'fraiter Ìa totalité de Ìa surface de l'annonce comme une couverture qu'apparemment un paradoxe
-
à contrecarÍer systématiquement
ou comme Ìa première doubìe page d'un Ìjvre traitel- pÌeine page,
-
tout ce qui peut y avoir de limitatif et d'attendu dans Ì'image tradi-
comme disent les maquettistes c'est créer un -Ìapport direct entre Ìe tionnelÌe du monde universitaire.
-
ìivre et le lecteur; c'est le lui rendre présent. Le lecteur est devant une Le monde ainsi questionné par les livres des PUF est un monde
couverture, devant unc doubÌe page, et non devant une mise en scène présent, encore bizarre et qui vous regarde aulant que vous le regar-
ou une reproduction du livre. Mis en scène ou reproduit, le livre est dez. Les livres des lu!'questionnent le monde comme Ìes ìecteurs des
un objet physique er commerciaÌ médiatisé : iì est scénographié, annonces sont amenés à questionner ceÌles-ci. Enoncé et énonciation
comme disent les spécìalistes de ìa distribution. Par contre, dans les relèvent de Ìa même thématique. I)ans un cas comme dans I'autre
annonces des run, Ie livre est davantage un objet sensibìe et un objet -
qu'il s'agisse de produire une signiÍication ou d'en saisir une * l'ir.ìtel-
de sens. On pourraìt dire
veÌle fois - eÍì retrouvant ainsi H. Wôllflin une r.ìou-
que Ìe rapport cle Ì'annonce au Ìecteur suggère des valeurs
ligibilitó est située à Ìa <bonne distance,) entre le sujet et Ì'objet. Bien
- qui pour Ì'auteur des Principes pÌus, elle le constitue. Le sémioticien d'acquiescer!
tactiles, ce fond,amentqux de I'histoire d,e
l'arl correspond bien à une vision classique. Le livre est là, présent,
d'une manièr'e immócliate. Et il s'éprouve comme objet sensibÌe dans
Ìe même instant oir iì est saisi comme objet de sens, et par son visuel
et par sorì textc. Orì peut d'ailleurs préciser Ìa nature de cet instant :
AlÌusìon esr faite ici au lilre de R. Jakobson, Six leçans sut Ìe son et Le sens, P^Í;s, Fà
c'est un début, Lrne oréc, uÌÌe ouverture. On a devarÌt soi la première 'q
de N{inuit. 1976.
178 Sous les signes, les stratégies L'image, prrur troubler les lettrés 179

Qui sera Ìe maitre du monde ?

u'

üs h yi inÈ,Eriootr "au.sn-i.r'tr343.
LEPATRTARCAT
siM-qNTreuË srRUcr'ÌipúLE
,ú 1. úq.t D.eithrr.n34.Lt PÀRLE
t\Ì Akíe' !"ú\ atins

b!4 , ** -.'-., i'"Ìl


'.4!E sÁIs rE:
Le pârtum de la salle en troir

'rÉcoNoMÌE- DE MARX.
HISTOÌRE D'I,Ì.J ÉCIEC.
P",
"",i,'._t,.

I]UR.S.S. !'TIE DE GAUC}IE.


-"
::::.:' : ]:; :,:" :::.,::;ï @
L'image, pour troubler les lettrés l8t

BREVIAIR"E DE I.{ COTIABIIATION


ítuu,ìa Dn.ryr

"Petit livre oü sonÌ clairement expliquées les règles que 1a cohabitation


politique impose à ses adversaires comme à ses partisans:'
D;I'ttnt à. I aute4 te36.
< TUÉS DANS L'GUF !),
LES F\ÉUX SÉMIOI IQt E5 DES DIF|EREN IES
<PHILOSOPHIES DE PI]R)>

Germaine et les maÌ.tiens tués dans I'euf ! 1989 sera une date
-
historique en publicité, moins par ses spectaculaires One sur Ogilvy
et BMP ceìles-ci ne sont connues que des gens du business
que par -les <meurtres en sérierrde nos héros famiÌiers:disparus, -
l'Oncle Ben's, le père Ducros er Marje-Pierre quì plizzait de terreur
les conseils d'administration, Disparue donc eììe aussi, Germaine, peut-
être pour avoir voulu que la fourchette füt aux pâtes ce que la cuilÌère
est au café soluble.
Non, il faut faire montre de plus de distance, de plus de hauteur
de- vue : 1989 marquera en fait le passage de Ì'ère des trois R à celle
des trois S. C'est du moins ce qu'affirme J. Séguéla:<<Nous sommes
passés de Ì'ère des trois R (rêve, rire, risque) à celle des trois S (sim-
plicité, substance, spectacle)... On entre dans une êpoque de sobriété
et de puritanisme à la mode Thatchero-reaganienne >r2.
Mais faut-il vraiment choisir entre le fait divers et I'épopée?
-
Décidons une bonne fois pour toutes que tout cela n'est que discours
convenu. Sinon chaque année sera I'année du siècle, à lire les revues
consacrées à la publicitó et à entendre la défense et ilÌustration que
les publicitaires font de leurs campagnes et de leurs agences ? Ce n,est
pas que ces articles et ces décÌarations soient sans impoÌtance; ils sont
simplement sans signification. IÌs ne renvoient à rien qui de près ou

Ì <Meurtres en série> et
"Germaine et les Martiens tués dans I'ceuf> sont deux rrrres
qui ìntroduisaient les arricles consacrés à ces événemenrs par Communication ICB Neus
(n' 109, janvier 198S).
'?J. Séguélâ, propos recueillis par Me'dias dans son numéro 277 de mai t989.
184 Sous les sìgnes, les stratégies "Tuet dant l'czuf!" 185

auprès de Ph. Gavi, alors journaliste à Libération, Ìa surenchère des


cle loin puisse reÌevcr d'une histoire de ìa publicité ou de réeÌs cnga-
pubÌicitós spectaculaires et Ìes stars systèmes sur l'autel desquels on
gemcnts PersonÌìeÌij...
sacrifie le produit au profìt du produit publicitaire luimême :<Au
Au risque cle passer pour un gobe-mr)uches, on dira ici que nous
lieu de se demander prioritairement queÌ produit on devrait concevuir
pensons toLlt Ìe contraìre, et Ìes Pages qui suivent chercheront à fâire
et comment eÌìsuite en exploiter les vertus pour fajre de sa natuÍe pro-
reconnaitre ,,sous les signes" de Ì'évidente conpétitürn commerciaÌe
fonde la vraie sta., Ìes publicitaires se sont empoignós dans un mano
eÌÌtre aeences, un véritabÌe dóbat d'idêes, des conceptìotrs diÍÏérentes
et parÍois antìn()miques de Ìa valeur ajoutée que représetlte la crea-
a mano d'tmages spectaculaires et de plus en plus coüteuses>!.
R. Raynaì, qui a fait plorrger des Visa du haut d'un porte-avion cr
tion :cÌes idéoìogies de Ìa pubÌicìté Autrement dit' quand D. OgiÌvy jeter des pneus du haut d'un somnìet des Andes, semblait dans Ìe
écrit Zer confessíons d'un publícittires, J.-M. Dru Le Saut créatif' mêrne article lui répondre t(Nous venons de franchir une fìontìère
P. Lemonnier Quand, La publicité est aussi un ram&ns et J. Séguéla 11oll1'-
en pubÌicité automobiÌe, celle de la crédibilité. Jusqu'ici, ce que l'on
uood, late plus blanc ou Demaìn il sera trop slnr6, il est possible de n'y
montÍait à Ì'écran s'inspirait d'un principe de réalité. Là, on sc situe
voir que des coups de pub, mais il est possible aussi - -et PeÌri êÍÍe
sur un autre plan, ceÌui de Ìa sympathie, de Ìa vivacité...>
mêm". légiti-" d'y reconnaitre des quêtes de valeursi, dcs prises
-
cn charge individuelìes ou coÌlectivcs de telìes ou telÌes conceprìons Ainsì la presse grand public, à I'instar de la presse pro{èssionneÌle,
se fait Ì'écho des controverses entre publicitaires. C'est un lait assez
du faìre pubÌìcitaire. Il en va de même des propos d'un J. Felrìman
récent, qu'on peut dater du milieu des années 80, et qui témuigne
ou d'un Ph. Michel quand iÌs s'exprimeÌÌt sur Ìeur métier et strr ìerrrs
sinon de Ìa <publiphilie> du grand public du moins de sa culture
campagnes;il en va cle même encore dcs <concepts d'auence"8 par publicitaire : de son attention à Ìa diversitó des approches publici-
Ìesquels ceÌÌes-ci cherchent à se positionner en termes de créarion
taires. De même, l'nxpress du 5 avriÌ de la mêrne année 1985
exposait pédagogiquement à ses lecteurs k:s démarches respectives
de Ph. Michel (cLr'ÍlBBDo), J, Séguéla (RSCG), J. Feldman (FcA !) e r
I'ubliciti, sómiotique : nême débat D. Robert (à l'époque, patron de Robert & Partners) à partir de cam-
pagnes exempÌaires : Mamie Nova (pour Ph. Michel), Citroën (pour
En février 1985, J. FeÌdman donnait indirectement sa Propre concep- J. Séguéla), Yoplait (pour J. FeÌdman) et Médecins sans Frontières
tion rÌe Ìa publicité en lançant <un pavé dans Ìa mare': iÌ dénonçait (pour D. Robert). Un nervs apprenait donc à ses Ìecteurs, sìnon
óclairés du moins sensibiÌisés, qu'il existc dc vóritabìes idéoÌogies
pubÌicitaìres et qu'eÌÌes peuvent ôtre très difÍèrentes Ìes unes des
I Darid Ogìlrr, tcs confes:iont d'un pubÌìt:itaire, I'aris' Dunorl, 1985 $our h der- autres, que Ìes campagnes sont des discours sur les produits mais
nière édition). qu'elles peuvent être aussi analysées comme des discours implicites
a tcar-M"ric DrLr. /,r"//
'"attt,
l'tt -, l,l. l.-Í L"ll.'. I'rd4.
. i,,.,,. r.",,,,,,,",. Oüand,., brbtt p ,.' oi,., ,,, ,a.ta", t'r.t,. llJ, l,e '.. l.ì8ì. sur Ìa bonne ou mauvaise façon de cÌiscourir sur Ìe produit, et donc
ldLqtreq sec,,elr. rtoitw-d tà." f!u\ bLanc' P^rts' ìrÌammarion,
1985: Deno;n ìt sera
de faire de Ìa pubìicité. La presse professionneÌìe n'était pas en ):este;
r,,,r Prrrs. Flrmmrri,,ìi. l'ì'ì'ì
i (, 'izr e l o'',1"r'. ., ,rFl.ri ', ,,,n e ,,,,, \r;rF Stratégies parlait même de rhétorique : ul-e dernier film de FCA!
'nn,riur."
.,,r.,.rr*ü"U , ,,.r Lr,l,,,|"" ,llÈ, rr l,','r-rì'l '- 'Ìr'r'q' 'l pour YopÌait Nature est un Íììm à messiÌge et à parodie. Le message,
rr.e a l'. rczl.er I rxi,'l,L'.,11,. - J.lìnir
-'lrr' d' "l'tt"t"o"'
L'a*ìologie c.r iiorrc cì( rìr,rLrrt P.rÌ:Ìrl gm.rtiq re. i'trt pr*disrnrtiqLre étant c'est celui de I'annonceur tout puissant; Ia parodie, elle, porte sur le
""i.,i
,.-r drr .rrrclr.. L:,1,,1!i,,* d, rr'.rr' '1rrr'rgrr'rrr9r':lc' re' r'- r pr tir dr'
"ii.r,,.
'n, m,,,r ôú.1.e.-,r,, I'ti',',r ,h'rc, e'qrir','- if,l-,:rr:ì rJF' I'nrcÌ rr"
i N""t ïi""ls ìci alÌusio,r ì lc,ìquére rc;li.ce p.rr Strrtegrtr rLrr lt\ PhiìosoPhics
d'agences: (Cloncrì)ts d.ìlìcÌr{1 : Ii phrl,+,'phLe 'irns lt' t"'Lllorr' 1ri ú26 ocrobÌe q
J. FeìdÍìan, Libírntxon, 2tr fé!ì ier Ì985.
19i18).
l8ô 50u' 1?\ \;gnp\. let çt,utlgie, <Tués d,ans I'ceuf!, Ì 87

clétournement du genre publicitaire. La rhétorique feÌdmanienne per- venu à ur sémioticien. Mais eÌle empêche de dìre n'imporre quoi
siste et signeÌ0. > -
lut Ìa réponse. lln eÍïèt,- c'est une noble tâche que de servir de pçarde-
Une telle situation (historiquei pour Ìe coup?) ne peut Pas rìe pas fou par ces temps de laxisne, oir face à un Tout est permis épistémo-
provoquer Ìes sémioticiens à intervenir. La sémìotique n'a-t elle Pas Ìogique par trop fréquent, on est amené à répéter, incessamnìent, le
pour objet ì'arraÌyse de Ìa signiÍìcatiort et donc du discour-s? Bien plus, Tout se tient saussurien. Et ceci sous peine de petdre son âme, c'est-à-
Ìe principe même de Ì'intervention cle la sémiotique 511uç11ì121e sl1 dire son .identité narrative>, pour reprendre une heureuse Íbrmule
tous cas
-
c'esÍ d'aider à passer de la saisie des dilÍérences à la défi- de Paul ììicceur.lÌ parait que, lors çÌ'un récent congrès, un émjlent
nition de -s relations. -I out le monde sait désormais que J. FeÌdman ne professeur s'cst interrosé sur Ìa di1lérence clui existait entre Ies sémio-
peÌÌsc pas comme J. SéguéÌa, que Ph. Michcl n'a pas la Ìnême pôsiiion tiques amérìcaine et européenne. Cette dernière ne reconnaitraìt pas
que D. Ogilvy. Encore s'agit-ì1, si I'on veut alÌer plus loin, de savoir de l'existence du référent, de Ìa référence du signe à Ìa nréaÌité,, aÌors
quoì Ì'on parìe, de préciser Ìa nature de ces diÍïérences. C'est alors que celÌe-ci serait de I'ordre de l'évidence. La sémiotique europeenne
qu'oÌì pourra reconnaitre Ìes compÌémentarités ou les contradictions aurait donc tort. Un tel raisonnemcnt pourrait aisóment ôtrc pris
entre phiÌosophies d'agences ou entre Pratiques pubÌicitaires. Dans Ìe comme un compliment : tout en s'empêchant de dire n'importe
débat qui s'instaure, la sérniotique pcur apporter urre certairre objecti- quoi, la sémiotique parcnthêtise en quelque sorte toute position gnr>
vaiion ou une certaine expÌicitation de ces enjeux norr exclusivement séoÌogique, Ìieu des <convictions intirnes>, et donne ainsJ la paroÌe à
commerciaux, en disposant ces philosophies les uncs par rapPort aux n'importe qui. La Ìiberté du su.jet et Ìa cohérence cle ì'ob.jet sémio-
autres rclativemerìt à Ìeur problénratique commLlne : Ìe rapport erìtre tique sont à ce prix ".
ie discours publicitaire et Ìa ( réalitó-produit ,. On corrprendra ainsi Aussi Ìe débat des pubÌicitaires est-il à sa Íàçon celui des sémioti-
Ìes vérités respectives de chacun des protagonìstes. Dans une interr iern ciens. Que Ìes pubìicitaires parlent du rapport eÌ.Ìtre la pubÌicité et le
accordée à Ch. Blachas (.Stratégies, n" 431), J. FeÌdman disait très.jus- produit ou que les théoriciens du langage parÌent du rapport entre le
tement : (Je n'exprime pas Ìa vérité. J'exprime ma vérité. Le marché cliscours et le monde, c'est Ìoujours Ia même question; ceÌle de Ìa
puLlicitaire a besoin de diftérences, de taÌents clivers. Séguéla exprime foltction du langage que celui<i soit verbal ou non-verbal peu
la vérité de Séguéla. PhiÌippe Micheì cxprime la vérité de - se demandeÌrt si la vaÌeur du produit, porir
importe. I-es pubÌicitaires
Ph. Michel. " Mais, beau<rup plus essentieìÌement, plus intimement le consommateur, préexiste à la publicité ou si c'est Ìa pubÌicité qui
pourrait-on dire, Ìes sémioticiens se sentent ici cttncernés du fair quc la Ìui donne: les sémioticiens si lc lansase est la représentation d'un
la sémiotique elle-même est née d'optioÍÌs prises et de controverses sens déjà là ou s'il en est la construction. Qu'ol y vienne par la pra-
tenues sur le même sujet : le rapPort du discours et du senç ì tique ou la théorie, la publicité et la sémiotique débouchent en fait
la réaÌìté sur Ìa même double probÌématique : la fonction du langaue et " l'ori-
" ".
Dans sa préface à Ìa première pubÌication cles Noutteaux Actes sémio- gine du sens.
"
Íiqzes (Limoges, Ed. 'I'rames, 1989), A. J. Greimas indìquait assez Parlons de choses concrêtes:de Ìa petìte cuilÌère de MaxweÌÌ, des
I'actualité voìre la permanence cle ce débat, et Ìa position qui est ceÌÌe Chevrons Sauvages de Citnrën, du tunncÌ de Black & White ct des
de ìa séDriotique structuraÌe, historiquement d'orisiììe euroPéennc : cinq Ecossais de Label 5: ou encore du pendu de Super GÌue 3,
n A quoi sert ìa sémiotique ? demandait une fois un esprit non pré- cÌu cow-boy de Marlboro, du champagne Piper-Hcidsieck et Ìa bière
- 'Ì'uborg, ces campagnes pouvant respectivement se substituer atix pré-
Ì0 Cette idi'c d'uÌr ÌÌér.rdìscours pubÌi(itaìr'e, cl'un discours de Ìa lmbÌicìré suÌ elle Ìnênle cédentes, comme oJì va le voir.'I outes sont de grandes campagÌres aux
rlans ses nessagcs se relÌoule darrs cettc ri'flexion cle Ph Cavi citóc ParJ-NÍ I)ÌÌr: yeux des profèssionneÌs; toutes représeÌ.Ìtent des sautij créatif,' p,rur
" ÌlLr
"dircsìous combier cettc voitLrrc est .lìouette", orì a saulé, en I'espace de clueìc1ucs
ânnées âìr "Ì)ìr(s rì()us .(nn!Ììent lous savcz diìc combien elle esl cÌrouellc"' (1-, razl reprendre Ì'expression de J.-M. Dlu mais elles relèvent, selon nous,
cr,íatlf, p. 233). de discipÌines aussi difïérentes que Ìe saut en longueur, le saut à Ìa
188 Sous les sígnes, les stratégies o Tués dans I'euf! , 189

