Télécharger au format pdf
Télécharger au format pdf
Vous êtes sur la page 1sur 6
o7i0e12022 00:51 La chanson de geste et le sacré,éd.N. Bragantin- Mallard, €, Goudeau, Fr, Laurent, Cl, Roussel, N, Viel, Clermont-Ferrand, © OpenEdition Journals Perspectives médiévales Revue d’épistémologie des langues et littératures du Moyen Age 42 | 2021 Les études médiévales face 4 Gérard Genette Etat de la recherche Ouvrages colectts La chanson de geste et le sacré, éd. N. Bragantini-Maillard, E. Goudeau, Fr. Laurent, Cl. Roussel, N. Viet, Clermont- Ferrand, Presses Universitaires Blaise Pascal, 2019 AGATA SOBCZYK hitlps:/fdoi.org/10-4000/peme.41203, Référence(s) La chanson de gste ot le sacré, études réunies par Nathalie Bragantni-Maillard, Emilie Goudeau, Frangoise Laurent, Claude Roussel, Nora Viet, Actes du Xe colloque international de la Section frangaise de la Société Rencesvals (Clermond-Ferrand, 18-20 octobre 2017), Clermont-Ferrand, Presses Universitaires Blaise Pascal, 2019. Entrées d’index + Baudri de Bourgueil, Jacques de Vitry hanson de geste, conversion finale, exedo épi désacralisation, dévotion, 6popée franco-italienne, évéque, femme, gémellité, géographie sacrée, geste du roi, Histoire, inceste,intronisation, lignage carolingien, manuscrit de jongleur, martyr, matidre d'Espagne, miracle, ordre patriarcal, Passion, péchés sexuels, périphrase, pouvoir, pouvoir lai, prire du plus haut péril, religion, relique, sacralité,sacré, sacrifice, sainte, sainteté, Sarrasine, silence, stylistique, transgression, transsexualité, travestissement, violence Keywords: otherness, androgyny, chanson de geste, final conversion, epic ereed, Alesacralization, devoti , Franco-Italian epic, bishop, woman, gemelity, sacred geography, king's gesture, history, incest, enthronement, Carolingian lineage, juggler's manuscript, martyr, matter of Spain, miracle, patriarchal order, Passion, sexual sins, periphrase, power, lay power, hitps:ljournals openedttion org/peme41203 18 ‘07/08/2022 00:51 La chanson de geste et le sacré, dd. N. Bragantin-Mallard, &. Goudeau, Fr. Laurent, Cl. Roussel, N. Viel, Clermont-Ferrand, prayer of the highest perl, religion, relic, sacrality, sacred, sacrifice, saint, sanctity, Saracen, silence, stylisties, transgression, transsexuality, transvestism, violence Parole chiave: alterta, androginia, chanson de geste, conversione finale, eredo epico, desacralizzazione, devozione, epica franco-italiana, vescovo, donna, gemellarita, geografia sacra, gesto del re, storia, incesto, intronizzazione, stirpe carolingia, manoscritto del giocoliere, martire, ‘materia di Spagna, miracolo, ordine patriareale, Passione, peccati sessuali, perifrasi potere, potere laico, preghiera del massimo pericolo, religione, reliquia, sacralita, sacro, sacrificio, santo, santit’, saraceno, silenzio, stlistica, trasgressione, transessualita, travestitismo, violenza uvros, personnages ot lioux lttéraires : Antioche, Bretagne, Jérusalem, Rome, Berthe au rand pied, Charlemagne, Hloripas, Guiboure, Hector, saint Pierre, Sarrasins, Simon le Magicien, Ami et Amile, Baudouin de Seboure, Chanson d’Aiguin, Chanson ’Antioche, Chanson d'Yde et Olive, Chevalerie Ogier, Couronnement de Louis, eyele dela Premiare Croisade, Deuxidme eyele de Ia croisade, Elie de Saint-Gilles, Fierabras, Garin le Loherene, Historia Orientalis, Jourdain de Blaye, La destruction de Rome, La Venjance Nostre Seigneur, Récit en vers de la premiére croisade, Renaut de Montauban, Voyage de Charlemagne Index des modernes : Marianne Ailes, Emma Babillo-Sphonix-Rust, Philip E. Bennett, Marie~ ‘Madeleine Castellani, Alain Corbellav,.Jérdme Devard, Mircea Eliade, René Girard, Philippe Haugeard, Nadine Henrard, Sandrine Legrand, Valérie Méot-Bourquin, Valérie Naudet, Muriel tt, Jn