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Marc Fermigier
Les figures 1.10, 1.11, 1.12, 2.5, 9.1, 9.3, 9.4, 9.5 et 9.6 sont tirées du livre de M. Van
Dyke, ” An Album of Fluid Motion ”, Parabolic Press, 1982. La figure 4.13a est tirée du
livre de D.V. Bogers et K. Walters, ” Rheological Phenomena in Focus ”, Elsevier 1993. Les
résultats présentés sur la figure 10.3 ont été obtenus par A. Bakker avec le logiciel Fluent.
Les simulations numériques sont réalisées avec le logiciel Charisma écrit par Ralph Goodwin
et Andrew Yeckel à l’Université d’Illinois Urbana-Champaign.
La photographie de couverture est de Philippe Petitjeans, laboratoire PMMH, ESPCI.
1 INTRODUCTION 1
1.1 Du microscopique à la géophysique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1
1.2 Qu’est-ce qu’un fluide ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
1.3 L’hypothèse de continuité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
1.4 Notion de viscosité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
1.5 Transport diffusif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
1.6 Transport convectif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10
2 CINEMATIQUE 13
2.1 Descriptions eulérienne et lagrangienne. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
2.2 Dérivée “particulaire” de la vitesse. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
2.3 Lignes de courant.Tubes de courant. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
2.4 Conservation de la masse. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
2.5 Ecoulement bidimensionnel incompressible. Fonction de courant. . . . . . . . 18
2.6 Mesure des champs de vitesse. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
2.6.1 Analyse numérique des visualisations. PIV . . . . . . . . . . . . . . . 19
2.6.2 Vélocimétrie laser. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
2.6.3 Doppler ultrasonore. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
2.7 Déformations dans un écoulement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
2.7.1 Décomposition du gradient de vitesse . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
2.7.2 Ecoulement de cisaillement simple . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
2.7.3 Ecoulement élongationnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
3 DYNAMIQUE 25
3.1 Forces de surface et tenseur des contraintes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
3.1.1 Représentation des forces de surface par le tenseur des contraintes . . 25
3.1.2 Tenseur des contraintes dans un fluide en mouvement . . . . . . . . . 27
3.2 Ecoulements simples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
3.2.1 Ecoulement dans un tube (écoulement de Poiseuille) . . . . . . . . . . 28
3.2.2 Ecoulement entre deux cylindres (écoulement de Couette) . . . . . . . 31
3.3 L’équation de Navier-Stokes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33
3.3.1 Equation de la vorticité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33
3.4 Conditions aux limites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
3.4.1 Interface solide-fluide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
3.4.2 Interface fluide-fluide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
3.5 Notion de similitude . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
iii
iv TABLE DES MATIÈRES
5 LOIS DE CONSERVATION 51
5.1 Conservation de la quantité de mouvement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
5.1.1 Conservation de la quantité de mouvement . . . . . . . . . . . . . . . 51
5.1.2 Exemple d’application de la conservation de la quantité de mouvement :
force exercée par l’écoulement sur une conduite coudée . . . . . . . . . 52
5.2 Conservation de l’énergie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54
5.2.1 Loi d’évolution de l’énergie cinétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54
5.2.2 Dissipation d’énergie par viscosité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55
5.2.3 Loi de Bernoulli . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56
5.3 Applications des lois de conservation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58
5.3.1 Ressaut hydraulique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58
5.3.2 Ecoulement à surface libre au-dessus d’un obstacle . . . . . . . . . . . 60
8 COUCHES LIMITES 91
8.1 La notion de couche limite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91
8.1.1 Approximations de l’équation de Navier-Stokes dans une couche limite. 92
8.2 Couche limite sur une plaque plane . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93
8.3 Avec gradient de pression extérieur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97
8.3.1 Influence de l’accélération ou décélération de l’écoulement externe . . 97
8.3.2 Solutions autosimilaires pour un écoulement externe en xm . . . . . . 98
8.3.3 Conséquences du décollement de la couche limite . . . . . . . . . . . . 99
8.3.4 Contrôle de la couche limite . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101
INTRODUCTION
1
2 CHAPITRE 1. INTRODUCTION
Fig. 1.1 – Les progrès de l’aviation en un siècle, depuis le planeur d’Otto Lilienthal (1894)
jusqu’à l’Airbus A340. Photos Archive Otto-Lilienthal-Museum / www.lilienthal-museum.de
et Airbus
sucre est extrêmement lente ; en fait, il faudrait une journée entière pour que le sucre diffuse
dans toute la tasse.
Autre différence essentielle : le fluide mis en jeu n’est plus un corps simple en phase fluide
mais un liquide complexe, une suspension de vésicules déformables, avec de nombreux ions
et macromolécules en solution. Néanmoins, à une échelle macroscopique, son comportement
peut être décrit par les mêmes équations qui régissent l’écoulement de l’air ou de l’eau. Pour
l’ingénieur du génie chimique, un écoulement est presque toujours le moyen utilisé pour amener
les réactifs en contact. La technique dite du lit fluidisé, dans laquelle des particules solides
sont mises en suspension par un courant ascendant de fluide est souvent mise à profit pour
les réactions catalytiques, le catalyseur étant dispersé dans les particules solides.
Remontons maintenant dans les échelles de longueur pour examiner des écoulements à
l’échelle de notre planète. La différence d’éclairement solaire entre les zones polaires et les
zones tropicales induit de grandes différences de température entre les différentes régions du
globe. Les écoulements atmosphériques et les courants marins servent essentiellement aux
échanges de chaleur entre pôles et tropiques ; la température moyenne qui règne à la surface
du globe est impossible à évaluer correctement sans prendre en compte les effets de la circula-
tion atmosphérique à grande échelle. Par la même occasion, ces écoulements transportent de
nombreuses substances, en particulier les polluants et les cendres volcaniques. Contrairement
à ce que certains ont affirmé, les éléments radioactifs émis par l’accident de la centrale de
Tchernobyl ne se sont pas arrêtés à nos frontières, ils ont été largement disséminés sur toute
l’Europe. Heureusement, les écoulements atmosphériques ont également réalisé un mélange
très efficace du nuage radioactif et ont permis la dilution des polluants.
Notre expérience quotidienne nous enseigne que les prévisions des météorologistes ne sont
pas d’une fiabilité à toute épreuve. Pourtant ceux-ci utilisent à temps plein les plus puissants
ordinateurs du monde et les équations de la mécanique des fluides sont connues depuis le
milieu du 19ème siècle.. La prévision météorologique se heurte ici à un problème fondamental :
l’existence de la turbulence et le caractère d’imprévisibilité à long terme des écoulements
turbulents. L’examen de l’atmosphère révèle des mouvements à des échelles très différentes :
un champ de blé dont la température est supérieure à celle du bois voisin suffit à provoquer
une cellule de convection thermique dont l’extension ne dépasse pas quelques centaines de
1.1. DU MICROSCOPIQUE À LA GÉOPHYSIQUE 3
Fig. 1.2 – Répartition schématique du débit sanguin dans les principaux organes, au repos et
pendant un exercice physique.Illustration tirée de J.F. Lamb et al., Manuel de Physiologie,
Masson 1990
Fig. 1.3 – Schéma de deux lits fluidisés l’un pour la calcination du calcaire, l’autre pour
effectuer une réaction catalytique. D’après The Kirk-Othmer Encyclopedia of Chemical Tech-
nology.
4 CHAPITRE 1. INTRODUCTION
Fig. 1.4 – Photographie de l’atmosphère terrestre prise par le satellite METEOSAT dans
le canal infrarouge, le 10 Février 1995. Le tourbillon associé à la perturbation située sur le
proche Atlantique s’étend sur un millier de kilomètres.
mètres. Le même phénomène se produit le long des côtes, provoquant la brise de mer ; cette
fois, la convection fait sentir ses effets sur une dizaine de km. Les perturbations qui balaient
régulièrement l’Atlantique Nord pendant l’hiver sont des tourbillons de plusieurs centaines de
km de diamètre. En haut de cette organisation, on trouve la circulation zonale : au niveau
des tropiques les alizés soufflent essentiellement de l’est, alors qu’aux latitudes moyennes les
vents d’ouest prédominent. L’existence de tourbillons sur une très grande gamme d’échelles
spatiales est une des caractéristiques de la turbulence et l’une des raisons essentielles de la
difficulté des simulations numériques.
Fig. 1.5 – Glacier Barnard en Alaska. Photo : National Snow and Ice Data Center/World
Data Center for Glaciology, Boulder, compiler. 2002. Online Glacier Photograph Database.
Digitized subset of the Glacier Photograph Collection. Boulder, CO : National Snow and Ice
Data Center. Digital Media..
Fig. 1.6 – Profil d’une goutte de polydiméthylsiloxane (huile silicone) s’étalant sur une surface
de silicium. Epaisseur mesurée par ellipsométrie optique, 3.5h, 11.4h, 45.4 h et 148.9 h après le
dépôt de la goutte. Noter que les échelles verticale et horizontale sont très différentes. D’après
N. Fraysse et al., J. Colloid Interface Sci. 158, 27 (1993)
d’un fluide possédant des propriétés mécaniques particulières. En fait, il n’en est rien et la “
physique du tas de sable ” est un domaine assez éloigné de la mécanique des fluides et qui est
encore en pleine évolution.
Pour illustrer le comportement particulier des milieux granulaires, considérons l’exemple
simple de l’équilibre statique d’un silo : si on mesure la pression exercée sur le fond du silo en
remplissant celui-ci de plus en plus, on constate que cette pression n’augmente plus au delà
d’une certaine hauteur de remplissage, proportionnelle au diamètre du silo. Ce comportement,
tout à fait différent de celui d’un liquide, est dû au frottement solide sur les parois latérales
du silo qui supporte partiellement le poids de l’empilement de grains.
Fig. 1.7 – Ecoulement de cisaillement simple. Deux plaques parallèles en mouvement relatif.
Lorsque la pression est suffisamment basse pour que la distance moyenne entre molécules
devienne plus grande que les dimensions caractéristiques de l’écoulement, on ne peut plus
appliquer les lois classiques de la mécanique des fluides. Une telle situation se rencontre dans
la très haute atmosphère (rentrée des véhicules spatiaux) et dans les systèmes d’ultravide
utilisés en physique du solide. Dans la suite de ce cours, nous ignorerons ces subtilités et
considérerons tous les fluides comme des milieux continus dont les propriétés physiques et la
dynamique peuvent être décrits par des fonctions des coordonnées spatiales.
L’un des cylindres est fixe, l’autre est mis en rotation à une vitesse imposée. La viscosité du
fluide est proportionnelle au couple nécessaire à l’entretien de la rotation. C’est le viscosimètre
développé par M. Couette au tout début du siècle. Nous reviendrons plus en détail sur cet
appareil dans le chapitre suivant.
Examinons en détail ce qui se passe lorsque un des cylindres est mis brusquement en
rotation (sa vitesse angulaire passe très rapidement de zéro à une valeur finie). Les couches
de fluide au voisinage immédiat de la paroi solide sont mises en mouvement avec la paroi. Cet
effet est dû à l’échange de quantité de mouvement entre le solide et le fluide. Dans tous les
fluides visqueux, les mesures de vitesse locale montrent que le champ de vitesse s’extrapole à
zéro sur une paroi solide : il n’y a pas de mouvement relatif à une interface entre un solide
et fluide visqueux. Ces observations macroscopiques ont été confirmées récemment à l’échelle
microscopique par des simulations de dynamique moléculaire Ensuite, les couches de fluide de
plus en plus éloignées de la paroi sont mises progressivement en mouvement. L’information
relative au déplacement de la paroi diffuse au sein du fluide.
Pour analyser la cinétique de ce phénomène, considérons une géométrie plane, plus simple
que l’écoulement entre les deux cylindres concentriques (en fait, si l’espacement des cylindres
est petit devant leurs rayons, l’effet de la courbure sur l’écoulement est négligeable. De la
même manière, à notre échelle humaine, nous ne percevons pas la courbure de la Terre) : une
plaque solide plane, au contact avec un fluide visqueux, est mise brusquement en mouvement
dans son propre plan (fig. 1.8). Quel est l’effet des contraintes de cisaillement sur un élément
de volume fluide parallèlépipèdique d’épaisseur dz et d’aire dS dans le plan xy parallèle à la
plaque en mouvement ? La force horizontale exercée sur la face supérieure est :
∂ux
η |z+dz
∂z
et la force sur la face inférieure est :
∂ux
−η |z
∂z
La résultante de ces deux forces est égale à la variation temporelle de quantité de mouvement
de l’élément de fluide :
ρdzdS∂ux
∂t
où ρ est la masse volumique du fluide. La relation fondamentale de la dynamique conduit
donc à l’équation suivante :
∂ux η ∂ 2 ux ∂ 2 ux
= = ν (1.1)
∂t ρ ∂z 2 ∂z 2
où ν est la viscosité cinématique du fluide, définie comme le rapport entre la viscosité dyna-
mique et la masse volumique. L’équation ci-dessus est une équation de diffusion de la quantité
1.5. TRANSPORT DIFFUSIF 9
∂T λ
= ∆T = κ∆T (1.2)
∂t ρCp
d2 u 1 du
+ ζ =0 (1.3)
dζ 2 2 dζ
∂u ∂ ∂u
ρ = η (1.6)
∂t ∂z ∂z
le membre de gauche représente la variation de quantité de mouvement, par unité de temps,
d’un élément de fluide de volume unité. Le membre de droite est la divergence de la contrainte
de cisaillement créée par la viscosité. La variation globale de quantité de mouvement résulte
10 CHAPITRE 1. INTRODUCTION
Fig. 1.9 – Plaque plane mise brusquement en mouvement. Profils de vitesse à différents
instants.
ρU 2 ρU L UL
Re = = = (1.7)
ηU/L η ν
dans lequel U est une vitesse représentative de l’écoulement (essentiellement la vitesse moyenne
du fluide) et L une échelle de longueur également représentative de l’écoulement (essentiel-
lement, la longueur sur laquelle la vitesse passe de 0 à U ). Ce rapport est appelé nombre
de Reynolds. Lorsqu’il est très grand devant 1, le transport d’impulsion est gouverné par
la convection, c’est-à-dire par l’inertie du fluide. En revanche, lorsque Re 1, le transport
d’impulsion est essentiellement diffusif et l’écoulement est gouverné par la viscosité. Les deux
types d’écoulement ont des caractéristiques très différentes. Les écoulements que nous obser-
vons couramment dans l’eau ou dans l’air sont presque tous à très grand nombre de Reynolds.
En voici quelques exemples :
– écoulement atmosphérique : U ≈ 10 m/s, L ≈ 100 km, Re ≈ 1011 .
– écoulement autour d’une aile d’avion : U ≈ 100 m/s, L ≈ 10 m, Re ≈ 108 .
– écoulement autour d’une voiture : U ≈ 30 m/s, L ≈ 4 m, Re ≈ 106 à 107 .
– jet d’eau sortant d’un robinet : U ≈ 10 cm/s , L ≈ 1 cm, Re ≈ 103 .
– écoulement du sang dans l’aorte : U ≈ 1 m/s, L ≈ 1 cm, Re ≈ 104 .
1.6. TRANSPORT CONVECTIF 11
Fig. 1.10 – Ecoulement autour d’un cylindre à Reynolds = 1.5. Visualisation à l’aide de
particules réfléchissantes dans l’écoulement. Photographie : S. Taneda., J. Phys. Soc. Jpn.
L’obtention d’un petit nombre de Reynolds nécessite soit un fluide de grande viscosité, soit
un écoulement de très petite taille, soit une vitesse très faible ou une combinaison de ces
trois paramètres. Si vous vouliez nager à Re = 1, il faudrait vous immerger dans du sirop
de sucre et vous interdire de déplacer vos bras ou vos jambes à plus de 1 cm/min. ! Alors
que l’écoulement du sang dans l’artère aorte se fait à Re ≈ 104 , dans les capillaires dont
le diamètre est d’une dizaine de microns, la vitesse du sang est 100 µm/s et le nombre de
Reynolds descend jusqu’à 10−3 . Autres exemples d’écoulements à petit nombre de Reynolds :
– lubrification de pièces mécaniques en mouvement
– mouvement de particules dans les suspensions colloı̈dales
– propulsion des micro-organismes
– écoulement des roches et du magma dans le manteau terrestre
Nous verrons dans la suite que la relation entre le champ de pression et le champ de vitesse
est très différente selon que le nombre de Reynolds est petit ou grand, selon que l’effet de
la viscosité est prépondérant ou négligeable. L’augmentation de Re est également associée à
l’apparition d’instabilités, puis de la turbulence dans l’écoulement. Les fig. 1.6 à 1.6 montrent
l’évolution du champ de vitesse dans le sillage d’un cylindre lorsque le nombre de Reynolds
passe de 1,5 à 10000.
12 CHAPITRE 1. INTRODUCTION
Fig. 1.11 – Ecoulement autour d’un cylindre à Reynolds = 26. Deux tourbillons de recircu-
lation sont visibles derrière le cylindre. Photographie : S. Taneda.
Fig. 1.12 – Ecoulement autour d’un cylindre à Reynolds = 10000. Le sillage est devenu
turbulent et présente de grands tourbillons alternés. Photographie : T. Corke et H. Nagib.
Chapitre 2
CINEMATIQUE
13
14 CHAPITRE 2. CINEMATIQUE
Fig. 2.3 – Ecoulement dans un élargissement brusque à Re = 50. Résultat d’une simulation
numérique. Représentation du champ de vitesse par des lignes de courant.
Fig. 2.4 – Ecoulement dans un élargissement brusque à Re = 50. Résultat d’une simulation
numérique. Représentation du champ de vitesse par des vecteurs.
Fig. 2.5 – Exemple d’écoulement instationnaire. Lignes de courant dans l’écoulement derrière
un cylindre qui est mis brusquement en mouvement à Re = 500. Visualisation à l’aide de par-
ticules métalliques réfléchissantes. A droite, le cylindre s’est déplacé d’une fois son diamètre,
à gauche, de trois fois son diamètre. Photographie : R. Bouard et M. Coutanceau.
