ALAUNE
+ nicolas.braemerf@territorial-fr
Christine Raphaél - Nicolas Braemer + christine.raphael(aterritorial.fr
Les dircom sont-ils
tous schizophrenes ?
Tiraillée entre information
du citoyen et mise
en avant de la politique
menée par la majorité,
la com’ territoriale revét
de multiples visages.
Le Dircom lui-méme est
souvent coincé entre l'élu
et son dircab et doit
imposer son
professionnalisme.
Attention, la schizophrénie
guette. Témoignages...
12. | LALETTREDU CADRE TERRITORLAL
es mots, durs, viennent d’un
dircom qui a décidé de raccro:
cher: « La communication
publique a un role dévasta-
teur lorsquelle devient poli
tique, tonne Jean-Francois Gazon,
directeur de la communication de la
ville de Blois. On arrive a dea situa
tions oie fond du message qui devrait
tre, justoment, politique, west plus que
cosmétique. La communication publi-
que risque une dérive graviasime, ai
ello n'a pas le courage de se remettre on
question et den rester
aux fondamentaux
servir de vecteur de
communication a de
vrais projets poli
tiques, @ de veritables
politiques publiques »
La question est posée
clairement : la dérive des dircoms vers le
«tout politique» estelle inéluctable ?
Trouve-ton encore des collectivités od le
rédacteur en chef d'une revue munici-
pale n'a pas obligation de faire relire ses
pages & chaque élu, lequel compte le
nombre de photos sur lesquelles il appa-
rait ? Dans ce contexte, quel est l'avenir
de'information territoriale et du service
au citoyen ?
Le « grand méchant dircab »
Le dircom d'ayjourd'hui estil payé
pour faire In communication de Télu
ou celle de la collectivité ? Les pla
quettes et journaus « d'information »
ne méritentils pas de vivre leur vie
942-15 JUILLET 2007 mb
PourQvuol OPPOSER
COM’ POLITIQUE
ET INFORMATION
DU CITOVEN ?
Les DEUX PEUVENT
ALLER DE Pair !
hors de toute communication poli-
tique, par respect pour le citoyen ?
« Fai méme vu certains élus prendre
une regle pour mesurer leur photo dans
le journal municipal et comparer avec
{a taille de la photo de Vautre étu sur la
page suivante » note un dircom.
Anecdotique ? Pas tant que ca. Car la
‘méconnaissance de la science meme de
la communication semble échapper a
certains élus, confondant communica
tion et propagande. Dans beaucoup
de collectivités, la
situation est d'au-
tant moins facile que
Te service com’
dépend du directeur
de-cabinet.
En off, combien de
dircoms feront le
portrait d'un « grand
méchant dircab », atteint de napoléonite
aigue, qui essaie de mettre sa griffe par-
tout, avec une conception du service
public souvent trés éloignée de celle que
se fait le dircom de sa profession.
Les dircabs, évidemment, refusent la
coupure artificielle entre profession-
nels et politiques : « Arrétons, dans la
communication territoriale, de parler
de « la politique » sana avoir Vir d'y
toucher, de mépriser Vaction politique,
de conteater par principe les compé:
tences des élua et de suapecter la capa
cité des dircabs a étre sensibles a Tin
térét général et au service public ! pro
teste Erwan Binet, dircab du maire deMions. Liengagement politique est noble
et a mise en musique dea decisions
politiques eat notre mission a tous.
Pourquoi aborder avec tant d'arro
gance ? Cest assez pratique d’incrimi:
ner le dircom, le dircab, ow Vélu de la
manvaise qualité des instruments de
communication. La qualité du travail
nnait de intelligence collective et de la
capacité de chacun des intervenants
dabandonner Vidée quil est omniscient
dans son domaine.A chacun d'aceepter
que les autres, a leur place, disposent
dune légitimité pour intorvenir ».
Quelle place
dans la hiérarchie ?
Certains plaident pour un rattache-
ment technique de la communication
au DGS, qui aura plus facilement le
réflexe de faire confiance aux qualités
professionnelles et a Vautonomie d'un
dircom, Mais cela n’évitera pas forcé-
ment Ie choc des cultures. « Avec le
DGC aussi, souligne Guillaume Fabre,
responsable de la communication &
Rives, Isere, la difference de culture est
flagrante : d'un cété une
formation juridique,
politique, empreinte de
rigueur et de discrétion,
de Vautre une formation
de communicant, sensi:
ble & Voriginalité, ou.
verte aux changements,
4@ priori au fait des données techniques
de fabrication et des regles de communi
cation. Le choc peut étre brutal. »
Ala fois directeur de cabinet du maire
de Lyon et directeur de la communica:
REN N’esT PIRE
UE L’EAU TIEDE.
PEUT~ETRE,
LA PROPAGANDE. . .
tion de la ville et de la CU, Jean Fran:
ois Lanneluc estime que « la question
nieat pas celle du rattachement. Elle ost
celle du territoire que le communicant
parvient & conquérir pour imposer son
professionnaliame »
Pour lui, parmi les
trois hommes (ou
femmes} clés qu'un élu
doit compter dans son
organisation, le DG, le
dircab, et le dircom,
cest au dernier de
stimposer : « Le com.
municant doit étre ardent, oser
imposer son savoir-faire, et revendi-
quer toute la dimension stratégique de
on activité. Le communicant ne doit
done pas étre achizo. Et souvent, ai le
‘Une communication intelligente porterait done sur les réali-
sations de (élu plutét que sur élu lui-méme. Serait-ce un
juste milieu ? « Nous ne sommes pas des journalistes et
avons parfaitement pour qui nous travaillons, plalde
Jean-Francois Gazon, mais entre « tout politique » et « tout
service » ily. un équilibre & trouver, en évitant fa personna-
Uisation du message. Ceriains avancent que tout est politique.
Peut-étre, mais les gens sont assez intelligents pour se rap-
peler le programme du candidat et voir comment les
chantiers avancent. Dans un numéro de mi-mandat, on peut
‘aussi souligner co qui n‘a pas marché. I ne faut pas prendre
les gens pour des crétins ».
Peut-étre la solution est-elle done de parier sur Cintell
gence. Un citoyen lambda a lu au moins un vrai magazine
dans sa vie. En toute logique, il devrait donc étre choqué
lorsqu'l aura entre les mains un magazine de trente pages
présentant douze photos du président du conseil général (tiré
un fait réell.
LALETTRE DU CADRE TERRITORIAL mL NY 342-15 JUILLET 2007 mM | 13,