perche, Ie.jumping et ìe plengeon. La cuillère de MaxweÌl pro- trait à la création et au rôle de ìa pubÌicité. Donnons ici quelques
cède d'une démarche qui s'oppose à celle des Chevrons Sauvages exemples de réfÌexions d'autres publicitaires qui suggèrent elles aussi
Et Ìa démarche dont procèdent les cinq Ecossais peut être considé- une Ìigne de partage des genres à partir de la catégorie fonction cons-
rée comme Ie contraire de ceÌÌe de BÌack & Whìte:deux démarches tructive ?.r fonction représentationneÌle :

contraires donc pour le même univers de produits. Si Ì'on veur justi-


D. OgiÌvy : u Une publicité doit être cohérente, vraie, crédible er
fier ces différences et ces oppositions, et établir un Ìien entre Ìes agréable : un représcntant meflteur et sans manière ne vendra
grandes options sur ìes rapports entre discours et (réaÌité>' d'une jamais rien... Je dis toLrjours à mes collaborateurs : .lorsque toas
part et Ìes campagnes qu'on vient de citer d'autre part, on recourra donnez à voÍre {amiÌÌe des informations sur un prod,uit, vous ne lui
une nouvelìe fois au modèle constitutionlel de ìa signification qu'est racontez pas des mensonges. Alors ne dites pas de mensonges à ma
Ìe carré sémiotique. Pour cela, posons tout d'abord que cette problé- famille... Si tous Ìes ânnoncrurs abandonnaient Jeur emphise et se
tournaient vers une pubÌicité factueììe et inÍbrmative, norr seulement
matique discours/réaÌité constitue un micro-univers sémantique (de ils augmenteraient leurs ventes, mais jis se meÌtraient cux-mêmes du
nature idéologique, on I'a vu) susceptible d'être articulé selon une côté des angesìÌ. o
catéÉiorie ÍòndamentaÌe et de devenir ainsi inteÌtigible. La projection Ph Michel : " La publicìté n'est pas jeu de mots mais.ieu de sens.
de Ìa catégorie sur le carré fera reconnaitre quatre grandes idéoÌo- La pub rePrésente et modrfte le raqport cle présentation. Elle fait qr,r'il y
gies de Ia pubÌicité. On s'attachera alors à ilÌustrer ces idéologies par a une multiplicitê des points de vue, qu'on peut et aimer et nc pas
aimer une chose... La pensée ÌatéraÌe, c'est cette bizarre manière
quelques campagnes particuÌièrement représentatives. Sont choisjes de déplacer ìe sujet en permârìence pour ìe revoir de façon íraiche,
bien sür certaines campagnes réaÌisées par les agences des quatre rouveÌÌe, différente, significative, émouvanre. Or, on est en train de
idéologues que sont D. OgiÌvy, Ph. Michel, J. Séguéla et J Feldman découvrir que c'esL cette méthode qui commur'rique le mieux: r'esÍ
r.rous alÌons voir en quoi iìs le sont mais aussi d'autres campagnes Lorsqu'on décale sa vi:ion d'un unìuers qu'on inrente. ll faur de la pro-
-réalisées par d'autres agences afin de- montrer la généralité des diffé- ro, ation pour inrenler ..ì2.
rentes options, Ieur possible transversalité Par rapport aux médias, J.-M. Dru : .De nombreuses iclées de carnpagnes sont inspirées
par Le udcu du prod.uìt. Les campagtes Maxwcll, Dalette, Flaldise,
aux secteurs, voire aux cultures d'origine des agences et des créatifs. Liebig, Orangina ou Petit Gervais... en sont des exemples. Chacune
A partir de quelle catégorie peut-on articuler cet univers idéolo- est fondée surr I'obseruatìon d'un dítail de la lie quotìd,ienne... Les fi1ms
gique des rapports entre discours et < réalité > ? A partir de Ìa catégorie Eram sont très divers.(Mais ìls ont rous), malgré tout, queìque chose
de la Íbnction attribuabÌe au discours : fonction constructive vs fonc- de commun. ÍÌs sont ironiques, irrcspectueux du produit lui-mcme,
voire même iconoclastes,..
tion représentationnelle. Pour Ìa présenter sans convoquer immédiate-
ment toute Ì'histoire des théories du Ìangage, repartolrs de Ì'aÍfirma- "Ce qui vaut pour les démonstrations se vériÍie pour toute lorme
de publicité. Pour qu'un message soit vraisemblablc, tlire Ia térité ne
tion de R. Raynal seÌon Ìaquelle "nous venons de franchir une sulrtt pas toujaurs. "Telling is not sellingu, disent lcs Américains. 1l
frontière en pubÌicité automobiÌe, celìe de la crédibiÌité. Jusqu'ìcí, ce law ro,htt,h?ì r? qut \?ta a lo ,our,c dr l4 rtpdibliro. le !ar r-ur qui
que I'on montrd,it à l'écran s'inspírait d'un principe de réalité (c'est nous déterminera I'adhésion...
<En Íajt, dans bien des cas, le critète <crédibilité> n'est p.s per-
qui soulignons); là, on se situe sur un autre pÌan, celui de Ìa symPathie, tinent. Cc sera le cas des campagnes oü la dimension ratiorrnelle du
de la vivacité,'. Si une telle affirmation indique assez de quel côté de ÌÌessege est faibÌe. lÌ serait absurde de dire : je crois ou je ne crois
Ìa frontière veut se situer R. Raynal et queÌ sens il donne â Ì'histoire pas à la statue qui pleure des film' p,rur ler crs\erres uasr. Publicités
de la publicité (et quelle est par Ìà même son idéologie), elle n'esr svmboliques, évocatrices, irmotionnelÌes, le langage puhlicitaire ó oLue
pas moirrs suggestive d'une typologie des genres de discours que ce en plus rers .es Íegistres aìr La (rr'd,ibìlìté est inopérante. Regardez une
ãi...te.,. de création estime être comprise Par tous. Mais, I'est-eÌle
vraiment?. lÌ semble bien que oui, si I'on considère ìes nombreuses et ÌÌ D. Ogilvy, lrs Coníe$ìons d'un Pübtttttaìre, ap..ìté., p.8-9.
diverses décÌarations et publications de ces dix dernières années ayant D Ph. Michel, interviews dans.ShdrlSìrr n" 62ô et n" 385.
190 Sous les sígnes, les stratégies <Tués dans I'ceu-f!> 191

série de spots télévisés, vous verrez que vous ne vous p'lsez pas Ìa P. l.erìonnier: oLe plus célebre (film Epécla) rret eìì sceìÌej uu
quesLjolì : est-ce qlle je crois à ce nÌessiÌs-e? Dans la maiorité des cas, pìus cxaclement au Ìit, un homme et une femme; la lènìme dort,
là qu-.rr"r' ,po:rr.rit hor d. prnp'* '' épanouie. L'hommc a lc hoquet. Il essaie tout, Ìe pirrcemcnt dcs
ptoduìt on
1. Feldoran : u(lì faut) ,e dem,tndet pltotitaìtempltt quel narines, ìa position ìotus, ìa respiration bloquéc, etc., mais rien n'y
d.eírait conceaair et camment ensuite en.xplaìter le.t t)ertus Pout faire de lait. Soudain, iÌ aperçoit un verre d'eau sur la table dc nuit de sa
sa n(lture Proíonde la traíe star".. 1èmme. lÌ veut I'atlrâpcr... et le renverse. La voix off de consta
o C'est ÌoÌrdemental clc réhabilitcr la particularìté rÌc Lustrrcru I les tcr: "Srrr un mateìas Ìúultispìrc, un prLrt virre su nuir sens réveilìer
eu1ì. Il vatLt mielrx êlre clcs pâtes aux 'eulr qrrt 'les pircs céìl,:bres ì'autre, ou presque." lÌrut ì'art de Jear-ReDé Ruttìnger (dirccteur
ct symÌliÌthiclues... Le spett.rr lc n .r.irmrrs -te lt ltrtmotiv cle 'eÍle dc la prodlLctiorì audìovisuelle de Ì'aeence lmpact, dont P. Lernon-
C'.ti davantagè une reLation cle charme. (I)ans une Pub à rrier est 1c PDG) est de ne rien imposer aux ty'líspectateurs quì ne .oit
"g"u.",
vócatiorr européenne), n'ont aucuÌìe chancc les fiÌms praticlrrarrr rsssenti par eux tomme une tronche (le í.tie à peine outrée, taut Juste plus
I'inceste ìocaì,-ceux qui fonL ì'ultime privatejoke pour un qurÌtieì, 1)raie que ,Jraie. rt7
'rne I'rr'\'rrì,c. Ln PJ\:.. rr'ìe rar-gorir'''r i:rìe
\,,u''ìe r,,rrìÌions j:'rn:ris le á',Jrrir er''lirr'ion i Il nous fallait au moìns ces sept citations de pubÌicitaires pour que
D. Chcvaìier- : " La itar'strtttógie, c'est une méthade, une phìLosophie' le lecteur ne soit pas obligé de nous cl'oire sur paroÌe quand nous
une manière de ttoir Ia uie. En dél'inissartt un physitluc:, LllÌ caractèÌe
ct un stvlc, ot1 rcüÍ tréer une anatlogie entr(-' uÌÌe marque et disions que Ìes idéoìogies de la pubÌicité pouvaient s'organiser à par-
une pcrsortne tÌ5. tir de 1a catégorie : fonction représeÌ.ìtatioÌÌÌÌelÌc attribué au discours
J.-Seguéìa:.Le meticr ile ìa publìcité est de donÌrer-du en lalcnt à uíruds ÍbJlction constructive. Lc lccteur a pu ainsi repérer que certains
iotrsòit,-otion. Flle d<\t eJJacer I'ennui de I'ar:hat quotidìen hahil-
lu parlaient ,J'u informer sur le produit), d'u.exploiter Ìa vraie nature du
Iant tLe rêae les produit! qui, sans elle, ne seïaient que aa qu'il\ sÔnt ' produit ), de o dire la xérìté , ou eÌrcore de ( pt'oposer une traÌìchc de
Vo,vc:z N{arÌboro, c'esl ullc cigarctte qui, rÌès la prcmière bouffée,
\,,otts mótamorphote.l 491 l.,tv. \-,,ir ibitÌL l.r nlee.i. dt n,,llc ârt lln v\e tout juste plus traìe que lraíe > alors qLre d'autres, au contraire, par-
tt"tt tou'o"t-""ttr, il y iì utì ltttrr qui s'tmmerlìe C c\t ltri qlÌe Ìa Ìaient dc faire cn sorte que ìes produits ne soient pÌus ce qu'ils sont au
publicité doit éveiller. rVotre métíer est (Le J(rire entrer de la.lumy'e par quotidien, de < représenter eL madirter le rapport de présentation >, de
u.n r:ôté d,u tunnel et d'e rair sartir rme locomatì1)e de I'autreu\6. .,.d,ícaler la vision du monde) ou rle
"críer uÌìe aÌìalogie). S'est engagé,
dans ces citatioÌÌs, Ìe débat entre le sens préexistant au lallgage ou
construit par lui, c'est à-dire Ìc débat entre les tenaJìts de la fonctiol
I M l).,, /, .,ur .rn,it ,'n , i . r' 17 rr"re lr, i;. lò; 200 -rrl Pr' 'i-'r ' 'lrr l' représentationneÌle du langage (par son discours, ì'homme s'attache à
,r.iu'i.r,.'. ,t,,t n';1 11' IB:':' 2ô1,,.'rr':r ,r' L, '.. ' 'r''i-rr'"L' et '1r''ì
.", i,;r4"... tout .rrti,.':r'1, pr,'hl"mrtique dLr criÌÌible et dcs rapports "Ìéalit'''/dis interpréter la réalité Ìes objets du morrde et à en saisir les sens
(déjà là, et Ìes partisans- -
de la lonction constructjve du langage:
' l l,ldn,.rrr. rrrr.rrir," 'lcr.' . rr. r", rr la Ì,ri -nìrÌc i' terr"r' ' r 'a 'ì"rsr' 1r"L'ò" /; '
.r:' leuic, l9ò5,r ',"". ,on,in,' 't,'" (8 \,J r 109 'r' Jdr \i'I lr89' niar'Ìt Ìa possibilité ou la légitimité d'une teÌÌe représentatioÌr, l'honnre
oout la deurìème. ','1"''."
iu L Clcualier, inlerviexÉ dâÌrs larticÌe de StnLégi\ (i" ti26, d'(xrr)Ìrre 88) "'r'sr'''
.rrrr ,,,n.rut' Ll ru.rrcrs.
' t to, tt't ìlon' p. t..t.2'4 2i'i '.'PÌ,,1 ,'-'rÌr IlJ'r*m'Ir coììÍìânce. Le mode cl'envie" (la pub aucÌnrvisuelle) restera roi et véhicuìcra ì'ìnìagi
','',,'t. ,Ho;i\".nd
,,,':,;,,:,,i,,1, , ,i., n, ,. ir.,r. 1 s";u-t, r-'lrr . ."1.-n' , \.r i{e,l ..r ,,ut 'urJ nur .rr naìre. La pub,ìode d'cnìpÌoi (prcssc) ct cclÌe node d'achat (promotion) continLLeronr
. , . r , rr , r
",
r l. r, r!\Jse 'ÌÈ lc. J, '' ',r' l( r,, rur n" roi' {: O r I' Lr -rr 'ìn rr' I ì)rh
.r r r de 1açon nationale. " lndiquorrs icì urL remarquabìe lait de connoration,.bl-à-.Ìire dr
ColìLttunrcatì,'ttr'B t\ eüi (r1'108' cÌe jalricr l989), il rÌécÌarc: "Depuis
r

