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La complexité algorithmique

1 Introduction
Nous terminons ce cours d’algorithmique et de structures de données par
une notion très importante et que l’on ne cessera de rencontrer désormais : la
complexité algorithmique.
En effet, nous avons appris à développer des programmes (et des modules
sous forme de fonctions et de procédures), et au delà du plaisir que nous
prenons parfois à le faire, nous nous apercevons que les solutions que nous
proposons sont parfois—voire souvent—différentes de celles proposées par les
autres (nos amis, nos collègues, etc.). Ceci est normal : un problème donné
peut avoir plusieurs solutions, et donc plusieurs algorithmes implémentant ces
solutions.
Cependant, nous nous interrogeons souvent quelle est la meilleure solution ?
Cette question invite une autre question : “meilleure en quoi ?" En effet, deux
algorithmes répondant au même besoin et renvoyant les mêmes résultats
peuvent être différents en termes d’espace et/ou de temps. Et nous parlons, par
conséquent, de (1) complexité en temps d’exécution, et de (2) complexité en
espace (mémoire, ou même disque, ou autres ressources) nécessaire pour que
l’algorithme fonctionne.
Pour simplifier, nous considérons dans ce cours la complexité en temps
d’exécution. En d’autres termes : à quel point un algorithme est-il rapide ?
Et nous tâcherons donc de formaliser cette comparaison d’efficacité par une
notation simple.

2 Exemple d’introduction
Supposons que l’on vous demande de stocker une séquence d’entiers dont
le nombre est inconnu avant l’exécution du programme. Vous optez pour une
liste linéaire chainée.
Vous pensez donc à insérer des éléments dans une LLC. Nous avons au moins
deux façons de le faire 1 . La première étant d’insérer chaque nouvel élément à
la tête de la liste, la deuxième consisterait à l’insérer à la fin de la liste.
Comparez ces deux solutions. Il est évident que la première est plus rapide
que la deuxième, n’est ce pas ? La première alloue de l’espace pour l’élément,
y met l’entier en question, et fait en sorte qu’il soit la nouvelle tête de la LLC.
1. sans compter les solutions bizarres

1
La deuxième, en revanche, après avoir alloué l’espace et y avoir mis la valeur,
parcoure la liste jusqu’à la fin pour y insérer l’élément nouvellement créé.
Mais ce n’est pas tout. Remarquez que le temps pris par le premier algorithme
est constant et ne dépend nullement de la taille de la liste, alors que le second
algorithme prendrait plus de temps (à parcourir la liste) à mesure que la liste
devienne plus longue.
Nous comprenons donc qu’il ne suffit souvent pas que l’algorithme fonctionne,
il est parfois aussi important qu’il soit efficace.

3 La notation de Landau
L’exemple précédent nous a donné une idée de la différence qu’il peut y avoir
entre deux algorithmes censés faire la même chose. Mais comment traduit-on
cette différence de façon formelle ou mathématique ?

3.1 Intuitivement
Avant de le faire, commençons par une explication intuitive. Lorsque nous
insérons un élément à la tête d’une liste, le temps d’exécution de dépend pas
de la taille de la liste. Alors que lorsque nous l’insérons à la queue, plus il y a
d’éléments dans la liste plus le programme prendra de temps pour le faire, et
ce de façon linéaire.
Lorsqu’un programme nécessite un temps d’exécution constant et indépen-
dant de la taille des données (n) à traiter, nous dison que sa complexité est
constante, et est égale à O(1), et c’est prononcé comme suit : Big-O de 1. La
différence en temps d’exécution quand n est incrémenté est de 0.
Lorsqu’un algorithme nécessite n fois plus de temps qu’il prendrait pour
le faire lorsqu’il n’y a qu’une seule donnée, nous disons que sa complexité
est linéaire et nous la notons par O(n). Si n est incrémenté de 1, le nombre
d’éléments à parcourir est lui aussi incrémenté de 1.
Maintenant supposons que l’on vous demande de chercher le maximum
d’une matrice carrée n × n. L’on devrait alors parcourir chaque ligne de cette
matrice, et pour chacune de ces lignes parcourir chaque colonne aussi. Nous
devons effectuer n × n vérifications pour connaitre ce maximum. Nous disons
dans ce cas que cet algorithme est d’une complexité quadratique et c’est noté
par O(n2 ). Si n est incrémenté de 1, nous aurons (n + 1)2 de cases à traiter, et
pas seulement n + 1.
Un dernier exemple : Supposons que nous recherchons une valeur donnée
x dans un arbre binaire de recherche (BST) qui a n nœuds. Remarquez qu’à
chaque itération nous éliminons une branche de l’arbre de façon récursive. Au
pire donc nous prendrons log(n) itérations et la complexité est notée justement
par O(log(n)).

