Vous êtes sur la page 1sur 136

ASPECTS JURIDIQUES

D’UNE OPERATION DE
FUSION
PREALABLES A LA FUSION
1. Rapprochement
2. Protocole d’accord
Une fois l’étape du rapprochement
franchie, de véritables négociations
sont entamées.
C’est à ce stade que l’on évoque la
possibilité d’une fusion, la parité
d’échange, les incidences sociales, le
sort des dirigeants, la date de
l’opération.
Toutefois, un protocole
d’accord n’équivaut pas à un
projet de fusion et un
désistement relatif à
l’opération projetée reste
possible.
3. La fusion à l’essai
Cette double étape du
rapprochement et du
protocole est tantôt abrégée,
tantôt allongée.
Elle est abrégée lorsque la
fusion concerne les sociétés
d’un même groupe.
Elle peut être aussi allongée
lorsque l’absorbante souhaite
en savoir plus sur l’absorbée
PREPARATION A LA
FUSION
1. Conditions financières
de la fusion
1.1. Evaluation des
sociétés fusionnantes
La loi ne réglemente pas les
modalités de détermination des
conditions financières de
l’opération
mais exige que les méthodes
d’évaluation qui seront retenues
par les dirigeants et dont les
explications figureront dans le
rapport du conseil d’administration,
du directoire ou du (ou des)
gérant(s) soient justifiées.
La détermination des conditions
financières suppose en pratique le
respect des méthodes
traditionnelles pour l’évaluation des
biens apportés à leur valeur vénale
ainsi que l’évaluation des titres à
attribuer en rémunération des
apports.
1.2. Détermination de la
parité d’échange
Il constitue la base financière
sur laquelle l’opération
sera réalisée.
Pour déterminer la parité d’échange,
la valeur globale des sociétés est
divisée par le nombre d’actions ou
de parts composant leur capital
respectif de telle sorte que soit
déterminée une valeur unitaire de
chaque titre.
La société A au capital de
4.200.000 DH divisé en 16.800
actions de 250 DH a absorbé la
société B au capital de
1.400.000 DH divisé en
14.000 actions de 100 DH.
Par hypothèse, les différentes
estimations ont abouti au résultat
suivant :
Valeur de l’action de la société

« A » : 600 DH
« B » : 120 DH
Le rapport théorique d’échange
est de : 600/120 = 5/1 soit 5
actions de la société « B » pour
1 action de la société « A ».
La société « A » devra créer
14.000 actions : 5 = 2.800
actions nouvelles.
1.3. Création d’un compte
« prime de fusion »
Chaque fois que la valeur réelle des
actions ou parts de la société absorbante
excède leur montant nominal, la
différence entre la valeur des biens reçus
en apport et le montant de
l’augmentation du capital de la société
absorbante doivent être portés au passif
du bilan au compte "Prime de Fusion".
En reprenant l’exemple ci-
dessus, la société « A » qui
doit créer 2.800 actions
nouvelles à la valeur nominale
de 250 DH, ceci conduit à :
*une augmentation du capital de :
250 DH x 2.800 actions
nouvelles = 700.000 DH
*la valeur d’apport de la société
« B » est de :
120 DH x 14.000 actions =
1.680.000 DH
La prime de fusion est de :
1.680.000 - 700.000 =
980.000 DH
1.4. Existence de
participations entre les
sociétés fusionnantes
1.4.1. Cas où la société
absorbante détient une
participation dans la société
absorbée
Dans ce cas la société
absorbante a une double
qualité :
d’une part, elle reçoit l’apport
de la société absorbée, apport
qu’elle doit rémunérer par une
attribution de parts ou d’actions
nouvelles;
mais d’autre part, en tant que
membre de la société
absorbée, elle a vocation à
recevoir une fraction des parts
ou actions nouvelles qu’elle
doit émettre.
Deux hypothèses peuvent
alors être envisagées :
a) Fusion- renonciation
La société absorbante se borne à
créer des droits sociaux
nécessaires à la rémunération
des associés de la société
absorbée autres qu’elle même.
Ce procédé est dit "fusion
renonciation", car la société
absorbante renonce à émettre
des actions ou des parts qui
devraient lui revenir.
