Vous êtes sur la page 1sur 2

MODERNISATION mmétier

étier
Une des difficultés du DSI et de son service informatique réside dans la gestion des applications et données, vieilles de
10, 15, 20 ou 25 ans. Ce patrimoine, souvent dénommé legacy, est parfois vécu comme un véritable boulet qu’il faut
conserver, projet après projet. Quels sont les choix pour le DSI ?

Le patrimoine applicatif :
statu quo ou évolution ?
Cinq milliards de nouvelles tes, qui bénéficient des ressources machi- Compétence et fin de cycle :
lignes de code Cobol chaque nes rendues disponibles. les pièges à déjouer !
année L’un des plus graves problèmes du legacy,

D ressons tout d’abord un constat : le pa- Les choix possibles en particulier quand il est ancien, concerne
trimoine applicatif et de données repré- de la modernisation la compétence. Si ce patrimoine a été codé
sente un héritage très hétérogène, main- La modernisation peut se décliner, schéma- avec un langage propriétaire et “mort” de-
frame ou non, qui va du Cobol aux premiers tiquement, selon trois options : puis des années, la compétence sur le code
Java en passant par VB, Smalltalk, Perl, Pac- > statu quo : on ne change rien. On conti- disparaît de l’entreprise. Pour éviter cela, il
Base, les outils et librairies maison non stan- nue la maintenance pour tenir la production est vital de constituer une base de connais-
dard, etc. La documentation technique est > migration : on migre tout ou partie d’une sances et d’entretenir la compétence en in-
de qualité variable, si elle existe. Il faut dire application legacy terne. Le Cobol est un exemple parmi d’au-
qu’il y a encore plus de 200 milliards de li- > approche mixte : on modernise le fron- tres. Aujourd’hui, les nouveaux développeurs
gnes de code Cobol. “Cinq milliards de nou- tal de l’application, ou on connecte le legacy formés au langage sont quasi inexistants.
velles lignes de code Cobol se rajoutent cha- à un nouveau frontal. Et avec les départs en retraite, ou départ
que année !” commente Henrik Jacobsen, du salarié pour diverses raisons, l’entreprise
Directeur Technique de Micro Focus France. Il est essentiel de définir ce que l’on veut perd de la compétence Cobol. Le SI ne doit
migrer ou moderniser, dans quels buts, et surtout pas laisser partir les compétences
Le poids du patrimoine applicatif se révèle quel est l’objectif à long terme. Tout projet en outsourcing, sous peine d’abandonner la
par un chiffre simple : le coût de la mainte- de modernisation (au sens large) doit impé- maîtrise de son legacy.
nance de cet existant représente 70 à 80 % rativement avoir une valeur ajoutée, immé- Nuançons tout de même cette affirmation.
du budget IT (Forrester, 2005). Cela consti- diate ou à long terme. Il y a dix ans le web- “Certaines écoles introduisent du Cobol (dans
tue une immobilisation des moyens humains to-host fut un échec car la valeur ajoutée les cursus). La demande existe, sur Pac-
et financiers considérable, qui grève l’inves- était quasi nulle. base, par exemple, elle est assez forte. Mais
tissement. On comprend mieux les enjeux
colossaux du legacy et de sa modernisation.
“Finalement, le patrimoine vieillit et même
Cobol en Open Source
si on met en place une nouvelle application, Le marché reste dynamique, comme en té- Metrixware ajoute notamment la génération
celle-ci ne remplace pas forcément l’an- moignent ces projets annoncés en 2009. sur Windows avec Visual Studio, le support
cienne, qui perdure. La couverture (de la Ces initiatives Open Source pour le déve- de CICS, de DB2 et l'expansion des clauses
nouvelle application) n’est pas de 100 %. loppement d'applications Cobol Grands Sys- copy Cobol.
Cela ne simplifie pas le SI !”, commente Fa- tèmes sous Eclipse, sont de véritable alter-
brice Bonan, directeur R&D de Talend. native aux solutions commerciales Main- > COBOL-IT est une
frame existantes. société française d’édition
Legacy : source de TCO ? de logiciel, créée en
Avec la crise, la pression se fait sentir pour > Metrixware propose Cobos, un envi- 2008, à l’initiative de
diminuer le coût de production et de mainte- ronnement de travail qui s’annonce ergo- Stéphane Croce. Elle est
nance, et le legacy est directement montré nomique, complété d'un compilateur inté- la première à proposer
du doigt. Comment, en effet, optimiser le coût gré et, des outils d'analyse de la qualité et des services profession- Stéphane Croce
Cobol-IT
de possession (ou TCO) ? Cela peut être un des services additionnels Metrixware. nels pour le monde
moyen de mieux aligner les besoins métiers Dérivé du projet IDE Cobol, Cobos propose COBOL en s'appuyant sur une gamme de
et le IT, ou tout du moins de migrer une par- l'utilisation de l'environnement Eclipse pour logiciels Open Source. COBOL-IT Compiler
tie de son legacy dans de nouvelles applica- le développement d'applications Cobol en Suite (compilateur et runtime COBOL ) est
tions, sans changer forcement le back office, local, avec une interface de communication une distribution Open Source d’un compila-
mais en adaptant l’interface utilisateur. basée sur SSH, limitant au strict nécessaire teur COBOL. L’éditeur vient d’ajouter à sa
Libérer le mainframe de plusieurs applica- les échanges avec la plate-forme d'exécu- gamme un Atelier de développement basé
tions peut aussi profiter en puissance et en tion. En natif, Cobos intègre un compilateur sur ECLIPSE et un précompilateur dédié à
disponibilité aux applications legacy restan- local, inspiré du projet OpenCobol, auquel la base de données MySQL. ■