,;,t.;i.r".l''. '
mise en srstème (oppositìons c( hiórarchìsatìon) dcs Íônctir:rns clu discouls; le discouìs
,rr-el,rrr. rnutr.. rr. ì'ul, riÌrir'\"rr 'irr., tircìLìrÈ r,,'r'rr, l're')er'rlra 'l 'r''t "-n- corìstì uctiÍ, vi hicul€ d'imaginaire, esr Ìié aLrx ìargages audnrvisueìs et relève de Ì'inter-
-r. r,',. tt' ii, I Ì :r r'| t'-'1..r r''tr.r l" 'r'rrr 1"1 " 'Je' l' I'Lr '' nationaliré euÌopéenne;pxr conÌre, ìe dìscours représentationncÌ, vóhiculc rl'inÍòrma
'l'.,.i".-,,,.
i,,,'i,,,.,"i"-'-,. '.i Lr r.r,h r, ,'-i.''-r t'ii'n"hr1 J'r"' Or t'r'r rr' r'r'l tion. est Ìié à l'écrii ou au verbal et reÌève des rationalités particuìarisantes. Ìl s'aeit
1,.^,.t.r f, a.: \l:"',.r, ',:irr. rr',, ,r'rrrt'Ì lôrr lÈl'r':ìdor'''r 'rrre l "'r''tt n' d'un système connota(ìÍ ìndividucl, conìme la coÌÌóÌa1iorì disc.,LrÍs sacìé/disrolrrs prr)
i' r. '. ì;\, ,, i,,,,r',,.. (,\r r,:t, i'rr"- r"1',rr '.lrrr I'rrb ue' r -' ' 1"-* fane er langue ìatine/ìangue Íìançaise a pu consti.uer, à rLÌre époque, an sÌsrèmc
òìirc',', "'a,'.ìeb"t, tlle sera j.rcénrerrr" in 1,.u mrls 1ru r 1'cu ces brr .orìnotrril 1-Ìr l]rmcnÌ .olLa rrt.
':l,,,n..'"'rrr',
Ìières vont tomber et ìcs rnnoììccÌrrs Ìeú,uÍneìrrrrt \i fs la puÌr rrr iìs attront dt ììouveâu I P. lemur rrcr. ltúnd 1o p|blt,'t;,1 ap. tt . p. ú7.
<Tuós dans L'teuf!> 193
192 Sous les signes, les stratégies

ticlues. Ainsi D. Chevalier se réÍère à la philosophie de -i SéguéÌa ou


considère qu'il ne connait les choses qu'en tant qu'eÌÌes sont cons-
P, Lemonnier à celÌe de D. Ogilvy. J.-M. Dru n'est pas un idéologue
truites par son propre discours. En d'autres termes, pÌus profession- qui considère les quatre positions a priori
ce n'est pas un défaut !
nels, s'instaure une opposition entre la vaÌeur inhérente au produìt -aussi vaÌabÌes les unes que - Ìes autres; son
(elle sera maniíêstée ou expìoitée par la publicité) et Ìa vaÌeur créée Propos sur le saut créatif
" " se situe en deçà ou au-deÌà de ces options, même si les exempÌes qu'il
par Ìa publicité. A partir du moment oü I'on pro-iette sur Ìe carré
donne spontanément reÌèvent le plus souvent dc Ìa pubìicité réÍéren-
sémiotique Ia catégorie lonction représentationneÌle vs Íonction cons-
tieìle.
tructive qui a pu être reconnue comme articuÌant I'univers des jdéolo-
gies de la publicité, oÌ.ì aura quatre positions possibles, interdéiìnies
selon des reÌations de contrariété, de contradiction ou de compÌémen-
tarité. Et, par là même, quaÚe idéoÌogies qu'on disposera et dénom- La publicité réfcrentielle
mera ainsi (Ìançorrs immédiatemelìt une oPA sur toutes dénominations
plus astucieuses) : La pubÌicité référentielle, c'est ceìle de D. Ogilvy. C'est une prrblicìté
de la vérité coÌÌÇue comme adéquation à la < réalite r, comme la quasi-
0.0GtLUv J. STGUELB
restitution de ceÌÌe-ci i ( Ì)()nnez Ìes Íaits,, clame Ogìlvy. Il s'agit aìors
de rc-produire une tranche de vie pour clue le consornmateur se dise
PUBLICITE MYTHIOUE
in petto '. c'est bien çà, c'est bierr vu, on p:rrÌe de Ìa réaÌité On cher-
PUBLICITE BEFERENTIELLE
chera le petit détaiÌ quì ne s'invente pas, versiott moderne du petit fait

f
rx
fonct on représentation nel e
du angage

orìction construclive
dén ée
ionct on consÍuctive
d! angage

^I
Íoncton reprósenlalonfe le
déniée
vrai stendhaÌien. Ce sera le bruit de I'horloge dans Ìa RoÌÌs-RoyceÌ!
ou ia Íàmeuse cuiÌÌère de Maxrn'ell, ce réflexe de vouloir encore
reprendre un pcu de café soluble Pour être assuré d'un bon café I,a
réalité de D. OgiÌvy s'avère être ceÌÌe de la vie quotidienrte : des Pra-
tiques, des gestes et dcs situations qui réfèrerrt à d'autres PratiqLres.
d'autres gestes et d'autres situations et {ìnissent ainsi par donner ul
PUBLICITE SUBSTANTIÊLLE PUBLICITE OBLIOUE eÍïêt de densité et d'épaisseur au <vécu>. Cette idéoÌogie référen-
tielle, qui vise à produire des 1ìlms et des arìnonces réalistes, peut
être à ce point assumée par D. Ogilvy qu'eÌÌe en devient une véri-
J. FTLOM R N PH, M I CHIL table éthique: l'honnêteté est finalenent coÌrstitutive de Ìa .ompe-
tence créative : " N'écrivez -iama is une rtttnonce quc \iìus ne voudriez
pas mettre sous ìes yeux de votre familÌe. Vous Ììe mentiriez P3s à
IÌÌustrons maintenant les quatre positions Par ces quatre idéologues votrc femme. Ne nrentez pas à la micnne. Ne Íaites pas
de la pubÌicité que sont D. OgiÌvy, Ph. Michel, J Séguéla et J. Feld-
nÌan. Ce sont des idéologues en ce sens qu'ils ont opté pour une posi-
tion qu'ils valorisent aux dépens des autres de façon polémique. Livres ì$ Voici le début du texte cÌe cettc Íameuse annoncc Ogiìvy pour RoÌÌs-Rolce : Qu'elt
'
ou interviews sont pour eux I'occasion, recherchée, de reprendre sans ,c,l.r l,r 'le Lr Itu.l"Rot', 'rrr,rl .r ', r',rrure cu rrurr,l, lt rr) r au rrrre rr i8i, rr-
cesse son expÌicitation et Ìa définitiolì de sa différence par raPPort aux Jorln. ..r-1.r,,,-rr,rirì 1'.,', ì',11", re " 'h.r'1rr, rle,Lnrr r,,|,i ,, rr rru;ni'L'
,l- Roll. R^r'e. \ 100 lrr l.'-,.ui l.,rr l' I'lu'd.brurr ,1" r'1, norr.ÌÌe l<,'ìì' Rn1'e.
autres. Ce sont aussi des idéologues dans la mesure oü ils croient à , c'r lr pe lu,-'.',ri Ílüc.,1., ld,; lc,l,rô-i;li..r. t1 h,,iq.F d. Ir rerrrr /re ìÍnrnr l-
Ia puissance de Ìeurs idées et que, de fait, eÌles le sont assez pour que siLeüce ilu moreur esr si'.p.enant. lìrlis Pors cl'échaPPenìcnt éliminent Ìes Ír,,1Ltcnces
soúoÌes pâr procócló acousticlLre.,
d'autres publicitaires s'y réfèrent en parlant de leurs propres pra-
l1ì4 Jplr /a, .4n,,r. l^.tntìgì?\ <Tués dans ['ttuf ! > Ì 95

Si vous clites des mensonges sur uÌì produit, tôt ou tard vous serez ouvr.ìge!r. Disons simplement que Ìe iaire-paraìrrc-vrai de Ìa publicité
dccorrrert soir prr le goureTrrt mt rrt. rlui rou. pour.uir r;. s,rit par réÍérentielÌe repose sur des discours 1) rrarratilìs, 2) Íìguratifs (cr non
-
Ìe consommateur qui vous punira eÌì ne rachetant pas votre pr()cÌujt; abstraits) et 3) descriptifs (et non normatifs), c'est-àdire en Ìangaue
ìes bons produits se vendent grâce à une pubÌicité honnête, >tt ogilvycn : l) des articulatioÌÌs avant/après, 2) des rcnseisnenrents
Maìs pour qui s'attache à rendre compte des clillérentes idéolo- coÌÌcrets ou des attraits anecclotiques et 3) pas d'adjectifs ou dc sio-
g-ies publicitaìres et des concepLions dc la production du sens qu'elles qan5.
représentent, la publicité référentielle reÌève d'une certaine stratégie Plus essentieÌ, la constitution d'un róférent interne : D. C)giÌrr ejme
cliscursivc, c'est-à-dire d'un ensembÌe de procédures visaÌìt à présenter Ìes démonstrations, lcs recettes, ìes annonccslrcsse (<Je n'al .lrnrais
le discorrrs comme vrai. La cluestion n'cst pÌus :rÌors : ce discours cor- aimé les afïiches>) qui séparent nettemeÌÌt Ìe texte et f image
rcspond-ìì à Ìa róalité ? mais : quelles sont Ìes conditions de productioÌì, un n dessin réaliste > ou mieux Lrne photouraphìe : ( Ìes pl.Ìot()s r-( prr- -
interncs au discours lui-même, qui 1e donnent pour vrai et Ìe font sentent la réalité, alors que les dessins représeÌÌteÌìt la farìtaisie, qur rsr
accepter comme teÌ ?. Une teÌÌe approche fait Ì'économie de tciur p,,si- moirrs vraisembÌable >'?2. QueÌ rapport eÌÌtrc ccs démonstrations, ccs
tivisme. < Une lois le Ìieu de la réllexìon sur la véridiction (Ìe dìre-vrai) rcccttcs cL ce type d'annonce? L)ans tous les cas, il s'agit dc í.rilc cn
instalÌé à I'intérieur du discours Iuj-mêmc, des interrogations rraïres sorte qu'une partie du discrrurs renloiz à une autrc partie du discours;
cette autre partie oü sera situé ìe produit est ailÌsi
pcuvent sulgìr pour le peupÌcr : dans quelles condìtlons disons-nous la
vérité? Corrmerrt meÌltons-noLrs ? Cclmment faisons-Dous pour cacher comme uÌì référent - intelle. Le tcxtc renvoit -à la pÌroto, coltitÌ utlc
Ìa rccctte
ct dévoiìer lcs secrets? A cette série indéÍìnie de questions qui se au produit ou à I'ustensiìe, telle phase de la clómorrstration aux prócé-
placeÌìt toutes du point de vue du producteur du discours, cor- dcntes ou elìcore le commentairc à ce qui est montré el plair fixr'. Lc
respondcr-Ìt naLureÌlement d'autres questions qlre peut Íòrmuler leur référent s'autorise, Ìui, de Ì'<ér'identc> fidéÌité de ìa photograplrìc ou
téceÌrteur : dans queÌÌes contlitions acceptoÌls-Ìtous les meÌÌsoÌìges et du "bon sens>, Ìa chose du monde la mieux partagée, du rroirrs par
ìes impostures? Quand Ìes assumons-nous comme porteurs de vérités Ìes gerrs raisonnables et sérieux... c'est-à-dire de conveltiorrs cultu-
proíbndes, pcut-être môme ineffabÌes ? Le problème du vraisembÌabÌe reìÌes, d'un coÌ.Ìtrat s()cial tacite. Enfin, Ìa publicité référentieìle veiÌÌc
s'iutèqre, Ìui aussi, à cette interrogation sur Ìa véracité des discours: à ce que le discours paraisse Ic pur énoncé des relations néccssaires
comment procède l'énonciateur p()ur présentcr son discours afin qu'iÌ e1ìtre les choses, e1 que ce déroulcmeÌÌt sIÌìtasmatique se retl:ouve
paraìsse vrai? SeÌon quels critères et queÌs procédés juge-t-on Ìes dis- dans la linóarité du íìlnr ou du texte. La suitc logique de l'histoire oLr
cours des autres comme vraisemblables .:'. L'Énumeration cle ces de la démonst ration se confirncl aÌors avec la succession tenrporelle dcs
procédés nÌais surtoLrt I'idenri{ìcation ct la définition des procédures pÌans-séquerÌccs ou cles paragraphes. Autant quc faire se peut, on éri-
cÌìscursives sur ÌesqueÌÌes se firnde ìa publicité référentielle demande- tcra les suspensiorrs ou les ret()urs en arrière qrri ièraient de l'énon-
raient un tout autre espace quc ces lignes, d'autant que Ìcs pubiicités ciatioÌì uÌÌe (:oÌlstructioÌì,
obÌique, mythique et substantielle seraient alors en droit d'être aussi Des exempÌes maiÌrtenaÌlt. RolÌs-Royce, Sears, Hattawav ... pour Ìes
exigearìtcs. Bien plus, eÌÌe impliclueraient la présentati()n de concepts srarrdes cÌassìques de D. Ogilvy Lui-même; et le Íìlm Super-Glue 3 cle
et de problématiques de Ìa théorie sémiotique (débray.age interne, I'agence Ouilvy & Mather France : ce farneux pcndu par ìes pieds qui
réÍérentiaÌisation...) préseÌltation qur c{rnrÌedirair lc propos de cet cìém()Ìltre, sur la foi d'un huissicrl, la puissance ilÌsLalltanéc dc cette