La plus-value nette
correspondant à la participation
de la société absorbante dans la
société absorbée constitue alors
une prime de fusion
complémentaire.
Partant de l’exemple précité, on
considère par hypothèse que la
société « A » détient 4000
actions de la société « B ».
dans ce cas, les nouvelles actions
que la société absorbante émettra
seront de l’ordre de :
(14.000 actions – 4.000
actions) : 5 = 2.000 actions
* soit une augmentation de
capital de :
250 DH x 2.000 actions =
500.000 DH
* la prime de fusion s’élevant à :
(120 DH x 10.000 actions) –
500.000 DH = 700.000 DH
Le montant de 700.000 DH
représente la différence entre le
valeur réelle de l’apport et la
valeur nominale de
l’augmentation de capital.
La prime de fusion complémentaire
correspondant à la participation de
la société absorbante dans la
société absorbée s’élève à :
(120 DH x 4.000 actions) –
(100 DH x 4.000 actions) =
80.000 DH
La somme de 80.000 DH
correspond à la valeur pour
laquelle les actions de la
société « B » (absorbée)
figurait à l’actif de la société
« A » (absorbante).
b) Fusion allotissement
Dans le cas où la société
absorbante détient une
participation dans la société
absorbée, les deux parties
pourraient aussi convenir du
système suivant :
attribution à la société
absorbante de la fraction du
patrimoine de l’absorbée qui
correspond aux droits de
l’absorbante, le surplus seul
faisant l’objet d’un véritable
apport-fusion.
1.4.2. Cas où la société
absorbée détient une
participation dans la société
absorbante :
Soit une société « A » absorbante au
capital de 4.000.000 DH divisé
en 40.000 actions de 100 DH dont la
valeur réelle est de 200 DH et une
société « B » au capital de 2.000.000
DH divisé en 10.000 actions de 200
DH valant 400 DH.
Dans le portefeuille de la
société « B » figurent 4.000
actions de la société « A »
évaluées à 800.000 DH.
Le rapport d’échange est le
suivant :
2/1 soit 2 actions « A »
pour 1 action « B ».
La société « A » va donc créer
10.000 actions x 2 = 20.000 actions
nouvelles qui seront attribuées aux
actionnaires de la société « B » dans
une augmentation de capital de :
100 DH x 20.000 = 2.000.000
DH
La prime de fusion s’élève à :
(200 DH x 20.000 actions) –
(100 DH x 20.000 actions) =
2.000.000 DH
Mais comme la société « A » ne
peut pas détenir ses propres
actions, elle doit supprimer de
son actif les 4.000 actions « A »
qui lui ont été apportées par la
société « B » pour une valeur de
800.000 DH.
A cet effet, elle réduit immédiatement
son capital de 100 DH x 4.000 actions
= 400.000 DH, soit la valeur nominale
et impute sur la prime de fusion la
différence entre la valeur d’apport et la
valeur nominale des actions annulées,
soit : 800.000 DH – 400.000 DH =
400.000 DH
En définitive le capital social
est seulement augmenté de :
2.000.000 DH – 400.000
DH = 1.600.000 DH
La prime de fusion s’élève à :
2.000.000 DH – 400.000
DH = 1.600.000 DH
1.4.3. Cas où les sociétés
absorbées et absorbantes
détiennent des
participations
réciproques
Dans ce cas, on applique
cumulativement les procédés
indiqués ci-dessus ; c’est-à-dire
une fusion renonciation et une
réduction de capital pour éviter que
la société absorbante ne devienne
propriétaire de ses propres actions.
2. Le projet de fusion
2.1. Etablissement du
projet de fusion
Avant toute formalité, il appartient
au conseil d’administration, ou au
directoire ou au(x) gérant(s) de
chacune des sociétés participant à
l’opération envisagée d’arrêter le
projet de fusion.
2.2. Contenu du projet de
fusion
Le projet de fusion doit
contenir les indications
suivantes :
1. La forme, la dénomination
ou la raison sociale et le siège
social de toutes les sociétés
participantes à l’opération.
2. Les motifs, buts et
conditions de la fusion.
