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Cahiers d’histoire.

Revue d’histoire critique 


140 | 2018
Communisme en Algérie/Communisme algérien

La Voix des soldats. Un réseau clandestin du Parti


communiste algérien dans la guerre
d’indépendance (1955-1957)
Pierre-Jean Le Foll-Luciani

Édition électronique
URL : http://journals.openedition.org/chrhc/9270
DOI : 10.4000/chrhc.9270
ISSN : 2102-5916

Éditeur
Association Paul Langevin

Édition imprimée
Date de publication : 15 décembre 2018
Pagination : 47-64
ISBN : 978-2-917541-74-6
ISSN : 1271-6669

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Référence électronique
Pierre-Jean Le Foll-Luciani, « La Voix des soldats. Un réseau clandestin du Parti communiste algérien
dans la guerre d’indépendance (1955-1957) », Cahiers d’histoire. Revue d’histoire critique [En ligne], 140 |
 2018, mis en ligne le 01 janvier 2019, consulté le 23 septembre 2020. URL : http://
journals.openedition.org/chrhc/9270  ; DOI : https://doi.org/10.4000/chrhc.9270

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La Voix des soldats. Un réseau clandestin du Parti communiste algérien dans l... 1

La Voix des soldats. Un réseau
clandestin du Parti communiste
algérien dans la guerre
d’indépendance (1955-1957)
Pierre-Jean Le Foll-Luciani

1 Entre janvier 1956 et janvier 1957 circulent clandestinement sur le sol algérien neuf
numéros d’un journal destiné aux soldats français, La Voix des soldats. Composé de deux
à quatre pages, ce journal ne porte pas de signature, mais les autorités françaises
émettent rapidement l’hypothèse – très vite confirmée – qu’il est rédigé, confectionné
et diffusé par un réseau du Parti communiste algérien (PCA), interdit depuis septembre
1955. Composé d’au moins une cinquantaine de membres très majoritairement issus de
familles européennes ou juives d’Algérie, ce réseau, constitué à partir de mai 1955, sort
ses premiers tracts en octobre 1955 et reste actif jusqu’à son démantèlement par
l’armée française en mars 1957.
2 Dans des publications communistes des années 1970 et 1980, ce journal se voit accorder
une importance qui semble sans commune mesure avec son rôle dans le cours de la
guerre d’indépendance1. En 2007, l’ancien responsable du réseau soulignait a contrario la
modestie de cette entreprise clandestine, en affirmant n’avoir jamais eu le moindre
écho de la réception du journal parmi les soldats français 2. D’autres anciens militants
partageaient avec lui le sentiment d’avoir mené une action qui, si elle avait eu un coût
très lourd sur leur existence, pouvait être qualifiée de symbolique. On peut toutefois
considérer que l’activité de ce réseau fut un moment important de la guerre, non pas
tant en elle-même que par ses conséquences répressives. Se voulant explicitement le
pendant anticolonialiste de l’organe de l’armée française Le Bled 3, La Voix des soldats fut
pris très au sérieux par les autorités militaires, qui menèrent à son encontre une vaste
opération qui aboutit, de proche en proche, à l’arrestation de militants d’autres
secteurs du PCA clandestin, mais aussi de militants liés aux milieux du christianisme
social et au Front de libération nationale (FLN). Survenu au cœur de la « grande

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répression d’Alger4 », ce démantèlement fut en outre marqué par un usage


systématique de la torture, qui provoqua la mort de deux communistes, Omar Djeghri
et Maurice Audin.
3 À partir d’archives des autorités civiles et militaires et de sources mémorielles et
privées, on s’intéressera d’abord à la constitution et au fonctionnement de ce réseau,
qui se révèle à plusieurs titres original. On verra ensuite que l’histoire de ce groupe
permet d’interroger les relations et les divergences entre communistes d’Algérie et de
France autour d’une question cruciale : le « travail » à mener en direction des soldats
du contingent. Enfin, on reviendra sur le démantèlement brutal du réseau et sur
l’attitude de ses membres face à la répression.

Entre PCA, PCF et FLN, un réseau clandestin original


4 Le réseau de La Voix   des   soldats présente plusieurs spécificités parmi les groupes
communistes clandestins mis en place durant la guerre d’indépendance. La première
tient au fait qu’il résulte d’une initiative commune du PCA et du Parti communiste
français (PCF), alors que le PCF se tient de manière générale à distance des activités
clandestines des communistes algériens. Cette association se concrétise au printemps
et à l’été 1955 par des rencontres entre trois personnages. Le premier est André Moine.
Né en 1909 en France et déporté comme communiste en 1941 en Algérie, il choisit d’y
rester après la guerre et devient membre de la direction du PCA. Perçu par ses
camarades algériens comme un représentant tacite du PCF au sein du PCA, et moins en
phase avec le mouvement nationaliste et insurrectionnel que d’autres dirigeants, il se
trouve marginalisé à partir du printemps 1955 par la direction du PCA, qui le charge
toutefois de l’organisation matérielle de la propagande clandestine ; au même moment,
la section d’outre-mer du PCF l’encourage à mettre en place un organe de propagande à
destination des soldats français. Le deuxième personnage est Alfred Sepselevicius, dit
Alfred Gerson. Né en 1928 dans une famille d’immigrés juifs lituaniens, ouvrier en
région parisienne, il est chargé au début des années 1950 par le PCF du « travail »
politique en direction de l’armée et de la diffusion du journal Soldat de France ; en juillet
1955, il est spécifiquement dépêché en Algérie par le PCF pour apporter son expérience
aux militants du PCA. Le troisième personnage est Lucien Hanoun. Né dans une famille
juive algérienne en 1914, il étudie en France sous le Front populaire et adhère au PCF,
puis rejoint le PCA à son retour à Alger en 1940 ; chargé de la direction du réseau à
partir de mai 1955, il s’entretient à plusieurs reprises à Paris avec les dirigeants de la
section d’outre-mer du PCF.
5 La deuxième originalité tient aux relations de ce réseau avec le FLN. Au printemps 1956,
les dirigeants des appareils politique et paramilitaire du PCA clandestin, Sadek
Hadjerès et Bachir Hadj Ali, concluent avec deux dirigeants du FLN, Benyoucef
Ben Khedda et Abbane Ramdane, un accord qui comporte deux volets principaux. D’une
part, le PCA dissout ses groupes armés, dont les membres intègrent l’Armée de
libération nationale (ALN) et rompent tout lien avec le PCA pour la durée de la guerre.
D’autre part, le FLN accepte le maintien de l’organisation politique du PCA, qui soutient
politiquement et matériellement le FLN-ALN5. C’est à la suite de cet accord qu’un
envoyé de Benyoucef Ben Khedda, Arezki Oucharef, rencontre Lucien Hanoun et
l’encourage à poursuivre la publication de La Voix des soldats. Bien que cela ne paraisse
pas avoir été formulé explicitement à l’été 1956, Lucien Hanoun semble, à compter de

