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La sélection du whisky

La sélection est au cœur de la démarche du spécialiste. Ses nombreuses dégustations lui permettent non seulement
d’établir des comparaisons mais surtout d’affiner son jugement. Différentes techniques de dégustation sont
couramment employées par les professionnels :

La dégustation repose sur un examen sensoriel où la vue, l’odorat, le goût et le toucher sont tour à tour sollicités.
L’analyse visuelle permet non seulement d’apprécier la couleur du whisky mais aussi sa texture. Il suffit pour cela
d’observer les jambes (grasses ou maigres) qui se forment sur les parois du verre. La découverte des arômes est
l’étape la plus ludique de l’analyse olfactive. L’ampleur, la finesse, la richesse, l’équilibre et la précision
aromatiques constituent d’autres critères d’appréciation. Certains dégustateurs ajoutent de l’eau dans leur whisky.
Cette méthode couramment employée par les master blenders permet d’exhaler les arômes. D’autres préfèrent
apprivoiser leur whisky en le laissant s’oxygéner. La bouche se décompose en deux étapes successives : l’attaque et
le milieu de bouche. L’attaque en bouche correspond aux premières impressions gustatives.

Elle révèle non seulement la texture du whisky - whiskies secs (tranchants, vifs, charpentés, fermes); whiskies gras
(crémeux, soyeux, onctueux, moelleux) - mais aussi les
saveurs primaires (sucré, acide, salé, amer). Le milieu de bouche permet d’en apprécier l’ampleur, l’équilibre, la
finesse, la richesse et la complexité. La finale constitue le point d’orgue de la dégustation. Selon son intensité, elle
est qualifiée de courte, moyenne ou longue. Intervient ensuite le phénomène de rétroolfaction. A mi-chemin entre
l’olfactif et le gustatif, il correspond à un retour aromatique du nez vers la bouche. L’analyse sensorielle s’achève
par l’examen du verre vide. Une fois l’alcool évaporé, le verre exhale des arômes provenant des extraits secs du
whisky.
Si un jeune whisky laisse une emprunte discrète, le plaisir que procurent ces extraits secs après de nombreuses
années de vieillissement est parfois plus intense que le whisky lui même.

Avoir du nez

Un des signes probants de l’excès de zèle en matière de boisson est sans aucun doute le fait de s’y adonner seul.
L’autre est de commencer dès le matin. Je devrais me sentir concerné puisque boire seul fait partie de mon travail et
que le meilleur moment pour une dégustation, c’est en fin de matinée, quand le palais est encore frais. Mais, si je
suis un travailleur solitaire, je ne suis pas le seul. Dans le monde du whisky, dégustateurs professionnels et maîtres
assembleurs font la même chose, quotidiennement. Un comble, certains d’entre eux n’aiment pas le goût du whisky.
Mais ils parviennent à travailler, et à garder toute leur raison, en se servant uniquement de leur nez. En anglais,
l’équivalent de « déguster » se dit nosing (humer). Dans la profession, on appelle les dégustateurs de whisky des
noses (des nez). De même, une dégustation de whisky se dit un nosing et une salle de dégustation une nosing room.
Les papilles gustatives ont une importance secondaire quand il s’agit de l’analyse sensorielle d’un whisky. Cela
implique deux choses. D’abord, il n'est pas nécessaire d’aimer le goût du whisky pour participer à une dégustation.
Ensuite, mieux vaut déguster le whisky dans un verre qui en fera ressortir les arômes. Il est fortement déconseillé
d’utiliser les tumblers, ces verres traditionnels à whisky de forme cylindrique. Remplissant parfaitement leur rôle
pour un whisky-soda, ils ne permettent pas de capturer les subtils arômes du malt.

De plus, il est très difficile de faire tourner l’alcool dans le verre pour favoriser l’aération. Un bon verre à
dégustation remplit ces deux fonctions. En forme de tulipe et de diamètre respectable, son sommet se rétrécit pour
mieux conserver les arômes.

Idéalement, il est en cristal pour que l’on puisse mieux examiner la robe chatoyante du whisky, mais en cristal non
taillé car les facettes modifieraient les reflets du whisky. Ce verre (comme sur la photo ci-dessus) est vraiment le
meilleur pour se faire une idée globale et complète du whisky.Autre élément à considérer : l’eau. Le whisky gagne
toujours à être allongé d’un peu d’eau. Cela révèle les arômes. Votre nez vous le confirmera. L’ajout d’eau permet
même de voir les petites chaînes huileuses des composés aromatiques tourbillonner à l’intérieur du verre.

Combien d’eau faut-il verser ? C’est une question délicate. Je me souviens avoir gâché un whisky à 500 livres la
bouteille en le noyant ; et pourtant, je n’avais versé qu’une petite cuillère d’eau. Il s’agissait du " The 500 " de
Whyte & Mackay, un whisky primé dans les concours.
En règle générale, il faut ajouter suffisamment d’eau pour redescendre le degré du whisky à 30%. Mais la quantité
juste varie selon le caractère du whisky. Il convient
donc de verser l’eau petit à petit. La dilution est optimale quand, au nez, vous n’avez plus ce picotement ou cette
sensation de brûlure que vous éprouvez en humant un whisky non dilué.

Idéalement, on utilisera la même eau que celle utilisée dans l’élaboration du single malt dégusté. Mais il est très rare
de pouvoir s’en procurer. Préférer une eau plate et non calcaire. L’eau en bouteille venant d’Ecosse répond à ces
critères. L’eau du robinet fera aussi l’affaire, à condition qu’elle demeure inodore. Il faut une eau raisonnablement
fraîche (environ 15°C). Si l’eau est trop froide, l’éventail des arômes ne se déploiera pas. Les glaçons sont à
proscrire dans toute dégustation. En revanche, je trouve que réchauffer légèrement le verre au creux de la main
contribue à faire ressortir les arômes. Une autre question est de savoir si l’on peut décrire un whisky rien qu’à son
nez.

Whisky et Fromage

Tout devait être parfait. Cela eût été le cas, si ce n'étaient les trois White Ladies du Norfolk. Quelles que soient les
raisons invoquées - les trois heures de route pour venir d'East Anglia, le stress de la traversée de Londres - il n'en
demeure pas moins qu'à l'instant décisif les plus éminentes représentantes du Norfolk se délitèrent littéralement.
La comédie que nous jouent ces nouveaux fromages au lait de brebis déconcerte à peine Martine Nouet. Elle semble
en effet intriguée,mais à vrai dire guère impressionnée.
« Ils sont bien faits, annonce-t-elle en les tâtant judicieusement de la pointe du doigt. Ils courent tout seuls ! » Cela
dit, elle s'en empare à pleine main, sans façon, les dépose à côté des cinq autres fromages proposés, puis va se
rasseoir. Nous sommes prêts à commencer, semble-t-il.
Le cadre : l'impressionnante enceinte du Malt Whisky Bar de l'hôtel Athenaeum à Londres. Les fromages : tous
excellents et provenant de la maison La Fromagerie, Highbury, Londres, hormis les White Ladies, ils s'apprêtent
tous à rencontrer six rudes whiskies.
Tous nos dégustateurs invités vont vivre une expérience qui piquera leur curiosité, une après-midi fascinante et
surprenante en définitive. Il est temps de se mettre au travail et il ne sera pas difficile d'impressionner un néophyte
comme votre serviteur. Se dispersant dans les recoins de la somptueuse salle, nos dégustateurs se réfugient sous des
vitrines éclairées regorgeant de whiskies en éditions spéciales, pour aborder chacun à sa façon la tâche qui l'attend.

