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Interfaces graphiques

Type WIMP
par Marc NANARD
Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)
Laboratoire d’informatique, de robotique et de microélectronique de Montpellier (LIRMM),
UMR CNRS/université de Montpellier-II
et Jocelyne NANARD
Université de Montpellier-II, LIRMM

1. Constituants .............................................................................................. H 7 216 – 2


1.1 Action de pointer.......................................................................................... — 2
1.2 Regrouper et séparer l’information : les fenêtres ..................................... — 3
1.3 Raccourcis symboliques : les icônes .......................................................... — 7
1.4 Organiser les commandes : les menus ...................................................... — 8
2. Dialogue ...................................................................................................... — 9
2.1 Principe ......................................................................................................... — 9
2.2 Principaux interacteurs ................................................................................ — 10
2.3 Structuration syntaxique ............................................................................. — 11
2.4 Structuration visuelle................................................................................... — 12
3. Principales métaphores .......................................................................... — 15
3.1 Bureau ........................................................................................................... — 15
3.2 Dialogue et conventions .............................................................................. — 16
3.3 « Copier-coller » ........................................................................................... — 16
3.4 « Glisser-déposer » ...................................................................................... — 17
3.5 Poubelle ........................................................................................................ — 17
3.6 Arbre développable ..................................................................................... — 17
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. H 7218

es habitudes d’interaction qui se sont développées du fait de l’emploi


L d’écrans ont forgé le « look and feel » des interfaces graphiques usuelles.
Petit à petit, les comportements et les conventions de représentation se sont
homogénéisés et ne diffèrent d’un système à l’autre que par de très petits
détails. Ces interfaces graphiques portent le nom générique d’interfaces WIMP
(« window, icon, menu, pointer ») en raison des interacteurs graphiques macros-
copiques que l’on y rencontre le plus fréquemment. Mais il existe des interfaces
à désignation directe, non WIMP, par exemple celles des jeux vidéo.
En pratique, les divers objets graphiques et les conventions d’usage associées
sont actuellement bien au point et sont directement disponibles sous des formes
fonctionnellement et visuellement très voisines dans les différentes boîtes à
outils qui permettent de développer des interfaces graphiques. Citons Delphi
pour Lisp, Motif pour X-Windows, Mac App et PowerPlant pour le MacIntosh, et
les bibliothèques Java pour ce dernier langage. On y trouve en particulier les
classes permettant de construire aisément des spécialisations des interacteurs
de base dont on peut avoir besoin. Toutefois, un concepteur d’interfaces doit
aussi connaître et comprendre les principes ainsi que les raisons des longues
évolutions qui ont conduit aux interacteurs actuels, car il peut être amené à
développer de nouveaux interacteurs pour des besoins spécifiques.
Après l’exposition des fondements cognitifs des interfaces graphiques [H 7 215],
cet article adopte le point de vue des objets et des techniques de l’interaction pour
l’utilisateur. L’article suivant [H 7 217] explique les principes d’architecture logicielle
pour les interfaces graphiques et les spécificités des différentes plates-formes.

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1. Constituants Exemple : les zones d’un écran d’une borne interactive de vente de
billets sont très grandes et peu nombreuses pour pouvoir être dési-
gnées (pointées) du doigt, même par une personne peu habile. Un
thème très important dans la conception d’interfaces est désormais
Les interfaces graphiques WIMP (window, icon, menu, pointer) l’accessibilité pour tous, c’est-à-dire la prise en compte des handicaps
usuelles font intervenir deux caractéristiques principales : ( auditifs, visuels, moteurs…), et de façon plus générale, l’adaptation à
— elles nécessitent de pouvoir désigner la représentation d’un l’usager non expert, trop longtemps négligé par les informaticiens. La
objet, d’une commande, d’une valeur. Cette action se nomme facilité de désignation est un facteur important à prendre en compte.
« pointer » ; Quel que soit le dispositif matériel utilisé (molettes – figure 1 –,
— elles organisent le dialogue macroscopique avec les classes souris, etc.), l’interprétation des actions réalisées avec ces disposi-
d’objets graphiques suivantes : tifs est transposée en désignation fonctionnelle. Elle n’est pas tou-
• des fenêtres, jours « géométrique ». Le choix de ces dispositifs repose sur
• des icônes, l’analyse des comportements spontanés des usagers.
• des menus.
Exemple : ainsi, certaines bornes SNCF utilisent une molette pour
Elles sont donc considérées comme des interfaces à désignation faire défiler un pointeur horizontal désignant globalement une ligne. En
directe. Dans l’organisation détaillée du dialogue, elles utilisent une effet, il semble que les usagers novices soient plus prompts à tourner
grande variété d’interacteurs qui mettent en œuvre le pointage. De un bouton qu’a toucher un écran. Cela s’appelle le déterminisme lin-
façon générale, le dialogue est régi par un langage dont les éléments guistique. Il consiste à agir et penser avec le vocabulaire dont on dis-
sont les interacteurs, aussi bien les fenêtres, les icônes, les menus pose déjà et ce, en termes des actions dont on a l’habitude. L’usager
que des interacteurs comme les boutons, les boîtes de dialogue, etc. ne touche pas l’écran de sa télé ; par contre, il tourne les boutons de
son poste de radio. Il peut inférer facilement qu’il peut tourner le bou-
ton qu’il voit sur la borne, alors qu’il n’inférera pas spontanément qu’il
peut toucher l’écran s’il ne voit personne le faire. Aujourd’hui, presque
1.1 Action de pointer tout le monde a utilisé un écran tactile, le problème est donc moins cru-
cial.
1.1.1 Principe La désignation peut ne faire appel à aucune notion géométrique,
mais seulement à un parcours abstrait d’éléments. Dans ce cas, les
Toutes les interfaces à désignation directe, en particulier WIMP, organes de pointage peuvent être les flèches du clavier.
demandent à l’usager de désigner ce qu’il souhaite en le « mon- Exemple : les icônes des éléments d’un dossier sur Mac ou PC
trant » et en confirmant son choix. peuvent être désignées (pointées) sans utiliser la souris, directement
au moyen des flèches du clavier. Il s’agit bien d’une désignation et non
■ Pointer
d’une nomination textuelle. On parcourt l’ensemble des icônes par
Le terme « pointer » désigne l’action qu’effectue l’usager qui désigne
ordre alphabétique à l’aide des flèches droite et gauche. C’est une
une partie identifiée de l’écran. Deux entités interviennent :
autre façon de pointer. Elle est fréquemment utilisée pour la désigna-
— le moyen utilisé pour pointer ; tion dans les listes et les menus, comme alternative à la désignation
— l’objet qui est pointé. par souris.
■ Pointeur
Le terme « pointeur » désigne le moyen utilisé pour réaliser
l’action de pointer. Il permet de montrer l’objet d’intérêt en pointant 1.1.2 Utilisabilité et pointage
sur sa représentation à l’écran et en le sélectionnant.
Un pointeur est constitué de deux dispositifs : Les problèmes d’utilisabilité concernant le pointage correspon-
— un « dispositif matériel de pointage » dont l’utilisateur modifie dent aux difficultés de réalisation de l’opération.
la position dans l’espace ;
— un « dispositif logique de pointage » : le curseur. 1.1.2.1 Précision du pointage
La désignation met en jeu la boucle de Norman [H 7 215]. L’usa-
ger agit avec le dispositif de pointage (souris, touches, joystick, Le pointage utilisé dans la désignation directe est le plus souvent
tablette…) et évalue l’effet de son action en observant sur l’écran la un pointage fonctionnel servant uniquement à désigner, et non un
position d’un « curseur » qui représente le point d’intérêt de l’utilisa- pointage géométrique exact comme vers une cible. La précision
teur. C’est ce curseur qui est déplacé à l’aide du dispositif de poin- graphique de la visée est donc souvent secondaire, le pointage dési-
tage. Il s’agit typiquement d’un transfert métaphorique : en gnant une entité de taille importante (par exemple, un bouton, une
déplaçant un objet matériel, l’utilisateur agit sur un objet abstrait, un icône, un item de menu, un mot).
point à l’écran. Ce point à l’écran, pour des raisons de lisibilité, est La précision ne prend sens que lorsque les objets à désigner sont
représenté graphiquement par une croix, une flèche, etc. eux-mêmes très petits, en particulier dans les constructions graphi-
■ Objet pointé ques, retouches d’image, etc. Par contre, dans de très nombreuses
applications, une précision de l’ordre de la cinquantaine de pixels
De fait, la désignation repose techniquement au niveau le plus est souvent tout à fait suffisante.
bas sur l’analyse de la position effective du curseur, mais elle est
très vite transformée en une désignation fonctionnelle de zones
cibles qui correspondent à la représentation graphique de l’objet sur 1.1.2.2 Précision et sensibilité du pointage
lequel porte l’interaction de l’utilisateur. Ainsi, c’est tel « bouton »
ou tel « item de menu », en tant que tel, qui a été « désigné » et non Le pointage implique le changement de position dans l’espace du
telle coordonnée qui est concernée. dispositif matériel. Il n’y a pas nécessairement de proportionnalité
entre les comportements de déplacement du dispositif physique et du
■ Zone cible pour la sélection d’un objet curseur. Par exemple, les souris offrent en général une sensibilité non
Une zone cible désigne une zone géométrique de l’écran qui, si linéaire qui est plus grande lorsqu’on déplace moins vite la souris. Il
elle contient le curseur et si l’utilisateur valide sa désignation, pro- est ainsi possible de pointer la cible avec plus de précision lorsque l’on
voque la sélection de l’objet associé à cette zone cible. amène le curseur au voisinage de la région d’intérêt.