La visualisation par injection de colorants (ou de fumée dans l’air) est assez simple à
mettre en ouvre. Elle de ce fait largement utilisée. Néanmoins, comme nous venons de le voir,
l’interprétation des visualisations d’écoulements instationnaires doit être faite avec précaution.
d
Z Z
ρdτ = − ρu.ndσ
dt V S
où n est le vecteur unitaire normal à la surface S et orienté vers l’extérieur de celle-
ci. En utilisant le théorème d’Ostrogradski pour transformer le second membre en intégrale
de volume, et en intervertissant la différentiation temporelle et l’intégration dans le premier
membre, on obtient :
∂ρ
Z
+ div(ρu) dτ = 0
V ∂t
L’égalité écrite ci-dessus est valide quel que soit le volume V considéré et l’intégrand est nul,
ce qui conduit à l’expression locale de la conservation de la masse :
∂ρ
+ div(ρu) = 0 (2.3)
∂t
Réécrivons 2.3 en développant le second terme :
∂ρ Dρ
+ u.gradρ + ρ divu = + ρ divu = 0 (2.4)
∂t Dt
La somme des deux premiers termes du membre de gauche est la dérivée “particulaire” (en
suivant le mouvement du fluide) de la masse volumique. Si le fluide est incompressible, la
2.4. CONSERVATION DE LA MASSE. 17
Ainsi, lorsqu’on représente un écoulement par des lignes de courant correspondant à des
valeurs de ψ régulièrement espacées, le débit de fluide Q = ∆ψ est le même entre tous
les couples de lignes adjacentes. L’espacement des lignes reflète alors directement la vitesse
du fluide : la distance d entre les lignes de courant est inversement proportionnelle à la
vitesse locale du fluide : u = ∆ψ/d. De la même manière que le champ magnétique, qui
est à divergence nulle, dérive d’un potentiel vecteur, le champ de vitesse d’un écoulement
bidimensionnel incompressible dérive du potentiel vecteur A = ψk, k étant le vecteur unitaire
sur l’axe z. Il est également possible de définir une fonction de courant dans un écoulement
axisymétrique incompressible, par exemple, l’écoulement autour d’une sphère. Si le champ de
vitesse est indépendante de la coordonnée azimutale θ autour de l’axe de symétrie, l’équation
de conservation de la masse s’écrit :
∂ux 1 ∂rur
divu = + =0
∂x r ∂r
où x est la coordonnée le long de l’axe de symétrie. Cette équation est satisfaite si :
1 ∂ψ 1 ∂ψ
ux = et ur = −
r ∂r r ∂x
10
0.1
0.01
Pitot sera détaillée après l’introduction de la loi de Bernoulli. Dans le vélocimètre à fil chaud,
un petit fil métallique est maintenu à une température constante, supérieure à celle du fluide.
L’asservissement en température du fil permet de mesurer le flux de chaleur évacué par le
fluide et un étalonnage permet de relier ce flux de chaleur à la vitesse du fluide.
Il est également possible de mesurer la vitesse du fluide sans introduire de capteur dans
l’écoulement, en utilisant les ondes électromagnétiques (vélocimétrie laser) ou les ondes acous-
tiques (Doppler ultrasonore).
La vélocimétrie laser est maintenant la technique la plus utilisée dans les laboratoires de
recherche et elle commence à se répandre dans l’industrie. Le faisceau issu d’un laser continu
est divisé en deux. Les deux faisceaux sont ensuite focalisés au sein de l’écoulement. Dans le
volume d’intersection des faisceaux, l’interférence des deux ondes produit des franges de pas p,
en général égal à quelques microns. Si une particule solide entraı̂née par l’écoulement traverse
l’intersection des faisceaux, la lumière diffusée par cette particule présente une succession
(dans le temps) de maxima et minima qui correspondent au passage de la particule dans les
franges brillantes et les franges sombres. La lumière diffusée est recueillie par un photomul-
tiplicateur et analysée par un appareil spécialisé qui détermine la fréquence f des succession
des maxima d’intensité. Cette fréquence est telle que : f = u/p où u est la projection de la
vitesse du fluide sur la normale au plan des franges d’interférence. Des dispositifs avec deux
systèmes de franges orthogonaux permettent de mesurer simultanément deux composantes
de la vitesse. Avec cette technique, on peut mesurer des vitesses allant de quelques microns/s
jusqu’à quelques centaines de m/s (la fréquence f est alors de l’ordre de 10 Mhz).
Fig. 2.9 – Imagerie Doppler ultrasonore de l’artère carotide. Dans le losange, à l’intérieur
de l’image, les niveaux de gris codent la vitesse du sang. Les côtés du losange ainsi que
le trait central indiquent la directions de propagation des ultrasons. Sous l’image on voit
l’enregistrement temporel de la vitesse au centre du vaisseau inférieur dans l’image. Document
ATL.
ont permis d’intégrer à ces appareils une fonction de mesure de vitesse de l’écoulement sanguin
en utilisant le décalage Doppler de l’onde ultrasonore rétrodiffusée. La résolution spatiale de
la mesure est assurée de manière électronique en sélectionnant un paquet d’onde rétrodiffusé
qui a mis un temps déterminé pour revenir à la sonde (la même sonde joue alternativement
le rôle d’émetteur et de récepteur). Dans les appareils les plus sophistiqués, plusieurs modes
de visualisation sont disponibles : vitesse du sang en un point du champ en fonction du
temps, distribution des vitesses dans la section d’un vaisseau (permet de quantifier le niveau
de turbulence), représentation du champ de vitesse superposé sur l’image par un système de
couleurs (permet de localiser les recirculations dans les vaisseaux).
Nous verrons que la dynamique des écoulements est régie par les gradients de vitesse, c’est-
à-dire par le mouvement relatif des particules de fluide. Il faut de ce fait analyser en détail les
déformations subies par un élément de fluide placé dans un écoulement. Si deux particules de
fluide sont placées respectivement en r et r + δr, la différence de leur déplacement pendant un
temps δt est : δ = ∇u.δrδt, soit pour la composante i du déplacement : δi = (∂ui /∂xj )δrj δt.
22 CHAPITRE 2. CINEMATIQUE
Fig. 2.10 – Déformation d’un cercle par un écoulement. Dilatation globale, puis déformation
à volume constant et enfin, rotation en bloc.
Fig. 2.11 – Déformation d’un élément de fluide carré dans un écoulement de cisaillement
simple : déformation sans changement de volume avec des axes propres à 45◦ puis rotation.
Le terme symétrique a une trace nulle, il n’y a donc pas de variation de volume des éléments
de fluide. Ce terme symétrique a des axes propres orientés à 45◦ et les valeurs propres sont
G/2 et −G/2. Enfin, le terme antisymétrique représente une rotation à la vitesse angulaire
−G/2 (fig. 2.11).
Fig. 2.12 – A gauche : Appareil à quatre rouleaux pour produire un écoulement élongationnel.
A droite : Déformation d’une goutelette de fluide visqueux en fonction du nombre capillaire.
Les différentes courbes correspondent à différentes valeurs de la vorticité. La déformation la
plus importante est obtenue pour une vorticité nulle. Figures tirée de Bentley et Leal, J. Fluid
Mech. 167, 219 (1986).
Les axes propres sont confondus avec les axes x et y. Un cercle se déforme en une ellipse dont le
grand axe est parallèle à l’axe x. Le gradient de vitesse n’ayant pas de partie antisymétrique, il
n’y a pas de mouvement de rotation des éléments de fluide ; cet écoulement est un écoulement
de déformation pure.
L’absence ou la présence d’une composante rotationnelle du gradient de vitesse peut avoir
des conséquences importantes. Une solution de polymères placée dans l’appareil à quatre rou-
leaux présente une biréfringence assez importante. Cette anisotropie de l’indice de réfraction
induite par l’écoulement est due à la déformation des macromolécules dans l’écoulement. En
revanche dans un écoulement de cisaillement simple, la même solution de polymère soumise
à un gradient de vitesse comparable ne présente pas de biréfringence notable. En effet, la
composante rotationnelle du gradient change continuellement la direction d’élongation des
macromolécules. Dans l’écoulement élongationnel, les macromolécules restent orientées dans
la direction d’allongement et, de ce fait, le gradient de vitesse est beaucoup plus efficace pour
déformer les polymères. Une observation similaire est faite concernant la déformation de goute-
lettes (suspendues dans un autre liquide) placées dans les mêmes écoulements : les goutelettes
sont plus facilement déformées et fractionnées dans l’écoulement purement élongationnel (fig.
2.12).
Chapitre 3
DYNAMIQUE
25
26 CHAPITRE 3. DYNAMIQUE
des forces de surface. Si on fait tendre les dimensions linéaires du tétraèdre vers 0, les deux
premiers termes de l’équation de mouvement tendent vers 0 comme δV ∝ δA3/2 . L’égalité
est respectée quel que soit δV seulement si le coefficient de δA est nul, soit :
Dans cette expression, Tx (j) est la composante suivant l’axe x du vecteur contrainte qui
s’exerce sur une facette de normale j. Toutes les composantes de ce type constituent un
tenseur d’ordre deux, le tenseur des contraintes. L’équation 3.2 peut s’écrire également :
où les σij sont les composantes du tenseur des contraintes ; dans le membre de droite de (3.3),
on utilise la convention de sommation d’Einstein : lorsque le même indice est répété, on effec-
tue la somme sur toutes les valeurs possible de cet indice (par exemple, le produit scalaire a.b
s’écrit : ai bi ). Les composantes diagonales du tenseur sont les contraintes normales alors que
les composantes hors diagonale sont les contraintes tangentielles, ou contraintes de cisaille-
ment. Les composantes du tenseur des contraintes ne sont pas indépendantes. Considérons un
petit élément de volume parallélépipèdique, dont les dimensions sont dx, dy et dz. Ecrivons le
couple exercé par les contraintes sur cet élément de volume et, en particulier, la composante
suivant l’axe z : Γz = σxy (dydz)dx − σyx (dxdz)dy = (σxy − σyx )δV L’équation de mouvement,
en rotation, pour le petit élément de volume est :
dω
δI =Γ
dt
où δI est le moment d’inertie dont l’ordre de grandeur est δV 5/3 . Si on fait tendre les dimen-
sions linéaires de l’élément de volume vers 0, pour que son accélération angulaire reste finie,
il est nécessaire que Γz soit nul, ce qui impose : σxy = σyx . Il est évidemment possible de faire
3.1. FORCES DE SURFACE ET TENSEUR DES CONTRAINTES 27
Fig. 3.2 – Vecteurs contraintes et contraintes sur les facettes orientées perpendiculairement
aux vecteurs i et j.
le même raisonnement sur les autres composantes du couple. On en déduit que le tenseur des
contraintes est symétrique : σij = σji . Il n’y a donc que six composantes indépendantes. Il
faut noter que cette symétrie n’est pas une propriété générale : par exemple, le tenseur des
contraintes n’est pas symétrique dans un matériau magnétique, en présence d’un champ.
la forme suivante :
1
dij = 2K eij − ekk δij (3.5)
3
où eij est le tenseur des vitesses de déformation qui n’est autre que la partie symétrique du
gradient de vitesse : eij = 1/2(∂ui /∂xj + ∂uj /∂xi ) et ekk = divu est la trace de ce tenseur.
Le terme entre parenthèses dans 3.5 est le déviateur du tenseur des vitesses de déformation.
Le coefficient K qui apparaı̂t dans 3.5 est la viscosité dynamique η introduite précédemment.
En effet, considérons l’écoulement de cisaillement simple (voir fig. 1.6) où seule la composante
∂ux /∂y du gradient de vitesse est non nulle.La seule composante du taux de déformation non
nulle est : exy = 12 ∂u
∂y et sa trace est nulle : ekk = 0. La relation 3.5 donne la contrainte de
x
cisaillement : σxy = K ∂u ∂y . Cette dernière relation est précisément celle que nous avons utilisé
x
pour définir la viscosité dynamique (§ 1.4). Seule la partie symétrique du gradient de vitesse
apparaı̂t dans la relation constitutive 3.5. En effet, ainsi que nous l’avons vu dans la partie
2.7, la partie antisymétrique correspond à une rotation en bloc, sans déformation. Lorsque le
fluide est incompressible, divu = 0 et la relation 3.5 conduit à :
Fig. 3.4 – Contraintes sur l’élément de volume annulaire dans l’écoulement de Poiseuille.
∂p
p(x, r)2πr dr − p(x + dx, r)2πr dr = − 2πr dr dx
∂x
– les contraintes de cisaillement σrx sur les surfaces cylindriques :
∂(rσrx )
σrx (r + dr)2π(r + dr) dx − σrx (r)2πr dx = 2π dr dx
∂r
Notons que le signe des forces tangentes est imposé par le choix d’une normale n extérieure
à l’élément de volume : la normale n(r + dr) a la même orientation que l’axe r alors que la
normale n(r) a une orientation opposée. En conséquence le vecteur contrainte sur la facette
(r) a pour composantes : −σrr (r), −σxr (r). Nous cherchons ici une solution indépendante du
temps. Si la vitesse d’un élément de fluide est constante, la résultante des forces est nulle,
soit :
∂p 1 ∂(rσrx )
= (3.7)
∂x r ∂r
30 CHAPITRE 3. DYNAMIQUE
La contrainte de cisaillement est reliée au gradient de vitesse par : σxr = η∂ux /∂r. L’équation
3.7 devient donc :
∂p η ∂ ∂ux
= r (3.8)
∂x r ∂r ∂r
Examinons maintenant la résultante des forces s’exerçant sur un élément de fluide dans
la direction radiale. Prenons le même élément de volume que ci-dessus, mais limité par les
angles polaires θ et θ + dθ. Ecrivons la résultante des forces sur l’élément de volume projetée
sur la direction radiale :
dθ
−(r + dr) p(r + dr) dθ + r p(r) dθ + 2p(r) dr = 0
2
Les deux premiers termes du membre de gauche proviennent de la pression exercée sur les
faces cylindriques en r et r + dr. Le troisième terme provient de la pression exercée sur les
faces radiales en θ et θ + dθ. D’où :
∂p
=0 (3.9)
∂r
Si la pression ne dépend que de x et la vitesse ne dépend que de r, les deux membres de
l’équation 3.8 sont nécessairement égaux à une constante G qui est le gradient de pression
moyen le long de l’écoulement : G = ∆p/L. L’équation s’intègre une première fois en :
∂ux Gr A
= +
∂r 2η r
où A est une constante d’intégration. Pour assurer la continuité du gradient de vitesse (et
donc, des contraintes) sur l’axe du tube, il faut imposer A = 0. Une seconde intégration
conduit à : !
G r 2 − R2
ux = (3.10)
η 4
en tenant compte de la condition aux limites ux (R) = 0. Le profil de vitesse est parabolique,
avec une vitesse maximale sur l’axe égale à −GR2 /4η. Notons que, si le gradient de pression
est négatif, la vitesse est positive ; l’écoulement se fait bien de la région de forte pression vers
la région de faible pression. Le débit de fluide à travers le tube est donné par l’intégration du
profil de vitesse :
πR4 ∆p
Z R
Q = 2π ux rdr = (3.11)
0 8η L
Ce résultat, souvent appelé ”loi de Poiseuille1 ”, montre que le débit est proportionnel au
gradient de pression ∆p/L et inversement proportionnel à la viscosité dynamique du fluide.
Il dépend très fortement du diamètre du tube ; cette dépendance en puissance quatrième
du diamètre est une conséquence du profil de vitesse parabolique qui est lui-même une
conséquence de la condition de non glissement sur la paroi du tube. Une situation physique
très différente est le transport des électrons dans un conducteur électrique : la vitesse moyenne
des électrons est la même dans toute la section du conducteur ; la résistance du conducteur
est simplement inversement proportionnelle à sa section (πR2 ).
1
du nom du médecin français qui fut le premier à montrer expérimentalement la dépendance du débit en
puissance quatrième du rayon.
3.2. ECOULEMENTS SIMPLES 31
Lorsque le fluide est incompressible, cet accroissement de volume est nul, ce qui conduit à :
∂(rur ) ∂uθ
+ =0 (3.12)
∂r ∂θ
Le champ de vitesse étant indépendant de θ pour une raison de symétrie, l’équation 3.12
conduit à : ur = C/r. Sur les parois solides en r = Re et r = Ri la vitesse radiale est nulle (le
fluide ne peut traverser ces parois), elle est donc nulle dans tout l’écoulement.
Nous pouvons maintenant écrire l’équilibre des forces qui s’exercent sur l’élément de vo-
lume que nous avons considéré ci-dessus. Si l’écoulement reste stable, nous pouvons supposer
que chaque élément de fluide se déplace avec une vitesse tangentielle constante sur une tra-
jectoire circulaire. Un tel élément a une accélération centripète égale à u2θ /r. Dans la direction
radiale, le gradient de pression équilibre cette accélération centripète. Ecrivons la résultante
des forces sur l’élément de volume projetée sur la direction radiale :
dθ u2
−(r + dr) p(r + dr) dθ + r p(r) dθ + 2p(r) dr = −ρ θ r dr dθ
2 r
32 CHAPITRE 3. DYNAMIQUE
Les deux premiers termes du membre de gauche proviennent de la pression exercée sur les
faces cylindriques en r et r + dr. Le troisième terme provient de la pression exercée sur les
faces radiales en θ et θ + dθ. D’où :
∂p u2
=ρ θ (3.13)
∂r r
Dans la direction tangentielle, écrivons le couple résultant de l’action des contraintes tangen-
tielles, couple qui est nul puisque l’élément de volume se déplace à vitesse angulaire constante
(notons que la pression est indépendante de θ, elle n’apparaı̂t donc pas dans l’équation ci-
dessous) :
−(r + dr)2 σrθ (r + dr) dθ + r2 σrθ (r) dθ = 0
soit :
∂(r2 σrθ )
=0 (3.14)
∂r
Soit, σrθ = C/r2 La contrainte tangentielle est proportionnelle à la vitesse de déformation :
∂uθ uθ ∂ uθ
σrθ =η − = ηr
∂r r ∂r r
Il faut soustraire uθ /r au gradient de vitesse pour tenir compte du fait qu’une rotation en bloc
(rotation solide avec uθ = ωr) ne provoque pas de déformation. L’intégration de l’équation
de mouvement donne : uθ = A/r + Br, les constantes d’intégration A et B étant déterminées
par les conditions aux limites sur les parois : uθ (Ri ) = Ωi Ri et uθ (Re ) = Ωe Re :
(Ωe − Ωi )Ri2
σrθ (Re ) = 2η
Re2 − Ri2
D
Z Z Z
ρu dτ = f dτ + σn dS (3.17)
Dt V V Σ
où Σ est la surface délimitant le volume V , dS est un élément de surface de normale n, f est
la force exercée par unité de volume et σ le tenseur des contraintes. La dérivée temporelle
du premier membre est une dérivée lagrangienne, c’est-à-dire, en suivant le mouvement des
particules de fluide. La masse de l’élément deRfluideρdτ reste constante dans ce mouvement. Il
est donc possible d’écrire le premier terme : V ρ Du/Dt dτ . L’intégrale
R
des forces de surface
peut s’écrire, à l’aide du théorème d’Ostrogradsky sous la forme : V ∇.σ dτ où ∇.σ est la
divergence du tenseur des contraintes, un vecteur dont la composante i est : ∂σij /∂xj . En
faisant tendre le volume V vers zéro l’équation de mouvement devient :
Du
ρ = f + ∇.σ (3.18)
Dt
Maintenant, utilisons la décomposition de la dérivée lagrangienne de la vitesse en la somme
de la dérivée eulérienne et de l’accélération convective (équation2.1) En tenant compte de
l’expression du tenseur des contraintes pour un fluide newtonien en mouvement (équation
3.6), la contribution des forces de surface à la composante i de l’équation de mouvement
s’écrit :
∂σij ∂p ∂ 2 ui
=− +η
∂xj ∂xi ∂xj ∂xj
et l’équation de mouvement prend la forme :
∂u
ρ + ρu.∇u = −∇p + η∆u + f (3.19)
∂t
C’est l’équation de Navier-Stokes qui décrit le comportement des fluides newtoniens. Réécrivons
cette équation sous la forme suivante :
∂u 1 1
+ u.∇u = − ∇p + ν∆u + f (3.20)
∂t ρ ρ
normale à l’interface (fig. 3.6), où ζ,w1 et w2 sont respectivement la position de l’interface et
les vitesses normales dans chacun des fluides, cette condition cinématique s’écrit :
dζ
= w1 = w2 (3.22)
dt
En conclusion, la vitesse du fluide est continue à travers une interface. Examinons maintenant
la relation qui existe entre les contraintes de part et d’autre de l’interface. Considérons un
élément de volume placé à cheval sur l’interface, dont les faces sont parallèles à l’interface
et dont l’épaisseur, perpendiculairement à l’interface, est très petite. La résultante des forces
sur cet élément de volume est : [σij nj ]1 + [σij nj ]2 + tension de surface. Cette résultante est
nulle lorsqu’on fait tendre l’épaisseur de cet élément de volume vers 0. Prenons des axes x
ety confondus avec la tangente et la normale à l’interface ; alors n1 = (0, 1) et n2 = −n1 =
(0, −1). La résultante des forces tangentielles est : [σxy ]1 − [σxy ]2 dx . La résultante des forces
normales est : [σyy ]1 − [σyy ]2 dx . Il faut ajouter la contribution de la tension interfaciale
entre les deux fluides. La tension de surface γ est l’énergie qu’il faut fournir pour créer une
interface d’aire unité. On peut aussi considérer γ comme une force par unité de longueur,
s’exerçant dans le plan de l’interface et qui assure la cohésion de cette interface.
