Evaluation perceptive et cognitive 1
Evaluation perceptive et cognitive du projet d'implantation de
réservoirs de I'lIECBW en zone d'intérét paysager
— réalisée a la demande du collectif de défense du Bois d'Ohain par Hic et nunC asbl
\I convient de constater que la parcelle proposée pour implantation des réservoirs et infrastructure de
talutage qui les enserre est située en zone forestiére diintérét paysager au plan de secteur. Dun point
de vue visuel, importance paysagére porte sur deux niveaux, l'échelle du paysage proche et sa
perception visuelle, et celle du cheminement et sa dimension scénographique. Le Chemin du Péque
est un des maillons essentiels d'une scénographie permettant de relier, par des voiries de trafic lent, la
Place Communale d'Ohain et le champ de bataille de Waterloo, soit deux sites classés. Sur le trajet
depuis le premier site vers le second, on trouve une succession harmonieuse de typologies
paysagéres : zone rurale A lurbanisation peu dense ; interface du cimetiare successivement enclos
dun mur et de haies ; zone boisée avec gradation transversale de la taille des arbres ; interface du golf
et son paysage vallonné en bocage ; zone ouverte de champs avec vue sur la Butte du Lion.
Le paysage proche du site proposé pour limplantation des réservoirs est caractérisé par une forét de
colonisation naturelle en lisiére d'une zone présentant quelques beaux exemplaires d'arbres aux hauts
{ts, de taille respectable. Bien que présentant une asymétrie topographique transversale au chemin,
"homogénéits du paysage en futaie surmonté, en arriére plan, darbres de port élevé est gage
diharmonie visuelle. Toute volumétrie non-naturelle ou dimportante modification du relief impacteraient
de maniare irrémédiable la dimension visuelle, mais aussi cognitive et d'usage du site.
La situation projetée se compose de deux réservoirs entourés de hauts talutages. Les documents
graphiques donnent une hauteur de talutage de 3,91 m par rapport & un niveau de référence situé &
7,80 m par rapport au niveau de la voirie, soit une hauteur totale de 5,71 m. Il est noter que la vue
aquareliée présentée avec les plans construite selon les lois de la perspective et que lintégration
photographique présentée & la page 34 du rapport « Réponse aux réclamations et avis » montre le
‘sommet des talus comme horizontal. Ce qui suppose, selon les lois de la perspective, que l'oeil du
spectateur se situe & cette hauteur. La perspective vue depuis un ceil adulte situé a 150m du sol, soit
environ 4 m plus bas, induit, selon les lois de la perspective, une augmentation perceptive des
hauteuts, ampifiant effet de masse.
Le tracé du Chemin du Péque est riche en qualité scénographique, en ce quil n'est pas linéaire mais,
présente & chaque extrémité du site un coude ample qui fait balayer du regard ensemble de calui
Lorientation de ces coudes porte le regard sur le site, plus que sur tout autre partie du champ visuel
potentiel ; ce, quelque soit le sens dans lequel le chemin est parcouru. Le regard se porte donc durant
Un laps de temps supérieur & tout autre segment du paysage sur I’étendue proposée pour implantation
du projet et renforce done la présence de tout volume auprés de l'usager-spectateur. Venant du
cimetiére, leffet de surprise, associé la vue en contreplongée amplifie le phénoméne. Tandis que
dans l'autre sens, toute rupture de perméabilité visuelle entre les arbres permettant de percevoir, au ras
du sol, la lumiére et la couleur du ciel, accrott effet de barriére visuelle et ne permet pas danticiper la
fin du plateau arboré. En effet, le contraste de luminance entre fragments de ciel au ras du sol et
Vombre des sous-bois attire invariablement lceil et permet de trouver ici un rare équilibre entre la
verticalité des trones et "horizon.
LLintégration photographique présentée & la page 34 du rapport « Réponse aux réclamations et avis »,
bien qu’erronée quant a la hauteur du point de vue, est néanmoins plausible lorsqu'elle montre la
perception du volume taluté dont on pergoit trois « faces ». Ce document contredit affirmation
contenue en page 12 du méme rapport, selon laquelle « le projet ne sera done perceptible que d'un
seul c6té ». Ainsi que le montrent les perspectives présentées dans le présent dossier, plus dune face
sera toujours percue, quelque soit le point de vue. Limpossibilité de ne voir qu'une seule face résulte ici
de absence de vue frontale de l'objet depuis le chemin, a laquelle s'ajoute la volumétrie complexe de
celui-ci.
