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Théorie d’actes du langage

• Avant de passer à l’analyse conversationnelle, on


va s’arrêter sur la théorie d’actes de langage
Théorie d’acte de langage

Nous sommes avec ces théories des actes du langage dans un courant
productif et vif encore aujourd'hui qui est le courant de pragmatique
linguistique.

La pragmatique linguistique émerge dans le milieu des années 1950
dans les travaux de John Austin (1911-1960). La spécificité de ce
courant pragmatique parmi les autres courants linguistiques c'est
l'idée de contester, et Austin a été le premier, dans une série de
conférences entamées en 1955, publiées à titre posthume en 1962
(traduit en 1970 et publié sous le nom «Quand dire c'est faire.»). Dans
ses conférences, Austin remet en question, il conteste même l'idée
que le langage ne ferait que décrire la réalité, décrire le monde, ou,
comme le dise les théories de la communication, que le langage ne
ferait que transmettre, véhiculer des messages.
L'idée forte et l'idée de base de la pragmatique, et tous les travaux se
réclamant de ce courant, est de présenter les dimensions proprement
actionnelles: le langage ne fait pas que dire les choses à propos du
monde, mais il agit sur le monde et sur nous-mêmes. Donc le langage
c'est aussi de l'action.

C'est dans ce cadre-là, dans le cadre d'une prise de position générale qu'à
eu lieu cette extension de l'idée de contexte de production au contexte
social de production des énoncés. Dans la théorie de Benveniste, c'est
quand même centré sur le contexte physique. Dans le cadre de la
pragmatique, on est plutôt et surtout sur des dimensions sociales ou
socio-actionnelles.
Ce que veulent dire «paramètres sociaux-actionnel » est qu'il n'y a pas
seulement un espace-temps physique de production langagière, mais
aussi et pratiquement toujours un lieu sociale. C'est-à-dire que les
énoncés sont prononcés dans une certaine institution sociale: dans
certains cadres nous pourrons effectuer certaines choses, certains
énoncés auront de l'importance et provoqueront une transformation,
tandis que dans d'autres, ces mêmes énoncés n'auront aucun effet. Ce
qu'il faut comprendre est que nous ne sommes pas seulement dans des
paramètres à caractère physique, mais nous sommes aussi toujours pris
dans un contexte qui présente des dimensions sociales ou socio-
actionnelles.
De même, si chaque production langagière ou tout est
énoncé, où tout présuppose la présence d'une instance
en chair et en os (mais qui parfois peuvent être des
machines), nous sommes toujours en présence d'une
personne physique, mais ces personnes sont dans une
posture d'énonciateur avec un rôle, une fonction au
moment de la production de l'énoncé. La nécessité de
faire la distinction entre émetteur et énonciateur est que
l'émetteur (le point de vue physique) est une instance
relativement fixe, il ne change en général pas, tandis
que l'énonciateur (dimension socio-actionnelle) change.

C'est la même chose pour les récepteurs/destinataires.

Les paramètres physiques sont stables, les paramètres


sociaux dynamiques changent.
I. Les énoncés constatifs et les énoncés performatifs
C'est dans ce cadre pragmatique que ces paramètres vont être pris en
considération, et une manière de les prendre en considération est dans le
cadre de la distinction, introduite par Austin, entre énoncé constatif et énoncé
performatif.

nous allons faire cette distinction. Elle nous permettra, par la suite, d'effectuer
la transition et introduire l'autocritique même d'Austin.

Austin introduit cette bi-partition comme suit: il y a deux types d'énoncés (qui
sont tous des énoncés de type affirmatif). Austin va dire qu'il y a des énoncés
qui disent des choses sur le monde (phrases 1 et 2 du tableau 2) et qui sont
évaluables en terme de vrai ou faux. Austin les appel des énoncés constatifs:
ils constatent des choses à propos de la réalité.
Tableau 2.

Exemples d'énoncés constatifs et performatifs.