Fig. 3.7 – Ascension capillaire : à gauche, montée d’huile silicone dans des tubes de verre de
diamètres différents. A droite, répartition de pression dans la colonne de liquide.
Fig. 3.8 – Deux écoulements géométriquement similaires caractérisés par les longueurs L1 et
L2 et par les vitesses U1 et U2
des viscosités dynamiques. Lorsqu’un des fluides a une viscosité très petite devant celle de
l’autre fluide (cas d’une interface liquide-gaz), 3.26 se réduit à :∂ux /∂y = 0 dans le fluide le
plus visqueux : dans ce cas, le gradient de vitesse est nul sur l’interface.
U ∂u0 U 2 0 U 1
0
+ u .∇u0 − 2 ν∆‘u0 = − ∇p0 (3.27)
τ ∂t L L ρL
∂u0 ν
0
+ u0 .∇u0 − ∆‘u0 = −∇‘p0 (3.28)
∂t UL
où nous avons défini une pression adimensionnelle :p0 = p/ρU 2 . En effet, 1/2ρU 2 qui est
l’énergie cinétique (typique) par unité de volume a la dimension d’une pression. C’est ce
qu’on nomme la pression dynamique. L’équation de Navier Stokes ainsi écrite ne comporte
plus que des termes sans dimension et les paramètres physiques qui déterminent l’écoulement
apparaissent uniquement dans le rapport : ν/U L qui est l’inverse du nombre de Reynolds.
Si on obtient une solution de l’équation de Navier-Stokes avec des conditions aux limites
prescrites par U , L et par des combinaisons des variables d’espace sans dimension, cette
solution sera également valide si la vitesse caractéristique U , la longueur caractéristique L ou
38 CHAPITRE 3. DYNAMIQUE
la viscosité du fluide sont modifiées à condition que le nombre de Reynolds reste le même. Ces
écoulements ont une similitude dynamique (fig. 3.9).
Lorsqu’il n’y a pas de force en volume, les seuls paramètres qui caractérisent le fluide sont
sa viscosité dynamique et sa masse volumique. Le nombre de Reynolds est une estimation
du rapport entre les effets d’inertie et les effets de viscosité. On peut le voir également en
considérant l’importance relative des termes u0 .∇u0 et (ν/U L)∆‘u0 dans l’équation 3.28. Si
U et L sont convenablement choisis pour représenter l’écoulement, toutes les variables sans
dimension (avec des ‘) sont d’ordre unité, de telle sorte que u0 .∇u0 et ∆‘u0 sont du même
ordre de grandeur. Le rapport du terme inertiel u.∇u et du terme lié à la viscosité ν∆u, dans
l’équation de Navier-Stokes, est précisément le nombre de Reynolds.
Lorsque des effets physiques autres que l’inertie et la viscosité entrent en jeu, d’autres
paramètres de similitude apparaissent 2 . Par exemple, si on rajoute un terme de gravité
à l’équation 3.28, le rapport des effets inertiels sur les effets de gravité vaut, en ordre de
grandeur, U 2 /gL . C’est le nombre de Froude. Si l’on veut respecter l’importance relative
des effets inertiels et des effets de gravité dans un essai sur maquette, par exemple, il faut
travailler à nombre de Froude constant.
2
voir en annexe une liste non exhaustive de nombres sans dimension
Chapitre 4
39
40 CHAPITRE 4. FLUIDES NON NEWTONIENS
Fig. 4.1 – Exemples de liquides rhéofluidifiants. Rhéogrammes obtenus pour une i) solution
aqueuse de polyacrylamide, ii) du sang, iii) une suspension de particules de polymère (latex)
dans l’eau.
Fig. 4.2 – Viscosité en fonction du taux de cisaillement pour une solution aqueuse de poly-
acrylamide, du sang, une suspension de particules de polymère (latex) dans l’eau.
4.2. COMPORTEMENT NON LINÉAIRE 41
d’Ostwald Dans une certaine gamme de taux de cisaillement, on peut représenter la viscosité
comme une loi de puissance de γ̇, en particulier pour les polymères fondus :
où η0 est la viscosité à cisaillement nul, η∞ la viscosité à cisaillement infini, λ une constante
de temps, n un exposant de loi de puissance et a est un paramètre qui décrit la transition
entre le comportement à faible cisaillement et la région en loi de puissance. Encore une fois,
les différents coefficients sont déterminés de manière empirique et n’ont pas de signification
physique simple.
Fig. 4.3 – Exemple de fluide à seuil d’écoulement. Rhéogramme d’une suspension concentrée
de bauxite avec les contraintes seuils d’écoulement déterminées i) par un modèle de Bingham,
ii) par extrapolation d’un ajustement polynomial.
grandeur (fig. 4.4). Ce brutal ”épaississement” de la solution est dû à un changement de type
d’association entre les macromolécules : à faible taux de cisaillement, il y a essentiellement
des interactions intramoléculaires et, dans une gamme de concentration adéquate, un taux
de cisaillement élevé conduit à des interactions intermoléculaires et à la ”gélification” de la
solution.
dans ce cas, les déformations élastique et visqueuse s’additionnent et les contraintes sont
identiques, soit :
dγvisc dγelast 1 dσ σ
γ̇ = + = + (4.5)
dt dt E dt η
Les modèles de Kelvin et Maxwell ont évidemment des analogues en électricité : une résistance
et un condensateur soit en parallèle, soit en série. Les deux modèles font apparaı̂tre un temps
de relaxation caractéristique : τ = η/E qui est l’analogue du temps caractéristique RC en
électricité. Expérimentalement, le comportement viscoélastique peut être mis en évidence en
examinant l’évolution temporelle de la réponse du fluide. Il y a essentiellement trois types
d’expériences : le fluage (creep), la relaxation de contrainte et la sollicitation oscillante.
Fig. 4.5 – Modèle de Kelvin (à gauche) et modèle de Maxwell pour un fluide viscoélastique.
A temps long, le comportement est celui d’un fluide newtonien avec une viscosité η : la
déformation augmente linéairement avec le temps. La différence avec un fluide newtonien est
la présence d’une élasticité instantanée donnée par la complaisance élastique J.
f(t)
1/η
J
où les parties réelle et imaginaire de G∗ sont le module de conservation (storage modulus)
et le module de perte (loss modulus). On définit également une viscosité complexe η∗ telle
que :
σ(t) = η ∗ (ω)γ̇ (4.11)
les parties réelle et imaginaire de η∗ étant reliées aux modules de cisaillement par :
G00 G0
η∗ = −i
ω ω
Le module de conservation G0 caractérise la réponse en phase avec la déformation. Il est
associé à la réponse élastique. En revanche, le module de perte G00 est associé à la réponse de
type visqueux, en quadrature de phase par rapport à la déformation. La puissance mise en
jeu dans la déformation est, par unité de volume :P = σ γ̇ . En faisant la moyenne de cette
quantité sur un quart de période, de t = 0 à t = π/2ω, il vient :
ωγ02 0 ωγ02 00
P̄ = ± G (ω) + G (ω) (4.12)
π 2
Le premier terme change de signe tous les quarts de cycle : c’est l’énergie de déformation
élastique stockée puis restituée. Ce terme est proportionnel à la partie réelle du module de
cisaillement. Le second terme est toujours positif, c’est l’énergie dissipée par le frottement
visqueux. Il est proportionnel à la partie imaginaire du module. Le module de cisaillement
complexe est facilement calculé pour le modèle du liquide de Maxwell. Sa dépendance en
fréquence est analogue à celle de l’impédance d’un circuit RC :
ω2τ 2 ωτ η
G0 = E , G00 = E , η0 = (4.13)
1 + ω2τ 2 1 + ω2τ 2 1 + ω2τ 2
La réponse est de type élastique aux grandes fréquences (temps courts) et de type visqueuse
aux basses fréquences (temps longs).
Le modèle de Maxwell qui ne prend en compte qu’un seul temps de relaxation est incapable
de représenter correctement les propriétés de véritables liquides viscoélastiques. La figure ci-
dessous montre le module de conservation et le module de perte mesurés sur du polyéthylène
46 CHAPITRE 4. FLUIDES NON NEWTONIENS
0
10
-1 η'/η0
10
G'/G
G''/G
-2
10
-3
10
-4
10
0.01 0.1 1 10 100
ωτ
Fig. 4.9 – Modules de cisaillement pour du polyéthylène fondu. Les courbes en trait plein
sont obtenues d’après un modèle de Maxwell généralisé, à plusieurs temps de relaxation. D’
après H.M. Laun, Rheol. Acta, 17, 1 (1978)
4.4. ANISOTROPIE DES CONTRAINTES NORMALES 47
fondu. Les deux modules sont du même ordre de grandeur et augmentent continûment avec
la fréquence. Ce diagramme peut s’interpréter par une distribution assez large des temps de
relaxation. Ces temps de relaxation correspondent au différents modes de déformation de la
chaı̂ne polymère.
Un autre exemple est donné ci-dessous avec les modules de cisaillement de polystyrènes
linéaires de différentes masses moléculaires. Pour les plus grandes masses moléculaires, il ap-
paraı̂t une bande de fréquences dans laquelle G0 et G00 sont constants. L’existence de ce ” pla-
teau caoutchouteux ” est lié aux enchevêtrements qui se produisent entre des macromolécules
de grande masse. L’écoulement du matériau nécessite la ” reptation ” d’un polymère dans les
enchevêtrements imposés par les polymères environnants.
L’anisotropie des contraintes normales est un effet non-linéaire : à faible taux de cisaille-
ment, N1 et N2 sont des fonctions quadratiques de γ̇ . Pour refléter ce caractère non linéaire,
on définit deux coefficients d’anisotropie Ψ1 et Ψ2 tels que : N1 = −Ψ1 γ̇ 2 et N2 = −Ψ2 γ̇ 2 . En
général N1 est négatif et beaucoup plus grand en valeur absolue que N2 qui est généralement
positif.
L’apparition d’anisotropie des contraintes normales est lié au fait que l’écoulement de
cisaillement modifie la microstructure du fluide et la rend anisotrope. Prenons l’exemple d’une
solution de polymères : la macromolécule en solution a l’aspect d’une ”pelote” de fil contenue
dans une enveloppe sphérique. Lorsqu’elle est soumise à un cisaillement suffisamment fort,
cette pelote se déforme en un ellipsoı̈de dont le grand axe à tendance à tourner vers la direction
d’écoulement (cf. II,7 déformation dans les écoulements). L’élasticité du polymère, d’origine
essentiellement entropique, à tendance à ramener cet ellipsoı̈de vers une forme sphérique.
La force de rappel est maximale dans la direction de l’écoulement ; elle est responsable de
l’apparition d’une compression le long de l’écoulement. Ceci implique donc que σxx < σyy ,
soit N1 < 0. En revanche, il n’y a pas d’interprétation simple du signe de N2 . La figure
4.12 montre la dépendance en taux de cisaillement de la première différence des contraintes
normales pour deux solutions de polymère (polyacrylamide et polyisobutylène) et une solution
de surfactant. L’anisotropie des contraintes normales a deux manifestations spectaculaires :
l’ascension du fluide le long d’un barreau tournant (effet Weissenberg) et l’expansion du
jet sortant d’un orifice (fig. 4.13). Dans l’écoulement engendré par le cylindre tournant, la
vitesse est essentiellement azimuthale, avec un gradient radial. L’anisotropie des contraintes
normales conduit ici à : σθθ < σrr . Il y a une ”tension” le long des lignes de courant circulaires
qui tend à pousser le fluide vers le centre de rotation et donc à le faire monter le long du
cylindre tournant. Dans le cas du jet, l’expansion à la sortie de l’orifice est dûe à la relaxation
des contraintes normales σxx (x étant la direction de l’axe du tube) accumulées pendant
48 CHAPITRE 4. FLUIDES NON NEWTONIENS
Fig. 4.10 – Modules de cisaillement pour une série de polystyrènes linéaires de masses
moléculaires allant de 8900 (L9) à 580000 (L18). D’après S. Onogi, T. Masuda, K. Kitagawa,
Macromolecules 3, 109 (1970)
l’écoulement à l’intérieur du tube. Cet effet d’expansion intervient fréquemment dans les
procédés d’extrusion des polymères fondus.
50 CHAPITRE 4. FLUIDES NON NEWTONIENS
Fig. 4.13 – Effets de l’anisotropie des contraintes normales. Ascension d’une solution de
polyisobutylène le long d’un barreau tournant (à droite, photographie : J. Bico). Expansion
d’un jet de solution de polyacrylamide à la sortie d’un orifice (à gauche, photographie : R.E.
Evans).
Chapitre 5
LOIS DE CONSERVATION
∂(ρu) ∂ρ ∂u
=u +ρ (5.1)
∂t ∂t ∂t
et utilisons, d’une part, l’équation de mouvement (3.18)
qui relie l’accélération ”particulaire” Du/Dt aux forces en volume et aux contraintes ;
l’équation 5.1 devient :
∂(ρu) ∂ρ
=u − ρu.∇u + divσ + f (5.2)
∂t ∂t
D’autre part, réécrivons l’équation de conservation de la masse de cet élément de volume ,
sous la forme ”lagrangienne” :
∂ρ
+ ∇.(ρu) = 0 (5.3)
∂t
et 5.2 donne :
∂(ρu)
= −u∇.(ρu) − ρu.∇u + divσ + f (5.4)
∂t
soit, en notation indicielle pour la composante i :
∂(ρui ) ∂
= (−ρui uj + σij ) + fi (5.6)
∂t ∂xj
51
52 CHAPITRE 5. LOIS DE CONSERVATION
L’équation 5.6 n’est qu’une autre écriture de l’équation de mouvement. Elle ne fait aucune
hypothèse quant à la compressibilité ou à la loi de comportement ; elle est valide dans toutes les
circonstances. Le second membre de 5.6 fait apparaı̂tre la divergence du tenseur des contraintes
ainsi que la divergence du flux convectif de quantité de mouvement. L’expression ρui uj est
en effet la quantité de mouvement dans la direction i qui traverse, par unité de temps, une
surface unité dont la normale est parallèle à j et ce, uniquement sous l’effet de la convection
du fluide. La somme de ρui uj et de σij constitue le flux total de quantité de mouvement. En
pratique, l’équation de conservation de l’impulsion est surtout utilisée sous sa forme intégrale,
que nous allons établir maintenant. Intégrons 5.6 sur un volume V , fixe par rapport R
au repère
où
R
est définie la vitesse eulérienne u, en utilisant le théorème de la divergence : V ∇.A dV =
S A.n dS. Nous obtenons :
∂(ρui )
Z Z Z
dV = − (ρui uj − σij )nj dS + fi dV
V ∂t S V
où S est la surface limitant le volume V et n est la normale à S. Et, en utilisant le fait
que le volume V est fixe dans l’espace, en séparant le tenseur des contraintes en une partie
isotrope −pδij et un déviateur dij :
d
Z Z Z Z Z
ρui dV =− ρui uj nj dS + dij nj dS − pni dS + fi dV (5.7)
dt V S S S V
qui exprime un équilibre entre, d’une part, le flux convectif de quantité de mouvement à
travers la surface S et, d’autre part, l’intégrale des contraintes dûes à la présence du fluide
extérieur au volume V et l’intégrale sur S du potentiel équivalent au champ de force. Nous
verrons qu’un choix judicieux du volume de contrôle V permet d’estimer très simplement la
force sur des objets placés au contact d’un écoulement. L’équation de conservation sous la
forme 5.8 ne fait intervenir que des quantités calculées sur la surface limitant le volume de
contrôle ; il est inutile de connaı̂tre le champ de vitesse et le champ de pression à l’intérieur
de V .