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cette date, être considéré comme un agent de l’ALN. C’est en tout cas ce qu’il dira avoir
appris de la bouche d’Arezki Oucharef lorsqu’il l’a retrouvé en prison 6.
6 Dans les faits toutefois, La Voix des soldats est bien un réseau du PCA, dont la troisième
originalité réside dans sa composition. Alors que les autres réseaux communistes
comptent dans leurs rangs une partie de militants dits « musulmans », celui de La Voix
des soldats est quasi exclusivement composé de militants dits « européens » – c’est-à-
dire métropolitains ou français d’Algérie d’origine française, espagnole, italienne ou
juive maghrébine –, ce qui témoigne à l’évidence d’une forme de division des tâches
selon l’origine. Par ailleurs, les catégories intellectuelles sont surreprésentées au sein
de ce groupe, même s’il reste, comme les autres réseaux du PCA, majoritairement
composé d’ouvriers et d’employés. Enfin, les femmes, qui constituent certes moins de la
moitié de ses membres, y sont plus nombreuses que dans d’autres réseaux. La
répartition inégalitaire des tâches selon le sexe n’en est pas moins importante : les
responsabilités de direction et de rédaction sont confiées à des hommes, tandis que les
femmes sont chargées de la confection, de la diffusion et des liaisons, à l’image de
l’employée de banque Lucie Coscas et de l’étudiante Éliette Loup, toutes deux nées en
1934 et agents de liaison respectivement de Lucien Hanoun et d’André Moine.
7 L’histoire du recrutement est difficile à retracer, mais elle fait apparaître une
quatrième particularité. Ayant été en partie constitué alors que le PCA était encore
légal, le réseau comporte un nombre important de militants comparativement à
d’autres réseaux. Surtout, bien que théoriquement régi par des règles de
cloisonnement, il rassemble plusieurs sous-groupes dont les membres sont liés par une
interconnaissance plus ou moins ancienne. La Librairie nouvelle d’Alger apparaît ainsi
comme un lieu de sociabilité essentiel dans la constitution du réseau, notamment pour
des jeunes femmes qui s’y fréquentent avant et pendant la guerre.
8 A priori, le réseau ne rassemble pas des militants à la recherche de modes d’actions
radicaux. « Je ne me serais pas vu visant un membre de l’armée française avec mon
fusil. […] J’étais bien à ma place à rédiger un journal, à trouver les arguments pour
m’adresser aux fils du peuple de France7 », affirmait en 2007 Lucien Hanoun, qui se
souvenait aussi de l’ironie, voire du mépris affichés à son égard courant 1956 par des
étudiants communistes dont il apprendra plus tard l’engagement dans la fabrication
d’explosifs. Des militants participant par ailleurs à la lutte armée jouent toutefois un
rôle dans le réseau, particulièrement à Blida, où le groupe communiste des
Combattants de la libération, versé à l’ALN durant l’été 1956, se charge non seulement
d’actions armées et de l’organisation de la désertion de soldats, mais aussi de la
diffusion du journal8. Entre l’ensemble des militants impliqués, la division des tâches
est la suivante : une petite partie est chargée de collecter des informations ayant
notamment trait à la situation des soldats et aux actions répressives de l’armée
française ; les mêmes militants et quelques autres discutent du contenu du journal avec
son principal rédacteur, Lucien Hanoun, remplacé après son arrestation par son
collègue enseignant en histoire-géographie, Georges Torres ; d’autres militants, plus
nombreux, sont chargés de la confection, de la reproduction et de la diffusion du
journal dans toute l’Algérie ; les mêmes et d’autres, plus périphériques, assurent les
transports et les « planques » du matériel et des militants recherchés.
9 Lucien Hanoun semble tout désigné pour diriger le réseau et rédiger le journal. Âgé de
41 ans en 1955, il est célibataire et sans enfant. Professeur de français rompu à
l’exercice de l’écriture de tracts et d’articles politiques, il dispose en outre d’une

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première expérience d’organisation clandestine sous Vichy et connaît de nombreux


militants de l’Algérois pour avoir dirigé la section de la Casbah, puis la « région » du
PCA d’Alger. Par ailleurs, ayant servi cinq ans dans l’armée française, il a une
connaissance concrète de l’institution militaire. Enfin, il a reçu lors de ses études une
formation de communiste français et considère le PCF comme le « grand frère » et
l’« éducateur » du PCA. Cette formation, couplée à l’éducation dispensée à l’école et
dans sa famille, le fait porter aux nues ce qu’il nomme « le peuple de France », dans
lequel il voit un vivier « progressiste » que les militants d’Algérie doivent considérer
comme un allié mobilisable à divers titres dans leur lutte anticolonialiste 9.

Alger, vers 1936. Lucien Hanoun entouré de sa demi-sœur, Armide Timsit, et de son demi-frère, Ulysse
Timsit (archives privées).