3. La désignation et
l’évaluation de l’actif et du
passif dont la transmission
aux sociétés absorbantes ou
nouvelles est prévue.
4. Les modalités de remise des parts
ou actions et la date à partir de
laquelle ces parts ou actions donnent
droit aux bénéfices ainsi que toute
modalité particulière relative à ce
droit.
5. Les dates auxquelles ont
été arrêtés les comptes des
sociétés intéressées utilisés
pour établir les conditions de
l’opération.
6. Le rapport d’échange
des droits, et le cas échéant,
le montant de la soulte.
7. Le montant prévu de la
prime de fusion.
8. Les droits accordés aux
associés ayant des droits
spéciaux et aux porteurs de
titres autres que des actions
et, le cas échéant, tous
avantages particuliers.
2.3. Publicité du projet de
fusion
Une fois établi et signé, le
projet de fusion doit être
déposé au greffe du Tribunal
du lieu du siège des
différentes sociétés participant
à la fusion.
Le projet de fusion fait
également l’objet d’un avis
inséré dans un journal
d’annonces légales, par
chacune des sociétés
participant à l’opération.
Si une au moins de ces
sociétés fait publiquement
appel à l’épargne, un avis
doit être inséré au Bulletin
Officiel
2.4. Délais
Le dépôt au greffe et la
publicité doivent avoir lieu au
moins trente jours avant la
date de la première assemblée
générale extraordinaire
appelée à statuer sur
l’opération.
EXECUTION DE LA FUSION
1. Intervention du
commissaire aux comptes
Les commissaires aux comptes
doivent avoir communication
du projet de fusion au
moins 45 jours avant la date
de l’assemblée générale
appelée à se prononcer sur ledit
projet.
En outre, ils peuvent obtenir
auprès de chaque société
communication de tous les
documents utiles et procéder
à toutes vérifications
nécessaires.
Si la loi rend obligatoire l’intervention des
commissaires aux comptes, elle reste
incomplète sur la désignation des
commissaires aux comptes dont elle ne
précise pas s’il s’agit de tous les
commissaires aux comptes des sociétés
fusionnées ou s’il s’agit des commissaires
aux comptes nommés spécifiquement à
l’occasion de la fusion, à l’instar des
commissaires à la fusion français.
En revanche, la loi définit la
mission du commissaire aux
comptes à l'occasion de
l'exécution de la fusion
comme suit :
* vérification que les valeurs
relatives attribuées aux
actions des sociétés
participant à l’opération sont
pertinentes et que le rapport
d’échange est équitable ;
* vérification notamment si le
montant de l’actif net apporté
par les sociétés absorbées est au
moins égal au montant de
l’augmentation de capital de la
société absorbante ou au montant
du capital de la société nouvelle
issue de la fusion.
Ces vérifications doivent être ensuite
portée dans un rapport qui indique la
ou les méthodes suivies pour la
détermination du rapport d’échange
proposé, si elles sont adéquates en
l’espèce, et les difficultés particulières
à l’évaluation s’il en existe.
Par ailleurs, l’assemblée générale
extraordinaire de la société
absorbante statue sur
l’approbation des apports en
nature sur la base, en principe,
d'un rapport spécial établi par
le commissaire aux comptes.
2. Rapport du conseil
d’administration
Le conseil d’administration, ou le
directoire de chacune des
sociétés établit un rapport
écrit qui est mis à la
disposition des actionnaires.
3. Information des
actionnaires
Toute société anonyme participant à
une opération de fusion doit mettre à
la disposition des actionnaires au
siège social, trente jours au moins
avant la date de l’assemblée générale
appelée à se prononcer sur le projet,
les documents suivants :
1. Le projet de fusion ;
2. Les rapports du conseil
d'administration (ou du
directoire) et du commissaire
aux comptes ;
3. Les états de synthèses
approuvés ainsi que les
rapports de gestion des trois
derniers exercices des sociétés
participant à l’opération ;
4. Un état comptable, établi selon les
mêmes méthodes et la même
présentation que le dernier bilan annuel,
arrêté à une date qui, si les derniers états
de synthèse se rapportent à un exercice
dont la fin est antérieure de plus de six
mois à la date du projet de fusion, doit
être antérieure de moins de trois mois à
la date de ce projet.