Fig. 5.1 – Ecoulement dans une conduite coudée. Le volume de contrôle utilisé pour appliquer
la conservation de l’impulsion est limité par le trait pointillé.
où S est la réunion de S1 , S2 et Si . Soit encore, puisque les vecteurs unitaires n sont orientés
vers l’extérieur du volume de contrôle (n = −ñ) :
Z Z Z
ρui uj nj dS = − pni dS − pni dS − Fi (5.9)
S S1 S2
Les normales à S1 et S2 ont pour composantes respectives : (-1,0) et (cos α, sin α). La com-
posante suivant x de l’équation de conservation est :
ρ(−U12 S1 + U22 S2 cos α) = p1 S1 − p2 S2 cos α − Fx (5.10)
et la composant suivant y est :
ρU22 sin α = −p2 S2 sin α − Fy (5.11)
Il faut ajouter à ces deux équations la conservation du débit : U1 S1 = U2 S2 , ce qui donne :
Fx = p1 S1 − p2 S2 cos α + ρU2 S2 (U1 − U2 cos α) (5.12)
Fy = −(ρU22 + p2 )S2 sin α (5.13)
Si l’entrée et la sortie du coude ont la même section : S1 = S2 = Σ et U1 = U2 = U , alors les
équations 5.13 deviennent :
Fx = Σ[p1 − p2 cos α + ρU 2 (1 − cos α)] (5.14)
Fy = −Σ(ρU 2 + p2 ) sin α (5.15)
La composante de force Fy est celle qui permet la mise en mouvement des arroseurs rotatifs
qui sont faits de deux tubes coudés à leur extrémité et montés sur un axe de rotation vertical.
Lorsque les canalisations sont de grande dimensions et que le débit est très important comme
c’est le cas dans les conduites forcées d’usines hydroélectriques, les forces exercées sur un
coude de la canalisation peuvent être considérables. C’est pourquoi les conduites forcées sont
ancrées par des ouvrages de béton.
54 CHAPITRE 5. LOIS DE CONSERVATION
Enfin, en tenant compte de la condition d’incompressibilité (∇.u = 0), nous pouvons mettre
le premier terme du membre de droite de (5.19) sous la forme d’une divergence, soit :
" ! #
∂ec ρu2
= −∇. u + p − u.d − d.∇u + u.f (5.20)
∂t 2
Réécrivons cette équation d’évolution de l’énergie cinétique sous forme intégrale, en intégrant
chacun des termes sur un volume V fixe dans le repère ”eulérien” et en utilisant le théorème
de la divergence :
∂ ρu2
Z Z Z Z Z
ec dV =− u.n dS + (σ.u).n dS + u.f dV − σ.∇u dV (5.21)
∂t V S 2 S V V
∂ ∂
δW = (−pux ) dx dy + (σxy ux ) dy dx (5.22)
∂x ∂y
soit, en tenant compte de la condition d’incompressibilité qui s’écrit ici : ∂ux /∂x = 0 et en
exprimant le travail W par unité de volume :
∂p ∂σxy ∂ux
W = −ux + ux + σxy (5.23)
∂x ∂y ∂y
∂ux ∂p ∂σxy
ρ =− +
∂t ∂x ∂y
(il n’y a pas de force en volume et la condition d’incompressibilité fait que le terme non-linéaire
u.∇u est nul), ce qui conduit à :
!
∂ux ∂ux ∂ ρu2x ∂ux
W = ρux + σxy = + σxy (5.24)
∂t ∂y ∂t 2 ∂y
Le travail des forces exercées sur l’élément de volume comprend deux termes : le premier
est lié à la variation d’énergie cinétique et à l’accélération globale de cet élément, le second
correspond à l’acroissement d’énergie interne qui résulte de la dissipation d’énergie par vis-
cosité. Cette énergie dissipée provient du travail des contraintes de cisaillement lors de la
déformation de l’élément de fluide ; c’est pourquoi ce terme fait apparaı̂tre explicitement le
gradient de vitesse. En revanche, l’autre terme de l’équation 5.24 dans lequel apparaissent
les contraintes de cisaillement contribue à l’accélération globale. Ce terme fait apparaı̂tre la
différence de valeur de la contrainte de cisaillement sur les deux faces de l’élément distantes
de dy. Dans le cas où le fluide est newtonien et incompressible, le déviateur des contraintes
s’écrit : dij = 2ηeij et l’énergie dissipée par viscosité est, d’après l’équation 5.21, par unité de
volume :
∂ui
Edis = 2ηeij (5.25)
∂xj
En tenant compte de la symétrie du tenseur des taux de déformation eij ,l’expression 5.24 se
transforme en :
Edis = 2ηeij eij (5.26)
Dans le cas où il y a une seule composante non nulle du gradient de vitesse comme dans
l’écoulement de cisaillement simple, l’expression 5.26 exprime simplement le fait que l’énergie
dissipée par unité de volume est le produit de la viscosité dynamique par le carré du gradient
de vitesse.
56 CHAPITRE 5. LOIS DE CONSERVATION
L’énergie dissipée par viscosité contribue finalement à élever (très peu) la température du
fluide. Prenons par exemple un gradient de vitesse de 100 s−1 (variation de 1m/s sur 1cm)
dans l’eau : la dissipation d’énergie par unité de volume est 10 W/m3 . Si aucune énergie
n’était rayonnée par le fluide ou échangée avec les parois contenant l’écoulement, cet apport
d’énergie conduirait à une élévation de température de environ 2mK par s.
Pour déterminer correctement la répartition de température dans le fluide, il faudrait
rajouter dans le bilan énergétique des termes de transport de la chaleur dus à l’advection et
au rayonnement.
Lorsque l’écoulement est stationnaire, la dérivée eulérienne de l’énergie cinétique est nulle.
Ce qui veut dire que la gradient de la quantité H = ρu2 /2 + p + φ est partout orthogonal au
vecteur vitesse. Donc, si on se déplace en suivant une particule de fluide le long d’une ligne de
courant, la quantité H, qui est l’équivalent d’une intégrale première en mécanique du point
matériel, est constante. Cette relation est connue sous le nom de loi de Bernoulli :
ρu2
+ p + φ = C te le long d0 une ligne de courant (5.28)
2
Si la seule force en volume présente est la gravité, φ = ρgz et l’équation de Bernoulli
devient :
ρu2
+ p + ρgz = C te (5.29)
2
Tube de Pitot
Parmi les dispositifs qui utilisent les variations de pression décritent par la loi de Bernoulli
se trouve le tube de Pitot qui permet de mesurer la vitesse d’un écoulement de gaz. Le tube
de Pitot est représenté schématiquement sur la fig. 5.2 ; il se compose d’un tube de section
circulaire dont l’extrémité est profilée. Deux trous sont percés dans le tube pour mesurer la
pression, d’une part sur le nez du tube et, d’autre part, sur le corps cylindrique du tube. Les
deux prises de pression sont reliées à un manomètre différentiel.
Nous supposons que l’écoulement loin du tube est uniforme, avec une vitesse U et que l’axe
du tube est parallèle à U . Par raison de symétrie, il existe une ligne de courant, confondue
avec l’axe du tube qui se termine au point B. Ce point B est un point de stagnation, la vitesse
du fluide y est nulle, même dans l’hypothèse où le fluide est parfait. Appliquons la loi de
Bernoulli entre le point A, situé loin du tube, où la vitesse est égale à U et le point B où la
vitesse est nulle :
pA + ρU 2 /2 = pB (5.30)
5.2. CONSERVATION DE L’ÉNERGIE 57
La pression de stagnation (en B) est supérieure à la pression qui règne au sein de l’écoulement.
La différence est la quantité 1/2ρU 2 que l’on nomme la pression dynamique. Autour du
point A, l’écoulement n’est pas perturbé par le tube et les lignes de courant sont parallèles.
Il y a une seule composante de vitesse le long de l’axe x. Si nous utilisons l’équation de
mouvement (même en tenant compte des effet visqueux), elle donne sur les axes orthogonaux
à x : ∂p/∂y = ∂p/∂z = 0.
Dans un écoulement unidimensionnel, il n’y a pas de gradient de pression perpendicu-
lairement aux lignes de courant. En conséquence, dans l’écoulement qui nous intéresse ici :
pC = pA . Parce que l’extrémité du tube de Pitot est profilée, l’écoulement est peu perturbé
par le tube et, le long du tube, les lignes de courant restent parallèles à la direction moyenne
de l’écoulement. Pour la raison exposée ci-dessus, la pression au point E, sur le tube, est la
même que la pression au point D. La vitesse en E est nulle du fait de la viscosité du fluide.
Nous verrons plus loin que, dans certains cas, les effets visqueux ne sont ressentis que dans
une mince couche près d’une paroi solide, la couche limite. Pour le tube de Pitot, nous nous
trouvons dans cette situation et si nous choisissons le point D en dehors de la couche limite,
nous pouvons appliquer la loi de Bernoulli entre C et D :
pC + ρU 2 /2 = pD + ρU 2 /2 (5.31)
Le manomètre différentiel mesure l’écart de pression entre B et E qui est, compte tenu des
relations établies ci-dessus : ∆p = 1/2ρU 2 . Le tube de Pitot donne accès à la pression
dynamique qui varie proportionnellement au carré de la vitesse.
La loi de Bernoulli prend une forme particulière lorsque le champ de vitesse dérive d’un
potentiel Φ. Pour la retrouver, nous allons partir de l’équation d’Euler qui est l’équation de
mouvement des fluides non visqueux :
∂u 1 f
+ u.∇u = − ∇p + (5.32)
∂t ρ ρ
L’équation d’Euler est identique à l’équation de Navier-Stokes à ceci-près que le terme propor-
tionnel à la viscosité a disparu. Si les forces en volume dérivent d’un potentiel −φ, l’équation
d’Euler devient :
∂Φ
∇ ρ + ρu.∇u = −∇(p + φ) (5.33)
∂t
58 CHAPITRE 5. LOIS DE CONSERVATION
Fig. 5.3 – Ressaut hydraulique circulaire formé sur une surface plane à partir du jet d’un
robinet
En utilisant le fait que : u.∇u = ∇(u2 /2)−u∧∇∧u et que le champ de vitesse est irrotationnel,
l’équation (5.33) devient : !
∂Φ u2
∇ ρ +ρ +p+φ =0 (5.34)
∂t 2
c’est-à-dire que la quantité : ρ∂Φ/∂t + ρu2 /2 + p + φ est constante dans tout l’écoulement.
Si l’écoulement est stationnaire, on retrouve la loi de Bernoulli (5.28) mais généralisée à
l’ensemble de l’écoulement du fait du caractère irrotationnel de l’écoulement.
Fig. 5.4 – Ressaut hydraulique. Volume de contrôle utilisé pour la conservation de l’impulsion.
soit :
h21 h2
ρ(U22 h2 − U12 h1 ) = p0 (H − h1 ) + p0 h1 + ρg − p0 (H − h2 ) − p0 h2 + ρg 2 (5.36)
2 2
soit, encore : !
h21 h22
ρ(U22 h2 − U12 h1 ) = ρg − (5.37)
2 2
En tenant compte de la conservation du débit : U1 h1 = U2 h2 , l’équation (5.37) devient :
g h2
U12 = (h1 + h2 ) (5.38)
2 h1
avec une formule similaire pour U2 , en intervertissant les indices. Supposons que la hauteur h2
soit supérieure à h1 et comparons la vitesse
√ U1 donnée par (5.38) à la vitesse de propagation
des ondes de surface dans la section 1, gh1 :
h2 h2
U12 = gh1 1+ (5.39)
2h1 h1
60 CHAPITRE 5. LOIS DE CONSERVATION
dh dU
U +h =0 (5.40)
dx dx
La relation de Bernoulli appliquée sur la surface libre donne :
1 1
p0 + ρU02 + ρgh0 = p0 + ρU 2 + ρg(h + e) (5.41)
2 2
soit, en dérivant par rapport à x et en utilisant la conservation du débit :
dU h dU de
U +g − + =0 (5.42)
dx U dx dx
ou bien, en mettant en évidence l’écart entre la vitesse de l’écoulement et la vitesse des ondes
de surface :
1 dU 2 de
(U − gh) = −g (5.43)
U dx dx
Au point où l’obstacle est le plus haut, c’est-à-dire où de/dx = 0, l’équation (5.43) peut être
satisfaite soit i) en annulant la dérivée de la vitesse, soit ii) en annulant U 2 − gh. Supposons
maintenant que l’écoulement en amont de l’obstacle soit sous-critique (U02 < gh0 ) et exami-
nons les signes des différents termes de l’équation (5.43) qui sont imposés par la forme de
l’obstacle : de/dx est d’abord positif, puis nul, puis négatif.
5.3. APPLICATIONS DES LOIS DE CONSERVATION 61
i) ii)
de/dx (U 2 − gh)dU/dx U 2 − gh dU/dx dh/dx U 2 − gh dU/dx dh/dx
+ - - + - - + -
0 0 - 0 0 0 + -
- + - - + + + -
D’après les résultats indiqués dans le tableau ci-dessus, nous voyons que dans le pre-
mier cas, l’écoulement reste sous-critique, l’épaisseur de la couche de la fluide diminue puis
réaugmente et l’écoulement s’accélère sur la face amont de l’obstacle. En revanche, dans le
second cas, la vitesse augmente suffisamment pour que l’écoulement devienne supercritique
en aval de l’obstacle. La vitesse continue à augmenter en aval de l’obstacle. Plus loin en aval,
l’écoulement subit un ressaut hydraulique qui lui permet de redevenir sous-critique.
Il existe une analogie entre ces écoulements à surface libre, en ”eau peu profonde” où
la vitesse de propagation des ondes est liée à la hauteur d’eau et les écoulements de fluides
compressibles dans des tuyères. La densité du fluide joue alors le rôle de la hauteur d’eau et
le nombre de Mach, qui est le rapport de la vitesse du fluide à la vitesse du son, joue le même
rôle que le nombre de Froude. Si l’écoulement est subsonique (M < 1) en amont du col de la
tuyère, on peut avoir une onde de choc localisée au col de la tuyère.
62 CHAPITRE 5. LOIS DE CONSERVATION
Chapitre 6
ECOULEMENTS A PETITS
NOMBRES DE REYNOLDS
Nous allons maintenant examiner les circonstances dans lesquelles les effets visqueux sont
dominants et quelles sont les particularités des écoulements à faible nombre de Reynolds. La
définition de Re nous montre que nous pouvons rendre la viscosité prépondérante de trois
manières : i) : en diminuant la vitesse, ii) : en diminuant la taille de l’écoulement, iii) : en
augmentant la viscosité ou bien en combinant ces effets.
Parmi les écoulements avec des échelles de longueur très petites, mentionnons les écoulements
dans les milieux poreux (roches poreuses, colonnes de chromatographie) et les écoulements au-
tour de petites objets en suspension (micro-organismes, macromolécules, particules colloı̈dales).
Les dévelopements récents des microsystèmes mécaniques (MEMS) et des dispositifs d’ana-
lyse physico-chimique intégrés accroissent encore le champ d’application des écoulements à
petits nombres de Reynolds.
63
64 CHAPITRE 6. ECOULEMENTS A PETITS NOMBRES DE REYNOLDS
η∆u = ∇p (6.1)
La différence fondamentale entre les deux équations est que le terme non linéaire en vitesse a
disparu ; l’équation de Stokes est une équation aux dérivées partielles linéaire. Les écoulements
à petit nombres de Reynolds ont presque toujours lieu dans des conditions où le fluide est
incompressible. Le mouvement du fluide est donc spécifié par (6.1) et par l’équation de conser-
vation : ∇.u = 0. En combinant ces deux équations, il est possible de reformuler l’équation
de Stokes de deux manières :
– i) en prenant le rotationnel de (6.1), on obtient :
∆ω = 0 (6.2)
∆p = 0 (6.3)
Fig. 6.1 – réversibilité de l’écoulement de Couette (vue de dessus). Au départ (en haut
à gauche), on dessine un carré avec du colorant entre les deux cylindres. La position des
cylindres est repérée par deux petits triangles. La rotation du cylindre intérieur déforme
complètement le carré (en haut, à droite : θ= 20◦ , en bas à gauche,θ = 345◦ ). Ensuite,
on ramène le cylindre intérieur à son point de départ (en bas, à droite) ; le carré coloré se
reconstitue. Il est légèrement déformé par la diffusion.
66 CHAPITRE 6. ECOULEMENTS A PETITS NOMBRES DE REYNOLDS
En l’absence d’inertie, les lignes de courant peuvent être parcourues dans un sens ou dans
l’autre. Si u est solution de l’équation de Stokes, alors −u l’est aussi. Ce n’est plus le cas dès
l’instant où l’inertie du fluide joue un rôle. Sur la fig. 6.2 nous voyons les lignes de courant
dans un élargissement brusque (ou rétrécissement brusque selon la direction de l’écoulement).
A Re = 0, les lignes de courant sont les mêmes pour les deux sens d’écoulement. En revanche,
à Re = 50, l’écoulement dans le divergent forme un “jet” au centre de la partie large. Ce
jet n’est pas visible si l’écoulement est convergent : souffler ou aspirer dans un entonnoir ne
produit le même écoulement que si Re est très petit.
La réversibilité a également une conséquence sur la symétrie des lignes de courant. Considérons
l’écoulement autour d’un obstacle possédant un plan de symétrie (par exemple, le plan x = 0).
Si u(x, y, z) est solution de l’équation de Stokes, alors −u est également solution. En renver-
sant l’écoulement, la face amont est devenue la face aval et vice versa et comme l’obstacle est
symétrique, on doit obtenir les mêmes lignes de courant que dans la configuration initiale,
ce qui implique que : u(x, y, z) − − > −u(−x, y, z) = −u(x, y, z) On remarquera sur la fig.
1.9 qui montre l’écoulement autour d’un cylindre à Re = 1.5 que la symétrie entre l’amont
et l’aval est déjà brisée. Il faut effectivement des nombres de Reynolds très petits pour que
l’inertie du fluide ne se manifeste pas dans ce type d’écoulements.
Enfin, la réversibilité cinématique a des conséquences fondamentales sur les modes de
propulsion animale. Les organismes de très petite taille comme les bactéries et les sperma-
tozoı̈des vivent dans un monde où l’inertie est négligeable devant la viscosité. L’évolution a
donc conduit à des modes de propulsion utilisant des cils ou des flagelles (fig. 3.9) qui sont
radicalement différents des modes de propulsion des organismes plus grands qui tirent partie
de l’inertie du fluide1 .
Fig. 6.3 – additivité des solutions de l’équation de Stokes pour l’écoulement dans un canal.
sion (voir le calcul de cet écoulement dans le § III.2.1). En revanche, si une des parois est
mobile et s’il n’y a pas de gradient de pression, la solution est un écoulement avec un profil
de vitesse linéaire. L’addition des deux solutions (addition des champs de vitesse et addition
des gradients de pression) est également une solution de l’équation de Stokes. Elle correspond
à la présence d’un gradient de pression dans le canal et à un mouvement d’une des parois.