'?rLe lecleur ìntó.(ssi pxÌ ces procidures clisculsives poulra lire l'âni.lc (RaÍiÌelrtìrì
U. Ogilrr.i,' rottp..; q d tt t..,t1,t,.:,?.../. ,j t' t0t ììsatìon), in Séniatique, dìctiannaÌÌe n;sonné de h thlorie du Ì.angage, o|. cit., t 2.
' A J.1;ìcrn,,., L( ,,,nu.,r .l- r, iclictiori, in .dü Srzr I par.is, F.d. clrr Sc,riÌ, p. Ì88-Ìiì9.
Ì9i13, p. 105. " D. {)gilvy, Les conJessìot^ d'ü1r pubÌr.ìtuìre, 01. .ii., p. 10Ì.
19ô Sous les signes, les stratégìes <Tués dans I'euf! > 197

colle. Bien súr, iì y a aussi Ìes créations de P. Lemonnier, Ìe disciple: demandé au lecteur et ce que gagne une telìe stratégie discursrve:
le film Epéda déjà cité maìs encore les campagnes-presse pour Mumm
"On aurait pu dire dans cette annonce pour Ìes buggyjeunes".
d'Eram "les
et Perrier-Jouët, pour Ìe bas 'I'êtu de Le Bourget et surtout les cam- Buggy, des chaussures pimpaÌÌtes et pas chères pour ies Mais
pagnes Carrefour. Enfin, cette idéolosie publicitaire n'est pas Ìe seul ce n'est pas en disant qu'en est pour les jeunes qu'on le signiÍie, c'est
fait des Ogilvicus de métier ou de vocaLion. J.-M. Dru a donné pÌus en étant jeune ! I out dans ce maniÍèste induit Ìa jeunesse : la nature
haut bien d'autres campagnes de ce type, outre celle de MaxwelÌ. du trajet eflectué, Ìe cÌin d'cil du concept, Ìe Íâit d'avoir mis en
Quant à nous, nous citcrons celle de Wilkinson oü une succession de vaÌeur des chaussures sympathiquement usées et ìégèrement déÍâites.
pÌans-fixes montre puis dómontre Ìa perÍormance de la lame:couper Ce maniÍèste ne dit pas ìa .jeunesse, iì I'induit avec beaucoup de
net une bougie sans Ìa faire tomber ni l'éteindre?3. Íorce, avec originaÌité et un fort pouvoir d'empathie par rapport à
i. sa cibìe o'a.
Une campagne relevant de la publicité oblique sera dès lors appre-
La publicité oblíque ciée sekrn cette manipulati()n acceptée, recherchée, puisqu'eÌÌe est
gage d'une modiÍìcation euphorisante de la perception ou de la vision
que I'on a des choses. C'est ceìa Ìa pensée ÌatéraÌe;<La pensée Ìaté-
La publicité obìique, c'est la négation de la pubììcité référentielle. Elle
en sape l'idéoÌogie positiviste. Le sens est à construire;iÌ n'est pas rale c'est cette bizarre manière de dépìacer Ìe su-jet en permanence
déjà Ìà. PubÌicité du paradoxe, qui littéralement va à I'encontre de pour Ìe revoir d'une fâçon fiaiche, nouvelle, diÍÍérente, signiÍicative,
émouvante, Or, on est en train de découvrir que c'est cette méthode
Ì'opìnion commune, elÌe joue ì'incongru et Ìe norr-immédiat I ceÌui
qui regarde Ì'affiche est Ìe su-jet d'un faire irÌterprétatiÍ. L'efÍìcacité qui communique le mieux: c'est lorsqu'on décaÌe sa vision du monde
du discours ne se mesure plus à Ìa rapidité de lecture ou de réaction qu'on invente. Il laut de Ìa provocation pour inventer>?5. Jamais
de la cible. Chez OgiÌvy, le consommateur est le sujet d'une action ou
Ogilvy ou P. Lemonnier ne souscrirait à de teÌs propos. Pour eux, iÌ
plutôt d'une réaction, c'est-à-dire d'un fajre pragmatique : iÌ achète ne s'agit là que de n cÌownerie >', ou de privilège indu donné à la
<Íìrrme>, aux déperrs du
le produit, iÌ renvoie le coupon-réponse ... II y a là quelque conccp- "fond". Ph. MicheÌ répondrait à ceÌa que
tion behavioriste de la communication. Pour Ph. MicheÌ, qui est Ì'idéo- c'est la íbrme qui crée la difïérence et produit du sens, et que la
logue de Ìa pubìicité obÌique, le consommateur auquel on s'adresse est reÌation entre inclustriels et pubÌicitaires doit précisément s'étabÌir sur
ìe su-jet d'un faire cognitif : on nret à Ì'épreuve son ìntelÌigence. cette base : u Pour qu'il y ait enrichissement, iÌ faut qu'iÌ y ait fabrica-
Aìors que Ìa publicité ogylvierrne recherche un temps de lecture voisin tion de valeur. Notre rôle est d'aider les irìdustriels à faire la vraic dif-
de zéro et une compréhension immédiate pour une réaction la plus férence.,. Notre métier, c'est de Íàbriquer de Ìa différence dans une
rapide possibÌe (Ìe parcours de l'ceiÌ le plus facile possible, le rapport société monotone au sens Ìittéraì du terme On comprend que la
'2rì.
texte-image le plus r.ratureÌ possibÌe ...), la publicité oblique fait de la
publicité oblique puisse être considérée par ses détracteurs comme
médiateté de sa compréhension une valeur: le lien d'une co-produc- une publicité intelìectueÌle aÌors que ses partisans soutiendront que
tion du sens par Ì'énoncìataire. Une céÌèbre annonce-presse Eram I'inteÌÌigence ne saurait être conlbndue avec I'inteliectualisme. Dia-
(un des grands budgets Ct.\,í/BBDo) moÌrtrait une paire de chaussures Ìogue de sourds ? II Íâut le crojre, Ce que les uns exaltent sous le nom
cle sërieux, Ìes autres Ìe rejetteÌlt sous le terme de canvenable, et ce que
usées et donnait en accroche Ìe prix d'un Paris-Amsterdam aller et
retour : 30 F. l,e commelÌtrìire qu'H. Joannis fait de cette annonce les premiers rejettent sous le nom de clownerie, Ìes seconds Ì'exaÌtent
dars Le processus de crétttion pubLicitaire indique assez ìe (travaiì)
:r HeÌìri Joannis, Le processut de créatìan publìàtaire, Bordâs-Dunod, 1978, p. 13.
'5 Ph. Michel, Srrarlder, n" 385.
?3 Le lllm de Wilkinson a ara raali'é erì 1983 par l'âgence Cherassus Vadon. '?ii
Ph. Micheì, & Marin, l2 juin Ì 981.
j98 \bü\ l?\,ign"\. l"\.\tlotpgtp., !"
" fues dan s l'euf 199

sous le teroìe çle liberté ; < L.a pub, dit Ph. Michel, c'est justement la Autant dire que cette campasne ne parÌe ni de Ì'origìne, nì de Ì'âge,
revanche du creux sur Ìe pÌein, du petìt sur le grancl, cle Ì'inculte sur ni des circonstances de consommation du whisky, comme ìe font les
le cultivó, du fils de prolo et Dieu sait s'iì y en a dars le miìieu autres communicatìons du secteur. L'union des contraires qui serait
sur cclui de ì'univcrsitlire. -C'cst I'csprit libre par opposition au 5.r\ oir-
- l'essence même de Ìa vie constitue l'énoncé gÌobal de Ìa campagne,
peÌÌserJ au penscr convcnablc. Etre convcnable nuir à l'altiste sociaÌ un énoncé dont Ì'exprcssion est assurée par le contraste pÌastique du
qu'est le pubìicitaire. llt r:elui-ci, au lrout clu t:ompte, Íìrrit, esprìt couple des petits chiens : une magnifique (petite mythologieu2e, On
inductif, par surprerrdre plus de véritl: quc l'esprit, déductif, du dog- notera que le whisky est ainsi vakrrisé comme la fieure irritiarirlue
matique basique "27. d'une vision du monde : < Les gens n'achètent pas un pr-oduit mais une
La récerte campagne-presse de Black & White róaìisée par représentation du monder, aìme à répéter Ph. MicheÌ. <Enoncés tels
CLÀ.r/ÌìBDo iÌlustre bien ìa pubìicité oblique de Ph. Michel teile que queÌs, remarque D. Bertrand, Ìe dispositif cultureÌ et Ìe message qu'il
ÌÌous venons de la définir, même si elÌe n'en manìfèste c1u'une cles comporte pourraient paraìtre d'une ambition disproportionnée si ect
formcs discursives : ccÌle cle Ì'ironie. Cette campagne a été Ìon- effet n'était pas corrigé au moins partiellcmcnt * par un mode
ÍÌuement anaLvsée par D. Bertrand cians sa contributjon au doubÌe
-
d'érroncintiorr et de rrrise crÌ corìtexte tlui ürvite à faire des ob-jets de
rrumóro de I'Intentational JournaL of Research ìrt Marhetìn.g; <Sémio- référence un usage parr.rdique, c'est-à-dire détourné dc leur finalité
tique et Marketingr2N. N1)Lr. reprendrons ici Ì'essentieÌ cle son étude premièrc, dc leur siunification au <deqré zéro> de l'inlormation. Un
de la ciimensiorr énonciativc conlmunc aux cinq manifcstcs de Ìa cam- tel détournement est réaÌisé par un .jeu de ruptures systémrtjques
pagne puisque nous essayons de m()Ìrtrer clue chaque conception du entre images eL textes, par un crtrisemerìt et une .rssociation de réfé-
rapport entre discours et réalité chatpe idéoìogie irnpliclue une rences hétérogènesr. Ainsi Ìe fait même cle rassembler dans un bric
-
certaine intersubjectivité, une relation - Ì'énonciatcur
particuÌière entre à brac un ange, un chevaÌier, Zorro et Dark Vedol fait pcrdre
et Ì'énonciataìre. Que représentaient ces cinq maniíestes? toute crédibiÌité à Ìeurs aventures particuÌières. Mais c'est peut-être
1 Un portrait de groupe oü des toiles d'araigrée réuriss;rient un l'<annonce au turìnel)) si l'on peut dire qui cst ia plus exem-
véritabÌe bric à brac mythologique:un chevalier, un ange, un Íàn- plaire, selon nous, cle Ìa -publicìté oblique dans- la mesure oü Ìe détour-
tôme, une sorcière, Zorro ct Dark-Vcdor (l'un des personnages de Ia nement dont parÌe D. Bertrand se fait par la prise en compte du
Guerre des Etoiles de G. Lucas) : la base-lirre irrdiquait : < Ceux qui sc,nt support de I'annonce : Ia convocation chez le lecteur d'une com-
tout n()il ou tout blant: (sic), sont-ils vraiment de bons vivants!" pétence interprétative et critique se doubÌe et se sert d'une sorte de
2. Un ÍunneÌ au bout duqucÌ apparaissait Ìa lumière d'uÌÌe sLrrtic: révélation de Ìa matérialité même du sisni{ìant de I'annonce : vous
I'accroche: <Si toute Ìa pace était noire, il n'y aurait plus d'esp,'ir. n'êtes pas d,an.s cet horúble tunneì, vous avez. detant vous uÌìe page avec
3. [,e symboÌe du vìns et du vang; ar:croc]re : ( PersoÌlne n'est t(]ut une certaine proportioÌl de noìr et de blanc.
noir, personne n'est tout bÌaÌÌc.) Cette stratégie de mise à distance s'inscrit, selon D. Bertrand dans le
4. Un ciel étoiÌét accroche:<Avec Lrn peu de recul, touL est noir phénomène général de I'ironie, auqueÌ s'intéressent particulièremert
êÍ blânc.,
5. Un Ìerrier noir esseulé: accrochc : uUn seul être vous rnanque
ct tout est dépeupÌé. , Nous tàisons ici allusion aux petiÌes mvthoìogies
'?i' Ì'expressiorr est de Cl. Levi-
StÌâuss qLri reposcnr sLrÌ Lnì scrìi-srÌìboìisÌÌei ct- que i'tirdiées dans
-
Pehlcs X'l)thalogies de I'eìl et de l'r+/tl, Pâris/AnÍerdam, [.cì. I Ìadès/Benjanins, 1985.
I-e phénomènc .lu semi srrrìboìi!'nc e a'tó pri'scÌrtó el ìllLrsrré i.i ÌìêrÌí: xa .hâpìrre "ÌÉì
?7 Ph. l\'Íichel, Shatígie\, i" 62{ì, o.Ì. l1lil8. reÍìrs de ì'cuphorìe', p.85. Inclluons qL'e, pour nous, l'ailiche Black & White conçue
':8 D. Bertrand, l'he creatiorr oÍ coÌrrpÌicì1,v. À senjotic anaÌvsìs oÍ adrertisirrg campri;n pâr cr-M/BBDo er coìnposée de deux surÍacer, abstÍaìtes noirc el bìanchc Ícììócs par ìc
fòr BÌirck & $hilc rLhiskl, :,t\ l tcnltnluLL Jour ã! al Resear& ìn Morkltìng (Ch. I'iníÌì signe & consrìtue ì\rn des plus beâLrx lun des plus "purs" exemples de
él.I), vol. 4. n" 4. North ÌloÌlard, ì088. semi-symbolisme plastique.
200 Sous les signes, les stratégies <Tués dans I'rzuf ! , 20 r

phiÌosophes, critiques et Ìinguistes30. D. Bertrand donne aÌors les trois timent réaÌise alors, sur Ìe mode d'une entente secrète d'une connt-
(caractères généraux> qui permettent de saisir ìe phénomène et qui' vence la solidarité des sujets., -
chacun, locaìise sur tel ou tel rôÌe actantieÌ attribué aux dsul sujets -
On ne saurait mieux dire en parlant de solidarité des sujets. L'iro-
engagés. lcn,,nciiÌleur Èl l enon.iiìlaire : nie ainsi définie est au cceur des campagnes Leclerc conçues par
"L'ironie est úne citatìon r c'est-à-dire que l'énonciateur cLM/BBDo. La solidarité inteììectueÌÌe, idéologique, y devient une soli-
-
convoque dans son discours un système axiologique établi dâns darité économi<1ue, voire poÌitique : "Quand on voit Ìes cinq alfiches
d'autres discours que le sien, et dont ìl n'assurne pas les valerrrs. La sur Ìa banque, on se dit : "Tiens, LecÌerc s'attaque aux banques." Une
distance intelÌectuelle et le détachement, qui caractérisent Ì'irt-rnie et constante : Ìe portrait du père et du fiÌs photographiés par J.-8. Mon-
Ìa rendent indifférente à tout engagement affèctif, permettent de dino démarre chaque campagne. Cette affiche indique précisément de
définir son énonciateur comme un sujet seÌon Ìe saroir (Ìe discours quel combat il s'agit. Ici : "Nous voudrions que la carte bancaire coúte
ironique se proclame impêrieusement omniscient) et, simultanément, moins cher, pas vous?" Les quatre autres alfiches traitent les points
selon le (ne pas croireo (l'ironiste est f oÌrdamentalement incroyant sensibles. Il y a Ie visueÌ typique banquier oü l'on voit deux hommes se
et sceptique). serrer la main. .I ellement contents qu'ìls se coÌrgratule Ì-ìt ! On n'a pas
L'ironie est renversement eL dénégation, puisqu'eÌÌe fâit entendre hésité à dresser un constat ironique, Pour<luoi ne pas aller jusqu'à cas-
le -contraire de ce qu'eÌÌe dit tout en le disant. Là réside Ìe caractère ser sa ti)-elire! Des pièces tombent d'un cochon brisé. Histoire de dire,
anti-phrastique qui la définit ordinairement (très insuffisant toutefois pauvres banquiers, voyez, ils perdent de Ì'argent, c'est à nous de leur
pour en appréhender la portée sémantique et communicative). Du en donner. )31
même coup, eÌìe apparait comme un instrument de dénonciarion
indirecte, son orientation allant du positif (énoncé) vers le négati{ (à
entendre). EìÌe suppose, par conséquent, une "cible, contre ÌaqueÌÌe La publicití mlthique
elÌe est dirigée; présente ou non, individueÌle ou coÌÌective, susceptible
même de Íüsionner avec Ì'énonciateur (cas de I'ironie sur soi), cette La publicité mythique, c'est celÌe de J. Séguéla : " une machine à fabri-
cible représente tous ceux qui assument l'univers axiologique de réfé- quer du bonheur". EÌìe veut tout simplement prévenir la mise
rence. - -
à mort de ce qui fait notre siècÌe "en Íâisant de I'auto et de Ì'hyper-
L'ironie est enfin un mode de conciìiation des subjectivités ÊÌle marchê autre chose que ce qu'iÌs sont : une machine à rouler vers une
-
stipule l'émergence d'un énonciataire à qui l'énonciateut prête une machine à acheter rs2. L'initiatrice de Séguéla, c'est Mme Bata, ., une
compétence interprétative remarquable:il ìe suppose apte à recons- belle Íèmme de soixante ans qui avai. tout compris ) (sic) I n Mes
truire convenablement à Ìa lois la citation et la dénégation, alors que maquettes montraieÌ-ìt de superbes photos de chaussuÌes, une somp-
les marques en sont (pÌus ou moins) dissimuÌées. Insistons sur cette tueuse natule morte en lumière anglaise. C'était à l'époque la fureur
reÌation particuÌière entre Ì'énonciateur et l'éìÌonciataiì:e : ce dernjer des directeurs artistiques. 'Jeune homme, me dit-elle, je ne travaiÌÌe-
est promu à I'assentiment. Plus qu'aucune autre forme de disc,-rurs, rai jamais avec vous. Un marchand de souÌiers ne vend pas de chaus-
Ì'ironie en effèt convoque Ì'énonciataire, Provoque chez Ìui un Íãire surcs. Il vend de jolis pieds..." Le métier de la publicité est de donner
interprétatif compÌexe, sur Ìa base d'une confiance postulée. L'assen- du talent à Ìa consommation. Elle doit ellacer Ì'ennui de l'achat quoti-
dien en habilÌant de rêve des produìts qui, sans elle, ne seraient que

30 On citera par exemple : C. KerbÌat Orecchioni, L'ironie, in Lirgzilique ü Sónl.ologre, rÌ Brnno LemouÌt et Serge Picharcl, cLv/RBì)o, interviewés d.a.ns Communications ë
L)on, pL'1, l9'76, Poeìique'; lron,p (núnìéro colÌ.'crìf), Paris, SeuiÌ, 1978; V .fanke- Butinëss, r" ?7, mai 1988.
l.!ir.h. / ,,o,i,, Pa'i., FlrnmJrì 'Ìì, 1J64. 5'?
facques Ségueìa, Ìlollyood late plus bktn., ap. ctt., p.2ú4.