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Figure 1 – Pointeur à rouleau

Figure 3 – Désignation en trois


dimensions avec une boule

Figure 2 – Tablette
à numériser

Les "poignées"
Exemple : dans les débuts, ainsi que maintenant encore sur les pour attraper
tablettes, il y avait proportionnalité entre les déplacements matériels et les objets
leur effet. Cela s’est avéré peu pratique et inadapté d’un point de vue
cognitif. Les souris actuelles ont un déplacement “non linéaire” : la dis-
tance parcourue par le curseur sur l’écran est proportionnelle à la Figure 4 – Aide au pointage (sous PowerPoint)
vitesse de la souris et non à son déplacement. De ce fait, la boucle de
réaction intègre directement l’effet de la loi de Fitts (relative à la rela-
tion entre la vitesse, la précision et la distance). Quand l’usager va vite, signaux émis et en déduit la position de la poignée. Il n’y a donc
c’est qu’il n’a pas besoin de précision. Quand il va lentement, c’est qu’il aucune contrainte pour l’usager. Ces dispositifs sont utilisés princi-
a besoin d’une grande précision. Cette transformation est si bien fon- palement dans les équipements de réalité virtuelle.
dée que l’usager ne constate même pas cette non-linéarité et la trouve Le gant tactile mesure les efforts reçus lors du pliage des doigts.
naturelle. Il laisse donc une grande liberté à la main. La mesure de sa position
Les tablettes à numériser (figure 2) permettent de connaître de est effectuée par le même procédé que précédemment.
façon précise la position d'un point sur une surface. Les procédés de Nota : le lecteur intéressé trouvera dans [6] une excellente classification des dispositifs
d’interaction.
mesure sont divers. L'un d'eux consiste à mesurer le temps de pro-
pagation d'une onde sonore depuis plusieurs points jusqu'au stylet.
Les tablettes ont été utilisées au début principalement pour la 1.1.2.3 Magnification des zones cibles
numérisation de cartes. On constate alors que le contrôle en posi- Dans certains logiciels, par exemple ceux de dessin, la géométrie
tion est en général assez peu naturel. Il n’a de sens que pour le poin- joue un rôle capital, le pointage sert à designer l’entité la plus petite
tage direct sur un document posé sur la tablette. Sur certaines identifiable sur l’écran : le point. La précision graphique prend son
tablettes, équipées indifféremment d’un crayon et d’une souris, sens ici uniquement du fait que l’entité visée est petite. C’est pour
celle-ci peut être contrôlée en position ou en vitesse. cela que, pour réduire la distance opératoire, les logiciels de dessin
La souris n’est pas le seul moyen de pointage. Elle est considérée utilisent des « poignées » (figure 4), sortes de carrés de taille suffi-
comme peu précise. Certains dispositifs permettent une grande pré- sante pour manipuler plus facilement les entités graphiques. Le
cision géométrique. pointage des poignées est ainsi moins critique.
Exemple : sur les premiers écrans graphiques, utilisés, par exemple,
1.1.2.4 Ambiguïté de désignation
en conception assistée par ordinateur, on utilisait pour pointer un
« réticule », c’est-à-dire deux lignes qui se croisent, comme dans un Parfois, des zones cibles correspondant à plusieurs objets sont
viseur. Chacune d’elles était déplacée par une molette. C’est en couplant empilées sur l’écran. L’utilisateur peut être amené à des manipula-
le mouvement de ces deux molettes que Douglas Engelbart a inventé la tions supplémentaires pour pouvoir sélectionner l’objet d’intérêt.
souris. Les réticules sont très précis. Ils sont encore utilisés pour les Dans de nombreux cas, l’interface peut lever l’ambiguïté. Ainsi, les
relevés géographiques ou encore pour réaliser les cartes à partir de pho- poignées d’un objet sélectionné sont toujours considérées comme
tos aériennes. présentes en surface, même si l’objet est en partie ou totalement
caché par d’autres. Lorsqu’un objet est caché par d’autres, sa dési-
D’autres dispositifs permettent de capter plus de deux coordon- gnation devient impossible. Il faut alors altérer temporairement la
nées, en particulier pour les applications 3D. Il existe des capteurs structure pour permettre d’atteindre l’objet. Cela se produit fréque-
destinés à la désignation en trois dimensions. Ils peuvent avoir ment dans les logiciels de dessin, ainsi qu’avec les piles de fenêtres.
jusqu’à six degrés de liberté (trois mouvements, trois angles). Le
plus simple est la « boule » (figure 3). On tient une boule en main.
Elle est reliée à un support par un capteur d’effort. On peut la soule-
ver, la pousser en avant ou en arrière, à droite ou à gauche, et en 1.2 Regrouper et séparer l’information :
même temps la tourner selon les trois axes. Ce dispositif est d’un les fenêtres
emploi assez surprenant car les déplacements effectifs de la main
sont nuls, seul l’effort est pris en compte.
Les dispositifs ayant le plus de naturel consistent en une poignée Les interfaces à désignation directe organisent géométriquement
équipée à ses extrémités d’émetteurs ultrasonores. Un ensemble de l’information sur l’écran pour que l’usager puisse la désigner. L’élé-
trois récepteurs mesure les différences de temps de parcours des ment structurant le plus général est la fenêtre.

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1.2.1 Point de vue fonctionnel du fenêtrage Dans le milieu de la décennie1960, IBM avait sorti un système
d’exploitation multitâche « DOS » sur l’IBM 360. Ce système effectuait
trois tâches en parallèle, identifiées par les noms F1, F2 et BG. La con-
La fenêtre est le type d’interacteur qui est devenu le plus commun sole de l’opérateur, simple machine à écrire, listait de façon séquentielle
dans les interfaces graphiques. Il est même devenu si commun qu’il les messages provenant de ces trois tâches en les faisant précéder en
est utilisé indépendamment de la manipulation directe. début de ligne par l’identifiant de cette tâche. Pour répondre aux mes-
sages, l’opérateur devait commencer la ligne par le nom de celui-ci. Il
■ Fenêtrage s’agit typiquement d’un dialogue multifil. Le listing de la console était-il
Fonctionnellement, le fenêtrage est une métaphore visuelle per- particulièrement facile à lire ? Non !
mettant de séparer les flots d’échange dans un dialogue multifil. Si, au lieu d’une machine à écrire, un écran avait été disponible, il
L’écran est divisé en autant de zones qu’il y a de fils de dialogue aurait suffit de séparer celui-ci en trois zones pour répartir les messages
(figure 5). Chaque zone correspond à un fil. Un dispositif de poin- en fonction de leur provenance et ainsi reconstituer la continuité des fils
tage permet à l’usager d’indiquer à quel fil il s’adresse. Le système de dialogue. Cela aurait constitué fonctionnellement un écran « à
affiche les informations relatives à un fil donné dans la zone corres- fenêtres ».
pondante. Aujourd’hui, dans de nombreux logiciels, plusieurs fils de dialo-
Cette définition montre le caractère très général de la notion de gue sont gérés simultanément, chacun dans une fenêtre. Par exem-
fenêtre, bien au-delà de son implémentation courante. Les premiers ple, sous un traitement de texte, plusieurs fenêtres peuvent contenir
systèmes à fenêtres, y compris les toutes premières versions de respectivement un texte, les propositions de correction orthographi-
MS Windows, ont été très proches de cette définition fonctionnelle que, ou encore les informations de recherche/substitution.
qui supporte des implémentations primaires, très différentes de ce
que nous connaissons aujourd’hui.
1.2.2 Systèmes actuels
■ Dialogue multifil
Les premières fenêtres ayant des caractéristiques voisines des
Un dialogue est dit multifil (en anglais multi-thread) quand plu- fenêtres actuelles datent des années 1975. Elles sont issues des tra-
sieurs fils de conversation s’entrecroisent temporellement. vaux du laboratoire de recherche de Xerox, à Palo Alto, bien que des
implémentations plus simples aient existé auparavant.
Exemples : la suite de phrases qui suit, prononcée en séquence
par une personne au marché, est un exemple typique de dialogue Les caractéristiques ajoutées depuis ne modifient pas le rôle fonc-
multifil dans la vie courante. tionnel de la fenêtre mais enrichissent la métaphore d’interaction.
« Bonjour, je voudrais un kilo de pommes… Brrr qu’il fait froid
aujourd’hui. Et votre père, sa santé va mieux ? Elles sont belles, mettez 1.2.2.1 Métaphore de la pile de feuilles
m’en plutôt deux kilos. Avec ce temps là, vous devez vous geler à être
La géométrie de « feuilles empilées » des fenêtres que nous
dehors comme ça, je vous plains. Ah, ça me fait plaisir de savoir qu’il va
connaissons sur les écrans est l’aboutissement d’une évolution qui
mieux . Voilà dix euros… Merci. Au revoir.»
est à l’origine même du nom de cette métaphore.
Le fil principal concerne l’achat de pommes. Il est entremêlé avec
deux autres flots, celui sur la pluie et le beau temps et celui sur la ■ Historique : fenêtre et utilisation de l’écran
santé. Les dialogues multifils sont extrêmement fréquents chez Les toutes premières implémentations de fenêtres ont utilisé une
l’humain et sont de plus en plus utilisés sur les ordinateurs grâce aux partition de l’écran (ou pavage) dans laquelle la surface de celui-ci
systèmes multitâches. était répartie de façon exclusive entre les différents fils du dialogue.
Considérons maintenant un exemple de dialogue multifil informa- Cette forme géométrique très particulière est à l’origine du nom de
tique. « fenêtre » (figure 6a).
■ Pourquoi la stratégie de la pile
L’espace de l’écran est limité. Si l’on partage sa surface entre les
différents fils de dialogue, la place accordée à chacun devient vite
trop petite pour être utile. Il faut une autre stratégie.

Zone du Zone du Fenêtre 1


fil de fil de
dialogue 1 dialogue 2
Fenêtre 2

Zone du Zone du Fenêtre 3


fil de fil de
dialogue 3 dialogue 4

a pavage b métaphore de la pile de feuilles

Figure 5 – Pile de fenêtres typique reflétant plusieurs fils d’activité Figure 6 – Évolution du fenêtrage

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■ Comment associer un fil de dialogue et une fenêtre dans la pile si les deux fenêtres sont « amies » et savent pour quelle raison se
Les écrans graphiques permettent de dessiner des formes quelcon- fait leur alternance. Cela permet la réduction de la distance articula-
ques, en particulier de simuler la superposition de feuilles de papier toire. Enfin, la simulation, c’est-à-dire l’anticipation sur l’action de
se masquant les unes les autres. On passe ainsi d’une mosaïque de l’usager n’intervient que pour rediriger l’utilisation du clavier en
fenêtres pavant l’écran (en anglais tiles) au dessin d’une pile de fonction du contexte. Par exemple, dans certains environnements
feuilles de papier (figure 6b). La feuille sélectionnée comme fil de dia- de programmation, un « coller » après « recherche » est sémanti-
logue actif est alors dessinée en surface afin de devenir visible. Les quement anticipé : la frappe va vers la fenêtre de texte alors que la
autres peuvent ou non être cachées derrière. fenêtre sélectionnée est celle qui contrôle la recherche d’informa-
tion. Il n’est pratiqué que pour des dialogues très fortement structu-
■ Détails rés comme « chercher-remplacer ».
Cette métaphore implique à la fois :
— une interaction de sélection (comment faire passer la feuille en 1.2.2.2 Titre
surface ?) ; ■ Rôle
— une stratégie de rangement (où va une feuille qui était venue
en surface ?). En tant que séparateur de fils de dialogue, les fenêtres doivent
suggérer à l’usager le fil qu’elles représentent. C’est le rôle du titre.
■ Variantes de sélection d’une fenêtre
■ Historique
De très nombreuses conventions d’interaction avec les fenêtres
ont été testées ou utilisées dans différents systèmes, en particulier Très vite, les fenêtres ont été équipées d’une barre de titre servant
X-Windows et ses multiples windows managers (gestionnaires de à les identifier. Elle est désormais la seule caractéristique la plus
fenêtres). Aujourd’hui, une convention simple et cohérente semble commune à toutes les fenêtres sur tous les systèmes. Toutefois, cer-
progressivement s’imposer : cliquer n’importe où dans une fenêtre taines fenêtres n’ont pas de titre, c’est en général le cas des boîtes
indique qu’on la sélectionne et la fait passer en premier plan. de dialogue et des messages d’erreur. Leur contenu est par lui-
même suffisamment informatif du fil concerné.
Exemples de stratégies : certains systèmes (ou leurs windows
managers ) proposaient, pour commuter de fenêtre, d’utiliser une tou- ■ Comment attribuer un titre à une fenêtre
che du clavier qui faisait circuler les fenêtres en sommet de pile les Du point de vue de l’interaction homme-machine, le titre de fenê-
unes après les autres. Cette méthode a le défaut d’augmenter énormé- tre devrait avoir un rôle sémantique, en annonçant le contenu de la
ment les temps de commutation à cause d’affichages inutiles. Par fenêtre, un peu comme celui que joue le titre d’un chapitre dans un
contre, elle permet d’accéder à des fenêtres qui seraient totalement livre. En pratique, le plus souvent, le nom du fichier joue ce rôle. Les
cachées et dont la sélection directe serait plus difficile. Elle était en pages Web ont assez bien identifié le rôle fonctionnel du titre de
vogue sur les premiers écrans dont la taille était réduite et où la désigna- fenêtre, en prévoyant explicitement une balise « titre ».
tion des fenêtres cachées aurait été difficile (§ 1.1.2.4). Une variante de
ce mécanisme existe sous MS Windows, où ALT Tab affiche une petite ■ Variantes
fenêtre contenant les symboles des vraies fenêtres, que l’on y fait défi- Certains systèmes affichent dans la barre de titre le chemin
ler sans réorganiser les vraies fenêtres. Le choix final est alors validé et d’accès du fichier (figure 7a) et parfois même le nom ou l’icône du
ne cause donc qu’un seul affichage de fenêtres, entraînant un meilleur logiciel qui est utilisé pour y accéder (figure 7b). D’autres deman-
temps de réponse quand certaines fenêtres sont masquées sous une dent que l’on interagisse pour afficher le chemin d’accès. Ainsi, sur
pile trop importante. MacIntosh, il faut appuyer sur « pomme » pour faire apparaître le
chemin dans la barre de titre sous forme d’un menu (figure 7c).
Certains systèmes imposent, pour commuter de fenêtre, de cli-
quer exclusivement dans la barre de titre de la fenêtre cible. Cette ■ Autres usages
contrainte de positionnement est très lourde car cette barre peut L’espace de la barre de titre est utilisé comme zone de commande
être cachée. Une telle restriction ne présente aucun intérêt. C’est pour des fonctions directement liées à la manipulation des fenêtres
pour cela que presque tous les systèmes préfèrent interpréter un telles que leur fermeture, certaines opérations de changement de
clic indépendamment de sa position. Toutefois, cela pose un pro- géométrie, leur mise sous forme iconique, etc.
blème sémantique : que faire de ce clic dans une autre fenêtre ?
● Premier cas

Supposons que l’on clique dans une fenêtre qui était « en


dessous », pour la sélectionner et la faire venir en surface. Le clic a
eu lieu dans une zone de cette fenêtre qui était un bouton. Ce bou-
ton doit-il réagir ? A priori non !
● Second cas a affichage du chemin sous Windows
On alterne entre deux fenêtres, celle dans laquelle est effectuée la
recherche d’un mot pour le remplacer et celle dans laquelle se
trouve le pilote de recherche avec le bouton « suivant ». En
appuyant sur « suivant », la position courante dans la fenêtre texte
sélectionne le mot cherché. On tape alors au clavier dans l’intention
b affichage du nom de fichier sous Windows
de remplacer le mot. Le destinataire de ce fil de dialogue est le
texte.
Le choix d’une stratégie de commutation à la fois efficace, cohé-
rente avec la tâche et non perturbante sur le plan cognitif est très
délicat. Il est en général laissé à l’application qui peut avoir les com-
portements suivants :
— ignorer le premier clic dans une fenêtre ;
— le prendre en compte ;
— le simuler. c sous MacIntosh
Le cas courant est l’ignorance du premier clic, pour éviter des
actions que l’usager ne souhaite pas. La prise en compte est utilisée Figure 7 – Barres de titre de fenêtre

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1.2.2.3 Changement de géométrie et déplacement 1.2.2.4 Forme iconique


■ Pourquoi modifier la géométrie des fenêtres et les déplacer
■ Pourquoi réduire l’encombrement
Une feuille de papier a une dimension fixe. Tel fut aussi le cas des
Les fenêtres occupent beaucoup de place sur l’écran. Une alterna-
premières fenêtres. Mais une fenêtre est une entité informatique
tive non exclusive à la métaphore de la pile de papier consiste en un
dont on peut changer facilement les propriétés pour les adapter aux
rangement temporaire et plus dense de fenêtres non utilisées dans
circonstances. On peut par exemple offrir à la fenêtre sélectionnée
un espace spécialisé.
la totalité de la surface de l’écran, ou ajuster la taille des fenêtres et
les déplacer pour satisfaire les besoins de l’usager, par exemple ■ Comment réduire l’encombrement
pour rendre visibles en même temps des informations présentes
dans des fenêtres différentes. Chaque fenêtre peut exister sous deux formes, sa forme ouverte
et sa forme iconique qui n’occupe qu’une place très réduite sur
■ Un problème induit l’écran, tout en restant facilement accessible.
Lorsqu’une fenêtre a une taille fixe, le programmeur peut agencer ■ Stratégies de mise en icône
spatialement les informations au moment de la conception. Si la
taille de la fenêtre change, que devient cet agencement ? Il est pris La mise en forme iconique diffère selon les systèmes. Avant
en compte dans tous les systèmes de façon plus ou moins systéma- l’introduction du système MacOS X, le MacIntosh réduisait la fenêtre
tique. X-Windows et Java l’ont bien explicité. à sa barre de titre, là où elle était. Cela présentait le défaut de ne pas
augmenter l’accessibilité de la fenêtre qui pouvait rester cachée sous
En pratique, on constate, sur le plan cognitif, qu’il est toujours d’autres.
néfaste d’altérer la géométrie d’une fenêtre en réorganisant son
contenu pour l’adapter à la taille du contenant. En effet, le change- Sur Windows, KDE ou MacOS X, la fenêtre est rangée, sous forme
ment de position détruit tous les automatismes que l’usager s’était d’une barre de titre réduite, dans une zone spécialisée de l’écran : la
construits dans la lecture et l’usage des éléments du dialogue. Cette barre de tâches. Sur le Next, la fenêtre prend la forme d’une icône
possibilité n’est supportable que dans des textes. C’est pour cette rangée en bas d’écran.
raison que la plupart de fenêtres de dialogue sous Windows et sous Sur le MacIntosh, avant MacOS X, les différentes applications
MacIntosh ne sont pas « redimensionnables ». ouvertes étaient accessibles par un menu, alors que sous Windows,
Les pages Web sont souvent réorganisées par les navigateurs la barre de tâches joue ce rôle.
lorsque l’on agrandit la fenêtre. Pour éviter ce désagrément, de
nombreux graphistes sont conduits à « bloquer » l’organisation du 1.2.2.5 Défilement du contenu et contrôle
contenu de la page dans un tableau fixe. C’est le cas de la plupart
des pages Web produites par des professionnels. ■ Pourquoi faire défiler le contenu
■ Historique Très rapidement, le contenu des fenêtres est devenu beaucoup
trop important pour que leur surface permette d’en afficher la tota-
Le changement de taille des fenêtres a été réalisé de différentes lité. Il s’est avéré intéressant de disposer d’une autre métaphore
façons entre le début du fenêtrage et maintenant, en raison des dans laquelle la fenêtre donne visibilité sur un paysage plus grand
besoins en puissance de calcul et d’affichage nécessaires à la mani- qu’elle et que l’on peut explorer.
pulation directe des fenêtres. En effet, le déplacement d’une fenêtre
à l’écran ou son changement de taille mettent en jeu la mise à jour ■ Historique : du temps à l’espace
de plusieurs millions d’octets. Si l’on veut que ce déplacement suive Les fenêtres ont tout d’abord eu un comportement semblable à
en temps réel le mouvement de la souris, comme le demande la celui qu’avaient les consoles jusqu'alors. Les données étaient
manipulation directe, on atteint des dizaines de millions d’octets par comme « imprimées » en bas de la page et disparaissaient naturel-
secondes. Une telle puissance d’affichage requise était hors de por- lement en haut, comme si la fenêtre était un petit écran à nombre de
tée des machines de la décennie 1980 et même de celles du début lignes fixe. Même encore actuellement, la fenêtre DOS de Windows
des années 1990. 98 a conservé ce comportement temporel et simule un écran de ter-
Les déplacements de fenêtres ont longtemps été simulés en mimant minal alphanumérique sans mémoire. Ce comportement est corrigé
le déplacement d’un cadre représentant la future position de la fenêtre, sous Windows NT.
comme sur les premiers MacIntosh. Ce n’est qu’à partir du Next qu’il Peu à peu, le système de fenêtrage a été chargé de garder trace
est devenu fréquent de déplacer une fenêtre en voyant son contenu des contenus antérieurement affichés. On pouvait ainsi réafficher
suivre le mouvement. Encore aujourd’hui, X-Windows utilise des un contenu antérieur à partir d’une interaction au clavier « page
cadres pour suggérer l’emplacement des futures fenêtres. précédente ».
■ Comment déplacer ou retailler les fenêtres Très vite, un interacteur graphique, la barre de défilement, a été
Le déplacement et le changement de taille sont accessibles soit mis au point pour piloter le contrôle de l’affichage. Il a induit un
par un menu dans la barre de titre ( X-Windows, Windows), soit par changement de métaphore. Avant les barres de défilement, on listait
manipulation directe (MacIntosh, Windows). Dans ce dernier cas, « séquentiellement » un document, le temps étant la variable princi-
les bords de la fenêtre servent de poignées par lesquelles il est pos- pale perçue par l’humain. La commande pour explorer le document
sible de l’étendre. Le curseur suggère la sémantique de l’action s’appelait « more » (« j’en veux encore »). Par exemple, pour lister
(figure 8). un fichier, Unix affiche des tranches de vingt-quatre lignes, suivies
du mot « more ». L’usager valide pour obtenir la suite ou annule la
Dans la plupart des systèmes, le déplacement d’une fenêtre sans commande lorsqu’il en a assez lu. En revanche, il ne peut « revenir
changement de taille s’effectue en la « tenant » par la barre de titre. plus haut ».
Maintenant, avec les barres de défilement, l’espace est devenu la
variable principale perçue par l’humain. On fait défiler le texte de
haut en bas ou de bas en haut ; le temps a disparu.

■ Comment faire défiler le contenu


Les barres de défilement sont des interacteurs très généraux, qui
Figure 8 – Forme du curseur et icône ne servent pas que dans les fenêtres. Ils délivrent deux bornes et
suggérant la modification de taille une position courante entre ces bornes. Pour les fenêtres, la valeur
de la fenêtre des bornes est définie par les limites du document.

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Le programme élabore le dessin (aussi bien pour un texte que 1.3 Raccourcis symboliques : les icônes
pour une image) dans un espace virtuel de dessin, sans se préoccu-
per de l’affichage effectif. Celui-ci est pris en compte par le méca-
Dans une interface à désignation directe, une représentation sym-
nisme de fenêtrage. Seule une partie de l’espace de dessin est
bolique graphique des éléments à désigner est souvent utilisée. Ces
affichée à l’écran, le reste est ignoré (clipping). Cette partie est défi-
vignettes s’appellent des « icônes ».
nie par ses coordonnées dans l’espace de dessin. Elles sont contrô-
lées par les ascenseurs associés à la fenêtre. En agissant sur ceux-
ci, on déplace la partie visible au sein de l’espace de dessin. La posi- 1.3.1 Aspects fonctionnels
tion de la fenêtre sur l’écran peut être quelconque et n’interfère pas
avec la position de la partie visible dans l’espace de dessin ■ Définition
(figure 9). Une icône est une représentation graphique d’une information
qui prend valeur de symbole du fait de son usage conventionnel.
■ Variante des barres de défilement
■ Rôle
Pour atteindre très vite une position quelconque dans une fenêtre,
on peut utiliser, à la place des barres de défilement, une image Une icône permet, en général, de représenter une information
réduite de la fenêtre, dans laquelle on désigne directement le posi- sous forme d’une image suggestive de beaucoup plus petite taille
tionnement courant souhaité pour la fenêtre. C’est une technique que le message textuel correspondant.
peu répandue mais très rapide pour des documents longs. Elle est ■ Icônes et commandes
utilisée en particulier pour la vidéo sous Adobe Première (figure 10)
Les icônes sont le plus souvent utilisées pour identifier des commandes.
où le rectangle vert indique la portion visible à l’écran.
Elles remplacent avantageusement les libellés de boutons, car une image
La zone verte indique la portion de film visible à l’écran ; le cur- suggestive peut être beaucoup plus petite qu’un message.
seur rouge indique la position courante ; la largeur de cette fenêtre
Dans la figure 11, il est intéressant de comparer la place occupée
représente la totalité du film. Notons le retour sémantique donnant
par les quatre premières icônes, « nouveau document », « ouvrir »,
le time-code de la position courante. En agissant sur cette fenêtre,
« sauver », « imprimer », et la place qu’auraient utilisée les libellés
on contrôle l’affichage réalisé dans la fenêtre principale. L’avantage
correspondants.
est que l’affichage de la fenêtre principale n’est déclenché que lors-
que la transaction dans cet interacteur est achevée, permettant ainsi ■ Avantages
une interaction plus rapide.
En concentrant l’information sur une surface réduite, l’ensemble
de l’icône apparaît sur la fovea de l’œil et peut être reconnue plus
vite qu’un message qui imposerait une saccade des yeux. Par son
caractère symbolique, une icône est interprétable indépendamment
de la langue naturelle. Elle a, de fait, un caractère universel, indé-
pendant des langues. Elle est internationale. C’est pour cela que les
Espace de dessin panneaux de circulation routière sont iconiques et non textuels.
■ Inconvénients
Position
y Pour constituer une représentation universellement interprétable, le
de la partie
visible dans graphisme d’une icône doit être à la fois simple et évocateur. Une mau-
le document vaise icône, mal conçue, mal dessinée, est pire qu’un mauvais texte.
x Il existe des conventions (peu respectées) concernant le gra-
Partie visible phisme des icônes en usage dans les lieux publics (par exemple, le
du dessin personnage qui court vers la sortie, figure 12). Remarquez la pureté
de son graphisme et sa suggestivité.
Fenêtre dans Il n’y a pas pour l’instant de normes informatiques concernant les
laquelle apparaît icônes.
la partie visible de
l'espace de dessin

Position de la fenêtre
dans l'écran

Figure 11 –
Efficacité spatiale
Figure 9 – Principe de la production d’une image dans une fenêtre des icônes

Figure 10 –
Fenêtre de navigation
dans la vidéo utilisée Figure 12 – Suggestivité de l’icône du personnage
sous Adobe Première qui court vers la sortie

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1.3.2 Aspects techniques 1.4 Organiser les commandes : les menus

■ Historique Dans une interface à désignation directe, l’usager doit en particulier


designer les commandes qu’il veut adresser au système. Celles-ci
Pour des raisons d’économie de mémoire, les premières icônes
sont regroupées dans des menus, qui ont en particulier un rôle struc-
étaient de petite taille (16 × 16 ou 32 × 32) et d’un graphisme symbo-
turant sur le plan cognitif en rapprochant des commandes voisines.
lique en noir et blanc. L’icône d’impression et l’icône du courrier uti-
lisées sur Xerox Star sont devenues des classiques. Les icônes du
MacIntosh, en particulier les icônes de fichiers, la poubelle, etc.,
étaient affichées en noir et blanc. Le Next disposait d’un écran à qua-
1.4.1 Aspects fonctionnels
tre niveaux de gris et a introduit la mode des icônes réalistes (figure
13) de plus grande taille (64 × 64). Ce mouvement s’est, dans un pre- Un menu est un regroupement géométrique d’items que l’usager
mier temps, accentué avec l’apparition de la couleur. Certaines icô- peut désigner.
nes devenaient de véritables photos minuscules en couleur, faisant Son affichage est généralement temporaire et disparaît dès que
perdre à l’icône son caractère de symbole. Typiquement, Linux (avec l’usager a choisi un item. L’affichage du menu est déclenché par une
KDE et Gnome) utilise encore des icônes de grande taille. action de l’usager.
Dans la plupart des systèmes actuels, malgré l’accroissement de ■ Historique
taille des écrans, les icônes ont repris progressivement un gra-
phisme plus épuré et une taille plus petite, retrouvant leur rôle de Les menus n’ont pas toujours eu leur forme actuelle. En parti-
symbole abstrait. La figure 14 donne un exemple d’icônes simples culier, ils ont commencé par exister sur les consoles textuelles sous
et suggestives pour symboliser des alignements. forme de « pages » de menus dans lesquelles les choix étaient pré-
sentés. Ce n’est qu’avec les interfaces graphiques qu’ils ont pris une
■ Comment coder les icônes forme extensible, ce qui a l’avantage de réduire la place consom-
Les icônes sont souvent gérées comme un alphabet d’idéogrammes, mée par l’affichage des choix en ne présentant ceux-ci qu’à la
ce qu’elles sont en quelque sorte. Pour faciliter leur intégration dans la demande.
mise en page générale, elles sont affichées comme des images avec une ■ Pourquoi les menus
couche alpha pour gérer la transparence. La couche alpha, dans une
image, indique le coefficient de transparence de chaque pixel. Les menus constituent un moyen simple pour structurer l’interac-
tion dans une métaphore à désignation directe. Ils ont un rôle struc-
turel en permettant de regrouper des ensembles de choix.
1.3.3 Aspects cognitifs : suggestivité Ils économisent l’espace d’affichage en réduisant l’espace
et sémantique consommé à celui nécessaire pour identifier un groupe de choix.
L’affichage est déclenché par une interaction et disparaît dès que
L’humain est plus sensible à la suggestivité visuelle des états qu’à l’usager a effectué son choix. Seul reste l’interacteur, qui se réduit le
celle des actions, du fait du caractère transitoire de celles-ci. En plus souvent à un bouton ouvrant le menu qui lui est associé.
conséquence, lorsque l’on veut suggérer une action par une icône, L’ensemble de ces boutons est souvent présenté en ligne, que l’on
celle-ci représente l’une des situations possibles suivantes plutôt appelle une barre de menus. Lorsque les items d’un menu sont eux-
que l’action elle-même : mêmes des boutons ouvrant d’autres menus, on obtient des menus
hiérarchiques.
— l’outil servant à l’action ;
— l’effet de l’action. L’interacteur ouvrant le menu n’a pas nécessairement de repré-
sentation visuelle, ce peut être une touche du clavier ou un bouton
Exemple : l’icône symbolisant l’insertion d’image (figure 15) est ici de la souris.
une instance d’image (paysage, montagne, soleil), Par contre, la mise Ainsi, un menu peut « surgir » (pop), à la position du curseur de la
en retrait ou l’annulation d’un retrait sont symbolisées par l’état corres- souris (figure 16), suite à une interaction, par exemple un clic sur le
pondant du document plus une flèche indiquant le sens dans lequel se bouton droit de la souris sur PC ou un clic altéré par une touche du
fait la transformation. De façon analogue, l’icône de numérotation des clavier sur MacIntosh.
items suggère l’effet de l’action. En contrepartie, à distance parcourue égale, l’accès à un item de
menu est beaucoup plus lent que celui à un bouton directement visi-
ble car deux actions élémentaires (déclenchement de l’affichage
puis sélection d’un item) se cumulent.
■ Rôle structurant
Les menus sont apparus comme un élément structurant du dialogue
en regroupant des choix par similitude conceptuelle. Ils facilitent la
remémoration des commandes. La mise en relation de la structure
visuelle et de la structure sémantique repose uniquement sur des cri-
tères cognitifs. Elle a pour but principal de réduire l’effort de mémori-
Figure 13 – Icônes sation de l’usager, en lui permettant de percevoir directement la
de grande taille, ayant structure de l’information à partir de son organisation géométrique
un dessin réaliste sur le Next (figure 17).

Figure 14 – Barre d’icônes simples mais suggestives (PowerPoint)

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Figure 15 –
Symbolisme
des icônes

Figure 18 – Commande
et affichage de changement
d’état dans un menu

● Utilisation pour représenter et contrôler l’état


Figure 16 – Menu surgissant
Un menu peut être utilisé pour visualiser un état. Il suffit d’asso-
au milieu d’un texte, suite
cier à un item un symbolisme représentant l’état associé (un mar-
à un clic droit sous MS Word
queur par exemple). La sélection de l’item correspondant est alors
une commande dont l’effet modifie l’état correspondant. Dans le cas
d’états binaires, la commande inverse l’état affiché.
Exemple : le sous-menu « barre d’outils » (figure 18) affiche l’état
(visible/caché) des différentes barres d’outils. Notons que si le sys-
tème n’avait affiché que les barres visibles ou que les barres cachées,
l’information d’état serait transmise mais la fonction commande serait
perdue.

2. Dialogue
Figure 17 – Exemple
de regroupement
de commandes par 2.1 Principe
similarité sémantique
2.1.1 Expression des commandes par désignation
Cette règle est trop souvent ignorée, mal comprise ou mal suivie. directe
On a rencontré des interfaces où les propositions faites à l’usager
étaient laissées en vrac. Même encore récemment, certains sites Le dialogue dans les interfaces graphiques à désignation directe
Web, dans leurs débuts, négligeaient ces règles pourtant élémentai- doit être guidé par la machine : l’usager ne peut désigner que ce que
res. la machine montre. La machine a donc toujours l’initiative. Elle doit
proposer, de façon accessible, organisée et sous une forme visuelle,
l’ensemble des choix que peut faire l’usager à un instant donné.
1.4.2 Problèmes cognitifs spécifiques Ces choix sont suggérés au moyen d’interacteurs, principalement
des boutons, des icônes et des menus, mais il en existe bien
■ Organisation structurelle d’autres. Pour le concepteur d’une interface, la décision de mettre
● Taille et organisation en menus hiérarchiques
en place tel ou tel interacteur et de les regrouper ne relève pas uni-
quement de ses goûts personnels.
Compte tenu de la limitation de la mémoire à court terme, il est
impossible de placer un grand nombre d’items dans un menu, sous La conception de l’organisation du dialogue repose sur des règles
peine d’une augmentation considérable de la charge cognitive. Si le qui découlent de la prise en compte de contraintes cognitives. Elles
nombre d’items tend à dépasser 10 (7 est une bonne valeur), on sont étudiées dans ce paragraphe. Ces règles concernent :
effectue des regroupements pour utiliser des menus hiérarchiques. — la structure syntaxique du dialogue ;
Un item d’un niveau fait apparaître un menu du niveau inférieur. — la structure visuelle des éléments du dialogue.
● Reconfiguration par l’usager

Avec l’accroissement de la taille des écrans, on voit se modifier 2.1.2 Notion d’interacteur
l’équilibre entre économie de temps et économie de place. L’usager
peut reconfigurer son environnement de travail en plaçant des com-
mandes indifféremment dans des menus ou dans des barres de Les interacteurs constituent les éléments interactifs servant de
commandes. Les commandes le plus fréquemment utilisées sont support au dialogue.
rendues directement accessibles dans les barres, les autres sont
dans les menus (voir en particulier les possibilités offertes par Dans une interface graphique, on appelle interacteur un élé-
MacOS X). ment graphique servant à l’usager à spécifier des valeurs de
■ Sémantique associée aux aspects graphiques paramètres ou à activer une commande. Les interacteurs jouent
dans les interfaces graphiques le même rôle que le vocabulaire
● Disponibilité des commandes : rôle du grisé
terminal dans les langages écrits.
Pour éviter de perturber le repère cognitif de l’usager, il convient
de ne pas ajouter ou supprimer des items de menus pendant le tra-
vail, de telle sorte que l’usager puisse se remémorer l’emplacement Un interacteur est caractérisé par les éléments suivants :
des commandes. Lorsqu’une commande est inaccessible dans un — un aspect ;
état donné, on ne la retire pas, on la dessine en indiquant de façon — un comportement ;
symbolique qu’elle est inopérante dans ce contexte, par exemple — un effet ;
par un grisé. — une structure.

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Exemple : un bouton a un aspect (son contour, son libellé ou Typiquement, les fenêtres et les menus sont des interacteurs
son icône), un comportement (il fait mine de s’enfoncer si on généraux composés.
« appuie dessus » avec la souris) et un effet qui dépend du pro-
gramme. Une case à cocher a un aspect qui dépend de son état ■ Bouton
« cochée » ou non. Son comportement consiste à changer d’état et La métaphore du bouton suggère que le fait d’appuyer sur le bou-
donc d’aspect quand on clique dessus. L’effet est à la discrétion du ton déclenche une action. L’objet informatique « bouton » a pour
programme applicatif. comportement, en réponse à un clic, d’activer le traitement associé.
La forme du bouton peut être quelconque, allant d’une forme
■ Aspect conventionnelle fournie par défaut à une image spécifiquement
C’est l’ensemble des attributs graphiques (forme, couleur, épais- choisie.
seur de traits, ombres), mais aussi des animations, des signaux
sonores ou mécaniques (par exemple, retour d’effort), etc., qui ■ Case à cocher
régissent la perception que l’usager a de cet élément. Cette métaphore suggère la représentation d’un état binaire,
matérialisé par une marque dans la case.
■ Comportement
C’est l’ensemble des lois d’évolution de l’aspect de l’interacteur ■ Zone de saisie
en réaction aux actions élémentaires de l’usager. Elle permet à l’usager de saisir des données au clavier, dans le cas
le plus simple, une courte chaîne. Un éditeur de texte complet est
■ Effet une généralisation de cet interacteur. La zone de saisie numérique
C’est la transformation d’état qui résulte de l’interaction entre en est une spécialisation.
l’usager et cet interacteur pour l’application qui l’utilise. La modifi-
cation d’état peut concerner l’interacteur, les autres éléments de ■ « Slider »
l’interface en relation avec cet interacteur, ainsi que des objets de Le poussoir linéaire coulissant, ou slider, utilise la métaphore du
l’application. Du point de vue de l’interacteur, l’effet est notifié à potentiomètre de table de mixage. Il fixe une valeur dans un inter-
l’application (plus précisément au contrôleur de dialogue) sous une valle en fonction de la position de l’ergot du poussoir (figure 19).
forme abstraite (par exemple, « bouton OK sélectionné »). C’est le Les sliders sont utilisés pour saisir des valeurs devant rester dans un
contrôleur de dialogue qui est en charge de propager l’effet sur les intervalle et dont il est souhaitable que la valeur relative soit directe-
autres objets de l’interface et au sein de l’application [H 7 217]. ment perçue par l’usager. Il existe de nombreuses représentations
des sliders allant des plus simples (juste un triangle sous un seg-
■ Structure : composition des interacteurs ment) aux plus complexes, simulant des potentiomètres avec leur
Un interacteur peut être simple ou construit. Par simple, on décor. Les « ascenseurs » utilisent directement cet interacteur.
entend qu’il est indivisible : il contrôle des transactions atomiques.
C’est typiquement le cas d’un bouton. Par construit, on entend qu’il ■ Poussoir d’incrément/décrément
est composé d’autres interacteurs, simples ou non. C’est typique- C’est un exemple d’interacteur composé. Il regroupe une zone de
ment le cas d’une boîte de dialogue. saisie numérique et deux boutons dont l’effet est d’incrémenter ou de
décrémenter la valeur concernée. Il n’est utilisé à bon escient que lors-
On dit qu’une action est atomique, à un niveau d’observation que la plage de variation probable autour de la valeur courante est fai-
donné, si l’usager peut l’exécuter en n’utilisant qu’une seule ble, sous peine d’une forte augmentation de la distance articulatoire.
action définie à ce niveau. C’est pour cela qu’il est couplé à une saisie directe de la valeur.
Dans une fenêtre de dialogue, plusieurs interacteurs sont couram-
Exemples : un clic de souris est considéré comme atomique, bien ment utilisés (figure 20).
que le mouvement qui lui est associé implique la contraction successive Nota : Il existe un très grand nombre d’autres interacteurs primitifs qu’il ne saurait être
de nombreux muscles. Ces actions, plus élémentaires, existent bien question de passer en revue ici. On en trouvera d’autres exemples dans les bibliothèques
Java.awt et Javax.swing.
dans la réalité, mais ne sont pas considérées dans le niveau courant.
Définir un nouveau style sous Word n’est pas considéré comme ato-
mique, car pour élaborer cette commande l’usager met en jeu de nom-
breuses autres commandes (choix de police, de cadrage, de bordure,
etc.) qui ont un sens au même niveau d’observation du dialogue.

2.2 Principaux interacteurs

Les boîtes à outils fournissent un ensemble d’interacteurs primi-


tifs qui servent de briques de base pour construire des interfaces. Le
protocole d’interaction repose sur des métaphores simples à com-
prendre et communément admises. On rencontre deux catégories
d’interacteurs :
— des interacteurs d’usage général (§ 2.2.1) ;
— des interacteurs spécifiques (§ 2.2.2).

2.2.1 Interacteurs généraux

Ils servent de support à la réalisation de tâches générales dans le


dialogue, telles que :
— valider un choix ;
— choisir une commande ;
— définir une valeur explicitement ;
— choisir une valeur dans un ensemble, etc. Figure 19 – Exemples de représentation de poussoirs linéaires

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2.3 Structuration syntaxique

Quel que soit le style de l’interface (textuel, graphique…), le dialo-


gue homme-machine repose toujours sur un langage qui structure
les échanges entre l’utilisateur et l’application, donc le dialogue. Il
permet en particulier de spécifier ce que l’usager a la possibilité
d’exprimer dans une situation donnée. Il est défini par une gram-
maire.
Dans les interfaces à langage de commande textuelles, l’usager
doit le plus souvent apprendre les règles de grammaire. Dans les
interfaces graphiques récentes, cette grammaire est organisée de
telle sorte que l’utilisateur l’utilise sans effort, comme on parle une
Les mois (12) sont présentés dans un menu pop-up. L'année, qui évolue
langue que l’on connaît, sans devoir se reporter à sa grammaire.
peu, est réglable par incrément, tandis que les jours (31), trop nombreux
pour un menu, sont présentés dans un calendrier pour désignation directe.
Elle n’en est pas moins présente.

Figure 20 – Divers interacteurs utilisés dans une fenêtre de dialogue 2.3.1 Grammaire
rationnellement conçue pour définir la date

Une grammaire est un outil mathématique dont le rôle est de spé-


cifier des structures, en engendrant des langages. Elle est définie
par un ensemble de variables non terminales, de variables termina-
les et de règles de production indiquant comment une variable non
terminale se réécrit.
Dans le cas des interfaces, on se limite le plus souvent aux gram-
maires les plus simples du point de vue formel : les grammaires
régulières et les grammaires hors contexte.
Concernant les variables, on associe :
— une variable non terminale à une situation ou à une intention
de l’usager ;
— une variable terminale à la notation de toute partie de com-
mande considérée comme atomique.
Une règle est constituée de deux parties :
— la partie gauche représente une situation ;
— la partie droite est constituée de concaténations et de disjonc-
tions de variables terminales et non terminales ; elle représente les
actions à effectuer et les nouvelles situations.
La concaténation de variables exprime que les actions qu’elles
représentent sont à exécuter en séquence. La disjonction de varia-
bles signifie que l’utilisateur doit choisir de façon exclusive l’une des
actions qu’elles représentent.

Le déplacement des onglets induit une perturbation cognitive Exemple : considérons le langage de commande d’une interface
graphique d’application bien connue, celle d’un traitement de texte et
la grammaire associée. Lorsque l’usager lance l’exécution d’un traite-
Figure 21 – Deux états de la même organisation d’onglets
ment de texte, il peut réaliser les actions suivantes :
multiétages
— ouvrir un fichier ;
— créer un fichier ;
— quitter.
2.2.2 Interacteurs spécifiques
Ces possibilités d’actions sont représentées par la règle :
Ils dépendent directement de la métaphore choisie pour l’organi- EnEntrée → ouvrir | créer | quitter
sation spatiale. L’interacteur « poubelle » ou les interacteurs EnEntrée est une variable non terminale qui représente une situation.
« dossiers » ou « fichiers » sont des interacteurs spécifiquement uti- créer est une variable terminale qui représente une action élé-
lisés avec la métaphore du bureau. D’autres interacteurs spécialisés mentaire.
permettent le partage de l’espace des fenêtres, par exemple en quitter est une variable terminale qui représente une action élé-
implantant la métaphore des onglets. mentaire.
Ces derniers s’appuient sur la métaphore des onglets dans les ouvrir est une variable non terminale qui représente une intention
classeurs. Ils sont souvent disponibles dans les boîtes à outils, complexe de l’usager.
comme spécialisation de fenêtres. Ils permettent de placer plusieurs La notation (ouvrir | créer | quitter) représente la disjonction de ces
panneaux dans une même fenêtre et de faire passer l’un d’eux en trois variables.
surface. Par contre, les onglets multiétages sont très perturbants sur
Il faut donc une nouvelle règle pour définir la variable non terminale
le plan cognitif, car ils provoquent une réorganisation spatiale de
« ouvrir » correspondant à l’expression d’une action complexe :
l’espace de désignation (figure 21). Ils représentent typiquement
une généralisation excessive de la métaphore des onglets bien au- ouvrir → (désigner le répertoire & désigner le fichier)* & (OK | Can-
delà du comportement des onglets réels. cel)

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L’expression (désigner le répertoire & désigner le fichier) représente


la conjonction de ces variables. La notation * signifie qu’elle prend
place un nombre quelconque de fois.
Dans la seconde règle prise en exemple, l’action est composée de
plusieurs sous-actions.
L’usager peut itérer sur des sélections de répertoires et de dossiers,
puis conclure par une commande OK ou par une commande d’abandon.

2.3.2 Représentation des disjonctions

Les disjonctions dans une règle de grammaire indiquent que l’usa-


ger a le choix entre plusieurs actions. Pour matérialiser la possibilité
de choix, les interacteurs correspondant à chaque choix élémentaire
doivent être simultanément accessibles. Lorsque l’usager valide l’un
quelconque de ces interacteurs, la commande est validée.
Figure 22 – Commande d’ouverture de fichier
D’un point de vue graphique, une disjonction est souvent matéria- et sa représentation graphique
lisée par une présentation d’interacteurs dans une barres d’icônes,
un menu ou une liste à défilement. Mais il est possible d’imaginer
d’autres organisations.

2.3.3 Représentation des concaténations

Les concaténations dans une règle de grammaire – par exemple,


utilisées pour noter les paramètres d’une commande –, indiquent
que l’usager doit renseigner chacun des éléments de la règle pour
que celle-ci soit complète.

Exemple : considérons la commande d’ouverture de fichier :op


(ouvrir). Dans l’exécution de cette commande, l’usager doit sélection-
ner un répertoire puis un fichier (figure 22). Il doit faire ces deux
actions. La transaction est considérée comme complète lorsque l’usa-
L'usager peut ajuster divers paramètres avant
ger valide à l’aide du bouton « ouvrir ».
de valider l'ensemble de ses choix.

Figure 23 – Boîte de dialogue avec bouton de validation


2.3.4 Validation d’une commande
2.4 Structuration visuelle
Chaque interacteur utilisé pour réaliser une action ou une com-
mande complète dispose d’un mécanisme de validation. Lorsque De façon générale, la prise en compte des contraintes cognitives
l’usager valide une action, l’exécution de la commande en cours suggère de grouper visuellement, et donc géométriquement, les
peut progresser. Lorsque l’usager a terminé les actions élémentai- interacteurs en fonction de la grammaire du langage de commande.
res correspondant à la réalisation d’une commande, autrement dit Cela se fait en organisant des menus, des barres d’outils et des boî-
lorsque toutes les actions spécifiées par la règle de grammaire ont tes de dialogue. Ces trois entités ont pour caractéristique de rendre
été exécutées, l’usager valide de façon explicite la commande. Tant explicite la relation entre un groupement de commandes et une por-
que la commande n’est pas validée, l’interacteur qui implémente la tion de l’espace graphique. Il faut remarquer que la structure
règle peut permettre ou non à l’usager de refaire une des actions, visuelle du dialogue a un rôle suggestif très important sur le plan
par exemple modifier une valeur de paramètres. La validation expli- cognitif pour faciliter l’expression de celui-ci. Elle permet à l’usager
cite de fin de transaction est exprimée par l’usager sous une forme de comprendre l’organisation du dialogue sans devoir s’appuyer
conventionnelle. Parmi ces formes, les plus fréquentes sont les sui- sur une mémorisation préalable de sa structure. C’est une des
vantes : conditions nécessaires à l’utilisation de dialogues par un usager
— un bouton OK ; novice, au sens « n’ayant pas reçu de formation pour ce logiciel ».
— un bouton Abandon ; Les groupements doivent être facilement localisables et identifia-
— tous les champs ont été renseignés ; bles dans l’espace visuel de l’usager.
— un double clic sur un des interacteurs. ■ Localisation du regroupement
Mais il peut y en avoir bien d’autres. L’usager sait « où se trouve » telle commande, il lui associe une
En plus des concaténations d’actions en séquence, les interfaces place sur l’écran dans la zone du groupement. Cela permet une
graphiques offrent souvent la possibilité d’exprimer qu’un ensem- meilleure mémorisation de la commande chez les usagers pour qui
ble d’actions doivent être réalisées mais sans qu’il y ait d’ordre la mémoire visuelle est meilleure que la mémoire verbale.
imposé. On appelle cela un agrégat. D’un point de vue graphique, ■ Identification du regroupement
un agrégat est matérialisé par une présentation dans une boîte de
L’usager voit comme un tout un ensemble de commandes. Il est
dialogue qui reste ouverte jusqu'à ce que la validation ou l’abandon
important que le regroupement soit matérialisé de façon visuelle
indique que les différents constituants ont été renseignés
pour jouer ce rôle structurant.
(figure 23). En pratique, les constituants possèdent le plus souvent
une valeur par défaut prédéfinie qui évite à l’usager de les rensei- Exemple : les icônes ne sont pas posées en vrac mais le plus sou-
gner dans les cas les plus fréquents. vent rangées par fonction dans des barres d’outils spécialisées.

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2.4.1 Interacteurs de groupement et critères


de groupement

Les principaux interacteurs de groupement sont : a bon


— les barres d’outils ;
— les menus ;
— les boîtes de dialogue.
Ces interacteurs ne sont pas en eux-mêmes des déclencheurs de b mauvais
commande (tels les icônes), mais des moyens pour regrouper des
commandes ou exprimer les paramètres d’une commande. Figure 24 – Regroupement d’outils

Exemple : une icône au sein d’une barre et la barre elle-même ne


sont pas de même nature dans le dialogue. Le bouton « fichier » de la
barre de menus, qui permet d’ouvrir le menu « fichier », n’est pas de
même nature que les items « ouvrir », « sauver », « imprimer » de ce
menu « fichier ». De même, une boîte de dialogue agrège des inter-
acteurs plus élémentaires, par exemple pour spécifier les valeurs de
paramètres. a barre d'outils

La structuration visuelle du dialogue doit respecter la structura-


tion syntaxique et renforcer sa perception par l’utilisateur. D’un
point de vue syntaxique, une barre d’outils ou un menu matérialise
une structure disjonctive dans le langage de commande. En plus
des aspects syntaxiques, trois critères président à la structuration
visuelle : catégorisation, identification et similitude.
■ Catégorisation
Il est préférable de placer dans des groupes différents des com-
mandes appartenant à des catégories différentes. Cette règle
s’applique aussi bien aux menus qu’aux barres d’outils. On créera
ainsi des menus ou des barres d’outils spécialisés. Le lecteur remar-
quera que cette règle n’est pas liée à la nature de ces interacteurs,
mais à leur usage (figure 24). Menus et boîtes d’outils permettent
de choisir une commande dont la réalisation est obtenue par une
action atomique de type sélection, comme par exemple cliquer sur
un item de menu ou sur une icône appartenant à une barre d’outils.
La répartition des commandes dans des groupes différents répond
à deux exigences, l’une purement cognitive, l’autre sémantique et
cognitive. Il est conseillé, pour ne pas saturer la mémoire à court
terme de l’usager, de ne pas faire des groupes de plus de sept à dix
éléments. L’usager identifie mieux comme sémantiquement diffé-
rents des éléments qui appartiennent à des groupes différents.
b menu
■ Identification
Il est souhaitable que tout groupement soit délimité visuellement
(figure 25), par exemple au moyen d’aplats colorés. Toutefois, les Figure 25 – Délimitation
règles habituelles du niveau opératoire (voir boucle d’interaction de
Norman [H 7 215]) impliquent que ces renforcements visuels soient
le plus légers possible. 2.4.2 Barres d’outils
Exemple : au sein d’une barre d’outils, on pourra délimiter le grou- On utilise une barre d’outils ou un menu pour proposer un
pement d’outils similaires par un cloisonnement, des aplats de couleur ensemble de choix d’actions ayant des rôles voisins.
légers ou simplement des traits.
■ Définition
■ Similitude
Pour faciliter la remémoration, on placera dans un même voisi- On appelle barre d’outils un regroupement géométrique
nage des éléments ayant des rôles similaires (figure 26). d’interacteurs simples à action directe et sans paramètres.
Exemple : au sein d’une barre d’outils, on pourra placer dans un
même voisinage les icônes des outils représentant des transforma- Lorsque la barre est présente, l’ensemble des choix proposés est
tions géométriques telles que la symétrie ou l’alignement. visible.

Figure 26 – Association

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D’un point de vue cognitif, une barre d’outils regroupe des inter- ■ Rôle cognitif
acteurs que l’usager perçoit comme faisant partie d’une même famille. Une boîte de dialogue a pour rôle de :
Exemple : la barre des outils de dessin, la barre de mise en page, — structurer visuellement les éléments du dialogue par leurs
sont des exemples typiques de barres d’outils. regroupements géométriques ;
— « parenthéser » la transaction d’élaboration d’une commande
■ Avantages complexe en indiquant explicitement le début et la fin de la transac-
Les intérêts d’une barre d’outils sont les suivants : tion.
— structuration : l’usager sait (ou peut extrapoler) où trouver (ou La règle d’initialisation de tout interacteur à sa valeur par défaut
chercher) une commande à partir d’une catégorisation de sa fonc- fait que la valeur par défaut d’une commande complexe exprimée
tion. Par exemple, la symétrie horizontale doit se trouver dans la par une boîte de dialogue est fixée par l’ensemble des valeurs par
barre d’outils de dessin, au voisinage des autres symétries ; défaut de ses composants.
— réduction de l’espace de dialogue : l’usager peut ajuster le lan-
gage qu’il utilise en masquant ou en faisant apparaître les barres de Exemple : une commande de compilation en Java s’exprime par
dialogue dont il a l’usage ; une ligne de commande, dans laquelle l’usager précise les paramètres
— organisation de l’espace de travail : l’individualisation des bar- suivants :
res d’outils en tant que fenêtres permet de les déplacer et d’organi- — nom du fichier à compiler ;
ser l’environnement de travail en fonction des habitudes — classpath ;
personnelles de l’usager ; — etc.
— rapidité d’accès.
Une boîte de dialogue rassemble les interacteurs servant à fixer cha-
■ Inconvénients cun de ces paramètres. Chacun d’eux peut être un interacteur simple
Les inconvénients d’une barre d’outils sont les suivants : (par exemple, une case à cocher) ou complexe (par exemple, un sélec-
teur de fichier).
— son encombrement, car tous les outils sont présents ;
— l’impossibilité pratique de disposer d’un grand nombre de
Lorsque l’usager n’a pas de modification à effectuer dans les
commandes.
paramètres, il lui suffit de valider la commande directement. Bien
que complexe, elle est perçue comme atomique car l’usager n’est
2.4.3 Menus pas entré dans une phase de planification de sa commande. La dis-
tance articulatoire est donc réduite (voir boucle d’interaction de Nor-
Un menu est, d’un point de vue fonctionnel, une forme parti- man [H 7 215]).
culière de barre d’outils qui n’apparaît qu’à la demande. Les méca- ■ Dialogue modal
nismes propres aux menus sont présentés au paragraphe 1.4.
Il peut exister des portions de dialogue dans lesquelles l’usager
Les intérêts des menus sont les mêmes que ceux des barres est contraint. Le système réduit temporairement très fortement son
d’outils : choix.
— réduction de la place utilisée sur l’écran. Seul le bouton
d’appel du menu reste affiché ;
— place nulle si le menu apparaît interactivement de façon délo- On appelle dialogue modal une partie de dialogue dans lequel
calisée (pop-up). Dans ce cas, le délai d’accès est très réduit car la la liberté de dialogue de l’usager est modifiée, l’interprétation de
distance à traverser est très faible ; certaines de ses actions pouvant avoir un sens différent de leur
— la structuration hiérarchique des menus rend possible la repré- sens usuel.
sentation de la structure du langage de commande. Elle réduit signi-
ficativement la place occupée par les menus.
Une telle portion de dialogue est aussi appelée transaction. Son
Le lecteur intéressé par les propriétés détaillées des menus se début et sa fin sont contrôlés par des commandes spécialisées ou
référera à [2]. des conventions propres au langage.

Exemple : certains éditeurs de texte à langage de commande tex-


2.4.4 Boîtes de dialogue tuel disposent d’une commande « insérer » qui ouvre et ferme le
mode « insérer ». Dans ce mode, tous les caractères sont entrés dans
Une commande peut avoir ou non des paramètres. Une le texte, y compris ceux qui auraient normalement été interprétés
commande sans paramètres est dite simple. Elle peut être activée comme des commandes. Il y a donc altération temporaire de l’interpré-
par une interaction atomique, par exemple un clic de souris. Une tation des commandes usuelles. Il faut sortir du mode « insérer » pour
icône ou un item de menu suffit pour l’activer. En revanche, une retrouver l’accès à la totalité du langage de commande.
commande avec paramètres est dite complexe. Elle nécessite une
conjonction d’interactions pour être exprimée. En ce sens, elle n’est Exemples de dialogues modaux
pas atomique Cette interaction met en jeu un dialogue structuré
entre l’usager et la machine. Celui-ci est réalisé au moyen de boîtes ■ Sur un téléphone pour enregistrer un numéro dans le répertoire, on
de dialogue. Elles rassemblent tous les constituants de la com- utilise un dialogue modal. La touche « mémoriser dans le répertoire »
mande avant de les valider, comme cela se fait dans les commandes supprime temporairement le comportement normal du téléphone : les
avec paramètres dans les langages de commande textuels. Toute- touches numériques n’appellent plus le numéro mais l’enregistrent
fois, il existe des cas particuliers où l’on réussit à regrouper en une dans le répertoire. L’interprétation du sens habituel de la frappe d’un
seule interaction atomique la définition de plusieurs paramètres. numéro est donc altérée. Notons aussi l’existence d’une interaction
pour signaler la fin du mode, par exemple, l’appui sur une touche spé-
■ Définition ciale ou le raccrochage du téléphone.

On appelle boîte de dialogue une fenêtre spécialisée dans ■ Sous MS Word, pour définir un style, on entre typiquement dans un
laquelle est regroupé l’ensemble des interacteurs simples ou com- dialogue modal. Les autres commandes du système cessent d’être
plexes participant à l’élaboration d’une commande complexe. Une accessibles. La barre de menu devient inopérante. Les sous-menus
convention fixe la validation ou l’abandon de cette commande. relatifs au « format » prennent alors sens dans le contexte du dialogue
de définition de style et n’ont plus leur effet standard.

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Pour bien mettre cette nuance en évidence, et avec plus de sugges-


tivité, les versions récentes d’Office ont dupliqué le menu « format »
directement dans la boîte de dialogue au lieu de le laisser dans la barre
de menu comme c’était le cas des premières versions de MS Word.
La validation ou l’abandon de cette partie du dialogue, et le retour au
« mode normal », se fait par les boutons correspondants dans la fenê-
tre de style. Notons que la fermeture explicite de la fenêtre est inter- Figure 27 – Étapes d’un dialogue guidé : l’outil tampon
prétée comme un abandon et non comme une validation.

Sous Windows, toutes les fenêtres ont le même comportement et


la même interface. Cela implique d’associer un sens particulier à sa L’outil tampon sert, en retouche d’image, à dupliquer des portions
fermeture, celui de la commande d’abandon. Un choix différent est d’images en indiquant la zone source, la zone destination et la forme de
fait sur MacIntosh, où les fenêtres modales n’ont pas de case de fer- la zone copiée. Sous Photoshop, par exemple, l’usager peut, à tout
meture, ce qui oblige l’usager à expliciter son choix : « validation » moment, changer l’un quelconque des paramètres. Il n’y a pas de boîte
ou « abandon ». de dialogue. La forme de la zone est choisie dans une barre de modè-
les de pinceaux. La source est définie par un clic de souris avec la tou-
■ Boîtes de dialogue et dialogue non modal che Alt enfoncée. La destination est définie par un clic de souris et se
propage en roulant. L’interaction est très directe. Un message en bas
On peut utiliser des boîtes de dialogue pour élaborer des com- d’écran indique juste l’interprétation courante des actions (figure 27).
mandes complexes sans pour autant entrer dans un dialogue Par contre, si l’usager oublie de redéfinir une zone source, c’est la
modal. précédente qui reste en cours lorsqu’il définit une nouvelle destination.
C’est très naturel car une retouche se fait par une succession de peti-
Exemple : la commande « rechercher-remplacer » est typique- tes étapes.
ment une commande non atomique puisqu’il faut indiquer ce que l’on Sous un logiciel grand public, au contraire, un dialogue modal forte-
recherche, par quoi on le remplace et si la commande doit être répé- ment guidé contraint l’usager à effectuer toutes ces opérations dans
tée. Pourtant, l’ouverture de la fenêtre de dialogue associée n’ouvre l’ordre requis. Il n’en oublie donc pas, mais le dialogue est ralenti
pas un dialogue modal ; toutes les autres commandes restent accessi- d’autant. Chaque fois qu’il reprend cet outil, il parcourt obligatoirement
bles avec leur sens usuel. Cette fenêtre a juste pour rôle de regrouper l’ensemble du dialogue.
visuellement les paramètres de la commande.

Dans de nombreux autres éditeurs, surtout ceux destinés aux pro-


grammeurs, la commande complexe « rechercher-remplacer » est
simplement décomposée en plusieurs commandes atomiques – par 3. Principales métaphores
exemple, « rechercher ce qui est identique à la sélection courante »,
« chercher suivant », « remplacer » –, ce qui dispense de l’ouverture
d’une fenêtre et améliore la rapidité d’interaction. Pour guider le dialogue, les interfaces à désignation directe font
usage de métaphores. Leur rôle est de réduire la distance articula-
■ Dialogues modaux sans boîtes de dialogue toire perçue par l’usager. L’expression d’actions utilise des conven-
L’ouverture de boîtes de dialogue modal est sécurisant pour le tions qui « évoquent » des actions que l’usager a l’habitude de faire.
débutant mais ralentit beaucoup l’interaction pour un utilisateur C’est pour cela que la métaphore de la désignation directe est aussi
expert. C’est pour cela que l’on emploie de préférence des dialogues souvent appelée de façon générale la métaphore du monde réel en
modaux sans boîte associée pour les transactions courtes dans des raison des métaphores qu’elle permet de mettre en œuvre.
éditeurs professionnels, par exemple des éditeurs de dessin 3D. Les métaphores les plus connues sont :
— le bureau (§ 3.1) ;
Exemple : pour dessiner un profilé extrudé, on doit définir sa sec- — la poubelle (§ 3.5) ;
tion, la trajectoire de l’extrusion. La transaction débute lors de la sélec- — le « copier-coller » (§ 3.3) ;
tion de l’outil de création de profil extrudé. Le premier tracé que fait — le « glisser-déposer » (§ 3.4).
l’usager est interprété comme étant la section. Lorsque ce tracé (qui
peut être un polygone et donc n’est pas nécessairement une interac-
tion atomique) prend fin, le tracé suivant est interprété comme la tra-
jectoire d’extrusion. La fin du second tracé clôt la transaction. Le tracé 3.1 Bureau
suivant, s’il existe, serait alors interprété comme un élément de dessin
normal. On est bien dans un dialogue modal car ces différents tracés
ont des interprétations différentes.
La métaphore du bureau consiste à organiser l’écran comme une
surface de travail où se trouvent des icônes symbolisant les com-
■ Dialogues modaux guidés séquentiellement mandes le plus souvent utilisées, par analogie avec le bureau sur
L’usage d’un dialogue modal sans boîte de dialogue est efficace lequel se trouvent les objets dont l’usager se sert le plus souvent.
mais perturbant pour les novices. Il s’ensuit qu’il faut généralement La métaphore du bureau introduit une mise en correspondance
adapter l’implémentation d’un dialogue modal au type d’usager. symbolique entre des objets que l’on trouve dans un bureau et ceux
Dans certains cas, plutôt que de laisser l’usager fixer les paramè- du système, et les actions que l’on peut faire sur des objets et celles
tres librement, le logiciel le guide en lui présentant en séquence les disponibles dans le système.
actions à effectuer. Cette technique héritée des premières interfaces
interactives est très sécurisante mais devient vite d’un emploi trop
lourd pour être utilisée par des usagers autres que des amateurs 3.1.1 Objets et symboles associés
débutants ou des usagers très occasionnels.

Exemple : l’interface du même outil dit « tampon » est implémen- ■ Objets


tée différemment sous deux logiciels de retouche d’image car l’un Les objets informatiques courants ont une représentation symbo-
s’adresse à des spécialistes et l’autre au « grand public ». lique suggestive.

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Les informations sont dans des documents : ils correspondent (PC). Dans d’autres cas, le mouvement définit une courbe libre
aux fichiers. On leur associe une icône évoquant la forme d’un englobant les éléments à sélectionner.
document et non plus simplement un nom. L’icône suggère le type
du document, qui dans un langage textuel est souvent identifié par ■ Opérations sur la sélection
l’extension du nom. Une sélection est souvent un ensemble d’items. Par combinaison
Les fichiers sont rangés dans des dossiers : ils correspondent aux de sélections élémentaires, on peut étendre ou réduire une sélec-
répertoires. On leur associe une icône évoquant la forme d’un clas- tion. Pour cela, on dispose d’altérations ; généralement, ce sont les
seur, ouvert ou fermé. touches Maj ou CTRL du clavier qui servent à indiquer que l’on
modifie la sélection courante et non qu’on la définit.
■ Réification de commandes
Étant donné une sélection courante, lorsque l’altération est utili-
Certaines abstractions correspondant à des actions sont réifiées sée conjointement à une nouvelle sélection, les éléments de la nou-
(transformées en objet) pour pouvoir prendre place sur le bureau. velle sélection qui appartenaient déjà à la sélection courante en sont
Par exemple, « imprimer » est une action, pas un objet. Dans la retirés, ceux qui ne lui appartenaient pas encore y sont ajoutés.
métaphore du bureau, cette action est réifiée sous la forme de Nota : l’interprétation des altérations diffère au niveau de nuances entre le PC et le Mac.
l’icône de l’imprimante qui, alors, donne accès à cette fonction. L’altération CTRL est utilisée sur le PC pour forcer une désignation à être élémentaire et non
ensembliste, alors que sur le Mac, cette nuance est exprimée par la gestuelle.
■ Réification d’états
De même, des états de l’information sont réifiés. Ainsi, la pou- ■ Actions sur une sélection
belle contient les documents destinés à être détruits. Il s’agit d’une L’intérêt d’effectuer une sélection est de ouvoir agir sur ses élé-
représentation symbolique de l’état d’un document entre le ments. Plusieurs stratégies sont utilisées pour exprimer la com-
moment où il n’est plus considéré comme utile et celui où il n’est mande à la sélection :
plus accessible. — menu général ;
L’imprimante, la boîte aux lettres, le presse-papiers sur le bureau — menu local ;
symbolisent des actions ou des états. — raccourci clavier ;
— multiples clics ou altération d’un clic.
■ Réification de comportements
● Menu général
Des comportements de l’usager sont aussi réifiés.
Cette solution est bien adaptée aux utilisateurs novices, car le
Ainsi, les documents sont dans des dossiers, eux-mêmes dans des menu leur suggère directement la sémantique de la commande. Elle
armoires (les disques). Mais l’usager peut sortir sur le bureau les dos- est lente en raison du déplacement nécessaire pour atteindre l’item
siers ou les documents dont il se sert souvent. Leur icône traîne ainsi de menu.
sur l’écran comme si le dossier était déjà sur la table de travail.
● Menu local

Un menu local a les mêmes avantages qu’un menu général, par


3.2 Dialogue et conventions contre, il a l’inconvénient d’être moins directement explorable, en
ce sens que l’usager ne connaît pas nécessairement la commande
pour le faire apparaître (par exemple, clic droit ou « pomme »-clic).
Pour rendre utilisable la métaphore du bureau, il convient d’intro- ● Raccourci au clavier
duire des conventions et des métaphores complémentaires pour
définir la façon dont l’usager interagit avec les éléments du bureau. C’est la solution la plus rapide. Elle n’est utilisable que par des uti-
Ce sont la métaphore du « glisser-déposer » et les conventions rela- lisateurs confirmés se servant régulièrement du logiciel, car ils doi-
tives à la sélection. vent connaître les abréviations. Seules des abréviations usuelles
comme celles du « copier-coller » sont presque accessibles à tous.
La quasi-totalité des interfaces graphiques a adopté un ensemble Par exemple, il est possible de créer une abréviation pour recher-
de conventions permettant de désigner un ou plusieurs items. Tou- cher un synonyme sous Word.
tefois, ces conventions dépendent fortement du périphérique de
● Multiples clics ou altération d’un clic
désignation (la souris notamment) et ne sont pas facilement trans-
posables à d’autres périphériques (tels que la dalle tactile). L’opération la plus fréquente est souvent associée au double clic –
par exemple, l’ouverture –, mais ce n’est pas la seule. Le double clic,
■ Expression de la réceptivité à l’interaction en supprimant tout déplacement, est l’interaction la plus rapide sur
Suggérer à l’usager qu’un objet de l’interface est susceptible de une sélection.
réagir à une interaction est utile. Cela est fait de façon très systéma-
tique en particulier dans les menus. L’objet peut manifester sa
réceptivité au moyen, par exemple, d’un changement d’aspect. Ce
changement doit être suffisant pour être perceptible, mais aussi 3.3 « Copier-coller »
limité que possible pour ne pas être perturbateur. Par exemple,
l’apparition d’un cadre autour d’une icône ou un changement de
saturation ou de contraste peuvent être efficaces. Par contre, des La métaphore du « copier-coller » consiste à disposer de trois
changements de couleur violents sont à proscrire. commandes élémentaires de mémorisation sans destruction
(copier), de mémorisation avec destruction (couper) et d’insertion
■ Sélection élémentaire de contenus mémorisés (coller).
La sélection peut être réalisée de plusieurs manières, soit indivi- Ces trois actions proviennent de la dissociation des actions élé-
duelle, soit ensembliste. mentaires intervenant dans les opérations de déplacement, de des-
Dans la sélection individuelle, l’usager clique sur l’objet à dési- truction, de duplication. Le « copier-coller » permet de les regrouper
gner. Il ne peut en désigner qu’un par action élémentaire. librement.
Dans la sélection ensembliste, l’usager « entoure » par le par- Le « copier-coller » est unanimement utilisé dans tous les systè-
cours du pointeur les objets qu’il veut designer. Il définit leur ensem- mes, nous ne détaillons pas plus son principe. Par contre, il est mis
ble. Généralement, un clic hors d’un objet initie une sélection en œuvre de façon très différente suivant les systèmes.
ensembliste ; tant que le bouton de la souris est pressé, le mouve- X-Windows, par exemple, utilise les touches de droite et du centre
ment définit l’ensemble concerné. Dans les cas les plus simples, la de la souris à trois boutons pour abréger les commandes de copier
sélection est identifiée par un rectangle englobant (Mac) ou sécant et de coller.

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3.6 Arbre développable

La métaphore de l’arbre développable consiste à suggérer visuel-


lement une structure arborescente sans la représenter en entier. La
présence de sous-arbres non développés est symbolisée par une
altération conventionnelle de la représentation d’une feuille.
Exemple : dans une fenêtre du « finder » du Mac ou du poste de
travail de Windows, les fichiers et les dossiers sont distingués par une
icône. Le rôle de celle-ci est de suggérer le développement possible de
l’arborescence pour les dossiers. C’est pour préserver la suggestivité
au sein de cette métaphore que la forme des icônes de dossiers est
Figure 28 – sensiblement un invariant, alors qu’il existe un très grand nombre de
« Copier-coller » formes pour les icônes de fichiers.
sous DOS
De même, dans la présentation arborescente des fichiers sur Mac
(figure 29), une flèche indique qu’il s’agit d’un élément dévelop-
À l’inverse, la fenêtre DOS de Windows ne permet le « copier- pable.
coller » que par menu (figure 28), car les abréviations usuelles utili- Exemple : cette métaphore visuelle est de plus en plus utilisée,
sent la touche CTRL qui a un autre sens sous DOS. bien qu’elle utilise un domaine source qui n’appartient pas à la vie cou-
rante mais repose sur une représentation organisée de l’information.
Windows 2000 l’utilise intensivement, y compris pour l’interface
d’administration du système (figure 30), où les valeurs des paramètres
3.4 « Glisser-déposer » sont rangées et accédées dans des structures arborescentes.

La métaphore du « glisser-déposer » consiste à sélectionner un


objet et à déplacer la souris en maintenant la sélection pour simuler
l’entraînement de l’objet jusqu'à abandon de la sélection, ce qui
dépose l’objet.
Bien que cette métaphore soit très ancienne (par exemple, dépla-
cer des fichiers ou mettre à la poubelle sur le Mac), son utilisation
n’a été généralisée que récemment.
Elle est utilisée entre applications. L’application de départ doit être
Figure 29 –
capable d’exporter la sélection sous une forme externe acceptable
Arbre développable
par d’autres, et l’application réceptrice doit être capable d’importer
de l’organisation
des données en provenance d’une autre. Les protocoles permettant
des fichiers
à une application de spécifier la nature de ce qu’elle exporte et à une
sous MacIntosh
autre d’interroger sur la nature de ce qu’on lui propose doivent être
définis entre les applications.
Une telle convention est définie dans Java, qui fournit les classes
nécessaires à l’implémentation du « glisser-déposer » entre appli-
cations.

3.5 Poubelle

La métaphore de la poubelle consiste à suggérer la destruction


par un « glisser-déposer » sur une icône symbolisant la poubelle.
C’est l’une des plus anciennes et plus célèbres métaphores des
interfaces à désignation directe. Son originalité a été de coupler à
cette métaphore celle de réversibilité : un objet mis à la poubelle
n’est pas « détruit » ; on peut le reprendre dans la poubelle. Pour la
plupart des autres commandes, la réversibilité est commandée par
un menu « défaire ». La poubelle est vue comme un dossier dans
lequel sont entreposés les documents devant être détruits. Le proto-
cole de destruction effective varie suivant les systèmes. Il est main- Figure 30 – Utilisation de la métaphore de l’arbre développable
tenant à la charge de l’usager. dans un outil d’administration système

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