6.2 Lubrification
6.2.1 Principe de la lubrification
Une des circonstances importantes dans laquelle l’inertie du fluide peut être négligée
concerne les écoulements dits de lubrification. Ce terme recouvre les écoulements de fluides
visqueux confinés entre deux parois solides très proches en mouvement relatif. Les deux parois
délimitent un espace de très grand rapport d’aspect : l’épaisseur moyenne < h > est très pe-
tite devant la longueur L. De plus, si l’épaisseur h varie d’un point à un autre de l’écoulement,
nous nous restreignons au cas où cette variation est très lente, c’est-à-dire : dh/dx 1.
Cette géométrie particulière a deux conséquences :
– la composante longitudinale de vitesse u est beaucoup plus grande que la composante
transverse v. En effet, la conservation de la masse impose :
∂u ∂v u v
+ ≈ + =0 (6.4)
∂x ∂y L h
d’où :
L
u≈v v (6.5)
h
– la force qui s’exerce sur les parois est beaucoup plus grande dans la direction normale
à l’écoulement que dans la direction parallèle à l’écoulement.
RL
La force normale Fn est
l’intégrale de la pression sur une des parois solides : Fn = 0 (p − p0 ) dx ≈ (p − p0 )L.
Toujours en tenant compte du rapport d’aspect L/h 1, il est possible de déterminer
68 CHAPITRE 6. ECOULEMENTS A PETITS NOMBRES DE REYNOLDS
Fig. 6.5 – Tête de lecture vue de face (à gauche). Profils de vitesse dans une couche de liquide
d’épaisseur variable.
où le gradient de pression G ainsi que u dépendent, a priori, de x. En supposant que h varie
lentement (θ 1), donc que le champ de vitesse évolue également lentement avec x, nous
pouvons intégrer 6.10 en y comme si l’écoulement était unidimensionnel et comme si u ne
dépendait que de y. En se plaçant dans le repère où la tête est immobile et le disque se déplace,
les conditions aux limites sont : u = −U en y = 0 et u = 0 en y = h(x). Ce qui donne :
G 2 y
u= (y − yh) + U −1 (6.11)
2η h
Ce profil de vitesse est la superposition d’un profil parabolique dû au gradient de pression et
d’un profil linéaire dû au mouvement relatif des deux surfaces solides. En intégrant 6.11 sur
toute l’épaisseur, nous obtenons le débit de fluide qui est constant dans toute la longueur de
l’écoulement :
Gh3 U h
Z h
Q= udy = − − (6.12)
0 12η 2
d’où :
∂p ∂p dh 2Q U
G= = = −6η + 2 (6.13)
∂x ∂h dx h3 h
Le gradient de pression s’annule lorsque h = hm = −2Q/U (le débit est négatif parce que le
fluide se déplace dans la direction −x). Il est positif lorsque h est inférieur à hm et négatif si h
est supérieur à hm . Le profil de vitesse est linéaire lorsque G = 0. Si h est différent de hm , le
profil de vitesse est parabolique avec une concavité dont le signe dépend de G. En intégrant
6.13 en h et en prenant p = p0 en h = h0 , il vient :
6η 1 1 1 1
p − p0 = Q 2
− 2 +U − (6.14)
θ h h0 h h0
Si nous supposons qu’à l’autre extrémité du plan incliné, où h = h1 = h0 + θL, la pression
est aussi égale à p0 , l’équation 6.14 fixe le débit :
h 0 h1
Q = −U (6.15)
h0 + h1
La force de sustentation FN est obtenue par intégration de la surpression qui règne dans le
coin de fluide : Z L
6ηU h1 2(h1 − h0 )
FN = (p − p0 )dx = 2 ln − (6.16)
0 θ h0 h0 + h1
alors que la force tangentielle est obtenue par intégration de la contrainte de cisaillement :
Z L ∂u ηU
h1 3(h1 − h0 )
FT = η dx = −2 ln − (6.17)
0 ∂y θ h0 h0 + h1
L’ordre de grandeur de FN /FT est 1/θ soit L/(h1 − h0 ) 1. Le fait d’avoir un plan très
légèrement incliné permet d’engendrer une force normale très importante.
une relation simple entre la vitesse moyenne du fluide ū et le gradient de pression moyen Ḡ .
Dans chacun des pores qui constitue l’espace occupé par le fluide, l’écoulement est similaire
à un écoulement de Poiseuille, même si la géométrie du pore est plus complexe que celle d’un
tube de section circulaire. Le point essentiel est que de la vitesse moyenne u dans chacun
des pores est proportionnelle au gradient de pression local G : u ∝ (1/η)d2 G où d est une
longueur représentative du diamètre des pores. Si nous regardons maintenant l’écoulement
à une échelle beaucoup plus grande que celle des pores, mais qui peut être nettement plus
petite que les dimensions totales du milieu poreux, nous pouvons définir une vitesse moyenne
ū et un gradient de pression moyen Ḡ . Ces deux quantités sont obtenues par intégration de
u et g sur une longueur assez grande pour que les fluctuations dues à la variabilité des pores
disparaissent. L’intégration conserve la linéarité de la relation entre u et G et l’équation qui
en résulte est la loi de Darcy :
k
ū = − ∇p̄ (6.18)
η
où k est un paramètre qui caractérise le milieu poreux et qui a la dimension du carré d’une
longueur ; c’est la perméabilité du milieu poreux. Notons que la loi de Darcy, écrite sous la
forme suivante :
ū
η = −∇p̄ (6.19)
k
est analogue à l’équation de Stokes, le terme u/k remplaçant ∆u. Pour une géométrie donnée
(par exemple un empilement régulier de sphères), la perméabilité est proportionnelle au carré
de la dimension des objets qui constituent le milieu poreux. Exemples de perméabilités :
– sable : 2 × 10−7 à 2 × 10−7 cm2
– grès : 5 × 10−12 à 3 × 10−8 cm2
– sols : 3 × 10−9 à 1 × 10−7 cm2
– cigarette : 10−5 cm2
Pour les très faibles perméabilités, en particuliers les sols, on utilise une unité de perméabilité
adaptée, le Darcy égal à 1 micron carré
Le champ de vitesse moyenné dérive d’un potentiel proportionnel à la pression moyennée.
Cette propriété simple permet de résoudre assez aisément les problèmes d’écoulement dans
les sols : la condition d’incompressibilité associée à la loi de Darcy implique que le champ de
pression obéisse à l’équation de Laplace. Il suffit donc en principe de résoudre l’équation de
Laplace avec les conditions aux limites appropriées.
kρgh20
L= (6.23)
2ηQ
Si le drain (où règne la pression p0 , ce qui implique h(l) = 0) est placé à une distance l de la
face amont de la digue, le débit d’eau infiltrée est fixé par (6.22) :
kρgh20
Q= (6.24)
2ηl
On pourrait retrouver le résultat ci-dessus par un raisonnement dimensionnel : l’ordre de gran-
deur du gradient de pression à travers la digue est : ∇p ≈ ρgh 0
l . La vitesse moyenne est donnée
k
par la loi de Darcy : u = η ∇p et le débit est de l’ordre de Q ≈ uh0 . Les résultats énoncés
ci-dessus ne sont valides que si le champ de vitesse reste approximativement unidimensionnel,
c’est-à-dire si dh/dx reste petit devant 1. En effet, la surface libre étant à pression constante
il s’agit d’une ligne de courant. La surface inférieure de la digue (z = 0) est également une
ligne de courant. La ligne de courant la plus inclinée sur l’horizontale est la surface libre et le
rapport uy /ux est donné par la pente de la surface libre dh/dx .
entre les deux extrémités du poreux. Nous appliquons la loi de Poiseuille qui donne le débit
dans chaque tube de diamètre d :
πd4 ∆p
q= (6.25)
128η T L
Le débit total dans le milieu poreux est : Q = N q où N est le nombre total de tubes et la
vitesse moyenne est : ū = nq où n est le nombre de tubes par unité de surface (sur une coupe
du poreux perpendiculairement à l’écoulement). Exprimons maintenant la perméabilité du
milieu en fonction de sa porosité α, de sa surface spécifique σ et de la tortuosité. La porosité
est la fraction de volume occupée par le fluide. La surface spécifique est l’aire de contact
entre le fluide et le solide par unité de volume. Dans notre modèle de tubes : α = nπd2 /4 et
σ = nπdT , ce qui donne une perméabilité telle que :
α3
k= (6.26)
2σ 2 T 2
Ce résultat est connu sous le nom de relation de Cozeny-Karman. Il n’est pas restreint à
un modèle de tubes et s’applique correctement à un certain nombre de milieux poreux. Mais
il est souvent incorrect pour des distributions de particules (ou de pores) très larges, pour
des particules non sphériques. Il existe évidemment d’autres modèles plus sophistiqués qui
rendent compte plus précisément des perméabilités mesurées.
Nous avons parlé jusqu’à présent d’écoulements monophasiques dans le milieux poreux
( au sens où il y a une seule phase fluide). Mais en hydrologie et en génie pétrolier, on
est toujours confronté à des écoulements multiphasiques (eau-air ou huile-eau). La présence
d’interfaces fluides ajoute encore à la complexité du problème. Mentionnons simplement que
la répartition de pression est considérablement modifiée par le pression capillaire : pc ≈ γ/d ,
où γ est la tension interfaciale, et que la forme globale (à une échelle plus grande que le pores)
de l’interface entre les deux phases peut être différente selon les conditions de déplacement
des fluides.
6.4. ECOULEMENT AUTOUR D’UNE SPHÈRE. SUSPENSIONS 73
P δρga2
Used ≈ ≈ (6.27)
ηa η
Ce raisonnement simple nous montre que la vitesse de sédimentation varie comme le carré
du rayon de la particule. La résolution complète de l’équation de Stokes est assez longue et
nous allons simplement donner les résultats du calcul. Dans le référentiel où la sphère est en
mouvement à une vitesse U et le fluide à l’infini immobile, le champ de vitesse est donné par :
! !
3a a3 3a a3
ur = U cos φ − 3 et uφ − U sin φ + 3 (6.28)
2r 2r 4r 4r
où r et φ sont les coordonnées polaires définies par le centre de la sphère et l’axe x suivant
lequel la sphère se déplace. Les lignes de courant correspondant au champ de vitesse donné
par (6.28) sont représentées sur la figure 6.8. Elles correspondent à une fonction de courant :
!
2 3a
2 a3
ψ = U r sin φ − 3
4r 4r
Pour obtenir le champ de vitesse dans le repère où la sphère est immobile, il suffit d’ajouter
−U partout à la vitesse, ce qui correspond à ajouter −1/2U r2 sin2 φ à la fonction de courant.
Les lignes de courant correspondantes sont représentées sur la fig. 6.9. Il faut noter que la
perturbation engendrée par la sphère décroı̂t très lentement (en 1/r) à grande distance. En
revanche, dans un écoulement à nombre de Reynolds élevé, le sillage d’un objet en mouvement
s’atténue très rapidement (dans la direction normale à l’écoulement). Cette lente décroissance
de la perturbation à Re 1 fait que dans une suspension les particules interagissent forte-
ment entre elles dès l’instant où la concentration dépasse quelques % en volume. Ce sont
74 CHAPITRE 6. ECOULEMENTS A PETITS NOMBRES DE REYNOLDS
2 2
1.8
1.6
1
1.4
1.2
1
0.5
0.8
0.6
0.4
0.1 0.2 0.2
0
Fig. 6.8 – écoulement à petit Re autour d’une sphère. Lignes de courant dans le repère où le
fluide est immobile à l’infini. Les valeurs de ψ sont normalisées par U a2 .
-2.8 -2.6
-2.4
-2.2
-2
-1.8
-1.6
-1.4
-1.2
-1
-0.8
-0.6
-0.4
-0.2
-0.2
-0.6
Fig. 6.9 – écoulement à petit Re autour d’une sphère. Lignes de courant dans le repère où la
sphère est immobile.
6.4. ECOULEMENT AUTOUR D’UNE SPHÈRE. SUSPENSIONS 75
des interactions hydrodynamiques dues au mouvement du fluide entre les particules et qui se
rajoutent aux autres interactions (électrostatiques par exemple).
A partir du champ de vitesse (6.28) on calcule les contraintes à la surface de la sphère et
la force de traı̂née :
T = 6πηaU (6.29)
2 δρga2
Used = (6.30)
9 η
4πηLUn 2πηLUt
Fn = Ft = (6.31)
ln(L/a) + 0.5 ln(L/a) − 0.5
On notera que pour les très grands allongements ln(L/a) 1, la résistance au déplacement
orthogonal à l’axe est deux fois plus grande que la résistance au déplacement longitudinal.
Cette anisotropie des résistances implique que la force de traı̂née n’est pas colinéaire à la
vitesse lorsque l’axe du bâtonnet est incliné par rapport à la direction de déplacement (fig.
6.10).
Fn
F
Ut
Ft
Un
Fig. 6.10 – Décomposition des composantes de vitesse et de force sur un objet allongé à petit
nombre de Reynolds.
76 CHAPITRE 6. ECOULEMENTS A PETITS NOMBRES DE REYNOLDS
Fig. 6.11 – Ligne passant au sein d’une suspension et interceptant les particules solides.
ce qui est en accord raisonnable avec la formule exacte. La formule 6.32 peut également
être appliquée à des solutions de polymères flexibles. Dans les conditions physico-chimiques
ou la chaı̂ne polymère forme une pelote contenue dans une sphère, l’écoulement du solvant
est modifié pratiquement comme si la pelote était une sphère dure. Le rayon de cette sphère
équivalente (rayon hydrodynamique RH ) peut être relié par des calculs de physique statistique
à la longueur de la macromolécule. Ainsi, la mesure de la viscosité de solutions diluées est un
moyen simple d’estimer la masse moléculaire d’un polymère. Lorsque la fraction volumique
solide dépasse quelques %, l’augmentation de viscosité devient non linéaire. La viscosité finit
par diverger si la fraction solide approche de l’empilement compact : le liquide ne se trouve
plus que dans de minces films qui permettent de lubrifier le contact entre les grains, comme
dans du sable humide.
Chapitre 7
u2 ∂p
ρ = (7.2)
R ∂r
ce qui montre que la pression augmente lorsqu’on s’éloigne du centre de courbure des lignes
de courant. Nous retrouvons également le fait qu’il n’y a pas de gradient de pression perpen-
diculairement aux lignes de courant si celles-ci sont rectilignes (R infini). Afin de connaı̂tre
la répartition complète de pression dans un écoulement de fluide parfait, nous pouvons donc
appliquer la loi de Bernoulli sur une ligne de courant et utiliser la relation 7.2 pour passer
d’une ligne de courant à l’autre. Une manifestation évidente du gradient de pression radial
lié à la courbure des lignes de courant est la déformation de la surface libre d’un liquide
77
78 CHAPITRE 7. ECOULEMENTS OÙ LA VISCOSITÉ EST NÉGLIGEABLE
Fig. 7.2 – Récipient en rotation rempli d’eau. La courbe en trait noir est la forme théorique
de la surface libre.
contenu dans un récipient cylindrique en rotation. Si on attend assez longtemps après la mise
en rotation du récipient, tout le liquide tourne “en bloc” avec un champ de vitesse uθ = Ωr.
Lorsque le fluide est en “rotation solide”, il n’y a pas de déformation des éléments de
fluide et, même si le fluide est visqueux, il n’y a pas de contraintes liées à la viscosité et
les équations de mouvement se ramènent à :ρu2θ /R = ∂p/∂r dans la direction radiale et :
−ρg = ∂p/∂zdans la direction verticale. Dans la direction radiale, la pression est donnée par :
p(r, z) = p(0, z) + 1/2ρΩ2 r2 .Sachant qu’à la surface libre, définie par z = ζ(r) la pression est
constante et égale à p0 , on obtient :p0 + ρgζ(0) + 1/2ρΩ2 r2 = p0 + ρgζ(r), d’où : ζ(r) − ζ(0) =
Ω2 r2 /2g. La forme de la surface libre est un paraboloı̈de de révolution.
Fig. 7.3 – Sphère sustentée par un jet d’air. Le poids P de la sphère est équilibré par la
traı̂née T et par la force résultant du gradient de pression radial.
La vitesse est orthogonale aux lignes équipotentielles φ = Cte et tangente aux lignes de
courant ψ = Cte. Les équipotentielles et les lignes de courant constituent donc des réseaux
de courbes orthogonales. Nous allons examiner quelques solutions simples de l’équation de
Laplace.
Tourbillon
Les lignes de courant sont circulaires. Le champ de vitesse est ur = 0,uθ = Γ/2πr. Le
potentiel des vitesses correspondant est donné par : uθ = 1/r∂φ/∂θ, soit :
Γθ
φ= (7.5)
2π
Les équipotentielles sont des droites θ = Cte. La fonction de courant est donnée par : uθ =
1/r∂φ/∂r, d’où :
Γ r
ψ = − ln (7.6)
2π a
Les lignes de courant sont des cercles espacés “exponentiellement”. La circulation de la vitesse
sur un cercle de rayon r est :
Z Z 2π Γ
C= uθ dl = rdθ = Γ (7.7)
0 2πr
Le paramètre Γ est donc la circulation associée au tourbillon. Cette circulation est indépendante
du rayon du cercle. En conséquence, le flux du rotationnel de la vitesse sur une surface limitée
par deux cercles de rayon quelconque centrées en O est nul. L’écoulement est bien irrotation-
nel, sauf en r = 0 où il existe une singularité de la vorticité. Cette singularité est responsable
de la circulation non nulle sur un contour qui entoure le centre du tourbillon. Cette situation
est absolument analogue au champ magnétique créé par un fil rectiligne parcouru par un
courant.
On peut également noter que le potentiel définit par (7.5) n’est pas univoque. En tournant
plusieurs fois autour du centre du tourbillon, on obtient des valeurs différentes du potentiel
7.2. ECOULEMENTS POTENTIELS 81
Source
Une source (ou un puits) est un écoulement purement radial dont le débit total est Q.
Q
Le champ de vitesse est : ur = 2πr , uθ = 0 . Si Q est positif, l’écoulement diverge depuis
le centre (source) ; si Q est négatif, l’écoulement converge (puits). Le potentiel des vitesses
correspondant est donné par : ur = ∂φ/∂r , d’où :
Q r
φ= ln (7.8)
2π a
La fonction de courant est donnée par : ur = 1r ∂ψ/∂θ , d’où : ψ = Qθ 2π . Remarquons que le
potentiel et la fonction des courants ont la même forme que pour le tourbillon, mais leur rôles
sont inversés. La source est, en quelque sorte, l’écoulement dual du tourbillon.