La configuration du Chemin du Péque, pavé et de faible largeur, ainsi que les paysages ruraux et
bucoliques quil traverse est propice a la balade pédestre, équestre, ou a vélo. Le déplacement lent des
Hic et nunC asbi — human factors and built environment
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usagers augmente la durée de perception de la volumétrie et effet de lisiére lorsqu'on le longe. La
hauteur importante des talus, leur proportionnelle proximité et leur volumétrie tantot fermée, tantot
discontinue, renforce leur présence visuelle. En effet, ia volumétrie des talutages est amplifiée par la
vision périphérique, dont importance va grandissant lorsqu'on s'approche ou longe ceux-ci. En effet,
les objets situés dans le champ visuel périphérique présentent des déformées volumétriques. La
grande hauteur et la forte pente des talus sont alors assimilées visuellement, et cognitivement, & des
parois verticales.
Diautre part, les riverains font part de ce que lors de la visite des représentants de I'lECBW, référence
fut faite aux réservoirs implantés dans le Zoning Nord de Wavre. Les documents photographiques en
annexe montrent que ces réservoirs sont surmontés d'un déme d'une hauteur estimée a environ la
moitié de la hauteur du fot cylindrique sur lesquels ils reposent. Si cela était le cas, cela assimilerait la
hauteur au sommet & celle d'une construction sur deux niveaux
En l'absence de référentiel construit @ proximité, la perception de toute hauteur et sur-hauteur est
accentuée. Ce phénomane visuel sera d'autant plus prégnant pour tout volume singulier partiellement
émergeant du talutage, tel les domes. L'émergence du sommet des réservoirs rend l'ensemble encore
moins cognitivement répertoriable et en renforce lattraction visuelle. De plus, et ainsi que le montrent
nos études sur I'attraction visuelle, la teinte métallisée et hautement réfiéchissante, visible sur le dome
des réservoirs, générera des reflets vers lesquels le regard sera invariablement attiré, comme c'est le
‘cas pour ceux implantés dans le Zoning Nord de Wavre.
Le feuillage caduc des essences diarbres présentes sur le site disparait durant hiver et avec lui !'écran
visuel quill constitue. L'absence de feuillage sur les arbres en futaie rend d'autant plus visible la masse
des talus, et 'absence de feuillage sur les arbres majeurs laissera passer plus de lumiére, ce qui rend
dautant plus perceptible le sommet des réservoirs ainsi mis en lumiére. Cela, tant pour les usagers du
Chemin du Péque que pour nombre de riverains qui auront une vue directe vers les réservoirs et talus
depuis le premier étage de leur habitation de décembre & mai.
Quant au cimetiére communal situé en limite de parcelle, il présente comme caractéristique une
extension récente non enceinte d'un mur de briques, tel le quadrilatire dorigine, mais de haies.
extension jouxtant le site marque une volonté de progression dune barriére visuelle vers une
perméabilité visuelle, du bati vers le non-bati. La construction de réservoirs et talus de forte pente,
assimilés & des parois verticales, romprait définitivement cette harmonieuse métamorphose, rendant
abrupte la transition et réduisant d'autant la perception d'un des espaces boisés majeurs de la
commune.
Les caractéristiques cognitivement peu naturelles du bruit de fond généré par 'équipement, tant au
niveau sonore que par la faible richesse spectrale, contrastent avec la quiétude, la douceur et la variété
des sons percus actuellement. Peru comme une discordance sonore qui produit des effets
diétrangetés perceptives troublant la sérénité des lieux et le reueillement des proches des défunts
enterrés au cimetiére,
En conclusion, ouvrage projeté est situé en zone forestiére d'intérét paysager au plan de secteur, le
long d'un chemin public pavé reliant de maniére bucolique deux sites classés : les étendues de la
bataille de Waterioo et la Place Communale dOhain. Il est de plus contigu au cimetiére de la localité et
d'une zone d'habitations pour lesquels une détérioration d'un paysage sonore apaisant s'ajoute & celle
du paysage visuel. impact visuel depuis le domaine public est amplifié par le tracé de la voirie, dont la
configuration des coudes & chaque extrémité du site conduit le regard balayer la zone dimplantation
plus que toute autre segment du champ visuel. Limplantation dans une aire de futaie de faible densité
offre une grande perméabilité visuelle, accrue dés la chute des feuilles, et durant environ cing moins.
La situation projetée, au sommet dun plateau renforce la perception des volumes, amplifiée par leur
vue en contre-plongée, si faible soitelle. La grande hauteur et la forte pente des talus les assimilent
Visuellement et cognitivement & des parois verticales, tandis que l'émergence du sommet des
réservoirs rend objet encore moins cognitivement répertoriable et renforce attraction visuelle de
ensemble des talutages et volumes projetés.
Jean-Luc Capron
Dr. Eng. Architect
Ass. Professor
Hic et nun asbi — human factors and built environment 29/05/10