Zivéak, Dorothea Kullmann, Beate Langenbruch, Chloé Lelong, Pierre Levron, Rudolf Otto, Jean-Charles Payen, Elena Podetti, Bernard Ribémont Texte intégral + Les derniéres années montrent que la chanson de geste est toujours un domaine stimulant pour les chercheurs. En 2015, les auteurs du recueil Chanson de geste et savoirs savants abordaient la question par un biais résolument paradoxal. Analyser la dimension sacrée de la chanson de geste parait étre, au contraire, une évidence, tellement la question est essentielle pour le genre ; le résultat est pourtant tout aussi enrichissant. 2 Les études sont tres différenciées. Elles le sont du point de vue méthodologique, tout aabord, puisqu'elles se basent sur différentes définitions du sacré, en particulier celles de Mircea Eliade et de René Girard, sans négliger approche proprement chrétienne ; cette diversité, offrant une multitude de points de vue sur la question, semble tout a fait, avantageuse. La thématique des articles est tout aussi diversifiée : certains se concentrent sur des questions strictement littéraires ou textuelles, mais la plupart abordent des sujets qui ont trait a Vanthropologie : la violence, la relation entre le sacré et Ie pouvoir (avec la figure emblématique de Charlemagne), l'image de Autre (la religion des Sarrasins), la conception de 'histoire, la représentation de la géographie sacrée. Tl est vrai quill est difficile de distinguer ces approches puisque aussi bien la tradition manuscrite que la stylistique permettent dans plusieurs cas de saisir différents aspects du sacré propre a la société médiévale. 38 Le recueil s‘ouvre par l'article de Marianne Ailes qui analyse la fonetion des reliques dans le Pélerinage Charlemagne, Fierabras et La destruction de Rome. Elle constate que dans ces textes, les reliques n’apparaissent pratiquement jamais pour leur pouvoir de guérison ni comme talisman protecteur ; elles fonctionnent soit comme « déclencheur narratif » (p. 20), soit comme signe du pouvoir spirituel. Ce deuxiéme réle concerne surtout la personne de Charlemagne, qui, par ailleurs, s'attache beaucoup aux reliques : il leur accorde une importance comparable a celle de ses chevaliers. (« Les reliques dans les chansons de geste »). 4 Jérdme Devard montre que les rituels d'intronisation représentés ou mentionnés dans les chansons de geste sont faiblement christianisés. Pourtant, la royauté n’est pas dépourvue de sacralité ; cest que celle-ci n'est pas a chercher dans Tidéologie chrétienne prégnante dans la société de Vépoque. Elle repose sur le charisme dynastique, transmis de pére en fils. Cette sacralité se manifeste par Vaura magique des ‘ois. Elle s’accompagne de nombreux gestes de transgression qu’on peut déceler aussi bien dans des comportements involontaires ~ Charlemagne provoque la mort violente dela plupart de ses héritiers, incarnant par ees actes de désocialisation la figure du « roi hitps:tjourals.openedtion org/pemel#1203 216 ‘07/08/2022 00:51 @ ‘magicien » ~ que dans les nombreux péchés sexuels des suzerains, en commengant pas Vineeste présumé de Charlemagne. Ces bouleversements transgressifs révélent une certaine sacralité du lignage carolingien. (« Aux sources de la royauté épique : la sacralité du gemus royal »). Nadine Henrard s'intéresse aux manuscrits ot les chansons de gestes voisinent avec des textes religieux. Tenant compte du réle du hasard qui peut jouer dans la composition du manuserit, l'auteure dégage quand méme une certaine logique dans le choix des textes réunis ainsi : surtout, la forte présence des récits de la Passion permet de pervevoir les héros épiques comme des martyrs. De plus, Nadine Henrard constate que pour la moitié des manuscrits analysés, leur forme matérielle correspond a ce qu'on appelle « le manuscrit