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COLLECTION D'HISTOIRE ET D’ARCHEOLOGIE MEDIEVALES un astrolabe, du gree asrolabe, “preneus d'étiles” 16 Instrument de la forme d'un disque, servant & mes he: eee Averroés et averroisme astolabe de wadition arabe en Oceident (XII*-XV¢° siécle) Un itinéraire historique du Haut Atlas a Paris et a Padoue Actes du colloque international organisé & Lyon, les 4 et 5 octobre 1999 dans le cadre du «Temps du Maroc» 5 par PUnité miste de recherche 5648 Maquette, mise en page : André Bazzana et Karyn Mercier. (CNRS, Universté Lume Loon 3, EHESS) “Regard Sud” et “Les Amis de la Maison de POrient” ainsi que de l'Institut universitaire de formation des maitces (UFM) ° du Rhéne Actes réunis et édités par André BAZZANA Nicole BERIOU et Pierre GUICHARD © Presses Universitaires de Lyon, 2005 86, rue Pasteur ~ 69365 Lyon Cedex 07 ISBN : 2-7297.0769-7 ISSN : 1255-2380 www.edition-nulvan.com du Haut Ads 4 Pars et & Padooe Dans al-Andalus, les ulémas face aux chrétiens Pieste GUICHARD & Jean-Pierre MOLENAT Ul sous a paru intéressant de reproduire, dans Pencadié ci-dessous et avec Vautorisation de Jean-Piesse Molénat, les lignes que, dans une communication récente', il a consacrées & la présence d'un descendant direct ’Averroés dans la communauté mudéjaze, de Toléde, vers le milieu du XIIE siécle, ainsi que de quelques autres docteurs mosulmans venus dans cette ville, semble-til, dans les mémes conditions que lui, Le fait ainsi donné 4 connaitre présente, en dehors de son caractéze “anecdotique”, un assez grand incését, mais il n'est pas évident en dégager la signification exacte. On complétera ces informations par quelques indications plus générales sur la facon dont les ulémas andalous considétaient les chrétiens et le christianisme. Un petit-fils d’Averroés « Toléde au milien du XUP sizcle Liabsence de savants mudéjars dans les dictionnaires biographiques musulmans, qui avait été selevée par Piecre Guichard, au moins verbalement, tendrait 2 prouver qu’ils n'étaieat pas reconaus comme tels par le reste du monde de I'lslam. Largument pourtant est susceptible détre réfuté. Pascal Buresi vient de nous sappeler® que Yon peut trouver dans la Silat al-Sila d'Ibn al-Zubayr, La question de Tele mudjare dans la péninsle Thésque médiévale», Wdo BARATA (i), Elier ¢ Rader Clantlarer na Wade Mido. Prbloes _seeligiay,Lisbonne-Ecora (Ed, Calia-CIDEHUS), 2001, p. 4553. 192 AVERROES ET LAVERROISME deux savants musulmans qui, aprés avoir été conduits comme captifs { Telede au milien du XINF siécle, ont choisi, apres avoir été fachetés, de rester et de s'y matics: Fadil b. Muhammad b, Abd alAzz Samal al-Mevafiet de Séville, Ibn al-Saffar de Cordoue. Le premier fur aucheté, of se facheta, pour une grande quantté d'argent, mais Recida de dementer 4 Toléde et y enseigna la grammaire et la fieérarure, jusqu’a sa mort survenuc en 650/1252. Le second, far Ggalement tacheté, saas qu'on sache comment, se masa 3 TToléde, puis y enseigna le Coran jusque daas les années 640/1240-45 envison ‘A quoi nous ajovterons le fait que le second, Mugit b. al ‘Ahead b. Abt Bake Mubammad b. AbI Walid Muhammad b. Abi [1 ‘Yosué b. Mubammad b. Muggs b. Abi I-Hlasan Yasuf b. ‘Abd Allah était le petifils,en ligne motemelle et le disciple du philosophe ‘Averrots!, Prtgalement, da cbté de son pe, le petic-fils d'un autre grand-cadi ge Bordoue, les deux familles des Bana Rusd et des Band al-Saffar Gi aleenérent a la fonction de cadi de Cordouc dosant le XII" sitele | Shek acento ei Le fait