I
202 saur lP' ,ìgít?'. lo' 51'a1;f10" < Tués dans l'czuf! > 203

ce qu'ils sont. ,33 Quand on sc rappeÌÌe ce que représenteÌÌt justement ou de.jeune prince, et Ìe récit déntarre, rlui consistera à "viderr> ces
I'achat et lc quotìdien dans Ì'idéolosie ogvlvienne, on imasine le Íãce pcr:soÌlrìages, à Ìes cxploiter comme de véritabÌes banques dt .ìtrre-
â face qui déíinìt polémiquement Ìa publicité mythique er la publi- tioÌÌs ct d'actions. Il ,v a, au contrairc, des littératures oü le récit fait
cité rélérentielle. Dans ce face à fàce avec la publicité réÍérentielle, en sortc que Ìes événemeÌÌts et le déroulcment Prosressif de Ì'inrrjcuc
la publicité mythique bénéÍìcie du soutien de la pubÌicité obliqLre, du (rempÌissent), coÌìstruiscÌÌt Petit à Petit lcs personrrages clui étaient
moins de soÌì alliance ob-jective. L'ironie ou la maÌice de Ìa publicité vides au clépart. Ainsi Fabricc deÌ Dongo, ainsi Ivan l)elissovitch...
oblique a signifié aux du bon sens et du sérieux de Ìa publi- Par rapport aLr prodlrit, La pubìicité rólérerrtielìe vcut travailler
cité réÍérentieÌÌe
- que ìedépens
sens n'est pas dójà là, < dans la réalité qu'il coÌnme le íait la premìère forme citée: le travaiÌ PubÌicitaire, le saut
est à construire i -la rêverie ou Ì'imasinatjon de Ìa publicité mvthique
",
créatif représentera ìa parlaitc connaìssarlce et Ì'exPloitatioìl pertj-
ce que les AÌlemands désigneraient mieux par le mot de Phantasíe nente de telle situatiott (ou <vécu>) ou de tellc action k)u <pÌus))
- est là pour aÍ{ìrmer que Ìe sens est dans le fantasme (individueì?) qui soÌÌt cn barque dans le procluit. 'l yran, .journaliste... comme ces
ou I'imaginaire (collectif?) projeté sur le mondc pour l'informer et le rôles, Ìa réaÌitélroduit rrret à la disposition du publicitaire une stru(r-
rendre sìgrriÍìarrt. ture Ìrarrative (un Sujet et un Objet, ou uIl Süjct et urt Anti-Sujct,
Nous venons de proposer une djstinction syÌìtacmatique entre publi dans une relation polénique ou coÌrtractLreÌìe) et unc configurari,,n
cité obÌique et publicité mythique, c'esr-!ì-dire en lbncrion de leur cliscursive (un univels de rélérence et Ìes diverses íìgurcs du monde
enchainemeÌìt, de lcurs positions dyÌ.Ìamiques par rapport à la pubÌi- qLr'il permet clc convoquer). OÌÌ trouve alors si I'on est créatif!
cité référenticlle. Dans llolllwood lau plus Õlcnc, J. Séguóla fait, Ìui, la pctire cuiÌÌère pour Maxrvell ou le bruit
-
de I'horìoge pour Rolls--
une distiÌrctioÌr de type paradigmatique (l'aurre approche possible de Royce. A Ì'opposé, la pubÌicité mythiqLre travailÌe comme Ìa seconde
Ìa différen<:e et du sens) en suugérant une ÌÌìise cÌÌ système, une tJxi Íìrrme de littérature : le produit sera itrvesti de scns et de vaÌeur par
nomie des (caractères)': Ì'autre intérêt de sa réflexion est de prendre I'histoire imaginée et par Ì'usage narratiÍ qÌr'oÌr ctr a Íàit Porrr ce
pour exemples de ces deux types de pubÌicité, cleux grands Améri- faire, iÌ lui arrive d':rvoir recours à des légendes, des héros, des sym-
cains: Léo Burnett ct Bill Bernbach :(Le jur)' d'Advertising Age a boles (quasi-universels) rlui sont déjà des rôÌes thématiques prrissam-
classé MarÌboro deuxième meilÌeure campacne du siècÌe, décerrrant ment structurés, extrêmement connLls et qui selviront de structure
I'Oscar à Bill Bcrnbat:h pour sa campãsne-lÌeuve sur Ìa Coccinelle. d'accueil au procluit: Ì'I-lonìmc de \''inci, l'C)uest amérit:ain, CÌéo-
J'aurais, pour ma part, inversé le classement. l,a preuve : le cow-boy pâtre34... EÌÌe Ìes exploitera tels qucls ou les bricolera ensemble : ce
de Marlboro court toujours la prairie de nos magazines. L'Ì.ìumour scra l'essor rÌe l'aviort ciepuis Ìcs Champs-Elysées ou l'Ilomme de Vinci
.juif new yorkais de Ìa CoccinelÌe cst au musée. Question de produit, et l'arc en-cieÌ35.
argucr()Ìrt Ìes erincheux. La VW est morte. l,a Marlboro en pleine Mais ol aurait tort dc réduire ìa publicité mlthiqLre à cette exploita
saÌrté. Certes, mais Ìe colv-bov est un s1nôole. La coccirreÌÌe un y'lal tion directe orr indirec:te de ces grattds référents cultur-els prlpulaires.
d'es|rit. Le premier est lc génie. La seconde simpÌcment le taleÌt t. (C'est Ce qui la di'finit cl'aborcì ct avaÌìt tout, c'esL la coÌÌstruction de la
nous <1ui souÌignons.) Simple aÍïaire de caractè're. > Nous reviendrons vaÌeur sémantique du produit par ìe discours tenLr daÌÌs le film ou
plrrs loin sur ces deux exempÌes américains. Ì'affiche. Liì errcore il ÍârrÍ citer le ÍìÌrn de lattcentent de Ìa BX ou les
Pour faire coÌnprendre Ì'oppositiorr entre ìa pubÌicité myrhiqúe ct Chevrons Sauvages. On a vu commetìt la structure llarrative drr Íìlm
la pubÌiciré référ-entielÌe, orl la comparera à ceÌÌe de deux graÌÌdes
frrrmes de Ìittérature. Il y a des Ìirter.rrures oü ìts pers,,nnages sont
< pÌeins > dès lc' díibut i on par-le cÌe tyran ou clc dragon, de journaliste ! Nous laìsons ici uìÌLnion à ìa canrpagne de lancenrenr cìe Cìóopâtra realisóc par
Publì.is en 1980.
r5 ÀllLr:ion eÍ laite cctte lòis aux camprÍÌnes ns(ì(; pouÌ les Aéroports de Paris
tt Ibid., p. 2íi1. et pour NÍaÌrpowcí.
204 Sctus les signes, les stratégìes n Tuà dans l'reuf! " 205

de Ìancement de Ìa Bx construìsait en trois temps la valeur sérlan-


tique, axioìogique, de Ìa voiture : La publicité substantielle
1 / investissement et exploitation de Ìa position utiÌitaire;
2 / négation de cette position (,gratuité" du plongeon : vaÌorisa- La pubìicité substantieìle, enÍin, a pour idéologue J. Feìdman Cette
tion < non-utilitaire >); pubÌicité se définit par la négation de Ìa publicité mythique et de son
3 / assertion finale et expÌoitation de la position < existentieÌìe ". idóologie. CeÌÌe-ci sera coupable, seÌon J. Feldman, de se servir du
On se souvient aussi de Ìa Íaçon dont le filn lzs Chevrons Sauuages produit comne d'un simple prétexte. La publicité substantielle refuse
égçalement Ìa udérision", terme péjoratif désignant la distance, ì'ironie
resémantisait le Ìogo Citroën (p. 1tll). La pubÌicité mythique peut aussi
et Ìa malice cuÌtivées par Ìa publicité obÌique de Ph. MicheÌ. La conni-
viser la construction de Ìa vaÌeur sémantique d'une marque, et non
vence, elle aussi, se ferait aux dépens du produit et, de plus, interdirait
pas seuÌement d'un produit ou d'un service. Et eìle peut se faire plus
ou moins progressivemeìlt et k)giquement dans le temps, sur pÌrni.rrrs
I'appréciation partagée de ses qualités essentielles. Aìnsi à Ìa qrrestion
de CB Neirrs .. n Quelle place Ìa pub à vocation européenÌìe Ìaisse-t-eìle
années. Nous avons vLr la logique de I'apport de Ìa pubÌìcité à Ì'ìrnage
à I'originaÌité?",J. Feldman répond : nN'ont aucune chance les {iÌms
de Citroen au cours des années 1982-1985. On pourrait donner aussi
I'exemple des campagrres pour MarÌboro réalisées par Léo Burnett. pratiquant l"'inceste" Iocal, ceux <1ui font I'uÌtime p rittate joke, pour un
quartier, une province, un pays, une catégorie sociaÌer. Seul un dis-
D'une <prétentìeuse cigarette pour lèmmes" (dìxit J, SéguéÌa), Léo
cours retouÍnant à nì'essentiel", au produit, pourra être parragé par
Burnett a fait un ncountry" de la sérénité, après avoir erré du côté
de la virilité tatouée3ô.
tout Ìe monde. Nous alìons revenir bientôt sur cette ìecture euro-
pêaniste des positions du carré des idéoÌogies publicitaires. Pn''' Ie
Si I'on considère qu'à chaque idéologie pubìicitaire correspond une
moment, et à propos de la " dérision " ou de la distance oblique et de
certaine stratégie énonciative, et si I'on reconnait d'autre part le ( lace
son caractère national, on rappellera Ìe mot du linguiste R. Jakobson :
à lace> des idéoÌogies rélérentielle et mythique, on peut s'interro-
,,Ì'étranger est celui qui rit de tout sauf d'une pÌaisanterie ".
ger sur le mode d'énonciation de Ì'icìéoÌogie mythique par rapport à
Revenons à la définition de la pubÌicité substantielle. 'I'out Ìe travajl
celui de l'idéologie référentjeÌÌe. On dira aÌors que, dans Ìa pubÌicité
de J. FeÌdmar.r constitue un < recentrage )) sur le produit dont on assure
mythique, Ì'énonciation tend à s'affìrmer autant que faire se peut
-
sans pour ceÌa ns'instalìer" dans Ì'énoncé. EÌÌe affirme sa présence
qu'iÌ possède sa propre vaÌeur ; iÌ s'agit d'n en cxpÌoiter Ìes vertus pour
-par le bricolage ou I'assembÌage de deux motiÍì ou ligures (l'avì,,,n quì fairc de sa nature profonde la vraie star". C'est cette expression
de (nature profonde" qui nous a suggéré l'épithète de substantieÌÌe;
décolle des Charnps-Elysées, I'arc-en-ciel de Ì'Homme de Vinci...),
cet épithète se justifie d'autaÌìt mieux aujourd'hui que J. Séguéla lui-
mais aussi par le modeìage, Ìa réorganìsation de l'image seÌon ìe
même Iait de la substance un des trois S de sa nouvelÌe philosophie,
rythme donné à celle-ci du fait de son propre déploiement (nous
marquée par Ìe privilège reconnu au produit3T. Vécu comme un
pensons ici aux visueÌs des carnpagnes Marlboro oü les vastes espaces
n eflacement , par rapport au produit et à sa réalité iÌÌtrinsèque, Ì'acte
de Ì'Ouest américain sont aussi 1à pour inscrire Ìe cow-boy dans un
créatif peut ici prendre la figure de Ì'épure : Ìe travail du publici-
rythme €iénéraÌ et lui donner ainsi une autre dimension). L'énoncia-
taire consìste à reÍüser toute mode ou toute connotatioll personnelÌe
tion mythique s'affirme donc; elle se veut construction, travail. Ses
détracteurs parleront, eux, de <spectacle pour Ìe spectacÌe
'. 37 Deux récentes campagnes Rscc !émoigDenl bien de ce substantialisme : la campagne
de lancement de ìa CiiÌoên xNt et la campagne ucoÌÌective, pour les bÌasscurs de
FÌance oò une brâssée de céréales a pour âccroche (récolte de bièrer. Le texte com-
3ô On lira à ce propos ìcs pagcs adnìirerivcs que J. Séguélâ a écrites sur ìa saga NÍarl- mence aìnsi : Au ciieur de la bière, iì v a tout Ì'or dc la teÌÌe : ì'orge, le hou_
boro clans HoÌÌytaad lalie plus blanc (oP. rÌ.), p. ?8-83. blon, I'cau pure...,
Sou.; les sìgnes, Les.;tratégíes
<I'ués dans l'euf ! > 207
206