de jongleur » ; la chercheuse pose avec prudence la question de savoir si on peut associer ce fait avec la distinction par les moralistes d'une catégorie privilégiée de jongleurs, ceux qui se spécialisent justement dans les ceuvres religicuses et les chansons de geste. (« La tradition manuscrite des textes épiques et le sacré >). Sandrine Legrand présente un cas particulier de conversion d'un Sarrasin, Contrairement A la convention, Hector de Baudouin de Seboure est un « bon Sarasin » qui refuse de se convertir. Le sens de ce refus dépend pourtant de la fagon dont on envisage la place du texte dans le cycle : si on le considére comme un texte autonome, ce serait le signe qu'une image nouvelle de l'autre se fait jour au XIVe siécle ; si on le voit en relation avec d’autres textes qui mettent en scéne le méme personage, sa générosité ne fait que préparer la conversion finale. (« La conversion d'Hector de Salorie dans le Dewxiéme cycle de la eroisade >). Larticle de Valérie Méot-Bourquin pose une question fondamentale, a savoir d’od vient le sentiment de sacralité qui frappe Pauditeur ou Te lecteur de la chanson de geste. Partant de la conviction que le sacré doit aller de pair avec le silence, elle aboutit & la conclusion que ce sont les rythmes multiples sur lesquels se basent les chansons de geste — formules, reprises, jeux d’échos, parallélismes — qui font « de lceuvre une liturgie » (p. 88). Associés & la parataxe, ils se combinent bien avec la thématique de la violence, Le fait que « le got du sang [fasse] naitre le sentiment du sacré » (p. 84) trouve son explication, selon l'auteure, dans la définition du sacré que donne Rudolf Otto (le « numineux » éveille des sentiments ambivalents de crainte et de fascination). Aussi les épopées tardives oti les effets rythmiques manquent sont-elles privées de « hauteur sacrée » (p. 88), méme si leur contenu est religieux. Malgré la part de subjectivité dans cette vision, il me semble qu'elle saisit un aspect essentiel du genre et en méme temps le moyen principal de expression épique du saeré. (« Effets de silence et stylistique du sacré dans quelques chansons de geste du XI au XVe siécle »), Valérie Naudet soumet & une analyse linguistique les périphrases qui, dans les textes épiques, servent & évoquer Dieu. Elle les considére comme « le reflet de la fagon dont, les hommes des XIe et Xlle sidcles se sont approprié le concept de Dieu » (p. 92). Il est ‘vrai que ce qui se révéle surtout de cette fagon, c'est la mentalité féodale, privilégiant les, épithétes qui expriment la puissance, En revanche, Pauteure démontre la richesse poétique de ces passages, richesse qui va de pair avec la conviction sous-jacente que le langage est impuissant face a la transcendance. (« Noms de Dieu >), Muriel Ott analyse la tradition manuserite des pritres du plus haut péril dans la Chevalerie Ogier. auteure sintéresse aussi bien A leur réle dans le texte, plus dramatique ou plus ornemental selon le eas, qu’ leur contenu. Celui-ci présente une gtande cohérence, les mémes motifs se retrouvant d'une version a autre ; dans certaines versions apparaissent pourtant des détails apocryphes originaux. (« Les credo épiques de la Chevalerie Ogier : credo certifiés et remaniements »). ‘Jan Zivéak montre comment, dans le Couronnement de Louis, au terme d’un sacrifice sanglant, le culte royal se substitue au culte divin. Ce processus s‘inserit dans un espace dont le caractére sacré est construit dune fagon bien particuligre puisqu'il est privé déléments chrétiens et correspond plutdt A un temple archétypal. (« L’pique, le iturgique, le royal : pour une mythopoétique du mostier d’Aix dans le Couronnement de Louis »). hitps:tjourals.openedtion org/pemel#1203 La chanson de geste et le sacré, dd