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3.2 Formellement
Supposons que le temps d’exécution d’un algorithme donné soit défini par
une fonction T (n) où n est le nombre de données. Nous disons que : T (n)
est 2 O(f (n)) si et seulement s’il existe deux constantes c ∈ R et n0 ∈ N pour
lesquelles T (n) ≤ cf (n) et ce pour tout n ≥ n0 .
La fonction f (n) est une borne supérieure pour T (n). Dit simplement, si l’on Pour plus de détails quant à
l’aspect mathématique de la
comparait le taux de croissance de T (n) nous dirons qu’ils est inférieur à celui
notation de Landau, revoir
de f (n). le cours d’analyse mathéma-
tique.

3.3 Comportement asymptotique


Le but de cette analyse est de comprendre le comportement dit asymptotique
de l’algorithme. C’est à dire, de connaitre son efficacité lorsque n est très grand.
Si un algorithme donné est d’une complexité égale à O(f (n)), alors on
s’attend à ce que son temps d’exécution ne croisse pas plus que f (n).

3.4 Quelques caractéristiques du Big-O

La somme : Soient T1 et T2 les temps d’exécution de deux parties consécu-


tives P1 et P2 d’un programme donné. Si T1 (n) est O(f (n)) et T2 (n) est
O(g(n)), alors T1 (n) + T2 (n) est O(max(f (n), g(n))).
En d’autres termes : O(f (n)) + g(n)) = O(max(f (n), g(n))). Vous pouvez démontrer ces ca-
ractéristiques en cherchant les
Multiplication par une constante (O(kf (n))) = O(f (n)). bonnes valeurs des constantes
c.
Produit (O(f (n) × g(n))) = O(f (n)) × O(g(n)).

3.5 Autres notations


En plus du Big-O, il existe d’autres notation existent et qui décrivent d’autres
bornes, notamment :
Big-Omega : T (n) est Ω(f (n)) si et seulement s’il existe c ∈ R et n0 ∈ N
tels que T (n) ≥ f (n) pour tout n ≥ n0 .
Theta : T (n) est Θ(f (n)) si T (n) est O(f (n)) et T (n) est Ω(f (n)).
Little-o : T (n) est o(f (n)) si T (n) est O(f (n)) et T (n) n’est pas Θ(f (n)).

4 Quelques complexités usuelles


Dans l’analyse des programmes, nous retrouvons souvent ces quelques com-
plexités classées de la plus faible à la plus forte.
O(log(n)) : Logarithmique
O(n) : Linéaire
O(n2 ) : Quadratique
O(nk ) : Polynomiale
O(nn ), O(ak ), O(n!) : Exponentielle
2. Ou que T (n) ∈ O(f (n))

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5 Règles de calcul
Pour calculer la complexité d’un algorithme, nous avons quelques règles
simples :
1. Toute opération élémentaire est d’une complexité constante O(1), car son
temps d’exécution est constant et ne dépend pas de la taille des données.
2. La complexité d’une séquence de deux blocs d’instructions P1 et P2 est
égale à la complexité du plus grand d’entre eux. (Revoir la somme ci-
dessus)
3. La complexité d’une conditionnelle (si/sinon) est égale à la complexité
du bloc le plus complexe. C’est un peu comme si l’on envisageait le cas où
le bloc ayant la plus grande complexité serait exécuté.
4. La complexité d’une boucle est égale à la somme des complexités de
toutes les itération du bloc. Si, par exemple, nous avons une boucle
“pour" ne contenant que des instruction élémentaires, sa complexité serait
égale à la somme, et si cette boucle itère sur les données, elle serait donc
de O(n).