4. Tenue des assemblées
générales extraordinaires
La fusion est décidée par
chacune des sociétés
intéressées, dans les conditions
requises pour la modification
des statuts.
La règle est logique : pour
l’une l’absorbée, la fusion
emporte dissolution, pour
l’autre, l’absorbante, le capital
de la société est augmenté.
5. Publicités
Les deux sociétés en cause doivent-
elles procéder à des inscriptions
modificatives afin d’informer les
tiers, pour l’une de sa dissolution et
pour l’autre de son augmentation de
capital.
Faute d’inscription
modificative, la fusion est
inopposable aux tiers.
EFFETS DE LA FUSION
1. Date d’effet de la fusion
1.1. Principe
Le principe s’exprime
différemment selon que l’on
s’adresse aux associés ou aux
tiers.
a) Pour les associés, ceux de
l’absorbante comme ceux de
l’absorbée, la date de la fusion
est celle de la dernière des
assemblées ayant approuvé la
fusion.
b) Pour les tiers, les créanciers
de la société absorbée
notamment, la date de la
fusion est celle des
inscriptions modificatives au
registre de commerce.
4.2. Clause de rétroactivité
On entend par « clause de rétroactivité
» la stipulation par laquelle les parties à
la fusion entendent reporter les effets
de celle-ci à une date antérieure à celle
de son approbation, par exemple à la
date d’arrêté des comptes sur le
fondement desquels les évaluations ont
eu lieu.
2. Effets à l’égard des
associés
La fusion entraîne l’acquisition,
par les associés des sociétés qui
disparaissent, de la qualité
d’associés des sociétés
bénéficiaires dans les conditions
déterminées par la contrat de
fusion.
3. Effets à l’égard des
dirigeants
La société absorbée étant
dissoute, ses dirigeants
perdent ipso facto cette
qualité.
4. Effets à l’égard des
créanciers
Un fois l’opération de fusion
réalisée la situation financière
de l’absorbante change : ses
actifs augmentent, mais son
passif aussi, d’où l’inquiétude
éventuelle de ses créanciers.
4.1. Principe de la
transmission universelle
du patrimoine
La fusion opère transmission
universelle du patrimoine de la
société absorbée à la société
absorbante.
Dès l’instant de la fusion, les
créanciers de l’absorbée ont
un autre débiteur : la société
absorbante.
4.2. Application du
principe
4.2.1. Pour les créanciers non
obligataires
L’opposition formée par un
créancier n’a pas pour effet
d’interdire la poursuite des
opérations.
Lorsqu’il estime l’opposition
fondée, le Tribunal ordonne
soit :
* le remboursement de la
créance soit,
* la constitution de garanties au
profit du créancier par la société
absorbante si elle en offre et si
elles sont jugées suffisantes.
4.2.2. Pour les créanciers
obligataires
a) Cas des obligations de la
société absorbée
La société absorbée qui a émis
un emprunt obligataire peut
décider de :
· soumettre le projet de fusion
à l’assemblée générale des
obligataires ;
· ne pas consulter les
obligataires mais leur proposer
de les rembourser (article 236).
b) Obligataires de la société
absorbante
Il n’est pas obligatoire de
soumettre le projet de fusion
aux assemblées d’obligataires
de la société absorbante
(article 238).
4.2.3. Pour les bailleurs
Pour les bailleurs de la société
absorbante, rien ne change
puisque l’absorbante ne
disparaissant pas, c’est
toujours le même locataire qui
occupe les locaux.
Quant au bailleur de la société
absorbée, il ne peut que
constater la transmission du bail
au bénéfice de l’absorbante.
4.2.4. Pour les salariés
Individuellement, et comme
en cas de transformation, les
salariés ne sont pas affectés
par la fusion ;
Cela n’interdit pas à la société
absorbante de procéder
ultérieurement aux compressions
d’effectif jugées nécessaires du
fait de la fusion. Elle supporte
alors la charge des indemnités à
allouer aux salariés.

Vous aimerez peut-être aussi