en soi que des musulmans, fussent-ils des savants, captusés par les chrétiens, puis Ubérés, alent choisi de resten pout the maison ou pour une autre, en terre des infidéles, s'est pas fait pou nous étonner: car Cest ainsi, pensons-nous, que se sont formmées re communautés mudéjares, au moins castillanes, de la fin du Moyen Age. Le fait digne @étre remarqué pour note question fest que ces deux personnages figurent dans les dictionnaites biogeaphigues arabes et musulmans (kutub af-tabagae, quils étaient dove meconnus comme des savants musulmans Culama? & Vintéticur Go dar al-Islam, malgré le chois quills avaient fait de ne pas revenir | Ga tere d'slam, certes pour le bon motif denseigner ans aues rmudéjaes | 2 La notice concernant Ibn al-Saffar nous parait également importante par la mention qu'elle fait d'un quartier, ow due eae ea eey axenic The ews of te fe ete dg fa GO [LBS ULEMAS FACE AUX CHRETIENS 193, faubourg, des musulmans (rabad al-muslimin) & Toléde au milieu du XITF siécle. Elle ne nous semble pas néanmoins suffisante a elle seule pour infirmer ce que nous avons écrit jusqu’a présent sur "inexistence ’une moreréa, au sens d'un quartier séparé, a Toléde, jusqu’a la fin du mudgjarisme castillan, en 1502", La présence d'une communauté musulmane a Tolde & hauteur des années 1240, attestée par ces deux persoanages%, n’exclut pas qu’elle se soit en bonae partie formée A partic des captifs ramenés de l'Andalovsie occidentale, déji en partic conquise & cette date, avec notamment la chure de Cordoue en 1236, comme cest vraisemblablement le cas pour Fadil et Mugit Du point de vue de Phistoire sociale on pourrait peut-étre se demander si, compte tenu de la prédominance de la parenté patrilinéaire dans les systémes arabes, il est tout A fait approprié de considézer cet Ibn al-Saffir, petiv-fils d’Averrots par les femmes, comme appartenant véritablement la “famille” du grand philosophe. Probablement oui compte tenu des pratiques sociales et matrimoniales de Ia classe trés urbanisée des ulémas ou docteurs en al-Andalus, ot il semble fréquent par exemple qu’un disciple épouse la fille de son maitre, et qu’en tout cas Sérablissent des réseaux complexes dalliances entte les diverses familles de juristes® ; de celles alliances entre groupes familiaux nominalement patiiingnizes y sont fréquentes et souvent notées par les biographes ; les doivent bien conformer des “familles” aux contours bien moins figides que le classique lignage patrilinéaire de la tradition arabe. Une question de plus grande portée est soulevée par la référence a cette présence volontaire dans la Toléde chrétienne du XIII siécle de deux savants musulmans, dont Pun fait non seulement partie du miliew des ulémas, mais est méme issu une alliance matrimoniale entre deux des plus importantes familles issues de ce milieu. Cet état de fait est, en effet, coateadictoire avec les prescriptions habituelles du droit musulman, énoncées particuli¢rement par les juristes malikites andalous, ‘quant au séjour des musulmans en terre chrétienne. Et ce qui retient pavticuliérement attention dans les deux cas cités, cest qu’aprés avoir été 4JeP, MOLENAT, « Les mudjare de Tol8de: occapations professionnelies et localisation San Pespace » dans 7 Sinpai Tternaiona de Madan (Teruel, 16-18 sepeernbre 1993), ‘Teruel (Centro de Estudios Mudlares, 1996, p. 429-435. S.M. MARIN & R, EL HOUR abservent que It préseace de Mugh « speaks elealy for presence fin Toledo] of a Mudéjar community in the 13° cenrary» (« Captives, childcen find