Énoncés constatifs Énoncés performatifs

1. Le chat est sur le paillasson. 3. Je te baptise, au nom du père …

2. Le témoin a juré de dire la vérité. 4. Je vous déclare unis par le mariage.

7. Le prêtre a baptisé le jeune enfant. 5. Je jure de dire toute la vérité.

8. Je t'avais promis de venir. 6. Je te promets de venir demain.


Mais tous les énoncés ne font pas ça, mais par le
fait même de les proférer font quelque chose dans
le monde. Cette dimension actionnelle du langage
évoquée plus haut, ce qu'il appelle les énoncés
performatifs. Des énoncés ayant la caractéristique
de constituer des actes en eux-mêmes (tableau 2,
phrases 3, 4, etc): il y a un avant et un après dans
l'état du monde .
La différence entre constatif et performatif est d'une
part le fait que les énoncés performatifs ne peuvent
pas s'évaluer en terme de vrai ou faux, mais en terme
de succès ou échecs. On parle de condition de félicité:
est-ce que ça marche ou pas?
Alors pour que ces énoncés performatifs marchent, ils doivent remplir des conditions qui,
certaines d'entre elles, font intervenir le contexte social de production.il y a trois conditions
à caractère social pour qu'un énoncé performatif le soit, pour qu'il soit réussi (qu'il ne soit
pas un échec):
1. qu'on se trouve dans le lieu adéquat;
2. l'énonciateur doit être adéquat (il doit avoir le rôle adéquat requis par l'acte en
question);
3. la sincérité, c'est l'idée que ceux impliqués dans un acte le fassent véritablement (qu'ils
soient venus pour cela).

Chose essentielle à retenir: un énoncé n'est pas automatiquement performatif. Il l'est


uniquement si les conditions sont remplies, ou si certaines règles sociales sont respectées.

il y a trois conditions linguistiques quand nous regardons ces énoncés performatifs:


4. il faut qu'il y ait un pronom de première personne: je;
5. les verbes doivent être au présent de l'indicatif, et;
6. tous ces énoncés doivent contenir un verbe performatif (un verbe dont le sens est lié à
l'acte qui doit être produit).

Si ces conditions linguistiques ne sont pas remplis, l'énoncé perd son statut performatif et
redevient constatif.
II.L'autocritique des énoncés performatifs et
constatifs par Austin
Austin a lui-même fait l'autocritique de sa théorie où il remet en question
la bi-partition constatif/performatif. Ceci a donné lieu à une deuxième
phase. Pour se faire, regardons certains énoncés de plus près.
. Exemples de phrases.
 11. Je te promets de t'emmener au cinéma demain.
12. Je t'emmènerai au cinéma demain.
 13. Le chat est sur le paillasson.
 14. J'affirme que le chat est sur le paillasson.
15. Je t'emmènerai demain au cinéma.
 16. Je te promets que je t'emmènerai au cinéma demain.
 17. Ouvrez la fenêtre, Gaston!
 18. Auriez-vous l'amabilité d'ouvrir la fenêtre, cher ami?
 19. Si tu ouvres ce frigo, tu seras puni.
Si nous prenons les phrases 11 et 12, la première est un énoncé clairement
performatif: nous avons un verbe au présent qui est à caractère performatif, le fait
même de dire «je te promets» constitue l'acte de promettre. Par contre, la seconde
phrase (12), elle, n'a pas de verbe au présent, mais elle fonctionne aussi comme
promesse. La force est comparable à l'énoncé 11, bien qu'elle ne remplisse pas les
conditions performatives même si elle fonctionne en tant que tel.

Nous voyons donc que certains énoncés, même s'ils ne remplissent pas toutes les
conditions linguistiques des énoncés performatifs, fonctionnent en réalité en tant que
tel.

La phrase 13 est constative puisqu'on peut la questionner par vrai ou faux. Mais
devant n'importe quel énoncé constatif, nous pouvons mettre un «J'affirme», comme
dans la phrase 14 et nous avons toutes les conditions d'un énoncé performatif,
pourtant elle ne l'est pas.

Donc, si nous prenons en considération la réalité du langage, où comment les choses


fonctionnent dans les interactions entre les locuteurs, la question qui se pose est de
trouver la «frontière» entre constatif et performatif. Si d'un côté, un énoncé n'ayant
pas les caractéristiques d'un performatif peut en réalité fonctionner en tant que tel et si
de l'autre, un énoncé ayant toutes les caractéristiques d'un constatif peut se
transformer en performatif par la simple adjonction d'un «J'affirme que».

C'est une problématisation, ou une manière de réfléchir qu'Austin lui-même a introduit


en se disant que tout énoncé peut avoir une dimension performative même si elle n'est
pas toujours explicite.
Par exemple un énoncé comme celui de la phrase 15 a une dimension performative ou
actionnelle qui est implicite.
À partir de là, Austin va dire que le problème doit être posé autrement: il n'y a pas
deux sortes de catégories d'énoncés. Par contre, dans tout énoncé, dans n'importe
quel énoncé, il y a une dimension constative et une dimension performative. N'importe
quel énoncé présente ces deux dimensions. Il ne s'agit plus de faire des catégories
d'énoncés (constatif/performatif), mais de dire que tout énoncé présente un peu des
deux dimensions. Cette idée selon laquelle tout énoncé présente à la fois les deux
dimensions, va donner naissance à un triptyque de notions:
la dimension locutoire;
la dimension illocutoire;
la dimension perlocutoire.
Ces trois termes ont été forgés par Austin. Il a commencé à les conceptualiser, mais il
est décédé et le flambeau a été repris par disciple et successeur John Searle, qui a
surtout travaillé la dimension illocutoire. Ce qu'on appelle la théorie des actes du
langage proprement dit et qui mobilisent ces trois notions, sont le produit des travaux
conjugués d'Austin et Searle.
Ce que nous allons voir une synthèse des deux. L'idée va être de comprendre ce que
sont ces dimensions d'énoncés.
Ce qu'il faut bien comprendre, est que ce ne sont pas trois catégories de phrases ou
d'énoncés, mais trois dimensions, trois couches, trois strates de tout énoncé. Nous
pourrions même parler de trois angles d'attaque.
1.La dimension locutoire
La dimension locutoire d'un énoncé désigne les caractéristiques objectives d'un énoncé. C'est-à-dire ses
caractéristiques morphosyntaxiques: prendre les caractéristiques de l'énoncé en tant que phrase.
Si nous prenons l'exemple 15 , l'énoncé du point de vue locutoire signifie que ce qu'il faut faire est:
de dégager ses caractéristiques morphosyntaxiques;

c'est une phrase simple, avec un pronom sujet à la première personne, un verbe au futur, un adverbe
déictique, etc.

La dimension locutoire est de décrire très objectivement les caractéristiques morphosyntaxiques de la
phrase de l'énoncé. d'en dégager le sens littéral.
Si nous prenons maintenant l'exemple 16:
les caractéristiques morphosyntaxiques de la phrase

phrase dérivée complexe, avec une subordination complétive;

du point de vue du sens littéral c'est le fait que "quelqu'un promet quelque chose à quelqu'un
d'autre".

Si nous prenons la phrase 17, c'est une dérivée simple de type impératif.

Si nous prenons la parse 18, c'est une dérivée simple de type interrogatif. Mais attention, au sens littéral
la phrase tente de mesurer le degré d'amabilité que l'ami possède...

La dimension locutoire sont les caractéristiques les plus objectives, les plus simples à dégager de tout
énoncé.
2.La dimension illocutoire
• La dimension illocutoire désigne ce qu'on appelle la valeur d'acte de l'énoncé. Par exemple, les
énoncés 15 et 16 constituent des promesses. Donc leur valeur en tant qu'acte humain est la
valeur de promesse.
Exemple d’énoncés avec leurs valeurs illocutoires:
• Je te promets de t'emmener au cinéma demain. Promesse
• Je t'emmènerai au cinéma demain. promesse
• Le chat est sur le paillasson. Promesse
• J'affirme que le chat est sur le paillasson. Affirmation
• Je t'emmènerai demain au cinéma. Promesse
• Je te promets que je t'emmènerai au cinéma demain. Promesse
• Ouvrez la fenêtre, Gaston! Ordre
• Auriez-vous l'amabilité d'ouvrir la fenêtre, cher ami? Demande
• mais si on change de cadre, à l'armée par exemple, ça pourrait être
un ordre
• Si tu ouvres ce frigo, tu seras puni. menace, mais, selon le contexte, pourrait être
une promesse...
Cette dimension illocutoire, qui se trouve dans tout énoncé, à trait à ce que
3.La dimension perlocutoire

Elle concerne l'effet de l'acte. C'est-à-dire: est-ce que la promesse de l'énoncé 15 a été tenue ou pas.
Est-ce que la fenêtre a été ouverte par Gaston ou pas (phrase 17). L'acte d'ordre ou de demande a
marché ou non.

Dans l'exemple de la phrase 17, selon la situation, il n'y aura pas d'acte. En effet, quelqu'un peut mal
prendre ce genre d'énoncé.

De toute manière, il y a lieu de considérer ce troisième niveau qui est de demander si la valeur d'acte
a produit ou non un effet et quel est l'effet produit.

Ces trois caractéristiques se trouvent, d'une certaine manière, empilées dans tout énoncé.

Ceci clos la question des actes de langage et nous permet de nous dirriger sur la théorie de l’implicite

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