et vjser Ìe (degré zéro de l'écriture" pour reprendre l'expresstott A Ìa lecture de cette liste d'exempÌes, le lecteur pourrait croire que
-et I'utopie sémiokruique de R. Barthes. Il'oü ccrtaiÌlemeÌÌt ccs la pubÌicitó substantieÌÌe est ( naturellen.ìelìt la publicité pour Ìes pro-
',
-
elTets de sens de dépouillemcÌìt cìassique ou de' néo-:rcadémisrne clui duits aìimentaires et Ìes boìssons ceÌir d'autant plus que FCA! est
pour certaìns catacterìsertt, en bien ou en mal, les camPagnes collçues bien I'une cles grandes agences cÌe- ce secÌeur iÌvec, cntre autres, ìes
par J. Feldman. bLrdgets Yoplait, Findus, Pacific... Pour le convaincre du contraire et
Dcs exemples dc pubììcités sIrÌ)\râììtielles lelrimeniennes? Parlons par Ìa même soutenir Ìa thèse que les idéoÌogies publicìtaìres sont
d'abord du nhisky Labeì 11 ou dc la bìère Georges KilÌian's. Des iÌìdópcndaÌÌtes de la nature des produits et des services, nous cite-
campagÌres comme ceÌles des cirrq Ecossais cle Label 5 sorrt toul â fâil rons elÌfiÌr le récent ïtlm Eponge S de Spontex : les faneux bagnards.
représeÌÌtatives de cettc idéoÌogie substantieììe; le con(:ept s'originc La scène se passe en prison. Deux bagnarcls en teÌÌue rayée róglemerr-
et s'autorise de la qualité essentielle, déÍìnitoire du produìt quì en taire íbnt la vaisselle tout eÌÌ resardaÌìt uÌÌ match de boxe à la télévi-
-
fait un vrai whisky écossais: un whisky qaranti d'au moins cintl rn. sion. Arrive une gardienne, puÌpeuse mais terribÌe, quì leur ordonne
d'âge. L'accroche d'orieinc allait.jusqu'à expÌoiter cette moti\âliorì : du geste et de Ìa voix de regagner leur ceÌlule. Sitôt derrière les bar-
<Cinq Et:ossais comme L:rbeÌ 5>. La campagrre 19BB de G. Killiarr's: reaux, ies deux balçnards, clui avaicnt conservé leurs éponges, se les
uJe suis rousse, et aÌorsl" corresponcl à un reposition nement prrbli<:i- partagent (Ìe petit bagnard dit au grancl; <-I'u prends la grande et
taire. Les caÌnpagnes G. Killian's de P. Lemonnier, fiÌs spirituel moi la petite)) et les (í)uvrerÌt de baisers ardents. Le tout sur une
tt'OaiÌvy reposaieÌlt sur uÌr cliscours ré{érenticÌ qui expìoitait lc per- musique jazz-hot : uSwing sr,ing ma Spontex". En fait, nous venons
sonnasc d'un u vrai, brasseur38; Ìe traitement pubÌit:itaire cle J. Feld- cìe très mal raconter ce ÍìÌm, ou pìutôt Ììous eÌl avons rappeÌé ìe scé-
man expÌoite par coÌÌtre ce qr-ri lait I'essence mêmc du produit, sa nario, Ìa structure narrative si I'on veut. Mais nous n'avons rien dit
<réaÌitér plus que son origine : sa roLlsscur. Nous voici revetltrs à dc son traitement, de sa forme discursive... qui en Íajt le nfbnd"ar.
Germaine, aux martiens et aux pâtes LustLlcrul nll est temps d'envi- Toute I'aLtention du spectateur est centrée sur l'éponge et plur prrri-
sauer un combat universeÌ pour les pâtes Lustucru. Pour ceÌa, il faut culièrcment sa silhouctte, à laquclÌe correspond Ìe nom du produit.
que le public ait une très haute opitrion du produit. ll faut insister Lc film ulocaÌise) sur cet acteur qu'est Ì'éponge pour en exaÌter Ìa
sur ìa qualité clu produit. D'oü I'idée de.jouer avec les oeuli et lcs nature galbée. La gestuaìité des Ìaveurs de vaisselle comme celle de
pâtes r31). Philippe Lemairc de Med.ias t trouvé une irraue très juste
Ìa puÌpeuse surveillante reprenÌìeÌÌt 1'naspéritó" si I'on peut dire
en I'occurrence!- de ce produit d'entrerien r les - mouvements cles
pour parler du substantiaìisme d'unc teÌÌe démarcbe ì (L'agen(:e de
bagnarcìs dessinent des S sur Ìes :rssiettes, Ìe geste de Ìa surveiÌÌante
J. Feldman a estimé que ìes personnages créés par l'agence prete- (,AlÌez, au dodol") est un geste ondulant... I.ìt quand l'éponge n'est
dente n'étaient pas lcs u ambassadeurs de la marque' mais risquaìent.
au conlraire, dc n.rasquer sa prirtcipaÌe aspírité : Ies ceulìs rao. C'est nous pas aLl centre de l'image, les cadrages glos plans cles a(:teurs mettent
qui souÌienons. en valcur la sinuosité dc I'accroche ccur du grand bagnard et ceÌÌe de
la mèchc cle la surveillantea'?l

3sDânsl'rrìnonrcpressequipróscììlair-(t,rrgtKrl rrn,gt rltm.]r lr:r.'.ur'ìrÌaItdair"' ar Pour les sÉmurriciens, r()nìme pour tous ceux qui trarailleut selon une approche
le textc .Ìe l.-R. RritrinÍ:r:rì:st un Pctjt n,''lcl. dt.lrr,'rrn reltrtnLrtl s.p1"xrnt explicì
srucrurale, la disrinction voire I'oppositLon "lond"/"fonÌìe" n'â gLrère de sens. Lc
(íond' dasignc ( ìì ìc c()nrcììu d'Lrnc Èu!rc oú d'urì Ìììcssiqc, ou pÌÌrs pÌ ('r( isi'ÌÌìcìr soÌr
1""'.nt ,u ìi.cn".. relèr'alt dc Ìri pLrblrtrre rrlrhique ll tt.rrt trrr' l"i' cn ÍrÌarrclt rrn contenu profoncÌ, ou encore Ìe matér'iarr conceptrrel :ì traìter (: Ìe "thèmer? Lâ lornìe
\'JuDe rrr L, Krlr:,.',ui t,. KIr, l,rr,',r:ìI -,rn r' II, ',r','.c I

.1. *'r .r.,t 't p''",.,'r un. n.rr:rriÍr';1,- barbe roLrssc (leh Pourrâi1 ôlÌí: le débÌÌt d'ttn( dí'sigÌìr t (Ìlc Ìa nirc cr fbrnrc, Ì'articuÌatioÌì cÌLr scns c cst à clire cc grLi csr nécrsr.rirc .r
ìa trlnstitrLtion d'Lrne significarion? F.lle ne saurait érre ak;rs considérée comme superlì-
dc.ts bonn.s hrrr,,ir,s d,,nt its lrirr"laìs ont Ìe sccrct et t1u ìls aimcnL r:rconter Ìe srrir cielle, voire superfétatoirc, mais tonrnrc cc qui leìèvr du prrÍond, du constìtutil, de
au r:oin du 1('o. F.n Ìt)c(uììdì(:e. lhistoile hóìos esr vraic F.lle se
Disse nìainrenant. err -
19i6. en IrÌandc à Enniscorthv ìà oü - habite'
G Killian Ì'invariant à lirppose du "1ìrnd".
i: Nous sr-,riorrr, tcntó dc ìcconÌìâirÌ. (Ìtìì\ Ìr stro(turc sororc de rSwirs, Sslr{ nr,r
'1'r 1 t"dln.Ìl tt\Ì nlpeìa. u '.:' \re, líìõ I.
Ph. L,cmaire, *)n'ìrun;mtìon ICR N?-úr', n" l09,.iarÌvicr 1989 Spontex" Ìexploiration, au plan de lexpressìon cette tois, cÌe la sulistance shueuse du
208 Sous les signes, les stratégtes <'fués dans I'euf!> 209

Comment rendre compte du mode d'énonciation qui caractériserait JúAXWELL {Young & R!bicam) I,4ARLBOR0 (Leo Burnett)
CARREF0UR (ripacl)
la publicité substantieÌÌe ? Il ne s'agit pas ici de la production d'une f,4ArsoNs BoUYGUES {RSCG)
iÌlusion réÍérentieÌÌe à proprement parler. Celle-cì est le fait de Ìa SUPER GLUE 3 (Oqivy & Mather France) CHEVBONS SAUVAGES (BSCG)
publicité rélérentielle justement et, surtoLrt, Ì'iÌlrrsion réÍérentielle r\TANPOWER (FSCG)

suppose un certain accommodement avec la réalité <1ui semble repro-


duite, une sorte de <bonne distance>. Or l'eflèt de sens produit par puhlicité puhlicité

ÏX
la publicité substantieÌÌe, c'est au contraire l'étrangeté du nronde, Ìa réfÉrentielle mgthique
préserce de Ì'objet íace au sujet énonciataire. On a l'impression que
le produit avance vers soi, jusqu'à pouvoir le toucher. De fait, l'image I

substantieìle privilégie les vaÌeurs tactiìes. Gros pìans, netteté absoÌue I

des traits et des fbrmes, rapport souvent Íiontal : la publicité substan- puhÌicitó pubÌicité
tielÌe renverse la relation du sujet au monde. C'est l'événement. qui sühslantielle ohlique
provoque uue suspension du temps ice soÌìt les objets, Ìes produits
<(qui vous observeÌìt avcc cles rcgards familiersu, pour reprendre Ìe KrruAN's (FcA!) BLACK & WHITE {CLI,,!/BBDO)
vers de Baudelaire. Cette aÌÌusion aux u Correspondances )) n'esL pas LUSÌUCRU (FCA]) ERAÌ\,! (CLÌúi8BDO)
SPONÌEX {FCAì llAl\,4rE N0VA (CLrú/BBD0)
gratuite. ElÌe veut introduire I'idée que la stratégie énonciative de la
pubììcité substantieÌÌe est cÌe pr-oposer une émotion esthétiquc. Nous LU (Béler) P]PER HEIDSIECK (DDB)
définirons ici l'émotion esthétique conìme une incapacité soudaine URGO (ÌBWA)
et bÍève du sujet à maitriser Ìe monde sensible, une ìncapacité qui-
-
l'ébranle et lui donne Ìe sentiment d'une présence physique venant exempÌaires selon nous, qu'elles soient conçues paÌ les quatre idéo-
au-devant de Ìui. Cette manifestation concrète est d'autant plus lbrte logues ou par d'autres publicitaires. Avant d'aborder Ìes discorrrs de
et <saisissante> que Ie sujet n'a pas enrcre réussi à projeter sur elle deux théoriciens de la publicité et du marketing qui, de Íaçons très
une griÌle de Ìecture du monde qui l'organisc et Ìa maintienne à bonne différentes, parÌent des rappolts entre Ìe discours et la (réalité, et
distance. Soudaineté, recherche d'une certaine perte de Ìa maitrise à donc de nos idéoÌogies, restons un lnonìent sur les diverses interpré-
comprendre ou à interpréter: on Ì'aura compris, le mode d'énuncia- tatioÌìs que I'on peut en laire. Le sémioticjen s'est donné pour tâche
tion de Ìa publicité substantielle est le contraire de ceÌui de Ia pubÌi- de définir les reÌations existant entre ces différentes phiÌosophies et de
cité obÌique. micux faire conprendre celles-ci mais d':rutres quc lui peuvent aller
au-delà : question de Ìégitimité et de compétence. lls interprèreront
sans le savoir Ìe carré en ce scns qu'iÌs donneront les raisotrs de
-ces diíÍér'ences, ou- des uexpÌicatìons, à ccs oppositions.
Quelq ue s ínterpr ítations po s sìb Le s
Prenière interprétation, de type socio-culturel : les pubÌìcités réíé-
rentieìle et strbstantieÌle d'une part et mythiquc et obÌique d'autre
Voilà, le carré parcouru, les (lLratre grandes idéologies publiciraires. part renverraient à des cultures ou à des styles de vie opposés. Annie
Nous ì'ilìustrons ci-contre par quelques campagnes particulièremeÌÌt
Prost d'Eurocom, dans un document interne inédit, s'appuie sur sa
cloubÌe expérience française et amóricaine, Pour oPPoser <Prrhlir^ité
lrlrrr'ai.c lersu.t Pul'licite .rmét i,.rinc. :
pioduit. Mais, ìà. rrorrs avouorrs nr)trc (r)râÌc incoÍÌpélerÌce en lâ oìarière. Ìl lâudrâìl icì
consultel qucìqLr'un comme Jean-lìénr Julien, auteur de Mustguc tt Publicití lFl^m- <Lo puhlicité arnéricaine est plutôt une publicité de faits, la publicité
marion, l9u9). .française e.rt plutôt une publicító de (:onrcpts. La différence tient à Ìa
210 Sous les signes, les stratégtes <'fuós dans L'ceuf!> 211

culture respective de chacun des pays. La française est une culture


conceptueÌle et d'idées. Elle produit des idées, du style et de Ì'esthé-
tisme ayant pour fonction de séduire en laisant appel à la sensibilité : MAXWilt
faire rire, plaire, émouvoir, faire rêver. L'Amérìque a une culture
de faits et d'argent. Elle produit des messages ÍâctueÌs destinés à
convaincre en fâisant appel à Ì'argumentation rationÌÌelÌe:ce que
j'obtiens de concret pour mon argent. Les Américains ne com-
prenneÌrt pas Ìes démarches françaises parce qu'elles ne mettent pas
en avant ìes raisons fâctuelles d'acheter Ìe produit. La culture matéria-
liste anéricaine est séduite par la réalité. La cuìture inteÌÌectuelÌe et
muÌti-sensorieÌle franÇaise est séduite par des idées et des impressions.
Les Amóricains ont jnventé Ì'hyper-réaÌisme, Ìes Français Ì'impres-
sionnisme. Chacun a raìson puisqu'il agit et réagit en fonction de sa
culture. Le meilleur exempÌe qui permet d'ilÌustrer ce point, c'est Ìa
co!ìtroverse soulevée par Ìe Grand Prix 1986 du Festival de Cannes :
John Hancock Insurance. Pour les Américains, c'est uÌre publicjté
formidabÌe parce qu'eÌie véhicule dcs faits, des réponses précises à
un problème important aux États-Unis : I'insécurité individueÌÌe vis-à-
vis de son lutur à partir d'une expression hyper-réaÌiste en résonance
avec le vécu de l'individu. Pour les Français, il n'y a pas d'idée, pas de
concept publicitaire. )
La réflexion d'Annie Prost est d'autant plus intéressante pour Ìe
sémioticien qu'elle aborde Ìe problème des <diÍïérences ìiées à la
structure de chacune des langues > :
uLa différence vient des difÍérences qui existent entre les deux
langues. Dans la langue angÌaìse, un mot peut être aussi bien un
1$5r
Css't u$ Produii lìbrs
ad-jectif, un velbe ou un nomJ ce qui sìgniÍìe qu'un même mot peut
cxprimer à la lois un état, une actiorì et une qualification. La langue
anglaise autorise la concjsion pour véÌriculer le sens souhaité. De plus,
:1-L l:l'--.ae'* *.iiïìL*$::::
dans son usage américain, Ia ìangue anglaise est simplifiée à ì'extrême.
Elle est centrée sur Ìa compréhension du messag-e. Par opposition, Ìa
Ìangue française utiÌise une grande diversité de mots pour exprimer
une infìnité de nuances. La lanque lrançaise enrichit le message de Ìa
Carnúxr:ro
diversité des mots.) Enfin, J'interprétation socio-culturelle d'4. Prost
se donne explir:itemerrt pour telÌe dans Ìa synthèse finale du
document ; < Culture d'idées par comparaìson à culture de faits et Puhliciré réf érentielle
d'argent, séduction et adhésion par comparaison à conviction rarion-
neÌle, pensée gÌobale et syÌìthétique par comparaison à pensée anaÌy-
SUPERGTUE

Publicité référenrielle

Publicité oblique
Vous avez ru la page de droite ? Eh bien tâchez de vous en souvenir quand vous rencontrerez ceile de qauche.