6 SOLUTIONS LOGICIELS • n°008 - été 2009


MODERNISATION mmétier
étier
mettre ces technologies en avant dans une
annonce, ce n’est pas ‘vendeur’. Il y a dan-
Blu Age : le “modèle patrimoine”
ger pour les entreprises qui n’investissent L’éditeur français, connu pour son approche del). Ce PIM est créé grâce
pas dans la formation, cela fait le jeu de l’ex- MDA et la génération automatique de code / aux données, métadonnées,
ternalisation. Nous avons, chez Microfocus, des applications, s’attaque à la modernisa- informations, que Blu Age
mis en place des partenariats pour des cur- tion du patrimoine applicatif. récupère du legacy. A partir
sus comme à l’IUT de Nantes. Il y a un réel L’idée est de reprendre l’approche modéli- de là, l’environnement peut
C. Champagne
besoin sur le marché, même si cela n’est sation, MDA, pour générer sa nouvelle ap- créer un PSM (Platform Spe-
pas toujours bien compris par les universi- plication à partir du modèle créé depuis son cific Model) qui est la nouvelle implémenta-
taires”, explique Henrik Jacobsen. Une ten- legacy. Comme le souligne Christian Cham- tion applicative. L’éditeur met en avant la mo-
dance croissante consiste à avoir la double pagne, Président Directeur Général, la ques- dernisation des applications Pacbase. Il s’agit
compétence, Objet et legacy. tion est de savoir comment extraire du pa- de pouvoir récupérer le référentiel, le code
trimoine les informations nécessaires pour nécessaire pour créer le modèle, puis géné-
L’obsolescence des langages et des outils créer le modèle. “Avec Java, .Net, nous som- rer une nouvelle application JEE.
demeure un souci : de nombreux langages mes dans de l’objet. Or, dans le patrimoine
sont désormais des langues mortes et quan- d’il y a 20-30 ans, il n’y a pas d’objet”. Christian Champagne est très clair sur le ni-
tité d’outils arrivent, ou sont déjà arrivés, en veau de reprise : “Sur Pacbase, c’est 100 %
Moderniser les applications Pacbase
fin de vie. Et le support de l’éditeur (s’il existe sinon rien ! Il faut regarder le degré de pu-
toujours !) n’est pas éternel. Le cas de Pac- L’idée de Blu Age est de se placer au niveau reté (du patrimoine). Pacbase est souvent
base est éloquent, d’ici 6 ans, son support du modèle métier. Comme nous sommes dans bon mais le Cobol généré est illisible ! C’est
chez IBM s’arrêtera. une approche MDA, l’objectif premier est de une ‘boîte noire’. Par contre, du legacy
A chaque fin de cycle de vie d’un outil, d’un générer un PIM (Platform Independant Mo- Java EE est plus simple.” ■
progiciel, le DSI doit prendre des décisions.
Et à chaque nouvelle version, se poser des > Modernisation et Gestion d’Applications d’Entreprise
questions sur le support, sa durée et l’inté-
rêt de garder une plate-forme en fin de vie.
La donnée legacy :
un autre problème ?
Dans le legacy on parle plus volontiers des
applications que des données. Or, la donnée
patrimoine est cruciale pour l’activité d’une
application critique et le business de l’entre-
prise. Pour assurer la reprise de la donnée
legacy, la qualité est primordiale. Il faut au-
diter minutieusement les bases de données,
la tables, les données, etc. avant de repren-
dre un patrimoine. La qualité de la donnée,
établie il y a 10 ou 15 ans, n’est pas du même
niveau que l’exigence d’aujourd’hui. “C’est
une véritable enjeu. L’ésotérisme des for-
mats, l’absence de documentation, la rigi-
> Blu Age Legacy Modernization for zap
dité de la structure n’aident pas ! Il faut du
pragmatisme” estime Fabrice Bonan.

L’erreur serait de partir tête baissée dans la


migration des données, dans le nouveau
SGBD. L’échec ne sera alors jamais bien
loin ! La démarche progressive est conseil-
lée, en évitant de tout migrer d’un coup, en
procédant à une cartographie des données.
La démarche demande du temps. L’usage
d’un ETL peut “simplifier” la migration. Il est
bien entendu possible de migrer directe-
ment d’un SGBD vers un autre mais la
connaissance de la structure, ou au moins
du format des données, est nécessaire. ■
François Tonic

8 SOLUTIONS LOGICIELS • n°008 - été 2009

Vous aimerez peut-être aussi