Cette dégustation a pour objet de déterminer si whiskies et fromages peuvent s'accorder et d'en tirer les conclusions
qui s'imposent. Les whiskies sélectionnés, au nombre desquels se trouvaient, pour varier les plaisirs, un irlandais et
un rye, étaient organisés par poids croissant, du plus suave - un Compass Box Hedonism -, au plus lourd - un
Ardbeg.
Les fromages, choisis pour offrir l'éventail le plus large des styles et des saveurs, étaient eux aussi numérotés par
ordre croissant, du plus doux au plus fort. Ce fut l'après-midi de toutes les surprises. Nombre d'associations dont on
escomptait la réussite refusèrent de fonctionner. Que deux favoris se querellent violemment dès l'instant de leur
rencontre,
voilà qui a profondément déçu certains de nos
dégustateurs.
Mais les surprises agréables n'ont pas manqué et chacun des membres de notre panel a pu se féliciter à l'issue de ces
travaux de la découverte d'une association fromage-whisky aussi inattendue que délicieuse.

Le consensus se fait rare. À l'exception du Glenkinchie, au comportement irréprochable


avec la plupart des fromages, il n'a pas été possible de mettre en évidence une règle absolue. Cependant, de manière
générale, les accords avec les fromages à pâte dure fonctionnent mieux que ceux avec les fromages à pâte molle et il
est rare que des fromages dominants forment un bon mariage avec des whiskies dominants. Cela dit, tout est affaire
de goût… En route pour le safari dégustation.
LES WHISKIES

Redbreast Balvenie 21 ans Van Winkle


12 ans 40° Port Wood 40° Rye 47,8°

Ardbeg Hedonism Glenkinchie


10 ans 46° 43° 10 ans 43°

  LES FROMAGES

Les fromages ont été choisis par Patricia Michelson de la maison La Fromagerie, Highbury, Londres. Le White
Lady du Norfolk a été choisi par Marcin Miller

Vieux cheddar Manchego Parmesan


anglais Montgomery Leon (Italie)
(Angleterre) (Espagne)

Bleu Brie de
White Lady
d’Auvergne Meaux
du Norfolk
(France) (France)

LES FÛTS

Il existe plus de cinquante variétés de chêne dans le monde, mais seules quelques-unes possèdent les propriétés
requises pour le vieillissement du whisky. La variété la plus couramment employée, quercus alba (chêne blanc), est
originaire des forêts du nord-est des Etats-Unis. Il s’agit d’un bois facile à courber et dont le grain, dur et serré, est
réputé pour sa faible porosité. Le chêne blanc est surtout utilisé pour l’élevage des whiskeys américains mais aussi
pour celui des xérès fino et amontillado.
Le chêne européen, de type quercus robur, quercus sessilis ou petrae, intervient notamment dans l’élevage des xérès
oloroso,
dont les fûts sont très convoités par les distilleries écossaises.
Ce chêne présente un grain beaucoup plus tendre permettant d’extraire davantage de composés aromatiques. Avec le
développement de la pratique des affinages, d’autres variétés ont été introduites, notamment le chêne français du
Limousin (quercus pedunculata), utilisé pour l’élevage du cognac. L’âge de la coupe du chêne varie de quarante à
cent ans pour les chênes américains et de soixante à cent cinquante ans pour les chênes européens.

LES DIFFÉRENTS TYPES DE FÛTS

La lente maturation des whiskies s’effectue dans des fûts de chêne de capacité variable. Les fûts de petite taille
favorisent un développement plus rapide des arômes, en raison d’un ratio bois-alcool en faveur du bois. On distingue
principalement quatre types de fûts :

Le bourbon barrel, 180 litres :


utilisé pour l’élevage des whiskeys américains, ce fût introduit en Ecosse dans les années 1930, fournit désormais
près de 97 % de la demande. Les fûts de bourbon sont démontés et expédiés en Ecosse sous forme de douelles. Une
fois remontés, ils sont soumis à un brûlage, (charring), plus ou moins important.
Le hogshead, 250 litres :
il est constitué de douelles d’exfûts de bourbon augmentées de quelques douelles neuves ou usagées.

Le sherry butt, 480-520 litres :


les premiers fûts de xérès provenaient des bodegas de Jerez de la Frontera (la bota de Jerez), en Andalousie. Ces
fûts, les plus chers du marché, sont de plus en plus difficiles à trouver.

Le puncheon, 480-520 litres :


é laboré à partir de chêne blanc américain, il fut introduit dans les années 1960. Avant tout employé pour l’élevage
des whiskies de grain, il est en voie de disparition.

Tous ces fûts peuvent être utilisés en l’état ou subir différents types de traitements, dont le wine seasonning (le fût
est loué aux bodegas pour l’élevage du xérès puis rendu aux distilleries pour le vieillissement du whisky) ou le
charring (l’interieur du fût est brûlé de façon plus ou moins intensive afin de concentrer en surface les composés
aromatiques du chêne). La durée de vie d’un fût est estimée à une soixantaine d’années.

Aujourd’hui, la tendance est aux affinages. Des fûts ayant contenu du madère, du porto, du sauternes, du bordeaux,
du calvados, etc., sont expérimentés par un nombre croissant de distilleries écossaises. Chacun de ces affinages
contribueà é largir et à étoffer un peu plus la palette aromatique et gustative des whiskies.

LES CONDITIONS DU VIEILLISSEMENT


La nature des chais : au cours des 30 dernières années, les chais traditionnels en terre battue, dunnage
warehouses, construitsà proximité des distilleries, ont été peu à peu remplacés par des chais de type rack warehouses
répartis sur différents sites en Ecosse.

Dans les dunnages warehouses, les fûts, entreposés à même le sol, sont placés les uns au-dessus des autres sur trois
niveaux. Ces chais favorisent un vieillissement harmonieux en raison de leur bonne hygrométrie et d’une meilleure
circulation de l’air. Les rack warehouses, permettent d’entreposer les fûts dans des racks métalliques sur plusieurs
mètres de hauteur et de profondeur. Ce type d’entrepôt favorise le contrôle de la température ambiante et limite
l’évaporation de l’alcool. Ce phénomène indissociable du vieillissement en fût est connu sous le nom poétique de
part des anges, the angel’s share.

