PLAN I. Neuropathies amyloïdes familiales II. Maladie de Fabry III. Neuropathies associées aux porphyries IV. Maladie de Tangier V. Neuropathies héréditaires d'origine mitochondriale VI. Maladie de Refsum
I. Neuropathies amyloïdes familiales (1) • Il s’agit de neuropathies axonales sévères en rapport avec la présence de dépôts de substance amyloïde dans le tissu nerveux, mais aussi dans de nombreux autres viscères, ce qui fait la gravité de cette maladie. • L’âge de début est variable ; il existe en particulier des formes tardives de diagnostic difficile.
I. Neuropathies amyloïdes familiales (2) • il s’agit presque toujours de dépôts de transthyrétine (TTR), protéine mutée qui est responsable de la formation d’amylose. • Cette neuropathie a d’abord été décrite au Portugal, puis a été reconnue dans le monde entier. • Lorsque le diagnostic clinique est suspecté, la confirmation se fait par la biologie moléculaire qui permet d’objectiver la mutation responsable; • dans des cas plus difficiles, comme les formes sporadiques et tardives, pour lesquelles le diagnostic n’a pas été initialement envisagé, la biopsie nerveuse peut objectiver les dépôts amyloïdes. • En plus des thérapeutiques symptomatiques contre les douleurs et les dysfonctions du système nerveux autonome, la transplantation hépatique est maintenant souvent réalisée pour stopper les dépôts de protéine TTR mutée 06/14/2021 NEUROPATHIES PERIPHERIQUES HEREDITAIRES 4 I. Neuropathies amyloïdes familiales (3) • les neuropathies amyloïdes familiales (NAF) regroupent trois types d’amyloses systémiques héréditaires à transmission autosomique dominante, liés à des mutations de la transthyrétine (TTR), de l’apolipoprotéine AI ou de la gelsoline. • Leur diagnostic repose sur la mise en évidence de dépôts amyloïdes sur une biopsie tissulaire combinée à la présence d’une mutation amyloïdogène spécifique. • Elles se caractérisent par une polyneuropathie sévère et évolutive associée à des troubles végétatifs. • En l’absence de diabète, le principal diagnostic différentiel est l’amylose AL.
I. Neuropathies amyloïdes familiales (4) • À côté des formes du sujet jeune survenant dans un contexte familial, les progrès de la génétique ont permis d’identifier des formes sporadiques à début tardif qui ne doivent plus être méconnues. • La transplantation hépatique est la première forme de traitement étiologique des NAF-TTR, mais elle est réservée à un nombre limité de patients. • L’arrivée de traitements oraux stabilisant la structure de la TTR offre à moyen terme un espoir de traitement non invasif des NAF-TTR. • Les NAF à apolipoprotéine AI sont exceptionnelles. • Les NAF à gelsoline, essentiellement diagnostiquées en Finlande, se caractérisent par une triade évocatrice associant dystrophie grillagée de la cornée, neuropathie crânienne et hyperlaxité cutanée. 06/14/2021 NEUROPATHIES PERIPHERIQUES HEREDITAIRES 6 Fragment de biopsie nerveuse du nerf musculocutané d’un patient présentant une polyneuropathie amyloïde. Immunomarquage par un anticorps antitransthyrétine de dépôts amyloïdes autour d’un capillaire endoneural
II. Maladie de Fabry (1) • La maladie de Fabry (MF) est une maladie lysosomale, de transmission liée au chromosome X, due à un déficit en alphagalactosidase A, enzyme responsable de la dégradation du globotriaosylcéramide (Gb3). • il s’agit cliniquement d’une polyneuropathie sensitive accompagnée de violentes douleurs survenant par accès, des acroparesthésies des pieds et des mains en rapport avec l’accumulation de céramide-trihexosides dans les neurones des ganglions rachidiens postérieurs et du système nerveux autonome. • Il existe par ailleurs des troubles ophtalmologiques, cardiaques, rénaux et parfois des accidents vasculaires cérébraux ischémiques
II. Maladie de Fabry (2) • L’accumulation progressive de Gb3 est à l’origine d’une vasculopathie systémique et de processus pro-fibrosants. • La maladie de Fabry est responsable de : • environ 1 % des mises en dialyse inexpliquées ; • environ 1 % des cardiomyopathies hypertrophiques (CMH) inexpliquées ; • environ 1 % des accidents vasculaires cérébraux ischémiques inexpliqués.
