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ECOLE D’APPLICATION DE L’ARTILLERIE ET DU GENIE
ye 2 ARTILLERIE
LES PROJECTILES
Par E. JOUFFRET
CHEF D'ESCADRON D'ARTILLERIE
FONTAINEBLEAU
TYPOGRAPHIE DE ERNEST BOURGES
IMPRIMRUR DE L'SCOLE D'APPLICATION
92, ruc de 'Arbre-Sec, 32.
1881Worn 42.9%, Bl
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JUN 51320
LipRARY,
DrURAND runeLES PROJECTILES
Nous avons étudié la Boucun a rev, c’est-d-dire instrument avec lequel
Tartilleur parvient 4 produire, en un temps trés court, une quantité de
force vive qui se chiffre déja par des milliers de kilogrammétres pour les
petits calibres, et qui croit proportionnellement au cube du calibre.
HH nous reste & voir le moyen par lequel la force vive ainsi engendaée est
transportée sur le but pour y produire Yeffet voulu : ce moyen de trans-
port, ce véhicule de force vive, n'est autre chose que us Prosgcri.e.
L’organisation du projectile doit étre étudiée aux points de vue suivants :
II faut 1° le placer dans les meilleures conditions pour son
dans I'dme du canon : voir chapitre premier,
dans I'air : voir chapitre deuxiéhe ;
et 2 élever Ie plus possible sa ~
mouvement
; . Jes obstacles matériels : chapitre troisi¢me,
puissance Caction contre ¢ 1, seoupes : chapitre quatriéme.
On aura vu dans ces deux derniers chapitres, et Fon sait déja, que la
puissance destructive ou meurtriére repose, dans la plupart des cas, sur la
division spontanée et opportune du projectile en un certain nombre @éclats
formant comme autant de projectiles nouveaux. Les deux chapitres sui-
vants. seront consacrés & l'étude de Yorgane qui produit Iéclatement,
savoir : :
percutante : chapitre cinquiéme ;
Ia fusée \ PO" pie
a durée : chapitre sixiéme.aa ot
Enfin, aprés avoir étadié le moyen, il nous faudra montrer Ie résultat
en décrivant, Caprés Ja théorie et, plus encore, daprés Fobservation, les
effets des projectiles dans
; les obstacles matériels : chapitre huitiéme ;
Je tir contre ; es
les troupes : chapitre neuviéme.
Un chepitre qui sort un peu du programme précédent a été intercalé,
sous Je 1 7, pour rappeler en termes sommaires Jes fails principaux de
Ia théorie de Ja probabilité du tir, que nous aurons & invoquer dans les
deux derniers chapitres.CHAPITRE PREMIER
CONDITIONS RESULTANT DU MOUVEMENT DU PROJECTILE
DANS L’AME DU CANON
Le projectile doit prendre dans le canon deux mouvements, un de rota-
tion et un de translation.
En co qui concerne celui-ci, il suffit de dire que la partie cylindrique doit
atre assez longue, relativement A la partie ogivale, pour que le centre de
gravité se trouve dans la premidre; autrement la stabilité du projectile
pendant son trajet dans ame ne serait pas suffisamment assurée. Cette
condition est toujours largement satisfaite, mais elle met une limite la ten-
dance qu’on a (voir chap. 2) d'allonger ogive de plus en plus.
La rotation est obtenue au moyen de rayures héligoidales creusées d’a-
vance sur la paroi de ame, et dans lesquelles pénatrent certaines portions
superficielles du projectile. Dans l'étude des rayures, nous avons déja fait
la distinction des systémes a ailettes, ob ces saillies conductrices existent
aussi d’avance sur la surface du projectile, et des systémes @ forcement, dans
lesquels elles se produisent automatiquement dés que le projectile com-
mence & sé mouvoir.
§ 1. — PROJECTILES A AILETTES
Les ailettes sont en un métal moins dur que celui de la bouche a feu, en
zine si celle-ci est en bronze, et en bronze ou en cuivre si elle est en fonte
ou enacier. Elles correspondent par deux ou par trois aux diverses rayures
du canon, et forment sur le projectile deux couronnes dans le premier cas,
trois dans le second : une seule couronne, méme en la mettant dans le
méme plan que le centre de gravité, ce qui serait indispensable, n'assure-
rait pas sufisamment la position de l'axe.i
Les ailettes sont posées & froid dans des alvéoles creusées A V'outil sur la
surface du projectile; ces alvéolos présen-
3 tent sur tout leur pourtour une sorte de
2 queue d’aronde dans laquelle, par compres-
& sion ou & coups de marteau, le métal de
z Pailette a été foreé de s'épanouir.
du systéme 4859
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ailette.