Le climat : on estime que le whisky s’évapore à raison de deux pour cent par an en fonction du climat. Plus il
fait froid, plus le chai est humide et plus l’alcool (plus volatil que l’eau) aura tendance à s’évaporer. Le whisky
perdra ainsi en force alcoolique mais pas en volume. A l’inverse, plus il fait chaud, plus le chai est sec et plus l’eau
aura tendance à s’évaporer. Dans ces conditions le volume du whisky baisse mais la force alcoolique demeure. En
vérité, chaque fût semble réagir différemment et dans un même chai, deux fûts de whisky issus du même distillat
présentent rarement un degré alcoolique similaire (une différence de dix degrés les sépare parfois). Les variations de
température et l’emplacement du fût dans le chai sont à l’origine de tels écarts.

L’environnement : l’air ambiant qui s’infiltre à travers les pores du bois a également son importance. Ainsi
les whiskies qui vieillissent à proximité de la mer, notamment ceux de la presqu’île de Campbeltown, de l’île d’Islay
et de l’île de Skye, captent des arômes marins et des saveurs salées parfois très marquées.

LES ARÔMES DU VIEILLISSEMENT

Le bouquet des whiskies est le fruit de réactions chimiques complexes entre le distillat et les différents composants
du bois. Ces derniers sont les tanins, la lignine, les lactones, le glycérol, les polysaccharides (sucres), les acides gras
et les aldéhydes aromatiques. En dégradant la lignine, l’alcool libère des aldéhydes, dont le plus connu, la vanilline,
apparaît dés le début du vieillissement. Les esters fruités et floraux ne se développent qu’avec le temps. On les
retrouve surtout dans les whiskies âgés de dix
à quinze ans. Les whiskies plus jeunes, proches des arômes de céréales, dévoilent un fruité discret (poire). Ceux de
plus de vingt cinq ans révèlent, quelle que soit leur région d’origine, de fins arômes exotiques (lait de coco)
provenant des lactones (très présentes dans le chêne) qui mettent un certain temps à migrer dans le whisky.

Au cours du vieillissement, le whisky change é galement de texture : en libérant des particules solides (sucres et
glycérols), il devient plus suave. C’est au cours des premières années de vieillissement que le futur whisky se pare
d’une belle teinte dorée ou ambrée. Ce phénomène est d’autant plus accentué dans le cas d’un vieillissement en fûts
de premier remplissage n’ayant contenu qu’un seul bourbon ou qu’un seul xérès (sherry). Pour ces derniers, la
couleur varie du jaune doré au rouge cuivré, selon qu’il s’agisse d’un vieillissement en fûts de sherry fino ou
oloroso. A l’inverse, des fûts de bourbon utilisés plusieurs fois n’auront pratiquement aucune influence sur la
couleur du whisky, le fût ne jouant alors qu’un rôle d’affineur. L’étape du vieillissement n’est en aucun cas une
période passive. A l’origine de 40% à 80% de la palette aromatique des whiskies, le fût de chêne agit comme un
creuset au sein duquel fusionnent tous les éléments qui contribuent à la naissance du whisky.

LES ALAMBICS

L’alambic employé pour la distillation des single malts écossais est de type pot still. Sorte de bouilloire surmontée
d’un chapiteau, il nécessite d’être nettoyé après chaque utilisation. Sa forme varie selon les distilleries. L’onion
shape et le boil ball à compartiment sphérique sont les plus répandus. Citons également le classic pot still ou lantern
still qui rappelle les anciens alambics clandestins, le pear shape avec sa forme inhabituelle de poire, le bell shape en
forme de cloche, sans oublier le très rare Lomond still, encore utilisé par Scapa et Dalmore, dont le chapiteau
évoque la forme cylindrique d’un patent still, l’alambic à colonnes (procédé de distillation en continu utilisé pour
l’élaboration des whiskies de grain). Quelle que soit sa forme, le pot still en cuivre s’achève par un col de cygne lui-
même relié à un condenseur. L’utilisation du cuivre dans la confection des alambics n’est pas le fruit du hasard.
C’est un matériau malléable qui agit en tant que catalyseur et permet d’éliminer des substances sulfurées
indésirables.

Traditionnellement chauffés au charbon, les alambics à chauffe directe sont équipés de bras rotatifs entraînant une
chaîne de cuivre afin d’empêcher la bière de malt (wash) de coller au fond de l’alambic ou de brûler. Ce dispositif
baptisé rummager est absent des alambics chauffés à la vapeur. Ces derniers, qui utilisent une méthode de chauffage
indirect (interne à l’alambic), sont aujourd’hui les plus répandus.

En Ecosse, la distillation des single malts s’effectue généralement en deux temps. La bière, le wash, obtenue à
l’issue de la fermentation, est tout d’abord acheminée vers un ou plusieurs alambics de grande taille baptisés wash
stills. Ces derniers sont équipés de hublots qui permettent de contrôler l’ébullition à l’intérieur de l’alambic. Les low
wines (bas vins) obtenus après condensation des vapeurs d’alcool, titrent en moyenne 25% vol. Ils s’écoulent à
travers le spirit safe, véritable coffre-fort à alcool, permettant au stillman, le distillateur, de mesurer avec précision
sa densité. La première distillation s’achève lorsque le liquide demeuré au fond du wash still ne titre pas plus de 1%
vol.. Ce résidu appelé pot ale, qui peut représenter plus des deux tiers du wash initial, sert à l’alimentation du bétail.
Les low wines sont ensuite acheminés vers un
alambic de plus petite taille, le spirit still, pour
y subir une deuxième distillation. Le premier distillat obtenu est acheminé vers le coffre à alcool afin d’être analysé.
Riches en esters aromatiques en aldéhydes et en acides, les têtes de distillation (foreshots) titrent entre 72% et 80%
vol. et se troublent par adjonction d’eau distillée. Impures, elles sont redistillées avec la charge suivante de low
wines. Au fur et à mesure de la distillation le degré alcoolique diminue. Lorsque le liquide ne se trouble plus, on est
en présence du futur whisky, le middle cut ou cœur de chauffe, qui titre en moyenne entre 68% et 72% vol.. En
dessous de 70% vol., les queues
de distillations (feints), riches en sulfures et en composés aromatiques lourds et puissants, sont redistillées avec la
charge suivante de low wines. La distillation s’achève lorsque le liquide encore présent dans le spirit still titre moins
de 1% vol.. Ce résidu, appelé spent lees, est traité avant rejet.

L'ORGE

Dès 1678, un certain Sir Robert Moray écrit dans l’un de ses articles que le malt ne peut être produit qu’à partir
d’une seule céréale, l’orge. A l’époque, plusieurs variétés sont déjà connues. La plus réputée est composée d’un épi
de deux rangs de grains. L’autre, plus communément utilisée, dispose de quatre rangées de grains. Cette dernière
variété, connue sous le nom de bere (l’ancêtre de l’orge actuelle), est encore cultivée dans les Orcades pour la
production du bere bannock, galettes qui furent longtemps l’aliment de base des habitants de ces îles. Les
distillateurs ont toujours favorisé les producteurs d’orge locaux. Pourtant, à partir de la fin du XIXe siècle, les
distilleries ont recours à l’importation. Poussées par l’engouement général que suscite le whisky, elles reçoivent des
cargaisons entières d’orge en provenance, notamment, de France, du Danemark, de Russie et des pays baltes. L’un
des principaux témoins de cette véritable ruée vers l’orge fut le port de Campbeltown de la presqu’île de Kintyre
qui, en 1873, accueillait plusieurs fois par semaines des cargos repus d’orge pour la trentaine de distilleries alors en
activité.