5.1 Quelques exemples


Nous présentons ci-après quelques exemples d’illustration. En les analysant,
et en essayant d’appliquer les règles ci-dessus, vous arriverez à calculer la
complexité d’autres algorithmes par vous-mêmes.

Rehcrehce dans un tableau

La recherche d’un élément dans un tableau non trié est d’une complexité
égale à O(n), car nous devons itérer n fois au pire pour trouver (ou pas) la
valeur recherchée, et le nombre d’itérations croitra avec le nombre d’éléments
dans le tableau.

Recherche dans un tableau trié

Si le tableau est trié : nous adoptons une recherche par dichotomie, donc
nous enlevons n/2 à chaque fois. La complexité d’un tel algorithme est beau-
coup plus faible que la précédente car elle est égale à O(log(n)). À titre
d’exemple, prenez un tableau de 8 éléments. Nous nous positionnons au
milieu, si la valeur recherchée est inférieure à celle du milieu, nous limitons
notre recherche au premier 4 éléments du tableau (sinon aux 4 derniers). Nous
refaisons cette opération avec ce sous-tableau de 4 éléments, et ainsi de suite.
En d’autres termes, au bout d’au plus 3 itérations nous avons notre réponse.
(8 = 23 donc 3 = log(8))

Produit matriciel

Le produit de deux matrices A et B : Nous multiplions et additionnons les


lignes de A par les colonnes de B. Nous avons trois boucles imbriquées et qui
dépendent toutes les deux de la taille des données. La complexité est donc
égale à O(n) × O(n) × O(n) = O(n3 ).

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Combinaisons

Supposez que vous avez un clavier avec des chiffres de 0 à 9. L’algorithme


qui affiche les combinaisons possibles de n chiffres (pas forcément distincts)
devrait effectuer 10n itérations. Sa complexité est de O(10n ).
Maintenant considérez un ensemble de caractères (26 lettres, 10 chiffres,
et plein de symboles), plus un mot de passe contient de caractères plus il
est difficile à deviner par la force brute (en essayant toutes les combinaisons
possibles).

6 Bibliographie
Vous trouverez dans la section (sur e-learning) dédiée à ce cours, un en-
semble de ressources supplémentaires pour bien comprendre cette notion.
N’hésitez pas à la discuter sur le forum.

7 Annexe
Démontrons que si T1 (n) = O(f (n)) et que T2 (n) = O(g(n)), alors :

T1 (n) + T2 (n) = O(max(f (n), g(n)))

Commençons par la retranscription des hypothèses :


T1 (n) = O(f (n)) veut dire qu’il existent deux constantes c1 et n1 tels que :

T1 (n) ≤ c1 f (n) pour n ≥ n1 (1)

T2 (n) = O(g(n)) veut dire qu’il existent deux constantes c2 et n2 tels que :

T2 (n) ≤ c2 g(n) pour n ≥ n2 (2)

Maintenant, combinons (1) et (2) en introduisant deux nouvelles constantes,


à savoir c = max(c1 , c2 ) et n0 = max(n1 , n2 ). Nous aurons alors :

T1 (n) + T2 (n) ≤ c1 f (n) + c2 g(n) ≤ c(f (n) + g(n)), pour n ≥ n0 (3)

Remarquons aussi que quelque soient a et b, nous avons :

a + b ≤ 2 max(a, b) (4)

En appliquant (4) dans (3), nous aurons :

T1 (n) + T2 (n) ≤ 2c(max(f (n), g(n))), pour n ≥ n0 (5)

Nous venons de trouver une constance C = 2c pour laquelle :

T1 (n) + T2 (n) ≤ C(max(f (n), g(n))), pour n ≥ n0 (6)

Par conséquent

T1 (n) + T2 (n) = O(max(f (n), g(n)))

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