II. Maladie de Fabry (4) • Le spectre des atteintes dans la MF est très large et hautement variable selon les patient(e)s et la durée d’évolution de la maladie. • Une histoire familiale évocatrice doit faire penser à la MF chez un(e) patient(e), même s’il/elle ne présente pas un tableau clinique
II. Maladie de Fabry (6) • La prise en charge de la maladie de Fabry repose sur le traitement symptomatique des atteintes d’organe, sur l’enzymothérapie substitutive ou la molécule chaperon. • Un diagnostic précoce de cette maladie rare est indispensable pour optimiser l’efficacité des traitements.
III. Neuropathies associées aux porphyries (1) • Les porphyries regroupent des affections dues à des anomalies enzymatiques de la voie de la synthèse de l’hémoglobine. • Ces maladies sont caractérisées par l’accumulation et l’excrétion des porphyrines et de leurs précurseurs (acide delta-aminolévulinique et porphobilinogène). • Le décit enzymatique est incomplet et ne se manifeste que lorsque les besoins hépatiques en hème sont augmentés.
III. Neuropathies associées aux porphyries (2) • On distingue les porphyries acquises de porphyries héréditaires • Ces déficits résultent de mutations au niveau d’un gène, la transmission est la plus souvent autosomique dominante. • La majorité des porteurs restent asymptomatiques. • La porphyrie aigüe intermittente est la plus fréquente des porphyries héréditaires. • Les manifestations pathologiques sont neuropathiques, digestives et psychiatriques et peuvent être déclenchées par certains médicaments ou des circonstances particulières comme le stress, les épisodes infectieux,…
III. Neuropathies associées aux porphyries (3) Quand suspecter une porphyrie ? • Porphyrie hépatique : Devant une femme jeune (25- 35 ans dans 90% des cas) qui présente : Des douleurs abdominales très intenses avec un examen abdominal normal (clinique et radiologique) Des troubles neurovégétatifs et des troubles mentaux : sujet irritable, confus, dépressif déclenchés par des facteurs exogènes ou environnementaux Les urines du patient deviennent foncées après exposition à la lumière (10 à 30 MIN)
III. Neuropathies associées aux porphyries(5) • Sur le plan clinique, la neuropathie est de type axonal et se caractérise par une polyradiculonévrite aiguë douloureuse souvent associée à des signes d’atteinte du système nerveux autonome. • La connaissance de cette anomalie métabolique génétique doit conduire à une attitude préventive pour éviter la survenue des symptômes cliniques graves qui apparaissent par accès.
III. Neuropathies associées aux porphyries (6) Trois grands syndromes caractérisent les crises neuroviscérales : Douleurs abdominales accompagnées de nausées et de vomissements Troubles neurologiques (neuropathie végétative, périphérique (Guillain- Barré), SNC) Troubles psychiques (anxiété, hallucinations, épilepsie, agitation)
IV. Maladie de Tangier Maladie autosomique récessive (mutation chromosome 9q31 entrainant un déficit du transporteur ABCA1) : Déficit héréditaire en alpha-lipoprotéine. Caractérisée par: • Une neuropathie asymétriques avec rechute et rémission • Un syndrome «syringomyélique-like» • Une neuropathie lentement progressive symétrique • Initialement, diminution de la sensibilité à la douleur et à la chaleur • Faiblesse musculaire des muscles intrinsèque de la main.
IV. Maladie de Tangier Parésie ou diplégie faciale Anomalies des amygdales, de couleur orange, élargie, polylobulée. Splénomégalie, hépatomégalie, anomalie cornéenne AVC du sujet jeune Biologiquement : réduction sévère du cholestérol HDL et de niveaux élevés de triglycérides.