Dans les années 1950, les variétés d’orge ne cessent d’évoluer et de nouvelles qualités viennent régulièrement
déclasser les plus anciennes : Spratt, Plumage, Archer, Proctor, Marris Otter. La plupart sont originaires du nord de
l’Angleterre, du sud de l’Ecosse ou du Canada. A partir de la fin des années 1960, les progrès technologiques liés à
la récolte et au stockage de l’orge, permettent l’apparition d’une nouvelle variété d’origine écossaise baptisée
Golden Promise. Malgré une certaine fragilité face aux attaques du mildiou (moisi), Golden Promise sera, pendant
près de vingt ans, souveraine auprès des distillateurs, représentant jusqu’à 95% de l’orge cultivée en Ecosse. Son
déclin s’amorce à partir de 1985. Malgré l’existence de nouvelles variétés, quelques distilleries restent farouchement
attachées à la Golden Promise, en particulier Macallan. Mais la plupart se sont tournées vers
d’autres qualités, notamment Optic, plus résistantes et au rendement en alcool supérieur.

LA SELECTION DE L'ORGE

Face à la multitude de variétés disponibles, une sélection s’impose. Toutes les qualités ne sont pas propices à la
production d’alcool. Ainsi, une orge riche en protéines sera utilisée entre autre pour l’alimentation du bétail ou pour
la production de whisky de grain. Pour la production du whisky de malt ou celle de Scottish ales (bières écossaises
de malt), les distillateurs et les brasseurs se tournent vers une orge riche en amidon qui permettra d’obtenir des
sucres fermentescibles et par conséquent de l’alcool. C’est au moment de la livraison que les distillateurs contrôlent
la qualité de l’orge. Ils vérifient notamment que le grain ne présente pas de traces de moisissures, qui, associéesà des
techniques de récolte, de trempage, et de germination peu scrupuleuses, sont source d’arômes indésirables.

LE MALTAGE :
ENTRE TRADITION ET MODERNITE

Depuis les années 1970, le maltage, qui constitue la première étape du processus de transformation du grain en
alcool, est réalisé en dehors de l’enceinte des distilleries. Seules cinq distilleries, dont Balvenie, maltent encore
jusqu’à 30% de leur orge. Longue et coûteuse, cette opération est désormais sous-traitée par des malteries
mécanisées. Le maltage industriel présente de nombreux avantages par rapport au maltage traditionnel. Outre les
considérations de temps et de coût, les malteries produisent une orge maltée de qualité constante, en tenant compte
des spécificités propres à chaque distillerie. Le maltage, souvent perçu comme une opération unique, la germination,
se décompose en réalité en trois étapes.
Le trempage : une fois récoltée, l’orge entre dans une phase naturelle de dormance. Composée d’une enveloppe qui
renferme un embryon (future plante) et d’une poche d’amidon (réserve d’énergie), l’orge est soumise à plusieurs
phases d’humidification et d’oxygénation afin d’activer l’embryon en sommeil. Cette opération, qui en fonction des
conditions atmosphériques varie de quarante-huit à soixante-douze heures, s’achève dès que le taux d’humidité du
grain passe de 15% à plus de 40%. La germination peut alors débuter.
La germination : l’orge humide est répandue sur des aires de maltage (malting floor) en couches épaisses d’environ
30 à 50 cm. Le développement de l’embryon va provoquer la désintégration des parois solides qui protégent
l’amidon. L’amidon se transforme en une sorte de farine souple blanchâtre dont les sucres seront extraits au moment
du brassage. La chaleur engendrée par la croissance de l’embryon nécessite de retourner régulièrement la masse
d’orge. Traditionnellement, cela est réalisé par le biais de pelles en bois (shiels) ou de râteaux. Cette opération,
physiquement éprouvante, se répète en moyenne trois fois par jour afin d’éviter que les germes ne s’enchevêtrent.
Lorsque ces germes ont atteint une longueur de deux ou trois millimètres, la germination est interrompue afin
d’éviter que l’embryon ne se nourrisse des sucres du grain. L’orge, à ce stade, est appelée malt vert. Il est transféré
au four (kiln) pour séchage.
Le séchage : autrefois le séchage, kilning, s’effectuait exclusivement à l’aide de tourbe, de charbon ou de coke.
Désormais, les malteries sont non seulement équipées de fours, utilisés pour le feu de tourbe, mais aussi de brûleurs
qui insufflent de l’air chaud. Une fois séché, le malt est débarrassé de ses impuretés, germes et autres résidus avant
d’être livré aux distilleries.

LES AROMES DU MALT

Souvent considéré comme une simple étape intermédiaire vers la production d’alcool, le
maltage est rarement évoqué pour sa contribution à la palette aromatique du whisky. Pourtant, selon le combustible
utilisé au cours du séchage, le profil aromatique du malt se révèle fort différent. Séché à l’air chaud, il se pare de
douces notes biscuitées, toastées et torréfiées. Séché sur un feu de tourbe, il développe alors des notes rôties, fumées
et médicinales que l’on retrouve après la distillation. A l’issue du maltage, le malt est stocké puis broyé en une
farine grossière, le grist, par l’intermédiaire d’un moulin, le malt mill. La mouture obtenue est composée de 70 % de
grist, 20% de résidu d’enveloppe du grain et 10% de farine. Ces proportions doivent être strictement respectées sous
peine d’entraver le bon déroulement du brassage. L’eau pourra alors extraire les sucres jusqu’alors inaccessibles.

DILUTION, COLORATION, FILTRATION

LA DILUTION

Cette étape consiste à ramener le degré naturel d’un whisky, titrant parfois plus de 60% vol., à un degré minimum de
40% vol., la force minimale en dessous de laquelle un alcool de grain ne peut être légalement appelé whisky. La
dilution concerne la majorité des whiskies disponibles sur le marché. Elle s’effectue par adjonction progressive
d’eau déminéralisée qui provoque la précipitation et la concentration des acides gras présents dans l’alcool. En plus
de cette réaction chimique, la dilution modifie les arômes et les saveurs du whisky.

LA COLORATION

Dans les années 1960, dans un contexte de forte croissance, les blenders ont peu à peu remplacé le verre teinté des
bouteilles de whisky par du verre transparent. L’impact visuel de leurs flacons, en particulier la couleur et la
limpidité du whisky, est alors devenu une réelle préoccupation.
La couleur d’un whisky est fonction du nombre d’années passées en fût. C’est au cours des trois premières années
que l’interaction entre le bois et l’alcool est la plus intense. Au-delà de cette période l’influence du chêne diminue au
fil des ans. Depuis l’essor des blended scotch au XIXe siècle, la couleur est parfois ajustée par ajout de caramel
alimentaire. Les maisons d’embouteillage utilisent, en application de la législation, un caramel de type E150a,
employé pour la coloration de boissons fortement alcoolisées. Le caramel est introduit après la dilution du whisky,
juste avant sa filtration.