Publicité oblique
MAISONS BOUYGUES

MARTBORO
oTués dans l'reuf ! , 219

titìuc, cénéralistes par compalaisolÌ à spéciaÌistes: il cst ér'iclent clue


lcs coÌìtextes cultureÌs franÇais et amí:ricairrs devaient gelérer des
approcìres de communication qui sc tìistingueraienL d:rls leurs grandes
tendarces et leurs cxprcssions génér'ales. rr
Ccttc oppositìon Amérique irs France rì'est pas sans rappeler ìes
pr-opos d'4.J. Creimas quc n(Ìus;Ì\'ons rapportés p. 18?. Seulement
voilà : lcs choses sont-eÌÌes aussi simplcs? Léo Bur!ìett est l'homme de
Marlboro, rélérence séguélienÌìe, cÌ Bill BerÌìbach a fàit clc la cornmu-
nication VoÌksrvagcn l'uÌì (lcs ar<ìétypes de Ìa prrblicité oÌrlic1ue. Et
ìnverserrlent, J. Fclclman, pour être Ì'idéolosuc clc La pubìicité srrb
stantielle, ìÌ'cÌr et pas ntoins I'un des chcÍ:s tÌe íiÌ de la publicitó
Íìançaise. Nous n'irons pas plus loin, personneìlenìeÌlt, daÌÌs ce
débat. Disons sìnrpìenrent qu'orÌ toucÌlc ici arLx ploblèrnes du relati-
vismc culturel, anaÌysable séniotiqtrcment en termes de connotlrruns
véridit:toires oÌr, pour reprcndrc 1'approche c1u'en avait laitc N,l. I,ì)u-
c^ult, d'attitudes ipistémiques; chaclue cuìture se dófinirait ainsi selon
Ì'attitrrde qu'ellc adopte paÌ-rapport iì ses proprcs sisnesa3. Une teÌÌe
interprétation socio-t:ultureÌle nous parait cn tous cas pìus sugge;tirc
mêÌÌÌc si cllc est certainement rnoins créetìve eL <météorololaiqu(.
- que ccllc qui r:onsiste à dire qLre la publit:ité obÌicltre une publi-
-cité de déc:alés et la publicité substaÌìtielÌe une puÌrÌicité est de rcccntrés.
Àutre ìnterprétation, dc typc historique cetle fois ... oü 1'orr reparÌe
de J. SéguéÌa et du passase cÌe ì'ère de 3n à cellc dcs 3s : Simplicité,
Substance, Spectacìc. Pour Ìe patron dc RSCrc, l'óvolution hist,,ritluc
de Ìa pubÌicité serait ìe i:rit des annonceurs, ct noÌì du consommatcur
c1ui, Jui, <veut Ìe r-ôvc et la réalité,r : < I-es anÌÌées prrLr, ìes années folÌes
sont mortes. Paralysés par la crise, les artrronceurs c1uì sponsorrserelt
llos sÌlectiìcles ()ÌÌt ren()ncé. Ils exigent plus d'aruurrentatìon, plus dc
promotiorr. La raison est Ìe grand vain<lueur de la crise. [,t cr-istr nc
rime avec création quc pour l'oreille. lit encore, la rime cst-clle très
pâuvre... Nous sommcs eÌìtrés dalls rrne socìété ìoLrislhilipparcÌe r1 I.
Ajnsj, Ìes années 70-80 auraient été ceÌles de I'apogóc.de la prrblicité
mythique aÌors que les années 90 s'annolceraient comÌne ceÌìes de la
pubÌicité substantielle. I.ìn íait, on peut se denaÌìdcr si J. Séguéìa ne

11 CÍ. ,^.-J. (ìreinÌâs er.J. CúÍtí:\, Sérnntìque. Dì.lr) 11.ÌìÍt Ì ì:\o,nl dc Ìa thlott du lt1,t
g.ge, aP. .ìt., aÌtjrle " \rÌ aìsenììrlablc ,. p. r22 4 23.
arJ. SéguéÌa, inreÌ1icw cÌans CÀlr\?ür, n', 10U,23 jânvn'Ì 1939.
Pub iciÌé substanlielle
220 \ous lp' tignps. lcs ,tralegtcs oTués dans I'ceuf! > 22t

croit pas davantage à une sorte de mouvement de baÌancier, à un pubìicité rélérentielle ou substantielle; viennent ici à Ì'esprit bien des
mouvement paradigmatique de Ì'histoire qui Íèrait se réaìiser alter- marques dont la communication a été conçue et górée par D, Ogilvy
nativement Ìes deux grandes Ìogiques contraires :Íònction construc- ou J. Feldman ; Sears et RoÌÌs-Royce, ou Findus et YopÌait. Cela dit,
tive du langage us l'onction représentationneÌÌe... "On a perdu nos puisque J. Hénocq aborde Ìe problème de l'approche marketing, par
mar<1ues culturelÌes. Quand on est perdu, on revient en désespoir de opposition seÌon Ìui à I'approche créative, considérons mainte-
cause à la substance, c'est-à-dire, en pub, au produit. Je reviens à
-
nant Ìe discours -
d'un homme de marketing, pÌus exactenent d'un
Procter. La pub a été telÌement axée sur le beau, l'image, la starisa- enseignant en marketing : J.-N. KapÍèrer.
tion, la surmédiatisation, Ìa gonflette, qu'elle s'est condamnée à bas- Dans sa contribution à l'ouvrage collectif Za MarqueaT, J.-N, Kap-
cuÌer dans Ì'autre sens. ras ferer s'attache à révéler "Ìa face cachée des marques> à partir
L'interprétation, historique eÌle aussi, de J. Hénocq relève d'rrne d'exempìes concrets: le changement radicaÌ de la communication
attitude pragmatique et non d'une idéoÌogie. Une attitude qui Nescafé en 1981 (l'apparition du petit train circulant dans les Andes),
n'exclut pas Ìe génie créatif; on doit par exemple â J. Hénocq deux Ìe lancement du (gratton laveur> 3M ou celui des Lotus Compacts
des plus grandes campagnes de la publicité substantieÌÌe ; < ll y a de par Kaysersberg. J.-N. Kaplerer est ici le promoteur d'une thèse :
Ì'Urgo dans Ì'air; iÌ y a de I'air dans Urgo> (TBWA 1980) et Ìa récente n La vraíe valeur ajoutée de Ìa marque est dans le produit et sa remisc
campagne lrr, Bélier 1988 (,(Cent ans et toutes ses dents>) : <Pour permanente sur le métier pour améÌiorer sa qualité, ses performances,
Dunlopilto, dans Ìes années 70, -je me serais certainement opposé sa vaìeur d'usage, son adéquation à Ì'évolution des goüts et besoins
aux matelas à ressorts. Mais aujourd'hui, DunÌopiÌÌo n'est pas Ìa seule des consommateurs. )48 Cette recherche permanente de I'améljorarion
marque à Íàbriquer des natelas de mousse... Je ne peux donc pìus agir des produits est la condition même de la survie d'une marque dans
comme en 1970, au risque de faire le jeu d'une coÌÌective du nateÌas une économie libérale oü < le marché est un système de liberté :
mousse qui profite autant à ses concurrents directs qu'à la marque les consommateuÌs votent chaque jour". L'auteur et co-éditeur
dont je m'occupe, Je ne peux pas non plus distinguer mon système de l'ouvrage * définit aÌors la place de Ìa publicité - dans le sys-
de mousse de ceÌui des concurrents. Je dois donc choisir un territoire tème : (IÌ faut avertir et convaincre les consommateurs des rrou-
pubÌicitaire (en Ì'occurrence, celui de Ì'érotisme) et labriquer une velles différences et performances apportées périodiquement par les
création poétique, irrationnelle, sympathique, amusante ... Une com- marques, rae. On ne peut être pÌus cÌair sur ìa fbnction seconde de Ìa
munication de marque. C'est pour cela que Ìes créatifs ont pris Ie publicité:une fonction d'information persuasive et non de création
pouvoir dans Ìa publicité depuis quinze ans. Il s'agit véritablement de (ou de contrìbution à Ìa création) de valeur ajoutée.
l'échec du marketing. "aô La position deJ. Hénocq est, on le voit bien, A lire et reÌire Ìes pages de ce chapitre, on ne peur qu'être liappé
une position militante, sans pour ceÌa * encore une 1'ois prôner de la récurrence des expressions verbales qui définissent Ìa fbnction
telle ou teììe idéoÌogie créative. ElÌe peut, cependant,
-
laisser accroire représentationnelle de la publicité et qui Íònr de .f.-N. Kapferer l'urr
que Ìes complémentarités des pubÌicités référentielle et substanÍielle des thuriféraires de la publicité référentieìle peur-êrre du faìr que
d'une part et mythique et oblique d'autre part reÌèvent respecti- ses sources d'inspiration sont essentielìement-anglo-saxonnes : le sìo-
vement d'une communication-produit et d'une communication de gan <'f'out arôme de Nescafé en 1962, reflítait... Ìa stratégie marke-
marque. Il ne nous semble pas, quant à nous, qu'on puisse Ìégitime- tingb0, ìa communication est nécessaire pour ofaire savoir ... et a1)er-
ment eo tirer cette conclusion. D'aiÌÌeurs, on ne voit pas pourquoi. a
priori, une communication de marque ne pourrait pas relever d'une
at
{3
J. N. Kapferer eÌ J.-Cl. Thoenig , La Marque, Paris, Ed. McGraw HilÌ, 1989.
Kapferer. I-a Íace cachée aes marques, ìn La LIarque, ob. rit. p.22.
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lbd.,,,t 43.
a IJ H-n.,q. rlr.rrrc" tLrr' ç/,"req,r.. ìr"'71 21 .ePt'"nbr" 1987 \a tbtd..
i. t1.
222 Sous les sign.es, Ie.s stratógies " lues dant l'rzuf! " 223

tir>!ì, trne czrÌnpagne publi<:itaire d'envergurc açr1 ) ,,Jàirc .onnaìtre raient vite sur le message dc lond >. Les mots, eux, sont micux consi
"
la nouvelle di{lérelcc au n:rrché r'52, c'esL ÌiÌ c()mmunication qlli Jrgta dérés mais ceux qui sont disponibÌes pour ( avcrtir et col.ÌvaiÌÌcre ) sont
L'o,ntécédence et clui pernet de protéuer Ìa création"r'|, usalrs ìa publi
en nonbre réduit et constant. Comment dòs lor-s signifier les réaÌités-
cité, ìa nrarque ne pourrait atteind're alusst trile sa clientèìe. EÌÌe devrait produits, Ìes performances des produits qui, elles, évoluent?J.,N. Kap-
attendre les effets beaucoup plus lents du bouche à oreille cìes consom- lerer s'en réfère aÌors tròs sérieusemcrìt à Coluchc : < lln se rcrrocrve-
matcurs... >5{. llnfin, la marquc u doit cctmmutricluer Pottr a1)ertir et lznl rÌì Permlncnte. eìl, rloit rommurriquer pollr avrìlit er cr,ÌìvJin{ re
rcn1)aínLre cle (la) diÍÍérencer55. C)n retrouve ìa même con(eption ct
de cette différence. Or le nombre des rrots disponibìes est rédujt. Le
pratiquement les mêmes tournurcs que chez Ogilvy :ìa prrblicìté est reBretté CoÌuche, dans un sketch célèbre, se mo<1uait des pubÌicités
rrn véhicule, eÌle gaerte sa Ìégitìmité du fait qu'elle représentt un gain de lessives pâssant du blanc au plus bÌanc que bÌalc, puis au plus plus
de temps (annonce, aÌrtócédence, accélération, ...) et d'espace (pìus que blanc. Sans le savoir, iì identiiiait une cÌes sources cÌes problèmes
large dientèle). De Íait, la pubÌicité semble bier susPecte paÍ nature; de la marque : la marque améìiore ia perfbrmance de ses procluits
on trouve curicusement publicité ot publícilairr associés à images et effet mais ne dispose que clcs mêmes mots pour Ìe signifier. I-a communica
de m.anches, habillage ou artíJíce. Si la publicité est cÌ'enblée susPecte, tion publicitaire sembìc aÌors piétirrer, se répéter dans ìe temps : elLe
c'est qu'eÌle relève du paraitrc et non cÌe 1'étre, de ìa " fbrme ) et noÌ) bute sur Ì'absence de vocabulaire, alors que Ìa réaÌité-produit, elìe, a
du "fònd". llt le paraitre sans l'ôtre, c'est le mensongerlla ufòrme , bien évolué. r57 Comme on le voit, ìes idéoÌogies pubìicitaires peuvent
se retrouver dans le discours du marketing, comme se retrouvent avec
sans le <Íoncl> c'cst Ie speüecle. Sans sLatut quant à ce qui Íait être
(n ce n'cst pas la communicatìon qui fait les marques I on ne Peut c()m
elles des systèmes contÌotatifs réglant I'usaue des diflórents larrgages,
muniquer que sLrr ce qui existe o), la pubÌicité, et Peut-être nlême plus par exemple en Íbnction de Ìeur rapport à Ìa róalité ou de telle
larpgement la communicatiort, cìoit justifìer de son empkri ou teÌÌe typolouie des signes. l,e sÌogan de Paris- Iatch, <Ìe poids des
quasi domestique du mot par l'illustratioÌì parÍaite et conslarrte de mots, Ìe choc des photos > en est un autre beÌ exempìe.
-
ccs valeurs anciÌÌiaires que soÌìt la céÌérìté et I'efficacjté. La pub, c'est Enfin citons une dernière interprétation du système des idéoÌogies
Ìe saute ruisseau du marketing : " Passant par dcssus Ìa distribution, la publicitaires : l'iÌÌterprérarion sómioÌogiquc de G. Peninou. L'auteur
publicité s'adresse dircctemert aux consommateurs, décideurs ultimes d'Intelligence de la publicitét\ distingue fondamenraÌeme nt deux grands
de Ìa validité de cìraque n-ìarqLle PréseÌ-Ìte sur Ìe marché, dans utle cc.r- régimes qui partagenr Ìa créarion pubÌicitaire I l'un reÌève de Ìa <déno-
nonrie ÌiÌrérale. o5u tation référentielle, à visée ìnformative", Ì'autre de Ìa <connotation, à
visée psychoÌoeique>. I)aÌrs un schérrra, reprocìuit ci-contre, G. peni-
Mais ce qLri est le plus intéressant selon llous, c'est que! Ìâ encore,
--> correspond au choix idéoÌogitlue une certaille défìrrition du discours nou présentc les dix oppositions qui n rassemblent les diflérences >
et des statuts respectifs des ìaneages: Ìes langages, ce sotrt des signes, ertre Ìes deux régimes. Or la dernière de ces diffórences mìmesis I
poiesis Ìre peut pas ne pas être rapprochéc tle ìa catéqorie - Íònc-
les signes signifient cìans Ìa mesure oü iÌs renvoietrt à la réalité, et il -
faut rìistìngucr signes vcrbaux et signes rron-verbaLÌx. L'image - le tion représentationnelÌe vs foncïj,rn ronsiructirr, a parrir ile laqueÌÌe
serait dangereuse parce qu'eLl. rrrrrit utt nous avons recorÌÌìu et interdéfiÌìi Ìes quatre idéologies. Flt les termes
spot téÌévisé ou Ì'aftìche
-
pouvoir de séduction teÌ que les consiclératjons de " forme " I'emporte- employés par G. Peninou pour parìer du passage ertre la pubLicìté de
d,ínotation et lì, publicité de connotatian aut()riserlt de fait un LeJ rappro-

'i lbut., p.2õ.