Fig. 1 bis. — Détaild’une
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§ 2. — CHEMISE DE PLOMB
Elle commence au-dessous de logive par un tronc de céne qui, dans le
chargement, s’applique contre celui sur lequel commencent les rayures, et
elle s’étond jusque prés du culot, en présentant parfois une interruption
sur sa partie moyenne. Pour diminuer le frottement contre la paroi de l’ame,
on la forme de parties alternativement saillantes et rentrantes : les pre-
miéres, dites bourrelets ou cordons, péndtrent seules jusqu’au fond des
rayures, et les secondes, qui ne concourent pas au forcement, -servent a
assurer la solidarité des premigres ainsi que Vadhésion & la fonte. Afin
que les gaz ne puissent pas se répandre autour de la partie cylindrique du
projectile lorsqu’il n'est pas encore entidrement engagé dans la partie rayée,
il est bon (voir la fig. représentant l’obus de 5) que le premier cordon prés
du culot ait un diamétre un peu plus grand que la chambre du projectile : ”
il s’appuie contre un petit trone de cdne qui sépare cette chambre de celle
de la gargousse.
Au début (artillerie prussienne avant 1864), l'enveloppe de plomb était
simplement coulée autour du noyau en fonte; V'adhérence était obtenue,
dans le sens longitudinal, au moyen de bourrelets ménagés sur celui-ci et
correspondent & ceux de I'enveloppe, dans le sens de la circonférence, par
des coupures faites a ces bourrelets en divers endroitd’Ce mode de con-
struction exigeait une enveloppe trés épaisse, représentant au moins 4/5 du
(2) bem tn fej ive 76 a SF
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poids total du projectile, nuisant a la pénétration dans les obstacles résis-
tants, diminuant le nombre des éclats et amortissant leur force vive.
Aujourd’hui Padhésion est obtenue par une espéce de soudure. On bu-
rine, avec une pointe d’acier et sur le tour, des sillons peu profonds dans
Fig. 2. — Obus de 5 de Reffye.
Fig. 4. — Obus de 138°,
Fig. 3. — Obus de 7 de Reffye.
les parties qui doivent recevoir 'emplombage; on chauffe au rouge sombre
et on décape ces parties au sel ammoniac; on plonge alors le projectile pen-
dant quelques instants dans un bain de zinc en fusion, puis dans un bain
formé par parties égales de zinc et d’étain. Cela fait, on place le projectile—6—
dans un moule et on y coule du plomb; celui-ci adhére fortement sur les
parties qui ont 66 écroutées et étamées, et sur les autres il s’enlave facile-
ment au tour, o¥ le projectile est reporté pour recevoir sa forme définitive.
Le forcement par chemise de plomb donne un bon centrage, méme avec
@assez larges tolérances dans les dimensions, parce que l'enveloppe se
moule bien dans les rayures et fournit au projectile une grande surface
@appui. Mais celte enveloppe est arrachée dans le tir aux fortes charges,
et ne satisferait pas aux exigences d’une artillerie puissante. D’ailleurs, on
ui faisait déja les reproches suivants :
4 Elle se déforme facilement, ce qui nécessite beaucoup de précautions
dans les transports (empaillage, caisses 4 un seul projectile, etc.), sous
peine de rencontrer un grand nombre de projectiles ne pouvant plus entrer
dans les canons;
2 L'emplombage des rayures, malgré tous les arlifices de graissage et
de nettoyage, altére bientdt la justesse du tir, et exige adoption d'instru-
ments spéciaux pour désemplomber;
8° L'enveloppe de plomb n'est guére compatible avec la rayure pro-
gressive;
4 Elle augmente la résistance de l'air par ses bourrelets saillants et par
les sillons que les cloisons y ont creusés; de plus, ainsi qu’il a déja été dit,
elle nuit aux effets d’éclatement et de pénétration;
5° Enfin la pose de I'enveloppe ne pouvant se faire qu’é chaud, cette opé-
ration peut altérer la structure moléculaire dans les projectiles en acier ou
en fonte dure. (Voir plus loin, chap. 8, 2 I.)
§ 8. — CORDONS ET CEINTURES
Avec les canons en acier, on a pu supprimer tous ces inconvénients en
remplagant le plomb par un métal plus résistant. Partout on s'est arrété au
cuivre rouge, que recommandent sa ténacité, huit fois plus grande que celle
du plomb, et son homogénéité, qui fait qu’il est entaillé et usé réguliérement
par les cloisons.
En Autriche et en Italie, on 'emploie sous forme de cordons, au nombre
de quatre. Chacun d’eux est formé d’un fil enroulé solidement dans une
rainure plus large au fond que sur les bords, puis soudé. Le glissement
du cordon dans la rainure est empéché par un ergot qui s’engage dans une
petite cavité inénagée au fond de celle-ci.{(Voir fig. 5.)