Si l’assemblage de dizaines de fûts entre eux (batch) permet d’obtenir une constante en termes d’arômes et de goûts,
la couleur résultant de l’assemblage n’est pas nécessairement la même d’un batch à un autre. Le changement de
teinte d’un whisky, si léger soit-il, tend à provoquer une « crise de confiance » chez les consommateurs peu avertis.
Pour beaucoup, la variation de couleur implique nécessairement un changement de qualité, ce qui est loin d’être
toujours le cas. Un whisky de couleur ambrée et cuivrée flatte plus facilement l’œil du consommateur qu’un whisky
arborant une teinte légèrement dorée. Même si « la couleur ne fait pas le moine », les whiskies foncés sont encore
aujourd’hui synonymes de maturité, de richesse et d’onctuosité. Profitant du débat actuel sur la coloration et de la
tendance au « tout naturel », certaines maisons ont récemment développé des gammes de whiskies « blancs » ou non
colorés. L’absence quasi totale de couleur est devenue, soudainement, un critère de qualité. En réalité, elle témoigne
surtout de l’utilisation de fûts pauvres en tanins, phénomène lié à un usage répété. En aucun cas elle ne saurait
garantir la qualité d’un whisky.

LA FILTRATION A FROID

Ce procédé permet d’accentuer la précipitation des acides gras, amorcée au cours de l’étape de dilution. Une fois
dilué, le whisky traverse un échangeur de température composé de plaques en inox.

Pour la filtration des single malts, la température oscille généralement entre 4 °C et 6 °C. A 4 °C, les acides gras
précipitent plus rapidement que les composés aromatiques. En ce qui concerne les blended scotch, cette température
est ramenée à 0 °C, - 2 °C voire - 4 °C. Composés en grande partie de whiskies de grains plus légers, les blends
présentent en effet une faible concentration en acides gras. Il est donc nécessaire pour les extraire d’avoir recours à
une température de filtration basse.
Le whisky, une fois refroidi, est acheminé vers l’appareil de filtration. Celui-ci est composé d’un nombre important
de plaques é quipées de feuilles de cellulose. Plusieurs paramètres sont pris en considération : l’épaisseur et la
densité des feuilles ainsi que la vitesse de filtration. Plus cette vitesse est importante, plus la pression augmente et
moins le whisky est filtré. A contrario, plus la vitesse est réduite, plus l’extraction d’acides gras est importante.

LES CONSEQUENCES SUR LES AROMES ET LES SAVEURS

L’impact de la dilution sur la palette aromatique et gustative d’un whisky est manifeste. Nombre de whiskies à 40%
vol. pèchent par excès de dilution. Quelques degrés de plus favorisent un meilleur é quilibre aromatique et gustatif.
Inversement, les whiskies non dilués (cask strength) présentent une telle concentration d’alcool qu’il est
généralement conseillé d’ajouter un filet d’eau afin de pouvoir libérer les parfums plus délicats de leur bouquet.
Cependant cette dilution ne doit pas être exagérée sous peine de modifier le nez et de rendre la bouche aqueuse.
Utilisé afin d’ajuster la couleur, le caramel alimentaire fait l’objet d’un certain nombre d’interrogations quant à son
influence sur le goût du whisky. Les plus suspicieux vont jusqu’à établir un lien direct entre caramel alimentaire et
arômes de vanille, de crème brûlée, de caramel au beurre, etc. Cette croyance ne repose sur aucun fondement. De
nos jours, plus de 90% des whiskies écossais vieillissent dans d’ex-fûts de bourbon qui procurent des arômes
gourmands de beurre, de vanille et de caramel.
Ces arômes sont la véritable marque de fabrique des whiskeys américains. Elevés en fûts neufs, ils ne sont eux-
mêmes jamais colorés.
Dans l’esprit de nombreux amateurs, la filtration à froid répond uniquement à des considérations esthétiques. Pour
eux, seules entrent en ligne de compte les qualités aromatiques et gustatives du whisky. Ainsi l’aspect trouble et
laiteux d’un whisky non filtré à froid trouve logiquement grâce à leurs yeux.

A l’instar du célèbre négociant Signatory Vintage, les embouteilleurs indépendants ont été de véritables précurseurs
en matière de whiskies non colorés, non filtrés et non réduits. Leur démarche qualitative a depuis inspiré de
nombreuses distilleries soucieuses de proposer à une clientèle d’amateurs toujours plus avertis des whiskies plus
authentiques.

L'ART DE L'ASSEMBLAGE

LES DIFFÉRENTS TYPES D'ASSEMBLAGE

La genèse :
c’est Andrew Usher qui, en qualité d’agent pour Smith’s of Glenlivet, lança la première marque commerciale de
whisky, le Usher’s Old Vatted Glenlivet. Celui-ci résultait de l’assemblage (vatting) de plusieurs fûts d’une même
distillerie (Glenlivet), d’âges différents. Cette pratique avait été reconnue auparavant, par une loi de 1853. Quelques
années plus tard, le Gladstone’s Spirit Act autorisa l’assemblage de whiskies de grain et de malt sous entrepôt. Il
permit ainsi l’essor du blended scotch.
Blending et blended scotch :
les blended scotchs sont issus de l’assemblage de single malts et de whiskies de grain. A l’origine, ces derniers
étaient élaborés à partir d’un mélange d’orge maltée et non maltée puis distillés dans des alambics traditionnels, pot
still, de grande taille. L’introduction d’un nouvel appareil de distillation en 1830, le patent still (alambic à colonne),
plus économique et au rendement élevé, marqua un véritable tournant. En 1846, l’abrogation de la loi sur le maïs
(qui limitait l’utilisation de cette céréale) permit de remplacer le mix orge maltée-orge non maltée, par un mélange
de céréales moins
coûteux à fort pourcentage de maïs. Ces différents facteurs, conjugués au phylloxéra, qui ravagea le vignoble
français à partir des années 1860, permirent aux blended scotchs de s’imposer rapidement sur la scène
internationale.
Vatted malt et vatted grain whiskies :
un autre style d’assemblage consiste à mélanger des single malts de différentes distilleries. Ces whiskies, vatted
malts ou pure malts, plus confidentiels, se limitent essentiellement aux grandes maisons d’assemblage qui en
proposent quelques versions : Johnnie Walker 15 ans Green Label, Famous Grouse Vintage 1987, Ballantine’s Pure
Malt 12 ans, etc. Mais ce style de whisky intéresse une nouvelle génération de « créateurs », tel John Glaser,
fondateur de Compass Box, qui élabore des vatted malts et des vatted grains, assemblages de plusieurs whiskies de
grain, issus de petites cuvées, small batchs (assemblages de quelques fûts).
Vatting et single malt :
la technique du vatting intervient également dans l’élaboration des single malts. Elle consiste à mélanger des fûts de
whiskies d’âges différents au sein d’une même distillerie. C’est l’âge du plus jeune whisky entrant dans le mélange
qui figure sur l’étiquette de la bouteille. Cette pratique, employée afin d’atténuer les disparités d’arômes et de goûts
d’un fût à un autre, concerne la plupart des single malts disponibles sur le marché.