conversion: @ case from lave nasrid Granada » Jou! ofthe Econ and Sel Hiny of fhe Orin, 41/4, 1998, p. 453-473, spécialementp, 458-459, et note 26) 6 On pourra se reporter & eet égard 4 Touerage de M. MARIN, Meson ebndelt, Madi (CSIC), 2000 (ens, p. 424: «Las prieceas mawimoniales usuces ene fs vlemas cendisn a , formanda un sélido entramado de pareatssco seal y 194 _AVERROES ET LAVERROISME, emmengs comme prisonniers dans la capitale chrétienne, il s'y établissent ensuite de leur plein gré, en contradiction avec opinion la plus Couramment exprimée par les docteurs qui réprouvent les séjours Gurables hors du Dér afIslim. Un texte souvent cisé sur ce sujet est une tise longue consultation jusidique (fatnd), cosrespondant & un véritable Opuseule de plusieurs pages, émise pat le grand docteur maghsébin du Save sigcle al-Wanshatisi, On la connait sous le nom d’Ama Lmatidin Souvent considérée comme Vexpression du traditionalisme borné des juristes malikites, il semble qu'elle cossesponde plutér & un certain Faidissement, sous effet des échecs de MIslam d’Occident, qui cependant 2 toujours affirmé en principe que les musulmans ne devaient pas se tnaintenit sous la domination des chrétiens’. On est dés lors amené & se poser de ficon plus générale la question de Tattitude des docteurs Praalous face aux chrétiens, du point de vue seligieux d'abord, culturel ensuite. Sans prétendre en aucune facon faire le tour de ce probleme, Gest sur lui que Pon axera les quelques réflexions qui suivent, en Sappuyant, outre les indications données ci-dessus, sur quelques textes Séeemment mis en évidence, parfois susceptibles dapporter sur certains points un éclairage assez nouveau. La polémique islamo-chrétienne Lest en premier liew évident que tout musulman d’al-Andalus, du fait de la présence des dbimmi/s & Vintéxieur méme de cette partie du ‘Dar ab-Islém, et de 1a constante pression chrétienne venue des royaumes du nord, avait une certaine connaissance du chtistinnisme et des Chrétiens, tout le probleme étant de savoir ce que Von entend pat “connaissance”, simplement conscience de leur existence, ou perception plus approfondie des caractéristiques de leur religion et, éventuellement ve leur culture. Ali al-Azmeh a bien montré que les Andalous s’étaient en fait ttés pen souciés de connaitre les chrétiens du aord qui feprésentent pourtant pour eux un pérl de plus en plus pressant dés te fuiliew du XI siécle’, On pent penser par ailleurs que le constant amenuisement démographique des mozarabes — qui semblent ecpendant {oir en panienles Fe, VIDAL CASTRO, «Las obras de Ahmad al-Wansharis (. 914/1505, Toventac analtco », Anagel de etic drees, 1K, 1992, p. 79.}-P, MOLENAT = aussi ft point sur eete queston daas «Le probléme dela permanence des maslmans dant i Potholes congue pat leschrétions dv poine de voe de la lo islamique», Abies, XLVI, «Mortal Enemies, Invisible Neighbours Northesners in Andalus Eyes, ‘LES ULEMAS FACE AUX CHRETIENS 195 avoir jamais complétement disparu du paysage religieux d’al-Andalus? dt les rendre de moins en moins “visibles” aes eae ins en moins “visibles” dans ce pays, du VITF au ceannige nit sependane que, mine dns les tes interes, eave yanaissance reste stracturée, non pas par une appréheasion objectiv des camctsotques du, chitalone, tals per R'viion qq'en donne sun, Tine powait sans doute ene ausement, Dali, la vson de slam qu‘avaient les chrétiens de cette époque peut, sans doute, é ari hin te Se ve, préjugés nés de leur certitude de détenic la vérité celigieuse, que Pidée