Béhanzin prit sa suite. Le nouveau roi ne voulait surtout pas perdre de temps sur un dossier qui lui tenait particulièrement à coeur, la location du village Koutonou aux français par son père à ce qui équivalait à 20.000 CFA par an. Les termes du loyer lui semblaient exagérément défavorables à son royaume. Il le faisait savoir aux représentants français du vivant même de son père. Ceux-ci ne considéraient guère les récriminations du " Vidaho" prince héritier du trône. Mais depuis un mois qu'il a pris les rênes du pouvoir à Abomey, il remit l'autorité de son royaume sur Cotonou en y nommant des représentants. Une location n'étant pas une cession ou une annexion, Béhanzin ne comprenait pas pourquoi son administration devrait laisser place à celle française sur un village de Koutonou de plus en plus en verve grâce à sa façade maritime. Les français accueillirent froidement et avec méfiance ce redéploiement de l'administration autochtone de Danhomè sur une cité qu'ils convoitisent désormais ostensiblement en y faisant débarquer des troupes. Dans un contexte de tensions continues entre Béhanzin et le lieutenant gouverneur Bayol, les autorités Danhoméennes déployées à Cotonou sont arrêtées le 02 février 1890 pour avoir ouvertement protesté contre l'occupation militaire et l'utilisation à des fins belliqueuses de la cité maritime par la France. Sous prétexte de leur expliquer les raisons de la présence des troupes Françaises à Cotonou, les autorités danhoméennes sont invitées au Comptoir (sis à Ganhi) puis arrêtées et emprisonnées parce qu'elles auraient distribué de la poudre à canon et des armes blanches aux habitants de Koutonou pour défendre le village contre l'occupation française en attendant l'arrivée des troupes d'élites Dahoméennes depuis Abomey. Béhanzin qui avait fait le rappel et la levée des troupes depuis le 21 février, fut davantage en colère quand il apprît que ses préfets avaient été arrêtés. Il décida à son tour de riposter en faisant otage de 8 français à Ouidah dont le révérend père Dorgère. La guerre devint dès lors inévitable entre un Béhanzin déterminé à sortir Cotonou des griffes d'un contrat léonien de location, et les troupes françaises déployées dans l'unique dessein d'arracher de force la cité maritime à Abomey. Le colonel Terillon attaqua à la lisière de Cotonou à Cadjehoun les positions de Béhanzin tenues par un régiment de 500 guerriers danxoméens qui étaient l'avant-garde des troupes d'Abomey. Ce régiment commandé par les chefs Béléhonmè, Banoupo ( une femme amazone), Ahintonton contre-attaqua. L'issue du combat se déssina très vite entre une armée super- équipée dotée d'une puissante artillerie et une armée certes audacieuse, volontaire mais mal équipée et tactiquement sobre. La France sortie victorieuse de cet affrontement, avait le triomphe modeste. Les pertes qu'elle a subies malgré la victoire sont importantes et elle est stupéfaite de découvrir qu'en face il y a une véritable organisation militaire dont le corps d'élite formé de femmes guerrières, les Amazones, a plus que sidéré par sa bravoure, son courage et sa ténacité au combat. Et le combat de Cadjehoun ne serait qu'un accrochage au vu de ce que préparait Béhanzin. Depuis quelques jours en effet, attendaient deux mille guerriers cantonnés autour d'Allada, deux mille autour de Ouidah et une centaine vers les villages de Godomey et Zogbo puis d'autre contingents postés au gué de l'ouémé pour prendre Cotonou en tenaille. Le 02 mars 1890, Béhanzin quitta Allada et établit son camp à Godomey et de là, les guerriers de Danxomè se rapprochèrent silencieusement de Cotonou. Le lieutenant-gouverneur Jean Bayol disposant de précieux renseignements sur l'ennemi se préparait aussi au combat. Il mobilisa à cet effet près de 400 tirailleurs sénégalais et d'une trentaine de soldats blancs dotés d'un armement nettement supérieur à celui de l'armée de Béhanzin, armement comprenant des pièces d'artillerie. Dans la nuit du 03 au 04 mars 1890, sous une violente tornade, l'armée Danhoméenne encercla Cotonou par des régiments entiers d'Amazones encadrant les soldats. Quand l'assaut fut donné, l'effet de surprise avait été annihilé par un soldat français qui ne dormait pas et qui donna l'alerte. Sous une pluie battante, une furieuse bataille s'engagea. Surprise ! L'armée Danhoméenne qui ne décrocha pas malgré les lourdes pertes, se montra quelque peu à la hauteur d'une armée française de métier. À la fin des combats, Jean Bayol écrira dans un télégramme adressé à ses supérieurs à Paris : 《 Les soldats Danhoméens ont montré une bravoure et un acharnement inouïe au combat. Plus question de réduire l'armée Danhoméenne dans l'immédiat, mieux valait négocier.》 En effet, les Français étaient à la fois admiratifs et inquiets de tels soldats qui méprisaient à tel point la mort qu'ils continuaient à attaquer malgré les lourdes pertes subies. La bataille de Cotonou par son intensité ébranla fortement les certitudes françaises et à la suite de celle- ci, l'armée Danhoméenne se déploya en position défensive sur tout Cotonou et les troupes françaises constamment harcelées par les guerriers de Béhanzin ont dû se replier sur Porto Novo que Béhanzin attaqua le 20 avril à Atchoukpa. À Abomey, la bataille de Cotonou fut ressentie comme la pire des défaites depuis Abéokuta malgré le fait que des positions des troupes danxoméennes soient désormais tenues sur le village à façade maritime et que les français aient reculé pour conforter les leurs sur Porto-Novo. Les pertes du côté de Béhanzin furent considérables et il en tira un enseignement : ses troupes manquent d'artillerie lourde ce qui fit la différence selon ses chefs militaires. Béhanzin se mit alors à l'idée de doter son armée de canons de longue portée. Pour ce projet, il se rabattit sur Ajavon, un riche commerçant établi à Ouidah qui avait ses entrées en Europe. Celui-ci lui commanda via Accra des canons en Allemagne. Béhanzin, dans l'attente de livraison des précieuses armes lourdes, prépare encore une fois la guerre.... Hier, à 17:01 · Facebook for Android · Public