LES ARÔMES AU COEUR DE L'ASSEMBLAGE

Les master blenders :


de nos jours, les masters blenders ne sont plus les marchands ni les négociants indépendants inspirés du XIXe siècle,
mais des hommes et des femmes au service d’une maison d’assemblage. Leur sens olfactif est sollicité
quotidiennement et leur travail consiste non seulement à assurer la constance des blends existants, mais aussi à
évaluer la qualité du nouveau distillat produit par les distilleries « maison ». Ils disposent pour cela d’un nouvel
outil, le Cask Management, qui permet une meilleure traçabilité des fûts (âge, origine).

Une symphonie d’arômes :


véritable chef d’orchestre, le master blender dispose d’une gamme infinie d’arômes afin de composer son œuvre.
Toute composition est structurée par un schéma aromatique (une recette) qui lui servira de partition à l’intérieure de
laquelle il donnera libre court à son inspiration.

Dans un premier temps, le master blender organise ses instruments, les whiskies, en fonction de leur profil
aromatique et de leur complémentarité. Pour le thème principal, il utilise les senteurs les plus parfumées, les arômes
de fruits (agrumes), de fruits secs et de fleurs. Pour l’harmonie, il recherche des notes plus vertes, plus herbacées
ainsi que des notes épicées. Enfin les percussions sont assurées par les arômes issus de la tourbe, notamment les
notes fumées et médicinales. Malgré l’identité très affirmée de certains whiskies, le master blender cherche avant
tout à rendre l’ensemble harmonieux et complexe.

L’intensité de l’œuvre :
parallèlement au choix de la palette aromatique, le master blender définit l’intensité avec laquelle chaque whisky
participe à l’harmonie finale. Ainsi, contrairement aux idées reçues, la proportion de whisky de grain détermine, non
pas tant la qualité que l’intensité de l’assemblage. Au final, ce sont le choix des ingrédients et le savant dosage de
chacun d’entre eux qui importent le plus. Compte tenu de ce qui précède, un blend composé d’une part importante
de single malts tourbés, de quelques single malts délicats et d’une faible proportion de whiskies de grain ne fera
jamais un mélange complexe. En règle générale, le ratio whisky de malt/whisky de grain est de l’ordre de 25/75 et le
nombre de distilleries représentées varie de vingtà cinquante. Ce large panel de distilleries permet de pallier la
fermeture éventuelle de l’une d’entre elles.
La réalisation de l’œuvre :
une fois les whiskies sélectionnés et leurs proportions définies, la réalisation de l’assemblage peut enfin débuter.
Certaines maisons d’assemblage mélangeront séparément les whiskies de malt et les whiskies de grain, d’autres
déverseront dans une même cuve tous les whiskies et les laisseront reposer avant dilution. A ce stade, le degré est
ramené à un niveau légèrement supérieur ou égal à celui de la mise en bouteilles par adjonction d’eau déminéralisée.
Certaines maisons embouteillent directement le mélange ainsi obtenu après seulement quelques jours de mariage,
marriage en anglais. Pour d’autres, cette étape, le marrying, est perçue comme un élément déterminant favorisant le
développement et le mélange harmonieux des arômes. Le whisky est alors remis en fûts usagers, afin d’éviter toute
influence du bois, pour une période pouvant varier de trois à six mois. Deux semaines avant la mise en bouteilles, les
fûts sont vidés dans une large cuve. Le whisky subit une ultime dilution afin d’atteindre le degré souhaité. Nul ne
saurait remettre en cause le rôle déterminant que jouèrent les blended scotchs dans le façonnage et l’émergence
d’une industrie du whisky moderne et pérenne. Des marques telles que
Ballantine’s, Chivas Regal, Dewars et Johnnie Walker ont donné au scotch whisky ses lettres de noblesse. La
technique du vatting a également permis de transcender le caractère spécifique de chaque distillerie en donnant
naissance à des single malts à la palette aromatique encore plus expressive.

LA TOURBE

LES PROPRIÉTÉS DE LA TOURBE

La tourbe est issue de la décomposition de végétaux, bruyère, herbe et mousse, qui, après quelques milliers
d’années, se transforment en un combustible composé de déchets organiques. Ressource naturelle, la tourbe se
régénère à raison d’un millimètre par an. Dans le nord et l’ouest de l’Ecosse, de vastes étendues de tourbe se sont
ainsi accumulées sur plusieurs mètres de profondeur. Sur l’île d’Islay, certaines tourbières datent de plus de 10 000
ans. En raison de son très fort taux d’humidité pouvant varier de 25% à 60%, la tourbe, en se consumant, ne produit
que très peu de chaleur et génère des fumées épaisses et grasses qui permettent de sécher en partie le malt vert mais
surtout de donner à ce dernier des arômes spécifiques de fumé.

LA TOURBE ET LE SÉCHAGE

La tourbe, peat, est utilisée au cours de l’étape ultime du maltage, le séchage. Traditionnellement, celui-ci
s’effectuait à l’intérieur d’un four, le kiln, équipé d’un plancher métallique perforé sur lequel le malt vert était étalé.
Ces fours surmontés de pagodes, signe distinctif des distilleries, dont la fonction est désormais purement
ornementale,
é taient également alimentés en coke et en charbon. Grâce au maltage mécanique, de nouveaux combustibles (gaz
naturel, fuel) ont été introduits, permettant de mieux contrôler les températures de séchage et de préserver les
enzymes du malt.
La tourbe est essentiellement utilisée pour sa contribution à la palette aromatique des whiskies. C’est au cours des
dix premières heures de séchage que la tourbe brûle et qu’elle imprègne de sa fumée le malt vert encore humide. La
température ne doit pas dépasser 50 °C afin de ne pas détruire les enzymes du malt. Une fois le taux d’humidité du
grain ramené de 45% à 25%, la tourbe est relayée par un autre combustible qui achèvera le séchage de l’orge. Le
malt, dont le taux d’humidité varie alors entre 4% et 6%, sera stocké dans des silos.

L’échelle de valeur employée pour mesurer la quantité de tourbe présente dans le malt est le ppm (parts per million)
de phénols. En Ecosse, dans la région du Speyside, le taux moyen de phénols oscille entre 2 et 3 ppm. Sur l’île
d’Islay, ce taux peut atteindre 80 ppm.

PARFUM DE TOURBE

La combustion de la tourbe donne naissance aux phénols, en particulier les crésols et les xylénols. L’intensité des
arômes véhiculés par la fumée de tourbe dépend de la quantité de tourbe utilisée pour sécher le malt et de la
température de brûlage. Les arômes les plus distinctifs sont ceux de réglisse, de feu de cheminée, de cendre, mais
aussi de clou de girofle, de camphre et d’eucalyptus. A l’extrême, les whiskies tourbés développent des arômes de
poisson fumé, voire même de caoutchouc brûlé. Aujourd’hui l’orge maltée tourbée employée par les sept distilleries
de l’île d’Islay provient essentiellement de la malterie de Port Ellen. Environ 2 000 tonnes de tourbe sont utilisées
chaque année pour sécher le malt vert entrant dans l’élaboration de leurs single malts.

L'EAU

LA NATURE DE L'EAU

C’est sous forme de pluie et de neige que l’eau fait sa première apparition. Si elle tombe sur des roches cristallines,
l’eau s’écoulera rapidement et n’entrera pas en contact avec les couches souterraines. Peu chargée en éléments
minéraux, elle conserve alors sa douceur ainsi q’une légère acidité. Cette qualité d’eau est la plus répandue en
Ecosse.
En contact avec un sol plus perméable ou une roche sédimentaire (calcaire, grès), l’eau pénètre le sous-sol et se
charge en minéraux, carbonates et sulfates. Elle devient alors alcaline et dure. La célèbre distillerie Glenmorangie,
située dans le nord des Highlands, est l’une des seules à disposer d’une telle source d’eau.
Pour de nombreux distillateurs, une eau douce qui s’écoule sur du granit à travers de la tourbe constitue la meilleure
eau de production. Sur la petite centaine de distilleries encore en activité, moins de vingt possèdent une source d’eau
présentant de telles propriétés, notamment Balblair, située à moins de quatre kilomètres de Glenmorangie.

LE BRASSAGE

L’eau intervient à plusieurs stades de l’élaboration : au cours du maltage, l’orge est humidifiée afin de germer ; lors
de la distillation,distillation, l’eau froide des condenseurs fait passer les vapeurs d’alcool à l’état liquide; enfin, l’eau
intervient au moment de la dilution du whisky qui précède la mise en bouteilles. Mais c’est avant tout l’élément
principal que l’on incorpore au moment du brassage. Le malt broyé (grist), mélangé à de l’eau chaude, est brassé
afin d’en extraire l’amidon soluble. Ce mélange contient en général une part de grist pour quatre parts d’eau. Le
brassage s’effectue dans une cuve généralement fermée, en acier ou en fonte, appelée mash tun, équipée de pales
tournantes et d’un fond en acier perforé.

Trois eaux successives sont nécessaires afin d’extraire les sucres contenus dans le malt. La première eau, qui
correspond à la troisième eau du brassage précédent, est chauffée entre 60 °C et 65 °C. Au-delà de cette température,
la diastase, l’enzyme du malt qui permet de transformer l’amidon en sucres (maltose, dextrine), meurt. Cette
substance est essentielle au développement de la palette aromatique des whiskies et notamment des esters à l’origine
des arômes fruités et floraux. Le liquide ainsi obtenu, un moût sucré, appelé wort, s’écouleà travers le mash tun puis
est stocké dans une cuve intermédiaire, l’underback. Une deuxième eau, chauffée entre 70 °C et 75 °C, permet
d’extraire les sucres restant dans le malt. Le moût sucré qui en résulte rejoint l’underback. Enfin, une troisième eau
d’extraction appelée sparge, chauffée entre 80 °C et 85 °C, servira au brassage suivant. Le résidu du grist, la drêche
(draff), riche en protéines, est destiné au bétail.

LES SAVEURS DE L'EAU

Des quatre éléments nécessaires à la production du whisky, l’eau est celui dont l’impact sur les arômes est sans
doute le plus difficile à mesurer. En revanche, les saveurs de l’eau se retrouvent généralement dans le caractère du
whisky. La classification schématique des single malts en fonction de leur région d’origine, Lowlands, Highlands,
Speyside et Islay, repose, en partie, sur une réalité d’ordre géologique dont l’eau est le principal vecteur.

Sur l’île d’Islay chaque distillerie possède sa propre source. Bunnahabhain utilise une eau fraîche et limpide qu’elle
tire de sources profondes. Pour Bowmore, cette eau si précieuse suit les flots vigoureux de la rivière Laggan en se
parant d’une teinte légère. Ardbeg, Caol Ila, Lagavulin et Laphroaig exploitent l’eau de lochs profonds et riches en
tourbe. Quant à Bruichladdich, son eau douce et présentant de fines traces de tourbe, s’écoule sur du quartz datant de
9 millions d’années.
Dans le Speyside, l’eau, similaire en terme de texture, se révèle à la fois plus claire et plus fraîche. Cette région qui
abrite les distilleries les plus réputées repose sur une formation rocheuse essentiellement composée de quartz et de
granit. A la fonte des neiges, l’eau traverse un sol fertile recouvert de forêts de conifères (pins, sapins). Ainsi chez
Macallan ou Glenlivet, l’eau véhicule des notes d’aiguille de pin, de mousse et de bois de bouleau. Du nord au sud
et d’est en ouest, l’eau des Highlands se caractérise par une très grande diversité. Au nord-est, la distillerie
Glenmorangie utilise une eau qui s’écoule sur des roches poreuses composées de calcaire et de grès. Cette eau dure,
sans aucune trace de tourbe, est saturée d’arômes de résine et d’épices (poivre) que l’on retrouve également chez
Ben Nevis, Dalmore et Glen Garioch. Dans le sud des Highlands, l’eau s’écoule sur des roches calcaires ou de grès
gris, traversant des collines recouvertes de fougères, de bruyères mais aussi de tourbières. Cette eau donne naissance
à des whiskies frais, vifs, épicés et très légèrement
tourbés comme Aberfeldy, Blair Athol ou Edradour. Issue à l’origine d’un sous-sol composé de grès, de roches
volcaniques et de gisements de houille, l’eau utilisée par les distilleries des Lowlands provient désormais de
réservoirs naturels situés dans les collines avoisinantes. Cette eau, appréciée pour sa pureté, sa douceur et sa
fraîcheur, est subtilement marquée par des senteurs de primevère, de bouton d’or, de fougère et de
verdure. On retrouve toutes ces caractéristiques dans les single malts des distilleries Auchentoshan, Bladnoch et
Glenkinchie ainsi que dans les whiskies produits sur l’île d’Arran et dans la région de Campbeltown.

UNE RESSOURCE INESTIMABLE

Si l’eau est à l’origine de seulement 5% de la palette aromatique d’un whisky, elle n’en demeure pas moins une
ressource précieuse. Les distilleries, soumises aux caprices des saisons, ont appris à respecter le cycle naturel de
l’eau. Chaque année, afin de prévenir un tarissement trop important de leur source, elles observent une période dite «
sèche » au cours de laquelle la production est interrompue. Il n’est donc pas surprenant que chaque distillerie
protège farouchement l’approvisionnement et la qualité d’une ressource à la fois si fragile et aléatoire.

LES LEVURES

LES FAMILLES DE LEVURES

On distingue deux grandes catégories de levures : les levures dites naturelles et les levures de culture. Les levures
naturelles, présentes dans l’atmosphère, sont encore parfois utilisées pour la production de certaines bières
artisanales, dont la bière belge Cantillon. Elles sont fragiles et leur action est soumise aux conditions climatiques, à
l’environnement naturel microbien, sur lequel l’homme n’a aucune emprise. Malgré un potentiel aromatique très
riche, leur utilisation est jugée trop risquée par les distillateurs, qui leur préfèrent les levures de culture. Les levures
de culture, qu’elles soient de brasseries ou de distilleries, sont les plus couramment utilisées et cela de façon
complémentaire. Elles permettent d’anticiper le rendement en alcool et la production d’arômes spécifiques
correspondant au profil aromatique des différents types de whiskies.

LA FERMENTATION

Acteur essentiel dans le processus d’élaboration des whiskies, les levures, par leur action féconde, permettent de
transformer un simple moût sucré en une bière de malt. A l’issue du brassage, le wort, mélange d’eau et de malt, est
refroidi à environ 20 °C (température de « démarrage » des levures). Il est ensuite acheminé vers les washbacks,
cuves de fermentation, dont la taille peut varier de 1 000 à plus de 50 000 litres. Traditionnellement en pin d’Oregon
ou en bois de mélèze, ces cuves sont aujourd’hui très souvent remplacées par des washbacks en acier inoxydable,
plus faciles d’entretien. Lorsque le washback est rempli aux deux tiers
on y incorpore les levures. Sous leur action, les sucres contenus dans le wort se transforment en alcool et en gaz
carbonique. Le liquide, désormais appelé wash, commence à bouillonner et la température passe alors de 20 °C à 35
°C. Des agitateurs brassent le wash en permanence afin d’empêcher une montée en température trop importante qui
risquerait d’inhiber les levures.

Il faut compter entre quarante et soixante heures pour que tout le sucre se transforme en alcool. Le liquide ainsi
obtenu, une sorte de bière de malt, titre entre 6% et 8% vol. Le wash est ensuite acheminé dans des cuves de
stockage, les wash-chargers, avant distillation.

LES ARÔMES ISSUS DE LA FERMENTATION

Les levures transforment non seulement les sucres en alcool, mais elles transmettent également certains arômes
spécifiques. C’est notamment au cours de la fermentation que les esters,à l’origine du caractère fruité et acidulé de
nombreux whiskies, font leur apparition. Ces esters véhiculent des notes caractéristiques d’abricot, de pomme, de
poire mais aussi de fruits exotiques (banane, ananas). D’autres arômes, sont également issus de la fermentation.
Qu’ils soient associés à des senteurs florales (violettes, buis) ou à des odeurs proches de la céréale (malt, porridge),
leur présence, après de nombreuses années de vieillissement, témoigne de la qualité de l’alcool produit par une
distillerie.

L'IRISH WHISKEY

NATURELLEMENT NON TOURBÉ

Omniprésente en Irlande, la tourbe est rarement utilisée pour le séchage de l’orge. Seule la distillerie Cooley, située
au nord de Dublin, produit un single malt tourbé, distillé deux fois. Chez Bushmills, au nord de Belfast,
et Midleton, près de Cork, le malt vert (orge germée) est séché en insufflant de l’air chaud dans des fours fermés afin
qu’aucune odeur de combustible ne vienne imprégner l’orge maltée.

PURE POT STILL : LA TRADITION IRLANDAISE

Elaboré à l’origine à partir d’un mélange de céréales (orge maltée et non maltée, avoine, blé, seigle), le pure pot still
est le plus traditionnel des Irish whiskeys. Si l’avoine, le blé et le seigle ne sont plus utilisés, Midleton continue de
perpétuer cette tradition, Bushmills ayant, à la fin du XIXe siècle, opté pour l’élaboration de single malts. Le fruité
exubérant (fruits rouges, fruits exotiques) et le caractère épicé du pure pot still résultent de la présence de 40% à
50% d’orge non maltée. Midleton élabore trois types de pure pot still : light (léger), medium ou modified
(moyennement corsé), heavy (riche).
Plus le pourcentage de queues de distillation contenu dans le cœur de chauffe est élevé, plus le whiskey est riche et
corsé.

LA TAILLE DES ALAMBICS :


SOURCE DE LÉGÈRETÉ

Au milieu du XIXe siècle, afin de faire face à l’essor des blends écossais bon marché, les Irlandais se tournèrent vers
des alambics pot still de grande taille pour produire leur whiskey. L’ancienne distillerie Midleton possédait le plus
grand alambic au monde. D’une capacité de 140 000 litres, il fonctionna jusqu’en 1975.

Les distilleries irlandaises sont toujours équipées d’alambics « géants » (en moyenne six fois plus grands qu’en
Ecosse) où seules les vapeurs d’alcool les plus volatiles parviennent jusqu’en haut du col de cygne avant d’être
condensées. Le distillat ainsi obtenu se révèle fin et léger.

TRIPLE DISTILLATION :
LE FRUITE EXACERBÉ

Mis à part quelques distilleries écossaises, la pratique de la triple distillation est l’apanage des distilleries Bushmills
et Midleton. En réalité seules les queues de distillation, plus lourdes et plus huileuses, sont distillées trois fois
successivement dans le wash still, le low wine (ou feint) still et le spirit still. Les low wines (bas vins) les plus forts
en alcool, obtenus à l’issue de la première distillation, sont stockés avant de rejoindre le troisième alambic. Au cours
de la seconde distillation, les queues, weak feints, sont écartées pour être incorporées à la prochaine distillation.
L’alcool qui sort du second alambic (strong feints) titre environ 70 % vol. Il est à son tour stocké avant de subir une
ultime distillation qui permet de séparer les têtes et les queues de distillation du cœur de chauffe. Le new spirit, futur
whiskey, titre environ 85 % vol. Riche en têtes de distillation, il se montre particulièrement fruité.

VATTING : UN ART POUSSÉ A LA PERFECTION

Les distillateurs irlandais sont passés maîtres dans l’art de l’assemblage (vatting). Chez Bushmills ou Midleton, on
assemble respectivement des single malts et des pure pot stills d’âge et de nature différents à des alcools de grainà
fort pourcentage de maïs. Le Bushmills Black Bush, à 80% de malt, illustre à merveille la qualité des blends
irlandais.
Au début des années 1970, les irlandais se sont penchés sur la question du vieillissement. L’accent a été mis sur
l’utilisation de fûts de bourbon ou de xérès de premier remplissage et sur des affinages spécifiques (porto, madère).
L’une des plus belles réussites est un Bushmills vieilli intégralement en fût de rhum à l’exotisme fruité-épicé
étonnant.

Les couleurs viennent du fût

SHERRY

Linkwood     Macallan

Les fûts de Sherry teintent le whisky de nuances rouges à acajou et lui confèrent des notes gustatives allant de la
griotte au pruneaux. Ils proviennent d'Espagne où ils ont contenu le fameux Xerès.

BOURBONS

Balblair    The Balvenie

Les fûts de Bourbon colorent très légèrement les whiskies tout en leur transmettant un caractère vanillé parfois
toffey. Ce sont des fût en chêne blanc Nord américains utilisés pour la maturation des Bourbons.

AFFINAGES

Glenmorangie    Edradour
Les affinages, très en vogue ces dernières années, constituent une étape supplémentaire de maturation de 6 mois à 2
ans maximum. Les tonneaux les plus invraisemblables ont été utilisés dans ces expérimentations pour le meilleur et
parfois le pire....

Bowmore Caol Ila Lowland

Tullibardine Isle of Jura Auchentoshan

The Balvenie Bruichladdich Linkwood

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