que pouvaient se faire les musulmans du christianisme, Il reste qu’a plus Tong terme, Tinterprétation toute fate du chrisdanisme que fournt I loi ihmigue sem sans doute moins favorable 4 une evolution vers une connaissance plus exacte et moins ¢ pri de cette reli feosuimias que ligaceaoee tole des premiers mempe ae atce A ae progression des Occidentaux hértiers de la tradition chrétienne vers une meilleare compréhension de YIslam. L’Occident laicisé élaborera une jslamologie” dont les prodromes se pescoivent peut-étre, non sans iétours, dés la fin du Moyen Age, alors que Ton ne voit pas se constimmer de “christianologie” dans le monde musulman, Ce qui se eélebre acavre dT Hazm intiulée Kitt abjisal ma Libel, importante ‘Histoire critique des religions”, selon Ia traduction qu’en a donné Miguel Asin Palacios", Certe cuvre est trés en avance sur son temps (le XI sicle) par Peffort de connaissance des autres religions et en particulier du christianisme qu’elle représente, mais, comme plus tard la Philosophie de Phistoire d'Tbn Khaldan, elle resera un monument assez exceptionnel et isolé de la pensée arabo-musulmane, sans véritable influence sur Je développement de cette demite, Le propos du live teste toutefois essenteliement apologétique, et il ne pouvait gutze en aca a sa Fiala esos omnes Tone] erase ls falsification de leurs éctitues par les chiédens en découle Doce ciiah tee naa aan ae ANU sé: scous de Lacs de Ty sur le angen» dans : Lg an Moye Ay, XXX Congrés de Ia SHALES, (Goteingen, juin 1999), Paris (Publications de la ao Tl pasos Akg iw ident est celui de jon rivicée de 1993 196 AVERROBS ET LAVERROISME II saisit cependant bien certains points essentiels, comme le fait que ¢e vronathéismne nrest pas une loi, de quoi il tire Ia conclusion que le Tiuistianisme constitue une branche de la loi qu’il n'a pas sbolic, Cestei-dire du judaisme®, De la méme époque qu'Tbn Hazm, son adversaire et concradicteut le grand malikite al-Badjaii, a probablement rédigé la “Réponse au moine de France”, texte de polémique anti-chrétienne censé répondre 3. uae Siissive émanant d'un clere cheétien anoayme, qui critiquait Ia religion musolmane et visait Ia conversion de Pémir de la alfa de Saragosse Lorigine et la sigaification exactes de ces deux textes ne sont pas cntideement éclaircies, bien que Vensemble quiils constituent ait été au con asses abondamment cité et étadié!. On tend & penser que Ia lettre So moine, & laquelle aurait tépondu al-Bidjdii, est une invention destinge sq avoriser Pargumentation contraire, Abdelmajid Charfi observe que, des vente tis textes de polémique ant-chrétienne qui lui sont connus dans In littéraeare religieuse musulmane médiévale POrient et @’Occident, seuls ceux d'origine andalouse ~et en premier lieu celuici— se présentent comme des réponses & des ctitiques venues des mills eieétiens!, On pourrait ajouter que les textes occidencaux, sensiblement fnoins nombreux que les orientaux, sont tous tardifs. Faure d'un bagage etlecwel suffisant ou, compte tenu de la supériorité manifeste de Tislaoy dans In péninsule, faute d'en avoir sessenti la nécessité, ce n’est Grd partir do milien da XI siécle que des réponses da genre de I Jets Pal Bididit sont attestées sous In plume des musulmans, ‘Au sigcle suivant, un autre texte andalou de polémique sat chrétienne, le Magdmi al-u/hén, que Yon peut traduire par “martes {desting 4 feapper) les croix”, rédigé en 1186 par un auteur du nom Gietichasridiiy se peésente aussi comme une réponse & une lettre dion prdtce tolédan