Dipôle
De la même manière qu’en électrostatique où deux charges proches de signes opposés
constituent un dipôle, nous pouvons fabriquer un dipôle en rapprochant une source et un
puits de débits opposés. Le potentiel des vitesses pour le dipôle est la somme du potentiel du
puits et de la source, soit :
Q rs rp
φ = φs + φp = ln − ln (7.9)
2π a a
où rs est la distance à la source et rp la distance au puits. En faisant tendre la distance d
entre puits et source vers 0, tout en gardant le produit p = dQ constant, les distances rs et rp
82 CHAPITRE 7. ECOULEMENTS OÙ LA VISCOSITÉ EST NÉGLIGEABLE
Fig. 7.6 – écoulement créé par un dipôle. Les lignes de courant sont des ellipses (en trait
pointillé)
p cos θ p
φ = Ux − = Ur − cos θ (7.12)
2πr 2πr
Le champ de vitesse correspondant est :
p p
ur = U + 2
cos θ uθ = − U − sin θ (7.13)
2πr 2πr2
7.2. ECOULEMENTS POTENTIELS 83
3.5
2.5
1.5
-0.2
-0.4
1
-0.6
0.2 0.2
-0.8
0.5 0.4 0.4
0.6 0.6
0.8 0.8
0
Fig. 7.7 – écoulement potentiel autour d’un cylindre. Lignes de courant ( ψ normalisée par
U a) en trait plein et isobares (pression normalisée par la pression dynamique) en pointillés.
Γθ A.r 1
φ(r) = + c ln r + c1 2 + O (7.19)
2π r r2
Le premier terme du développement est le potentiel d’un tourbillon, il correspond à l’existence
possible d’une circulation autour de l’obstacle. Le second terme est le potentiel d’une source.
L’intégrale sur un contour fermé de l’écoulement lié à ce terme de source est un débit c. En
raison de la condition de vitesse normale nulle imposée sur le corps solide, ce débit doit être nul.
Le terme suivant est le potentiel d’un dipôle et il est possible de poursuivre le développement
par des termes multipolaires. A grande distance, le terme dipolaire domine les termes d’ordre
plus élevé. Si la circulation Γ n’est pas nulle, sa contribution (décroissant en 1/r) au champ
de vitesse est dominante. En revanche, si la circulation est nulle, le terme dipolaire donne la
contribution dominante (en 1/r2 ) au champ de vitesse. Nous avons vu que, dans le cas d’un
cylindre, le développement (7.19) donne la solution exacte de l’équation de Laplace. Dans un
écoulement tridimensionnel, le potentiel peut être développé en harmoniques sphériques :
c A.r 1
φ(r) = + c1 3 + O (7.20)
r r r3
Le premier terme de ce développement est un terme de source qui est nul pour la même raison
que dans un écoulement bidimensionnel. Le second terme est le potentiel d’un dipôle à trois
dimensions. Ce terme dipolaire est dominant à grande distance.
Fig. 7.8 – volume de contrôle utilisé pour calculer la force sur un corps solide.
cylindre est remplacé par une sphère. Puisqu’il n’y a pas ici de contraintes engendrées
R
par
la viscosité, F est l’intégrale de la pression sur la surface Sc du corps : F = Sc pñdS où ñ
est à la normale à Sc orientée vers le fluide. D’autre part, la conservation de la quantité de
mouvement appliqué au volume limité par Sc et S donne :
Z Z Z
ρu(u.n)dS + pndS = f dV (7.21)
S+Sc S+Sc V
où f est la force par unité de volume exercée sur le fluide (la gravité par exemple) et n la
normale à S + Sc orientée vers l’extérieur du volume de contrôle. A la surface du corps solide,
la composante normale de vitesse est nulle et le flux de quantité de mouvement à travers cette
surface est donc nul. En supposant que la force en volume est nulle (l’ajout de la force de
gravité donnerait la poussée d’Archimède exercée sur le corps), l’équation de conservation de
l’impulsion devient : Z Z
ρu(u.n)dS + pndS = −F (7.22)
S S
Décomposons maintenant le champ de vitesse u en la somme de la vitesse à l’infini U et d’une
perturbation v due à l’obstacle et utilisons la loi de Bernoulli pour évaluer la pression :
1 1
p + ρ(U + v)2 = p∞ + ρU 2 (7.23)
2 2
Si la surface S est placée suffisamment loin de l’obstacle, la perturbation v est petite
devant la vitesse moyenne U et il est possible de négliger le terme en v 2 dans le membre de
gauche de (7.23), d’où :
p − p∞ ≈ −ρv.U (7.24)
En reportant cette expression de la pression dans (7.22), il vient :
Z Z Z Z Z
F= p∞ ndS − ρ(v.U)ndS + ρUU.ndS + ρUv.ndS + ρvU.ndS (7.25)
S S S S S
Les
R
intégrales de p∞ et U (qui sont constants) sur le contour fermé S sont nulles. L’intégrale
S ρUv.ndS est également nulle ; c’est, au facteur U près, l’intégrale de la perturbation v sur
la surface S, c’est-à-dire le débit de fluide à travers S associé à la perturbation. Nous avons
86 CHAPITRE 7. ECOULEMENTS OÙ LA VISCOSITÉ EST NÉGLIGEABLE
vu que la présence du corps solide empêche d’avoir un terme de source pour le potentiel de
perturbation. Ce débit est donc nul. Finalement, la force exercée sur le solide est :
Z Z Z
F=− ρ(v.U)ndS + ρvU.ndS = ρ[(U.n)v − (v.U)n]dS (7.26)
S S S
Cette dernière expression montre que la force F est toujours orthogonale à la direction
moyenne de l’écoulement. Il n’y a pas de force de traı̂née dans un écoulement potentiel. Nous
retrouvons sous forme générale le résultat obtenu pour l’écoulement autour d’un cylindre.
Dans un écoulement tridimensionnel autour d’un corps de dimensions finies, le terme domi-
nant du potentiel des vitesses est le terme dipolaire en 1/r2 . Le champ de vitesse correspondant
décroı̂t en 1/r3 . L’intégrale de cette perturbation sur une sphère de surface proportionnelle à
r2 décroı̂t comme 1/r. Il est possible de placer la surface S arbitrairement loin et l’intégrale
de v est nulle. La force de portance (normale à l’écoulement moyen) est donc aussi nulle dans
ce cas. Dans un écoulement bidimensionnel, en présence d’une circulation autour du corps
solide, c’est ce terme de circulation qui domine la perturbation v à grande distance. Pour les
mêmes raisons qu’à trois dimensions, la contribution du terme dipolaire à la force F est nulle.
Le champ de vitesse v est donné par le potentiel d’un tourbillon (7.5) :
Γ
v = ∇φ = ∇θ (7.28)
2π
et, en choisissant S comme un cercle de rayon r, la normale n a pour composantes cos θ et
sin θ. La composante Fy s’exprime de la manière suivante, pour un écoulement moyen dirigé
suivant l’axe x :
Γ
Z 2π
∂θ ∂θ
Fy = −ρU cos θ − sin θ rdθ = −ρU Γ (7.29)
2π 0 ∂y ∂x
Ce dernier résultat qui montre que la portance est proportionnelle au produit de la vitesse
moyenne et de la circulation, est connu sous le nom de relation de Kutta-Joukovski. Il faut
noter que la vitesse U est exprimée dans un repère où le corps solide est immobile ; U est
la vitesse du fluide à l’infini. Nous pouvons interpréter simplement le signe de la force de
portance en utilisant la loi de Bernoulli. Supposons que l’écoulement moyen du fluide se
fasse de droite à gauche, soit : U = (−U, 0) et que la circulation Γ soit positive (dans le
sens trigonométrique). Au dessus du solide, l’écoulement créé par la circulation se rajoute à
l’écoulement moyen. En dessous, il s’oppose à l’écoulement moyen. La vitesse du fluide est
donc plus grande au-dessus de l’obstacle qu’en dessous. En application de la loi de Bernoulli,
la pression est plus basse au-dessus de l’obstacle. Donc la force résultante est dirigée vers le
haut (Fy positif, en accord avec (7.29) pour une vitesse moyenne négative et une circulation
positive.)
La portance développée sur des ailes ou des voiles est donc liée à l’existence d’une cir-
culation autour de ces profils. Nous n’avons pas évoqué jusqu’à maintenant la façon dont
cette circulation s’établit. En réalité, la viscosité joue un rôle déterminant dans ce phénomène
transitoire sur lequel nous reviendrons un peu plus loin. Un cylindre ou une sphère en rota-
tion (comme une balle de tennis frappée avec un effet) sont également soumis à une force de
7.4. CONSERVATION DE LA CIRCULATION. THÉORÈME DE KELVIN. 87
Fig. 7.9 – Portance engendrée par un écoulement bidimensionnel couplé à une circulation Γ
autour de l’obstacle.
portance. Là encore, la viscosité joue un rôle important : la surface solide en rotation entraı̂ne
le fluide environnant qui doit respecter la condition de non glissement sur la surface et un
écoulement tourbillonnaire est ainsi créé. Dans certaines conditions, le champ de vitesse réel
est peu différent de celui déterminé par une théorie “potentielle” et la force de portance réelle
est très voisine de celle prédite par la relation de Kutta-Joukovski. Les cylindres tournants
ont été effectivement utilisés comme “surfaces portantes” sur un navire imaginé par Flettner
dans les années 20 : deux grands cylindres verticaux entraı̂nés par des moteurs remplaçaient
les voiles traditionnelles.
Ddl 1
I I I
u. = u.∇u.dl = ∇(u2 ).dl (7.31)
C Dt C C 2
88 CHAPITRE 7. ECOULEMENTS OÙ LA VISCOSITÉ EST NÉGLIGEABLE
C’est à nouveau l’intégrale d’un gradient sur un contour fermé. Donc la variation de circulation
sur un contour fermé qui suit l’écoulement est nulle :
DΓ
=0 (7.32)
Dt
Ce résultat, qui constitue le théorème de Kelvin, n’est valide que si i) le fluide n’est pas
visqueux, ii) si la masse volumique est constante et iii) si les forces en volume dérivent d’un
potentiel.
Fig. 7.10 – écoulement potentiel autour d’un profil d’aile, sans circulation.
Fig. 7.11 – écoulement potentiel autour d’un profil d’aile avec une circulation assurant une
vitesse finie au bord de fuite.
0
p'-p'0
-1
-2
-3
0.0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0
x/c
Fig. 7.12 – répartition de pression sur un profil d’aile avec un angle d’incidence de 7◦ en
fonction de la position le long du profil. c est la longueur du profil (corde). Cercles : pression
sur l’intrados. Triangles : pression sur l’extrados.
90 CHAPITRE 7. ECOULEMENTS OÙ LA VISCOSITÉ EST NÉGLIGEABLE
Fig. 7.13 – visualisation par des filets colorés de l’écoulement autour d’un profil d’aile en
incidence.
Lorsque la vitesse moyenne change ou bien lorsque l’incidence du profil est modifiée, la
force de portance change. La circulation autour de l’aile doit donc changer. Or, d’après le
théorème de Kelvin, si les effets visqueux sont négligeables, la circulation sur un contour qui
suit le mouvement du fluide doit être constante. Le changement de circulation autour d’un
profil portant doit s’accompagner d’un changement de circulation exactement opposé dans le
fluide qui est emporté dans le sillage du profil. Cette conservation globale de la circulation
est illustrée sur la fig. 7.13.
Dans l’écoulement photographié sur la fig. 7.13, la vitesse moyenne a été brusquement
modifiée, ce qui a entraı̂né une modification de la circulation autour du profil d’aile. Pour
compenser ce changement, un tourbillon de circulation opposée se crée au bord de fuite et
se détache du profil. La circulation autour des deux rectangles noirs dessinés sur la fig. 7.13
(autour de l’aile et autour du tourbillon détaché) est telle que la circulation globale est resté
constante pendant la modification de l’écoulement moyen. Pour la même raison, lorsqu’un
profil portant est mis en mouvement, il faut détacher un tourbillon derrière le profil afin de
permettre l’établissement de la portance.
Chapitre 8
COUCHES LIMITES
91
92 CHAPITRE 8. COUCHES LIMITES
Fig. 8.1 – Couche limite autour d’une plaque plane de longueur l, dans le cas où U l/ν est
d’ordre unité et dans le cas où U l/ν est très grand.
n’est pas nulle. L’écoulement moyen s’oppose à l’extension de cette couche vers l’amont. En
revanche, il favorise son développement vers l’aval. Contrairement au cas de la plaque infinie,
nous pouvons atteindre ici un état stationnaire pour le transport de la vorticité et de la
quantité de mouvement. Cet état stationnaire va définir l’épaisseur de la couche limite. Le
temps moyen mis par un élément de fluide pour parcourir la totalité de la plaque est l/U .
Pendant ce temps, la viscosité permet à la quantité de mouvement de diffuser sur une distance
δ = (νl/U )1/2 = lRe−1/2 , si nous calculons le nombre de Reynolds sur la longueur de la plaque.
Si le nombre de Reynolds ainsi calculé est suffisamment grand, l’épaisseur δ sera petite devant
la longueur l de la plaque. En dehors de la couche limite, l’écoulement reste irrotationnel et les
effets visqueux sont négligeables. Ce raisonnement s’applique à tout corps solide placé dans
un écoulement, à condition que la couche limite reste effectivement confinée près du corps ;
nous verrons plus tard quelles sont les conditions qui conduisent au décollement de la couche
limite.
Ceci justifie l’utilisation de l’hypothèse de fluide parfait pour décrire l’écoulement autour
d’un corps solide ainsi que la recherche de solutions qui dérivent d’un potentiel (écoulements
irrotationnels).
∂u ∂u ∂v 1 ∂p ∂2u
+u +v =− +ν 2 (8.2)
∂t ∂x ∂y ρ ∂x ∂y
8.2. COUCHE LIMITE SUR UNE PLAQUE PLANE 93
Par ailleurs, la composante de vitesse v, normale à la plaque est petite devant u, ainsi que le
montre la relation d’incompressibilité :
∂u ∂v u v
+ ≈ + =0 (8.3)
∂x ∂y l δ
Nous pouvons noter que l’équation (8.2) est identique à l’équation d’Euler pour les fluides
parfaits à un terme près qui est proportionnel à la viscosité et qui rend compte de la diffusion
de la vorticité. Les considérations générales développées ci-dessus suggèrent que ce terme de
viscosité est comparable aux termes inertiels de (8.2) à l’intérieur de la couche limite, soit :
∂u ∂2u
u ≈ν 2 (8.4)
∂x ∂y
νU
δ 2 ≈ l2 soit :δ ≈ lRe−1/2 (8.5)
l
où le nombre de Reynolds est défini avec la longueur de la plaque. Une des conséquences de
(8.5) est que la composante v a pour ordre de grandeur : U Re−1/2 et que la projection suivant
y de l’équation de Navier-Stokes se réduit à :
∂p
=0 (8.6)
∂y
tous les termes proportionnels à v étant petits. La pression est donc pratiquement constante
à travers la couche limite et elle déterminée par la résolution de l’équation d’Euler en dehors
de la couche limite. lorsque l’écoulement est stationnaire, l’équation d’Euler est équivalente
à la relation de Bernoulli. Il est donc possible de résoudre (8.2) en utilisant les conditions
aux limites suivantes : sur la plaque plane (y = 0) : u = v = 0 ; sur l’extérieur de la couche
(y/δ 7→ ∞) : u(x, y, t) 7→ U (x, t) et v 7→ 0, la pression étant donnée par l’équation de Bernoulli
p + 1/2ρU 2 = C te . Le raisonnement que nous venons de faire pour une plaque plane peut
être généralisé à d’autres géométries. Nous pouvons décrire de la même manière la couche
limite sur une paroi courbe. Il suffit de définir un système de coordonnées curvilignes suivant
le contour de la paroi solide. Il faudra également tenir compte du gradient de pression radial
imposé par la courbure des lignes de courant et remplacer l’équation (8.6) par une équation
similaire à (7.2). Nous pouvons également utiliser des approximations de couche limite pour
décrire la zone de transition entre deux écoulements parallèles de vitesses différentes (couche
de mélange, fig. 8.2) ou bien pour décrire un sillage laminaire. Les approximations essentielles
reposent en effet sur la grande disparité des longueurs caractérisant l’écoulement dans deux
directions orthogonales.
Fig. 8.2 – couche de mélange se développant entre deux écoulements uniformes de vitesses
U1 et U2 .