V. Neuropathies héréditaires d'origine mitochondriale • Les mitochondries sont des organites intracellulaires qui possèdent leur propre génome, l'ADN mitochondrial (ADNmt), sous forme circulaire double brin de 16 569 paires de bases. • La grande majorité des protéines mitochondriales est donc codée par le génome nucléaire (ADNn), puis acheminée vers les mitochondries. • Les mitochondries sont impliquées dans un grand nombre de voies métaboliques et de processus physiologiques tels que la b-oxydation des acides gras, la synthèse des hormones stéroïdes, certaines étapes de la néoglucogenèse, du cycle de l'urée, la synthèse de l'hème, la thermogenèse, l'homéostasie calcique et l'apoptose. • Cependant, leur fonction principale est la production d'énergie sous forme d'adénosine triphosphate (ATP) 06/14/2021 NEUROPATHIES PERIPHERIQUES HEREDITAIRES 22 V. Neuropathies héréditaires d'origine mitochondriale
• L'atteinte du système nerveux périphérique est fréquemment rencontrée
dans les cytopathies mitochondriales avec une expression phénotypique très variable et parfois infra-clinique. • À cette variabilité phénotypique s'ajoute la complexité génétique puisqu'elles peuvent être dues soit à des mutations de l'ADN mitochondrial, soit à des mutations affectant des gènes nucléaires. • L'atteinte du système nerveux périphérique (SNP) est le plus souvent une polyneuropathie chronique axonale sensitivomotrice; les neuropathies démyélinisantes sont, elles, beaucoup plus rares. • L'atteinte sensitive est souvent prédominante dans les MCP mais une neuropathie à nette prédominance motrice peut être rencontrée ce qui est essentiellement le cas dans les maladies de Charcot-Marie-Tooth (CMT). 06/14/2021 NEUROPATHIES PERIPHERIQUES HEREDITAIRES 23 V. Neuropathies héréditaires d'origine mitochondriale
• Les mitochondriopathies (MCP), maladies héréditaires responsables
d'anomalies de la conversion énergétique mitochondriale, sont nombreuses et hétérogènes puisqu'elles concernent probablement plus de 300 entités clinicobiologiques. • Ces pathologies affectent principalement les organes à fort besoin énergétique comme le système nerveux, les muscles ou les organes neurosensoriels. • Les atteintes sont souvent multisystémiques n'ayant a priori pas de relation entre elles. • L'aggravation progressive des symptômes préexistants et l'apparition de nouvelles atteintes sont également très évocatrices d'une MCP
V. Neuropathies héréditaires d'origine mitochondrial • l'intégralité du génome mitochondrial d'un individu étant héritée de la mère. Chacune des cellules d'un patient possède de multiples copies d'ADNmt, dont une proportion est mutée et l'autre saine, phénomène appelé hétéroplasmie. Ainsi,l'expression d'une mutation ne devient pathogène pour une cellule que si le pourcentage d'ADNmt muté dépasse un certain seuil (30 à 80 % de l'ADNmt total selon les tissus). • Le retentissement clinique pour même mutation sera donc variable entre les patients, mais aussi pour un même patient entre les différents tissus ou organes. • De même, une patiente pourra hériter de mitochondries mutées en quantité insuffisante pour développer la maladie, mais suffisante pour pouvoir en transmettre une proportion pathologique à ses enfants qui deviendront symptomatiques
V. Neuropathies héréditaires d'origine mitochondrial • Mutations de l'ADNmt affectant les complexes de la chaîne respiratoire: • Syndrome NARP (Neurogenic Weakness, Ataxia, Retinitis Pigmentosa) : est provoqué par la mutation du gène MT-ATP6, codant pour la sous-unité 6 de l'ATP synthase. • La présentation clinique est dominée par une neuropathie axonale essentiellement sensitive et ataxiante, un syndrome cérébelleux, une faiblesse musculaire proximale et une rétinopathie pigmentaire.
V. Neuropathies héréditaires d'origine mitochondrial • Mutations de l'ADNmt affectant les ARN de transfert mitochondriaux Syndrome MERRF (Myoclonic Epilepsy with Ragged Red Fibers) est causé dans 80 % des cas par la mutation 8344A> G du gène MT-TK de l'ARN de transfert de la Lysine. • Il débute généralement dans l'enfance et se caractérise classiquement par l'association d'une épilepsie myoclonique, d'une ataxie cérébelleuse et d'une myopathie avec fibres rouges déchiquetées à la biopsie musculaire. • À cette symptomatologie peuvent s'ajouter des troubles cognitifs, une surdité, une lipomatose, une atrophie optique, ou une cardiomyopathie. • La neuropathie périphérique est fréquente, habituellement très lentement progressive et affectant principalement les nerfs sensitifs. • Cette polyneuropathie est dans la majorité des cas de forme axonale mais quelques neuropathies démyélinisantes ont été décrites.