ectiquant VTslum. Son auteur est, de Ia méme fagon us le Preeédent, quelque pev suspecté Pavoir Iuiméme sédigé In leuss aenmant une occasion de séponse. Un rapprochement avec le cas du pecivfils @Avertogs est interessant: Pauteur de la lettre auraie oe, Iai Peasy mais au milien da XIE siécle, quelque temps captif & Toléde ae oins quil ne sy soit réfugié au moment des troubles politiques gut ee 4 des dogmes ou A des problém slr » lane Parsee “Ton Haz” de Vapi ds lan, 2°" €a, vol 1, p- 819) TB. Femprante cee obsecerton 4 Ph. GOURDIN & G. ManrnNeZ-Gnos (de) Panel won lta 950-1250, Paris (Adan), 2001, p. 338. aaervia.ela lence da ‘Moine de France’ i Al-Mogtadiz bill, roi de Saragose ts réponse dal fagih andalou », AbAn SSI, 1966, p. 73453 (reproduit as cpt de FEsgne mead. Arpt perigne, Pass, 982 sem Chanri, «Polémiques islamo-cheésiennes 4 [époque médiévale», dase pi permettent de les mettre en comparison avec [LES ULEMAS FACE AUX CHRETIENS 197 affectent alors fAndalus!— ec eesti quill aunt été amené 4 rédiger une réfutation des arguments présentés par les clezes chrétiens pour inciter se cotelgfonaies 4 le conversion 20 christianisme. Dans son traité, il mame en désision les faux mizncles allégués par les prétces chrétiens i Pappui de la vérité de leur foi” mee a Des ulémas facteurs de transmission de la science arabe ? On ne peut éviter, sur un autre plan, de constater qui apelques séjour connus de saants musuimans &Toide se produisent au plus fort du développement du mouvement des traductions de Parabe au latin dans cere ville, Selon le traductcur Daniel de Morley, acif dans le troisigme quart du XIIF siécle, «c'est a Toléde que Denscignement des i est dispeasé aux foules'®». En dehors de la captation bien conve des manuscrits arabes, les Latins auraienvils parfois cherché Stlger dieceement les compétences éventulles, en mate de sciences profane, de certains savants? Et ceux-ci, ou certains dentee eux, sy sontils prétés en leur donnant un enseignement? On sait que cela apu amtver, ais pour une époque plus tardive, Av XID stele & Murcie, par exemple, assez nombreux docteurs musulmans restérent sans doute ea zone chiétienne aprés Vinstauration du protectorat castlan en 1243, Contuizement a ce qui s'tait passé & Valence en 1238, le fit que la ville soit passée sous contrble chrétien sans conquéte violente et que non seulement les musulmaas a’en aient pas été chassés, mais que la population musulmane y ait subsisté sous Pautorité un émir hudide, vasa dri de Castile et membre des faile Jak Musab Hid, Gqui avait gouverné la ville durant la période 1228-1238, créa une situation ava gre la période 1228-1238, ¢ situation 16. Hypothse éise par M. Fsnno, dans « Christian sucess and Muslim fea in Andsbst . cava and Almoad petiod»,publié dans Lime! Orca! Ste, XVI, 1997, et repro dans Ler minis des py lm ae kde lin dy mien 3° on sia de Xo acl seis pat Fe. Michens, Pas Eason Jaeqes Mace), 200 7-237 et note 72. ALKhaaeidji réside en effet & Toléde en 145-1147, Ces factement au moment de la gtave ctise portalmoravide, qui provoque Wintenses Peron Cac dan es oes ie do Ade a Ce texte a fait Pobjee d'au moins d ins devs ions, par Abdelmajid Char et Nobuomed Shanah. La patie pettendument chiteone (os "Letee dv Got) st ‘illige par Th. E, BURMAN, Relgous Polewic and ibe Inellatal Histo of the Meera 198 AVERROES ET LAVERROISME Sans doute certains docteuss abandonnérent-ils leur ville désormais contrélée par les chrétiens®, mais ce ne fut certainemeat pas le cas de tous. Dans son ouvrage sur les femmes en al-Andalus, Manuela Marin cite par exemple un savant appartenant au courant mystique hétérodoxe d’Tbn Ald, qui, originaire de Lorca, vient résider & Murcie postérieurement @ linstauration du protectorat chrétien*’. Un dépouil- lement systématique des dictionnaires biographiques ferait sans doute apparaitre qu'un cettain nombre de docteurs n'ont pas quitté leur ville, passée sous la dépendance politique de la Castille, avant la répression de la grande révolte mudéjare de 1263-12662. Un cas pasticulirement intéressant de Putilisation, par les chrétiens, des compétences scienti- fiques des musulmans est celui d’un savant réputé appelé al-Righd, auquel le souverain chrétien aurait proposé, aprés la conquéte de Murcie, de grands avantages s'il se convertissait au christianisme. Il déclina loffre et dit avec humour & ses proches que, ne parvenant déja pas a répondre 4 ses obligations envers un seul Dieu, il y parviendrait encore moins s'il se trouvait soumis & trois ! Le souverain lui aurait cependant fait construire une madrasa pour enseigner les sciences —il s'agit évidemment des sciences profanes— aussi bien aux chrétiens ct aux juifs qu’aux musulmans®, Des cas, analogues a celui de Murcie, de savants musulmans demeurés dans une ville temporairement soumise 4 Pautorité politique d'un souverain chrétien, existérent certainement ailleurs. Sagissant de la région centrale en relation directe avec Toléde, Mustafa Benouis a signalé dans sa thése existence d'un savant dont la contribution a lessor cultarel du monde chrétien & cette époque est expressément indiquée, ce qui est exceptionnel. Il s'agit d'un docteur de Baeza, Abii Muhammad “Abd Allah b. Sahl al-Gharnati, dont le célébre historien grenadin Ibn al-Khat, donne la biographie. Il indique qu’originaire de Grenade, comme en témoigne son nom, il résida une partie de sa vie 4 Baeza oi il dispensa son enseignement. Spécialiste de Coran, de hadith et de grammaire, il était aussi conn pout sa compétence en ‘ila al-mantig (ogique), bisib (imathématiques), et en “sciences des Anciens”. Beaucoup plus intéressant pour In question qui nous occupe, il précise surtout que lorsqu’il habitait 20.En dehors du cas des docteuss musulmens contraints Pabandonner les villes colonisées par les cluéticns — ainsi & Valence ~ on trouve fréquemment des savants dont les Diographes indiquent qu’ils quinérent leur ville, comme vn Aba ‘Abd Alléh Mohammad b. Ahmad al-Ansarl, waditioniste et poste, qui quicts Murcie Tannée mime de Vinstauration du protectorat castllan (M. GASPAR RERIRO, Hivoia de Muni mncalnae, Saragosce, 1905, p. 306). 21. M. MARIN, Majo, p 407. LES ULEMAS FACE AUX CHRETIENS 199 Baeza, les chrétiens de Toléde venaient chez Iui pour recevoir son enseignement™, ‘Au premier abord, dans la perspective souvent présentée d'une Andalousie vue comme le lieu d'une symbiose culturelle harmonicuse, on poutrait penser que de tels contacts scientifiques entre chtétiens et ‘musulmans étaient habituels. En fait, pacmni les milliers de biographies de savants que ous livrent les dictionnaires bio-bibliographiques, la mention de rencontres culturelles de ce genre est extrémement rare, et les cas de Muscie et de Baeza restent exceptionnels. On sait qu'a Toléde méme, ce n'est pas par Vintermédiaice des musulmans, peu nombreux dans Ia ville aprés la conquéte chrétieane, que se sont faites les traductions de l'arabe au latin, mais par celui des Juifs et des mozarabes®. La méfiance des Andalows vis a vis des efforts des chrétiens pour acquérir la “science arabe” est bien exprimée par un passage souvent cité du traité de bisba du sévillan Tbn ‘Abdin qui, dés le début du XII siécle, aventit les musulmans de ne pas vendre aux chrétiens les livres taitant de matidres scientifiques : « En effet ils traduisent les livtes de science et en autsibuent la paternité a leurs coreligionnaires et a leurs évéques, alors quis sont Peeuvte des musulmans®. » Il me parait trés probable que la situation originale de cet “Abd Allah b. Sahl s'explique, tout comme celle d’al-Rigiti 4 Murcie, par des circonstances historiques bien particuliéres et, au total, assez tarement réalisées lors d'une Reconquéte généralement plus bautale. La situation pasticulidre de Baeza, ville de frontiére tout spécialemeat exposée aux entreprises des chrétiens, et passée 4 diverses reprises sous leur contréle, sans que la population musulmane ait été contrainte de Vabandonnes, est un peu comparable 4 celle de Murcie. Dans sa thése, Pascal Buresi a bien exposé ces vicissitudes de Vhistoire de cette petite cité du nord de l'Andalousie orientale: Baeza est conquise par Alphonse VII en 1147, et reprise par les Almohades dix ans plus tard, en 1157, alors que la seule date conaue de activité du savant musulman en question est celle de 1158-1159. On peut supposer que Cest antérieurement a la réoccupation de la ville par le pouvoir musulman que les chrétiens eureat suttout occasion d'y veniz. On a la preuve de Vintensité des relations entre Toléde et une ville de Baeza dont les M, BaNou's a publi une analyse de cee biographic, d'apaés le tome HL, p. 404-405 de Ihe ba al-Kluut, dans Pays dle e monde lt, (9 ai. Tes et doce (Presses Universinires de Lyor), 2000, p. 121 (aotie n° 2) 25,Sur les seconds, voir JoP. MOLENAT, «Note sar les triducteurs de Toléde (si. XI sles)», Coos dudes ares (NALCO), 2, 1988, . 109-144. 26. Trad. E, LEV-PROVENCAL, dans Séill muculane au dibvt de XO siele (le trie Yin‘ Abdn nk rb teers de tier, Pacs, 1947, p. 128, Ce passage incivesit & ne ‘as situer top tt la rédaedion de ce este, souvent considéré comme datant dee env 200 AVERROES ET LAVERROISME structures n’étaient pas trés affectées par la tu s'y exercait par Pexistence dans cette ville, & Pépoque de sa suj la Castille, d'un monnayage d’or assez abondant, de type almoravide, légendes musulmanes mais sans nom de souversin, dot la citcul A Toléde est bien attestée par les documents écrits mozarabes & par de 1152, L’économie castillane ayant besoin de monnaies d'or, et Ie roi n’en frappant pas encore en Castille, cest certainement dans le cadre de ln politique castillane que ces monnaies arent Emises™. (On ne sait pas si lors de son séjour 4 Toléde, tardif par sapport & la grande époque des traductions, le petit-fils d’Averro’s contribua lui aussi i la transmission Pune science teaue de son grand-pére maternel dont il avait, on Pa vu, suivi Penseignement™, Il reste que de tels contacts scientifiques entre intellectuels chrétiens et musulmans furent, autaat que la documentation disponible permette d’en connaitre quelques uns, une grande rareté, Ces situations furent autre part & transitoires. Ainsi le murcien al-Rigiti, sur lequel on est relativement renseignés, ne finit-il pas sa vie chez les chrétiens mais 4 Grenade, auprés des premiers nasrides®. Il semble bien que l'on puisse considérer, pour concluse, quill exista en réalité bien peu doccasions de rencontre entre docteuts chrétiens et intellectuels musulmans d’al-Andalus au temps d'Averrods, inemment ore Mora fir 30- 3. La transmission de Pceuvre d’Averroés ‘Al-Shaquadi, critique : 1 ALShatibt: 245 Siger de Bral 146, 253, 328, 330 médecine prophétique Taddeo Alderotti, maitre de médecine de Université de Bologne : 268 “Tahir aljazd?s,sheish : 243 Talavera (Espagne) : 105, 166, 167 227 ‘Théodose de Tripoli grec, auteur des ‘Thomas d'Aquin, saint: 22, 25, 146, 242, 253-255, 351-333 ‘Tibbonides (Juda, Moise et Sarnw famille de traducteurs : 277, 278, soir cuss Samuel Ton Tibbon AVERROES ET LAVERROISME, ‘Tierra de Campos (Espagne) : 105 ‘Tinmal on Tinmel (Maroc): 5, 36, 67-88, 525, 326 Tinto Toléde (Espagne) : 77, 78, 103, 105, 166, 167, 3, 196, 198-200, 250, 251, 265, 267 ‘Torres Novas, batalle de : 102 Tortosa (Espagne) : 22, 93, 97, 98, 115 Teyjillo, place forte : 105 AlUdhsi, chroniqueur arabe : 41 Uclés (Espagne) : 105 AL-Usil wir Aba ‘Abd Allah Muhammad b, Ibrihim al-Mahsi al-Ustit Valence (Espagne): 93, 95, 197, 207 Venise (Italie) : 268, 298, 321 Vernia, Nicolet¢o, philosophe italien : 298 b. alBitrig, traductent : 208 ia b. ‘Umar, vizir almohade 12 Yasuf I, calife almohade, ba Yasuf I, émir de Grenade : 13 Yisuf b. Mardanish, fréce de Muhammad Iba Mardanish, en charge de Pémirat de Valence 93 Al-Zasqfillu noir Azarquiel ‘TABLE DES MATIERES Piesre GUICHARD Présentation. an 58 Roger ARNALDEZ “Avant-propos, =: : ee se2] Pierre GUICHARD “Avverrogs dans $00 tempura —— 13:26 Epa marine marr om de Oecd. 13 sede cai de Condoue dans ata Alnorasies oe Alle 13 7 18 19 2 2 2 le monde cvéten. 24 1. Le temps d’Averro’s L'Empite almohade dans la seconde moitié du XII siécle Santiago MACIAS Mazo. S von 29-38 Une vile dant le Gharb al-Andalus cbmbde nw = 30 Le quazier is : : ve La mosque : : 36 La nderopoe : ———— : 37 ~~ JAVERKUES £1 LAVERKUISME (Chistian EWERT & Jens-Peter WISSHAK Documents d'histoire et d'aschéologie (André Bazzana, Patrice CRESSIER, Pier GUICHARD & Yves MONTMESSIN) La mosquée de Timah rnnnnennnnnnn Chapiteaus almohades.. La eésistance aux-Almohad Pascal BURESI ‘Liapogée almohade : la bale d’Alarcos Te cas de Andale oneal. (Andsé Bazzana, Piewe GUICHARD & Yves MONTHEESSIN) Le champ de batalle d?ALR1008 ec snnnne 2. Un intellectuel musulman en son temps Dominique URVOY ie, p89, 12-194, 6. 85.88 89.92 93.98 99.114 101 106 109 mw AVERROES ET L'AVERROISME 347 Emile FRICAUD Le probléme de la disgrace Dichoromie de la soci almobade. Averots, ead de Seville puis de Condon Les adver d Aver, e Tes paras de ar es Recs os Tee Ue raccoue "eeu dbo Tdi Ate sources sur la disgeice d Avesiod Les rigs dnt ft sci Aver. Lar perenages conden ae Avore ‘eA Aoh ah Due de ya tes eee te Day GUCHAD en i ea tie ———— Dosa oe 3. La transmission de I'ceuvre d'Averroés Inet : Po = a # none tt ena Urtnenrdeete Rh lemadente a 028 ata ee teach 348, AVERROES ET L'AVERROISME Jacques LANGHADE, tienté latine : Yoruvre d’Averro8s, homme de religion € jurist nce sens 249-262 co 250 232 234 260 4, Averroas et ses lecteurs (XID - XV° siécle) Péter MOLNAR ine ape négligée de la réception d’Aristote en Occident Averro8s, Le Liler Niconacié et la science poliqht 265.274 ‘Mausice- Ruben HAYOUN Laversoisme dans les milieux intellectvels dia judaisime : Moise de Narbonne (1300-1362), cet Eliya Delmédigo (v. 1460-1 ‘Une relerare ce Maimonide par un "AL La porsibilieé de conjonction 2 ‘Marwan RASHED. ‘Laverroisme de Lauro Quit... scree TBI Nicole BERIOU Conclusions. - 323.334 Index des noms de personne et de liew a 335-344 Lad IMPRESSION. BROCHAGE 2540 STIUSTALA-PENDUE ott eroruecat.

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