Vous êtes sur la page 1sur 2

Conférence de

Jean-Louis HILLAIRET
Chercheur-Archéologue chargé de recherches I.N.R.A.P
Responsable sécurité (chantiers INRAP Grand sud-Ouest et Dom-Tom )
Vice-président de la SAHCM et responsable du groupe terrain

"Les fouilles de l’aqueduc de Saintes"

le 3 novembre 2007 à 14h30, salle de la médiathèque de Lagord

SAINTES, la cité des Santons et ses aqueducs.

Des fouilles récentes ont montré l’existence d’habitats dès l’époque pré-
augustéenne, sans pour autant que nous puissions y voir pour l’instant, un oppidum
gaulois. Les origines romaines de Saintes semblent, d’après Louis Maurin, correspondre
au premier gouvernement du co-régent d’Auguste, Agrippa vers 40 à 37 av. J.-C.,
faisant suite au lancement du schéma routier, dont la première des quatre voies
principales partait de Lyon et aboutissait chez les Santons. L’étude architectonique des
blocs monumentaux augustéens et julio-claudiens de Médiolanum (SAINTES) n’ont pas
d’équivalent en Aquitaine, ce qui incite les scientifiques à penser que cette ville fut la
première capitale de cette nouvelle province d’Aquitaine. Vaste territoire qui s’étendait
depuis les abords de la Loire jusqu’aux Pyrénées, elle englobait la plus grande partie du
Massif central.
Il faut attendre le début du 1er siècle de notre ère et plus particulièrement vers
18/19, date de l’achèvement de l’arc marquant l’entrée de la ville par la route venant de
Lyon, capitale des Gaules, pour voir s’installer une nouvelle voirie. Celle-ci est fondée
sur un maillage orthogonal. Il est raisonnable de penser, au vu de l’importance des
travaux, que c’est également à ce moment, que les Romains décident, grâce à leur
maîtrise technologique, de construire un aqueduc pour desservir la ville en eau potable.
Un premier aqueduc voit le jour, depuis la source de la « Font-Morillon » sur le
commune de Fontcouverte, jusqu’aux thermes Saint-Vivien, construits au bord de la
Charente. Sur le parcours, plusieurs ouvrages de qualité ont été réalisés : le pont-
aqueduc du « vallon des Arcs », long de 160 m avec ses 27 arcades, puis la galerie du
« Plantis des neuf puits », sur une longueur de 500 m à 17 m de profondeur, enfin un
autre pont-aqueduc à « Haumont » long de 400 m qui comprenait 62 arches et atteignait
29 m de hauteur.
Quelques décennies plus tard, à l’époque des Flaviens et des premiers Antonins
70/150, la ville continue son expansion ; elle atteint sans doute son époque la plus
brillante et correspond à l’apogée de la prospérité de Mediolanum.
Ainsi, un nouvel établissement thermal est construit à Saint Saloine. Il fallut
revoir le débit de l’aqueduc trop faible. Ainsi, vit le jour un nouvel aqueduc réunissant
les eaux des sources des communes du Douhet et de Vénérand. Il doublait le parcours du
premier aqueduc à partir de la source de Fontcouverte, et permettait sans doute de
l’additionner aux deux autres. Cet itinéraire a permis de réutiliser, après modifications,
les ouvrages d’art du premier aqueduc, ce qui en diminuait ainsi le coût.
Les aqueducs de Saintes possèdent différents types d’ouvrages. Tout d’abord, en
leur point de départ, les captages des sources, et à leur arrivée, les thermes. Entre ces
deux points, il existe un conduit qui a été réalisé soit en tranchées, soit en tunnels, soit en
galeries construites hors sol. Puis, lorsqu’il doit franchir un vallon ou une vallée, ce
dernier passe soit sur un mur-pont, soit sur un pont-aqueduc, voire, pour le
franchissement de la vallée de la Charente, par le biais d’un siphon muni d’ouvrages
spécifiques (réservoirs de chasse et de fuite). Un autre ouvrage remarquable, est le
bassin de jonction des deux aqueducs de Vénérand et du Douhet, celui-ci ayant un
système d’évacuation des eaux, en souterrain, assez complexe

Les recherches effectuées depuis trois ans ont permis de mettre au jour d’autres
ouvrages inédits, tel que le croisement des deux aqueducs à l’emplacement d’un talweg
de vallon, ainsi que des systèmes de délestage d’eau avant l’entrée des ouvrages, mais
aussi la jonction entre la sortie d’un tunnel et le début d’une tranchée.

La « Grand-Font » correspond à la source la plus éloignée du deuxième aqueduc


qui alimentait la ville antique de Saintes. Cet endroit était connu longtemps avant
l’arrivé des Romains, puisque nous avons recueilli de la céramique datée de l’âge du
Bronze Ancien/Moyen.

Les populations avaient accès à l’eau de la rivière souterraine par une ou


plusieurs diaclases remontant jusqu’à la surface. C’est donc par l’une de ces failles que
les Romains ont eu accès à cette rivière qui coulait sous terre à quelques mètres de
profondeur. Ainsi, après avoir vérifié le débit et la hauteur de l’eau par rapport au
niveau d’arrivée à Saintes, les ingénieurs romains ont pu décider de réaliser un aqueduc.
Cet aménagement antique, lié au captage d’une résurgence souterraine, est
exceptionnelle dans le monde antique. Ce monument public utilitaire et cultuel
correspond à une source sanctuaire.

Jean-Louis HILLAIRET

Vous aimerez peut-être aussi