N. Bragantin-Mailard, €. Goudeau, Fr, Laurent, Cl, Roussel, N. Viel, Clermont-Ferrand, 316 ‘07/08/2022 00:51 ” 2 8 6 analyse du sacré et de la violence dans la Chanson d'Antioche par Bernard Guidot montre que si on aborde la question du point de vue de la religion chrétienne, la question de la représentation épique du saeré demeure un paradoxe indissoluble : il n'y a aucune trace de lenseignement du Christ dans Punivers dominé par la violence (« Peut-on parler de trahison du sacré dans la Chanson d’Antioche ? »). Dorothea Kullmann montre une forme de religiosité particuligre dans une version tardive de Renaut de Montauban, oii le héros laique acquiert un statut proche de la sainteté et en méme temps représente une attitude qu’on peut rapprocher de la devotio moderna. L’auteure est pourtant prudente quant a la possibilité d'une influence effective de ce courant sur Yauteur du texte. (« La religiosité laique dans le remaniement de Renaut de Montauban »). Beate Langenbruch interroge la relation entre le sacré et la violence dans Elie de Saint-Gilles & travers la rivalité mimétique entre les chrétiens et les Sarrasins. Méme si le recours & la chanson de Janis Joplin ne semble pas trés & d'une fagon convaincante que la religion est traitée dans ce texte d'une fagon trés mercantile, aussi bien par les Chrétiens que par les Sarrasins. Le dieu chrétien Temporte parce qu'il est plus efficace, et cette victoire est couronnée par des actes de violence des Sarrasins contre leurs propres idoles. On peut seulement se demander si le caractére intéressé de la foi est spécifique a la chanson de geste ; somme toute, il fonde un autre genre litéraire, celui du miracle 1a aussi, « le bon dieu, c'est celui qui montre son efficacité au fidale » (p. 173). (« Sacré Mahomet... ! Traitements et maltraitance du divin dans Elie de Saint-Gilles »).. Chloé Lelong s'intéresse a la représentation de Charlemagne dans les épopées franco- italiennes de la matiére d'Espagne ; Tempereur y est représenté d'une fagon ambivalente, D'un e6té, on le montre dans des situations peu louables et on insiste sur ses faiblesses, sur ses carences morales et sur la fragilité due a son Age ; d’autre part, ila des qualités et de bonnes intentions. Il manque surtout de prudence, ce qui est particuligrement significatif dans le contexte du premier humanisme italien ot cette qualité joue un réle important. Aussi, sa désacralisation aboutit & une image plus humaine. (« La désacralisation de Charlemagne dans les épopées franco-italiennes de la matiére dE lairant, 'auteur montre ion des Sarrasins sous un angle inhabituel, celui de la révolte contre leurs dieux. Le désespoir sarrasin s'exprime différemment de celui des, chrétiens, a savoir par une colére blasphématoire. Ces se’nes seraient pourtant inspirées par la tradition chrétienne concernant le sentiment de déréliction. On se pose Ja question de savoir si, dans ces scénes, Yaccent n'est pas plut6t mis sur T'inefficacité des dieux paiens (question traitée aussi bien dans la communication de Beate Langenbruch que dans celle de Mariane Ailes) ; peut-on faire grief & celui qui perd une foi dont l'objet est faux ? Pourtant, auteur cite le passage de la traduction de Historia Orientalis de Jacques de Vitry ot les Sarrasins sont qualifiés de « gent desperee » (p. 199) : visiblement, ce péché vaut aussi pour la religion des infidéles. Placer V'analyse dans la subjectivité des Sarrasins intervertit Vordre attendu et constitue une approche originale (« Les Sarrasins aux dieux incapables, ou les représentations paradoxales du. désespoir. Enquéte dans les chansons de geste du XIle au XIVe sic »). Elena Podetti propose une interprétation du motif de travestissement et transsexualité dans Yde et Olive, d’un cété en rapprochant le