Que dire aux soldats de l’armée française ? Le contenu


de La Voix des soldats
10 Que dire aux soldats d’une armée engagée contre une insurrection anticoloniale ? Et
quelle attitude les soldats communistes doivent-ils adopter à l’intérieur de cette
armée ? La question s’est surtout posée pour les communistes algériens et français lors
des guerres dites du Rif, d’Indochine et d’Algérie. Durant les guerres de décolonisation,
la direction du PCF s’oppose à l’insoumission et à la désertion et n’encourage pas les
refus d’obéissance, mais invite ses militants à « se comporter en communistes » à
l’intérieur de l’armée. Des directives leur sont données à ce propos durant la guerre
d’Indochine : il s’agit de mener un « travail de masse » au sein de l’armée, c’est-à-dire
non seulement de se montrer attentif à l’état d’esprit et aux revendications matérielles
des autres soldats, mais aussi, à l’exemple du marin Henri Martin dont l’action est
exaltée par le PCF, d’y diffuser une propagande reprenant plus ou moins directement
les mots d’ordre du parti sur la guerre10. Mais durant la guerre d’Algérie, où l’envoi du

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contingent induit pourtant une proportion bien plus importante de communistes dans
l’armée, aucune directive ayant trait au « travail de masse » n’est donnée aux soldats
par la direction du PCF. Cette dernière, qui exclut du parti les déserteurs, hésite en
outre durant plusieurs mois à apporter son soutien au premier de la quarantaine de
soldats communistes dits « du refus », Alban Liechti, arrêté en juillet 1956 11. Le PCF
s’adresse cependant aux soldats à travers son journal clandestin Soldat de France. Ce
dernier, dont la diffusion et le contenu restent à étudier, s’oppose à l’envoi du
contingent, dénonce la colonisation et les méthodes de l’armée française et appelle à
l’ouverture de négociations12.
11 Les positions du PCA sont en partie différentes. Durant la guerre d’Indochine, plusieurs
de ses militants sont poursuivis pour avoir fait l’éloge de l’insoumission et de la
désertion des soldats « musulmans13 ». Surtout, durant la guerre d’indépendance
algérienne, le parti organise la désertion de militants qui ont le souhait et la possibilité
de gagner le maquis, à l’image d’Henri Maillot, Abdelhamid Gherab et Georges Bensaïd.
Toutefois, la direction du PCA n’appelle ni à la désertion ni à l’insoumission et invite la
majorité de ses militants mobilisés à demeurer dans l’armée pour apprendre le
maniement des armes, informer le parti et faire pénétrer sa propagande dans les
casernes. Tout comme le PCF et à la différence du FLN14, la direction du PCA estime en
effet que le travail « collectif » et « patient » à l’intérieur de l’armée est « politiquement
plus rentable » que l’insoumission, la désertion ou le refus d’obéissance, présentés
comme des actes individuels qui livreraient leurs auteurs à la répression, les
couperaient des autres soldats – dès lors abandonnés à la propagande « colonialiste » –
et ne sauraient rencontrer de succès dans « l’opinion française 15 ».
12 Adressés aux soldats métropolitains, français d’Algérie ou « musulmans » et parfois
fictivement rédigés par des soldats à la première personne du pluriel, La Voix des soldats
et les tracts édités par le réseau entre octobre 1955 et janvier 1957 ne se présentent pas
comme des publications du PCA, mais développent un argumentaire très proche de
celui de textes du PCA16. Leur langage se rapproche aussi en partie de celui du PCF.
D’une part, La Voix   des   soldats condamne l’envoi du contingent et appelle à une
mobilisation pour la réduction du service militaire et pour un retour rapide dans les
foyers. D’autre part, il vise à expliquer ce qu’est la domination coloniale et insiste
particulièrement sur la figure des « gros colons ». Écrivant que c’est pour les privilèges
de ces derniers que la guerre est menée, ses rédacteurs affirment que la guerre est
contraire à « l’intérêt du peuple de France17 ». En relayant les témoignages de soldats
français, La Voix   des   soldats compare en outre les actions répressives de l’armée
française à la « barbarie hitlérienne18 » et affirme qu’elles sont « déshonorantes19 » pour
l’armée comme pour le « peuple français », présenté comme fondamentalement
« progressiste ». Enfin, le journal appelle à un cessez-le-feu et à des négociations ayant
comme point de départ la « reconnaissance du fait national algérien 20 ».
13 Toutefois, La Voix des soldats se distingue à plusieurs titres de la propagande du PCF.
D’abord, par son soutien au FLN – dont des documents sont cités – et par sa légitimation
de la lutte armée de ceux que le journal nomme les « patriotes algériens 21 », qu’il
compare aux résistants français et dont il affirme que les éventuelles exactions, si elles
sont « injustifiables », sont « compréhensibles », car elles répondent à la « sauvagerie »
des « colonialistes22 ». Le journal se félicite en outre de la désertion de soldats
« musulmans » et affirme début 1956 qu’« avec l’ensemble de leur peuple, les 40 000
soldats algériens sont appelés à entrer dans la lutte pour la libération de leur pays 23 ».

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Surtout, tout comme le FLN, ses rédacteurs enjoignent les soldats à désobéir aux ordres
de répression, à condamner la torture, à fraterniser avec la population, à soutenir leurs
camarades insoumis et déserteurs, voire à envisager la désertion 24. Le numéro de juin
1956 relaie en effet un appel à la désertion lancé par le FLN et consacre un article à
« l’exemple d’Henri Maillot », soldat communiste algérien qui a déserté en détournant
un camion d’armes de l’armée française en avril 1956 :
« Si, contre la volonté du peuple de France et la nôtre solennellement déclarée, on
nous obligeait à des opérations que nous réprouvons de tout notre cœur de
patriotes français, alors il nous faudrait envisager de répondre favorablement aux
appels des patriotes algériens qui se déclarent prêts à nous accueillir
fraternellement. » 25

La Voix des soldats, n° 9, janvier 1957 (ANOM).