"'' Ibd., p.2n
tf id., p. 2ì t'lrrd.. p. J8- r9
"+ tbid., ;:. 27 .
.' thd., p. 38. 'í G Pcninnu, lnte.ltigpo-r. d/: la p t,tì, Ltí, Paris. Ed. RirbeÌr L.ìtÍòÌr(, 1972. Un (,,rvÌagc
9L re.', lF r.\,. dc ri l.-F ,, ,Ì' , ,.rn,,,,tsie puL,r, rrr r,
'õ lbid., p. 13.
ì

224 Sous Les signes, les stratígies <Tttés dan.ç I'euf !> 225

chement : C'est délaisser Ìa praxis et la mimesis qu'elle appe lìe


LÊs oEUx cRANDS RÊctMEs "
pour Ìe mythe - favorise.,5e
et Ìa poêtique qu'il -
-
Oü y at-il donc interprétation cle la part de G. Peninou, et en quoi
celÌe-ci est-eÌÌe sêrniolouique? Pour G. Peninou, la <dénotation réfé-
reÌrtieÌÌe) est un sens ÌittéraÌ : iÌ y a un en-soi, un <ré{ërent> en
pubÌicité, Ìe produit. I-a dénotation est le rapporr cle confcrrmité - à
celui-ci; et Ìa Íbr.rction réÍérenrieÌÌe "établit ìa relation entre le mes-
sage et I'objet auqueì il réfère"60. La connotation, quant à eÌÌe, sera
le fait des nassociations dérivées>. de Ìa non-coïncidence entre le dis-
cours et la réalité, et par Ìà même Ìe fait d'une productioÌì de sens.
Nous pensons avoir montré concrètement, et aussi clairement que pos-
sible, que les campagnes référentielles tout autant que Ìes campagnes
mytbiques rclòvcnt de stratégies discursives complexes, et que le dis-
cours référentiel, comme tout discours, est une production, en I'occur-
rence la production d'une iÌlusion rélérentieììe, par Ì'exploitation
entre autres procédés des systèmes connotatifì qui font accorder- à
-
teÌ ou teÌ type de signes ou de langages des vertus de plus ou ntoins
grande ressembìance à la <réalité>. La pubÌicité référentieÌÌe teÌle
que nous I'avons définie n'a donc rien à voir avec uÌr sens littéral qui
coìnciderait avec la réaÌité. Autrement dit, cette littéralité esr I'effer
de sens qu'eÌle cherche à produire;c'est sa visée et roÌÌ sa natuÌe.
Croire que c'est sa natLrre ou que c'est le devoir de Ìa pubÌicité, ou sa
noblesse, est.justemelìt un fait d'idéoÌogie,
Comme on peut Ìe remarquer ici, un sémioticien, travaillant selon
Ì'approche structurale qui a été initiée par Saussure, s'attache à
reconnaïtre et à aÌìalyser Ìes logiques et les pÍocédures dorrt relèvent
chacun des régimes publit:itaires; Ìe sémioÌogue influencé par ìe posi-
tivisme d'une certaine sémiotique américaine zia R. Jakobson et
R. Barthesdr veut pour sa part distiìÌguer -ct classer ces régimes
-
selon leur rapport à Ìa réaÌité. Il s'agit là, pour le sémioticien, d'une
entreprise qui ne peut que faire perdre à un projet d'une scierrcc
des Ìangages et de la signification toute autonomie et tout objet spéci-

'' L;. P.niÌiuL. Int?1t,Ëa,' d. t.t


t\ tLid , o. ll\. luLlt.t!;, op ,ìt . p. ll2.
6 Une relle (,'nceplôn e.t (cn\iLrlc,lans la définition de h fonction ri'íére|tielÌe du
langage chez R. Jakobmn, paÌ rapporr aux cinq autres Íoncrions, et dans les déÍlniriorls
G. Peninou, lntelligence de ]a publicìté de la dénotation, de ìa conììotation et du métalangaee cher R. fìaÍthes, Eléments cte
v miolog.-. aanquríotion\. n 4. PJ||.. 5, uil. 361
226 Sous les signes, Les stratégie.t

lique, Déí'inir les discours ou les régimes pubÌicitaires par rapport à la


réalité ou à quelque référent autre que discursif ou Ìangagier revient
à livrer piecls et poings Ìiés toute sémiotique ou sémiologìe peut
importe alors l'étiquette à n'inrporte clueÌÌe discipÌine qui -préten-
drait avoir la <réalité> ou-ce ré1érent pour objet propre : )a ph;siqur. BI BLÌOGRAPIIIE S ÉL T]C'I I V I:
la biologie, Ì'économie... Porrrquoi pas, apròs tout, les mathémiltiques
ou la ph il,,*,ph ie ?
On concÌura ce chapitre noÌr sur unc nouvelle ir-rterprétatìon mais
sur une récente interrogation à propos de ces idéoìogies. Dans le
Anivé N,Í. (Ìxluet l.-C1., La sínìotìr1ue.n
numéro spéciaì Eté 89 que L'Expansfun a consacré à Ìa publicité62, -et J&, à l,aúír et ãutouï tte t,.ELrre
. d'A. J. Creinas, PaÌis/AÌnsrerdâm, td. Hadès-úenjamiirs, 1987.
R. Alexandre présente nos quatre idéologies pubÌicitaires. Le journa- Augé M., Un ethnobgue dans le mittt, t'aris, Hacherre, Ì986.
liste <émerge du carré jnÍèrnaÌ> (sic) avec cette idóc qui ne laisse pas Bartlres R.. M\thak)gies, Paris, Seuil, 195?.
BrÌrh, \ R.. F.l, in.nÌ\ .1, ,eÌnrot,,gt. rn Comnunicatians, n,,.1, prris, Seuiì, Ì96.1.
de faire réÍléchir sur ì'ìnfìuence que peut avoir la publicité et ses cìiÍ- tìd rdr ilr" LJ 1.. I ,
"\,t,r,? o, oLla,. I'Jt
,. ( ,.,t.,ndr,r, tCbu.
férentes icléoiogies sur ses cìbÌes, c'est-à-dire sur tout un chacun : Si Baurìrìlla_r,l ). ü,,. ,,hque dp t'ícaÌu)nie paritìqu. d.L rgnr, paris, caÌìiÌìrÌl.l,
" !,'u'
les discours des publicitaires recèlcnt tant dc positions contradicr o ires, Ì.lcl. 'I cl. l9?2.
Ben venisre F.., Prrrlà" es d.e lhtgutstique glnit âle, paris, câìlimâr.l, t. \ tg6ò Í.
eh bien, tout cela doit finir par s'annuler dans nos têtes. De sorte que /
Bc'.r.1,d,D.. rlr...r,?r ,,.r ^,,,rol ,:r, \., 1,.,,ri, .r:rtr,r.,, ,,lr_rrr.rrrq,rnp"iSrr
: 2 / tgj q.
c'est peut-être G. Peninou qui a raison quand iÌ conclut : u En fin de l,' 81",Ì8uhrc$ i.l).i t.tp,',..t.oatt l,.L,40tôt tí,po..t, i,.ì,".Érl,rr r( h. piÌr-
'1988
compte, que retie ÌÌt-on de la pubÌicité ? Rien. C'est tout son cl]arme. , ', Èd.). \,,1. t. r, ,l.rr,, \., rh-iJô,.,r o
Et çà, comme disait la récÌame u EnÍbncezle vous bien dans la tête. BeÌÌrâl]d D...(ód.), Les passions,
^nÌ..c it At)(s sí ntiTu.s Rút.titì, |X, 39, cNRs/
"63 l.]rrss. Ì 9fìíì
'lout en reconnaissant à G. Peninou Ì'autorité qu'il faut pour établir Coquer J. CÌ., Slnioti.tue. L't:coÌ. de pdrts, pãttr, ÌJachette-Unìvcrsité. 1982.
effectivement une <Íin de compter, nous pensoÌls! pour notre part, Courtés J.. Introdudion à ta sémìot;q1). ntrtojìle eÌ d,Jtanrur, p.trrs, Êtd.hetrc Urr-
\ er\ric l9 /h
que ce serait au conLraire une belle eÌìtreprise socio-sérn iotiq ue que Ìln, J. N,Í., 1,/ raLl .úatií P?]is. Ld. JcaD CÌ.ìu.te La(ès, Ì984.
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t) P,..t,,..t,,. lt..t.a:,.. n 2. nrjr-J\ri. t.,!j.
Floch J. N{.,.l.c chang(.ÌÌenr clc 1òr.nLrtc cl'Lrn qÌrotidìeÌr i t.rìJrprochc cl.un(. rtoubte exi-
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Il,,!1 l-\' t. t..,"e. d, t't",pútttp t" iËu, u\. Ftt. r,r..,,. toBij
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Acteur, 63, 11 1, 124. Contrat de véridicrion, 55, 61, 12, 15,
Adjuvant, I I 1. 78.
Anti-phrastique,200. Conrre-don,55.
Anri-programme,36. Conversation,.lS.
Anti-Sujet,60. Corréiation, l5 Ì.
,A.ppropriation, I 10. Croire,200.
AspecruaÌisâtion, 117 note Ì3.
Assertion,28,29. Llébrâyage interne, 194.
Attitudes épistérÌiques, 2 19. Debr;1age rcmpo'eÌ. 5pdridÌ. a, ro
Attribution, Ì Ì0. riel, Ì Ì7 note 13.
Axe sémantique,2?. Dépossession, I Ì0.
Axiologie, t7, 60, 126, 145, t46, Ì4?, Désémanrisation, 33, 3.1.
I50. Destinataire, S3, 109, I 11.
Axiologiclue, 60, 86, 151, Ì52, 200, Destinateur, 109, I 11.
201. Devoir, Ì06.
Diachronique, 15.
Bi-isotopique, 29 nore 6. DiaÌogue,45.
Bricolage, Ì ?5. Dimension figurative, 85, 102.
Don, 1 10.
Carré sémiotique, 27, 122, l?5, ÌBB, DuÌativiré, Ìt? note 13.
r 92.
Catégorie sémantique, 27, 30, 85. Elasticité du discours, 28.
Chiâsme, Ì 37. Embrayage acrorieÌ, 117 note 13.
Clôrure,2l, 52. Enoncó d'état, 108.
Codage semi-symbolique, 98, 107. Enoncé de faire, 108.
Codage symbolique, 98. Enoncé narratif. 58, 59.
Commurâriorì, 12. Enoncé syncrétique, 86.
Compétence, 6Ì, 62, 63, 106, Ì07. Enonciataire, Ì6. 53, 55, 56, 165, 200.
Composante discursive, 124, 125. 208.
Composante sómanriqLLe, 1 25. EnonciateLrr, Ì5,55, Ì24, Ì65, 194,
Composante sémio-narrarive, 124, Ì 25. 200.
Composanre syntaxique, 125. Enonciâtion, Ì24, 126, ì65, 177, 194,
Condensation, Ì2Ì, Ì2ô. 204.
Configuration discursive, ?8, 203. Epreuve, 59, 63, Ì 10.
Connotation véridictoire, 219. Epreuve décisive, 59.
Contexte de communication, 4. Epreuve gÌorifiante, Ì6, 59, 61.
232 Sous les signes, les stratégies Index des termes sémiotiques 233

Ëpreuve qualifiante, 16, 59. Objet de vâleur, 108, I26. Signifiant, 9, 12. Synlaxe nârÌative, 63, 109.
Espâce rayonnanr, Ì74. Observateur, 117 note Ì3. Significarion, 8, 11, 20, l?3. Système semi-symboÌique, 87, 94, Ì08,
Eur finaÌ, 108. Opérations,28,29. Signifié,39. 150.
Etar iniiial, 108. Opposant,63. Socio-sémiotique, 226. Systèmes connotatifs, 225.
Etat modal, I12. Statur na.ratif. ô3. Systèmes sémiotiques, 88.
Expansioo, Ì 21, 126. Parcours génératil de la signìfication, 8, Stratégie discursive, 194, 225. Systèmes symboliques, 88.
r 23, 156. Stratégies ìnreractionnelles, 46.
Faire cognitìf,196. Parcours narÌatif, 22, 60, 63, 110. Strucrure dìscursive, 1Ì 8, Ì2.1. Terminãtiviré, I Ì7 note 13.
Faire conjonctif, Ì 12. Performance, 60, iil, 62, I06. Strucrure narrative, 58, I08, 124, 203. Texte,4.
'fhématique, ì25.
Faire interprétarif, 56, 6Ì. Phonologie, l2 nore Ì4. Strucrure sémio-narrative, 124, I25. 'I hymie, 85.
Faire persuasif, 56, 61. Pictogramme, 165. SÌrbsÈnce,65,76.
Faire pragmâtique, 196. Plan de Ì'expressioo, Ì2, 88. Substance de I'expression, Ì 55. Transformation, 108.
Fiducie,54,75. Plan du contenlr, I2, 88. Substance du contenu, Ì6Ì. Unité narrative,63.
Focalisation,54. Pouvoir, 1 13. sujer, ô0. Unité paradigmatique, 58.
Forme,5,75,76. Prédicat,5B,59. Sujet d'état, 108. Univers figürâtif, Ì26.
Présuppositioo,6l. Sujet de faire, 110.
Grandeur, 151. Princjpe d'ìmmanence, 5. Synchronie, 132. Valeur contexrueÌle, 30.
PÌocès, 3Ì, Ì ì7. Synchronique, 15. Valeur d'usage, 123, 127, 130.
Hypotâxique, Ì Ì0. PÌogrâmme d'usage, 128. Syncrétisme, 58, 132. Valeur de base, 123, Ì27, Ì30.
Programme de base, 128. Synesthésie, 17. VâÍiables,5.
Idéologie, 184 note 7. Programme narratif, 108, Ì Ì0, 125. Syntagmatique, 58, 59, 62, Ì 17. Véridicrìon, 54, 7 4, 194.
Illusion référenrielle, 208, 225. Projection paradignatique, 58. Syntagmes, 2L Virtualité, 124.
Inchoativiré. 117 nore 13. Proxémique, 21. Syntaxe, 125. VouÌoir, 114.
Intentionnalité, 59, 60.
lnleraction,45. Récurrence,24,25.
lntertexrualiré, 1ô6. Récursivité, 12ô.
Invâriants,5. Redondance, S2.
Ironie,200. Référent interne, 195.
Isotope,29. Rêférentiâlisation, Ì94.
Isotopie, 29 note 6. Relation de complémenrârité, 29.
ItéÍativité, Ì l7 note 13. Relation de conjonction, 108.
Relation de conrradiction, 28, 29.
Lexèmes,30. Reìacion de conrrariéré, 28.
Relation de disjonction, Ì08.
ManifesetioÌÌ, l2ti. Relation fiduciaire, 74.
Médiateur mythique, I 1. Relation paradigmatique, 58.
Micro univers sémantìque, 27, t88 Renonciatiírn, 110.
Modalités,6Ì,62, 106, I 13, 1Ì4. Rôle, 63, 1ÌÌ, t2.1.
Motif, 42, 123. Rôìes accanriels, 200.
Mythe,86. Rôles thémariques, 203.
Mythogramme, Ì65, 17.1, 175.
Sanctlon,6Ì,62.
Nébuleuse du sens, 10. Savoir, 106,200.
Négâtion,2B. Schéma oârratif, 58, 61, 64.
Négociarion,45. Segmentation,2Ì.
Niveau abstrait, 126. Segmentation < actorielle >, 23.
Niveau de dérivation, Ì 26. Sémanrjque, 125, Ì 37.
Niveau figuÌatif,126. Sémantique ÌexicaÌe, ÌO note
Niveau profond, 125. Semèmes,30.
Niveau supeÌficiel, 125. Sémiologìe,7,226.
Niveau thématique, 126. Sémnxis,89.
lrrprinó i:n Ì"ranct:
Imprincrìr'rlcs I'rcsscs rrìitlsitaircs dr: tÌarrcc
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73. alenLrr: Ronsarcl, 1ì 100 \:r:rrrltlnr'
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