personage principal des figures des saintes travesties, et, de Pautre, en placant le texte dans le contexte des controverses politiques et religicuses de époque concernant lnceste. Elle aboutit & la conclusion que cette chanson de geste nourrit une réflexion sur le pouvoir et le lignage ; il semble tout a fait justifié d'attirer V'attention sur le dénuement « qui fait triompher Vordre patriarcal préétabli » (p. 212-213) pour écarter toute lecture anachronique. (« Entre androgynie, sang et sainteté : aspects du sacré dans Ia Chanson d'¥de et Olive »). Emma Bahillo Sphonix-Rust présente deux cas de femmes épiques associées & la violence, soit en tant que sujet (Floripas de Fierabras), soit en tant que vietime (Berthe au grand pied). Cest en particulier ce premier cas de figure qui est important a relever hitps:tjourals.openedtion org/pemel#1203 La chanson de geste et le sacré, dd N. Bragantin-Mailard, €. Goudeau, Fr, Laurent, Cl, Roussel, N. Viel, Clermont-Ferrand, 416 ‘07/08/2022 00:51 8 8 2» 2 2 comme non conforme a un certain stéréotype de la féminité, méme sil s‘agit d'une Sarrasine. On peut pourtant se demander si ce personnage constitue vraiment une exception absolue opposée a un « idéal féminin médiéval » (p. 225) ; ni Guiboure, ni la mére de Raoul de Cambrai (pour s’en tenir a ces deux exemples) ne sont des incarnations de la douceur. (« Du saeré et de la violence chez la ferme épique >). ‘Avec intervention de Philip E. Bennett et la Chanson d’Aiquin, Vaction se déplace en Bretagne. L’auteur s'intéresse surtout aux relations entre le religieux et le pouvoir laic dans cette histoire de la « reconquéte » de Bretagne : le personnage de l’évéque fait ici concurrence a Charlemagne, le miracle vient parfois masquer le comportement peu héroique des chevaliers franes et V'tinéraire militaire est ponetué par des lieux sacrés («La Chanson d'Aiquin : entre croisade et pélerinage »). Marie-Madeleine Castellani explique le rdle du motif de la confrontation entre saint Pierre et Simon le Magicien, et les modifications qu’ subit dans le Récit en vers de la premiére croisade. Il s‘agit en particulier du déplacement de la sc’ne de Rome & Antioche, que Pauteure explique par la volonté de justifier le sige d’Antioche par le rappel de son passé chrétien incarné dans la figure fondamentale de saint Pierre. Antioche devient ainsi une préfiguration de Jérusalem, mais aussi de Rome. (« Laffrontement de saint Pierre et de Simon le magicien dans le Récit en vers de la premiére croisade d'aprés Baudri de Bourgueil ») Alain Corbellari attire Vattention sur un texte qu'il considére comme injustement négligé par la critique, La Venjance Nostre Seigneur. Le chercheur montre tout d'abord. que Yceuvre appartient bien au genre épique et lui assigne une place au eroisement de la geste du roi et du cycle de la Premiére Croisade. Il explique la tradition manuserite qui juxtapose ce texte au Voyage de Charlemagne — ce serait une fagon de rehausser la dignité de cette ceuvre peu sérieuse par la chanson que V'auteur qualifie de « Pune des plus sinistres que Von puisse lire » (p. 251). L'étude se termine par des réflexions sur la faible place de Rome dans l'épopée, qui rejoignent et développent celles de Marie~ Madeleine Castellani (« La Jérusalem épique avant Gaudefroi de Bouilon : de La Venjance Nostre Seigneur au Voyage de Charlemagne >). article extrémement stimulant de Philippe Haugeard propose une interprétation de Garin le Loherenc a la lumiére de la théorie de René Girard. L’auteur se garde Gappliquer directement la grille anthropologique au texte littéraire ; il montre quill sfagit juste d’échos et de reprises fragmentaires de certains motifs et il signale des divergences par rapport au schéma girardien. Cela dit, on voit sans peine