Comment atteindre les soldats ? La diffusion du


journal
14 Si des témoignages font état d’un tirage ayant pu atteindre mille exemplaires, il est
difficile d’évaluer la diffusion – et a fortiori la réception – de La Voix des soldats parmi les
soldats français. La frappe et les premiers tirages sont assurés par Geneviève Rioch (née
Sulmon), employée du gouvernement général âgée de 54 ans et mère d’un capitaine de
l’armée française. Les militants munis de systèmes de tirage sont invités à reproduire à
leur niveau le journal, « de manière parfois un peu archaïque 26 », et l’organisation
compte plusieurs responsables de la diffusion par « région », parmi lesquels Roger
Perlès (Alger), Antoine Pelozuelo et Roger Simongiovanni (Oran), Odet Voirin et
Auguste Martinez (Blida), Hubert Hannoun et André Beckouche (Constantine). D’après
les archives et des témoignages, seule une partie de ces groupes aurait assuré une
diffusion effective des Voix des soldats. Des numéros ont notamment été répandus à

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proximité de casernes ou dans des lieux fréquentés par des militaires à Alger, Ténès ou
Blida, tandis que d’autres ont été envoyés par courrier à des soldats de Boufarik,
Hussein Dey, Affreville, Sétif ou Batna. La diffusion du journal par l’ALN, évoquée par
André Moine, ne peut être confirmée, même si des militants de Blida semblent avoir
cherché à remettre des tracts au lieutenant de l’ALN Ali Khodja 27.
15 Ces envois et dépôts de journaux sont majoritairement effectués « à l’aveugle » par des
communistes algériens. Lucien Hanoun n’a pu en effet obtenir du PCF le contact avec
des soldats communistes français, malgré deux demandes formulées auprès de Léon
Feix lors de ses venues à Paris28. Quels que soient les motifs des dirigeants du PCF, cette
frilosité est déplorée par des communistes algériens29, qui ne peuvent compter que sur
leurs propres forces pour pénétrer directement les casernes. Un précédent de
collaboration sur le sol algérien entre militants du PCA et soldats membres du PCF
aurait pourtant pu servir de modèle : fin 1952, plusieurs d’entre eux avaient mené
conjointement, parmi les soldats stationnés en Algérie avant leur envoi au Vietnam,
une propagande pour une réduction du service militaire, pour la négociation avec le
Vietminh et pour l’indépendance de l’Algérie30.
16 Seuls deux militants du PCA mobilisés dans l’armée semblent avoir servi de relais direct
au réseau dans les casernes. Le premier, Jean-Pierre Saïd, né dans une famille juive à
Alger en 1933 et journaliste à Alger républicain, fait son service à Batna, dans les Aurès,
en 1954. Connu comme communiste, il lui est interdit de monter la garde et de toucher
une arme après l’attaque de la caserne par le FLN le 1er novembre 1954. Contacté par
des camarades courant 1955, il les informe sur la caserne et donne des noms de soldats
à qui sont envoyés des tracts et La Voix des soldats. Soupçonné, mais protégé par un
colonel ancien résistant, il est envoyé à Laghouat. Après sa démobilisation, il diffuse le
journal à Alger et Ténès en compagnie de son cousin Pierre Ghenassia, qui rejoindra le
maquis et y mourra en février 1957. Son activité prend fin en novembre 1956, date de
son internement administratif sur la base de soupçons31.
17 Le second soldat est Pierre Khalifa. Agent des PTT né en 1931 dans une famille juive de
Constantine, il entre le 1er février 1954 à la base aérienne de Hussein Dey. Bien qu’il ait
été un orateur remarqué dans des réunions rassemblant jeunes communistes et
nationalistes à Constantine, lors desquelles il exaltait les luttes armées des peuples
colonisés32, il ne semble pas être l’objet de méfiance au sein de l’armée, même si les
gradés se plaignent de son manque de discipline et d’un tempérament « très peu
militaire33 ». Fréquentant lors de ses permissions la Librairie nouvelle d’Alger, il se lie
notamment à Marie Mateu et Roger Perlès, à qui il fournit les adresses d’une dizaine de
militaires, qui reçoivent au moins trois tracts entre fin octobre et fin décembre 1955,
puis les premiers numéros de La Voix des soldats en février-mars 1956 34. Douze feuillets
écrits de sa main sont découverts dans son armoire en mars 1956. Même s’il déclare à la
police « [s’interdire] […] toute discussion politique pour ne pas [se] dévoiler, et [écrire]
ces notes pour [se] soulager intellectuellement quand [il n’a] pas pu répondre à
certaines discussions35 », on peut imaginer qu’il se servait de ces notes au cours de ce
qu’il nommera a   posteriori ses « discussions avec les soldats du contingent 36 ».
Reprenant des textes du PCA, ces feuillets mêlent, tout comme La Voix des soldats, deux
registres : d’une part, une dénonciation des inégalités coloniales et une légitimation de
la lutte armée pour l’indépendance ; d’autre part, des arguments dont le PCA estime
qu’ils peuvent toucher de jeunes Français, comme l’assimilation des « colonialistes » à
des « hitlériens » et à des « collabos », ou l’affirmation selon laquelle la guerre est

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contraire à « l’intérêt véritable de la France, son intérêt national 37 ». Arrêté dans sa


caserne en mars 1956 après la découverte sur lui d’un exemplaire du journal du PCA
Liberté appelant à la lutte armée 38, Pierre Khalifa est, d’après son audition par la justice
militaire, brutalisé et menacé des supplices de l’eau et de l’électricité 39. Le 19 novembre
1956, il est condamné à deux ans de prison pour « participation au fonctionnement de
ligue dissoute et à une entreprise de démoralisation de l’armée ». Il déclare à
l’audience : « J’ai agi par pure conviction, et pour le parti 40 ».

Jean-Pierre Saïd au camp d’internement de Lodi (1956-1960) (archives privées).

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Pierre Khalifa sous l’uniforme de l’armée française à la base aérienne de Hussein Dey (1954-1956)
(archives privées).

« Des méthodes dépassant les cruautés les plus


sadiques de la Gestapo ». Le réseau face à la
répression
18 En mars 1956, l’arrestation de Pierre Khalifa confirme aux autorités – qui le supposaient
déjà41 – que La Voix des soldats émane du PCA clandestin, mais aucun autre membre du
réseau n’est identifié avec certitude avant mars 1957. Fin novembre 1956, Lucien
Hanoun est toutefois interné sur décision administrative à la suite d’une notice de
renseignements émettant notamment l’hypothèse qu’il est le principal rédacteur du
journal42. À en croire les souvenirs du général Massu et du commandant Aussaresses, le
démantèlement du réseau devient une des priorités de l’armée à Alger fin 1956-début
1957. Revenant en 1971 sur la publication de ce « torchon clandestin », Jacques Massu
écrit : « Depuis des mois, tous les services de police prévoient un pot monstre pour le
jour où ils cravateront l’imprimerie clandestine de La   Voix   des   soldats ». Il ajoute
qu’après le démantèlement du réseau, un « message chaleureux de Paris [lui] précisa
que son importance se situait sur le plan gouvernemental43 ». Cette « importance »
s’explique sans doute par la certitude des autorités françaises qu’elles ont la possibilité
de détruire, à travers ce réseau, l’essentiel de l’appareil clandestin du PCA, mais aussi
par le sérieux accordé à toute « entreprise de démoralisation de l’armée 44 ».
19 L’enchaînement d’événements qui conduit à l’arrestation d’une grande partie de la
branche algéroise du réseau témoigne de la raréfaction des « planques » à Alger au
début de l’année 1957, qui oblige des militants appartenant parfois à des organisations
politiques différentes à faire s’interpénétrer des branches clandestines théoriquement

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cloisonnées. C’est en effet en traquant Raymonde Peschard, militante du PCA passée au


FLN et soupçonnée à tort d’avoir remis à Fernand Iveton la bombe qui devait exploser
dans son usine, que les « paras » portent les premiers coups au réseau. D’abord cachée
par des réseaux chrétiens liés au FLN, Raymonde Peschard se réfugie dans la colocation
de trois institutrices membres du réseau de La Voix   des   soldats, Colette Grégoire,
Claudine Lacascade et Arlette Bourgel, qui hébergent deux autres membres du réseau
eux aussi recherchés, André Beckouche et Roger Perlès45. Du fait du double emploi de
certains militants, les premières arrestations débouchent en outre sur celles de
militants extérieurs à La Voix des soldats, à Alger comme à Blida.
20 Lorsque le démantèlement du réseau démarre en mars 1957, le PCA a déjà été
lourdement touché par la répression. Les premières mesures administratives se sont
abattues au printemps 1955, avant que la police et l’armée ne démantèlent plusieurs
réseaux politiques et armés entre décembre 1955 et janvier 1957. Après l’arrestation
d’une quarantaine de communistes d’Oran en septembre 1956 – à l’origine de la
première grande affaire liée à la torture en France –, les militants qui en doutaient
encore savent que, quels que soient leurs origines et leur sexe, ils risquent fortement
d’être torturés en cas d’arrestation. Interrogée en 2007, Arlette Bourgel se souvenait
avoir vu sa colocataire Claudine Lacascade, fils d’un résistant français exécuté sous
l’Occupation46, se brûler avec des cigarettes, ce qu’elle interprétait a posteriori comme
un entraînement à supporter la torture47. Dès leur arrivée en prison, les communistes
séquestrés entre mars et juillet 1957 à la villa Sésini et à El Biar rédigent des plaintes
contre leurs tortionnaires. Immédiatement relayées en France dans une brochure
éditée par d’anciens condisciples de Lucien Hanoun48, elles sont fortement publicisées
en 1958 avec les publications de La Question d’Henri Alleg et de L’Affaire Audin de Pierre
Vidal-Naquet. Désignant nommément leurs bourreaux, les militants y décrivent les
supplices de l’eau et de l’électricité, les coups et les pendaisons, les attouchements
sexuels et les humiliations verbales, les simulacres d’exécution et autres tortures
psychologiques, parfois subis pendant plusieurs jours. Parmi les torturés, deux
communistes sont faussement déclarés « évadés49 » par l’armée : le premier, Omar
Djeghri, membre du réseau, est mort à la fin mars 1957 à l’intérieur de la villa Sésini en
présence d’autres militants ; le second, Maurice Audin, non-membre du réseau, est
mort entre les mains de ses tortionnaires à la fin juin 1957.
21 Début novembre 1958 a lieu devant le tribunal militaire d’Alger le procès de
26 membres supposés ou réels du réseau de La Voix   des   soldats d’Alger, inculpés
d’atteinte à la sûreté extérieure de l’État, de reconstitution de ligue dissoute et
d’entreprise de démoralisation de l’armée. Il est suivi, un an plus tard, par celui de
24 membres supposés ou réels du réseau de Blida, dont la participation à la diffusion de
La Voix des soldats ne constitue qu’une partie des activités. Deux grands axes définissent
les prises de parole de la grande majorité des inculpés : d’une part, la dénonciation des
sévices subis, dont Lucien Hanoun écrit dans sa plainte qu’ils « [dépassent] les cruautés
les plus sadiques de la Gestapo50 » et dont les prévenus et leurs avocats affirment qu’ils
rendent nulles des déclarations « extorquées sous la torture51 », d’autre part, la
revendication de leurs actes par les militants, qui ne cherchent que rarement à nier ou
à minimiser leur engagement pour obtenir la clémence du tribunal. Clamant leur
appartenance au réseau de La Voix des soldats, au PCA et, pour certains militants de
Blida, au FLN, ils défendent lors des audiences la lutte d’indépendance et légitiment la
lutte armée. Certains y présentent leur engagement communiste comme un
engagement de classe – à l’image de Marie Mateu, qui déclare avoir « adhéré au PCA en

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tant qu’ouvrière » –, d’autres comme un engagement « national » pris en tant qu’«


Algérien » et motivé avant tout par la volonté de lutter contre la domination et les
inégalités coloniales, à l’image d’Éliette Loup :
« Je suis née en Algérie. Je suis d’origine européenne, mais je suis algérienne, et,
tout comme mon camarade Moine André, je dénie au tribunal militaire français
toute compétence pour me juger. Révoltée par le régime colonialiste imposé aux
musulmans algériens, je me suis rendu compte que les Algériens avaient le droit de
gouverner leur propre pays. […] Demain, sans rien regretter de ce que j’ai fait, je
continuerai dans la même voie pour le bonheur du peuple algérien. » 52
22 À l’issue du procès d’Alger, seuls neuf militants sont condamnés à de la prison ferme,
les peines les plus lourdes étant celles d’André Moine (cinq ans) et de Lucien Hanoun
(quatre ans). Cette clémence relative s’explique selon ce dernier par la solidarité de
nombreux enseignants de France, manifestée par l’envoi au tribunal militaire d’une
trentaine de lettres et télégrammes collectifs de soutien53, à quoi s’ajoute certainement
le retentissement des affaires Alleg et Audin. Les militants de Blida sont plus
lourdement punis, Auguste Martinez et Aimé Sintes étant par exemple condamnés à dix
ans de prison pour leur seul rôle dans la diffusion de propagande. Qu’ils aient été
acquittés ou condamnés, la plupart des inculpés subissent en outre après leur sortie de
prison une mesure administrative d’internement et/ou d’expulsion.
23 Celles et ceux qui ont été emprisonnés ou internés ont témoigné de la fraternité les
unissant à la base avec leurs codétenus du FLN, notamment dans les prisons de femmes,
malgré des relations difficiles avec certains cadres du Front. Dans leur majorité, les
membres du réseau choisiront de vivre en Algérie indépendante, où plusieurs d’entre
eux obtiendront la nationalité algérienne qu’ils avaient revendiquée devant les
tribunaux français.

Épilogue. « Un symbole de l’amitié entre nos deux


peuples »
24 Comme les membres des autres réseaux de propagande du PCA, et à la différence des
communistes engagés dans des actions armées ou de soutien aux maquis, dont ils
pouvaient observer la portée immédiate, les militants du réseau de La Voix des soldats
n’ont jamais eu aucun écho autre que répressif de leur action. Combien de soldats ont-
ils eu le journal entre leurs mains ? L’ont-ils lu, en ont-ils parlé avec leurs camarades, et
qu’en ont-ils pensé ? Ces questions restent à ce jour en suspens. Plusieurs membres du
réseau ont toutefois eu l’occasion, en prison, de discuter de leur action avec des
« soldats du refus » communistes français, qui avaient tout comme eux tenté
d’influencer les appelés sans obtenir du PCF tout le soutien qu’ils pouvaient escompter.
En novembre 1956, le communiste algérien Pierre Khalifa et le communiste français
Alban Liechti, tous deux sous les drapeaux, sont jugés le même jour par le tribunal
militaire d’Alger. Transférés ensemble « dans ce lieu de souffrance et de désolation 54 »
qu’est la prison de Berrouaghia, où ils subissent dès leur arrivée une mise à nu dans la
neige, les deux appelés se lient d’amitié et interprètent leurs liens comme « un symbole
de l’amitié entre [leurs] deux peuples55 ». Après sa libération de prison en mars 1958,
Pierre Khalifa, qui se considère comme un Algérien, remercie par courrier son
camarade français pour sa solidarité envers « [son] peuple 56 » et offre à son épouse un
portrait d’Alban Liechti réalisé en prison par un « frère57 » maquisard de l’ALN.
Rejoignant Yolande Liechti sur l’idée que « ce qui a été fait pour l’Algérie par le Peuple

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de France est insuffisant », il désapprouve implicitement l’attitude du PCF sur la


question algérienne en écrivant : « C’est d’ailleurs une critique qui revenait souvent
lorsque je discutais [en prison] avec des compatriotes. À ce propos, ils faisaient la
comparaison de la solidarité des Français pour les Vietnamiens, qui était plus efficace
que celle pour les Algériens58 ».
25 Après avoir connu plusieurs prisons en Algérie, Lucien Hanoun est pour sa part
transféré aux Baumettes, à Marseille, en juin 1959, où il retrouve neuf « soldats du
refus » membres du PCF. Interrogé en 2007, il décrivait la chaleur des militants du FLN
à l’égard de ces soldats, plus constante et appuyée qu’à l’égard des détenus
communistes algériens. Après avoir participé aux grèves de la faim et à diverses
activités organisées par le FLN, les « soldats du refus » sont finalement transférés à la
prison de Casabianda, en Corse, en octobre 1959 :
« Quand ils ont été chassés de la prison […], les camarades algériens [du FLN] ont
organisé dans la cour un grand meeting, dans lequel l’un d’eux s’est adressé aux
soldats français. Et un soldat français a répondu – et il a répondu au nom du Parti
communiste français ! […] Mais personne n’en parle, y compris le Parti communiste
français ! (rires) » 59

NOTES
1. André Moine, Ma guerre d’Algérie, Paris, Éditions sociales, 1979, 231 p. ; Henri Alleg (dir.), La
Guerre   d’Algérie, t. 2, Paris, Temps actuels, 1981, p. 488-492 ; Roger Bourderon, « Un journal
clandestin pour les appelés : La Voix du soldat », Cahiers d’histoire de l’institut de recherches marxistes,
n° 8 (1982), 40, p. 89-111. Contrairement à ce qui est affirmé dans ces publications, le réseau n’a
pas fait paraître 17 mais 9 numéros du journal. Signalons aussi que le journal s’intitulait bien
La Voix des soldats, et non La Voix du soldat.
2. Entretien de l’auteur avec Lucien Hanoun, 12 janvier 2007.
3. La Voix des soldats, n° 5, septembre 1956 (ANOM).
4. Gilbert Meynier, Histoire intérieure du FLN, 1954-1962, Paris, Fayard, 2002, p. 322-333.
5. Hafid Khatib, 1er juillet 1956. L’accord FLN-PCA et l’intégration des « Combattants de la libération »
dans l’Armée de libération nationale en Algérie, Alger, Office des publications universitaires, 1991,
148 p.
6. Entretien de l’auteur avec Lucien Hanoun, 6 février 2007.
7. Idem.
8. Archives de la justice militaire (AJM) : réquisitoire définitif du parquet du tribunal permanent
des forces armées (TPFA) de la zone nord-algérois (ZNA), 18 septembre 1959.
9. Entretien de l’auteur avec Lucien Hanoun, 12 janvier 2007.
10. Alain Ruscio, Les communistes français et la guerre d’Indochine. 1944-1954, Paris, L’Harmattan,
1985, p. 266-273 et 362-371.
11. Marc GIOVANINETTI, « Le Parti communiste français et les soldats du contingent pendant la
guerre d’Algérie : prôner l’insoumission ou accepter la mobilisation ? », Le Mouvement   social,
vol. 251, n° 2, 2015, p. 75-97.
12. Élie Mignot, « Soldat de France et l’intervention du PCF auprès des soldats du contingent »,
Cahiers d’histoire de l’institut de recherches marxistes, n° 8 (1982), 40, p. 49-62.

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13. C’est notamment le cas de Hamou Kraba. Archives nationales d’outre-mer (ANOM),
Gouvernement général d’Algérie (GGA), 10 CAB 6 : rapport de la police des renseignements
généraux (PRG) de Constantine, 7 juillet 1950.
14. Sur la propagande du FLN à destination des soldats français, voir Charles-Robert Ageron, « La
“guerre psychologique” de l’Armée de libération nationale algérienne », dans  Charles-Robert
Ageron (dir.), La guerre d’Algérie et les Algériens, 1954-1962, Paris, Armand Colin, 1997, p. 203-206.
15. « À propos des attitudes respectives des jeunes Algériens et des jeunes Français face à l’armée
impérialiste », Réalités algériennes et marxisme, n° 6, mars 1961, Service historique de la défense
(SHD), 1 H 1720-2.
16. 19 documents rassemblés dans les dossiers d’instruction de la justice militaire ont été
consultés. Il s’agit, d’une part, de six des neuf numéros de La Voix des soldats : n° 1 (janvier 1956),
non numéroté (vers mars-avril 1956), n° 4 (juin 1956), n° 5 (septembre 1956), non numéroté (vers
octobre 1956) et n° 9 (janvier 1957) ; d’autre part, de dix tracts non signés adressés aux soldats
français et fort probablement rédigés par le même réseau : « Soldats de l’armée française. Pour le
retour dans vos foyers, pour la quille à 15 mois. Assez de sang ! Négociation » (octobre 1955),
« Monsieur Soustelle ment… » (novembre 1955), « Soldats algériens, deux poids, deux mesures,
pourquoi ? » (décembre 1955), « Soldats ! Les Algériens luttent pour supprimer la domination des
gros colons et des sociétés coloniales françaises… » (fin 1955 ou début 1956), « Pour que les
rappelés et maintenus soient bientôt libérés », « Lettre ouverte à Guy Mollet », « Alger,
14 juillet », « Ceux qui prétendent parler au nom de la France », « Paix en Algérie, paix en
Égypte », « Disponibles français, votre lutte n’est pas isolée » (courant 1956) ; enfin, de trois tracts
du PCA, dont les deux premiers ont probablement pour auteurs des membres du réseau :
« Soldats de France les patriotes algériens vous saluent », signé « Les combattants algériens de la
libération nationale » (vers mai-juin 1956), « Soldats de France ! » (20 décembre 1956), « Des
soldats français refusent de combattre notre peuple » (22 décembre 1957).
17. La Voix des soldats n° 1, janvier 1956.
18. La Voix des soldats n° 4, juin 1956.
19. La Voix des soldats n° 1, janvier 1956.
20. La Voix des soldats non numéroté, vers mars-avril 1956.
21. La Voix des soldats n° 4, juin 1956.
22. La Voix des soldats non numéroté, vers mars-avril 1956.
23. Idem.
24. La Voix des soldats non numéroté, vers octobre 1956.
25. La Voix des soldats n° 4, juin 1956.
26. Entretien de l’auteur avec Arlette Beckouche (née Bourgel), 23 avril 2007.
27. ANOM, préfecture d’Alger, 91 3 F 88 et 91 4 I 19 : rapports de la PRG d’Alger, 30 janvier et
6 mars 1956 ; AJM : réquisitoires définitifs des parquets du TPFA d’Alger, novembre 1958, et de la
ZNA, 18 septembre 1959 ; Henri Alleg (dir.), op. cit., p. 192 ; entretiens de l’auteur avec Lucien
Hanoun, 12 janvier 2007, Jean-Pierre Saïd, 9 mars 2007, et Pierre Khalifa, 27 juin 2007.
28. Entretien de l’auteur avec Lucien Hanoun, 12 janvier 2007.
29. Outre les nombreux témoignages de militants du PCA, les RG d’Alger établissent le 16 mai
1957 un résumé crédible des motifs d’insatisfaction des dirigeants du PCA à l’égard du PCF,
notamment en ce qui concerne l’absence d’aide concrète en matière de propagande (ANOM,
préfecture d’Alger, 91 1 F 285).
30. AJM : acte d’accusation du parquet du TPFA de Constantine, 20 juin 1955, à l’encontre de
quatre communistes algériens (Abdelhamid Boudiaf, Mabrouck Legmar, Alfred Strich et Louis
Porro) et de huit soldats français (dont Claude Lecomte, Roland Vaucher, Rolland Zampilli et
Pierre Hennequin) pour « participation à une entreprise de démoralisation de l’armée » et « de
nature à soustraire à l’autorité de la France une partie des territoires sur lesquels cette autorité
s’exerce ».

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31. Entretien de l’auteur avec Jean-Pierre Saïd, 9 mars 2007 ; ANOM, préfecture d’Alger, 91 3 F 89 :
notice de renseignements, 25 novembre 1956, et GGA, 12 CAB 196 : rapport de la PRG d’Alger,
27 novembre 1956.
32. ANOM, préfecture de Constantine, 93 1534 : rapport de la PRG de Constantine, 24 mars 1952.
33. AJM : appréciation d’un adjudant-chef, 4 octobre 1955, d’un capitaine, 20 mars 1956, du
commandant de la base aérienne de Hussein Dey, 4 juin 1956, et relevé des punitions de Pierre
Khalifa, 4 juin 1956.
34. Entretien de l’auteur avec Pierre Khalifa, 27 juin 2007 ; AJM : rapport de la Direction générale
de la sûreté nationale (DGSN), 14 mars 1956, et procès-verbal d’interrogatoire par le TPFA
d’Alger, 26 juillet 1956.
35. AJM : procès-verbal d’audition par la Direction de la surveillance du territoire (DST), 14 mars
1956.
36. Notes autobiographiques de Pierre Khalifa, 12 octobre 1992 (communiquées par Laurence
Khalifa).
37. AJM : feuillets manuscrits de Pierre Khalifa joints à un rapport de la DGSN d’Alger, 14 mars
1956.
38. AJM : rapports du lieutenant-colonel X1 et du lieutenant X2, 20 mars 1956.
39. AJM : procès-verbal d’interrogatoire par le TPFA d’Alger, 26 juillet 1956.
40. AJM : notes d’audience du 19 novembre 1956.
41. ANOM, préfecture d’Alger, 91 4 I 19 : rapport de la PRG d’Alger, 6 mars 1956.
42. ANOM, préfecture d’Alger, 91 3 F 89 : notice de renseignements, 15 novembre 1956.
43. Jacques Massu, La vraie Bataille d’Alger, Paris, Plon, 1971, p. 139.
44. En janvier 1958, les autorités lancent par exemple une enquête auprès des soldats du
contingent pour déterminer si les affirmations du journal clandestin du PCA Liberté n° 22 (janvier
1958), selon lesquelles les soldats français seraient peu enthousiastes, sont avérées (SHD,
1 H 1720-2).
45. AJM : réquisitoire définitif du parquet du TPFA d’Alger, novembre 1958.
46. AJM : courrier de Mme Lacascade, mère de Claudine, au président du TPFA d’Alger,
2 novembre 1958.
47. Entretien de l’auteur avec Arlette Beckouche (née Bourgel), 23 avril 2007.
48. L’Affaire des enseignants d’Alger, brochure éditée par le Comité de défense des enseignants,
1958, 47 p.
49. AJM : rapport du commissaire chef de la 1 ère brigade mobile, 10 avril 1957 (à propos d’Omar
Djeghri).
50. Plainte de Lucien Hanoun citée dans L’Affaire des enseignants d’Alger, op. cit.
51. AJM : conclusions des avocats des prévenus déposées auprès du président du TPFA d’Alger,
1958.
52. AJM : notes d’audience des 3-5 novembre 1958.
53. L’ensemble de ces courriers est conservé dans le dossier d’instruction du TPFA d’Alger (AJM).
54. Notes autobiographiques de Pierre Khalifa, 12 octobre 1992 (communiquées par Laurence
Khalifa).
55. Lettre de Pierre Khalifa à Yolande Liechti, 3 avril 1958 (communiquée par Laurence Khalifa).
56. Lettre de Pierre Khalifa à Alban Liechti, 8 octobre 1958 (communiquée par Laurence Khalifa).
57. Lettre de Pierre Khalifa à Yolande Liechti, 28 mars 1958 (communiquée par Laurence Khalifa).
58. Lettre de Pierre Khalifa à Yolande Liechti, 3 avril 1958 (communiquée par Laurence Khalifa).
59. Entretien de l’auteur avec Lucien Hanoun, 12 janvier 2007.

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RÉSUMÉS
Dans les premiers mois de la guerre d’indépendance algérienne, un réseau clandestin du Parti
communiste algérien est constitué pour rédiger, confectionner et diffuser un journal à
destination des soldats français : La Voix des soldats. À partir d’archives des autorités civiles et
militaires françaises et de sources mémorielles et privées, cet article s’intéresse à la constitution
et au fonctionnement de ce groupe clandestin original, mais aussi à la répression brutale subie
par ses membres. À travers l’histoire de ce réseau, il s’agit aussi d’interroger les relations et les
divergences entre communistes d’Algérie et de France autour d’une question cruciale : le
« travail » à mener en direction des soldats du contingent.

INDEX
Index chronologique : XXe siècle
Mots-clés : Parti communiste algérien, PCF, guerre, indépendance, armée française,
clandestinité, répression
Index géographique : Algérie
Keywords : Parti communiste algérien, PCF, guerre, indépendance, armée française,
clandestinité, répression
Palabras claves : Parti communiste algérien, PCF, guerre, indépendance, armée française,
clandestinité, répression
Schlüsselwörter : Parti communiste algérien, PCF, guerre, indépendance, armée française,
clandestinité, répression

AUTEUR
PIERRE-JEAN LE FOLL-LUCIANI
Agrégé et docteur en histoire.

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