∂u0 0 ∂u
0 ∂ 2 u0
u0 + v = (8.11)
∂x0 ∂y 0 ∂y 02
Cette forme de l’équation de couche limite montre que les termes inertiels (membre de gauche)
sont bien du même ordre de grandeur que les termes de viscosité (membre de droite). En effet,
les variables adimensionnelles sont toutes choisies de manière à être d’ordre unité. On peut
également remarquer que la viscosité du fluide et le nombre de Reynolds n’apparaissent plus
directement dans cette équation. Ceci résulte du choix de l’épaisseur locale de la couche limite :
−1/2
δ(X) = XReX qui décrit l’essentiel du phénomène physique conduisant à la formation de la
couche limite. De la même manière que dans le problème de la plaque infinie mise brusquement
en mouvement, nous allons trouver des solutions autosimilaires pour le profil de vitesse en
prenant une coordonnée spatiale sans dimension : ζ = y/δ(X) = y(U/νx)1/2 et en cherchant
une solution pour u de la forme :
u = U f (ζ) (8.12)
Pour satisfaire les conditions aux limites (u(y = 0) = 0 et u 7→ U si y 7→ ∞), il est nécessaire
que : f (0) = 0 et : f (ζ) 7→ 1 si ζ 7→ ∞. En reportant l’expression (8.12) dans la condition
d’incompressibilité, il vient :
1/2
∂v ∂v ∂ζ U ∂v U 0
= = = ζf (ζ) (8.13)
∂y ∂ζ ∂y νx ∂ζ 2x
soit : 1/2
∂v 1 νU
= ζf 0 (ζ) (8.14)
∂ζ 2 x
qu’il est possible d’intégrer par parties en :
1/2 " ζ
#
1 νU
Z
v= ζf (ζ) − f (ξ)dξ (8.15)
2 x 0
en tenant compte de la condition v(y = 0) = 0. Nous pouvons maintenant insérer les expres-
sions (8.12) et (8.15) dans l’équation (8.2), avec ∂p/∂x = 0 puisque la pression est constante
à l’extérieur de la couche limite. Avec :
∂u 1 U2 ∂u 1 U2 0
Z
u =− ζf f 0 et : v = f ζf − f dξ
∂x 2 x ∂y 2 x
ainsi que :
∂2u U 2 00
= f
∂y 2 νx
il vient : Z ζ
2f 00 (ζ) + f 0 (ζ) f (ξ)dξ = 0 (8.16)
0
qui est l’équation de Blasius décrivant le profil de vitesse. Remarquons la disparition expli-
cite des coordonnées x et y dans cette dernière équation. Elles apparaissent seulement par
l’intermédiaire de ζ qui est proportionnel à yx−1/2 . Ceci confirme que l’équation de couche
96 CHAPITRE 8. COUCHES LIMITES
1.0
0.8
0.6
u/U
0.4
0.2
0.0
0 2 4 6 8
1/2
ζ = y (U/νx)
Fig. 8.3 – profil de vitesse dans la couche limite sur une plaque plane.
limite admet bien des solutions autosimilaires (les profils de vitesses sont identiques à toutes
les abscisses x). La solution de (8.16) a été obtenue numériquement. Il faut noter que lorsque
ζ est inférieur à 2, le profil de vitesse est très proche d’une droite et que lorsque ζ atteint
5, f est supérieur à 0,99. La couche limite sur une plaque plane peut donc être représentée
très schématiquement par un profil linéaire se raccordant à la valeur constante de la vitesse à
l’extérieur de la couche limite (fig. 8.3). A partir du profil de vitesse, nous pouvons déterminer
la force de friction exercée sur la plaque par l’écoulement. La contrainte de cisaillement sur
la plaque est :
∂u ∂ζ
σxy = η = ηU f 0 (0) (8.17)
∂y y=0 ∂y
soit, en faisant apparaı̂tre la pression dynamique ρU 2 et en prenant la valeur de f 0(0) = 0.33
trouvée par le calcul :
ν 1/2
2
σxy = 0, 33ρU (8.18)
Ux
La force totale sur une plaque de longueur l (par unité de longueur dans la troisième dimen-
sion) est donc l’intégrale de la contrainte donnée par (8.18) :
Z l 1/2 1/2
ν ν
2 2
Fl = 0, 33ρU dx = 0, 66ρU l (8.19)
0 Ux Ul
Le coefficient de friction CD est défini comme le rapport entre la force de traı̂née et la force
qui serait exercée par la pression dynamique appliquée uniformément sur toute la plaque,
soit :
Fl −1/2
CD = = 0, 66Rel (8.20)
ρU 2 l
L’expression du coefficient de friction trouvée ci-dessus dans le cas d’une plaque plane
reste approximativement correcte sur des corps profilés, c’est-à-dire tant que la surface solide
fait un angle faible avec la direction moyenne de l’écoulement (par exemple, dans le cas du
profil d’aile de la fig. 1.1 placé en incidence nulle). Les calculs développés ci-dessus cessent
également d’être valables lorsque la couche limite devient turbulente ce qui se produit lorsque
le nombre de Reynolds construit sur l’épaisseur locale de la couche limite U δ/ν excède à
peu près 600. Nous avons jusqu’à présent défini l’épaisseur δ de la couche limite par un
raisonnement purement dimensionnel. Il est maintenant possible d’en donner une définition
plus précise. La définition la plus simple consiste à chercher la valeur de ζ pour laquelle u/U
atteint une valeur donnée, par exemple 0,99. On trouve alors : δ = 5(νx/U )1/2 . Une autre
8.3. AVEC GRADIENT DE PRESSION EXTÉRIEUR 97
définition, plus physique, consiste à définir l’épaisseur de déplacement qui estime le déficit
global de débit dû à la présence de la couche limite. En amont de la plaque, le débit de fluide
entre les lignes y = 0 et y = D est évidemment Q0 = U D. A une distance x en aval du bord
d’attaque, ce débit devient :
Z D Z D Z ∞ u
Q= udy = Q0 − (U − u)dy ≈ Q0 − U 1− dy (8.21)
0 0 0 U
où nous avons utilisé le fait que D est beaucoup plus grand que l’épaisseur de le couche limite
et, qu’en dehors de cette couche, u est égal à U . Nous pouvons écrire (8.21) sous la forme :
Q = Q0 − U δ1 (8.22)
définissant ainsi l’épaisseur de déplacement δ1 . Cette épaisseur est également la distance dont
sont déplacées verticalement les lignes de courant dans l’écoulement potentiel à l’extérieur de
la couche limite. En effet, il faut assurer la conservation du débit Q0 entre les lignes de courant
qui, loin en amont, se situent respectivement en y = 0 et y = D. Sachant qu’à l’extérieur
de la couche limite, la vitesse est uniforme et égale à U , pour compenser le déficit exprimé
par (8.22), il faut déplacer la ligne de courant extérieure d’une distance δ1 . Cet écartement
progressif des lignes de courant extérieures est dû à la petite composante verticale de vitesse.
1.0
m=1
0.8
m = 1/3
0.6
m=0
u/U
0.4
m = -0.091
0.2
0.0
0 1 2 3 4
1/2 1/2
(m+1) (U/2νx) y
Sur un corps non profilé (un cylindre ou une sphère, par exemple), la couche limite se
développe à partir du point de stagnation situé sur la face amont du corps. Sur la partie
arrière du corps, la forme du solide impose une divergence rapide des lignes de courant,
donc un ralentissement rapide de l’écoulement moyen. Ce ralentissement est naturellement
la source d’un décollement prématuré de la couche limite (voir, par exemple, la fig. 1.6). La
conséquence directe de ce décollement est la présence d’un sillage très large et un force de
traı̂née très importante sur le corps. Afin de comparer l’influence de la forme de différents
corps sur la force de traı̂née FT , on définit un coefficient de traı̂née CD (D comme Drag,
traı̂née en anglais), tel que :
1
FT = ρU 2 SCD (8.30)
2
où S est la surface frontale du corps et 1/2ρU 2 est la pression dynamique qui, dans un
écoulement à grand nombre de Reynolds, donne un ordre de grandeur de la surpression régnant
sur la face amont du corps. C’est ce coefficient de traı̂née qu’on désigne traditionnellement
par Cx pour les automobiles. Le coefficient de traı̂née est, en général, fonction du nombre de
Reynolds. Toutefois, si les caractéristiques générales de l’écoulement varient peu, le coefficient
de traı̂née reste presque constant. Ainsi, pour un cylindre, CD varie de 1,4 à 1,2 lorsque Re
varie de 102 à 105 (avec un minimum à 0,9 pour Re de l’ordre de 1000). A titre de comparaison,
le coefficient de traı̂née d’un profil d’aile placé à angle d’incidence nul peut descendre en
dessous de 10−2 . Cette faible traı̂née s’explique par l’absence de décollement appréciable de
la couche limite sur l’ensemble du profil.
Surfaces portantes
Comme nous l’avons vu en étudiant les écoulements où la viscosité peut être négligée, la
présence d’une force portante sur un corps solide est associée à l’existence d’une circulation
autour de ce corps et à une différence appréciable de vitesse entre la surface supérieure et
la surface inférieure (voir la répartition de pression de la fig. 7.12). De même que la traı̂née
est caractérisée par le coefficient CD , la force de portance est définie par un coefficient sans
100 CHAPITRE 8. COUCHES LIMITES
Fig. 8.5 – Vues de profil de deux modèles d’un constructeur japonais. A gauche un véhicule
à propulsion hybride et Cx faible (0,26). A droite un véhicule à Cx et surface frontale élevés :
une catastrophe aérodynamique et une consommation de carburant en conséquence.
1.4 40
1.2
1.0 30
0.8
CL/CD
20
CL
0.6
0.4
10
0.2
0.0
0
-0.2
0 5 10 15 20 25
Fig. 8.6 – Coefficient de portance (CL ) et finesse (CL /CD ) pour un profil d’aile en fonction
de l’angle d’incidence (mesures effectuées à Re de l’ordre de 106 ).
Fig. 8.7 – Schéma d’un profil d’aile avec bec de bord d’attaque et volets de bord de fuite.
Document NASA. A droite, volet de bord de fuite et générateurs de turbulence sur une aile
de Boeing 767.
long du bord d’attaque. Lorsque les brins de laine se retournent, c’est le signe d’une inversion
de l’écoulement sur la voile et donc du décollement de couche limite. C’est aussi le signe que
l’angle incidence est trop grand et que la voile est incorrectement réglée.
INSTABILITES ET
TURBULENCE
En caricaturant à l’extrême, on pourrait affirmer que ce qui a été énoncé dans les chapitres
précédents ne s’applique pas à la grande majorité des écoulements que nous sommes suscep-
tibles de rencontrer. En effet, la faible viscosité de l’eau et de l’air et les échelles de longueur
mises en jeu font que les nombres de Reynolds associés aux écoulements dans la nature ou
dans l’activité industrielle sont en général très grands et ces écoulements sont turbulents.
La nature particulière de la turbulence et, spécialement, la multiplicité d’échelles spatiales
empêche d’appliquer simplement les résultats obtenus en négligeant les termes dus à la visco-
sité dans l’équation de Navier-Stokes. Nous allons examiner quelques types d’écoulements où
le développement d’instabilités successives conduit à un comportement chaotique, puis nous
essaierons de dégager les caractéristiques importantes de la turbulence.
103
104 CHAPITRE 9. INSTABILITES ET TURBULENCE
Fig. 9.1 – visualisations des instabilités successives de l’écoulement entre cylindres coaxiaux
(écoulement de Couette-Taylor). A gauche : instabilité primaire en ” rouleaux ”. A droite :
rouleaux sinusoı̈daux. Photos : Burkhalter et Koschmieder.
L’instabilité d’une ” couche de mélange ” entre deux courants de fluide de vitesses différentes,
appelée aussi instabilité de Kelvin-Helmholtz présente elle aussi une succession d’instabi-
lités : apparition de tourbillons périodiques dans la couche de mélange (périodicité spatiale
et temporelle), interactions entre les tourbillons provoquant une modification locale de la
périodicité, apparition de structures tridimensionnelles. L’instabilité de Kelvin-Helmholtz se
retrouve également dans l’instabilité des sillages et dans l’instabilité des jets. Elle est à l’ori-
gine de la turbulence dans tous les écoulements où règne un fort cisaillement. Dans l’instabilité
de Taylor-Couette comme dans celle de Kelvin-Helmholtz, le moteur de l’instabilité est l’iner-
tie du fluide et le terme non linéaire u.gradu dans l’équation de mouvement. En revanche,
la viscosité a tendance à stabiliser l’écoulement. C’est pourquoi le paramètre qui décrit ces
instabilités est le nombre de Reynolds. Dans le cas de l’écoulement de Couette, Re = ΩR1 d/ν
où R1 est le rayon du cylindre intérieur, d est l’espacement entre les cylindres et Ω est la
vitesse angulaire.
1
Voir par exemple, P. Bergé, Y.Pomeau, M. Dubois-Gance, ”Des rythmes au chaos”, Odile Jacob, 1994
9.1. INSTABILITÉS : DE L’ÉCOULEMENT LAMINAIRE À LA TURBULENCE DÉVELOPPÉE105
Fig. 9.2 – Dépendance temporelle de la vitesse radiale (à gauche) et spectre de puissance (à
droite) dans l’instabilité de Taylor Couette. Les enregistrements sont effectués à des nombres
de Reynolds croissants (du haut vers le bas). Le premier montre une seule fréquence fon-
damentale et ses harmoniques. Le second montre deux fréquences fondamentales et leurs
harmoniques. Le dernier montre seulement une bande large. le comportement temporel cor-
respondant est chaotique, sans aucune périodicité apparente. Figures tirées de Gollub et
Swinney, Phys. Rev. Lett. 35, 927 (1975)
Fig. 9.3 – instabilité de Kelvin-Helmholtz entre deux courants d’eau parallèles. Visualisation
par fluorescence induite par laser. Photo par F. Roberts, P. Dimotakis et A. Roshko.
106 CHAPITRE 9. INSTABILITES ET TURBULENCE
Fig. 9.4 – instabilité d’un jet circulaire de CO2 pénétrant dans l’air à Re = 30000. L’in-
stabilité se développe à la périphérie du jet qui devient rapidement complètement turbulent.
Visualisation par ombroscopie. Photo par F. Landis et A. Schapiro.
Il peut y avoir d’autres sources d’instabilité que l’inertie du fluide. Un exemple notable
est l’instabilité thermoconvective d’une couche de fluide chauffée par le bas. Le fluide chaud
est moins dense que le fluide froid et il a tendance à monter dans le champ de gravité. La
diffusion thermique tend à homogénéiser la température et à réduire les gradients de densité
responsables de la convection. La viscosité du fluide tend également à ralentir la convection. La
diffusion thermique et la viscosité sont ici les deux effets stabilisants. Lorsque la différence de
température entre le bas et le haut de la couche de fluide est assez grande, on voit apparaı̂tre
des rouleaux de convection réguliers dont la largeur est voisine de l’épaisseur de la couche
de fluide. En augmentant encore la différence de température, la structure de l’écoulement se
complique de plus en plus et finit par devenir chaotique. Une des caractéristiques communes
de toutes les instabilités décrites ci-dessus est l’apparition d’une structure spatiale périodique
dans l’instabilité primaire. Le système se comporte comme un amplificateur sélectif pour les
sources de bruit. Parmi tous les modes possibles, l’un d’entre eux est amplifié de façon plus
importante et fixe la périodicité spatiale de l’écoulement. Une autre caractéristique commune
de ces instabilités est l’existence d’un paramètre de contrôle. Dans le cas de l’instabilité
centrifuge et de l’instabilité de Kelvin-Helmholtz, c’est le nombre de Reynolds qui joue ce
rôle. Pour l’instabilité thermoconvective, c’est un autre nombre sans dimension, le nombre de
Rayleigh :
αgd3 ∆T
Ra = (9.1)
νκ
9.2 Turbulence
9.2.1 La nature de la turbulence
Il est difficile de définir la turbulence par des critères simples. Une possibilité consiste à
qualifier un écoulement de turbulent dès que le champ de vitesse présente un caractère chao-
tique (absence de toute périodicité) dans l’espace ou le temps. Mais il existe des écoulements
” déterministes ” qui présentent des caractères chaotiques, comme ceux dans les mélangeurs
hélicoı̈daux (voir § 10.3). Le caractère aléatoire de l’écoulement n’est qu’une des facettes de
la turbulence. Il impose de traiter les écoulements turbulents par des méthodes statistiques.
Une des manifestations spectaculaires du caractère chaotique est la sensibilité aux conditions
initiales : un système dynamique complexe placé dans des conditions initiales extrêmement
peu différentes peut évoluer au cours du temps de façons très différentes. Ainsi les prévisions
météorologiques qui sont initiées avec un état approximatif de l’atmosphère (faute de pouvoir
mesurer vitesse, température, pression et humidité en tous points) s’écartent progressivement
de la situation réelle. Au delà d’une dizaine de jours, les dépressions et anticyclones de la
simulation n’ont plus rien de commun avec ceux de l’atmosphère réelle. Henri Poincaré avait
découvert dès la fin du dix-neuvième siècle que trois corps en interaction gravitationnelle
pouvaient avoir un comportement chaotique. Il fallut attendre les années soixante et les si-
mulations numériques du météorologue Edward Lorenz pour que les idées de Poincaré soient
appliquées au chaos en mécanique des fluides.
Un autre aspect essentiel de la turbulence est sa capacité à mélanger rapidement que
ce soit la quantité de mouvement, la chaleur ou la masse. Les fluctuations du champ de
vitesse se produisent sur une large gamme d’échelles spatiales et assurent très efficacement la
production de forts gradients de concentration qui sont finalement atténués par les mécanismes
de diffusion moléculaire. L’existence de ” tourbillons ” à toutes les échelles spatiales, depuis
la plus grande dimension de l’écoulement jusqu’à une échelle assez petite pour que la viscosité
108 CHAPITRE 9. INSTABILITES ET TURBULENCE
Fig. 9.6 – couche de mélange turbulente à Re = 850000. Les grands tourbillons provenant de
l’instabilité initiale de la couche de mélange sont encore visibles ainsi que toute une gamme
de tourbillons beaucoup plus petits. Photo : M.R. Rebello, G.L. Brown et A. Roshko.
les valeurs moyennes étant calculées sur un temps très grand devant les périodes ca-
ractéristiques des fluctuations. On montre facilement que si le fluide est incompressible, la
vitesse moyenne et la fluctuation obéissent à l’équation de conservation :
∂Ui 1 ∂
Ui =− (−P δij + 2ηEij − ρ < vi vj >) (9.4)
∂xj ρ ∂xj
où P est la moyenne temporelle de la pression et Eij la moyenne temporelle du tenseur des
déformations eij . Le terme de dérivée temporelle de la vitesse a disparu puisque nous avons
pris une valeur moyenne sur un temps assez long. Par rapport à l’équation de Navier-Stokes,
il apparaı̂t un terme supplémentaire −ρ < vi vj > dans le tenseur des contraintes. Ce terme
qui représente la fonction de corrélation entre les composantes vi et vj de la fluctuation de
vitesse est appelé contrainte de Reynolds. Les contraintes de Reynolds manifestent l’influence
des fluctuations sur l’écoulement moyen.
9.2. TURBULENCE 109
Fig. 9.7 – Transfert de quantité de mouvement dans une couche limite par l’intermédiaire
des contraintes de Reynolds
Dans la couche limite où le gradient de vitesse moyen ∂U/∂y est positif, la fonction de
corrélation des fluctuations < uv > devrait être essentiellement négative. En effet, une fluc-
tuation v positive est associée au mouvement d’un élément de fluide vers l’extérieur de la
couche limite. Cet élément emporte avec lui une quantité de mouvement faible puisqu’il se
trouvait dans une zone de faible vitesse. Il va donc se trouver dans un environnement où
la majorité des éléments de fluide se déplacera plus vite. Il sera donc associé à une fluctua-
tion u de valeur négative. On peut faire un raisonnement identique avec une fluctuation v
négative (fig. 9.7). On voit ici que le tenseur de Reynolds augmente le transfert de quantité
de mouvement au sein de la couche limite.
Cet accroissement du transfert de quantité de mouvement explique que le décollement
des couches limites est retardé lorsqu’elles deviennent turbulentes : l’apport de fluide de
grande vitesse vers la paroi s’oppose au développement d’un gradient de pression adverse qui
est responsable du décollement (cf 8.3). Cet effet se manifeste par la diminution brutale de
traı̂née observée sur les sphères lorsque la couche limite devient turbulente : la couche limite
décolle plus en aval et la largeur du sillage se trouve réduite. La fig. 9.8 montre de coefficient
de traı̂née mesuré sur des sphères lisses et rugueuses. Sur les sphères lisses, la transition de la
couche limite a lieu vers Re = 3 × 105 et provoque une réduction de traı̂née d’un facteur 5.