que la présence de la violence omniprésente, de la rivalité mimétique et de la mort sacrificielle (« mort misérable et admirable, sauvage et grandiose » ; p. 271) dévoile dans le texte étudié un sacré de type archaique, préchrétien, et que « la célébration épique confine elle-méme au sacré en certains de ses épisodes les plus puissants » (p. 271). Ces considérations se laissent facilement généraliser pour caractériser le genre entier. (« Garin le Loherene a Pépreuve de La violence et le sacré de René Girard »). Bernard Ribémont dans un article trés dense applique la pensée de René Girard & Ami et Amile et Jourdain de Blaye ; 14 encore, cette méthode semble particuligrement pertinente, et permet de déméler les entrecroisements complexes de la gémellité et de la violence. En outre, cette approche permet d’établir une relation entre les deux textes, conservés dans le méme manuserit : le deuxiéme proposerait « la solution d'une forme de crise sacrificielle » (p. 275) représentée par le premier. (« Amie et Amile, Jourdain de Blaie, la violence et le sacré »). Ainsi, parmi toutes les définitions du sacré, c'est celle de René Girard qui parait la plus adaptée a Vétude du sacré épique. Rien d’étonnant, puisqu’elle se base sur Vassociation du sacré et de la violence qui détermine la spécificité de la chanson de geste. Cette approche permet de dévoiler dans les chansons de geste des couches profondes du sacré archaique ; sans cela, on serait réduit la triste constatation de Yalliance du tréne et de Vautel. Le résultat supplémentaire du recueil est quill permet de savourer la difficile et dangereuse beauté du genre. La célébration d'une « liturgie du génocide », pour reprendre Vexpression de Jean-Charles Payen, fournit toujours au lecteur un plaisir hitps:tjourals.openedtion org/pemel#1203 La chanson de geste et le sacré, dd N. Bragantin-Mailard, €. Goudeau, Fr, Laurent, Cl, Roussel, N. Viel, Clermont-Ferrand, 56 ‘07/08/2022 00:51 La chanson de geste et le sacré, dd N. Bragantin-Mailard, €. Goudeau, Fr, Laurent, Cl, Roussel, N. Viel, Clermont-Ferrand, @ incontestable, malgré la conscience ot peut mener cette rhétorique. A lire les citations alléguées par les auteurs des articles, oi les vers frappent comme un coup de hache, on ressent vraiment le frisson du sacré. Le recueil présenté permet de saisir les mécanismes de ce plaisir aussi bien que les rouages de I'idéologie qui se cache derriére. Pour citer cet article éfrencedletronique ‘Agata Sobezyk, « La chanson do goste ot le sacré, 6d. N. Bragantini-Mailard, €. Goudeau, Fr. Laurent, Cl. Roussel, N. Viet, Clermont-Ferrand, Presses Universitaires Blaise Pascal 2018 », Perspectives médiévates [En ligne], 42 2021, mis en ligne le , consults le 07 aodt 2022. URL : htpijournals.openediton org/peme/41208 ; DOI : htps:dol.org/10.4000/peme.41203 Auteur Agata Sobczyk Articles du méme auteur Histoires des Bretagnes 5. En marge, dir, Héléne Bouget et Magali Coumert, Brest, Université de Bretagne Occidentale, 2015. (Texte integral) aru dans Perspectives médlévales, 40 | 2019 Dialles et d’oiseaux au Moyen Age. Langue, littérature, histoire des sclences (Texte integra Paris, Honoré Champion, 2016 Paru dans Porspectves médiévale, 38 | 2017 Chaire, chair et bonne chére. En hommage & Paul Bretel [Texte intégral] aru dans Porspoctives médivals, 36 | 2015 Histoires des Brotagnes, 4. Conservatours de la mémoire (Texts intécral Université de Bretagne Occidentale, Brest, 2013 Paru dans Perspectives médiovales, 36 | 2015 Cloches ot horloges dans les textes médiévaux {Texte intégral Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2012 aru dans Perspectives médtévalos, 35 | 2014 Droits d’auteur ‘Tous droits réservés hitps:tjourals.openedtion org/pemel#1203 66

Vous aimerez peut-être aussi