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Le nom de mardi en osmanli

Author(s): Jean Deny


Source: Zeitschrift der Deutschen Morgenländischen Gesellschaft , 1954, Vol. 104 (n.F.
29), No. 2 (1954), pp. 383-385
Published by: Harrassowitz Verlag

Stable URL: https://www.jstor.org/stable/43368994

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Le nom de mardi en osmanli
Par Jean Deny, Gérardmer
On sait que le mardi s'appelle en osmanli sah günü ou plus rarem
sali gün ou tout simplement sali. Dans l'ancienne langue littéraire
avait aussi se§embe (Ktjpelian, 1883 : se§embih) et l'arabe yevm-ûs-s
ou selâse. Tous ces mots se trouvent dans l'excellent dictionnaire du P.
Pascal Aucher (1840) sub verbo mardi. La forme sali gün doit être con-
sidérée comme innovation d'illettrés étant trop récente pour pouvoir
passer pour un archaïsme.
A notre connaissance il existe deux étymologies de sah :
Io celle de Gordlevski, Mať er' ah dVa osmanskavo narodnavo kaVen -
dar' a , in Jivaya Stariņa , 20-année, 1911, in - 8°, pages 439 - 444. A la
page 442, il y a une note 2 dont voici la traduction :
" Sali (à Konya: se§embe) Comme je l'ai écrit dans une remarque aux
Chansons des Turcs de Crimée ď A. Ol'esnitski, Moscou, 1910, p. 109,
c'est une altération de l'arabe sālis troisième'. Ce n'est pas sans raison
que la palatalisation de la voyelle de la deuxième syllabe est conservée
parfois dans le parler des Osmanli cultivés qui prononcent sali". Cette
note est suivie de ces mots: "L'etymologie de sali n'est pas connue (La
Rédaction)".
Les Ottomans, pour désigner le "troisième" jour de la semaine, se sont
bien servis, même dans le langage courant, du persan se§embe qui a le
même sens, mais non de l'arabe sālis et les emprunts arabes selâsa et
selâse, bien qu'étant de la même racine, n'ont pu donner le mot sali.
Quant à la forme sali , elle semble représenter la prononciation de gens
pédants ou semi-cultivés. On la trouve chez Hindoglotj (1831), chez
Eminian (1881), chez Kantarian (1912), qui a suivi Eminian, sous
„mardi", et même chez Camilla Ružička-Ostoič ( Wörterbuch , 1879).
Nous croyons, comme Kraeutz, que sah est un mot turc et non
l'altération d'un emprunt.
2° L'étymologie proposée par Kraet.ttz von Greifenhorst. Zum
Worte lezez in türk. Urkunde , in der Islam , 1918, p. 139 - 140: „Das
'ulûfe wurde immer an einem Dienstag (sah günü) ausbezahlt. Auch in
alt-türkischem hieß der Wochentag, an den die jährliche Steuer salgm,
salgun zu zahlen war, sahdj was die ältere Form des osm. sah ist."
L'auteur ne précise pas de quel Wochentag il s'agit. En outre il ne donne
pas de référence pour salic(sahdj)y mot qui semble rare, s'il a jamais
existé. On ne le retrouve pas parmi les nombreuses variantes de dérivés
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de la racine sal- signifiant, d


taxe": saliļļ (anc. ouigour), sal
salgun, salgit, salgut, salgirt. L
énumération. Il est vrai que
très bien venir, par amuissem
finale, de sahQ qui est attesté
Edeb de ZamaģŠabī (Taram
salgut), mais toute discussion
vient en l'espèce inutile, pui
sémantiquement la "paye de la
tombe donc d'elle même, du
Il faut cependant retenir sa
solde qui avait lieu effective
jour de la semaine, les regist
chez le Grand-vizir. Au "tro
se§embe, on procédait à la gran
de solde. Retenons ce détail q
les Janissaires de chaque orta
si bien qu'il arrivait qu'un so
était chargé de deux ou trois
Ģebef, Tarih-i devlet-i osma
État militaire ottoman, trad
Remarquons maintenant que
en anatolien dans le sens de "
meler l'explique par nevbet,
"jachère annuelle" (birer yil d
Rappelons-nous que le mot
c'est précisément le pays de
de la cérémonie de la paye d
persan se§embe, tandis que l
nations de la même série (çar
time d'admettre que le term
suite "mardi" a été introduit
milice ottomane.
On remarquera que la locution française synonyme "tour de rôle"
offre un développement de sens analogue. Il s'agissait, en effet, primi-
tivement d'une inscription au "rôle", c'est à dire au registre, comme pour
les orta de Janissaires. On a la même chose dans l'expression anglaise,
d'origine hollandaise, by roster.
Comme l'implique le raisonnement qui précède, j'admets que sali
se rattache à la racine sal- signifiant "lancer, lâcher, dépêcher, envoyer,
pousser, expédier, imposer (un impôt, une taxe)".

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Le nom de mardi en osmanli 385

Au point de vue sémantique on peut constater de


plus ou moins semblables, dans d'autres langues, av
mant l'idée de "frapper", et prenant le sens de "fo
coup, le slave raz (cf. une autre coïncidence d'un g
zaram , turc salgin "contagion"). Le grec forâ sign
"fois". En arabe on a pour "fois" depa (passé aussi en
signifiant "pousser". Les idées de "frapper", "pouss
de celle de "lancer", comme l'idée de "tour de rôle" s
de "fois".
Au point de vue morphologique sait est soit un dérivé (d'origine ou dû,
comme il a été indiqué plus haut, â un amuissement du suffixe -ig, cf.
ma grammaire § 869; Zaj^czkowski, Sufiksy, § 31), soit un gérondif
concordant non redoublé en -( y)e , -{y)i, ma grammaire § 1337 et suiv. On
retrouve la même forme dans le verbe complexe salivermek (sal-i vermek).
C'est plus probablement un gérondif, comme le montre une comparaison
avec la forme synonyme et parallèle sira "rangée, série, tour de rôle"
(Nous avons vu plus haut que YAnadilden Derlemeler explique sali par
sir a). Comme cette forme n'a pas été relevée dans ma grammaire, je ferai
observer ici que sira est sûrement une contraction de siyir-a par réduction
du groupe iyi (quelquefois yi) en i. Cf. sink < siyirik , sirim < siyinm,
yirmi < yigirmi , peki < pek iyi, et peut-être sint- < *siyint-. Or siyir-
signifie "déplacer ou arracher un objet momentanément ou naturellement
adhérent a un autre, frôler, affleurer etc.". Pour la forme complète
styira voir ma grammaire p. 910, en haut (on peut ajouter l'exemple
"en tirant leurs couteaux" (ma. Alger 1640, fol. 5 v°). Sira , pro-
prement "en frôlant" est employé Io comme substantif "suite ou succes-
sion immédiate, file, série, rang, rangée, ordre, tour de rôle , occurence,
moment favorable, occasion, moment en général, temps", 2° comme post-
position (voir ma grammaire § 902 et 1381, remarque).
La forme secondaire en -(y)i, tout a fait parallèle à sali existe aussi
(cf. ardi sin , chez Šeyh Süleyman, p. 270, sous kütmäk).
En résumé le mot osmanli sali signifie "à tour de rôle" et est devenu
le nom du "mardi" dans l'usage des Janissaires et plus tard dans l'usage
commun.

Cette explication a pour elle de s'appuyer sur des for


sans qu'on ait besoin de recourir a des dérivations hypo

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