Sur des sphères de plus en plus rugueuses la transition se produit à des nombres de Reynolds
plus petits et entraı̂ne une réduction de traı̂née du même ordre de grandeur.
Sur certaines ailes d’avion, de très petits ailerons placés devant les volets de bord de fuite
servent à déclencher la turbulence de la couche limite et à retarder son décollement sur les
volets lorsqu’ils sont placés à un grand angle d’incidence.
110 CHAPITRE 9. INSTABILITES ET TURBULENCE
Fig. 9.8 – coefficients de traı̂née pour une sphère lisse (trait continu seul) et pour des sphères
rugueuses. L’amplitude de la rugosité va de 2, 5 × 10−4 diamètre (croix) jusqu’à 1, 25 × 10−2
diamètre(carrés). D’après E. Achenbach, J. Fluid Mech. 65, 113 (1974)
Tant que les dimensions des tourbillons restent assez grandes, la viscosité joue un rôle négligeable
dans l’écoulement. En revanche, lorsque les tourbillons atteignent une taille assez petite ld,
la viscosité devient dominante et l’énergie cinétique transférée est dissipée. Cette échelle de
dissipation ld , ou micro-échelle de Kolmogorov, peut être évaluée en écrivant que le nombre
de Reynolds associé à cette échelle est égal à 1, soit :
1/3
ld u(ld ) ld 1/3 ld
1= = (9.7)
ν ν
d’où l’ordre de grandeur de l’échelle de dissipation :
Fig. 9.9 – représentation schématique du flux d’énergie cinétique dans un écoulement tur-
bulent.
Notons que plus le nombre de Reynolds de l’écoulement global est grand, plus l’échelle de
−3/4
dissipation est petite. En effet, si ReL = u(L)L/ν = 1/3 L3/4 /ν, alors : ld ∝ LReL .
En pratique, les lois d’échelle ainsi prédites par Kolmogorov ne sont observées que dans les
écoulements de turbulence développée à très grands nombres de Reynolds, au moins de l’ordre
de 106 .
Bien que le nombre de Reynolds associé à l’écoulement global soit très grand, l’existence de
tourbillons jusqu’à l’échelle ld impose une forte dissipation d’énergie cinétique. Le caractère
dissipatif des écoulements turbulents se manifeste, entre autres, par une perte de charge
accrue lorsque l’écoulement dans un tuyau passe de l’état laminaire à l’état turbulent. Si la
turbulence n’est plus entretenue par l’écoulement moyen, elle est amortie très rapidement
par les effets de la viscosité. La multiplicité des échelles spatiales est également la source
essentielle de la difficulté de simuler numériquement les écoulements turbulents. Prenons
l’exemple d’un avion : la plus grande échelle de l’écoulement est une dimension typique de
l’avion, quelques dizaines de m. La vitesse est de l’ordre de 200 à 250 m/s ce qui conduit à
un nombre de Reynolds ReL de l’ordre de 108 !. L’échelle de dissipation pour cet écoulement
est 106 fois plus petite que L ; elle est de l’ordre de quelques dizaines de microns. Si on
voulait simuler la totalité de l’écoulement, il faudrait de l’ordre de (106 )3 = 1018 mailles ! Une
estimation similaire est donnée par Kim et Moin, deux experts de la simulation numérique de
la turbulence : ils évaluent le nombre de mailles à 1016 . En utilisant un calculateur ” teraflop
”, 100 fois plus rapide que la limite actuelle, il faudrait encore plusieurs milliers d’années pour
calculer une seule seconde de l’écoulement réel ! Cette difficulté apparemment insurmontable
peut être contournée en ne simulant directement que les grandes échelles de l’écoulement. Les
petites échelles sont représentées par un modèle statistique (technique dite de ” Large Eddy
Simulation ”). En utilisant la méthode LES, Moin et Kim ont été les premiers à simuler un
écoulement turbulent dans une conduite avec un certain réalisme (c’est-à-dire reproduisant
correctement les observations expérimentales jusqu’aux plus petites échelles de l’écoulement).
Le nombre de Reynolds atteint était de l’ordre de 10 000, avec 500 000 points de maillage.
112 CHAPITRE 9. INSTABILITES ET TURBULENCE
Chapitre 10
TRANSPORT CONVECTIF
∂C
+ ∇.(uC − D∇C) = 0 (10.4)
∂t
113
114 CHAPITRE 10. TRANSPORT CONVECTIF
kB T
D= (10.7)
6πηa
Plus le fluide est visqueux, plus les particules solides diffusent lentement. Si les gradients
de concentration ou de température sont suffisamment faibles, les propriétés physiques du
fluide (viscosité, masse volumique) ne sont pas affectées par le transport du soluté ou de la
chaleur. Il n’y a alors pas de couplage direct entre la dynamique de l’écoulement et la quantité
transportée, qu’on qualifie dans ce cas de ” scalaire passif ”. Le champ de concentration peut
être trouvé à partir de (10.5) si le champ de vitesse est donné. En revanche, si les propriétés
physiques du fluide sont suffisamment modifiées, il y aura un fort couplage entre l’équation
de transport et l’équation de mouvement pour le fluide. C’est le cas, par exemple, pour la
convection thermique déclenchée par la remontée de fluide chaud dans le champ de pesanteur.
dans le liquide s’adsorbe de manière irréversible sur la paroi. Le profil de vitesse est parabo-
lique avec une vitesse maximale à la surface du liquide :
!
g y2
u=− − hy (10.8)
ν 2
Tant que la paroi solide n’est pas saturée, le soluté continue de s’adsorber irréversiblement.
Nous pouvons alors faire l’hypothèse que la concentration est nulle à la paroi ; la paroi se
comporte comme un ” puits ”. Lorsque le liquide entre en contact avec la paroi réactive, en
haut de l’écoulement, la condition C = 0 à la paroi est imposée brusquement. Nous voyons
alors l’analogie entre ce problème et celui de la couche limite sur une paroi plane où la
condition de vitesse nulle est imposée à partir du bord d’attaque. La couche dans laquelle
la concentration du soluté est affectée par la présence de la paroi adsorbante va s’épaissir
progressivement le long de l’écoulement. En poussant l’analogie avec la couche limite pour
la quantité de mouvement, nous pouvons écrire que l’épaisseur δ de la couche limite pour la
concentration sera d’autant plus petite que le nombre de Péclet sera grand. Supposons que
le nombre de Péclet soit assez grand pour que l’épaisseur δ reste petite devant l’épaisseur
116 CHAPITRE 10. TRANSPORT CONVECTIF
du film de liquide h. Alors, le gradient de concentration n’est appréciable que très près de la
paroi solide, où le profil de vitesse est approximativement linéaire :
!
g y2 ghy Uy
u=− − hy ≈ =3 (10.10)
ν 2 ν h
D’autre part, l’épaisseur de la couche limite de concentration varie lentement dans la direction
de l’écoulement. Nous pouvons donc supposer que la dérivée de la concentration dans la
direction de l’écoulement (x) est beaucoup plus petite que la dérivée dans la direction normale
à l’écoulement (y). Si nous cherchons une solution stationnaire du problème, l’équation de
transport devient :
U y ∂C ∂2C
3 −D 2 =0 (10.11)
h ∂x ∂y
De la même manière que pour la couche limite de quantité de mouvement, réécrivons l’équation
(10.11) en utilisant des quantités adimensionnelles : x0 = x/X, y 0 = y/δ(X) et C 0 = C/C0 .
Dans la direction y, la longueur caractéristique est l’épaisseur locale de la couche limite δ(X).
Dans la direction x, la longueur caractéristique est la distance X parcourue depuis le début
de la paroi solide. En faisant apparaı̂tre le nombre de Péclet P e = U h/D (10.11) devient :
δ ∂C0 h2 ∂ 2 C0
3P e y0 = 2 (10.12)
X ∂x0 δ ∂y02
Si nous choisissons l’épaisseur de couche limite δ(X) telle que : δ 3 = h2 X/P e, soit :
1/3
δ X
= P e−1/3 (10.13)
h h
(10.12) s’écrit :
∂C0 ∂ 2 C0
3y0 = (10.14)
∂x0 ∂y02
où les caractéristiques physiques du problème ont disparu. L’équation (10.13) nous donne donc
la dépendance de l’épaisseur de couche limite en fonction de la position x et du nombre de
Péclet. Notons que δ(x) augmente comme la racine cubique de x, c’est-à-dire plus lentement
que l’épaisseur de couche limite pour la quantité de mouvement. Ceci est dû au profil de vitesse
linéaire près de la paroi solide. Nous pouvons maintenant chercher des solutions autosimilaires
de (10.11) sous la forme : C = C0 f (ζ) où ζ = y/δ(x). En utilisant ces variables, il vient :
d2 f ζ 2 df
+ =0 (10.15)
dζ 2 3 dζ
soit :
d df ζ2
ln =− (10.16)
dζ dζ 3
que nous devons intégrer avec les conditions aux limites suivantes : f = 0 en ζ = 0 et f 7→ 1
si ζ 7→ ∞. D’où le profil de concentration :
Rζ 3 ζ
0 exp(−ξ /9)dξ
Z
f= ∞
R
3
≈ 0, 54 exp(−ξ 3 /9)dξ (10.17)
0 exp(−ξ /9)dξ 0
10.3. DE L’ART DE BIEN MÉLANGER 117
Nous pouvons maintenant calculer le flux de soluté vers la surface solide. Le flux de concen-
tration dans la direction y est purement diffusif :
∂C C0 C0
JD (y = 0) = −D = −D f 0(0) ≈ 0, 54D (10.18)
∂y δ δ
et calculer la quantité totale de soluté Q qui se dépose sur la surface de longueur L par unité
de temps :
Z L 2/3
L
Q= JD (y = 0)dx ≈ 3C0 D P e1/3 (10.19)
0 h
ce résultat n’étant bien entendu valide que si l’épaisseur δ reste petite devant l’épaisseur h
du film de liquide. Le résultat obtenu ici peut être généralisé à des géométries plus complexes
si l’écoulement du liquide dans le film reste laminaire. Si nous nous intéressions au problème
d’un gaz diffusant dans un film liquide s’écoulant sur un paroi verticale, la procédure à suivre
serait identique. Cette fois, le profil de vitesse vu par le gaz diffusant serait approximativement
uniforme et l’équation de transport deviendrait :
∂C ∂2C
U0 +D 2 =0 (10.20)
∂x ∂y
où U0 est la vitesse à la surface du film. L’équation (10.20) est formellement identique à
(1.1) qui décrit la diffusion de la quantité de mouvement dans le problème de la plaque
plane mise brusquement en mouvement (en remplaçant x par U0 t). Nous trouverions donc une
√
couche limite de diffusion dont l’épaisseur croı̂t comme x, avec un profil de concentration
donné par une fonction d’erreur.
Fig. 10.3 – répartition de concentration dans un mélangeur statique Kenics. Résultat de simu-
lations numériques. En haut à gauche : champ de concentration à l’entrée dans le mélangeur.
En haut à droite et en bas à gauche : champ de concentration dans diverses sections du
premier étage. En bas à droite : champ de concentration dans le troisième étage.
10.4. DISPERSION DE TAYLOR 119
Fig. 10.4 – Ecoulement entre deux cylindres excentrés mis en mouvement alternativement.
A gauche : étirement en feuillets d’un tache de colorant (après 12 périodes de rotation). Au
centre : lignes de courant pour la rotation du cylindre intérieur. A droite : lignes de courant
pour la rotation du cylindre extérieur. Figures tirées de Chaiken, Chevray, Tabor et Tan,
Proc. Roy. Soc. A408 165 (1986)
Un autre moyen de mélanger efficacement les fluides très visqueux consiste à utiliser un
écoulement instationnaire, dont les lignes de courant changent de topologie au cours du temps.
Un exemple en est donné sur la fig. 10.4 : le fluide est confiné entre deux cylindres excentrés.
Chaque cylindre est mis en mouvement alternativement pendant un temps correspondant à
moins d’un tour complet. A chaque changement de cylindre, les lignes de courant changent
brusquement de topologie. Après quelques périodes, le résultat de ces sauts entre lignes de
courant différentes est une trajectoire chaotique. La photographie de la fig. 10.4 montre le
” feuilletage ” obtenu après 12 périodes de rotation : un tache circulaire de colorant placée
sur l’axe médian a été rapidement étirée en une figure très complexe mettant en évidence de
très forts gradients de concentration. L’action de la diffusion moléculaire permettra ensuite
d’homogénéiser totalement la concentration en colorant.
– ρ : masse volumique
– γ : tension superficielle
– η : viscosité dynamique
– ν = η/ρ : viscosité cinématique
– λ : conductivité thermique
– κ = λ/ρCp : diffusivité thermique
121
122 ANNEXE A. PROPRIÉTÉS PHYSIQUES DE QUELQUES FLUIDES
Annexe B
Les paramètres physiques intervenant dans les nombres sans dimension sont une échelle
de longueur L, une échelle de temps t, une échelle de vitesse U , une échelle de température T
ainsi que les propriétés physiques du fluide masse volumique ρ, viscosité dynamique η, tension
superficielle γ, difusivité thermique κ, diffusivité massique D.
On pourra consulter la page du Treasure trove of physics d’Eric Weinstein consacrée aux
nombres sans dimension :
(http ://www.treasure-troves.com/physics/topics/DimensionlessParameters.html).
– nombre de Bond : rapport des effets de gravité et de la tension superficielle.
ρgL2 L2
Bo = = 2
γ λc
où λc est la longueur capillaire.
– nombre capillaire : rapport des effets visqueux et de la tension superficielle.
ηU
Ca =
γ
– nombre d’Ekman : rapport des effets visqueux et de la force de Coriolis dans un
écoulement en rotation à vitesse angulaire Ω
ν
Ek =
ΩL2
– nombre de Froude : rapport des effets inertiels et de la gravité.
U2
Fr =
gL
– nombre de Mach : rapport de la vitesse du fluide et de la vitesse du son
U
M=
c
– nombre de Nusselt : flux de chaleur adimensionnel
HL
Nu =
κ∆T
où H est le flux de chaleur
123
124 ANNEXE B. PETIT CATALOGUE DE NOMBRES SANS DIMENSION
– nombre de Péclet :
UL
Pe = = ReP r
D
– nombre de Prandtl : rapport de la viscosité cinématique et de la difusivité thermique.
ν
Pr =
κ
– nombre de Rayleigh : rapport de la force d’Archimède créée par l’expansion thermique
et de
αρg∆T L3
Ra =
νκ
où α est le coefficient d’expansion thermique et ∆T est la variation de température sur
l’échelle L.
– nombre de Reynolds : rapport des effets inertiels et des effets de viscosité
UL
Re =
ν
– nombre de Rossby : rapport de l’accélération convective et de la force de Coriolis dans
un écoulement en rotation à vitesse angulaire Ω
U
Ro =
ΩL
– nombre de Schmidt : rapport de la viscosité cinématique et de la diffusivité massique
ν
Sc =
D
– nombre de Stokes : rapport de l’inertie d’une particule solide et des forces visqueuses
ρs LU
St =
η
où ρs est la masse volumique de la particule et L sa taille.
– nombre de Strouhal : fréquence normalisée pour un écoulement instationnaire
L
Str =
Ut
Annexe C
Tij (y) = Aik Ajl Tkl (x) et Tij (x) = Tkl (y)Aki Alj
la matrice T st un tenseur de rang deux. Une des caractéristiques importantes des tenseurs de
rang deux est l’invariance de leur polynôme caractéristique Det(T − λI) dans un changement
de repère. De ce fait les racines du polynôme caractéristique, qui sont les valeurs propres du
tenseur sont également invariantes par changement de repère.
Le polynôme caractéristique peut s’exprimer en fonction des trois invariants du tenseur :
I1 = Det(T) = λ1 λ2 λ3
1
I2 = λ1 λ2 + λ2 λ3 + λ3 λ1 = ([T r(T)]2 − Tr(T2 ))
2
I3 = T r(T) = λ1 + λ2 + λ3
125
126 ANNEXE C. NOTIONS ÉLÉMENTAIRES SUR LES TENSEURS
Le troisième invariant, la trace du tenseur, est ici égal à la divergence de la vitesse. Il ca-
ractérise le changement de volume, par unité de temps, d’un élément de fluide. Lorsque le fluide
peut être considéré comme incompressible, la trace de G est nulle. Les parties symétrique et
antisymétrique de G sont également des tenseurs de rang deux.
Un autre exemple de tenseur de rang deux est le flux de quantité de mouvement ρui uj .
Un raisonnement analogue à celui fait pour le gradient de vitesse montre qu’il se transforme
dans un changement de repère comme :
Equations en coordonnées
cylindriques et sphériques
∂ux 1 ∂p
+ u.∇ux = − + ν∆ux
∂t ρ ∂x
∂ur u2 1 ∂p ur 2 ∂uθ
+ u.∇ur − θ = − + ν ∆ur − 2 − 2
∂t r ρ ∂r r r ∂θ
∂uθ ur uθ 1 ∂p uθ 2 ∂ur
+ u.∇uθ + =− + ν ∆uθ − 2 + 2
∂t r ρr ∂θ r r ∂θ
où les opérateurs gradient et laplacien ont pour expression :
∂f ∂f 1 ∂f
∇f = , ,
∂x ∂r r ∂θ
∂2f 1 ∂ ∂f 1 ∂2f
∆f = + r +
∂x2 r ∂r ∂r r2 ∂θ2
127
128ANNEXE D. EQUATIONS EN COORDONNÉES CYLINDRIQUES ET SPHÉRIQUES
1 ∂ ∂f 1 ∂ ∂f 1 ∂2f
∆f = 2 r2 + 2 sinθ +
r ∂r ∂r r sinθ ∂θ ∂θ r2 sin2 θ ∂ϕ2
129
130 ANNEXE E. QUELQUES REPÈRES HISTORIQUES
écoulement turbulent conserve une organisation qu’on ne peut décrire de manière pu-
rement statistique.
– 1980 Les premiers calculateurs parallèles permettent la simulation directe d’écoulements
turbulents à des nombres de Reynolds raisonnables (quelques centaines). John Kim et
Parziv Moin, au centre de recherche Ames de la NASA, utilisent le calculateur proto-
type ILLIAC-IV pour simuler un écoulement turbulent jusqu’à Re = 14000 . Jusqu’à
nos jours, la mécanique des fluides reste une des applications primordiales des supercal-
culateurs et les problèmes posés par la turbulence sont loin d’être résolus.
132 ANNEXE E. QUELQUES REPÈRES HISTORIQUES
Annexe F
Références bibliographiques
133
134 ANNEXE F. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES