faut apporter à la connaissance a priori de cette œuvre Observations générales L’Iliade, comme un certain nombre d’œuvres antiques (et fondatrices de la culture occidentale), est souvent réduite à quelques connaissances trop générales, dues à une approche superficielle ou victime de représentations infidèles (comme au cinéma), de réécritures littéraires tronquées, ou de récits et reprises trop schématiques. L’œuvre est autrement plus riche, complexe et porteuse d’enseignements divers Ce que l’on connaît de L’Iliade
1- Œuvre d'Homère Homère (en grec ancien Hómêros, « aveugle ») est réputé avoir été un aède de la fin du VIIIème siècle av. J- C.
Aède (en grec ancien aoidós, du verbe áidô,
« chanter ») est, en Grèce antique, un artiste qui chante des épopées en s'accompagnant d'un instrument de musique, la phorminx, qui ressemble à la cithare Phorminx (instrument à corde ancêtre de la lyre) Ce que l’on connaît de L’Iliade (suite)
2- que ce long poème chante les exploits de la Guerre
de Troie, et que cette guerre, qui dura dix ans, mit aux prises les Grecs et les Troyens, à cause d' Hélène, car cette femme, la plus belle du monde, avait abandonné Sparte et son mari le roi Ménélas, pour suivre à Troie le séduisant prince Pâris (Cf. le mythe originel : le concours de beauté entre Héra, Athéna et Aphrodite, lors des noces de Pélée et Thétis) Ce que l’on connaît de L’Iliade (suite)
3- que dans cette lutte, les dieux prennent parti
et combattent. Ainsi, Athéna, déesse de la sagesse, assiste les Grecs, compatriotes de son protégé, Ulysse, mais l'arbitrage est réservé à Zeus, le roi des dieux 4- que les deux héros de cette épopée sont le bouillant Achille du côté grec, et le sage Hector du côté troyen. Choses à nuancer dans l’appréhension de L’Iliade 1- Homère n'a peut-être jamais existé La question, qui soulève des polémiques depuis la fin du XVII° siècle, et que nous n'essaierons pas de trancher, nous donne simplement l'occasion de rappeler que l'Iliade fut longtemps récitée ou chantée par des artistes itinérants (les aèdes), avant d'être mise en ordre et transcrite, sous l'autorité du tyran athénien Pisistrate, au VIème siècle avant J-C. Elle avait commencé à circuler dans le monde grec aux alentours du Xème siècle, et les faits qu'elle relate en les interprétant (la destruction de le ville de Troie) s'étaient produits plus de deux siècles auparavant (vers le XIIIème siècle av. J-C.). Choses à nuancer dans l’appréhension de L’Iliade (Suite) 2- l'Iliade ne raconte pas la guerre de Troie et, malgré les apparences, ici, ce sont les femmes qui tirent les ficelles ou motivent les hommes. Par ailleurs, Hélène n'est pas une femme égoïste, ni Ménélas un mari ridicule. 3- Zeus domine rarement la situation, et sa fille Athéna ne mérite guère son titre de déesse de la sagesse. Choses à nuancer dans l’appréhension de L’Iliade (Suite) 4- Achille passe le plus clair de son temps sous sa tente, tandis que d'autres guerriers se dépensent beaucoup plus que lui. Enfin, Hector n'est pas toujours un modèle d'humanité.
S’il est un thème central qu’il faut étudier avec
attention, dans L’Iliade, c’est celui de l'héroïsme, associée à la notion de valeur, de gloire (Timè en grec). I- Sujet de L’Iliade Que raconte L’Iliade ? Nous sommes à la fin de la neuvième année du siège. Les deux camps sont usés par cette attente interminable, la plupart des guerriers rêvent d'une solution qui ramènerait les uns dans leur patrie, et qui libèrerait les autres d'une présence menaçante et contraignante dans leur propre pays. Sujet de L’Iliade Les Grecs, présents en grands nombre (Homère dénombre plus de mille vaisseaux achéens, amenant chacun une cinquantaine d'hommes, ce qui aurait déposé au moins cinquante mille hommes sur le rivage troyen) assurent leur approvisionnement par des opérations de piraterie sur toute la côte. C'est une chose tout à fait courante dans le monde mycénien. On se pourvoit ainsi en matériel, mais aussi en esclaves, les plus jeunes, pour le plaisir, telles Chryséis (fille d’un prêtre du temple d’Apollon, razzié par les Grecs) et Briséis (reine d’une cité attaquée par les Achéens); les autres, pour le travail ménager. Sujet de L’Iliade Une discorde naîtra entre Agamemnon et Achille, autour du droit au butin constitué de femmes esclaves (Briséis, notamment). Mais il faut rappeler la situation d’avant : le courroux d’Apollon qui s’est abattu sur le camp des Grecs, punis parce qu’ils ont profané le temple du dieu solaire et enlevé la fille du prêtre d’Apollon, Crhysès, captive d’Agamemnon. Ce dernier refuse de rendre sa fille à Chrysès, venu supplier le roi de lui rendre sa fille. Une délégation de rois Grecs tentera de raisonner Agamemnon, qui s’accroche à son droit, et à son butin. Sujet de L’Iliade Lorsqu’Achille interviendra pour le raisonner à son tour, Agamemnon décide de céder, mais à une condition : qu’Achille lui cède sa captive, Briséis, dont il est tombé amoureux. Ce sera la naissance la cause d'une terrible rancune entre les deux rois, qui menace de dégénérer en conflit meurtrier. Cette brouille entre les deux chefs active et concentre toutes les rancœurs accumulées entre les hommes et entre les dieux. L’Iliade débute ainsi sur ces faits : • Achille, offensé par Agamemnon, jure de le lui faire payer cher. Il décide de se retirer du combat, sachant pertinemment que sa non- participation aux hostilités équivaut à une défaite certaine des Achéens face aux Troyens, que dirige le redoutable Hector, désigné comme le « fléau des Grecs » Sujet de L’Iliade C’est sur ces entrefaites que débute donc L’Iliade (Lire chant I, traduction de Paul Mazon)
La suite se déroule selon le schéma suivant :
Mort de Patrocle, tué par Hector, qui le prend pour Achille. Ce dernier, pour venger son ami, s’engage dans le combat, et tue Hector en combat singulier, mais décide d’offenser sa dépouille. Priam, le père éploré, se rend en cachette dans le camp Grec, et se présente en suppliant auprès d’Achille qui, le prenant en pitié, lui rend la dépouille de son fils. C’est la fin de L’Iliade. II- Le Héros Antique (ou Homérique) Le mot « héros » est apparu pour la première fois dans les récits d'Homère bien que la notion existe depuis les premières civilisations qui ont peuplé le monde. Le héros est un personnage réel ou fictif, qui se distingue par des qualités ou des actions exceptionnelles. Il est le plus souvent, dans l'antiquité, un demi-dieu ou un homme divinisé qui se démarque par ses valeurs, et la force de ses convictions. Définition lexicale : héros : • 1361; lat. heros, du gr. Hêrôs 1 Mythol. antiq. demi-dieu. Nom donné, dans Homère, aux hommes d'un courage et d'un mérite supérieur, favoris particuliers des dieux, et dans Hésiode à ceux qu'on disait fils d'un dieu et d'une mortelle ou d'une déesse et d'un mortel. — Il fallait, chez les Grecs, être mort pour être reconnu héros, c’est-à-dire objet d’un culte (le mot héros , qui désigne un mort détenteur d’un potentiel vital exceptionnel, est d’origine crétoise). Le terme "héros" s'applique à des êtres demi-légendaires, appartenant à un lointain passé, mais considérés comme supérieurs et objets, à l'instar des dieux, d'un culte spécial. 2 Fig. Ceux qui se distinguent par une valeur extraordinaire ou des succès éclatants à la guerre. — "Il semble que le héros est d'un seul métier, qui est celui de la guerre, et que le grand homme est de tous les métiers, ou de la robe, ou de l'épée, ou du cabinet, ou de la cour " (La Bruyère). 3 Tout homme qui se distingue par la force du caractère, la grandeur d'âme, une haute vertu. — "On peut être héros sans ravager la terre." (Boileau). Le héros antique Dans l'antiquité grecque, le héros est fruit d'une exagération. Il connaît des vertus qui lui font dépasser le commun des mortels. Le héros épique, souvent descendant d'une lignée divine ou aristocratique, est avant tout un guerrier ou un aventurier dont les prouesses lui confèrent une grande renommée. Il est, comme Achille ou Hercule, promis à une mort précoce. Des forces extérieures le menacent au cours de son périple, dont il peut triompher et ressortir plus fort encore. Le héros antique Le Héros grec de l'antiquité érige en modèle le guerrier qui devient l'image idéale de l'homme. Le Héros constitue donc un excellent miroir de la société grecque car il reflète un idéal militaire par la force et la vaillance et un idéal politique puisqu'il possède généralement un lien avec le pouvoir (fils, neveu... du dirigeant), ou bien il est lui même le dirigeant de la cité. Le héros antique Néanmoins, les héros à l'instar des hommes sont soumis aux pouvoirs divins. Le héros sera victime de l'humeur des dieux, tantôt bienfaisante, tantôt malfaisante, comme l'est, par exemple, Ulysse, maudit par Poséidon, et aidé par Athéna. Face aux interventions divines, le Héros peut dépasser sa condition humaine pour s'élever au rang de surhomme et devenir un élu des dieux (Hercule). Les héros exercent sur les hommes et sur les événements une influence quasi divine. Le héros antique Dès le VIIIème siècle av. J- C., le culte des héros se développe, et des temples leurs sont dédiés, appelés Hérôon. Le héros antique Le culte voué aux héros inclut souvent les mêmes rites, les mêmes cérémonies et les mêmes célébrations que le culte voué aux divinités. En effet, ils sont comme les dieux et déesses, invoqués et cités dans les prières. Le développement de ce culte coïncide avec la généralisation des poèmes homériques, vantant les vertus de ces héros. Les héros sont donc dans l'antiquité des icônes importantes, qui