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XIV NOTICE HISTORIQUE.


d'aigrettes rouges ; des lances, des javelots, des frondes, et sur-tout des épées a deux
tranchants , dont la trempe étoit si bonne qu'elles mettoient en pieces les casc1ues et les
houcliers, et que ríen n e leur résistoit 1 • Diodore de Sicile croit que cet avantage venoit de
la coutume qu'ils avoient de les enfouir en terre, et de les y 'Iaisser jusqu'a ce que la plus
- foible partíe du fer ayant été rongée par la rouille , il n e restat plus que celle qui avoit le
plus de forcy et de finesse : mais l'opinion la plus vraisemblable est celle de Justin 2 , qui
l'attribue aux eaux du Bilbilis et du Chalybs; ce qui est hors de doute, c'est que les ,Romains
~ adopterent par la suite les ép ées espagnole~, et qu'ils les r egarderent comme les armes les
plus r edoutables.
- ' Leur manier e de combattre étoit celle des troupes légeres; ils harceloient l'ennemi,
ne lui laissoient aucun r epos, et r entroient précipitamment dans leurs montagnes inac-
cessibles, ou la nature faisoit tous les frais de la défense 3. lis étoient cependant suscep-
tibles d'etre disciplinés, et ils le furent en effet dans les armées d'Annibal et de Scipion.
On remarquoit dans ces p euples une fidélité a toute ó.preuve, et une constan ce a garder
leur secret au milieu des tourments. On vit dans la guerre punique4 un esclave qui, ayant
été condamné a la n1ort pour avoir vengé son maitre , rioit sous la main des bour-
reaux, et insultoit a leur fureur par la .sérénité de son visage. Tacite 5 .parle aussi d'un
paysan de Termeste, qui apres avoir tué Pison , gouverneur d e la province, fut arre té
et ~is- a-la torture ; mais au ieu e nommer ses complices, il cri(;it: « C'est en vain
« qJI'on veut les connoitre ; je ne les nornmerai jamais, ils p euvent se montrer , et vehir
<e me vo1r. »
Ils avoient la Ineme intrépidité en mourant pour leur patrie : des Cantabres pris a ]a
guerre, et condamnés a u dernier supplice, chantoient gaiement sur la croix. Ce sang-froid,
qui triomphe de la nature meme, étoit si supérieur aux idées des Romains dans ces der-
niers ternps que Strabon , qui le rapporte, n 'y voit que de La folie. ,
Les femmes partageoieut ce male courage ' et se meloient dans les COinbats 6; elles re-
tra<;oient sans cesse a leurs enfants les belles actions de leurs per es' et les auroient tués pour
les empecher de tomber a u pouvoir de 1'ennemi. En général ils croyoient renclre servic~ a
leurs parents en leur ótant la vie' lorsqu'ils clevoient cesser el'etre libres 7.

fau·e, crw:ent qu'ils avoient perdu !'esprit .ou s'étoient égarés, et- le fort de la melée ils se composoient une infanterie plus ou moins
leur proposerent de les ramener a leur tente. Strabon , lib. m , nombreuse, suivant la nature du terrain. Diod., lib. V, p. 2 r 5. Leurs
p. 164. , chevaux étoient dressés a gravli· les montagnes eta s'arreter aleur
( 1) Le traducteur de l'histol'ien a pris le grec o·v't't cm ouv voix. Strab. , lib. m, p. 163.
pour 6a't'ovv, et fait dire a son auteur que cet arme coupoit les (4) Justin, lib. XLIV, cap. 3.
casques, les boucliers, et meme un os. n est étonnantque le savant (5) Tacite, Ann., lib. IV, cap. 45.
Wesseling, qui a été f éditeur, n'ait pas corrigé cette faute. Lib. V, (6) Salluste, Fragments , p. 183.
pag. 356, éd. iT~rfol. , (7) .. .. HiS pugna cecidisse decus. Sil. Ital., lib. m, v. 34L C'est
(2) Justin, lib. XIJV. Le Bilbilis~ enAragon , baignoitles murs avec sw·prise que l'on trouve dans ces temps reculés une coutume
de la ville du meme nom dont il est parlé dans Marcial : biz~e qui exist~it au Paragu~. Lors~une femme accoucbe, le
Videbis altam, Liciane, Bilbilim man se met au lit, et elle le so1gne : usage aussi absurcle que r é-
Armis et equis nobilem. Mart., lib. IV, ep. 55. voltant. Les hommes, uniquement 1·enfermés dans les soins ele la
Le Cha0'bs coule dans la Galice. guerre, abandonnoient a leurs comp agnes la culture des terres .
(3) Ds montoient ordinairement deux sw· un meme ch eval, et dans celles--ci pour ne pas inten ompre leurs travaux pénibles portoient

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