V. Neuropathies héréditaires d'origine mitochondrial • Syndrome MELAS (Mitochondrial Encephalomyopathy with Lactic Acidosis and Stroke-like) • Si plus de 10 mutations différentes ont été identifiées comme pouvant être à l'origine du syndrome MELAS, 80 % des patients sont porteurs de la mutation 3243A>G du gène MTTL1 de l'ARN de transfert de la leucine. • Les manifestations cliniques du syndrome MELAS débutent dans l'enfance ou l'adolescence, et associent céphalées, vomissements et
V. Neuropathies héréditaires d'origine mitochondrial • En pratique, quand évoquer une pathologie mitochondriale lors de l'exploration d'une neuropathie périphérique ? • L'enquête étiologique d'une affection neuromusculaire potentiellement en lien avec une atteinte mitochondriale repose sur une démarche étiologique comprenant un interrogatoire, avec établissement d'un arbre généalogique, un examen clinique et la réalisation d'un électroneuromyogramme. • À chacune de ces étapes, il faudra s'efforcer de rechercher de façon minutieuse des arguments évocateurs d'une atteinte plurisystémique très évocatrice d'une mitochondriopathie afin d'orienter au mieux les investigations génétiques.
NEUROPATHIES PERIPHERIQUES HEREDITAIRES
06/14/2021 29 V. Neuropathies héréditaires d'origine mitochondrial • Interrogatoire L'interrogatoire est un temps crucial qui recherche des éléments en faveur d'une atteinte multisystémique et notamment la présence d'un diabète, d'une épilepsie, d'une surdité, de troubles visuels ou cognitifs y compris chez les membres de la famille. • En effet, la présence de traits familiaux incitera à privilégier une maladie génétiquement déterminée et permettra d'identifier un mode de transmission génétique, une transmission maternelle étant pathognomonique d'une atteinte de l'ADNmt. • L'existence de crampes ou d'entorses fréquentes depuis de nombreuses années, l'association de signes orthopédiques tels que des pieds creux ou une scoliose feront suspecter une neuropathie héréditaire de type CMT dont certaines mutations affectent des gènes codant pour des protéines mitochondriales (MFN2, GDAP1, PDK3, SURF1, AIFM1, MT-ATP6).
V. Neuropathies héréditaires d'origine mitochondrial • Examen clinique Les signes associés à rechercher avec attention sont très nombreux ; leur dépistage systématique impose donc un examen général et neurologique minutieux et attentif, en insistant plus particulièrement sur certains signes très évocateurs d'un syndrome mitochondrial défini et qui orienteront rapidement vers le diagnostic génétique. • En cas d'atteinte en apparence isolée du SNP, il faudra s'efforcer de rechercher des éléments en faveur d'une neuropathie chronique pouvant faire suspecter une origine génétique.
V. Neuropathies héréditaires d'origine mitochondrial • Syndrome MNGIE (Mitochondrial Neuro-GastroIntestinal Encephalopathy) • est une mitochondriopathie héréditaire de transmission récessive liée à la mutation du gène TYMP codant pour la thymidine phosphorylase, à l'origine d'une déplétion du génome mitochondrial et d'une accumulation de mutations. • Le tableau clinique est dominé par les symptômes digestifs, essentiellement liés à des troubles de la motilité gastro-intestinale associant vomissements postprandiaux, dysphagie, reflux gastro-œsophagien, douleurs abdominales et troubles du transit apparaissant dès l'adolescence et souvent responsables d'une cachexie
V. Neuropathies héréditaires d'origine mitochondrial
• L'association à une neuropathie est constante de type sensitivomotrice
démyélinisante ou mixte et de sévérité variable. • De nombreux signes associés ont été également décrits, tels que des troubles de l'oculomotricité, une rétinopathie pigmentaire,une myopathie ou encore une leuco-encéphalopathie. • L'existence d'un taux sérique élevé de thymidine peut orienter le diagnostic.
VI. Maladie de Refsum • La mutation d'une seule enzyme péroxysomale, la phytanoyl-CoA hydroxylase, qui catalyse l'acide phytanique (un composant alimentaire courant), entraîne une accumulation d'acide phytanique. • Les manifestations cliniques comprennent une neuropathie périphérique progressive, des troubles de la vision secondaire à une rétinite pigmentaire, une surdité, une anosmie, une cardiomyopathie et des troubles de la conduction et une ichtyose.
Maladie de Refsum • Apparition habituellement à la vingtaine. • Le diagnostic de maladie de Refsum est confirmé par une élévation des taux sériques d'acide phytanique et une diminution des taux d'acide pristanique (l'augmentation de l'acide phytanique est accompagnée d'une augmentation de l'acide pristanique dans plusieurs autres pathologies péroxysomales). • Le traitement de la maladie de Refsum consiste en une restriction alimentaire de l'acide phytanique (< 10 mg/jour), qui peut être efficace pour prévenir ou retarder les symptômes quand il est débuté avant l'apparition des symptômes.