durent au-delà de leur mort grâce au culte qui leur est rendu. Ils sont le modèle de la cité entière. Le héros antique D’après Marthe Robert, écrivain et essayiste, les caractéristiques du héros homérique (selon le modèle achiléen) sont : • il est jeune, fort et rapide dans son domaine d'élection qui est l'action guerrière; • il est beau, car le domaine du paraître est aussi celui de la fonction guerrière : les kouroi sont les figurants obligés des célébrations, danses, festins et jeux. Cette apparence est aussi terrifiante : ceci explique la solennité avec laquelle Achille se prépare au combat (chant XIX), et cette fascination qu'il exerce par le flamboiement de son armure (XXII : p. 326, version PDF); Le héros antique • il est entraîné à toutes les formes de lutte, y compris les joutes oratoires puisque l'art de la dispute, plus que de la discussion, contraint et soumet l'adversaire aussi bien que des armes (ambassade de Nestor, XI). • il est en proie à l'hubris, cette démesure qui lui fait fuir les juste milieux et l'entraîne hors des limites communes, quitte à déroger aux règles éthiques : c'est la fureur guerrière (Achille au combat, XX), mais aussi la violence des passions (ainsi le chagrin d'Achille, XVIII). Le héros antique • il jouit de la faveur divine, ce qui explique qu'il soit aussi objet particulier de malédiction pour certains dieux (Achille favorisé par Athéna : XXII) • il est promis à une mort précoce : sa vocation est de tuer et d'être tué, sort accepté librement (ainsi Achille tue Hector en sachant qu'un oracle a associé sa propre mort à celle du Troyen). Mais que serait un héros vieillissant ? Cette mort, il importe surtout qu'elle soit belle en portant à son acmé le désir de gloire. Les paradoxes du héros antique Selon Pierre-Henri Simon dans Le domaine héroïque des lettres françaises (1963), le héros est défini dans ces termes : « Originellement et dans sa définition la plus stricte, le héros est un être fort, de naissance noble et quasi divine, et que son courage et la grandeur de ses actes élèvent au-dessus de la foule. A sa gauche – du côté du cœur, de l’amour, de la bonté – marche le grand homme, bienfaisant, béni par les peuples, couvert de décorations et de couronnes. A sa droite – du côté de la main qui tient l’épée ou le sceptre – avance le surhomme, hautain, solitaire, incommode et souvent haïssable. Leurs rapports ne sont pas toujours simples ; il arrive que leurs directions se recoupent et que leurs pas se mêlent ; il arrive aussi qu’ils se contredisent et se combattent ; mais ils ont en commun une vertu vitale, l’énergie, et une vertu morale, le goût de la grandeur ; ils sont actifs et courageux.» Les paradoxes du héros antique Le cas d’Achille : Dont nous avons déjà rappelé l’humeur mélancolique et le refus de combattre, ce qui l’inscrit d’entrée de jeu, et avant la lettre, dans la lignée des héros modernes, ou des antihéros romantiques. Balançant ainsi entre un chagrin rêveur (quand il pleure la perte de Brisèis et confie son âme à sa cithare) et une fureur noire (quand il venge la mort de Patrocle en tuant hector), il présente deux visages contradictoires, et pourtant complémentaires. Ces paradoxes se lisent déjà dans le jeu des titres et des significations. Rappelons que le sous-titre de L’Iliade est « La colère d’Achille ». Thème qui revient souvent dans l’œuvre, à travers des manifestations de fureur d’une rare brutalité. Pourtant, étymologiquement, Achille (du grec akhos) signifie « affliction », peine, grande tristesse. Cela étant, Achille éprouve de la peine autant qu’il en inflige : il est aussi le fléau de ses ennemis (cf. la peine qu’il inflige à Priam, et qu’il finira par partager avec lui à la fin de L’Iliade : Chant XXIV) Bref, l’héroïsme d’Achille doit tout autant aux pleurs qui rappellent qu’il appartient à la société des hommes, qu’à ses prouesses violentes. Il est constamment préoccupé par sa réputation d’être glorieux, qu’il veut honorer et rendre la plus éclatante possible, et surtout immortelle et qu’elle soit chantée par les générations futures ; en même temps, il dira après son regret d’avoir délaissé la vie tranquille et sans heurts d’un être humain normal, et avoir choisi une vie glorieuse, mais courte Dans L’Odyssée, Ulysse qui est descendu aux enfers pour retrouver son père Laërte et lui demander conseil, va rencontrer Achille. Ce dernier lui dira : "Ne cherche pas à m'adoucir la mort, ô noble Ulysse !/J'aimerais mieux être sur terre domestique d'un paysan,/fût-il sans patrimoine et presque sans ressources,/que de régner ici parmi ces ombres consumées…" (v. 488-491)
La Table d'émeraude: L'écrit fondateur de l'alchimie moderne par Hermès Trismégiste, suivi du commentaire qu'en fait Hortulain, célèbre alchimiste du XIVe siècle.